COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE ARRET N°159/21 du 16 DECEMBRE 2021 _________ Pourvoi N°025/RS/20 du 26 Février 2020 AFFAIRE
Société MIDNIGHT SUN S.A
C/
Société Z X C Y SARL
PRESENTS: MM SAMTA* : PRESIDENT
LOXOGA.
ABBEY-KOUNTE MEMBRES AMOUSSOU-KOUETETE BODJONA KANTCHIL-LARRE : M.P. BISSETI-MARDJA : GREFFIER
REPUBLIQUE-TOGOLAISE Travail-Liberté-Patrie
« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN (16-12-21)
A l’audience de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de ladite Cour, le jeudi seize décembre deux mille vingt et un, est intervenu l’arrêt suivant : LA COUR, Sur le rapport de monsieur Badjona SAMTA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ; Vu l’arrêt n°008/20 en date du 5 Février 2020 rendu par la chambre civile de la Cour d’appel de Lomé ; Vu la requête à fin de pourvoi de la SCP AQUEREBURU AND PARTNERS, société d’avocats au barreau du Togo, conseil de la demanderesse au pourvoi ; Vu les conclusions écrites de monsieur Ab B, 4ème avocat général près la Cour suprême ; Vu les autres pièces de la procédure ; Vu la loi organique n°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ; Ouï monsieur Badjona SAMTA en son rapport ; Ouï la SCP AQUEREBURU and PARTNERS, conseil de la demanderesse au pourvoi ;
Nul pour maître Kokouvi AGBOGAN, conseil de la défenderesse au pourvoi, forclos ;
Le ministère public entendu ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Statuant en matière commerciale sur le pourvoi formé le 26 février 2020 par la SCP AQUEREBURU and PARTNERS, société d’avocats au barreau du Togo, agissant au nom et pour le compte de la société MIDNIGHT SUN-S.A contre l’arrêt n°008/20 rendu le 5 février 2020 par la chambre commerciale de la Cour d’appel de Lomé dans le différend qui oppose sa cliente à la société Z X C Y ; EN LA FORME
Attendu que le pourvoi a été fait dans les forme et délai de la loi ; qu’il est alors recevable ; AU FOND
Attendu qu’il ressort de l’arrêt infirmatif que les deux parties litigantes ont, courant mois de novembre 2015, convenu par un contrat que la société Z X C Y devait assurer la garde des sites de la société MIDNIGHT SUN, laquelle, en retour, devait verser des contreparties financières ; que leurs prestations devaient commencer par s’exécuter avant même la signature formelle de la convention ; Qu’ainsi, Z X C Y a, dès le 18 novembre 2015, mis à la disposition de MIDNIGHT SUN huit (08) agents de sécurité pour la surveillance de ses sites ; que de cette date à avril 2016, elle s’est offerte les services de Z X C Y à qui elle a versé les contreparties financières mensuelles ; Que MIDNIGHT SUN a fini par rompre le contrat de façon unilatérale au motif d’être en désaccord avec les termes du contrat ; Attendu que la société Z X, estimant la rupture des relations contractuelles abusives, a saisi le Tribunal de première instance de Lomé d’une action en dommages et intérêts ; que le Tribunal l’en a déboutée et l’a condamnée à servir la somme de cinq millions (5.000.000) francs CFA à titre de dommages intérêts à MIDNIGHT SUN ; Que sur appel, la Cour d’appel, par arrêt dont pourvoi, a infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, constaté l’existence d’un contrat entre les parties, jugé sa rupture abusive et, en conséquence, condamné l’auteur, MIDNIGHT SUN à payer à Z X la somme de dix millions (10.000.000) francs CFA au titre des dommages et intérêts ; Sur le premier moyen pris de la violation des articles 1101 et 1108 du code civil applicable au Togo
Attendu que par ce moyen, il est fait grief à l’arrêt querellé d’avoir retenu qu’un contrat existe entre les parties litigantes alors que le consentement, une des conditions de validité du contrat, fait défaut, la demanderesse au pourvoi n’en ayant jamais donné de sorte qu’il n’y a pas eu d’accord destiné à produire des effets de droit et des obligations à la charge des parties ; Mais attendu que s’il est exact parce que ressortant des faits de la procédure que la demanderesse au pourvoi s’est abstenue de faire retourner le contrat signé dans le délai de quinze (15) jours à compter du début de l’exécution des prestations, autrement a gardé silence sur sa signature du contrat et ne pouvant, en principe, être contrainte à répondre expressément à une offre, le silence ne valant pas à lui seul acceptation, il est tout aussi constant que l’acceptation d’un contrat, si elle ne peut être tacite, peut résulter d’actes démontrant avec évidence l’intention d’accepter le contrat proposé ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel s’étant appuyée sur les actes posés par les parties (fourniture réciproque des prestations sur une certaine durée en matière commerciale) pour conclure à l’existence d’un contrat entre les parties, elle n’a en rien violé les textes visés au moyen ; D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; SUR LE DEUXIEME MOYEN
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt qu’en retenant que «suivant l’article 12 du projet de contrat, si celui-ci est retourné non signé dans les quinze (15) jours après sa réception le contrat est considéré comme signé alors que le texte dit que le contrat non retourné signé quinze (15) jours après le début de la prestation sera considéré comme définitivement accepté », il a dénaturé l’écrit violant ainsi les articles 46 et 128 du code de procédure ensemble avec l’article 9 du code de l’organisation judiciaire (loi n°2019-015 du 30 octobre 2019 ; Mais attendu que la Cour d’appel en énonçant que « le projet de contrat n’est pas retourné quinze (15) jours après sa réception » a, plus loin, nettement affirmé que « le contrat n’a pas été retourné dans les délais prévus avec les amendements et qu’en revanche, il est constant que depuis le 18 novembre 2015, il y a eu des prestations de part et d’autre jusqu’au 13 janvier 2016 où une partie signifia son intention de mettre fin aux négociations » ; que tel que raisonné, il est clair que la Cour n’a pas entendu faire dépendre l’existence du contrat de sa réception, de sa signature et de son retour dans le délai prévu mais plutôt des actes posés et consommés par les parties ; qu’il suit qu’elle n’est pas coupable de la dénaturation de l’écrit à elle reprochée ; que le moyen n’est donc pas fondé ; SUR LE TROISIEME MOYEN
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir invoqué des préjudices dont la défenderesse au pourvoi ne s’en prévaut pas violant ainsi l’article 1147 du code civil français applicable au Togo ; Mais attendu que l’article 1147 du code civil visé au moyen régit la responsabilité contractuelle pour laquelle seule la preuve de la faute du contractant défaillant suffit sans qu’il soit besoin de rapporter la preuve des préjudices contrairement à la responsabilité civile de droit commun ; que les juges d’appel ayant caractérisé la faute de la demanderesse au pourvoi (rupture abusive des relations contractuelles imputable à elle), il sied qu’elle soit condamnée à des dommages-intérêts en réparation des préjudices subis par la partie lésée sans que celle-ci soit obligée d’en rapporter la preuve ; qu’ainsi le moyen n’est pas fondé ; PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement, en matière commerciale et en état de cassation ; En la forme Reçoit le pourvoi ; Au fond
Le rejette, aucun des trois moyens n’étant fondés ; Ordonne la confiscation de la taxe de pourvoi ; Condamne la demanderesse au pourvoi aux dépens ; Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi seize décembre deux mille vingt et un et à laquelle siégeaient :
Monsieur Badjona SAMTA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ; Messieurs Kuma LOXOGA, madame Kayi ABBEY-KOUNTE, Anani AMOUSSOU-KOUETETE et Pignossi BODJONA, tous quatre conseillers à la chambre judiciaire de la Cour suprême, MEMBRES ; En présence de monsieur Aa A, 2ème avocat général près la Cour suprême ; Et avec l’assistance de maître Tilate BISSETI-MARDJA, greffier à la Cour suprême, GREFFIER ; En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier. /.