COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE ARRET N°010/22 du 20 JANVIER 2022 _________ Pourvoi N°098/RS/2019 du 07 juin 2019 ___________ AFFAIRE
C Ac Af représenté par GBEDJE Samson alias « manager » (SCP DOGBEAVOU & ASSOCIES,
scp Martial AKAKPO)
C/
Collectivité A représentée par A Ae Ad (Mes AGNINA Yacoubou, TCHACOROM Alfa, SESSENOU Kwadjo F.) ___________
PRESENTS: MM
BASSAH : PRESIDENT
SAMTA* ABBEY-K. MEMBRES AMOUSSOU-KOUETETE AYEVA
Y : M.P. ADJETE-AMLA : GREFFIER
REPUBLIQUE- TOGOLAISE Travail-Liberté-Patrie
« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI VINGT JANVIER DEUX MILLE VINGT-DEUX (20/01/2022)
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de ladite Cour, le jeudi vingt janvier deux mille vingt-deux, est intervenu l’arrêt suivant : LA COUR, Sur le rapport de monsieur Badjona SAMTA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ; Vu l’arrêt n°033/19 rendu le 23 janvier 2019 par la cour d’appel de Lomé ; Vu la requête à fin de pourvoi de la SCP DOGBEAVOU & ASSOCIES, conseil du demandeur au pourvoi ; Vu les conclusions écrites de monsieur Ac B, cinquième avocat général près la Cour suprême ; Vu les autres pièces de la procédure ; Vu la loi organique n° 97-05 du 6 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n° 82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ; Ouï le conseiller Badjona SAMTA en son rapport ; Ouï la SCP DOGBEAVOU & ASSOCIES représentée par maître SOSSOUKPE Vigninou, conseil du demandeur au pourvoi ; Nul pour la SCP Martial AKAKPO, conseil du demandeur au pourvoi, absent et non représentée ;
Ouï maître Alfa TCHACOROM, conseil du défendeur au pourvoi ; Nul pour maîtres AGNINA Yacoubou et Kwadjo SESSENOU, conseils du défendeur au pourvoi, absents et non représentés ; Le ministère public entendu ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 7 juin 2019 par la SCP DOGBEAVOU et associés, société d’avocats au barreau du Togo, agissant au nom et pour le compte du sieur C Ac, représenté par GBEDJE Samson alias « manager » contre l’arrêt n°033/19 rendu le 23 janvier 2019 par la chambre civile de la cour d’appel de Lomé dans le différend qui oppose son client à la collectivité A représentée par A Ae Ad ; Attendu que l’arrêt querellé intervenu à la suite de l’appel contre le jugement n°016/18 rendu le 5 janvier 2018 par le tribunal de première instance de Tsévié a, pour confirmer le droit de propriété de la collectivité A sur l’immeuble, objet du litige, anéanti le jugement n°132 du 10 juin 2005 du même tribunal, passé en force de chose jugée et non contesté, lequel jugement avait déclaré l’immeuble litigieux propriété du sieur C Ac ; EN LA FORME
Attendu qu’il est versé au dossier deux exploits de signification de l’arrêt par le même huissier (13 mars 2019 et 18 avril 2019) ; que dans l’un et l’autre exploit, l’huissier instrumentaire a pris soin de mentionner que le destinataire dispose « d’un délai d’un (01) mois à compter de la date de la signification pour relever pourvoi dudit arrêt » ; que ce délai indiqué n’étant pas conforme à celui retenu par la loi, deux (02) mois, il y a une irrégularité insusceptible de faire courir le délai de recours ; qu’il suit donc que le pourvoi est recevable ;
Sur la nullité du mémoire en défense. Attendu que les demandeurs au pourvoi, in limine litis, sollicitent la nullité du mémoire en défense des défendeurs au pourvoi pour défaut de capacité d’agir en raison de la non justification du pouvoir de représentation ; Attendu que le défaut de pouvoir de représentation d’une partie au procès est une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte aux termes de l’article 22 du code de procédure civile ; que cette exception de procédure, au regard de l’article 30 du code de procédure civile, peut être proposée en tout état de cause ; Qu’en l’espèce, les défendeurs au pourvoi n’ont pu justifier leur pouvoir de représentation, autrement, la capacité d’ester en justice, de sorte que leur mémoire en défense doit être déclaré nul ; AU FOND
Sur le premier moyen
Vu l’article 23 de la loi n°2011-043 du 30 décembre 2011 ; Attendu qu’aux termes de l’article 23 de la loi susvisée portant statut des huissiers, « les huissiers de justice accomplissent les actes de leur compétence dans le ressort du tribunal où ils ont leur charge.
Toutefois, au cas où il n’existe pas d’huissier dans le ressort du tribunal, le président de la juridiction peut autoriser un huissier de justice établi dans le ressort d’un tribunal voisin, dépendant territorialement de la même cour d’appel à instrumenter. Il en est de même lorsqu’il n’existe qu’un huissier de justice dans le ressort du tribunal et, en cas d’empêchement de celui-ci, si l’intérêt des parties l’exige » ; Attendu qu’il est fait grief à la cour d’appel d’avoir reconnu la compétence à l’huissier instrumentaire, lequel a agi hors du ressort de sa compétence territoriale aux motifs « qu’il est constant que la cour d’appel de céans devant laquelle l’appel est interjeté a son siège à Lomé et que l’huissier dont s’agit exerce dans le ressort du tribunal de Lomé… » ;
Qu’en statuant ainsi alors qu’il est constant que l’huissier instrumentaire a instrumenté hors du ressort de sa compétence territoriale et sans autorisation du président de la juridiction dans le ressort de laquelle il a agi, la cour d’appel a violé le texte visé au moyen ; D’où il suit que l’arrêt encourt cassation de ce chef ; Sur l’opportunité du renvoi
Attendu qu’il est constant que la cour d’appel a reçu l’appel alors que l’acte d’appel était manifestement irrégulier parce qu’accompli par un agent incompétent ; qu’ainsi, l’appel était irrecevable ; Attendu qu’en ayant déclaré à tort l’appel recevable, il suit qu’elle a faussement statué sur le fond ; Qu’au regard de ces considérations, il sied de casser l’arrêt critiqué sans renvoi et de dire que le jugement n°016 rendu le 5 janvier 2018 par le tribunal de Tsévié produira ses pleins et entiers effets ; PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement, en matière civile et en état de cassation ; EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ; Déclare nul le mémoire en défense ; AU FOND
Casse et annule l’arrêt n°033/19 du 23 janvier 2019 de la cour d’appel ; Dit n’y avoir lieu à renvoi ; Dit que le jugement n°016/18 du 5 janvier 2018 produira ses pleins et entiers effets ; Ordonne la restitution de la taxe de pourvoi ; Condamne la défenderesse au pourvoi aux dépens ; Dit que mention du présent arrêt sera faite en marge ou au pied de la décision critiquée. Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi vingt janvier deux mille vingt-deux à laquelle siégeaient :
Monsieur Koffi Agbenyo BASSAH, président de la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ; Monsieur Badjona SAMTA, madame Kayi ABBEY-KOUNTE, messieurs Anani AMOUSSOU-KOUETETE et Pignossi BODJONA, tous quatre, conseillers à la chambre judiciaire de la Cour suprême, MEMBRES ; En présence de monsieur Ab Aa Y, troisième avocat général près la Cour suprême ; Et avec l’assistance de maître Agnélé ADJETE-AMLA, greffier à la Cour suprême, GREFFIER ; En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président et le greffier. /.