COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE ARRET N°0101/22 du 17 novembre 2022 ________
Pourvoi N°008/RS/2018 du 25 janvier 2018
AFFAIRE
Sieur A Af (Me DAVI Koffii) C/ B Ab Ae (Me AMEGANDJI, Me KODJOVI-NUMADO) ___________
PRESENTS : MM
BASSAH : PRESIDENT
KODA LOXOGA* AYEVA membres BIGNANG
BEKETI : M.P. NIKA : GREFFIER
Visa de l’ordonnance de 1978 REPUBLIQUE- TOGOLAISE Travail-Liberté-Patrie
« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI DIX-SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT-DEUX (17/11/2022)
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de ladite Cour, le jeudi dix-sept novembre deux mille vingt-deux, est intervenu l’arrêt suivant : LA COUR, Sur le rapport de monsieur Kuma LOXOGA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ; Vu l’arrêt n°160/17 rendu le 26 Juillet 2017 par la Cour d’appel de Lomé ; Vu la requête à fin de pourvoi de maître DAVI Koffi, avocat au barreau du Togo, conseil du demandeur au pourvoi ; Vu le mémoire en réponse de maître AMEGANGJI, conseil du défendeur au pourvoi ; Vu les conclusions écrites de monsieur Komlan DODZRO, avocat général près la Cour suprême ; Vu les autres pièces de la procédure ; Vu la loi organique n° 97-05 du 6 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ; Ouï le conseiller LOXOGA en son rapport ; Nul pour les conseils des deux parties ; Le ministère public entendu ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 25 janvier 2018 par maître DAVI Koffi, avocat au barreau du Togo, agissant au nom et pour le compte du sieur A Af, contre l’arrêt n°160/17 rendu le 26 juillet 2017 par la Cour d’appel de Lomé qui a confirmé en toutes ses dispositions, le jugement n° 706/06, rendu le 14 avril 2006 par le tribunal de première instance de Lomé, lequel a dit non fondée l’action du sieur A Af et l’a rejetée ; EN LA FORME
Attendu que l’arrêt a été signifié le 27 novembre 2017 à l’épouse du sieur A Af ; qu’ainsi, le pourvoi formé par ce dernier le 25 janvier 2018 est recevable, tous les actes de la procédure ayant été faits et produits dans les forme et délai de la loi ; AU FOND
Attendu que des énonciations de l’arrêt confirmatif attaqué et d’autres éléments du dossier, il ressort que, par acte d’huissier en date du 11 novembre 2002, le sieur A Af assisté de maître ABI Tchessa Jean, avocat au barreau du Togo, a fait donner assignation au nommé Ab Ae B, ayant pour conseil maître Bébi OLYMPIO, avocat à la Cour à Lomé, à comparaître par-devant le tribunal de première instance de Lomé pour s’entendre :
dire et juger que l’immatriculation obtenue sur le terrain formant le lot n° 727 bis lui appartenant est frauduleuse ;
en conséquence, le condamner à lui payer la somme de vingt millions (20.000.000) francs CFA à titre de dommages-intérêts ;
le condamner aux dépens ; Qu’à l’appui de son action, le requérant expose qu’il est propriétaire d’un terrain non bâti, sis à Agoenyivé au lieudit Gbonve, formant le lot n° 727 bis ; qu’il a érigé des constructions sur ledit immeuble et y habite ; que le requis est propriétaire d’un titre foncier n°26783 délivré le 16 avril 2002 portant sur cet immeuble ; que cette immatriculation a été faite à son insu et contre tous les principes régissant aussi bien la propriété foncière que le droit de propriété ; que ce titre foncier a été obtenu en fraude de son droit ; qu’il est manifestement frauduleux et expose son titulaire à la condamnation en dommages-intérêts, conformément à l’article 98 du décret foncier du 24 juillet 1906 ; que le préjudice par lui subi ne peut être évalué à moins de vingt millions (20.000.000) deb francs CFA ; que le requis, par l’organe de son conseil, explique que la procédure d’immatriculation au livre foncier comporte une large publicité au journal officielle ; qu’ainsi, le requérant ne saurait prétendre que l’immatriculation dont s’agit a été faite à son insu ; que la preuve de la prétendue fraude n’étant pas rapportée, l’action intentée doit être rejetée purement et simplement ;
Que par jugement n°706/2006 rendu le 14 avril 2006, le tribunal de première instance de Lomé a rejeté l’action du requérant comme non fondée et l’a condamné aux dépens ; que suivant l’arrêt dont pourvoi, la Cour d’appel de Lomé a confirmé, en toutes ses dispositions, la décision du premier juge ;
SUR LE MOYEN UNIQUE
Attendu que le demandeur au pourvoi fait grief à l’arrêt entrepris de l’avoir débouté de la demande en payement de dommages-intérêts au motif qu’après avoir relevé appel du jugement n°706/2006 rendu le 14 avril 2006, et en dépit d’avenir à lui signifié et des renvois à lui concédés, il n’a pas déposé sa requête d’appel, ce qui justifie le recours à l’application de l’article 148 alinéa 1er du code de procédure civile, alors qu’il est fait obligation aux juges du fond d’ordonner d’office, une mesure d’instruction qui relève de leur pouvoir selon les articles 44, 48 et 51 du même code et alors que la Cour d’appel n’a pas recherché s’il a été atteint par l’acte d’Avenir , violant ainsi l’article 48 ensemble avec les articles 44 et 51 de ce code, le tout en violation de l’article 9 de l’ordonnance n° 35-78 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire au Togo ; Mais attendu d’abord que l’ordonnance n° 35-78 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire au Togo, telle qu’indiquée dans la formulation du moyen unique, n’existe pas dans l’ordonnancement juridique togolais, auquel cas, le pourvoi fondé sur un tel texte doit être déclaré irrecevable ; Attendu cependant, qu’à supposer que le demandeur au pourvoi entendait viser l’ordonnance n°78-35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire au Togo et que c’est par inadvertance qu’il a indiqué le mauvais texte, il ressort de l’arrêt attaqué, en sa partie intitulée : « SUR L’IMMATRICULATION FRAUDULEUSE », à la page 7 dudit arrêt, que pour débouter le demandeur au pourvoi de sa demande de condamnation du défendeur au pourvoi au payement de la somme de vingt millions (20.000.000) de francs CFA à titre de dommages-intérêts pour préjudices par lui subis du fait de l’immatriculation frauduleuse par ce dernier de son terrain sis à Agoenyivé au lieudit Gbonve, formant le lot n° 727, la Cour d’appel de Lomé, se fondant sur les dispositions de l’article 98 du décret foncier du 24 juillet 1906, a ainsi énoncé : « qu’il résulte de ce texte que celui qui s’en prévaut doit rapporter la preuve du dol allégué, celui-ci s’entend par l’ensemble de tromperies (manœuvre frauduleuse, mensonge) utilisées pour l’obtention de l’immatriculation en cause ; que dans le cas d’espèce, l’intimé qui a acquis l’immeuble litigieux auprès de la collectivité VIZA représentée par X Ad, a obtenu confirmation de cette vente par jugement n°1439/2000 du 20 octobre 2000 rendu par le tribunal de première instance de Lomé, avant de déposer la réquisition n°21873 le 8 janvier 2001, laquelle a été insérée dans le Journal Officiel de la République Togolaise N°1 bis du 1er septembre 2001 ; qu’ainsi, les formalités de publicité requises avant toute immatriculation ont été accomplies par l’intimé ; que dès lors, l’appelant qui prétend que l’immatriculation en question est frauduleuse, sans rapporter la moindre preuve, conformément à l’article 43 du code procédure civile… doit être débouté de son action comme non fondée » ; Attendu qu’au regard et à l’examen de cette motivation, on constate aisément que l’arrêt querellé a débouté le demandeur au pourvoi de sa demande en payement de dommages-intérêts pour l’immatriculation frauduleuse de l’immeuble litigieux, non pas parce qu’il n’a pas déposé sa requête d’appel et accompli les actes subséquents malgré l’exploit d’Avenir et plusieurs renvois à lui concédés comme il tente de le faire croire, mais du fait qu’il n’a pas rapporté la moindre preuve du dol allégué ; qu’il s’en suit que le moyen unique du pourvoi tend à faire dire à la Cour d’appel de Lomé ce qu’elle n’a pas dit ; qu’il s’agit donc d’un moyen qui manque en fait et doit être déclaré irrecevable, justifiant, en conséquence le rejet du pourvoi ; PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement, en matière civile et en état de cassation ; EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ; AU FOND
Le rejette comme non fondé ; Prononce, en conséquence la confiscation de la taxe de pourvoi ; Condamne le demandeur au pourvoi aux dépens ; Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi dix-sept novembre deux mille vingt- deux à laquelle siégeaient :
Monsieur BASSAH Koffi Agbenyo, président de la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ; Messieurs Koffi KODA, Kuma LOXOGA, Tcha-Tchibara AYEVA et Koffi Ernest BIGNANG, tous quatre, conseillers à la chambre judiciaire de la Cour suprême, MEMBRES ; En présence de monsieur C Aa, quatrième avocat général près la Cour suprême ; Et avec l’assistance de maître Naka NIKA, greffier à la Cour suprême, GREFFIER ; En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier./.