DROIT COMMERCIAL GENERAL - BAIL COMMERCIAL - CONTRAT DE BAIL- EXPLOITATION DE CASINO - INEXECUTION PAR LE PRENEUR DE SES OBLIGATIONS - MISE EN DEMEUREE SANS EFFETS - RESILIATION DU BAIL –
SAISIE CONSERVATOIRE DES BIENS MEUBLES CORPORELS DU PRENEUR - REGULARITE DE LA SAISIE (OUI) - CARACTERES CERTAIN , LIQUIDE ET EXIGIBLE REUNIS -VENTE DES BIENS SAISIS - BONNE FOI DU PRENEUR - EXONERATION DES INTERETS LEGAUX ET DOMMAGES ET INTERETS - ANCIENNETE DE LA CREANCE - EXECUTION PROVISOIRE
Le preneur est tenu de payer le loyer convenu sous peine de résiliation du contrat de bail. En l’espèce, l’inexploitation du fonds de commerce du fait de l’impossibilité d’obtention de l’autorisation d’exploitation de casino ne peut servir de justification à l’inexécution par le preneur de ses obligations, ni constituer un obstacle à la résiliation du bail.
De même, la saisie conservatoire réalisée sur les biens meubles corporels du preneur doit être déclarée bonne et recevable dans la mesure où cette dernière présente tous les caractères apparents de la régularité et que les caractères certain, liquide et exigible de la créance sont réunis. Il importe donc d’ordonner la vente des biens saisis pour faire face à la créance exigible.
Enfin, les raisons qui justifient l’inexploitation du fonds étant compréhensibles et caractérisant la bonne foi du preneur, ce dernier doit être épargné des condamnations à des dommages et intérêts. Néanmoins, du fait de l’ancienneté de la créance, l’exécution provisoire de la décision a été prononcée.
ARTICLE 101 AUDCG ARTICLE 39 AUPSRVE
Tribunal de Première Instance de Première Classe de Lomé, Chambre Civile et Commerciale (TOGO), Jugement N°533/2009 du 06 mars 2009, Sieur C Ac c/ société GEMAC SARL
LE TRIBUNAL
Ouï les conseils des parties en leurs conclusions ;
Le Ministère public entendu ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EXPOSE DU LITIGE
Suivant exploit d’huissier en date à Lomé du 28 octobre 2005, le Sieur C Ac, Directeur de société demeurant et domicilié à Lomé, assisté de Maître BATAKA, Avocat à la Cour à Lomé, a fait donner assignation à la société GEMAC SARL, prise en la personne de son représentant légal, Monsieur A Aa X, demeurant et domicilié à Lomé, assisté de Maître Ahlin KOMLAN , Avocat à la Cour à Lomé, à comparaître devant le tribunal de céans pour voir :
- Prononcer la résiliation du bail consenti le 17 mars 2000 entre les parties ;
- Ordonner l’expulsion immédiate des locaux de la requise et tous occupants de son chef
- Condamner la requise au paiement du montant de tous les arriérés de loyers depuis le 1er avril 2004 jusqu’au prononcé du jugement à intervenir ;
- Dire et juger que cette condamnation à ladite somme sera productive d’intérêts de droit
au taux légal à compter de la mise en demeure soit à compter du 07 juin 2005 ;
- Ordonner la requise à 10.000.000 F CFA à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé ;
- Ordonner l’exécution provisoire de l’ordonnance à intervenir sur minute avant
enregistrement, nonobstant toutes voies de recours et sans caution ;
- Condamner la requise aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître BATAKA, Avocat aux offres de droit ; Au soutien de son action, le requérant expose que suivant contrat en date du 17 mars 2003, il a donné à bail à GEMAC SARL, un local sis dans l’enceinte de l’hôtel KRIMAS à des fins d’exploitation d’un casino, moyennant un loyer mensuel de 1.000.000 F CFA, que dès la signature du contrat, le requis versa une somme de 12.000.000 F CFA représentant douze mois d’avance sur loyer pour la période allant du 1er avril 2003 au 31 mars 2004 et une somme de 3.000.000 F CFA à titre de garantie ; que depuis le 1er avril 2004 à ce jour, soit 19 mois, le requis n’a plus daigné payer son loyer ; qu’il reste par conséquent devoir à ce jour une somme de 19.000.000 F CFA à titre de loyers impayés ; que par exploit en date du 07 juin 2005, il a mis en demeure le requis d’exécuter ses obligations ; que cette mise en demeure est restée sans effets mettant en péril non seulement la créance mais aussi son droit de jouir de son unique source de revenus qu’est l’immeuble loué ; que cette résistance injustifiée de la requise lui cause d’énormes préjudices en ce qu’il est obligé d’engager des frais de procédures judiciaires et à se payer les services d’un avocat ; qu’un tel préjudice ne saurait s’évaluer à moins de 10.000.000 F CFA ; Par un autre exploit d’huissier en date à Lomé du 19 décembre 2005, le requérant a encore assigné la requise aux fins d’obtention d’un titre exécutoire, le requérant précise que les arriérés de loyers d’élèvent à 20.000.000F CFA ; que le 09 septembre 2005, il a sollicité et obtenu du président du Tribunal de Première instance de Lomé, l’ordonnance N°1326/2005 en exécution de laquelle, il a pratiqué le 09 décembre 2005, une saisie conservatoire sur les biens meubles corporels appartenant à la
GEMAC SARL pour avoir sûreté et paiement de la somme totale de 21.117.000 F CFA en principal intérêts et frais ; que la saisie pratiquée est régulière en la forme et juste au fond ; qu’il ya lieu de valider ladite saisie et ordonner la vente des biens provenant de cette saisie ; Les deux procédures initiées par le requérant, concernant les mêmes parties et portant sur le même objet, le tribunal a procédé à leur jonction pour que le litige reçoive une seule et même solution ; Pour résister à l’action du requérant, la requise par le truchement de son conseil, Maître Ahlin KOMLAN dans des conclusions en date du 19 mars 2007, fait observer qu’elle ne conteste pas la créance dans son principe mais qu’elle fait remarquer que le montant réclamé n’est pas exact ; que les loyers impayés se chiffrent à la date de l’assignation du 19 décembre 2005 non pas à 20.000.000 F CFA (20 mois d’arriérés) mais 19.000.000 F CFA soit 19 mois d’arriérés ; que la garantie de 3.000.000 F CFA pouvant être affectée au règlement partiel des loyers impayés, ce qui diminuerait le montant des impayés qui s’élève désormais à 16.000.000 F CFA ; qu’elle fait valoir également dans son actif, le produit de la vente des biens saisis à intervenir, qu’en outre, elle n’a jamais exploité dès sa création la casino, n’ayant pu obtenir l’autorisation requise suite au monopole accordé à la LONATO ; que cette entité aurait pu donner une plus-value à l’hôtel du requérant qui n’a pas pu l’aider non plus dans l’obtention de l’autorisation, qu’il ya lieu en considération de sa bonne foi, lui épargner le payement des intérêts et frais, d’ordonner la compensation entre la somme due et le produit de la vente à intervenir, et de désigner tel commissaire priseur ou tel huissier aux fins de procéder à la vente aux enchères publique des meubles saisis ; Toutes les parties se sont faites représenter par leurs conseils respectifs, il suit que la présente décision sera rendue contradictoirement à leur égard ;
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu’il est constant ainsi qu’il ressort des éléments du dossier que suivant contrat en date du 17 mars 2003, bail d’un local a été donné à la société GEMAC SARL par le requérant dans l’enceinte de l’hôtel KRIMAS à des fins d’exploitation d’un casino ; que le loyer mensuel étant fixé à la somme de 1.000.000 F CFA, la requise verse la somme de 12.000.000 F CFA représentant douze mois d’avance pour la période allant du 1er avril 2003 au 31 mars 2004 et celle de 3.000.000 F CFA à titre de garantie ; Attendu qu’il ressort des débats que la société GEMAC SARL n’a plus respecté ses obligations contractuelles ; que malgré la mise en demeure à lui adressée par le requérant, aucun loyer n’a pu être versé en exécution du contrat de bail en date du 17 mars 2003 ; qu’il apparaît au vu des pièces de la procédure qu’à la date du 19 décembre 2005, les loyers impayés s’élèvent à la somme de 19.000.000 F CFA ; Attendu que ladite somme n’est nullement contestée par la société GEMAC SARL qui justifie ses mois d’arriérés par des difficultés financières liées à la non exploitation de son casino depuis sa création, que le fait de n’avoir pas pu obtenir l’autorisation requise suite au monopole accordé à la LONATO, ne peut l’exonérer de la résiliation du contrat de bail du 17 mars 2003, le preneur étant tenu de payer sous peine de
résiliation du bail et d’expulsion, le loyer et de respecter les clauses et conditions du bail conformément aux dispositions de l’article 101 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général ; Attendu en outre que la saisie conservatoire pratiquée le 09 décembre 2005 par le requérant sur les biens meubles corporels de la requise pour sûreté et avoir garantie du paiement de la créance de 19.000.000F CFA présente tous les caractères apparents de la régularité ; qu’aucun élément du dossier ne permet de la remettre en cause ; que ladite créance étant certaine, liquide et exigible, il ya lieu de condamner la requise à son paiement tout en considérant que la garantie de 3.000.000F CFA préalablement déposée dans les mains du requérant lors de la signature du contrat de bail, viendra en règlement partiel des loyers impayés ; Attendu que la vente des biens saisis permettra au requérant de faire face à la créance exigible ; qu’il convient de l’ordonner tout en commettant Maître SALLAH, huissier de justice à Lomé pour y procéder ; Attendu que par ailleurs il est établi que la société GEMAC SARL n’a jamais exploité le fonds de commerce pour lequel bail lui a été donné le 17 mars 2003 ; que les motifs de l’échec de ses objectifs, compréhensibles et caractérisant sa bonne foi, recommandent que le tribunal lui épargne des condamnations à des intérêts au taux légal et à des dommages intérêts ; Attendu par contre que l’ancienneté de la créance du requérant exige que soit ordonnée l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant toutes voies de recours et sans caution ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière civile et en premier ressort ; EN LA FORME Reçoit le Sieur C Ac en son action régulière ; AU FOND Constate qu’à la date de l’assignation, les loyers impayés se chiffrent à la somme de 19.000.000 ( Dix neuf millions de francs) CFA ; Dit que la garantie de 3.000.000 F ( trois millions de francs) CFA préalablement versée par la requise viendra en règlement partiel de ses loyers impayés ; Prononce la résiliation du bail consenti le 17 mars 2003 par le sieur C Ac à la Société GEMAC SARL Déclare la saisie pratiquée le 09 décembre 2005 sur les biens meubles corporels de la requise bonne et valable
Ordonne la vente des dits biens et commet pour y procéder Maître SALLAH, huissier de justice à Lomé Tél.916 06 61 ; Condamne donc la requise à payer au requérant la somme principale de 16.000.000 F (seize millions de francs) CFA ainsi que les frais de procédure ; Ordonne la compensation entre la somme due et le produit de la vente à intervenir ; Dit n’y avoir pas lieu à condamnation de la requise à des intérêts aux taux légal et à des dommages intérêts ; Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement nonobstant toutes voies de recours et sans caution ; Condamne la requise aux entiers dépens. Condamne le requérant aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par le Tribunal de Première instance de Première Classe de Lomé (TOGO), en son audience publique du vendredi 06 mars 2009 à laquelle siégeait Monsieur BODJONA Pignossi, Juge au dit Tribunal, PRESIDENT, assisté de Maître PITASSA Pikiliwé Attaché d’Administration faisant office de Greffier , en présence de Monsieur Ad Ab B, Procureur de la République ;
Et ont signé le Président et le Greffier. /