Conformément à l’Article 1 de l’AUPSRVE, seule une créance certaine, liquide et exigible peut faire l’objet d’une procédure d’injonction de payer.
Il ressort des éléments factuels qu’une gérante d’Etablissement commercial prend l’engagement de régler une dette de 30 millions F CFA sous la condition d’obtenir un crédit bancaire avec un titre foncier que son créancier devrait lui fournir. La pièce fournie s’étant révélée être une simple attestation d’immatriculation au lieu du titre promis, la gérante débitrice s’oppose au payement du montant convenu.
La conciliation entre les parties ayant échoué, le tribunal saisi en vue de la rétractation de l’injonction de payer relève à raison que l’engagement du débiteur était conditionnel et la dette, contractée sous condition suspensive (l’obtention d’un prêt bancaire avec le titre foncier fourni par le créancier). Aussi, qualifie-t-il la créance litigieuse d’éventuelle et ordonne la rétractation de l’ordonnance d’injonction de payer.
La condamnation de la requérante à restituer l’attestation d’immatriculation (refusée par la
banque) va de soi.
ARTICLE 1 AUPSRVE ARTICLE 401 CODE DE PROCEDURE CIVILE (Tribunal de Première Instance de Lomé - TOGO, Chambre Civile et Commerciale, Jugement N°2778/09 du 22 septembre 2009, A Ad Ae c/ Aa Af C) LE TRIBUNAL Vu les pièces de la procédure ; Ouï les conseils des parties en leurs conclusions ; Le Ministère Public entendu ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que suivant exploit d’huissier en date du 07 avril 2009, dame Ad Ae A Gérante des Etablissements EBENEZER PLUS TOGO, demeurant et domiciliée à Lomé, 401, rue Kokétimé, assistée de Me ATTOH-MENSAH, Avocat à la cour, a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer N°0204/09 rendue le 25 mars 2009 et fait donner, par le même acte, assignation au sieur Ac Ab C, Directeur de société demeurant et domicilié à Lomé, à comparaître par-devant le tribunal de céans pour est-il dit :
- Constater que l’attestation d’immatriculation que lui a fournie le requis n’a pa valablement servir à la transaction souhaitée ;
- Voir rétracter purement et simplement l’ordonnance dont opposition ;
- Lui donner acte de ce qu’elle s’engage à restituer au requis l’attestation d’immatriculation en cause ;
Attendu qu’au soutient de son action, la requérante expose que par l’ordonnance ci-dessus indiquée, il lui est enjoint de payer au requis la somme totale de 35.310.000 F CFA en principal et frais ; qu’elle ne nie pas avoir entretenu avec le requis quelques relations d’affaires, que la convention qui les liait était que le requis mette à sa disposition un titre foncier pouvant lui servir de caution en vue de bénéficier d’un prêt auprès d’une banque de la place ; qu’elle ne nie pas non plus l’engagement pris dans la convention en date du 23 juin 2008 ; que cependant, elle précise que l’accomplissement de cet engagement était conditionné par la réalisation d’une condition ; qu’elle ne devait honorer son engagement à l’égard du requis que si le document mis à sa disposition lui aurait effectivement servi à bénéficier du prêt sollicité ; mais qu’ au lieu de lui fournir un titre foncier pouvant garantir son prêt, le requis ne lui a remis qu’une simple attestation d’immatriculation que la banque a d’ailleurs rejetée comme ne pouvant servir et valoir de caution ; que la banque le lui a expressément signifié par une correspondance , que donc, la condition suspensive n’a pas été réalisée pour donner effet à la convention sus visée ; qu’il suit que la créance du requis n’est ni certaine, ni liquide, ni exigible comme le prévoit l’article 1er de l’acte uniforme de l’OHADA portant procédure simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, ne saurait valablement fonder une ordonnance d’injonction de payer ; qu’elle précise en outre n’avoir jamais émis un chèque revenu impayé ; que c’est lorsqu’elle s’est rendue compte, après la correspondance de la banque, que le document n’était pas celui que demandait l’institution bancaire ; qu’elle a ordonné à cette dernière d’annuler le paiement d’un chèque émis dans le sens d’une exécution anticipée du contrat ; qu’à aucun moment, il ne s’est agi d’un chèque sans provision comme le requis tente de le faire croire au tribunal ; qu’il y a lieu de rétracter l’ordonnance querellée ;
Attendu que le défendeur par le biais de son conseil Me EDORH-KOMAHE, avocat à la Cour, déclare qu’il n’y a pas de débats à faire au regard de la convention qui les lie mais qu’il ne comprend pas la réticence de la requérante qui, tout en prétendant n’avoir pas pu obtenir son prêt, refuse malgré les multiples réclamations de lui restituer les documents de son immeuble qu’il a remis, à savoir l’attestation d’immatriculation, le plan visé et l’évaluation faite par l’architecte ; qu’il sollicite alors reconventionnellement qu’il plaise au tribunal enjoindre à la demanderesse de lui restituer les pièces sus mentionnées sous astreinte de 5 000.000 FCFA par jour de retard ;
Attendu que la tentative de conciliation prévue par la loi ayant échoué, il y a lieu de se prononcer sur les mérites de l’opposition ;
Attendu qu’au sens de l’article 1er de l’acte uniforme de l’OHADA portant organisations des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, seul le recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut faire l’objet d’une procédure d’injonction de payer ;
Attendu qu’en l’espèce, il résulte de l’analyse des pièces du dossier que l’engagement pris par la requérante dans la convention en date du 23 Juin 2008 de payer au requis la somme de 30.000.000 F CFA est un engagement sous condition qui ne peut ou ne doit être honoré que si et seulement si le titre de propriété mis à sa disposition par le requis lui a effectivement permis d’obtenir le crédit bancaire sollicité ; qu’il apparaît clairement que la créance litigieuse n’est qu’une créance conditionnelle voire éventuelle ; qu’ainsi, la condition suspensive, qui est l’obtention effective du prêt au moyen du document remis, n’ayant pas été réalisée en l’espèce pour donner effet à la convention du 23 juin 2008 conclue entre les parties, il y a lieu de constater que la créance litigieuse de 30.000.000 F CFA que
poursuit le requis n’existe pas, et ne remplit pas non plus les conditions de certitude, de liquidité et d’exigibilité de l’article 1er de l’Acte uniforme sus visé ; qu’il échet, en conséquence, de rétracter purement et simplement l’ordonnance d’injonction de payer N°0204/2009 entreprise ;
Attendu que le défendeur sollicite reconventionnellement la restitution par la requérante de l’attestation d’immatriculation, du plan visé et l’évaluation de l’architecte et ce, sous astreinte de 5.000.000 F CFA par jour de retard ;
Attendu cependant qu’à l’exception de l’attestation d’immatriculation se trouvant chez la requérante, le défendeur ne rapporte pas la preuve de la remise des deux autres documents sus mentionnés à cette dernière qui conteste n’avoir jamais reçu ces pièces ; que faute de preuve de cette remise, la requérante ne peut être tenue qu’à la seule restitution de l’attestation d’immatriculation en cause ;
Attendu qu’au regard de tout ce qui précède, il importe de mettre les dépens pour moitié à la charge de chacune des parties et ce, conformément aux dispositions de l’article 401 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ;
EN LA FORME
- Déclare l’opposition recevable ;
AU FOND
- Rétracte purement et simplement l’ordonnance d’injonction de payer N°0204/2009 rendue le 25 mars 2009 ;
- Ordonne à la requérante de restituer au requis Ac Ab C l’attestation d’immatriculation reçue et ce, sous astreinte de 25.000 F CFA par jour de résidence ;
- Déboute le requis de ses autres demandes mal fondées ;
- Met les dépens pour moitié à la charge de chacune des parties ;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par le Tribunal de Première Instance de Lomé à l’audience publique ordinaire du vendredi 26 juin 2009 par Monsieur KUTUHUN Kossi, juge audit tribunal, PRESIDENT, assisté de Me ALINON Amudussuèni, Greffier, en présence de Monsieur B Ag, Procureur de la République.
Et ont signé le Président et le Greffier