Affaire
X n° 02/2001
Tobi Edoé contre
Commission de l'UEMOA
« Agent contractuel — Droit communautaire — Recours en annulation d’une
décision de non renouvellement de contrat de travail — Procédure — Délai de
recours — Forclusion — Cas de force majeure — Notion — Limites »
Sommaire de l’arrêt
La notion de force majeure vise essentiellement, abstraction faite des
particularités des domaines spécifiques où elle est utilisée, des circonstances
étrangères rendant impossible la réalisation du fait en cause.
Même si elle ne présuppose pas une impossibilité absolue, elle exige toutefois
qu’il s’agisse de difficultés anormales, indépendantes de la volonté de la
personne et apparaissant inévitables même si toutes les diligences utiles sont
mises en œuvre.
RAPPORT DU JUGE RAPPORTEUR
Le requérant est engagé le 26 juillet 1996, par la Commission de l'Union Economique et
Monétaire Ouest Africaine en qualité de planton pour une période de six (6) mois
renouvelable. A cet effet, un contrat de travail à durée déterminée est signé entre lui et le
Président de la Commission, conformément aux dispositions du Règlement n°02/95/CM du
1°” août 1995 portant régime applicable au personnel non permanent de l'Union.
Ce contrat précise que Monsieur X B C est engagé à l'UEMOA pour une
période de six mois renouvelable, qui commence à courir pour compter du 1°" août 1996.
Après plusieurs renouvellements, un autre contrat est conclu entre les deux parties pour une
période de deux ans renouvelable, allant du 1” août 1998 au 31 juillet 2000.
Le 5 mai, il lui est notifié par décision n°00-006/PC/DAAF du 28 avril 2000, le non
renouvellement de son contrat de travail, à l'échéance du 31 juillet 2000.
Estimant que le contrat à durée déterminée qui le lie à la Commission, s'est transformé en
contrat à durée indéterminée pour avoir été renouvelé au moins à deux reprises, Monsieur
X soutient que la résiliation de ce type de contrat est soumise à l'observation d'un
délai de préavis de 3 mois que l'autorité investie du pouvoir de nomination n'a pas respecté et
qu'elle doit être consécutive à une faute lourde qu'il dit n'avoir pas commise.
Pour toutes ces raisons invoquées, Monsieur X B C demande à la Cour de
déclarer son recours recevable, de prononcer l'annulation de la décision n°006006/PC/DAAF
du 28 avril 2000 avec toutes les conséquences de droit et de condamner l’UEMOA aux
dépens.
Par mémoire, en date du 16 février 2001, Maître Harouna SAWADOGO, Avocat à la Cour,
01 BP 4091 OUAGADOUGOU, agissant pour le compte de la Commission, demande à la
Cour de déclarer in limine litis, le recours en annulation de M. X B C en
date du 4 octobre 2000, irrecevable car introduit hors délai.
Quant au fond, Maître SAWADOGO estime que la Commission a respecté toutes les
dispositions légales et que le non renouvellement d'un contrat à durée déterminée arrivé à
terme ne saurait être confondu à un licenciement, avant de demander à la Cour de déclarer le
recours de M. X mal fondé, de le rejeter et de condamner M. X aux dépens.
Observations du Juge rapporteur
Il faut rappeler que la Cour doit d'abord statuer sur sa compétence à connaître de cette affaire,
sur la recevabilité du recours ensuite, avant d'examiner les moyens des parties après avoir fixé
les questions auxquelles elle est appelée à répondre ainsi que le cadre juridique de l'affaire.
La compétence de la Cour est consacrée, en l'espèce, par les articles 16 du Protocole
additionnel n°1 et 61 du Règlement n°02/95/CM du 1” août 1995 portant régime applicable
au personnel non permanent de l'Union Economique et Monétaire ouest Africaine.
En ce qui concerne la recevabilité du recours, il y a lieu de relever que la requête a été
présentée conformément aux prescriptions de l'article 26 du Règlement de Procédures et que
le requérant s'est acquitté de l'obligation de cautionnement le 12 décembre 2000.
Mais s'agissant des délais, il apparaît que :
- La décision attaquée datant du 28 avril 2000 et sa notification faite le 5 mai 2000, le
requérant avait jusqu'au 5 juillet 2000 pour saisir la Cour. Qu'il a préféré introduire un
recours gracieux le 3 juin 2000, ce qui eu pour effet de suspendre le recours. Et eu égard au
silence de l'autorité investie du pouvoir de recrutement, le délai de deux mois commençait
à courir pour compter du 4 juillet 2000 ;
- X B C a saisi la Cour le 4 octobre 2000 au lieu du 4 septembre 2000,
mais il demande à la Cour de le relever de cette forclusion et de déclarer son recours
recevable car la maladie qui le mine revêt les caractères de la force majeure ;
- Si la Cour estime le recours de M. X recevable, elle est appelée à répondre aux
questions suivantes :
Le fait de renouveler, au moins à deux reprises, un contrat à durée déterminée, le
transforme-t-il en contrat à durée indéterminée ?
La procédure utilisée par la Commission de l'UEMOA pour rompre le contrat de
travail qui la lie à M. X, est-elle régulière ?
A cette fin, il faut préalablement préciser le cadre juridique de cette affaire constitué par :
- l'article 33 alinéa 2 du Traité de l'UEMOA conférant le pouvoir de nomination aux
emplois de l'Union au Président de la Commission ;
- l'article 8 du Protocole additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle ;
- les articles 19, 20 alinéa 7, 59 60 et 61 du Règlement n°02/95/CM du 1” août 1995 portant
régime applicable au personnel non permanent de l’UEMOA ;
- les articles 15 paragraphe 4, 26, 55 et 56 du Règlement n°01/96/CM du 5 juillet 1996
portant Règlement de Procédures de la Cour de Justice de l'UEMOA.
Le Juge rapporteur :
Youssouf Any MAHAMAN CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GENERAL
Par requête en date du 24 octobre 2000, le sieur X B C, a, par l'organe de son
avocat, Maître Hamidou SAWADOGO, introduit un recours en annulation contre la décision
n°00-006/PC/DAAF du 28 avril 2000 du Président de la Commission de l'UEMOA, mettant
fin à ses fonctions.
Les faits tels qu'ils sont rapportés par le requérant se résument comme suit :
X a été recruté le 26 juillet 1996 par la Commission de l’'UEMOA en qualité de planton
pour une période initiale de six mois renouvelable et affecté au siège de la Commission,
recrutement conforme aux dispositions du Règlement n°02/95/CM du 1“/08/1995 applicable
au personnel non permanent de l'Union.
Le 5 mai 2000, le Président de la Commission lui notifiait la décision précitée mettant fin le
31 juillet 2000, à ses fonctions.
Il a introduit le 3 juin, contre cette décision, un recours gracieux qui est resté sans suite.
A l'appui de son recours en annulation, il fait valoir que :
1. La décision est entachée de vice de forme en ce que la résiliation de son contrat n'avait pas
été précédée de l'avis préalable de l'autorité chargée de la gestion des ressources et du
Comité consultatif de discipline, requis en application de l'article 39 du Règlement précité;
2. Qu'ayant été recruté pour un contrat de six mois renouvelable, renouvelé plus de deux fois
et devenu alors contrat à durée indéterminée, il estime qu'il devrait bénéficier d'un préavis
de trois mois, ce qui n'avait pas été le cas, d'où la violation des dispositions de l'article 20
alinéa 7 de ce Règlement ; qu'en outre, il a toujours servi avec loyauté et n'a encouru
aucune sanction disciplinaire.
Dans son mémoire en défense, la Commission soulève in limine litis, l'irrecevabilité du
recours pour inobservation des délais de procédure prescrits à l'article 8 du Protocole additionnel n°1 qui oblige le requérant, en matière de recours en appréciation de la légalité, à
attaquer l'acte dans les deux mois de sa notification ; qu'en considérant même le recours
gracieux du requérant en date du 3/06/2000 comme interruptif du délai des deux mois, celui-ci
restait forclos, puisque ce délai aurait commencé à courir à compter du 4/07/2000.
La Commission rejette les conclusions et moyens du requérant en objectant que le contrat
était à durée déterminée et qu'il arrivait à terme ; qu'il n'y avait pas lieu à donner préavis, le
contrat n'ayant pas été résilié avant son échéance.
Elle conclut que le recours est mal fondé et que le requérant doit être condamné aux dépens.
Dans sa réplique, le requérant fait valoir que c'est par suite de maladie qu'il n'a pu constituer à
temps un avocat afin d'introduire à la suite du recours gracieux, dans le délai requis, un
recours en annulation ; que cette situation revêtait pour lui un cas de force majeure devant le
relever de la forclusion.
Sans discuter l'argumentaire du requérant, il y a lieu d'observer que celui-ci a reçu le mémoire
en défense le 2 mars 2001 et était tenu d'y répondre au plus tard le 2 avril ; mais la réplique
n'étant parvenue au greffe que le 10 avril, hors le délai d'un mois accordé au requérant en
application de l'article 30 du Règlement de Procédures, doit être déclarée irrecevable parce
que tardive et écartée des débats.
DISCUSSION DES MOYENS
La compétence de la Cour est manifeste, en application des articles 16 du Protocole
additionnel N°1, 61 du Règlement n°02/95/CM du 1/08/1995.
SUR LA RECEVABILITE DU RECOURS
La Commission fait valoir in limine litis que le recours est irrecevable, motifs pris de ce qu'il
n'a pas été introduit dans les deux mois qui suivent la notification de la décision au requérant ;
qu'en considérant par ailleurs le recours gracieux qui suspend le délai de recours contentieux,
le requérant n'en était pas moins relevé de la forclusion ; qu'en effet, le recours pré
contentieux ayant été introduit le 3 juin 2000 et eu égard au silence de l'autorité de recrutement, le délai de deux mois commençait à courir pour compter du 4 juillet 2000 et
expirait le 4 septembre 2000, dernière date utile pour le requérant.
Le requérant a attaqué le 24 octobre 2000 la décision qui lui avait été notifiée le 5 mai 2000 ;
mais par lettre en date du samedi 3 juin 2000, et dans les délais de recours contentieux (deux
mois à compter de la notification), il a saisi l'autorité de recrutement (Président de la
Commission) d'un recours gracieux parvenu à la Commission le même jour ; celle-ci disposait
d'un délai de trente jours pour répondre, mais elle n'a donné aucune suite ; la demande du
requérant est considérée donc comme implicitement rejetée ; le délai de recours étant de deux
mois pour compter du 4 juillet et expirant le 4 septembre, le requérant est manifestement
forclos à la date du 24 octobre.
Il s'en suit, et par application des articles 59 à 61 du Règlement n°02/95/CM précité, que le
recours est irrecevable par forclusion ;
Qu'il importe de considérer les délais de recours établis par ce règlement pour les besoins
d'une sécurité juridique et de la continuité du service public communautaire ; qu'autant il est
impératif de sanctionner l'inertie des institutions communautaires préjudiciables aux
justiciables, autant ceux-ci doivent répondre de leur négligence découlant de l'inobservation
des délais de procédure.
UID EVENTUELLEMENT DU FOND ?
Le requérant excipe de la violation des articles 19, 39 et 21 du Règlement n°02/95/CM du
1°"/8/1995 en ce que la Commission s'est abstenue de consulter les organes consultatifs requis,
et de donner un préavis de trois mois, dans un contrat devenu à durée indéterminée du fait de
plus de deux renouvellements.
Le requérant a été engagé par contrat à durée déterminée en date du 26/7/1996, courant à
compter du 1”/8/1996 et expirant le 31/01/1996. Le contrat a fait l’objet de trois
renouvellements par :
- Avenant n°1 pour 6 mois (du 31/02/1997 au 31/07/1997) ;
- Avenant n°2 pour 5 mois (du 1/08/1997 au 31/12/1997) ;
- Avenant N°3 pour 7 mois (du 1/01/1998 au 31/07/1999).
Aux termes d'un nouveau contrat à durée déterminée (n°11/99/PC/CM du 20/04/1999 du
Président de la Commission), il a été engagé pour deux ans, allant du 1/08/1999 au
31/07/2000.
Le 5 mai, l'autorité de recrutement l'informait par écrit de sa volonté de mettre fin à ce contrat,
à son échéance.
Le requérant estime que la décision de la Commission heurte les dispositions de l’article 19
du fait que son contrat du 26/7/1996 ait été reconduit plus de deux fois ; ce que conteste la
Commission.
Celle-ci soutient que les deux renouvellements autorisés par ce texte ne s’appliquent qu’à la
durée du contrat, c’est-à-dire que la même durée d’un contrat donné ne peut être renouvelée
plus de deux fois.
Suivant les dispositions de cet article, les agents temporaires sont recrutés « par contrat à
durée déterminée d’une période de six mois à deux ans, renouvelable deux fois ».
La durée du contrat varie donc de 6 mois à deux ans ; il en est de même de la durée des
renouvellements, et dans ces limites, contrat et renouvellements peuvent avoir des durées
différentes ; le renouvellement, plus précisément le terme « renouvelable », se rattache tant du
point de vue juridique que sémantique à « contrat » et non à « durée ».
Les divers avenants mettent en évidence que le contrat a été renouvelé trois fois par suite de
l’arrivée des échéances ; toutefois ce contrat a expiré et ne régissait plus les rapports
contractuels des parties au moment du présent recours ; il ne peut donc servir de fondement au
règlement judiciaire du litige ; dès lors il ne doit pas être pris en considération.
La cessation d’activités du requérant doit être appréciée, par contre, au regard du contrat du
20/4/1999 et du Règlement n°02/95/CM.
L'article 45 — b) dudit Règlement prévoit que le contrat prend fin à la date fixée au contrat ; il
n'est pas contestable que le contrat était à durée déterminée ; qu'en raison de sa nature, il
expire à l'arrivée du terme fixé au 31/07/2000 sans que le requérant puisse se prévaloir d'un
contrat à durée indéterminée, d'un préavis et d'autres préalables ; que le fait d'y mettre fin n'a
nullement un caractère disciplinaire.
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés et doivent être rejetés.
SUR LES DEPENS
Nous concluons que le recours étant irrecevable, le requérant doit être condamné aux dépens,
et la caution restituée à l'UEMOA.
S'agissant d'un litige entre un agent et l'Union, les frais exposés par la Commission restent à la
charge de celle-ci (articles 60 et 61 du Règlement de procédures, 31 des Statuts de la Cour).
L’Avocat Général :
Malet DIAKITE ARRET DE LA COUR
20 juin 2001
Entre
X B C
Et
La Commission de l'UEMOA
La Cour composée de MM. Yves D. YEHOUESSI, Président ; Youssouf Any MAHAMAN,
Juge rapporteur ; Ramata FOFANA, Juge ; Malet DIAKITE, Avocat Général ; Raphaël P.
OUATTARA, Greffier ;
rend le présent arrêt :
Considérant que par requête en date du 4 octobre 2000, enregistrée au Greffe de la Cour de
Justice de l'UEMOA le même jour sous le n° 02/2000, Monsieur X B C, par
l’entremise de son Conseil, Maître Hamidou SAVADOGO, Avocat à la Cour de
OUAGADOUGOU (Aa AbA, a introduit un recours en annulation de la Décision n° 00-
006/PC/DAAF du 28 avril 2000 par laquelle le Président de la Commission de l'UEMOA l’a
informé du non renouvellement de son contrat de travail, à l’échéance du 31 juillet 2000 ;
Qu'il expose qu’il a été recruté à l'UEMOA en qualité de planton suivant contrat de travail à
durée déterminée en date du 26 juillet 1996, pour une période initiale de six mois
renouvelable ;
Que ce contrat a été renouvelé, pour une nouvelle période de six mois qui a couru du 1”
février 1997 au 31 juillet 1997, par avenant n° 1 en date du 14 février 1997 ;
Qu’après deux autres modifications du contrat suivant avenants n° 2 et n° 3 pour une durée
de cinq et sept mois, il est conclu entre les deux parties un autre contrat à durée déterminée
pour une période de deux ans renouvelable, allant du 1°” août 1998 au 31 juillet 2000 ;
Que le 5 mai 2000, il lui a été notifié par Décision n° 00-006/PC/DAAF du 28 avril 2000 du
Président de la Commission de l’UEMOA que son contrat ne sera pas renouvelé à l’échéance
du 31 juillet 2000 ;
Que le 3 juin 2000, il a introduit auprès du Président de la Commission un recours gracieux
qui s’est soldé par un échec ; que c’est pourquoi il a saisi la Cour le 4 octobre 2000 aux fins
de voir :
1. déclarer son action recevable et bien fondée ;
2. annuler la décision n° 00-006/PC/DAAF du 28 avril 2000 et en tirer toutes les
conséquences de droit ;
3. mettre les dépens à la charge de la Commission ;
Considérant qu’au soutien de son recours, le requérant fait valoir que la décision attaquée a
été prise en violation des articles 19 et 20 alinéa 7 du Règlement N° 02/95/CM du 1“ août
1995 portant régime applicable au personnel non permanent de l’UEMOA ;
Que d’une part, le contrat à durée déterminée qui le lie à la Commission s’est transformé en
contrat à durée indéterminée (pour avoir été renouvelé à plus de deux reprises) dont la
résiliation est soumise à l’observation d’un délai de préavis de trois mois et doit être
consécutive à une faute lourde ;
Que d’autre part, cette décision qu’il considère comme une sanction doit être précédée d’une
proposition de l’autorité chargée de la gestion des ressources humaines et d’un avis du Comité
Consultatif de discipline des fonctionnaires ; ce qui n’a pas été fait ;
Considérant qu’en réplique à ces moyens, le défendeur a fait valoir que :
1. en ce qui concerne la forme, le recours introduit par requête en date du 4 octobre 2000 est
irrecevable car intervenu hors délai ;
2. sur le fond, les conditions de légalité de la décision ont été réunies, le Président de la
Commission s’étant conformé aux prescriptions de l’article 45 du Règlement n°
02/95/CM portant régime applicable au personnel non permanent de l’'UEMOA ;
Considérant qu’à ces réfutations, le requérant a répliqué le 10 avril 2001 pour indiquer que
l’argument tiré de la forclusion ne saurait prospérer car d’une part, à la suite d’une plainte
déposée contre lui par l'UEMOA pour vol de mobilier de bureau, il a été arrêté, maltraité et
torturé avant d’être relâché sans aucune charge ; que la découverte d’autre part, de sa maladie
a revêtu pour lui les caractères de la force majeure ;
Considérant que la Cour doit d’abord statuer sur sa compétence à connaître de cette affaire,
sur la recevabilité du recours ensuite, avant d’examiner les moyens des parties après avoir fixé
les questions auxquelles elle est appelée à répondre ainsi que le cadre juridique de l’affaire ;
Considérant que la compétence de la Cour en l’espèce est consacrée par les articles 16 du
Protocole Additionnel n° 1 relatif aux organes de contrôle de l'UEMOA et 61 du Règlement
n° 02/95/CM du 1° août 1995 portant régime applicable au personnel non permanent de
l’UEMOA, et n’appelle en conséquence aucun commentaire particulier ;
Qu'en ce qui concerne la recevabilité du recours, il y a lieu de relever tout d’abord :
- que la requête a été présentée conformément aux prescriptions de l’article 26 du
Règlement de Procédureset que le requérant s’est acquitté de l’obligation de
cautionnement le 12 décembre 2000 ;
- Mais pour ce qui est des délais, il apparaît qu’il doive respecter les prescriptions de
l’article 61 du Règlement n° 02/95/CM portant régime applicable au personnel non
permanent de l'UEMOA qui dispose que :
« La Cour de Justice de l'UEMOA est compétente pour connaître de tout litige opposant
l’Union à l’un de ses agents contractuels.
Toutefois, le recours n’est valablement formé, devant la Cour que :
- si l’autorité investie du pouvoir de recrutement a été préalablement saisie d’une demande,
au sens de l’article 59 ;
- si cette demande a abouti à une décision implicite de rejet, partiel ou total, de l’autorité
investie du pouvoir de recrutement.
Le recours doit être introduit, devant la Cour, dans un délai de deux mois, courant à compter :
- de la date de la publication de la décision ;
- de la date de sa notification à l’agent concerné ;
- du jour ou l’intéressé en a eu connaissance ;
- de la date d’expiration du délai de réponse, lorsque le recours porte sur une décision
implicite de rejet ».
Qu'en l’espèce, la décision attaquée datant du 28 avril 2000 et sa notification faite le 5 mai
2000, le requérant a valablement introduit son recours gracieux le 3 juin 2000;
Qu’eu égard au silence de l’autorité investie du pouvoir de recrutement, le délai de deux mois
pour saisir la Cour commençait à courir à compter du 4 juillet 2000 ;
Que le recours ayant été enregistré au Greffe de la Cour le 4 octobre 2000, au lieu du 4
septembre 2000 se trouve introduit largement hors du délai prescrit ;
Qu’au regard de ce qui précède, le recours de Monsieur X tel qu’initialement
introduit doit être déclaré irrecevable ;
Considérant que M. X demande néanmoins à la Cour de le relever de sa forclusion
et de déclarer son recours recevable, bien qu’introduit hors délai, pour cas de force majeure :
la découverte de sa maladie ;
Que la question qu’il convient dès lors de se poser est de savoir si, en l’espèce, les conditions
de la force majeure étaient réunies ;
Qu’il y a lieu de constater que le délai de recours revêt un caractère strict et qu’il ne peut être
prolongé qu’au titre des délais de distance prévus à l’article 69 paragraphe e alinéa 3 du
Règlement de Procédures ; quand bien même cet article ne prévoit pas expressément le cas de
force majeure, il résulte des principes généraux de droit constamment admis par notre Cour,
qu’une déchéance tirée de l’expiration des délais ne peut être opposée lorsqu’est établie
l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure ;
Que la notion de force majeure vise essentiellement des circonstances étrangères rendant
impossible la réalisation du fait en cause ; même si elle ne présuppose pas une impossibilité
absolue, elle exige toutefois qu’il s’agisse de difficultés anormales, indépendantes de la
volonté de la personne et apparaissant inévitables même si toutes les diligences utiles sont
mises en œuvre ;
Considérant qu’il résulte du dossier et des débats à l’audience que M. X n’a eu
connaissance de sa maladie qu’en décembre 2000, c’est-à-dire trois mois après l’expiration du
délai du recours ; qu’il a introduit son recours gracieux dans les délais requis et qu’il a
constitué avocat en août 2000, mais qu’il n’a pas fait preuve de toute la diligence requise d’un
justiciable normalement averti pour saisir la Cour dans les délais requis ;
Qu’en conséquence, il convient de constater qu’en l’espèce, il n’y a ni difficultés anormales
et inévitables, ni évènements extérieurs indépendants de la volonté de M. X qui
auraient pu justifier que sa requête soit introduite hors délai ;
Qu’en tout état de cause, il en résulte que l’introduction tardive du recours n’est pas
imputable à un cas de force majeure et que le recours est irrecevable ;
Considérant que s'agissant d’un litige entre l’Union et son agent, il y a lieu conformément
aux dispositions de l’article 61 du Règlement de Procédures de mettre les dépens à la charge
de l’UEMOA ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de Fonction Publique
Communautaire :
- Déclare le recours de M. X irrecevable ;
- Met les dépens à la charge de l'UEMOA.