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25/06/2003 | UEMOA | N°03/2002

UEMOA | UEMOA, Cour de justice, 25 juin 2003, 03/2002


Texte (pseudonymisé)
Affaire Ac A
contre
Commission de l'UEMOA
« Fonctionnaire — Recours en responsabilité extra contractuelle — Recours en
réparation »
Sommaire de l’arrêt
Droit de la fonction publique communautaire.
Recours en responsabilité extra contractuelle et en réparation du préjudice subi
par un fonctionnaire de l’Union abusivement licencié.
Obligation pour l’autorité investie du pouvoir de nomination de consulter
préalablement à toute sanction du second degré l’autorité chargée des
ressources humaines.
Le l

icenciement doit respecter les règles prescrites à l’article 76 lorsqu’il est
envisagé à titre de sanction dis...

Affaire Ac A
contre
Commission de l'UEMOA
« Fonctionnaire — Recours en responsabilité extra contractuelle — Recours en
réparation »
Sommaire de l’arrêt
Droit de la fonction publique communautaire.
Recours en responsabilité extra contractuelle et en réparation du préjudice subi
par un fonctionnaire de l’Union abusivement licencié.
Obligation pour l’autorité investie du pouvoir de nomination de consulter
préalablement à toute sanction du second degré l’autorité chargée des
ressources humaines.
Le licenciement doit respecter les règles prescrites à l’article 76 lorsqu’il est
envisagé à titre de sanction disciplinaire.
RAPPORT DU JUGE RAPPORTEUR
I. FAITS ET CONCLUSIONS DES PARTIES
Par requête en date du 19 août 2002, enregistrée le 20 août 2002, Madame Ac A a,
par l’entremise de ses avocats, Maîtres Moumouny Kopiho et Mamadou Coulibaly, introduit
un recours contre la Décision n°449/2001 du 28 juin 2001 du Président de la Commission de
l’UEMOA, qui l’a licenciée de ses fonctions.
Madame Ac A a été recrutée en qualité de secrétaire dactylographe à la Commission
de l'UEMOÀA, par Décision n°016/2000/PC/UEMOA, du 14 janvier 2000.
Par Décision n° 232/2001/PC/UEMOA en date du O2 avril 2001 du Président de la
Commission de l’UEMOA, elle a bénéficié d’une évacuation sanitaire pour consultation,
examens et soins à l’hôpital COCHIN à PARIS ( France).
Après son retour à Aa, par lettre en date du 30 mai 2001, la requérante adressa une
demande de remboursement de frais de séjour (indemnités et transport) liés à son évacuation
sanitaire, au Président de la Commission.
Le 08 juin 2001,le Président de la Commission de l’'UEMOA saisissait le Président du Comité
Consultatif de Discipline de faits de « manœuvres tendant à obtenir le paiement de frais
supplémentaires séjour et transport », contre Madame Ac.A.
Le 11 juin 2001, elle recevait une invitation à comparaître devant le Comité Consultatif de
Discipline pour un conseil de discipline prévu pour le 19 juin 2001.
A l’issue dudit conseil, le Comité Consultatif de Discipline donna son avis n°03/2001, selon
lequel la prolongation de séjour de Madame A au-delà du 22 avril 2001 en l’absence
d’un acte l’y autorisant est caractéristique d’une absence non autorisée. Toutefois, ledit
Comité estima, à l’unanimité, que Madame Ac A pourrait bénéficier de circonstances
atténuantes compte tenu de sa maladie et du fait que tous les examens qu’elle a effectués et les soins qu’elle a reçus après sa sortie de l’hôpital entrent dans le cadre des maux relevés dans le
dossier médical.
Le Comité Consultatif de Discipline fit encore observer qu’il n’y a pas eu manœuvre tendant
à obtenir le paiement de frais supplémentaires de la part de la requérante.
Cependant par Décision n°449/2001/PC/UEMOA en date du 28 juin 2001, le Président de la
Commission licenciait la requérante pour « faute grave constituée par des manœuvres tendant
à bénéficier d’avantages non justifiés ».
Le 06 août 2001, la requérante introduisait un recours gracieux en annulation de la Décision
n°449/2001 du 28 juin 2001 auprès du Président de la Commission.
Elle a ensuite saisi le 20 février 2002, sans succès le Comité Consultatif Paritaire d’ Arbitrage,
après expiration du délai de réponse, pour voir ordonner le sursis à exécution de la Décision
n°449/2001 portant son licenciement.
Dans sa requête Madame Ac A a, par l’organe de ses conseils, demandé à la Cour de
déclarer son recours recevable, son licenciement abusif et la condamnation de la Commission
de l'UEMOA à lui verser la somme de cent millions (100.000.000) FCFA en réparation des
graves préjudices professionnel, matériel et moral qu’elle a subis du fait de ce licenciement.
Le recours a été notifié le 04 septembre 2002 au Président de la Commission qui par lettres
n°3849/PC/CI et n°3850/PC/CI du 13 septembre 2002 informa la Cour respectivement de la
désignation de son agent en la personne de M.Eugène Kpota, Conseiller juridique, et de la
constitution de Maître Harouna Sawadogo, avocat à la Cour, pour représenter M. Ah
devant la Cour.
Par mémoire en défense, en date du 03 octobre 2001, Maître Harouna Sawadogo, avocat à la
Cour, agissant pour le compte de la Commission sollicite de la Cour :
Sur la forme
au principal
dire et juger que le recours introduit le 20 août 2002 par Madame Ac A n’a pas
satisfait aux exigences des articles 107,108 et 112 du Règlement n° 01/95/CM portant Statut
des fonctionnaires de l’UEMOA ;
en conséquence
déclarer ledit recours irrecevable ;
subsidiairement
donner acte à la requérante de ce qu’elle sollicite de la Cour de céans de constater l’illégalité de
la décision attaquée et d’en tirer en même temps les conséquences pécuniaires par la
condamnation de la Commission au paiement d’indemnités réparatrices de préjudices subis ;
en conséquence
déclarer ledit recours irrecevable en l’état pour défaut de fondement ;
Au fond
très subsidiairement
rejeter les moyens invoqués par la requérante
en conséquence
- la débouter de tous ses chefs de demande comme étant mal fondés ;
- la condamner aux dépens.
Sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, la Cour a décidé d’ouvrir la
procédure orale sans mesures d’instruction préalables. Cependant elle a invité la Commission
de l'UEMOA à produire deux documents, à savoir :
- l'avis n° 03/2001 du Comité Consultatif de Discipline ;
- la Décision n° 016/2000/PC/UEMOA du 14 janvier 2000, portant recrutement de Madame
Ac.A.
La Cour a invité aussi la requérante à produire la lettre de saisine du Comité Consultatif
IL. MOYENS ET ARGUMENTS DES PARTIES
SUR LA FORME
La Commission de l'UEMOA dans son mémoire en défense en date du 03 octobre 2002, a
conclu à l’irrecevabilité de la requête de Madame Ac A en faisant valoir :
- qu’en invoquant les dispositions des articles 107, 108 et 112 du Règlement n°01/95/CM
portant Statut des fonctionnaires de l’UEMOA, la demanderesse a fait une mauvaise
application des dispositions susvisées; le recours préalable obligatoire imposé en l’espèce
étant celui édicté à l’article 108 du Règlement n° 01/95/CM et non celui de l’article 107
malencontreusement visé par la demanderesse ;
- que le recours préalable introduit visait à rapporter la Décision de caractère individuel
n°449/2001/PC/UEMOA du 28 juin 2001 ;
- qu’il est dés lors évident que le recours préalable obligatoire qui sied en l’espèce est celui
prévu à l’article 108 du Règlement n° 01/95/CM et qui concerne les réclamations visant
un acte de l’autorité investie du pouvoir de nomination ;
- qu’en conséquence, la prétendue saisine du Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage
quatre mois après la notification de la décision de licenciement est intervenue hors délai.
Toujours selon la Commission, le recours préalable à la saisine directe du Comité Consultatif
Paritaire d’Arbitrage avant celle de l’autorité hiérarchique, ne peut durer plus de sept mois si
l’on additionne tous les délais. En l’espèce, ce délai de sept mois expirait le 28 février 2002.
Elle fait en outre remarquer que l’article 112 du Règlement n°01/95/CM a imparti un délai de
deux mois à compter de la date d’expiration du délai de réponse, lorsque le recours porte sur
une décision implicite de rejet. La requérante avait alors jusqu’au 28 avril 2002 pour
introduire son recours. En ayant fait son recours le 20 août 2002, Madame A Ac a
encouru la forclusion en agissant hors délai ; ce qui entraîne l’irrecevabilité du présent
b) Moyens et arguments de la requérante
La requérante dans son mémoire en réponse du 13 novembre 2002 soutient que c’est à bon
droit qu’elle a entrepris le recours préalable imposé à l’article 107du Règlement n° 01/95/CM.
Toujours selon la requérante ce recours préalable trouve son fondement dans les dispositions
de l’article 76 du statut précité, l’autorité habilitée à prononcer les sanctions du second degré
et investie du pouvoir de nomination doit logiquement être compétente pour connaître d’un
recours gracieux par voie hiérarchique.
Elle ajoute qu’en tout état de cause, les dispositions de l’article 107 ne prévoient pas une
procédure autre que celle qui a été suivie en prescrivant que « tout fonctionnaire peut saisir,
en respectant la voie hiérarchique, l’autorité investie du pouvoir de nomination, d’une requête
l’invitant à prendre, à son égard, une décision ».
Elle estime que l’autorité investie du pouvoir de nomination prend sa décision, après avoir, le
cas échéant, recueilli l’avis du Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage. Elle notifie sa
décision motivée au fonctionnaire intéressé, dans un délai maximum de quatre mois courant à
compter du jour de l'introduction de la demande ; à l’expiration de ce délai, le silence de
l’autorité investie du pouvoir de nomination vaut décision implicite de rejet, susceptible de
donner lieu à une réclamation, au sens de l’article 108 du Règlement n° 01/95/CM.
Elle conclut en conséquence au rejet des moyens de la Commission et à la recevabilité de son
c) Réponse de la Commission
Par mémoire en duplique en date du 26 novembre 2002, la Commission de l'UEMOA
soutient que l’article 107 du Règlement n°01/95/CM/UEMOA du 1°" août 1995, ne concerne
que le cas du fonctionnaire qui n’a pas de décision et qui veut en susciter.
Elle ajoute que le recours gracieux introduit par la requérante le 06 août 2001 visait à
rapporter la Décision de licenciement n° 449/2001/PC/UEMOA du 28 juin 2001, et ne
pouvait valablement que s’adresser au Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage.
Qu’en saisissant le Président de la Commission de l'UEMOA puis le Comité Consultatif
Paritaire d’Arbitrage d’une réclamation visant à rapporter l’acte de l’autorité investie du
pouvoir de nomination, la requérante a opéré un double emploi du recours gracieux, ayant
pour conséquence de fausser le point de départ du délai du recours contentieux.
Elle fait encore remarquer que le recours préalable introduit par la demanderesse le 06 août
2001 auprès du Président de la Commission de l’'UEMOA concerne uniquement l’annulation
du licenciement. Ni le Président de la Commission de l'UEMOA, ni le Comité Consultatif
Paritaire d’Arbitrage n° ont été saisis d’un recours gracieux en indemnisation.
Enfin la Commission souligne que ces recours gracieux, préalables à toute saisine régulière de
la Cour, n’ayant porté sur un quelconque paiement de somme d’argent à titre de réparation de
préjudices subis, l’action en indemnisation introduite par la requérante doit être déclarée
irrecevable.
B. AU FOND
La requérante estime que la Décision n°449/2001/PC/UEMOA en date du 28 juin 2001 du
Président de la Commission de l'UEMOA mettant fin à ses fonctions, à titre de sanction
disciplinaire, a été prise en violation de l’article 77 du Règlement n° 01/95/CM du 1°” août 1995 portant Statut des fonctionnaires de l’UEMOA , parce qu’elle n’a pas été invitée à
s’expliquer par écrit préalablement sur les faits qui lui sont reprochés.
Elle fait observer que son licenciement, sanction disciplinaire, n’a pas respecté les
dispositions des articles 86 et 76 du règlement précité.
Elle précise que la sanction prise à son encontre est du second degré et qu’aux termes dudit
article 76 « les sanctions du second degré sont prononcées par l’autorité investie du pouvoir
de nomination, sur proposition de l’autorité chargée de la gestion des ressources humaines et
après avis du Comité Consultatif de Discipline ».
Elle souligne que la Décision n° 449/2001 portant son licenciement vise l’avis du Comité
Consultatif de Discipline mais nullement une quelconque proposition de l’autorité chargée de
la gestion des ressources humaines ; que cette proposition n’ayant pas été visée, n’a donc pu
être faite.
Elle estime que la Décision relative à son licenciement est entachée de vices de forme, qu’elle
est irrégulière et abusive, raison pour laquelle aux termes de l’article 107 du Règlement n°
01/95/CM elle a saisi par requête en date du 06 août 2001, l’autorité investie du pouvoir de
nomination aux fins de rapporter la Décision n° 449/2001/PC/UEMOA du 28 juin 2001,
portant son licenciement.
Toujours selon la requérante, l’autorité investie du pouvoir de nomination n’a donné aucune
suite à sa demande quatre mois après son introduction ; ce qui équivaut à une décision
implicite de rejet au sens de l’alinéa 4 dudit article 107.
La requérante fait remarquer que conformément à l’alinéa 2 de l’article précité, elle a saisi en
vain tout en respectant les forme et délai requis, le Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage
d’une réclamation, après expiration du délai de réponse, pour voir ordonner le sursis à
exécution de la Décision n° 449/2001 portant son licenciement.
Pour toutes ces raisons invoquées, Madame Ac A demande à la Cour de déclarer son
licenciement abusif et de condamner la Commission de l'UEMOA à lui payer la somme de cent millions (100.000.000) de francs CFA à titre de réparation des graves préjudices
professionnel, matériel et moral qu’elle a subis du fait de ce licenciement abusif.
Quant à la Commission de l'UEMOA, elle fait observer que le licenciement de Madame
Ac A n’étant pas annulé ni annulable sur le fondement du recours en indemnisation, le
préjudice causé à la requérante ne peut être fondé sur les chefs de demande tels qu’elle les a
présentés, mais sur le préjudice né exclusivement du dysfonctionnement administratif de la
Commission.
Elle précise que ni l’absence de proposition de sanction de l’autorité chargée de la gestion des
ressources humaines ni l’absence d’explication écrite de la demanderesse ne saurait être
assimilable à un fonctionnement défectueux des organes de l’Union susceptible de causer
préjudice.
Elle ajoute que la prise de la sanction de licenciement a été précédée d’un conseil de
discipline au cours duquel la requérante a fourni les explications nécessaires aux faits à elle
reprochés.
Toujours selon la Commission, en sa qualité de premier responsable chargé de la gestion du
personnel de l’Union, le Président de la Commission de l’'UEMOA n’a commis aucune
irrégularité assimilable à un dysfonctionnement des organes de l’Union en prenant la Décision
n°449/2001/PC/UEMOA en dehors de toute proposition de « l’autorité chargée de la gestion
des ressources humaines ».
Enfin, la Commission estime, qu’en tout état de cause, le recours introduit par la
demanderesse n’ayant pas pour objet d’annuler la Décision n°449/2001, les griefs soulevés
tant dans sa requête que dans son mémoire en réplique demeurent totalement inopérants en
l’espèce.
Le Juge rapporteur :
Daniel Lopes FERREIRA CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GENERAL
I LES FAITS A L’ORIGINE DU RECOURS
Par requête en date du 19 août 2002, enregistrée au greffe le 20 août 2002, Madame Ac
A, a, par l’organe de ses avocats KOPIHO et COULIBALY, introduit un recours contre
la décision de la Commission de l’'UEMOA qui l’a révoquée de ses fonctions le 28 juin 2001.
L’intéressée a été recrutée le 14 janvier 2000, par la Commission, en qualité de secrétaire
dactylographe pour servir dans les services de cette institution ; elle est fonctionnaire et
relève à ce titre, du règlement n°01/95/CM du 1°" août 1995 portant statut des fonctionnaires
Le 30 mai 2001, elle demandait par écrit, au Président de la Commission, le remboursement
de frais supplémentaires (séjour et transport local) occasionnés par son évacuation sanitaire à
Paris (France).
Par lettre n°01-036 en date du 8 juin 2001, le Président de la Commission saisissait le Comité
consultatif de discipline des faits d’absence non autorisée et de réclamation frauduleuse des
frais précités, qu’il reproche à la requérante.
Le Comité concluait dans son avis du 19 juin 2001 que la réclamation ne renfermait aucune
manœuvre frauduleuse.
Le 28 juin 2001, par décision n°499/2001/UEMOA, le Président de la Commission licenciait
la requérante « pour faute grave constituée par des manœuvres tendant à bénéficier
d’avantages non justifiés ».
Le 6 août 2001, Madame A saisissait le Président de la Commission, l’autorité investie
du pouvoir de nomination (ci-après AIPN), d’un recours préalable intitulé, « demande de
réhabilitation administrative », dans lequel elle estimait que la qualification des faits qui lui
sont reprochés était inexacte et que la procédure disciplinaire devrait être révisée et la sanction annulée pour défaut de motifs, et qu’en conséquence elle devrait être réintégrée dans
ses fonctions.
Le Président de la Commission n’a pas réagi à ce recours ;
Elle saisissait le 20 février 2002, par l’entremise du Président de la Commission, le Comité
Consultatif Paritaire d’Arbitrage (ci-après CCPA) de sa réclamation ; elle demandait à celui-ci
de surseoir à l’exécution de la décision de licenciement dont l’ordonnancement a violé les
dispositions de l’article 76 du règlement n°01/95/CM précité.
Le Comité ne donnait aucune suite à sa demande ;
En définitive, elle attaquait la décision de licenciement devant la Cour.
II. CONCLUSIONS DES PARTIES
La requérante demande à ce qu’il plaise à la Cour de :
- déclarer son recours recevable en la forme ;
- au fond, déclarer son licenciement abusif et condamner la Commission à lui payer une
indemnité de cent (100) millions de francs CFA en réparation des préjudices
professionnel, matériel et moral qu’elle a subis ;
La défenderesse, quant à elle, conclut qu’en la forme, le recours doit être déclaré irrecevable
pour inobservation des formalités exigées aux articles 107, 108 et 112 du règlement
n°01/95/CM portant statut des fonctionnaires, et que subsidiairement,
il y a lieu de donner acte à la requérante de ce qu’elle demande à la Cour de constater
l’illégalité de la décision attaquée et d’en tirer en même temps les conséquences pécuniaires
par la condamnation au paiement d’indemnités réparatrices des préjudices subis ;
Qu’au fond les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés et que le recours doit
être rejeté.
IIL. MOYENS ET ARGUMENTS DES PARTIES
La requérante invoque contre la décision attaquée, divers griefs tenant à des irrégularités de
forme et à un défaut de motivation.
En ce qui concerne les irrégularités de forme, elle argumente qu’elle avait déposé le 30 mai
2001, au niveau du Président de la Commission de l’'UEMOA, une demande de
remboursement de frais (indemnités et transport) résultant de son évacuation sanitaire sur
l’hôpital COCHIN à PARIS, mais que contre toute attente, elle recevait le 11 juin 2001, une
convocation l’invitant à comparaître le 19 juin 2001, devant le Comité consultatif de
discipline, pour être entendue sur la prolongation de son séjour et sur sa réclamation de frais ;
Qu’après son audition, elle fut licenciée par le Président de la Commission, avant même
qu’elle n’ait été invitée à s’expliquer par écrit, dans le cas d’espèce, sur les faits qui lui sont
reprochés, et alors même que la mesure de licenciement devait être proposée au préalable à
l’autorité chargée des ressources humaines ;
Que l’omission de ces formalités constitue un vice de procédure dans l’ordonnancement de la
décision et violait les dispositions des articles 76, 77 et 86 du statut.
Sur le fond, elle fait valoir qu’elle a été évacuée le 2 avril 2001 sur l’hôpital COCHIN à
PARIS, pour maladie (consultations, examens médicaux et soins) ; que l'UEMOA son
service employeur, prenait en charge pour deux jours les frais de transport aller et retour par
avion, les frais d’hospitalisation, et les produits pharmaceutiques ; que du fait de l’étroitesse
du délai deux (2) jours, elle avait, avant son évacuation, consulté le Directeur de Cabinet du
Président de la Commission, Monsieur Ad C sur la conduite à tenir en cas de
prolongement de séjour pour raisons médicales ; que celui-ci l’avait rassurée qu’en pareille
circonstance, la prolongation ordonnée par les médecins traitants ne saurait donner lieu à des
conséquences administratives fâcheuses ; que ces médecins lui ayant prescrit d’approfondir
sur place les diagnostics d’un des maux (céphalées chroniques) dont elle souffrait, elle en
avait déduit, en toute bonne foi, qu’elle pouvait continuer ses consultations ; que la
prolongation de son séjour est motivée par l’autorisation du Directeur de Cabinet et que
partant le licenciement n’est pas justifié ; que le simple fait de réclamer des remboursements
de frais découlant de cette prolongation est loin d’être téméraire et ne peut donner lieu à une sanction disciplinaire en l’absence de faux, d’usage de faux et de manœuvres frauduleuses ;
que le Président de la Commission aurait dû recevoir ou rejeter simplement ses réclamations ;
que le motif retenu pour la révoquer repose sur des faits n’ayant aucun caractère fautif
justifiant un licenciement, que celui-ci demeure abusif ;
Qu’enfin, la Commission ne lui ayant pas donné l’occasion de s’expliquer par écrit, s’agissant
d’un licenciement, sanction du second degré, a violé les dispositions de l’article 77 du statut,
et partant les droits de la défense.
La défenderesse oppose à la requérante les arguments suivants :
Elle fait observer que la procédure précontentieuse n’a pas suivi un agencement régulier ;
qu’en effet le recours préalable devant être exercé en pareil cas, est celui prévu à l’article 108
du statut qui concerne les réclamations visant un acte de l’autorité investie du pouvoir de
nomination et non celui prévu à l’article 107 visé à tort par la requérante et qui concerne le
cas du fonctionnaire qui n’a pas de décision et qui veut en susciter par un recours
administratif préalable ; que la décision de licenciement ayant été notifiée à la requérante le
28 juin 2001, celle-ci, aux termes de l’article 108 précité, disposait d’un délai de trois mois
à compter du 28 juin 2001, -date de la notification- pour saisir le CCPA ; que l’intéressée
n’ayant soumis sa réclamation que quatre (4) mois après le 28 juin 2001, le recours doit être
déclaré irrecevable ;
Que dans l’hypothèse d’une saisine directe du CCPA avant celle de l’autorité hiérarchique, le
recours préalable ne peut durer plus de sept (7) mois si l’on additionne tous les délais ; qu’en
l’espèce ce délai de sept (7) mois expirait le 28 Février 2002 ;
Que l’article 112 du statut impartit un délai de deux (2) mois au fonctionnaire dont le recours
préalable a été implicitement rejeté, pour agir ; que la requérante avait alors jusqu’au 28 avril
2002 au plus tard pour saisir la Cour de Justice ; qu’en saisissant celle-ci le 20 août 2002, la
requérante est forclose et doit être privée de son droit d’agir ;
Que le recours est encore irrecevable du fait que la requérante ait demandé à la Cour de
déclarer la décision de licenciement illégale et de condamner l’UEMOA à cent (100) millions
de francs CFA de dommages et intérêts ; que l’objet d’une telle demande tend à faire apprécier par la Cour et la légalité de cette décision et un recours en indemnité, alors que les
statuts et le règlement de cette juridiction ne donnent à celle-ci aucune compétence pour se
prononcer en même temps sur la légalité d’un acte communautaire et sur une indemnisation
financière ; que cette dernière ne devrait être que le pendant du recours en annulation, lorsque
la Commission refuserait de tirer les conséquences éventuelles de l’annulation de sa décision.
Sur le fond, la défenderesse fait valoir que sa responsabilité ne saurait être engagée vis-à-vis
de la requérante du fait que la décision de licenciement n’a pas été annulée et qu’elle
(défenderesse) n’a commis aucune faute, élément déterminant de la notion de responsabilité.
Dans sa réplique la requérante réfute les arguments de la Commission et rétorque qu’une
bonne analyse des dispositions des articles 107 et 108 du statut permet de juger que le recours
préalable requis (hiérarchique) est bien celui prévu à l’article 107 du statut, que ce recours est
justifié au regard des dispositions de l’article 76 du statut qui donnent à l’autorité investie du
pouvoir de sanction, de connaître du recours préalable ; que les formalités précontentieuses
ont été régulièrement suivies en ce qu’elle (requérante) a d’abord exercé un recours préalable
au niveau de l’autorité investie du pouvoir de nomination, par lettre en date du 6 août 2001 ;
que cette autorité n’a pas réagi pendant quatre (4) mois ; qu’elle a ensuite saisi le CCPA le 20
février 2002, d’une réclamation dont le point de départ du délai est le 6 décembre 2001 ; que
la forclusion ne saurait lui être opposée.
Elle estime qu’il n’y a pas lieu pour elle de s’attarder sur l’exception d’incompétence
soulevée par la Commission concernant les recours en appréciation de la légalité et en
indemnisation, dans la mesure où elle n’a pas introduit un recours en excès de pouvoir
(appréciation de la légalité).
Elle réitère qu’elle a subi un dommage qui mérite réparation par application des articles 16 du
Protocole additionnel n°01, et 27 alinéa 6 des statuts de la Cour, 15-5° alinéas 1 et 3 du
Règlement de procédure de la Cour.
Dans son mémoire en duplique, la Commission a repris les arguments qu’elle a développés
dans son mémoire en défense, et fait en outre valoir que les recours préalables dont l’AIPN et
le CCPA ont été saisis, avaient respectivement pour seuls objets l’annulation et le sursis à
exécution de la décision contestée ;
que l’objet des recours gracieux introduits au niveau de l’AIPN et du CCPA n’étant pas une
indemnisation, la requérante est mal venue à réclamer dans sa requête saisissant la Cour, le
paiement de sommes d’argent à titre de réparation de préjudices subis.
IV. DISCUSSION JURIDIQUE
A. Sur les moyens de forme
La défenderesse excipe en premier lieu de la violation des articles 107, 108 et 112 du statut
relatifs aux formalités de procédure précontentieuse et de saisine de la Cour, violation qui
entraînerait l’irrecevabilité du recours.
Elle invoque en second lieu que la Cour est incompétente pour connaître simultanément d’un
recours en indemnité et de la légalité d’un acte communautaire ; que dès lors, le recours
devrait être déclaré irrecevable ;
Aux termes des articles 107, 108 du statut, tout fonctionnaire peut saisir en respectant la voie
hiérarchique l’AIPN afin que celle-ci prenne une décision le concernant. L’AIPN dispose
d’un délai de quatre (4) mois à compter de l’introduction de la demande pour prendre une
décision ; son silence dans ce délai, équivaut à une décision implicite de rejet susceptible de
réclamation devant le CCPA ; cette réclamation peut viser un acte de l’AIPN faisant grief, soit
que l'autorité ait pris une décision, soit qu’elle se soit abstenue de prendre une mesure
imposée par le statut et les règlements d’application.
La réclamation, suivant l’article 108, doit être introduite dans un délai de trois (3) mois
courant à compter :
- de la date d’expiration du délai de réponse lorsque la réclamation porte sur une décision
implicite de rejet (alinéa 2 de l’article) ;
- du jour de la notification de la décision ou de la connaissance de la décision par le
fonctionnaire, s’il s’agit d’une décision individuelle ;
- du jour de la publication de l’acte s’il s’agit d’une mesure de caractère général ;
Le CCPA doit statuer dans un délai maximum d’un (1) mois à compter de sa saisine ;
L’AIPN dispose de trois (3) mois, à compter de la date de réception de l’avis du CCPA, pour
prendre et notifier sa décision au fonctionnaire ;
A l’expiration du délai des quatre (4) mois, suivant le dépôt de la réclamation, le défaut de
réponse à celle-ci vaut décision implicite de rejet susceptible de recours contentieux devant la
Cour ;
Ce recours n’est recevable, suivant l’article 112 du statut que si le requérant a préalablement
saisi le CCPA de sa réclamation et si celle-ci a abouti à une décision implicite ou explicite de
rejet total ou partiel de l’AIPN.
Il n’est pas contestable que la requérante a saisi d’un recours préalable, hiérarchique, l’AIPN,
le 6 août 2001 ; que celle-ci n’a donné aucune suite dans le délai statutaire des quatre mois qui
lui était imparti et qui courrait du 6 août 2001 au 6 décembre 2001, date d’expiration du délai
de réponse ; qu’il y a décision implicite de rejet, au sens de l’article 107 alinéa 4 ; que la
requérante a soulevé contre cette décision une réclamation devant le CCPA par lettre en date
du 20 février 2002, donc dans le délai des trois mois, à compter de la décision implicite de
rejet ; que le CCPA qui devait statuer dans le délai d’un mois à compter de sa saisine n’a pas
répondu ; que son inertie ne permettant pas de satisfaire au reste des formalités
précontentieuses, il y a lieu de considérer que la requérante a observé l’agencement et les
délais de procédure précontentieuse et qu’elle a saisi la Cour, à bon droit.
L’argument de la Commission selon lequel la réclamation devant le CCPA devrait être
introduite dans un délai de trois mois et non quatre mois, à compter de la notification de la
décision de licenciement n’est pas fondé, au regard des dispositions des articles 107 alinéa 4
et 108 alinéa 2, applicables en l’espèce.
Par ailleurs, la carence du CCPA liée à un dysfonctionnement administratif des services de la
Commission, ne doit pas faire grief à la requérante dès lors que celle-ci a effectué les
formalités qui s’imposaient à ce niveau.
Les agents ne doivent pas pâtir de la mauvaise organisation du service qui porte atteinte à
leurs droits qu’ils tiennent des statuts (cf. Droit du contentieux administratif de René
CHAPUS — 7° édition n° 596 à 597 pages 421 et 422).
Il suit de là que les moyens tirés de la violation des textes susvisés ne sont pas fondés et
doivent être rejetés.
La défenderesse conteste également la compétence de la Cour à connaître simultanément d’un
recours en indemnité et de la légalité d’un acte communautaire. Elle demande par ailleurs à ce
que la Cour donne acte à la requérante de ce que celle-ci entend faire constater l’illégalité de
la décision de licenciement, avec les conséquences pécuniaires de droit.
La requête saisissant la Cour est manifestement un recours en indemnité pour licenciement
abusif.
La requérante n’y demande pas à la Cour d’apprécier la légalité d’un acte communautaire,
mais de juger que le licenciement est abusif et de lui accorder des dommages et intérêts.
Du reste, la défenderesse reconnaît elle-même dans son mémoire en duplique (dernier
paragraphe) que l’objet du recours n’est pas une appréciation de la légalité (annulation).
Par ailleurs, aucune disposition des statuts et du Règlement de procédure de la Cour n’interdit
à un justiciable de saisir la Cour d’une requête en annulation et en indemnisation, à fortiori, à
la Cour de l’apprécier.
Dès lors, les moyens invoqués sont dénués de fondement et doivent être écartés.
La défenderesse excipe enfin de l’irrecevabilité de l’action de la requérante, aux motifs que la
réclamation administrative préalable et le recours contentieux ne sont pas fondés sur une
identité de cause et d’objet.
La finalité du recours précontentieux est de provoquer l’intervention de l’AIPN en vue d’un
règlement amiable du litige. Il fixe le cadre du débat et permet à l’AIPN et au CCPA de
connaître les griefs que le recourant formule à l’encontre de la décision contestée.
Dans son recours préalable saisissant l’AIPN, la requérante a mis en cause la légalité de la
décision de licenciement, pour absence de motifs, et demandé sa réintégration dans ses
fonctions. Dans sa réclamation au CCPA, elle a soutenu ces moyens en invoquant les
dispositions des articles 76, 77, 86, 107, 108 du statut, puis les a développés dans sa requête ;
il y a manifestement un lien de causalité entre les arguments et moyens de la réclamation
administrative et ceux du recours contentieux.
Et sur le point de cette causalité qui conditionne la recevabilité du recours un arrêt de la Cour
de Justice des Communautés Européennes est assez édifiant :
« Est notamment recevable, la demande d’indemnisation formulée pour la première fois
devant la Cour, alors que la réclamation administrative ne visait que l’annulation de la
décision prétendument dommageable. Une telle demande d’annulation invite en effet,
l’autorité investie du pouvoir de nomination à remédier à l’illégalité invoquée et à prendre
toutes les mesures requises pour replacer le demandeur dans la situation qui était la sienne si
l’illégalité n’avait pas été commise. Ces mesures comprennent nécessairement la réparation
du préjudice résultant de l’illégalité de l’acte attaqué et que n’assurerait pas l’adoption d’un
nouvel acte non entaché d’irrégularité ».
(CJCE 14 février 1989, Bossi contre Commission des Communautés Européennes).
La Cour confirmait cette jurisprudence dans l’arrêt Aj Al Ag contre Commission
des Communautés Européennes, en date du 10 mars 1989 et ainsi libellé :
« Est notamment recevable, la demande d’indemnisation formulée pour la première fois
devant la Cour, alors que la réclamation administrative ne visait que l’annulation de la
décision prétendument dommageable, une telle demande d’annulation pouvant impliquer une
demande de réparation du préjudice causé par ladite décision ».
Il s’ensuit que l’exception d’irrecevabilité invoquée est infondée et doit être rejetée.
B. Sur les moyens de fond
La requérante justifie le caractère abusif du licenciement du fait que la décision attaquée a
violé les dispositions des articles 77, 76 et 86 du statut.
Elle fait valoir, qu’en application de ces textes, elle aurait dû être invitée à s’expliquer par
écrit, avant la révocation, sur les faits qui lui sont reprochés, et que l’AIPN aurait dû consulter
l’autorité chargée des ressources humaines, avant de prendre sa décision.
1) Sur le moyen pris de la violation de l’article 77
L'article 77 dispose que le fonctionnaire doit être entendu par écrit, avant toute sanction
disciplinaire, sauf si celle-ci est un avertissement.
La requérante, s’agissant d’un licenciement aurait dû alors, être entendue. Ses droits n’ont
donc pas été sauvegardés. Elle n’a pas été mise en mesure de présenter ses moyens de
défense.
La Cour de Justice des Communautés Européennes a toujours protégé les droits des
fonctionnaires à travers ses jurisprudences :
« Le respect des droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir à des
sanctions, notamment à des amendes ou astreintes, constitue un principe fondamental de droit
communautaire qui doit être observé, même s’il s’agit d’une procédure à caractère
administratif ; qu’en vertu de ce principe la Commission doit faire connaître aux parties
poursuivies par elle (pour abus de position dominante) leur point de vue au sujet des griefs
qu’elle a retenus à leur égard ».
(CICE arrêt du 13/2/1979, Affaire As Ae contre Commission, Recueil 1979, 1ère
partie, page 511, attendus n° 9 et 11).
« Les dispositions du statut ne permettent pas d’établir une distinction entre les moyens de
défense dont le fonctionnaire peut disposer au cours de la procédure disciplinaire, selon que cette procédure comporte ou non l’intervention du Conseil de discipline ou selon la gravité de
la sanction qui pourrait être infligée au fonctionnaire ».
(CIJCE arrêt du 17/12/1981, Affaire Demont contre Commission, Recueil 1981 page 3157).
2) Sur le moyen pris de la violation des articles 76 et 86
L'article 76 prescrit à l’AIPN de consulter, préalablement à toute sanction du second degré -
dont le licenciement-, l’autorité chargée des ressources humaines. Celle-ci n’a pas été
associée à l’élaboration de la décision et elle aurait pu faire des propositions si elle avait été
saisie.
La formalité instituée par l’article 76 est substantielle eu égard aux dispositions de l’article 86
qui énoncent que le licenciement doit respecter les règles prescrites à l’article 76 lorsqu’il est
envisagé à titre de sanction disciplinaire.
La défenderesse a omis les formalités prescrites par les articles 77 et 76 du statut ; autrement
dit elle a commis des irrégularités de forme dans l’ordonnancement juridique de la décision ;
mais ces vices suffisent-ils à engager sa responsabilité dans un recours en indemnité ? La
jurisprudence exige une faute. Y a t-il eu comportement fautif de la Commission ?
3) Sur la faute de la Commission tirée du défaut de motifs de la décision de
licenciement
La requérante a bénéficié d’une décision d’évacuation sanitaire (décision
n°232/2001/PC/UEMOA du 2/4/2001), sur l’hôpital COCHIN à PARIS, et qui fait prendre en
charge par la Commission, les consultations, examens, soins médicaux, indemnités
journalières pour deux (2) jours, et le transport par avion aller et retour, Ouagadougou-Par.s-
Aa.
L’intéressée devait être soumise à l’expertise d’un neurochirurgien (diagnostic du médecin
traitant de l'UEMOA Monsieur Aq Ab).
Un bulletin de situation fait ressortir que l’intéressée est entrée à l’hôpital COCHIN et en est
sortie le 21 avril 2001 ;
Une lettre du 25 avril 2001 du Docteur Caynard du service de Rhumatologie de l’hôpital
COCHIN, à un confrère (non dénommé) invite celui-ci à prendre en charge la requérante,
pour céphalées ;
Un certificat en date du 29 juin 2001 du Docteur Ak An du service de
Rhumatologie de l’hôpital COCHIN, établit que la requérante doit être soumise à la
consultation d’un neurologue ; il précise que « le neurologue de l'hôpital COCHIN, étant
empêché, elle a donc été dirigée sur un neurologue externe ».
Madame Ac A est alors reçue à l’hôpital FOCH, ainsi qu’en font foi un bulletin de
situation consultation externe en date du 14 mai 2001 et une fiche de rendez-vous avec le
docteur Af, pour le 26 avril 2001 à 16H30, « examen demandé : scanner cérébral ;
renseignements cliniques : céphalées chroniques ».
A l’issue de son traitement dans les hôpitaux de Paris, la requérante regagnait Aa
le 16 mai 2001. Le 30 mai 2001, elle demandait par écrit au Président de la Commission de
lui rembourser les indemnités et les frais de transport résultant de son séjour prolongé
consécutif aux consultations médicales.
La Commission prétend que cette réclamation est frauduleuse, mais elle ne caractérise pas
cette fraude.
La sanction infligée à la requérante du seul fait de la réclamation par celle-ci, des frais
occasionnés par des consultations médicales avérées, alors que les manœuvres frauduleuses
alléguées ne sont pas rapportées, que la prolongation du séjour constitutif d’une absence non
autorisée n’est pas en cause au regard des motifs de la décision de licenciement, que la
témérité de la réclamation n’est pas non plus prouvée, manque de pertinence ;
L’appréciation des faits par la défenderesse nous semble manifestement erronée ; cette erreur
devrait priver la décision de fondement juridique ; elle constitue dans la jurisprudence de la
Cour de Justice des Communautés Européennes, un défaut de motivation (cf. CJCE 5/4/1984
Affaire Ai X contre Am Ao — Recueil 1984-4 paragraphe 16).
Le défaut de motivation, faut-il le rappeler, est également censuré dans le droit français dont
nos divers droits nationaux -source de droit communautaire- sont inspirés.
A cet égard, la Cour de Cassation de la France a jugé qu’une appréciation erronée des faits est
de nature à invalider la décision judiciaire (cf. Boré Cassation civile, édition Sirey 1988 page
439, n°1325) et qu’il ne saurait lui être dénié le pouvoir de contrôle de la qualification
juridique des faits de faute lourde, de faute grave ou de faute inexcusable, notamment en
matière sociale (cf. ouvrage précité page 481, n°1474).
Il résulte des considérations qui précèdent que le licenciement est infondé ; il demeure donc
abusif.
En résumé nous concluons que le recours est recevable et bien fondé.
En ce qui concerne les dépens, ils doivent être mis à la charge de l’'UEMOA, par application
de l’article 61 du Règlement de procédure de la Cour.
Le Premier Avocat Général :
Malet DIAKITE ARRET DE LA COUR
25 juin 2003
Entre
Madame Ac A
Et
La Commission de 'UEMOA
La Cour composée de M. Yves D. YEHOUESSI, Président ; M. Daniel Lopes FERREIRA,
Juge rapporteur ; Mme Ramata FOFANA, Juge ; M. Malet DIAKITE, Premier Avocat
Général ; M. Raphaël P. OUATTARA, Greffier ;
rend le présent arrêt :
Considérant que par requête en date du 19 août 2002, enregistrée au Greffe de la Cour de
Justice de l’UEMOA le 20 août 2002 sous le n° 03/ 2002, Madame Ac A, ancienne
secrétaire dactylographe à la Présidence de la Commission de l’UEMOA, par l’entremise de
ses conseils Mes Moumouny Kopiho et Mamadou Coulibaly, Avocats à la Cour de
Aa, Ap Ar, a introduit un recours contre la Décision n°449-
2001/PC/UEMOA en date du 28 juin 2001 par laquelle le Président de la Commission de
l’UEMOA l’a licenciée de ses fonctions, pour faute grave constituée par des manœuvres
tendant à bénéficier d’avantages non justifiés et a sollicité le paiement de la somme de
100.000.000 francs ;
En fait
I. FAITS ET PROCEDURE
La requérante avait été recrutée en qualité de secrétaire dactylographe à la Commission de
l’UEMOA, par Décision n° 016/2000/PC/UEMOÀA, du 14 janvier 2000.
Par Décision n° 449-2001/PC/UEMOA du 28 juin 2001, Madame Ac A a été
licenciée pour faute grave constituée par des manœuvres tendant à bénéficier d’avantages non
justifiés.
Le 06 août 2001, se fondant sur l’article 107 du Règlement n° 01/95/CM du 1” août 1995
portant Statut des fonctionnaires de l'UEMOA, Madame Ac A a introduit en vain
auprès du Président de la Commission un recours gracieux en annulation de la Décision n°
449-2001/PC/UEMOA portant son licenciement.
Elle saisissait le 20 février 2002, d’une réclamation le Comité Consultatif Paritaire
d’Arbitrage qui ne donna aucune suite à sa demande ; c’est pourquoi elle a adressé un recours
à la Cour de Justice de l'UEMOA.
Le recours a été notifié le 04 septembre 2002 au Président de la Commission qui, par lettres
n° 3849/PC/CI et n° 3850/PC/CI du 13 septembre 2002, informa la Cour respectivement de la
désignation de son agent en la personne de M. Eugène Kpota, Conseiller juridique de la
Commission, et de la constitution de Maître Harouna Sawadogo, Avocat à la Cour, pour
représenter M. Ah devant la Cour.
IL. CONCLUSIONS DES PARTIES
La requérante demande à ce qu’il plaise à la Cour :
- déclarer son recours recevable en la forme ;
- au fond, déclarer son licenciement abusif et condamner la Commission à lui payer une
indemnité de cent ( 100 000 000) millions de francs CFA en réparation des préjudices
professionnel, matériel et moral qu’elle a subis.
La défenderesse conclut à ce qu’il plaise à la cour :
en la forme
au principal
- dire et juger que le recours introduit le 20 août 2002 par Madame Ac A n’a pas
satisfait aux exigences des articles 107, 108 et 112 du Règlement n° 01/95/CM portant
Statut des fonctionnaires de l’'UEMOA ;
en conséquence
- déclarer ledit recours irrecevable ;
subsidiairement
- donner acte à la requérante de ce qu’elle sollicite de la Cour de céans de constater
l’illégalité de la décision attaquée et d’en tirer en même temps les conséquences
pécuniaires par la condamnation de la Commission au paiement d’indemnités
réparatrices de préjudices subis ;
en conséquence
- déclarer ledit recours irrecevable pour défaut de fondement ;
au fond, subsidiairement
- rejeter les moyens invoqués par la requérante ;
en conséquence
- la débouter de tous ses chefs de demande comme étant mal fondés ;
- la condamner aux dépens.
IIL. MOYENS ET ARGUMENTS DES PARTIES
1. Sur la recevabilité
a) Moyens et arguments de la Commission de l'UEMOA
La Commission de l'UEMOA dans son mémoire en défense en date du 03 octobre 2002, a
conclu à l’irrecevabilité de la requête de Madame Ac A. en faisant valoir :
- qu’en invoquant les dispositions des articles 107, 108 et 112 du Règlement
n°01/95/CM portant Statut des fonctionnaires de l’UEMOA, la demanderesse a fait
une mauvaise application des dispositions sus-visées ; le recours préalable obligatoire
imposé en l’espèce étant celui édicté à l’article 108 du Règlement n°01/95/CM et non
celui de l’article 107 malencontreusement visé par la demanderesse ;
- que le recours introduit visait à rapporter la Décision de caractère individuel n°449-
2001/PC/UEMOA ;
- qu’il est dès lors évident que le recours préalable obligatoire qui sied en l’espèce est
celui prévu à l’article 108 du Règlement n°01/95/CM et qui concerne les réclamations
visant un acte de l’autorité investie du pouvoir de nomination ;
- qu’en conséquence, la prétendue saisine du Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage
quatre mois après la notification de la décision de licenciement est intervenue hors
délai.
Toujours selon la Commission, le recours préalable à la saisine directe du Comité Consultatif
Paritaire d’Arbitrage avant celle de l’autorité hiérarchique, ne peut durer plus de sept mois si
l’on additionne tous les délais. En l’espèce, ce délai de sept mois expirait le 28 février 2002.
Elle fait en outre remarquer que l’article 112 du Règlement n°01/95/CM a imparti un délai de
deux mois à compter de la date d’expiration du délai de réponse, lorsque le recours porte sur
une décision implicite de rejet. La requérante avait alors jusqu’au 28 avril 2002 pour
introduire son recours. En ayant fait son recours le 20 août 2002, Madame Ac A a encouru la forclusion en agissant hors délai ; ce qui entraîne l’irrecevabilité du présent
b) Moyens et arguments de la requérante
La requérante dans son mémoire en réponse du 12 novembre 2002 soutient que c’est à bon
droit qu’elle a entrepris le recours préalable imposé à l’article 107 du Règlement n°
01/95/CM.
Toujours selon la requérante, ce recours préalable trouve son fondement dans les
dispositions de l’article 76 du statut précité, l’autorité habilitée à prononcer les sanctions du
second degré et investie du pouvoir de nomination doit logiquement être compétente pour
connaître d’un recours gracieux par voie hiérarchique.
Elle ajoute qu’en tout état de cause, les dispositions de l’article 107 ne prévoient pas une
procédure autre que celle qui a été suivie en prescrivant que « tout fonctionnaire peut saisir,
en respectant la voie hiérarchique, l’autorité investie du pouvoir de nomination, d’une requête
l’invitant à prendre, à son égard, une décision ».
Elle estime que l’autorité investie du pouvoir de nomination prend sa décision, après avoir, le
cas échéant, recueilli l’avis du Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage. Elle notifie sa
décision motivée au fonctionnaire intéressé, dans un délai maximum de quatre mois courant à
compter du jour de l'introduction de la demande ; à l’expiration de ce délai, le silence de
l’autorité investie du pouvoir de nomination vaut décision implicite de rejet, susceptible de
donner lieu à une réclamation, au sens de l’article 108 du Règlement n° 01/95/CM.
Elle conclut en conséquence au rejet des moyens de la Commission et à la recevabilité de son
recours.
c) Réponse de la Commission
Par mémoire en duplique en date du 26 novembre 2002, la Commission de l'UEMOA
soutient que l’article 107 du Règlement n°01/95/CM/UEMOA du 1°" août 1995, ne concerne
que le cas du fonctionnaire qui n’a pas de décision et qui veut en susciter.
Elle ajoute que le recours gracieux introduit par la requérante le 06 août 2001 visait à
rapporter la Décision de licenciement n° 449/2001/PC/UEMOA du 28 juin 2001, et ne
pouvait valablement que s’adresser au Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage.
Qu’en saisissant le Président de la Commission de l’'UEMOA, puis le Comité Consultatif
Paritaire d’Arbitrage d’une réclamation visant à rapporter l’acte de l’autorité investie du
pouvoir de nomination, la requérante a opéré un double emploi du recours gracieux, ayant
pour conséquence de fausser le point de départ du délai du recours contentieux.
Elle fait encore remarquer que le recours préalable introduit par la demanderesse le 06 août
2001 auprès du Président de la Commission de l’'UEMOA concerne uniquement l’annulation
de la décision de licenciement. Ni le Président de la Commission de l'UEMOA ni le Comité
Consultatif Paritaire d’Arbitrage n° ont été saisis d’un recours gracieux en indemnisation.
Enfin la Commission souligne que ces recours gracieux, préalables à toute saisine régulière de
la Cour, n’ayant porté sur un quelconque paiement de somme d’argent à titre de réparation de
préjudices subis, l’action en indemnisation introduite par la requérante doit être déclarée
irrecevable.
2. Au fond
La requérante estime que la Décision n°449-2001/PC/UEMOA en date du 28 juin 2001 du
Président de la Commission de l'UEMOA mettant fin à ses fonctions, à titre de sanction
disciplinaire, a été prise en violation de l’article 77 du Règlement n° 01/95/CM du ''" août
1995 portant Statut des Fonctionnaires de l'UEMOA , parce qu’elle n°’ a pas été invitée à
s’expliquer par écrit préalablement sur les faits qui lui sont reprochés.
Elle fait observer que son licenciement, sanction disciplinaire, n’a pas respecté les
dispositions des articles 86 et 76 du règlement précité.
Elle précise que la sanction prise à son encontre est du second degré et qu’aux termes dudit
article 76 « les sanctions du second degré sont prononcées par l’autorité investie du pouvoir
de nomination, sur proposition de l’autorité chargée de la gestion des ressources humaines et
après avis du Comité Consultatif de Discipline ».
Elle souligne que la Décision n° 449-2001/PC/UEMOA portant son licenciement vise l’avis
du Comité Consultatif de Discipline mais nullement une quelconque proposition de l’autorité
chargée de la gestion des ressources humaines ; que cette proposition n’a jamais été faite.
Elle estime que la décision relative à son licenciement est entachée de vices de forme, qu’elle
est irrégulière et abusive, raison pour laquelle aux termes de l’article 107 du règlement n°
01/95/CM elle a saisi, par requête en date du 06 août 2002, l’autorité investie du pouvoir de
nomination aux fins de rapporter la Décision n° 449/2001 portant son licenciement.
Toujours selon la requérante, l’autorité investie du pouvoir de nomination n’a donné aucune
suite à sa demande quatre mois après son introduction ; ce qui équivaut à une décision
implicite de rejet au sens de l’alinéa 4 dudit article 107.
La requérante fait remarquer que conformément à l’alinéa 2 de l’article précité, elle a saisi en
vain tout en respectant les forme et délai requis, le Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage
d’une réclamation, après expiration du délai de réponse, pour voir ordonner le sursis à
exécution de la Décision n° 449-2001/PC/UEMOA portant son licenciement.
Pour toutes ces raisons invoquées, Madame Ac A demande à la Cour de déclarer son
licenciement abusif et de condamner la Commission de l'UEMOA à lui payer la somme de
cent millions (100.000.000) de francs CFA à titre de réparation des graves préjudices
professionnel, matériel et moral qu’elle a subis du fait de ce licenciement abusif.
Quant à la Commission de l'UEMOA, elle fait observer que le licenciement de Madame
Ac A n’étant pas annulé ni annulable sur le fondement du recours en indemnisation, le
préjudice causé à la requérante ne peut être fondé sur les chefs de demande tels qu’elle les a
présentés, mais sur le préjudice né exclusivement du dysfonctionnement administratif de la
Commission.
Elle précise que ni l’absence de proposition de sanction de l’autorité chargée de la gestion des
ressources humaines ni l’absence d’explication écrite de la demanderesse ne sauraient être
assimilables à un fonctionnement défectueux des organes de l’Union susceptible de causer
préjudice.
Elle ajoute que la prise de la sanction de licenciement a été précédée d’un conseil de
discipline au cours duquel la requérante a fourni les explications nécessaires aux faits à elle
reprochés.
Toujours selon la Commission, en sa qualité de premier responsable chargé de la gestion du
personnel de l’Union, le Président de la Commission de l’'UEMOA n’a commis aucune
irrégularité assimilable à un dysfonctionnement des organes de l’Union en prenant la Décision
n°449-2001/PC/UEMOA en dehors de toute proposition de « l’autorité chargée de la gestion
des ressources humaines ».
Enfin, la Commission estime qu’en tout état de cause, le recours introduit par la demanderesse
n’ayant pas pour objet d’annuler la Décision n°449-2001/PC/UEMOA, les griefs soulevés tant
dans sa requête que dans son mémoire en réplique demeurent totalement inopérants en
l’espèce.
En droit
Par requête déposée au greffe de la Cour le 20 août 2002, Mme Ac A, ancienne
secrétaire dactylographe à la Présidence de la Commission de l’'UEMOÀA, a introduit un
recours visant, d’une part, à faire déclarer son licenciement abusif et, d’autre part, la
condamnation de cette dernière à lui payer la somme de cent millions (100 000 000 F) en
réparation des préjudices professionnel, matériel et moral que ce licenciement lui aurait causé.
Sur la forme
La Commission de l'UEMOA avance trois moyens à l’appui de son exception d’irrecevabilité
du recours de la dame A. Le premier moyen est tiré selon la Commission de la violation
des dispositions des articles 107, 108 et 112 du Statut ; le deuxième moyen de l’incompétence
de la Cour de céans à connaître simultanément d’un recours en indemnisation et d’un recours
en appréciation de la légalité d’un acte communautaire ; le troisième moyen est tiré du défaut
d’identité de cause et d’objet entre la réclamation administrative et le recours contentieux.
Sur le premier moyen tiré de la violation des dispositions des articles 107, 108 et 112 du
Statut des fonctionnaires de l'UEMOA.
La Commission soutient que le recours de la dame A n’a pas satisfait aux exigences des
articles 107, 108 et 112 du Règlement n° 01/95/CM portant Statut des fonctionnaires de
l’UEMOA. Elle ajoute que la prétendue saisine du Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage
quatre mois après la notification de la décision de licenciement est intervenue hors délai. Elle
précise que la requérante avait jusqu’au 28 avril 2001 pour introduire son recours et qu’en
saisissant la Cour le 20 août 2002, elle a agi hors délai. Elle déclare enfin que ni le Comité
Consultatif Paritaire d’Arbitrage ni le Président de la Commission n’ont été saisis d’un
recours gracieux en indemnisation.
La requérante qui conteste l’ensemble des moyens soulevés par la Commission et qui conclut
à la recevabilité de son recours, fait valoir qu’elle a légitimement et préalablement exercé son
recours gracieux par voie hiérarchique en s’adressant à l’autorité investie du pouvoir de
nomination d’une part et d’autre part au Comité Consultatif Paritaire d’Arbitrage, dans les
délais de la loi.
Il est constant que suite à la décision de licenciement intervenue le 28 juin 2001, la dame
A en se fondant d’abord à bon droit sur les dispositions de l’article 107 alinéa 1 du statut,
a régulièrement saisi le Président de la Commission de l'UEMOA, autorité investie du
pouvoir de nomination, d’un recours administratif en date du 06 août 2001, pour solliciter
l’annulation de ladite décision pour absence de motif, ainsi que sa réhabilitation
administrative.
L’autorité investie du pouvoir de nomination ne donna aucune suite à la requête de dame
A dans le délai de quatre mois courant du 06 août 2001 au 06 décembre 2001, date
d’expiration du délai de réponse.
Face à cette décision implicite de rejet, la dame A, par autre requête en date du 20 février
2002 saisissait, régulièrement, conformément aux dispositions de l’article 108 alinéa 1 du
Statut des fonctionnaires de l’'UEMOA dans le délai de trois mois, le Président du Comité
Consultatif Paritaire d’Arbitrage de l’'UEMOA pour solliciter le sursis à exécution de la
décision portant son licenciement.
Ledit Comité qui devait statuer dans le délai d’un mois à compter de sa saisine ne réagit pas et
n’émet aucun avis à destination de l’autorité investie du pouvoir de nomination qui à son tour
disposait d’un délai maximum de trois mois pour notifier sa décision par écrit à la requérante.
Devant l’inertie aussi bien de l’autorité investie du pouvoir de nomination que du Comité
Consultatif Paritaire d’Arbitrage, la requérante qui avait exécuté correctement toutes les
formalités s’imposant à elle à son niveau, avait toute la latitude de saisir la Cour, après la
décision implicite de rejet, dans le délai compris entre le 20 juin 2002 et le 20 août 2002.
C’est ce qu’elle a fait.
La Cour de céans ayant été régulièrement saisie à cette date du 20 août 2002, c’est en vain que
la Commission tente de faire plaider que la requérante a agi hors délai.
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation des articles 107, et 108
du Statut des fonctionnaires de l'UEMOA
Sur le moyen tiré de l’incompétence de la Cour à connaître simultanément d’un recours en
indemnisation et d’un recours en appréciation de légalité.
La Commission de l’UEMOA soutient que la Cour de céans ne peut connaître simultanément
d’un recours en indemnisation et d’un recours en appréciation de la légalité d’un acte
communautaire.
La requérante souligne que l’article 112 du Règlement n°01/95/CM du ''" août 1995 ne limite
nullement le type de demandes dont les agents de l'UEMOA peuvent saisir la Cour. Elle
précise qu’elle n’a jamais saisi la Cour d’un recours pour excès de pouvoir.
Il ressort tant de l’examen de la requête que des pièces versées aux débats par la requérante,
que cette dernière n’a jamais entendu saisir la Cour de céans aussi bien d’un recours en
appréciation de légalité que d’un recours en indemnisation.
Même si tel était le cas, rien n° interdit à la requérante de saisir la Cour d’une requête à la fois
en appréciation de légalité et en indemnisation et il lui était même loisible, en raison de
l’autonomie des différentes voies de droit, de choisir soit le recours en annulation, soit le
recours en indemnisation.
Dans ces conditions le moyen tiré de l’incompétence de la Cour de connaître simultanément
d’un double recours doit être rejeté, la Cour étant toujours compétente.
Sur le moyen tiré du défaut d’identité d’objet et de cause de la réclamation administrative et
du recours contentieux.
La Commission de l’'UEMOA fait valoir qu’il n’existe aucune identité de cause et d’objet
entre les réclamations administratives et le recours contentieux de la dame A.
La requérante demande à la Cour de céans de passer sous silence cet argument de la
Commission dénué de tout fondement en droit.
Il est constant que la dame A a aussi bien dans ses recours préalables que dans son
recours contentieux, développé les mêmes moyens. Il s’y ajoute que son recours contentieux
ne modifie ni la cause ni l’objet de sa réclamation préalable.
Par ailleurs il est de règle qu’est recevable la demande d’indemnisation formulée pour la
première fois devant la Cour, alors que la réclamation administrative ne visait que
l’annulation de la décision prétendument dommageable, une telle demande d’annulation
pouvant impliquer une demande de réparation du préjudice causé par ladite décision.
En conséquence, il convient de rejeter le grief tiré du défaut d’identité de cause et d’objet
entre les réclamations et le recours contentieux.
Il découle de tout ce qui précède que l’ensemble des trois moyens doivent être rejetés et le
recours contentieux de la dame A, déclaré recevable en la forme.
Au fond
Sur la demande en réparation de préjudices.
La requérante soutient que la décision mettant fin à ses fonctions, à titre de sanction
disciplinaire, a été prise en violation de l’article 77 du Règlement portant Statut des
Fonctionnaires. Elle ajoute qu’elle n’a jamais été invitée à s’expliquer par écrit préalablement,
sur les faits reprochés.
Toujours selon la requérante son licenciement n’a pas respecté les dispositions des articles 86 et
76 du Règlement précité. Elle estime que la décision portant son licenciement est entachée de
vices de forme ; qu’elle est irrégulière et abusive.
Pour toutes ces raisons la requérante demande la condamnation de la Commission de
l’UEMOA au paiement de la somme de 100.000.000 F à titre de dommages-intérêts pour les
préjudices professionnel, matériel et moral subis du fait de la décision du Président de la
Commission de l’'UEMOA.
La Commission de l'UEMOA qui conclut au débouté de la demanderesse fait observer que ni
l’absence de proposition de sanction de l’autorité chargée de la gestion des ressources
humaines, ni l’absence d’explication écrite de la part de la requérante ne sauraient être
assimilables à un fonctionnement défectueux des organes de l’'UEMOA susceptibles de causer
préjudice.
Elle précise que la prise de sanction a été précédée d’un conseil de discipline au cours duquel la
requérante a fourni les explications nécessaires.
Toujours selon la Commission, en sa qualité de premier responsable chargé de la gestion du
personnel de l’Union, le Président de la Commission n’a commis aucune irrégularité
assimilable à un dysfonctionnement des organes en prenant la décision de licenciement en
dehors de toute proposition de l’autorité chargée de la gestion des ressources humaines.
Il est de règle que l’engagement de la responsabilité de la Commission suppose la réunion d’un
ensemble de conditions en ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché à l’institution,
la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice
invoqué.
La Commission de l’UEMOA a-t-elle commis une illégalité ?
En tout cas aux termes de l’article 77 du Règlement « le fonctionnaire doit être entendu par
écrit, avant toute sanction disciplinaire, sauf si celle-ci est un avertissement ».
A cet égard « l’article 76 prescrit à l’autorité investie du pouvoir de nomination de consulter
préalablement à toute sanction du second degré l'autorité chargée des ressources humaines ».
Il en résulte que cette formalité instituée par le texte communautaire, est substantielle eu égard
aux dispositions de l’article 86 qui énoncent que « le licenciement doit respecter les règles
prescrites à l’article 76 lorsqu’il est envisagé à titre de sanction disciplinaire ».
En tout état de cause, la Commission qui reconnaît n’avoir pas respecté ces dispositions qui
s’imposaient à elle, a commis un ensemble d’irrégularités susceptibles d’engager sa
responsabilité à l’égard de la requérante.
En outre, la Commission qui prétend que la réclamation d’avantages non justifiés de la
requérante est frauduleuse, n’a pas caractérisé cette fraude.
En effet, la sanction infligée à la requérante du seul fait de la réclamation par celle-ci, des frais
occasionnés par des consultations médicales avérées, alors que les manœuvres frauduleuses
alléguées ne sont pas rapportées, la prolongation du séjour constitutif d’une absence non
autorisée n’étant pas en cause au regard des motifs de la décision de licenciement, celle-ci n’est
pas justifiée.
Le licenciement est donc abusif et la réclamation de la requérante bien fondée.
Dans ce contexte, la condition relative à l’existence d’un comportement fautif de la part de la
Commission, étant suffisamment établie et l’inexistence d’aucune cause d’atténuation ou
d’exonération de la responsabilité de la Commission s’y ajoutant, la décision attaquée est
génératrice du dommage invoqué par la requérante ; il y a lieu de faire droit à sa demande en
réparation des préjudices subis par elle.
Cependant, la somme de 100.000.000 F demandée est excessive eu égard au salaire que
percevait la requérante ; la Cour dispose d’éléments suffisants pour ramener le montant à
20.000.000 F.
En conséquence, il convient de condamner la Commission de l’'UEMOA à payer à la dame
A, la somme de vingt millions (20.000.000) F à titre de dommages et intérêts toutes causes
de préjudices confondues.
Sur les dépens
S’agissant d’un litige entre l’Union et son agent, il y a lieu, conformément aux dispositions de
l’article 61 du Règlement de procédure, de mettre les dépens à la charge de l'UEMOA.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de fonction publique
communautaire ;
Déclare et arrête :
- le recours est recevable ;
- le licenciement est abusif ;
- condamne en conséquence la Commission de l’UEMOA à payer à la dame Ac A
la somme de vingt millions (20 000 000) F à titre de dommages-intérêts toutes causes de
préjudice confondues ;
- condamne la Commission de l’'UEMOA aux dépens.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 03/2002
Date de la décision : 25/06/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;uemoa;cour.justice;arret;2003-06-25;03.2002 ?
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