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01/02/2012 | FRANCE | N°09/14761

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 01 février 2012, 09/14761


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 FEVRIER 2012



N° 2012/44













Rôle N° 09/14761







[T] [C]





C/



ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG - EFS

GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES

SA AXA FRANCE IARD

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES DES BOUCHES DU RHONE



OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MECIAUX - ONIAM











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Grosse délivrée

le :

à :

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Mai 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 02/12584.





APPELANTE



Mademoiselle [T] [C...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 FEVRIER 2012

N° 2012/44

Rôle N° 09/14761

[T] [C]

C/

ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG - EFS

GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES

SA AXA FRANCE IARD

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES DES BOUCHES DU RHONE

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MECIAUX - ONIAM

Grosse délivrée

le :

à :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Mai 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 02/12584.

APPELANTE

Mademoiselle [T] [C]

née le [Date naissance 4] 1962 à [Localité 11], demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

assistée de Me Frédéric ORTEGA, avocat au barreau de NIMES

INTIMES

ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG - EFS prise en la personne de son représentant légal en exercice, [Adresse 2]

représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour,

assisté de Me Virginie PIN, avocat au barreau de TOULON

GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES RCS PARIS B 398 972 901 prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, [Localité 7]

représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour,

assistée de Me Anne JOURNET, avocat au barreau de MARSEILLE

SA AXA FRANCE IARD RCS PARIS N° 722 057 460 poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la Cour,

assistée de la SCP DAUMAS - WILSON - BERGE-ROSSI (ASS), avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Julien SUBE, avocat au barreau de MARSEILLE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BDR prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, [Adresse 5]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE

PARTIE INTERVENANTE

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MECIAUX , DES AFFECTIONS IATROGENES ET INFECTIONS NOSOCOMIALES - ONIAM - prise en la personne de son directeur, [Adresse 6]

représentée par la SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avoués à la Cour, assistée de Me Patrick DE LA GRANCE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Camille PARPEX, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Décembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Brigitte VANNIER, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Brigitte VANNIER, Présidente

Madame Laure BOURREL, Conseiller

Madame Patricia TOURNIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Février 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Février 2012,

Signé par Mme Brigitte VANNIER, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

I - Exposé du litige :

Le 8 juin 1987 mademoiselle [T] [C] a été victime d'un accident de la circulation en qualité de passagère transportée du véhicule de monsieur [M] [J] assuré auprès de la société d'assurances mutuelles la Garantie Mutuelle des Fonctionnaire (la GMF).

Très grièvement blessée mademoiselle [C] a été plusieurs fois opérée.

A l'occasion de ses opérations des poches de sang lui ont été transfusées.

Un bilan sanguin réalisé au mois de mars 1992 a révélé qu'elle avait été contaminée par le virus de l'hépatite C.

Par jugement du 24 juin 2004 le tribunal de grande instance de Marseille a essentiellement :

- déclaré l'Etablissement français du sang (l'EFS) responsable de la contamination de mademoiselle [C] par le virus de l'hépatite C

- réservé les droits de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône (la CPAM)

- ordonné une expertise médicale

- condamné l'EFS à payer à mademoiselle [C] une provision de 4.000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel.

Par acte du 21 octobre 2004 l'EFS a appelé son assureur la société AXA France IARD (la société AXA) en garantie et par acte du 21 novembre 2007 il a exercé son action récursoire contre la GMF, assureur de monsieur [J] pris en sa qualité de coobligé fautif.

Après jonction de ces instances le tribunal, par jugement du 7 mai 2009 assorti de l'exécution provisoire, a :

- condamné l'EFS à payer à la CPAM la somme de 28.783,33 € au titre de ses frais de soins et d'hospitalisations exposés pour le compte de mademoiselle [C] au titre de sa contamination par le virus de l'hépatite C avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2005

- réservé les droits de la CPAM au remboursement de toutes les autres sommes qui peuvent ou pourraient lui être dues

- condamné l'EFS à payer à mademoiselle [C] la somme de 9.440 € en réparation de son préjudice corporel subi du fait de la contamination par le virus de l'hépatite C

- condamné la société AXA à garantir l'EFS dans les limites de son plafond de garantie soit 381.122,54 € pour l'année 1987

- condamné la GMF à garantir l'EFS de la moitié de l'ensemble des condamnations prononcées contre lui dans le cadre de la présente procédure

- condamné l'EFS à payer à mademoiselle [C] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté les plus amples demandes

- condamné l'EFS et la société AXA aux dépens.

Mademoiselle [C] a interjeté appel de ce jugement.

Elle demande à la cour, au vu du jugement du 24 juin 2004, de dire que l'EFS est responsable de sa contamination par le virus de l'hépatite C et d'augmenter le montant de son indemnisation en condamnant l'EFS et la compagnie AXA solidairement à lui payer les sommes suivantes :

° incapacité totale de travail : 750 €

° incapacité temporaire partielle : 13.500 €

° pretium doloris : 20.000 €

° préjudice d'agrément, gêne dans la vie courante et préjudice sexuel : 20.000 €

° préjudice spécifique de contamination : 20 000 €.

Elle sollicite également leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 5.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et leur condamnation aux dépens.

La CPAM demande condamnation de l'ONIAM, de l'EFS et de la société AXA ou de l'un d'eux à lui payer la somme de 28.738,33 €, montant de ses dépenses de santé.

L'EFS qui forme appel incident sauf en ce que le premier juge a décidé que la société AXA lui devait sa garantie, demande à la cour de juger que l'ONIAM lui est substitué dans son

obligation d'indemniser le préjudice de mademoiselle [C], en application de l'article 67 IV de la loi n°2008-1330 du 17 décembre 2008 et de l'article L.1221-14 du code de la santé publique et, en conséquence, de rejeter les demandes formées contre lui par mademoiselle [C] et par la CPAM.

Il demande également qu'il soit jugé que la société AXA devra prendre en charge les condamnations éventuellement prononcées.

Faisant siennes les conclusions de l'ONIAM, il demande à la cour de dire que la GMF prendra seule en charge les condamnations éventuellement prononcées.

Subsidiairement il conclut à un partage de prise en charge entre l'ONIAM et la GMF.

La société AXA s'associe aux écritures de son assuré et demande acte de ce que son plafond de garantie pour l'année 2007, dont le tribunal a exactement reconnu l'existence, est atteint, de sorte que sa garantie ne peut jouer.

L'ONIAM, intervenu volontairement à l'instance en tant que substitué dans l'obligation à indemnisation de l'EFS, demande à la cour de dire qu'intervenant au titre de la solidarité nationale, de façon subsidiaire, il ne peut être jugé responsable du dommage de mademoiselle [C] et ne peut donc recevoir la qualification de co-auteur aux côtés du tiers responsable monsieur [J] et d'en conclure qu'il appartient à la GMF seule, assureur du tiers responsable, de supporter l'entière réparation des conséquences dommageables de la contamination de mademoiselle [C] par le virus de l'hépatite C.

A titre subsidiaire il demande à la cour de répartir par moitié la charge définitive de la dette en considération de l'importance des fautes de monsieur [J].

Il sollicite également la réduction des sommes qui ont été allouées à mademoiselle [C], qu'il propose de fixer comme suit :

° déficit fonctionnel temporaire total : 144 €

° déficit fonctionnel temporaire partiel : 2.700 €

° souffrances endurées : 4.000 €.

Il approuve le premier juge d'avoir rejeté les prétentions de mademoiselle [C] au titre des postes du préjudice d'agrément, du préjudice sexuel et du préjudice spécifique de contamination .

Il demande à la cour de constater que la CPAM ne justifie pas que les dépenses de santé actuelles dont elle demande remboursement, à l'exception des dépenses d'hospitalisations, sont en relation avec la seule pathologie hépatique de mademoiselle [C].

La GMF qui fait valoir que la circonstance que l'ONIAM est substitué à l'EFS dans son obligation à réparation du préjudice de mademoiselle [C] ne fait pas obstacle à la détermination de la part de responsabilité de chacun des co-responsables, l'EFS et monsieur [J], demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a considéré qu'elle devait supporter pour moitié la charge définitive de l'indemnisation de mademoiselle [C] et lui demande de dire que la transfusion sanguine a eu un rôle prépondérant dans la contamination de sorte que la part de responsabilité de son assuré ne saurait excéder 25%.

S'agissant de l'évaluation du préjudice de mademoiselle [C], elle demande que la somme que le tribunal lui a allouée au titre de son pretium doloris soit réduite à 5.000 €.

Pour le surplus elle conclut à la confirmation du jugement, demandant à la cour de juger que mademoiselle [C], qui est guérie de son hépatite C, ne peut arguer de l'existence d'un préjudice spécifique de contamination qui en tout état de cause ne peut être cumulé avec une réparation au titre des souffrances endurées et de rejeter la demande qu'elle formule au titre de son préjudice sexuel .

Elle sollicite de tout succombant la condamnation au paiement d'une indemnité de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision critiquée et aux dernières conclusions déposées par les parties (par mademoiselle [C] le 6 septembre 2011, par la CPAM le 25 janvier 2011, par l'EFS le 2 décembre 2011, par la société AXA le 13 juillet 2010, par l'ONIAM le 29 novembre 2011, par la GMF le 8 décembre 2011).

II - Motifs :

Sur l'obligation à indemnisation

Il est définitivement jugé par le jugement du 24 juin 2004 ayant force de chose jugée que l'EFS est responsable de la contamination de mademoiselle [C] par le virus de l'hépatite C.

Cependant, en application de l'article 67 IV de la loi n°2008-1330 du 17 décembre 2008, les victimes contaminées par le virus de l'hépatite C suite à une transfusion de produits sanguins ou à une injection de produits dérivés du sang sont indemnisées par l'ONIAM aux lieu et place de l'EFS, dans les contentieux en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision irrévocable à la date du 1er juin 2010, date de l'entrée en vigueur de ce texte.

Dans ces contentieux en cours cette substitution s'opère tant au bénéfice des caisses que des victimes.

De là il découle que l'EFS est bien fondé à soutenir que mademoiselle [C] et la CPAM, subrogée dans les droits de son assurée, ne sont pas fondées à demander sa condamnation, fut-ce conjointement avec celle de l'ONIAM.

En l'état de la déclaration de responsabilité de l'EFS, mais sachant que la contamination de mademoiselle [C] est consécutive à des transfusions rendues nécessaires par l'accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule de monsieur [J], la circonstance que la loi, pour des considérations de solidarité nationale, substitue l'ONIAM à l'EFS dans son obligation à réparation, ne peut avoir pour effet de faire obstacle à la détermination, à proportion des fautes respectives des co-responables, de la charge finale de l'indemnisation de la victime.

La seule conséquence de la loi est que la réparation du dommage de mademoiselle [C] imputable à l'EFS sera mise à la charge de l'ONIAM, sans qu'il soit possible de prononcer de condamnation in solidum entre l'ONIAM, qui n'est pas co-responsable, et la GMF, assureur du co-responsable.

Il ressort des procès-verbaux établis ensuite de l'accident de la circulation du 8 juin 1987 que monsieur [J], conducteur du véhicule dans lequel mademoiselle [C] était passagère transportée, qui circulait sur la route nationale 113 à double sens de circulation dans le sens [Localité 12]-[Localité 8], a entrepris d'effectuer un demi-tour pour prendre la direction de [Localité 9]-[Localité 10]. Pour ce faire il a traversé la voie de gauche de la RN 113 pour atteindre le terre-plein central séparant cette route de la voie rapide allant en direction de [Localité 9]-[Localité 10] qu'il voulait rejoindre.

Selon les militaires de la gendarmerie il n'a pas averti de son changement de direction, ne s'est pas assuré qu'il pouvait le faire sans danger, n'a pas respecté la priorité due au véhicule qui circulait dans le sens inverse, [Localité 8]-[Localité 12] et qui l'a percuté au moment où il abordait le terre plein central.

Sont ainsi caractérisées la manoeuvre dangereuse et les différentes fautes de conduite qui ont été à l'origine de l'accident ayant rendu nécessaires les transfusions causes de la contamination de mademoiselle [C].

Compte tenu de la gravité de ces faute et de celle de l'EFS qui n'a pas satisfait à son obligation de fournir des produits sanguins exempts de vice, il apparaît que le premier juge a exactement décidé que chacun des co-responsables avait concouru pour moitié à la réalisation du dommage de mademoiselle [C].

L'ONIAM et la GMF assumeront donc pour moitié chacun la charge définitive de l'indemnisation de mademoiselle [C].

Sur le montant de l'indemnisation

Il ressort du rapport d'expertise que la découverte de la contamination par le virus de l'hépatite C de mademoiselle [C], née le [Date naissance 4] 1962, a été faite fortuitement au mois de mars 1992, à l'occasion d'un bilan sanguin réalisé pour déterminer les causes de crises d'acné.

Mademoiselle [C] a subi une ponction biopsie hépatique au mois de décembre 1992 qui a montré des lésions minimes avec un score de Knodell à 4.

A partir du mois de janvier 1993 mademoiselle [C] a été traitée par Interferon, ce traitement étant poursuivi pendant une année. Ce traitement a été mal toléré, mademoiselle [C] développant un syndrome dépressif traité par antidépresseur et anxiolytique.

Mademoiselle [C] a répondu au traitement mais a rechuté en mars 1994.

Elle est restée sous surveillance tous les deux mois.

La virémie est devenue inférieure au seuil de sensibilité en janvier 1997.

En cours d'année 2000 mademoiselle [C] a développé un nouveau syndrome dépressif qui a retardé la mise en oeuvre d'un nouveau traitement.

Celui-ci, consistant en une bi-thérapie Interferon-Ribavirine, a débuté en janvier 2001 et a duré un an. Pendant ce temps l'état dépressif de mademoiselle [C] a justifié un traitement par antidépresseur et antipsychotique, traitement défini par un neuropsychiatre, dont l'expert précise qu'il était toujours en cours au jour de ses opérations (5 janvier 2005).

Après l'arrêt du traitement en février 2002, la sérologie V.H.C était devenue négative. Elle l'était encore en septembre 2002, en juin 2003 puis en juillet 2004, ce qui permet à l'expert de conclure que mademoiselle [C] est guérie de son hépatite C.

Les conclusions du rapport d'expertise sont les suivantes :

- l'incapacité temporaire a été totale durant les 9 jours correspondant à des périodes d'hospitalisation

- elle a été partielle pendant la durée des traitements, à 30% pendant la première cure, à 15% pendant la seconde

- la consolidation est acquise le 26 septembre 2002

- il ne subsiste pas de déficit fonctionnel permanent

- le préjudice lié à la douleur est de 3,5 sur une échelle de 7 et inclut le retentissement psychologique et l'état dépressif.

La cour dispose ainsi des éléments lui permettant de déterminer le préjudice de mademoiselle [C] qui doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties.

Selon l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985 le recours du tiers payeur, que la victime subroge par l'effet de la loi dans la limite de ses propres droits à l'indemnité, doit s'exercer poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'il a pris en charge.

I- Préjudices patrimoniaux

A- temporaires

- dépenses de santé actuelles :

Mademoiselle [C] ne prétend pas avoir conservé des dépenses de santé à charge et la CPAM revendique le remboursement de la somme de 28.738,33 € qui lui a été allouée par le premier juge.

Si l'ONIAM ne conteste pas les débours de la caisse s'agissant des frais d'hospitalisation, il conteste l'imputabilité à la seule hépatite des frais médicaux et pharmaceutiques qui s'élèvent à 25.604,90 €.

Selon l'état définitif des débours de la CPAM ces frais ont été exposés entre le 7 septembre 1992, date postérieure à la découverte de la contamination de mademoiselle [C] par le virus de l'hépatite C, et le 26 septembre 1992, date de sa consolidation.

En dépit de l'objection soulevée par l'ONIAM, la CPAM n'a pas fourni la liste de ses prestations et n'a pas versé aux débats d'attestation d'imputabilité émanant de son médecin conseil.

Cependant mademoiselle [C] a communiqué de très nombreux éléments de preuve extraits de son dossier médical qui permettent à la cour de compter que pendant la période susdite ont été réalisés 89 examens dont certains complexes (amplification génétique et hybridation moléculaire) et 66 consultations chez des médecins spécialistes en hépato-gastro-antérologie. En outre ne figurent pas dans ces pièces les consultations chez le neuro-psychiatre ni les frais pharmaceutiques.

Au vu de ces documents, la réclamation de la caisse apparaît suffisamment justifiée.

Etant observé que la cour n'est saisie d'aucun moyen à l'encontre du jugement qui a alloué à la caisse la somme qu'elle réclamait augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2005, le jugement sera approuvé en ce qui concerne le montant du poste des dépenses de santé actuelles.

B- permanents

- frais futurs :

La cour n'est saisie d'aucun moyen à l'encontre du jugement qui a donné acte à la CPAM de ses réserves. Il sera donc confirmé de ce chef.

II- Préjudices extra-patrimoniaux

A- Temporaires

- déficit fonctionnel temporaire:

Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la consolidation l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et les joies usuelles de la vie courante pendant la maladie traumatique.

Mademoiselle [C] qui demande indemnisation du préjudice qu'elle a subi au cours des périodes d'incapacité totale de travail et d'incapacité temporaire partielle, le définit comme étant distinct de celui résultant des pertes de gains.

Elle demande donc bien à ce titre, ainsi que l'a exactement qualifié l'ONIAM, l'indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire total et partiel tel que défini ci-dessus.

Elle ne retient à cet égard que les périodes définies par l'expert comme correspondant à ses hospitalisation et à ses périodes de traitement, à l'exclusion des périodes de surveillance et de soins.

Dans ces conditions, sur la base d'une indemnisation de 750 € par mois pour un déficit fonctionnel temporaire total, il lui revient 4.275 €.

- souffrances endurées :

Mademoiselle [C] demande à la cour de porter à 6,5/7 la cote de ses souffrances endurées, ce à quoi s'opposent l'ONIAM et la GMF.

Il sera rappelé que la découverte de l'hépatite en mars 1992 a été fortuite, ce qui démontrer qu'elle était asymptomatique.

Il ressort des lettres du professeur [D], gastro-entérologue au centre hospitalier régional de [Localité 10] qui suit mademoiselle [C] depuis la découverte de son hépatite, que le 2 décembre 1992 sa tolérance au virus était jugée bonne, que le 27 juillet 1994 ce médecin considérait qu'elle n'allait pas mal, que le 16 novembre 1994 il notait son absence de troubles fonctionnels, que le 23 mars 1995 il jugeait à nouveau qu'elle n'allait pas mal, que le 25 octobre 1995 il considérait qu'elle allait très bien cliniquement, que le 31 octobre 2001 il écrivait encore qu'elle n'allait pas mal.

Il reste que le 17 janvier 2001 ce médecin déplorait l'état dépressif de sa patiente ayant nécessité un traitement assez lourd et que le 31 octobre 2001 il rappelait l'existence d'éruptions cutanées.

Au demeurant l'expert a rappelé que le premier traitement par Interferon avait été mal toléré.

En outre mademoiselle [C] verse aux débats des attestations de quatre personnes étrangères à sa famille qui témoignent de son abattement physique aussi bien que psychologique.

Si ces documents ne permettent pas de contredire l'appréciation de l'expert et de qualifier les souffrances endurées par mademoiselle [C] de très importantes, comme elle le demande, ils conduisent à indemniser le préjudice de mademoiselle [C], qui inclut ses souffrances morales, par l'allocation de la somme de 9.000 €.

- préjudice sexuel :

L'expert n'en retient pas l'existence et mademoiselle [C] ne verse aux débats aucun élément permettant de caractériser un tel préjudice.

Le premier juge qui a rejeté ses prétentions à ce titre sera donc approuvé.

B- Permanents

- préjudice d'agrément :

Le préjudice d'agrément vise exclusivement à l'indemnisation du préjudice lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs.

Bien que l'ONIAM ait rappelé à mademoiselle [C] la définition de ce poste de préjudice permanent, celle-ci persiste à réclamer à ce titre l'indemnisation de sa gêne dans les actes de la vie courante pendant la période de 12 années qui a duré de la découverte de sa contamination à l'arrêt des soins en juillet 2004.

Or le préjudice d'agrément ne se confond pas avec la gêne dans les actes de la vie courante éprouvée avant consolidation qui est indemnisée au titre du déficit fonctionnel temporaire (étant rappelé que mademoiselle [C] n'a pas demandé à ce titre l'indemnisation de sa gêne hors des périodes de déficit fonctionnel temporaire total et partiel retenues par l'expert) ni avec celle éprouvée après consolidation comme conséquence du déficit fonctionnel permanent (étant observé que l'expert n'a pas retenu l'existence d'un déficit fonctionnel permanent et que mademoiselle [C] ne formule aucune demande d'indemnisation à ce titre).

Le premier juge sera donc approuvé en ce qu'il a rejeté les prétentions de mademoiselle [C] au titre de son ' préjudice d'agrément, gêne dans les actes de la vie courante'.

Mademoiselle [C] demande en outre l'indemnisation d'un préjudice spécifique de contamination en raison des traitements extrêmement lourds, surtout au niveau des effets secondaires, mettant en péril sa vie, qu'elle a subis pendant 12 ans et en raison du risque vital qui demeure en dépit du fait que le virus est devenu indétectable.

Le préjudice spécifique de contamination par le virus de l'hépatite C comprend l'ensemble des préjudices de caractère personnel tant physiques que psychiques résultant de la contamination, notamment les perturbations et les craintes éprouvées, toujours latentes, concernant l'espérance de vie et les craintes des souffrances ; il comprend également le risque de toutes les affections opportunistes consécutives à la découverte de la contamination, les perturbations de la vie sociale, familiale et sexuelle, et les dommages esthétiques et d'agrément générés par les traitements et les soins subis ; il n'inclut pas le déficit fonctionnel.

De cette définition il découle que mademoiselle [C] n'est pas fondée à obtenir au titre d'un préjudice spécifique de contamination d'autre indemnisation que celle qui lui a déjà été allouée pour réparer son préjudice antérieur à la consolidation puisque les effets secondaires du traitement et ses craintes, manifestées par son état dépressif, ont été indemnisées au titre de ses souffrances endurées et qu'il a été dit qu'elle ne justifiait pas d'un préjudice sexuel.

En revanche, s'agissant du préjudice après consolidation, mademoiselle [C] verse aux débats un certificat du professeur [D] en date du le 12 février 2010, qui précise d'une part que persiste chez la patiente un état dépressif apparu puis exacerbé par les différentes phases de traitement par Interferon, d'autre part que reste nécessaire une surveillance biologique et échographique annuelle compte tenu de l'absence de donnée concernant le risque évolutif des patients qui ont contracté une hépatite C chronique, même après guérison, notamment en terme de cancer du foie.

Ainsi, mademoiselle [C] est fondée à soutenir qu'en dépit du fait qu'elle est guérie de son hépatite, elle continue légitimement à éprouver des craintes concernant son état de santé, son espérance de vie et d'éventuelles souffrances, craintes d'autant plus douloureuses qu'elles se manifestent dans le contexte d'un état dépressif, créé par le traitement de la maladie, qui la met peu à même de les surmonter.

Dans ces conditions mademoiselle [C] justifie d'un préjudice spécifique de contamination qui sera réparé par l'allocation de la somme de 15.000 €.

Au total le jugement le préjudice de mademoiselle [C] s'établit à 28.275 € et celui de la CPAM à la somme de 28.738,33 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2005.

Ces sommes seront supportées pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF.

*

La société AXA justifie que son plafond de garantie pour l'année 1987 est atteint, de sorte qu'elle n'a plus vocation à garantir l'EFS.

*

Il sera alloué à mademoiselle [C] la somme de 5.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Cette somme sera supportée pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF.

Les dépens de première instance et d'appel seront également supportés pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF.

Par ces motifs :

LA COUR :

- Reçoit l'ONIAM en son intervention volontaire

- Infirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant de la créance de la CPAM et en ce qu'il a donné acte à la CPAM de ses réserves relatives à ses dépenses de santé futures

- Statuant à nouveau

- Fixe l'indemnisation de mademoiselle [C] à 28.275 € et celle de la CPAM à la somme de 28.738,33 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2005

- Dit que ces sommes seront supportées pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF

- Alloue à mademoiselle [C] la somme de 5.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

- Dit que cette somme sera supportée pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF

- Rejette toutes demandes plus amples ou contraires

- Dit que le plafond de garantie de la société AXA pour l'année 1987 est atteint et qu'elle n'a plus vocation à garantir l'EFS

- Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés pour 50% par l'ONIAM et pour 50% par la GMF, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 code de procédure civile .

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 09/14761
Date de la décision : 01/02/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°09/14761 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-01;09.14761 ?
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