COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 07 OCTOBRE 2019
hg
N° 2019/ 553
N° RG 18/08463 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCOXR
Syndicat des copropriétaires LE MAGALI
C/
SCI DG
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me HURLUS
Me JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 13 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03169.
APPELANT
Syndicat des copropriétaires LE MAGALI représenté par son Syndic, la société GESTION IMMOBILIÈRE DAUBEZE-ROULLAND, Société par Actions Simplifiée au capital de 38.200 €, ayant son siège social à [Adresse 3], inscrite au RCS de Grasse sous le numéro B 438 200 032, exerçant sous l'enseigne 'CABINET ROULLAND', pris en la personne de son représentant légal dument habilité aux présentes, domicilié audit siège en cette qualité
sis [Adresse 1]
représenté et assisté par Me Juliette HURLUS de la SELARL GHM, avocat au barreau de NICE, plaidant
INTIMEE
SCI DG Pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
sis [Adresse 4]
représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée par Me Alain VIDAL-NAQUET de la SCP A VIDAL-NAQUET AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Hélène GIAMI, Conseiller faisant fonction de président de chambre
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
M. Luc BRIAND, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Octobre 2019
Signé par Madame Hélène GIAMI, Conseiller faisant fonction de président de chambre et Madame Priscilla BOSIO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES
La SCI DG est propriétaire de divers lots au sein de l'ensemble immobilier le Magali situé [Adresse 2] ; un conflit ancien l'oppose au syndicat des copropriétaires ayant donné lieu à des décisions judiciaires antérieures. Invoquant un arriéré de charges et provisions le syndic l'a fait assigner en paiement le 30 mai 2016 devant le tribunal de grande instance de Grasse qui par jugement contradictoire du 13 avril 2018 a :
' débouté le syndicat de l'ensemble de ses demandes ;
' condamné le syndicat aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' dispensé la SCI DG de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.
Le syndicat a régulièrement relevé appel de cette décision le 18 mai 2018 et demande à la cour selon conclusions signifiées par voie électronique le 29 mai 2019 de:
vu la loi du 10 juillet 1965 et le décret du 17 mars 1967,
vu les articles 561 et suivants du code de procédure civile,
' confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que les erreurs comptables invoquées par la SCI DG n'étaient pas judiciairement établies ;
' réformer pour le surplus et condamner la SCI DG à payer au syndicat les sommes de :
*42'445,56 € au titre de l'arriéré de charges arrêtées au 28 mai 2019,
*2500 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
*3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' à titre subsidiaire, confirmer le rejet de la demande de sursis à statuer ;
' à titre infiniment subsidiaire débouter la SCI DG de sa demande de cantonnement.
Au soutien de son appel, le syndicat fait valoir principalement qu'il ne peut recouvrer les charges de copropriété depuis 2010 dans la mesure où quelques copropriétaires engagent systématiquement des procédures en nullité des assemblées générales, que le tribunal de grande instance de Grasse a statué sur la procédure initiale concernant l'assemblée générale de 2009, que la clé de répartition des charges est appliquée depuis 1985 après délibération votée à l'unanimité, que l'assemblée générale du 8 août 1985 n'a fait l'objet d'aucune contestation, qu'aucune procédure en révision de la répartition des charges n'a pas plus été engagée, qu'ainsi la créance du syndicat est justifiée, qu'en tout état de cause la différence entre la répartition d'origine et la répartition modifiée en 1985 s'établit à 137,20 €, circonstance qui ne peut autoriser l'intimée à s'opposer au paiement des charges et que sa carence depuis 2010 engendre des problèmes de trésorerie ; le syndicat ajoute que la SCI DG est irrecevable à solliciter un sursis à statuer postérieurement au dépôt de conclusions au fond et que les dispositions des assemblées générales sont opposables à tous copropriétaires tant que celles-ci n'ont pas été annulées.
La SCI DG sollicite en réplique selon conclusions signifiées par voie électronique le 28 mai 2019 :
vu les articles 910 et suivants du code de procédure civile,
vu la loi du 10 juillet 1965,
vu l'article 378 du code de procédure civile,
vu le règlement de copropriété du 12 février 1981,
vu l'assemblée générale du 8 août 1985,
' à titre principal infirmer le jugement déféré en ce qu'il mentionne que les erreurs comptables ne sont pas judiciairement établies et dire en conséquence que l'arriéré de charges invoqué par le syndicat n'est pas justifié ;
' confirmer le jugement dans le surplus de ses dispositions ;
' à titre subsidiaire, surseoir à statuer sur les demandes en paiement de charges dans l'attente des décisions à intervenir dans les procédures en contestations des assemblées générales pendantes devant le tribunal de grande instance de Grasse ;
' surseoir à statuer sur la demande en paiement de charges figurant à l'acte introductif d'instance du 30 mai 2016 ;
' à titre infiniment subsidiaire, dire que la SCI DG ne peut être débitrice d'une somme supérieure à 25'072,02 € au titre de l'arriéré de charges courantes et de fonctionnement ;
' constater l'offre de paiement à hauteur de 8000 € ;
' accorder un délai de 24 mois à la SCI DG pour apurer le reliquat ;
' en tout état de cause condamner le syndicat aux dépens et au paiement d'une indemnité de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'intimée explique principalement qu'une scission des copropriétaires est intervenue lors de l'assemblée générale du 26 novembre 2009 qui s'est tenue dans des conditions totalement irrégulières sous la direction de l'ancien syndic, le cabinet Europazur, que cette assemblée a été annulée par jugement du 7 juillet 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Grasse confirmé par arrêt de cette cour en date du 21 mars 2019, que les assemblées générales subséquentes ont toutes fait l'objet d'une procédure d'annulation, qu'en l'absence de publication de l'assemblée générale du 8 août 1985 la modification de la répartition des charges ne lui est pas opposable, que ses courriers adressés au syndic Daubeze Roulland sont demeurés sans réponse, que la modification litigieuse a en outre été adoptée à l'unanimité des copropriétaires présents ou représentés soit 6101/10'000 tantièmes, que les erreurs comptables sont établies dans la mesure où le syndic actuel s'est arrogé le droit de refaire la comptabilité du syndic précédent et que les deux comptabilités sont discordantes.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 17 juin 2019.
MOTIFS de la DECISION
Selon ordonnance du 9 juin 2017 rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Grasse, la SCI DG a été déboutée de sa demande de sursis à statuer. Cette décision n'ayant fait l'objet d'aucun recours, sa demande aux mêmes fins en cause d'appel est irrecevable.
Sur le paiement des charges de copropriété :
L'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 énonce que « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement communs en fonction de l'utilité que ces services et équipements présentent à l'égard de chaque lot et qu'ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5 » ; l'article 14 -1 de la même loi dispose en outre que « pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel, que les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté, sauf à ce que l'assemblée générale fixe des modalités différentes et que la provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour fixé par l'assemblée générale».
L'approbation des comptes du syndic par l'assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges et le copropriétaire qui n'a pas contesté, dans les termes prévus à l'article 42 de la loi précitée, les décisions d'assemblées générales ayant approuvé les comptes des exercices considérés ne peut s'opposer au paiement des sommes qui lui sont réclamées que s'il en conteste la répartition.
Il est constant que la SCI DG a acquis ses lots postérieurement à la modification de la répartition des charges de 1985 qui n'a fait l'objet d'aucune publication ; aucun modificatif du règlement de copropriété n'est intervenu et c'est à bon droit que le premier juge a considéré que la répartition d'origine devait être appliquée à la SCI intimée. Il ressort cependant que la différence entre la répartition d'origine et la répartition modifiée des charges applicables aux lots de l'intimée est minime soit 137,20 € pour un arriéré de charges de 39'720,62 € au 8 août 2018.
Il faut encore rappeler que les délibérations des assemblées générales approuvant les comptes des exercices clos et les budgets provisionnels s'imposent à tout copropriétaire tant que ces délibérations n'ont pas été annulées et que le paiement des charges est une obligation essentielle attachée à la qualité de copropriétaire.
C'est donc en vain que la SCI DG critique les provisions spéciales pour créances douteuses ainsi que les provisions pour travaux de réfection dont elle ne conteste pas qu'ils ont été aujourd'hui exécutés ou invoque des erreurs comptables dans la succession des syndics dont le dernier nouvellement désigné doit nécessairement reprendre la comptabilité du précédent.
Le syndicat actualise sa créance à la somme de 42'445,56 € au 28 mai 2019 mais ne produit pas de décompte individuel retraçant l'historique des appels de fonds et paiements ou crédits arrêté à cette date ; en conséquence il est fait droit à sa demande à concurrence de 39'583,42 €, comptes arrêtés au 8 août 2018.
Sur le surplus des demandes :
La SCI DG a cessé tout paiement depuis 2010, soit depuis neuf ans alors qu'elle est notamment propriétaire de deux appartements au sein de la copropriété et reconnaît devoir à minima la somme de 25'072,02 €. C'est manifestement par un abus de langage qu'elle conclut à l'absence de toute résistance abusive alors que sa carence délibérée a contraint le syndicat à multiplier les démarches et procédures et compromet l'équilibre financier de la copropriété contrainte de différer des travaux d'entretien utile à la conservation de l'immeuble.
Sa faute et le préjudice consécutif sont donc certains ce qui justifie la demande indemnitaire du syndicat à hauteur de 2500 €.
La SCI DG qui ne fournit aucun renseignement sur sa situation matérielle et financière ne peut prétendre à l'octroi de délais de paiement et ce d'autant qu'elle a déjà bénéficié des plus larges délais de fait en s'abstenant de toute participation à la dépense commune depuis plusieurs années ainsi qu'il a été dit ci-dessus.
Compte tenu de ce qui précède, l'équité autorise une application de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes sollicités par le syndicat.
Enfin, la SCI DG qui succombe est condamnée aux dépens en application de l'article 696 du même code.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Déclare irrecevable la demande de sursis à statuer ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il indique que les erreurs comptables invoquées par la SCI DG ne sont pas judiciairement établies ;
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :
Condamne la SCI DG à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Magali les sommes de :
-39 583,42 € au titre de l'arriéré des charges et provisions exigibles au 8 août 2018,
-2500 € à titre de dommages-intérêts,
-3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel ;
Déboute la SCI DG de sa demande en délais de paiement ;
Condamne la SCI DG aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LECONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT DE CHAMBRE