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16/10/2003 | FRANCE | N°JURITEXT000006942677

France | France, Cour d'appel de colmar, 16 octobre 2003, JURITEXT000006942677


DEUXIEME CHAMBRE CIVILE Section A CC/CW R.G. N° 2 A 00/05145 Minute N° 2 M 995.2003 Copies exécutoires à : Maîtres WETZEL etamp; FRICK Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK etamp; CHEVALLIER-GASCHY Maîtres D'AMBRA, BOUCON etamp; LITOU-WOLFF Le 16 octobre 2003 Le Greffier, RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 16 OCTOBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Marc SAMSON, Président de Chambre Christian CUENOT, Conseiller Philippe ALLARD, Conseiller Greffier présent aux débats et au prononcé : Nathalie NEFF DEBATS en audienc

e publique du 04 septembre 2003 ARRET CONTRADICTOIRE du 16 ...

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE Section A CC/CW R.G. N° 2 A 00/05145 Minute N° 2 M 995.2003 Copies exécutoires à : Maîtres WETZEL etamp; FRICK Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK etamp; CHEVALLIER-GASCHY Maîtres D'AMBRA, BOUCON etamp; LITOU-WOLFF Le 16 octobre 2003 Le Greffier, RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 16 OCTOBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Marc SAMSON, Président de Chambre Christian CUENOT, Conseiller Philippe ALLARD, Conseiller Greffier présent aux débats et au prononcé : Nathalie NEFF DEBATS en audience publique du 04 septembre 2003 ARRET CONTRADICTOIRE du 16 octobre 2003 prononcé publiquement par le Président. NATURE DE L'AFFAIRE : DEMANDE D'EXECUTION DE TRAVAUX DE REPARATION, OU DE DOMMAGES ET INTERETS, FORMEE PAR LE MAITRE OU L'ACQUEREUR DE L'OUVRAGE CONTRE LE CONSTRUCTEUR OU LE FABRICANT D'UN DES ELEMENTS DE CONSTRUCTION APPELANTE et défenderesse, INTIMEE sur appel incident : La S.A. SOCIETE EUROPENNE DE SUPERMARCHES (S.E.S.) représentée par son Président Directeur Général ayant son siège social 52, Route de Bitche 67506 HAGUENAU représentée par Maîtres WETZEL etamp; FRICK, avocats à COLMAR plaidant : Maître WEHR, avocat à STRASBOURG INTIMEES : - demanderesse, APPELANTE sur appel incident et provoqué : 1 - La S.A. CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE représentée par son représentant légal ayant son siège social 11, rue du Marais Vert 67000 STRASBOURG représentée par Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK etamp; CHEVALLIER-GASCHY, avocats à COLMAR - défenderesse et appelée en garantie, INTIMEE sur appel principal et sur appel provoqué : 2 - La Ville de HAGUENAU représentée par son Maire ayant son siège social Hôtel de Ville 67500 HAGUENAU représentée par Maîtres D'AMBRA, BOUCON etamp; LITOU-WOLFF, avocats à COLMAR plaidant : Maître MARTINEZ, avocat à STRASBOURG * * *

Attendu que par acte du 8 octobre 1997, la Société CREDIT IMMOBILIER

D'ALSACE a assigné la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES et la Commune de HAGUENAU pour les faire condamner solidairement à lui rembourser le coût de la dépollution d'un terrain qui leur a appartenu successivement ;

Attendu que par jugement du 12 septembre 2000, le Tribunal de grande instance de STRASBOURG s'est déclaré incompétent pour connaître de l'action en responsabilité contre la Ville de HAGUENAU, et qu'il a condamné la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES à payer au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE une somme de 3.879.578,86 F et ses intérêts à compter du 17 mai 2000 ;

qu'il a rejeté les plus amples demandes du CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE, et qu'il l'a débouté de son action de nature contractuelle contre la Ville de HAGUENAU ;

qu'il a condamné la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES à payer au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE une compensation de 30.000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, et qu'il a condamné la Société S.E.S. ainsi que le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE à payer à la Ville de HAGUENAU deux compensations de 7.500 F chacune sur le fondement de cette disposition ;

Attendu que la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES a relevé appel de ce jugement le 18 octobre 2000, dans des conditions de recevabilité non contestées ;

Attendu qu'au soutien de son recours, la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES conteste la requalification quasi-délictuelle de l'action intentée contre elle, en indiquant notamment qu'elle viole les principes procéduraux du contradictoire, et qu'elle opère un cumul irrégulier des responsabilités contractuelles et quasi-délictuelles ;

qu'elle approuve par contre la décision qui a déclaré irrecevable comme tardive l'action en garantie des vices cachés, et qu'elle

propose une démonstration tendant à établir qu'elle ignorait la pollution du terrain vendu à la Société C.I.C., marchand de biens qui l'a revendu au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE ;

qu'elle demande subsidiairement la garantie de la Ville de HAGUENAU, tant sur le fondement de la garantie des vices cachés, que sur celui de la responsabilité contractuelle ou de la responsabilité quasi-délictuelle ;

qu'elle estime que ce dernier fondement est bien de la compétence judiciaire, contrairement à l'avis du premier Juge ;

qu'elle indique que la Ville de HAGUENAU connaissait le vice de l'immeuble vendu, et qu'elle souligne le contenu de l'acte de vente de 1956, qui ne contenait pas de clause de non garantie ;

qu'elle fait valoir que la commune de HAGUENAU a conservé la garde de ses déchets, selon les principes dégagés par la jurisprudence actuelle, à défaut pour elle d'avoir déclaré leur présence lors de la vente ;

qu'elle demande des compensations sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société S.E.S. à lui rembourser les travaux de dépollution ;

qu'il invoque cependant la garantie des vices cachés, en soutenant que son action a bien été intentée dans le bref délai de l'article 1648 du Code civil, compte tenu notamment du caractère progressif de la découverte de l'origine et de l'étendue de la pollution ;

qu'il invoque subsidiairement la responsabilité contractuelle de la Société S.E.S., ou sa responsabilité quasi-délictuelle au titre d'un dol ;

qu'appelant incident, il demande la condamnation de la Société S.E.S. à prendre en charge la compensation de l'immobilisation du terrain,

estimée à 617.545 F, ou 94.144,13 ä ;

qu'il sollicite en outre la condamnation solidaire de la Ville de HAGUENAU, tant sur le fondement contractuel que sur celui d'une responsabilité quasi-délictuelle, ou d'une obligation légale pour l'auteur d'une pollution de prendre en charge son traitement, conformément au Code rural et à la loi de 1976 sur les établissements classés ;

qu'il demande des compensations sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la commune de HAGUENAU fait valoir essentiellement en fait que la Société X..., aux droits de laquelle se trouve actuellement la Société S.E.S., a acquis en connaissance de cause les terrains sur lesquels se trouvait implantée l'ancienne usine de production de gaz de la ville ;

qu'elle conclut au rejet comme prescrites et mal fondées les demandes présentées contre elle sur le fondement contractuel ;

qu'elle approuve le premier Juge d'avoir considéré que l'action sur le fondement quasi-délictuel ressortissait à la compétence de la juridiction administrative, en ce qu'elle met en cause les conditions de fonctionnement du service public de distribution du gaz, ainsi que les dommages causés par des travaux publics ;

qu'elle demande subsidiairement et par voie d'appel incident la garantie de la Société S.E.S. et du CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE, pour des motifs assez mal justifiés ;

qu'elle sollicite des compensations sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la Cour rappelle qu'en avril 1994, un conducteur de travaux de l'entreprise TRABET, chargée de la démolition des bâtiments de la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES à HAGUENAU, a découvert au cours des travaux de destruction de la dalle de

rez-de-chaussée deux cavités pleines d'un mélange visqueux contenant des hydrocarbures ;

Attendu que ce conducteur de travaux, Monsieur Y..., s'est renseigné auprès du voisinage, et a obtenu l'indication qu'il y avait eu à cet endroit une ancienne usine de production de gaz ;

Attendu que le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE, qui avait acquis ce terrain d'un marchand de biens, la Société C.I.C., par acte notarié du 1er août 1990, a dû interrompre alors son projet de construction d'un bâtiment R + 3 qui devait être édifié à cet endroit ;

Attendu qu'en février 1995, il a eu l'indication d'un géomètre que le terrain avait appartenu initialement à la Ville de HAGUENAU ;

Attendu cependant qu'il paraît assez évident que les renseignements recueillis dans le voisinage par le conducteur de travaux de l'entreprise TRABET avaient déjà donné des indications en ce sens, et qu'un voisin, Monsieur Z..., possédait un dossier photographique ancien et complet, qui a été largement utilisé dans la présente instance ;

Attendu que le 26 avril 1996, le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE a assigné en référé la Société C.I.C., la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES et la Ville de HAGUENAU ;

Attendu que Monsieur A... a été désigné en qualité d'expert, avec pour mission de faire l'historique du site, d'estimer la superficie polluée et de chiffrer les travaux de dépollution ;

Attendu qu'il a déposé un premier rapport, qui a confirmé la présence d'anciennes citernes de gaz, remplies de déchets de distillation ;

qu'il a estimé initialement les travaux de dépollution à moins de 500.000 F, mais qu'en cours d'exécution, une des cuves supposée pleine de vase s'est révélée également polluée en profondeur par des résidus d'hydrocarbures, qu'il a fallu faire traiter par une entreprise spécialisée ;

Attendu que la facture de traitement s'est élevée à 3.879.578,86 F hors taxes ;

Attendu qu'après la revente d'une partie du terrain à une Société 3 F, l'autre moitié d'une cuve, que l'expert avait cru semi circulaire, a été découverte, et que la Société 3 F a dû payer une facture supplémentaire d'un peu plus de 1.100.000 F pour faire effectuer la dépollution complémentaire ;

Attendu que le Tribunal de grande instance de STRASBOURG a été saisi de l'instance actuellement dévolue à cette Cour ;

Attendu qu'il convient tout d'abord de rappeler que l'action en garantie est bien le cadre juridique nécessaire et exclusif de cette instance, sous réserve d'une éventuelle action en responsabilité contre la Ville de HAGUENAU devant la juridiction administrative ;

Attendu en effet qu'il existe une chaîne de ventes successives, qui ont conduit à transmettre au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE un terrain affecté d'un vice

Attendu en effet qu'il existe une chaîne de ventes successives, qui ont conduit à transmettre au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE un terrain affecté d'un vice caché grave, le rendant en l'état impropre à sa destination normale ;

Attendu que l'action en garantie des vices cachés constitue donc le fondement juridique nécessaire du recours de l'acquéreur final ;

qu'il faut rappeler que l'action en garantie est transmise comme accessoire de la chose vendue ;

Attendu que le terrain en cause a été vendu le 11 juillet 1956 par la commune de HAGUENAU à la Société X... etamp; Compagnie représentée par Monsieur Adolphe X... ;

Attendu que Monsieur X... a fait construire un entrepôt à la place des ancien ateliers municipaux ;

Attendu qu'en 1968, la Société X... a acquis de la ville une

surface supplémentaire de 18 ares, provenant pour la plus grande part d'une propriété contiguù appartenant précédemment à l'Etat (Ministère de la Guerre) ;

Attendu que la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES, aux droits de la Société X... MIGROS, a revendu cet ensemble immobilier à la Société C.I.C. le 24 juillet 1990, en stipulant une clause de non-garantie dont la portée générale n'est pas contestée ;

que la Société C.I.C. l'a revendu au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE dans les conditions précédemment rappelées ;

Attendu qu'il convient de rechercher préalablement si l'action en garantie, accessoire de l'immeuble ainsi transmis, a bien été intentée dans le bref délai de l'article 1648 du Code civil ;

Attendu que l'action en référé a été intentée près de deux années après la découverte du vice et l'interruption du programme de l'acquéreur ;

que sa mesure exacte a fait l'objet d'une réévaluation à deux reprises entre 1996 et la fin de l'année 1999 ;

Attendu que la Cour souligne que le respect du bref délai est imposé pour des raisons de preuve, contradictoire avec le vendeur, de l'origine et de l'antériorité du vice par rapport à la vente ;

que très court dans le cadre de la vente d'animaux malades, pour les raisons de preuve précédemment rappelées, il est généralement fixé à environ six mois pour les ventes de véhicules ou d'appareils mécaniques soumis à une usure assez rapide ;

Attendu qu'en matière immobilière, il peut être cependant plus largement apprécié, surtout si comme dans le cas d'espèce, son origine antérieure aux ventes en causes est clairement établie ;

Attendu donc que si l'on admet que le bref délai est un délai compatible avec la preuve de l'origine du vice, et également avec les nécessités de sécurité juridique imposant de ne pas remettre trop

tardivement en cause des transactions, le délai dans lequel le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE a intenté son action en référé reste admissible ; Attendu qu'il convient en second lieu d'apprécier l'efficacité de la clause de non-garantie introduite par la Société S.E.S. dans son acte de vente, et naturellement opposable en principe à un sous-acquéreur ;

Attendu que cette Cour ne trouve pas de preuve déterminante d'une mauvaise foi des responsables de la Société S.E.S lorsqu'elle a revendu ses entrepôts en 1990, étant rappelé ici que la mauvaise foi d'une personne morale ne signifie rien, même si cette évidence paraît avoir été un peu perdue de vue ;

Attendu que l'examen du dossier montre que Monsieur Adolphe X... avait effectivement connaissance des problèmes de constructibilité du terrain acquis par sa société, et qu'il a adapté la construction de l'entrepôt à la présence de trois anciennes cuves ;

Attendu cependant que rien ne permet d'affirmer qu'il connaissait le contenu de ces cuves ;

Attendu que l'usine de production de gaz de houille, exploitée en régie directe par la Ville de HAGUENAU jusqu'en 1929, avait cessé depuis longtemps son activité, que les gazomètres avaient été enlevés et que les fosses de ceux-ci avaient été comblées ;

Attendu que des photographies montrent clairement que le terrain des ateliers municipaux, qui ont succédé à l'usine de production de gaz, avait été remblayé et parfaitement nivelé ;

Or attendu que le vice est essentiellement constitué par la présence de résidus de fioul, mélangés à de la terre et des gravats divers, dont l'élimination à partir de 1996 s'est avérée d'un coût extrêmement important ;

que les factures de dépollution d'entreprises spécialisées sont

afférentes à l'enlèvement et au traitement de ces boues mêlées d'hydrocarbures ;

Attendu que la seule présence des trois fosses, même comblées par un remblai nécessairement trop superficiel, n'aurait pas constitué un vice important pour une entreprise de construction chargée d'édifier un immeuble collectif R + 3 impliquant le creusement d'une excavation nécessairement importante :

Attendu qu'une deuxième zone de doute subsiste quant à la connaissance même de l'existence de ces fosses par les dirigeants de la Société S.E.S. en 1990 ;

Attendu que la seule pièce extraite du dossier de permis de construire des entrepôts est un plan de masse qui ne révèle pas la présence de ces fosses ;

Attendu que lorsque le vendeur n'est pas un professionnel tenu de connaître la chose qu'il a fabriquée ou mise sur le marché, la mauvaise foi est bien la conscience effective de celui qui stipule une clause de non-garantie en connaissant concrètement le vice de la chose vendue, et qui commet ainsi un dol à l'égard de son acquéreur ; Attendu que Monsieur Adolphe X..., qui était né en 1902, a disparu, et que la Société S..E.S était administrée en 1990 par un directoire, sans rapport établi avec la famille X... ;

Attendu qu'en définitive, la Cour ne trouve pas de démonstration probante de la mauvaise foi des dirigeants de la Société S.E.S. lorsqu'ils ont vendu l'entrepôt de HAGUENAU en 1990 ;

Attendu que le recours à un marchand de biens, qui avait déjà promis une rétrocession au CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE en février 1990, n'est pas non plus démonstratif avec certitude d'une volonté d'interposer un écran artificiel ;

Attendu que la Cour doit donc reconnaître l'efficacité de la clause

de non-garantie stipulée dans l'acte de vente de la Société S.E.S. à la Société C.I.C., et son opposabilité à l'action en garantie intentée par le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE ;

Attendu que l'action en garantie, exclue et bloquée au niveau d'un vendeur intermédiaire, ne peut naturellement pas être envisagée et prospérer contre le vendeur initial, la Ville de HAGUENAU ;

Attendu que tous autres fondements juridiques sont sans application en l'espèce ;

qu'il n'y a pas de cumul possible entre une action en garantie des vices cachés et une autre responsabilité contractuelle, alors surtout que le CREDIT IMMOBILIER n'est pas en rapport contractuel direct avec la Société S.E.S. et avec la Ville de HAGUENAU ;

que le système légal de garantie des vices cachés s'applique spécifiquement à la réparation des désordres qui ont ce caractère, et qu'elle exclut l'application d'autres responsabilités ;

Attendu qu'il serait donc irrégulier de cumuler également une responsabilité de type quasi-délictuel en ce cas ;

qu'au fond, il a d'ailleurs été vu précédemment qu'il n'existait pas de démonstration probante d'un dol commis par la Société S.E.S. ou d'une autre faute quasi-délictuelle de ce type ;

Attendu qu'un recours contractuel de droit commun contre la Ville de HAGUENAU serait d'ailleurs prescrit par application de l'article 2262 du Code civil ;

que la vente du terrain contenant le vice caché constitué par les trois cuves remplies de fioul remonte en effet à 1956 ;

Attendu qu'une éventuelle faute de la Ville de HAGUENAU dans l'élimination de ses déchets pourrait être envisagée, mais qu'elle ne pourrait dans ce cas qu'être rattachée à son activité d'exploitant d'un ouvrage public de production de gaz ;

qu'il faut souligner que le litige ne serait pas un différend de

nature privée avec un usager ;

Attendu donc qu'une éventuelle obligation de la commune de traiter sa pollution, qu'elle soit prise sur le fondement de la garde de ses déchets ou sur celui de la loi de 1976 sur les établissements classés, ne pourrait en réalité qu'être rattachée à son activité initiale d'exploitation d'une usine de gaz, ouvrage public ;

Attendu que le déclassement ultérieur de l'immeuble dans le domaine privé ne saurait modifier les données du litige analysées dans les termes précédents ;

Attendu qu'il faut rappeler que le Conseil d'Etat a effectivement admis que les obligations de dépollution résultant de l'application de la loi de 1976 et de son décret d'application de 1977 pouvaient s'appliquer à une exploitation terminée avant l'entrée en vigueur de ces textes, mais relevant d'une des activités visée par ceux-ci, même si elle n'était pas soumise à la loi antérieure du 19 décembre 1917, laquelle ne prévoyait d'ailleurs pas expressément d'obligation particulière de dépollution ;

Attendu qu'en l'espèce, une telle obligation serait directement rattachable au mode d'exploitation d'un ouvrage public ;

que l'obligation de traiter la pollution en vertu de la loi de 1976 concerne bien l'exploitant de l'établissement ;

Attendu que la responsabilité encourue au titre de l'exploitation d'un ouvrage public, y compris d'ailleurs celle résultant de l'inexécution de travaux publics, constitue une responsabilité des dommages de travaux publics, laquelle ressortit à la compétence de la juridiction administrative en vertu de la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Attendu donc que c'est bien à la juridiction administrative qu'il incombe d'apprécier si la Ville de HAGUENAU conserve l'obligation de traiter les déchets de son activité ou de prendre en charge le coût

de leur traitement ;

que le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef particulier ; Attendu qu'au total, la Cour est amenée à rejeter l'action du CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE sur tous les fondements de sa compétence, en confirmant l'incompétence des juridictions judiciaires pour connaître d'une action contre la Ville de HAGUENAU en ce qu'elle est fondée sur l'obligation de traiter ou de prendre en charge le coût du traitement des déchets de son exploitation d'un ouvrage public ;

Attendu que la Cour n'estime pas que l'équité commande de faire en l'espèce application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

que l'action contre la SOCIETE EUROPENNE DE SUPERMARCHES est rejetée en effet sur la base d'une insuffisance de preuve, et qu'il n'est pas anormal que la commune de HAGUENAU soit inquiétée au titre de la gestion assez particulière de ses déchets ;

Attendu que toutes les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile sont donc rejetées, en première instance et en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS ============== LA COUR RECOIT l'appel de la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES contre le jugement du 12 septembre 2000 du Tribunal de grande instance de STRASBOURG ; Au fond, CONFIRME le jugement entrepris dans ses dispositions qui ont déclaré les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître de l'action contre la commune de HAGUENAU en ce qu'elle est fondée sur l'obligation de traiter ou de prendre en charge le coût du traitement des déchets de son activité de production de gaz ; REFORME le jugement pour le surplus, et statuant à nouveau, DEBOUTE le CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE de l'ensemble de ses demandes contre la SOCIETE EUROPEENNE DE SUPERMARCHES, ainsi que contre la commune de HAGUENAU

en ce qu'elles mettent en cause des liens de droit privé de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; CONSTATE que les appels en garantie entre co-défendeurs sont sans objet ; REJETTE toutes les demandes d'indemnités ou de compensations fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, tant en première instance qu'en cause d'appel ; CONDAMNE la Société anonyme CREDIT IMMOBILIER D'ALSACE aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de référé et le coût des expertises de Monsieur A...

Et, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier présent au prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006942677
Date de la décision : 16/10/2003

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS

2) Compétence- Appel en garantie- Exploitation d'ouvrage public- Incompétence relevée d'office au motif que l'affaire relève de la compétence administrative- Loi du 28 pluviôse de l'An VIII 1) Dans une chaîne de ventes successives conduisant à transmettre un terrain affecté d'un vice caché, le rendant en l'état impropre à sa destination normale, l'action en garantie est transmise comme accessoire à la chose vendue. Cette action intentée dans le bref délai de l'article 1648 du code civil peut se voir opposer la clause de non-garantie introduite dans l'acte de vente, dès lors que la mauvaise foi du vendeur non professionnel, à la date de la vente, ne peut pas être démontrée. 2) La responsabilité encourue au titre de l'exploitation d'un ouvrage public, y compris d'ailleurs celle résultant de l'inexécution de travaux publics, constitue une responsabilité des dommages de travaux publics, dont la compétence relève de la juridiction administrative en vertu de la loi du 28 pluviôse An VIII. C'est donc à la juridiction administrative qu'il incombe d'apprécier si la Ville, appelée en garantie, a conservé l'obligation de traiter les déchets de son activité ou de prendre en charge le coût de leur traitement.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2003-10-16;juritext000006942677 ?
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