République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 1
ARRÊT DU 07/11/2013
***
N° MINUTE :
N° RG : 12/07327
Jugement (N° 12/00460)
rendu le 26 Septembre 2012
par le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS
REF : AH/CL
APPELANTE
Madame [G] [A]
née le [Date naissance 6] 1983 à [Localité 1]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception dont l'accusé de réception a été signé le 15 mars 2013
Non comparante
Ayant pour conseil Me THOMAS Charles, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER
(Bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/002/2012/011333 du 11 décembre 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉ
CONSEIL GENERAL DU PAS DE CALAIS,
[Adresse 3]
[Localité 2]
Régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception dont l'accusé de réception a été signé le 18 mars 2013
Représenté par Mme [U] [Z], responsable de secteur ASE, munie d'un pouvoir
INTERVENANT
Monsieur [X] [O]
de nationalité Irakienne
né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 3]
adresse postale : Secours Catholique
[Adresse 1]
[Localité 1]
Non comparant
Représenté par Me Hervé KRYCH , avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER
EN PRÉSENCE DU MINISTÈRE PUBLIC :
Représenté par Monsieur DECLERCK, Substitut Général, en ses observations orales (et visa du 14.02.2013)
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Pascale FONTAINE Président de Chambre
Ali HAROUNE, Conseiller
Véronique FOURNEL, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gina CHIROLA
DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 26 Septembre 2013,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé, en audience publique, par mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2013, (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pascale FONTAINE Président, et Gina CHIROLA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Des relations de Mme [A] et M. [X] [O] sont issus deux enfants [K] né le [Date naissance 5] 2006 et [W] né le [Date naissance 2] 2007.
Mme [A] a par ailleurs eu deux autres enfants : [T] [A] né de père inconnu le [Date naissance 3] 2000 et [C] [H] [V] né le [Date naissance 4] 2002 de sa relation avec M. [H] [V].
Au cours du mois de mars 2005, les deux premiers enfants de Mme [A] ont été placés par la direction de l'enfance et de la famille avec droit de visite médiatisé pour chacun des deux parents, placement qui a été renouvelé par la suite. A compter de juillet 2009, [W] a également été placé.
En décembre 2010, compte tenu du désintérêt des parents pour les enfants, les services du Conseil général du Pas de Calais ont introduit une requête en délégation d'autorité parentale. Ils se sont finalement désistés pour déposer une requête en déclaration judiciaire d'abandon le 3 novembre 2011 pour les trois enfants [T], [K] et [W], [C] n'étant pas concerné par la procédure dans la mesure où des relations existent encore avec le père.
Par jugement en date du 28 juin 2012 le tribunal d'Arras a invité le Président du conseil général à faire assigner Mme [G] [S] [A] à sa dernière adresse connue, tout en précisant que l'affaire serait rappelée à l'audience du 12 septembre 2012.
A l'audience du 12 septembre 2012, toutes les parties étaient présentes ou représentées sauf M. [X] [O] assigné conformément aux dispositions de l'article 659 du cpc)
Par jugement en date du 26 septembre 2012 le tribunal de grande instance d'Arras a :
-déclaré l'enfant [T], [Y], [B], [R], [L] [A] né le [Date naissance 3] 2000 à [Localité 1] (Pas-de-Calais) abandonné aux sens de l'article 350 du Code Civil,
- déclaré l'enfant, [K], [T], [O]- [A] né le [Date naissance 5] 2006 à [Localité 1] (Pas-de-Calais) abandonné au sens de l'article 350 du Code Civil,
-déclaré l'enfant [W] [O]- [A] né le [Date naissance 2] 2007 à [Localité 1] (Pas-de- Calais) abandonné au sens de l'article 350 du Code Civil.
Mme [A] a interjeté appel total de la décision le 4 décembre 2012 .
M. [O] et Mme [A] ont comparu en personne le 30 mai 2013, date à laquelle l'affaire a été contradictoirement renvoyée au 26 septembre, en raison de l'intervention du conseil de ce dernier.
Aux termes de ses conclusions en date du 26 juillet 2013 Mme [A] demande à la cour :
- d'infirmer la décision du 26 septembre 2012,
- de débouter le Président du conseil général de sa requête en déclaration judiciaire d'abandon des trois enfants,
- de le condamner aux dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées le 26 septembre 2013 et développées à l'audience du même jour, le conseil de M. [X] [O] demande à la cour :
- d'infirmer la décision du 26 septembre 2012,
- de débouter le Président du conseil général de sa requête en déclaration judiciaire d'abandon pour les trois enfants,
- de le condamner aux dépens.
Entendu à l'audience du jeudi 26 septembre 2013, le ministère public a maintenu les termes de son écrit du 14 février 2013, en rappelant les faits et la situation des mineurs. Il a souligné le défaut de stabilité de Mme [A] tant sur le plan affectif que social. Il a donc affirmé qu'il y avait un désintérêt manifeste de Mme [A] à l'égard de ces trois enfants placés.
Le Président du conseil général, régulièrement représenté confirme sa demande de voir déclarer abandonnés les mineurs [T] [A], [K] [O]-[A] et [W] [O]-[A] et ce en vertu de l'article 350 du code civil afin que la situation juridique de chacun de ces enfants soit conforme à la réalité subie par eux.
Mme [G] [A] comme M. [X] [O], représentés sont absents à l'audience du 26 septembre 2013.
SUR CE,
Attendu qu'en vertu de l'article 350 du code civil, l'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service d'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance ;
Qu'il résulte des pièces du dossier que courant mars 2005, les deux premiers enfants de Madame [A] ont été placés à la direction de l'enfance et de la famille avec droit de visite médiatisé pour chacun des deux parents, placement qui sera renouvelé par la suite, Monsieur [O] ayant été incarcéré dans une affaire de «passeurs» et Mme [A] étant placée sous contrôle judiciaire, que le placement de [K] a été ordonné avec droit de visite réservé pour le père et droit de visite médiatisé pour la mère ; que les droits de visite sont ensuite devenus libres pour être de nouveau médiatisés avant d'être suspendus ;
Que les carences éducatives de Mme [A] ont à nouveau été constatées en 2009 puisque le 16 juillet 2009 [W] a fait l'objet d'un placement ordonné par le juge des enfants ; que cette mesure a été prolongée pour une durée de deux ans lors d'une audience qui s'est tenue au mois d'octobre 2012, en l'absence de Mme [A] et de M. [O] ; qu'en l'absence de contact entre les enfants et les parents, le droit de visite a été suspendu ;
Qu'il est à préciser que Mme [A]- incarcérée le 21 mai 2010 - s'est présentée quelques jours à peine après sa sortie d'incarcération, soit le 1er février 2011 à la Maison département solidarité pour rencontrer la référente de ses enfants et demander un droit de visite médiatisé à l'égard de ces derniers ;
Qu'en décembre 2011 Mme [A] a informé les services de l'aide sociale à l'enfance de l'arrêt de la consommation de drogue ; qu'elle leur a cependant déclaré être fragile sur le plan psychologique (tentative de suicide et hospitalisation en psychiatrie) ; que lors du dernier contact avec ce service au mois de juin 2012, selon son interlocuteur « elle semble avoir des difficultés à comprendre les propos échangés, de plus , elle a une voix léthargique. Elle oubliera ensuite de les recontacter comme convenu » ;
Que dans un rapport en date du 25 septembre 2012 les services de l'aide sociale à l'enfance indiquent qu'il n'y a aucune évolution dans les rapports entre Mme [A] et son fils [T] ; que ce dernier n' a pas rencontré physiquement sa mère depuis le 10 janvier 2009 ; que « [T] a indiqué ne plus vouloir la rencontrer » ; que la procédure d'abandon a été évoquée avec lui et « [T] ne manifeste pas d'angoisses particulières quant à une éventuelle adoption», s'inquiétant uniquement d'être séparé de ses frères ;
Que par ailleurs il ressort du dossier que par courrier en date du 24 février 2013 le père a écrit au juge des enfants pour lui indiquer «être parti ces dernières années en Irak pour des raisons familiales», étant précisé que M. [O] n'avait plus de contact avec le service éducatif et ses fils depuis le mois d'octobre 2008 ; que depuis il indique être en situation irrégulière sur le territoire national, être hébergé par des amis et ne justifie d'aucune ressource ;
Que s'agissant des rapports entre le père et les enfants, les services de l'enfance indique que M. [O] «ne semble pas prendre conscience de ce que [W] et [K] ont pu ressentir ou ressentent actuellement face à son absence» ;
Que manifestement Mme [A] s'est désintéressée depuis plusieurs années de ses enfants tant sur le plan affectif que matériel, n'entretenant plus de relations avec eux ; qu'elle ne se mobilise pas pour tenter de s'investir dans leur éducation, tant son mode de vie est instable, faisant des apparitions ponctuelles auprès des services sociaux sans réel investissement, comportement qui fait obstacle à un épanouissement des trois enfants ; que cette situation a d'ailleurs été perçue par les enfants, conduisant notamment [T] à refuser de voir sa mère ;
Que par ailleurs Mme [A] n'est d'ailleurs pas en capacité de se projeter dans l'avenir en cherchant à s'insérer socialement afin de pouvoir accueillir dignement ses enfants, semblant vivre au jour le jour sans réelle stabilité de domicile, comme le démontrent les difficultés rencontrées par les services d'aide sociale à l'enfance pour la contacter ;
Que s'agissant de M. [O], père de [W] et [K], ce dernier n'avait plus eu de contact avec le service éducatif et ses fils depuis l6 octobre 2008, et ne s'est présenté que plus de 28 mois après, soit le 28 janvier 2013 au service de l'aide sociale à l'enfance pour solliciter un droit de visite ; que pendant cette période, hormis indiquer qu'il faisait confiance à Mme [A] pour s'occuper des enfants, il ne s'est pas enquis de leur situation et n'a manifesté aucun véritable attachement affectif ;
Que dès lors, à défaut d'un investissement réel tant de Mme [A] vis à vis de [T], [W] et [K] que de M. [O] vis à vis de [W] et [K], et ce depuis de nombreuses années, il convient de constater leur désintérêt manifeste à l' égard de leurs enfants, depluis plus d'un an à la date de la requête du 3 novembre 2011 ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Vu les réquisitions du ministère public,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Le GreffierLe Président
G. CHIROLAP. FONTAINE