AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLÉGIALE
RG : 14/09678
Etablissement Public OPAC DU RHONE AT DE MME [L] [H]
C/
CPAM DU RHÔNE
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 17 Novembre 2014
RG :
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 03 MAI 2016
APPELANTE :
Etablissement Public OPAC DU RHONE
[Adresse 1]
[Localité 1]
Accident du travail de madame [L] [H]
représentée par Me Olivier GELLER de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
CPAM DU RHÔNE
Service des Affaires Juridiques
[Localité 2]
Représentée par Madame [F] [S], munie d'un pouvoir
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 08 Mars 2016
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Jean-Louis BERNAUD, Président
Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller
Marie-Christine DE LA SALLE, Conseiller
Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 03 Mai 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Louis BERNAUD, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Madame [L] [H] , salariée de l'OPAC DU Rhône en qualité de d'agent de résidence, a été victime le 23 mars 2011 à 6 h d'un accident porté à la connaissance de l'employeur le jour même.
La déclaration d'accident établie le 23 mars 2011 par l'employeur indique qu'en déplaçant un conteneur plein pour la collecte des ordures ménagères la salariée a ramassé un sac au sol .
L'OPAC DU Rhône a émis des réserves par lettre du 28 mars 2011 en indiquant qu'en l'absence de témoin la matérialité de l'accident n'était pas démontrée par les seules affirmations de la victime, que l'incident a eu lieu à la prise de poste à six heures et a donc pu se produire en dehors du temps de travail et qu'elle n'a été informée que trois heures plus tard.
Le certificat médical initial établi le 23 mars 2011 fait état d'un « lumbago » nécessitant un arrêt de travail.
La caisse primaire d'assurance-maladie de LYON a pris en charge d'emblée l'accident au titre de la législation professionnelle.
L'OPAC du Rhône a contesté cette décision aux motifs que la matérialité de l'accident n'était pas établie et que la caisse avait violé le principe du contradictoire en ne mettant pas en 'uvre une procédure d'instruction compte tenu des réserves émises.
La commission de recours amiable a rejeté la demande de l'employeur en inopposabilité de la prise en charge de l'accident du travail, ce qui a conduit à la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon, qui par jugement du 17 novembre 2014 a déclaré opposable à l'OPAC du Rhône la prise en charge de l'accident dont a été victime Madame [L] [H] le 23 mars 2011.
Le tribunal a considéré d'une part qu'en l'absence de réserves suffisamment motivées et circonstanciées sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident, et à défaut pour l'employeur d'avoir invoqué l'existence d'une cause étrangère, la caisse n'était pas tenue de procéder à une mesure d'instruction, et d'autre part que l'employeur ne renversait pas la présomption d'imputabilité.
L'OPAC du Rhône a relevé appel de cette décision par déclaration reçue le 12 décembre 2014.
Vu les conclusions soutenues à l'audience du 1er mars 2016 par l'OPAC du Rhône qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement, de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de l'accident aux motifs :
que ses réserves sont suffisamment motivées et circonstanciées au sens de l'article R. 411'11 du code de la sécurité sociale, alors que la matérialité de l'accident ainsi que sa survenance au temps et sur le lieu du travail ont été expressément contestées,en l'absence de tout témoin de l'incident survenu immédiatement après la prise de poste, et que de façon inexplicable elle n'a été informée que trois heures plus tard,
que les jurisprudences invoquées par la caisse primaire d'assurance-maladie ne concernent pas les mêmes faits,
que la caisse fait une confusion entre la recevabilité des réserves et leur caractère bien fondé,
que dès lors qu'un doute est émis sur la matérialité des faits il appartient à la caisse de diligenter une enquête, à défaut de laquelle la décision de prise en charge rendue non contradictoirement est inopposable à l'employeur.
Vu les conclusions soutenues à l'audience du 8 mars 2016 par la caisse primaire d'assurance-maladie de Lyon qui sollicite la confirmation du jugement entrepris aux motifs:
que la victime décrit très précisément les circonstances de l'accident, qui sont corroborées par des éléments objectifs (information immédiate de l'employeur, transport immédiat du salarié à l'hôpital, certificat médical initial établi le jour même du fait accidentel décrivant des lésions compatibles avec la déclaration),
que les réserves non motivées de l'employeur ne pouvaient être prises en compte, puisqu'elles ne remettaient pas en doute la réalité des circonstances décrites par le salarié, ni le fait que celui-ci se trouvait seul au moment de l'accident,
qu'il existe un faisceau de présomptions graves, précises et concordantes permettant d'admettre la réalité des faits allégués et de retenir en conséquence la présomption d'imputabilité, qu'il appartient à l'employeur de détruire en apportant la preuve d'une cause totalement étrangère au travail.
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MOTIFS DE L'ARRET
Selon l'article R.441-11 I du code de la sécurité sociale « la déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur ».
Aux termes du troisième paragraphe (III) du même article « en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès ».
Au sens de ce texte constituent des réserves motivées de la part de l'employeur toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail.
En l'espèce, par lettre recommandée du 28 mars 2011, adressée à la caisse primaire d'assurance-maladie 4 jours après les faits, l'OPAC du Rhône a émis en ces termes des réserves sur l'accident du travail dont Madame [L] [H] prétendait avoir été victime le 23 mars 2011 :
« l'OPAC du Rhône entend formuler des réserves s'agissant des circonstances de temps et de lieu de l'accident déclaré, et donc quant à sa matérialité.
En effet, Madame [L] [H] prétend que le mercredi 23 mars 2011 à 6h00, soit à sa prise de poste, elle se serait blessée au dos après avoir ramassé un sac au sol.
Force est d'observer qu'aucun témoin n'a pu constater la scène accidentelle.
Or, la matérialité de l'accident doit être prouvée et ne peut être démontrée par les seules affirmations de la victime.
L'incident a donc pu se produire en dehors du temps de travail, et avant la prise de poste.
Par ailleurs, l'accident n'a pas été porté à la connaissance de l'employeur immédiatement, mais à 9h00, soit trois heures après, l'intéressé ayant donc poursuivi son activité durant ce laps de temps.
Partant de ces constats, la présomption d'imputabilité n'est pas un invocable.
Telles sont les réserves que l'OPAC du Rhône entend formuler à ce stade de l'instruction. »
Force est de constater qu'en relevant l'absence de témoin et le fait que l'accident, qui se serait produit à la prise de poste à 6h00, a été porté à sa connaissance plusieurs heures plus tard, l'employeur, qui ne s'est pas borné à mettre en doute les déclarations de la salariée, a contesté que les lésions soient la conséquence d'une action violente et soudaine survenue au temps et au lieu du travail.
Ainsi, de telles réserves portant sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident, ne pouvaient-elles être ignorées par la caisse, qui n'avait pas à en apprécier à priori le bien-fondé.
En prenant en charge d'emblée l'accident sans procéder à une instruction préalable, la caisse primaire d'assurance-maladie du Rhône a par conséquent méconnu les dispositions du texte susvisé et ainsi porté atteinte au principe du contradictoire, de sorte que, par voie d'infirmation du jugement, qui a décidé à tort que les réserves de l'employeur n'étaient pas suffisamment motivées et circonstanciées, la prise en charge de l'accident du travail doit être déclarée inopposable à l'OPAC du Rhône.
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PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Déclare inopposable à l'OPAC du Rhône la décision de la caisse primaire d'assurance-maladie du Rhône du 7 avril 2011 de prise en charge d'emblée de l'accident du travail dont a été victime Madame [L] [H] le mercredi 23 mars 2011 à 6h00,
Rappelle que la procédure est sans frais ni dépens.
LA GREFFIÈRELE PRESIDENT
Malika CHINOUNE Jean- Louis BERNAUD