COUR D'APPEL DE MONTPELLIER1 Chambre Section DARRET DU 19 AVRIL 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 05/01008 Décision déférée à la Cour : arrêt rendu par la Cour de Cassation du 1er février 2005 sous le No 150 F-D qui casse et annule l'arrêt du 19 juin 2003 sous le No 334 rendu par la Cour d'Appel de NIMES à l'encontre du jugement du 12 décembre 2000 sous le No 11-00-000611 rendu par le tribunal d'instance de CARPENTRAS
APPELANT :Monsieur Pierre X... né le 01 Novembre 1948 à GENEVE - SUISSE de nationalité Française ... représenté par la SCP SALVIGNOL - GUILHEM avoués à la Cour INTIMEE :SCM BPM CABINET DE RADIOLOGIE DES DOCTEURS BOUFFARD PLISMY MORIN, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis 130 Ave Paul Doumer 84300 CAVAILLON représentée par la SCP DIVISIA -
SENMARTIN, avoués à la Cour ORDONNANCE DE CLOTURE DU 10 Mars 2006COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 MARS 2006 , en audience publique, Jean-Marc ARMINGAUD, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :M. Mathieu MAURI, Président de Chambre,M. Jean-Marc ARMINGAUD, Conseiller,M. Georges TORREGROSA, Conseiller,
qui en ont délibéré.Greffier, lors des débats : Mme CHABBERT-LACAS, greffier en chefARRET :
- CONTRADICTOIRE .
- prononcé publiquement par M. Mathieu MAURI, Président de Chambre
- signé par M. Mathieu MAURI, Président de Chambre et par Mme Josiane MARAND, Greffier présent lors du prononcé.FAITS ET PROCEDURELe 18 juillet 2000 Pierre X..., qui a donné à bail professionnel, le 3 septembre 1985, un local médical sis à CARPENTRAS, Bd du Musée, a fait assigner sa locataire, la Société Civile de Moyens BPM, par devant le Tribunal de Grande Instance de CARPENTRAS, en paiement d'une somme de 127.599F, outre un solde de TVA dû, sur le précédent protocole, soit 3.588,30F, outre sa quote part de réparation actuelle soit 17.599F.Il a fait valoir que ce bail a expiré le 6 avril 2000, en suite d'un congé donné par la Société Civile BPM ;Que le bail comprenait deux clauses de prise en charge des réparations :1) dans les parties privatives, l'ensemble des travaux.2) dans les parties communes, une participation du locataire de 50 %, notamment, en ce qui concerne les réparations de l'article 606 du Code Civil ;Qu'une première tranche de réparations de façade et toiture a engendré une transaction, non encore soldée entre les parties ;Que la nécessité de faire de nouvelles reprises, sur les façades Sud et Ouest de l'immeuble, a fait l'objet d'un devis, le 8 décembre 1999, établi par architecte, et qui s'élève à 228.363,72 F, engendrant une
participation de 127.599,72 F pour le locataire, que celui-ci n'a pas acquittée, malgré les demandes dans ce sens.*La Société civile BPM a répondu qu'un nouveau bail a été signé pour la période du 1er novembre 1998 au 31 octobre 2004, avec un loyer de 8.500,00 francs ;Qu'en vertu de l'article 57-A de la loi du 6 juillet 1989, congé a été donné de cet immeuble pour le 1er avril 2000.Qu'elle est fondée à conclure au débouté des demandes de M. X..., qui n'a jamais entretenu son immeuble, à la limite de l'arrêté de péril, en conscience de cet état ;Que les travaux de réfection étaient dus à un réel danger de chute des corniches, donc à la vétusté, ce qui ne peut être à la charge du locataire, selon l'article 1755 du Code Civil ;Que les locataires ont accepté de participer, dans un esprit de conciliation, mais qu'aucun justificatif ne leur ayant été fourni et des travaux ne leur incombant pas, comme la création de fenêtres, ayant été réalisés, ils ne verseront la somme due au titre de la TVA, que sur justificatif de son montant ;Que la reprise des travaux sur les autres façades procède de l'intention de se faire refaire un immeuble à neuf ;Qu'il est étrange que l'intervention de l'architecte n'ait pas porté, en même temps, sur toutes les façades, ce qui n'était pas nécessaire en mai 1999, date des premiers travaux, le devenant en décembre 1999, au moment du congé.Ils ont demandé le remboursement du dépôt de garantie, soit 17.000 F, avec intérêts depuis le mois d'avril 2000.*Par jugement en date du 12 décembre 2000, le Tribunal a statué en ces termes :Déboute Monsieur Pierre X... de sa demande de participation aux frais de rénovation de l'immeuble loué.Dit que la SCM BPM, devra payer à Monsieur X... la somme de 3.886,36 F au titre du protocole du 28 septembre 1989 (TVA).Dit que Monsieur X... devra rembourser à la SCM BPM la somme de 17.000 francs au titre du dépôt de garantie.La partie qui succombe, X..., supporte les dépens.*Pierre X... a
interjeté appel.
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* *Par arrêt en date du 19 juin 2003, la Cour d'Appel de NIMES a statué en ces termes :Déclare l'appel régulier en la forme mais partiellement fondé,Avec substitution de motifs, confirme le jugement déféré en ce qu'il a :- condamné la SCM BPH à payer à Monsieur X... la somme de 592,47 euros (3.886,36 francs) au titre de la TVA, avec intérêts légaux à compter de la première mise en demeure du 15 février 2000.- débouté Monsieur X... de ses demandes relatives au paiement de sommes au titre des travaux de réfection de l'immeuble.Infirme le jugement sur le dépôt de garantie et, statuant à nouveau :Dit qu'en raison des dégradations et du défaut d'entretien des lieux imputables à la SCM BPH, Monsieur X... est autorisé à conserver le dépôt de garantie de 2.591,63 euros ( 17.000 francs).Rejette le surplus des demandes.Dit que chaque partie conservera la charge des dépens de première instance et d'appel.** *Par arrêt en date du 1er février 2005, la Cour de Cassation a cassé cet arrêt mais seulement en ce qu'il a débouté X... de ses demandes relatives au paiement de sommes au titre des travaux de réfection de l'immeuble.La Cour de Cassation a relevé que pour rejeter la demande de participation du locataire à hauteur de 50 % des travaux d'entretien des façades de l'immeuble, ainsi que de la toiture :"l'arrêt retient, que par le protocole d'accord, librement négocié, le bailleur a clairement renoncé à se prévaloir des dispositions contractuelles du contrat de bail antérieur, et qu'il n'est pas fondé à revenir sur sa renonciation, pour des convenances personnelles, compte tenu du caractère forfaitaire et transactionnel expressément conféré au protocole ;Que le bailleur, qui s'est estimé,
dans le protocole susvisé, intégralement rempli de ses droits, ne peut, dès lors, formuler à l'égard de son locataire, de nouvelles exigences, et lui imposer une participation financière à de nouveaux travaux, qui n'ont absolument pas été prévus par le protocole, et dont la nécessité et l'urgence ne sont par ailleurs aucunement démontrées ;Qu'en statuant ainsi, la Cour d'Appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, d'où il ressortait que les travaux litigieux étaient étrangers au différend que le protocole d'accord avait pour objet de régler, a violé les textessusvisês" ;** *La Cour d'Appel de Montpellier, Cour de renvoi a été régulièrement saisie par Pierre X... le 17 février 2005.** *Par conclusions en date du 21 octobre 1995, il a demandé à la Cour de renvoi :Vu l'arrêt de la Cour de Cassation du 1er février 2005.Vu le contrat de bail et le protocole d'accord.Vu les articles 2046, 2049, 1134 et 606 CC.Vu l'article 1153 CC.- de condamner la SCM BPM au paiement de la somme de 19.452,45 ç, avec intérêts légaux depuis le 15 février 2000, date de la mise en demeure de paiement des sommes dues, à Monsieur X... . - de condamner l'intimée à 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.- de condamner l'intimée au paiement de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens, avec pour ceux exposés devant la Cour de Céans.
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* *Par conclusions en date du 24 janvier 2006, la SCM BPM a demandé à la Cour de renvoi :Vu les dispositions des articles 1134, 1755 et suivant du Code Civil,Vu le protocole d'accord régularisé entre les parties le 28 septembre 1999,- de DIRE ET JUGER que ce protocole régle le sort de l'ensemble des travaux nécessaires,- de DEBOUTER M. X... de l'ensemble de ses demandes.- de CONFIRMER le
jugement du tribunal d'instance de CARPENTRAS du 12 décembre 2000, en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de participation aux frais de rénovation de l'immeuble loué.- de CONDAMNER M. X... à payer à la SCM BPM la somme de 2.000 ç en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.*SUR CE :Pierre X... maintient que l'article 1755 du Code Civil, qui stipule que le locataire n'a pas la charge des travaux causés par la vétusté, n'est pas d'ordre public ;Que le bail y déroge en laissant, pour les parties communes, 50 % de ces réparations, "de toute nature et de toute origine, qui deviendraient nécessaires" ;Qu'appliquer l'article 1755, violerait le bail ;Que le protocole du 28 septembre 1999 ne s'applique pas aux travaux litigieux, ne vaut que pour les travaux limitativement énumérés, dans ce protocole ;Que les nouveaux travaux rentrent dans le cadre du bail, sont donc à prendre à 50 % par le bailleur pour les travaux des parties communes, même ceux concernant les grosses réparation telles que gros murs, voûtes, poutres, toiture entière ;Que sa créance est aussi fondée dans son quantum ;Que la somme de 255.199,40 F ou 19.452,45 ç, qui correspond à des travaux supplémentaires par rapport au protocole du 20 septembre 1999, est conforme au rapport technique de la mairie, aux observations de l'architecte J. Jacques Y.... Pour débouter l'appelant de sa demande afférente à la somme de 127.594 F, le premier juge a retenu, en substance, que le procès verbal d'état des lieux de Me Z..., dressé par un professionnel mais qui n'est pas spécialiste de la construction immobilière, démontre un état général de vétusté ;Que si les locataires ont accepté cet état, en revanche, les factures des maçons A... du 10 janvier 2000, démontrent que la vétusté ne se limitait pas aux façades, et que l'ensemble de l'immeuble était, à l'extérieur, en grand état de
danger.Que la correspondance de M. Y..., architecte, du 8 décembre 1999, fait également état d'urgence.Qu'il ne s'agit donc plus de travaux d'entretien ou de travaux périodiques, mais d'une reprise complète des balcons, cheminées, toiture, façades qui n'ont d'autre origine qu'un défaut prolongé d'entretien, imputable au seul bailleur ;Que dans ces conditions, le locataire n'a pas à participer, malgré les termes du protocole et malgré son accord sur de précédents travaux, à des réparations qui ne sont pas entreprises dans le cadre d'un entretien normal, et peut s'affranchir des stipulations contractuelles, en vertu des dispositions de l'article 1755 du Code Civil.La Cour constate, cependant, que le bail, qui est la loi des parties, stipule expressément, qu'en sus des réparations locatives, prévues par l'article 606 du Code Civil, le preneur aura à sa charge, pour les parties communes 50 % de ces réparations (de toute origine, de toute nature qui deviendraient nécessaires aux lieux loués).Ces dispositions qui dérogent à celles de l'article 1755 du Code Civil, qui ne sont pas d'ordre public, fondent, dans son principe, la demande du bailleur, de remboursement des réparations effectuées par lui, suivant factures dont le montant, lui même n'est pas discuté.Toutefois, sur le quantum de la demande, l'entier bénéfice du contrat, à hauteur de 50 %, ne peut être accordé qu'à un bailleur qui a exécuté le contrat de bonne foi, c'est à dire, qui a effectué des réparations qui s'imposaient, en temps utile, sans attendre la ruine du bâtiment, et surtout, qui a permis au locataire de bénéficier de ces grosses réparations, la cause de l'engagement du locataire à hauteur de 50 %, étant exclusivement dans l'engagement du bailleur de le faire bénéficier de l'exécution des travaux pendant la durée du bail, ou, en tout cas, sur une période très importante.Or, à cet égard, la Société Civile de Moyens souligne, justement, qu'il ne s'agissait pas de réparations classiques, d'un immeuble normalement
entretenu, mais de la réfection complète d'un immeuble, ce sauvetage étant dû à un état de délabrement, dont seul le bailleur est comptable ;Que l'"urgence" de ces travaux n'est apparue qu'au moment du congé délivré le 6 octobre 1999, en décembre 1999, alors que la locataire était en place depuis septembre 1985, de sorte que la locataire s'est vu imposer pendant 14 années d'occuper un immeuble délabré, cet état manifeste, sanctionné par un arrêté de péril en date du 31 mars 1999, valant, à lui seul, interpellation suffisante du bailleur, de faire cesser ce péril, et de réaliser les travaux qui s'imposaient de très longue date ;Qu'elle n'a donc profité de ces travaux que quelques mois, son départ étant intervenu le 6 avril 2000, certains travaux n'ayant été facturés qu'en janvier 2000, date d'autres devis ;Qu'il est curieux que les travaux n'aient pas été prévus par l'architecte Y..., dans son étude technique datée de mars1999. antérieure au protocole d'accord u 28 septembre 1999, ce qui confirme que c'est le congé délivré le 6 octobre 1999, qui a seul provoqué l'action du bailleur.En cet état, Pierre X... n'ayant pas exécuté le bail de bonne foi, la locataire n'ayant eu, de ce fait, qu'une très faible contrepartie par rapport à l'effet des travaux, dont certains éléments, tels que création de fenêtres, échappent au simple entretien, la cour limitera à 2.500 ç le recours du bailleur à l'encontre du preneur.Du fait de la succombance partielle des parties, les dépens de première instance et des appels seront supportés comme suit :- 9/10 par Pierre X... - 1/lO par la SCMBPMPour ce même motif, chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles.PAR CES MOTIFSLa Cour,Statuant sur renvoi de cassation publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré,Dit l'appel très partiellement fondé.Condamne la SCM BPM à payer à Pierre X... la somme de 2.500 ç outre intérêts légaux depuis le 18 juillet 2000, la mise demeure du 15 février 2000
étant insuffisante
Rejette les demandes plus amples ou contraires.Dit que les dépens de première instance et des appels seront supportés comme suit :- 9/10 par l'appelant-1/0 par la SCM BPMAccorde aux avoués le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.LE GREFFIER,
LE PRESIDENT,JM.A/A.B