COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section B ARRET DU 20 FÉVRIER 2003
(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/20714 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 31/05/2001 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 2/2è Ch. RG n :
1999/18586 Date ordonnance de clôture : 6 Décembre 2002 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION APPELANTS : Madame X... DE CLERMONT TONNERRE Y... épouse LE GOUZ DE SAINT Z... tant en son nom personnel qu'es qualités d'administratrice légale de sa fille mineure Charlotte Marie Jeanne LE GOUZ DE SAINT Z... ... par la SCP BOMMART-FORSTER, avoué assisté de Maître SARFATI, avocat au Barreau de Paris, C60 INTIME : M. LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE PARIS A... ayant ses bureaux 20 rue La Boùtie 75008 PARIS et agissant sous l'autorité de Monsieur le Directeur Général des Impôts 92 allée de Bercy 75380 PARIS CEDEX 08 représenté par la SCP NABOUDET-HATET, avoué et à l'audience par Monsieur Farouk B..., Inspecteur principal, muni d'un pouvoir de la Direction Générale des Impôts COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré Président :
Monsieur ANQUETIL C... : Madame BRONGNIART C... : Monsieur DIXIMIER D... : lors des débats et du prononcé de l'arrêt D... : Madame E... MINISTERE F... : à qui le dossier a été préalablement communiqué : représenté aux débats par Madame G..., Substitut général, qui a présenté des observations orales. DEBATS : A l'audience publique du 16 janvier 2002 ARRET : prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame E..., D.... Nicolas LE GOUZ DE SAINT Z... est décédé le 15 août 1989, en France, laissant pour recueillir sa succession son épouse, Madame Y... X... de CLERMONT TONNERRE et leur fille mineure Charlotte. La déclaration de
succession a été enregistrée le 12 juillet 1990 sous le numéro 224/90. Par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 25 octobre 1993, un redressement a été notifié selon la procédure contradictoire. Le 22 février 1995, les contribuables ont déposé une réclamation qui est restée sans réponse. Par assignation du 17 octobre 1995, Madame Y... X... de CLERMONT TONNERRE épouse LE GOUZ DE SAINT Z... agissant tant en son nom personnel qu'au nom de sa fille Charlotte (ci après les consorts de Saint Z...) a saisi le tribunal de grande instance de Paris du litige. Un avis de dégrèvement a été établi le 13 décembre 1995. Par jugement du 27 juin 1996, le tribunal de grande instance de Paris a constaté qu'en raison du dégrèvement total de l'imposition contestée (dégrèvement du 13 décembre 1995) la procédure est sans objet. Le 20 décembre 1995, un nouveau redressement a été notifié et les droits ont été mis en recouvrement par avis de mise en recouvrement rendu exécutoire le 18 décembre 1998. Le 27 janvier 1999, les consorts de Saint Z... ont présenté une réclamation contentieuse qui a fait l'objet d'aucune décision de la part de l'Administration. La cour statue sur l'appel interjeté par les consorts de Saint Z... du jugement rendu le 31 mai 2001 par le tribunal de grande instance de Paris qui, sur leur assignation du 26 octobre 1999, a rejeté l'intégralité de leurs demandes tendant à obtenir le dégrèvement des impositions mises à leur charge en raison de la prescription ou du caractère non fondé du redressement. Vu les conclusions par lesquelles les consorts de Saint Z... agissant tant en son nom personnel qu'au nom de sa fille Charlotte demande à la cour de - la recevoir en son appel, - infirmer le jugement, et statuant à nouveau au niveau du droit européen à titre préjudiciel - saisir la Cour de Justice Européenne afin de savoir si l'Administration a le droit d'imposer des obligations aux contribuables lorsque non seulement aucun texte ne les met en
évidence mais que les textes existant contredisent la position de ladite administration, très subsidiairement - constater la violation dans le cadre de la procédure suivie des articles 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 1 du protocole de la dite convention, - faire droit aux demandes des requérantes, au niveau du droit interne - sur la forme, déclarer nul et non avenu comme prescrit ou infondé le redressement opéré le 20 décembre 1995, - sur le fond, constater le mal fondé de l'argumentation de l'Administration pour violation notamment de l'article 631 du Code général des impôts, en tout état de cause et quels que soient les motivations de la demande, à titre principal - "déclarer nul tout acte qui est directement ou indirectement issu et notamment les avis de mise en recouvrement qui en découlent du 20 décembre 1995 ainsi que tous actes antérieurs et postérieurs à celui-ci", à titre infiniment subsidiaire, si le redressement est maintenu, - dire que l'Administration est au mieux mal fondée à réclamer des pénalités et des intérêts de retard aux concluantes du fait que l'obligation qui leur est imposée ne ressort d'aucun texte ni d'aucune réglementation publiée et valant loi ou décret et ainsi qu'elle l'a déclaré pour la question des pénalités aux premiers juges, - ordonner remboursement aux concluants de toutes sommes versées en plus du principal mis à la charge des requérantes du fait du redressement contesté, en tout état de cause - condamner le Trésor F... à leur payer la somme de 4.573,47 ä par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamner le Trésor F... aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré selon les dispositions de l'article 699 du même code. Vu les conclusions par lesquelles Monsieur le Directeur des Services fiscaux de Paris A... demande à la cour - de dire les appelantes mal fondées en leur appel, - de les en débouter
ainsi que de tous leurs demandes, fins et conclusions, - de confirmer la décision entreprise, - de dire irrecevable la demande en restitution formée par elles, - de les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré dans les conditions de l'article 699 du même code. SUR CE, LA COUR, se référant pour un plus ample exposé des faits, des moyens et prétentions des parties à la décision entreprise et aux dernières conclusions échangées en appel ;
Considérant que les consorts de Saint Z... font valoir que par application de l'article L 180 du Livre des Procédures Fiscales les droits d'enregistrement se prescrivent le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est exigible ; que Nicolas LE GOUZ DE SAINT Z... est décédé le 15 août 1989 et que le redressement à l'origine de l'imposition contestée est du 20 décembre 1995 soit près de 6 années et 4 mois après ledit décès ; qu'elles soutiennent qu'il ne pouvait être tenu compte de la procédure antérieure "car elle portait sur des griefs et des montants sans aucun rapport avec les premiers opérés et ne pouvait en aucune manière être considérée comme une simple substitution de motif, et qu'elle avait fait l'objet d'un dégrèvement total le 13 décembre 1995" ;
Que l'Administration invoque les dispositions de l'article L 189 du Livre des Procédures Fiscales pour soutenir que la prescription a été interrompue par la notification du redressement du 22 octobre 1993 qui a fait courir un nouveau délai de même nature et de même durée que celui interrompu ; que la notification de redressements régulièrement faite dans le cadre de la procédure contradictoire de l'article L 55 du Livre des Procédures Fiscales interrompt la prescription indépendamment de ses motifs ; que l'interruption de la prescription reste acquise même dans le cas où, après avoir mis en
recouvrement l'imposition correspondant au redressement notifié, l'Administration en accorde la décharge d'office ; qu'elle est en droit d'établir une nouvelle imposition jusqu'à l'expiration du délai de répétition ayant commencé à courir à compter de la notification ; que les impositions pouvaient être mises en recouvrement au plus tard le 31 décembre 1998, puisqu'un délai légal de trois ans était ouvert par la notification de redressements en date du 20 décembre 1995 ;
Considérant que la déclaration de succession a été enregistrée le 12 juillet 1990 ;
Que par lettre datée du 22 octobre 1993, l'Administration a notifié une proposition de redressements selon la procédure contradictoire prévue par les articles L 55 à L 61 du Livre des Procédures Fiscales qui avait pour objet, s'agissant de l'actif, l'évaluation des parts de la SARL INTRADEX et du solde créditeur d'un compte courant et s'agissant du passif, la déductibilité d'un rappel d'impôts au titre des années 1981, 1982 et 1983 pour un total de 2.482.532 francs ; qu'un avis de dégrèvement a été émis le 13 décembre 1995 pour la totalité de l'imposition découlant de ces redressements, l'Administration précisant dans son mémoire du 5 février 1996 avoir fait droit à la demande de la requérante qui l'avait assignée devant le tribunal de grande instance de Paris le 17 octobre 1995 ;
Que le 20 décembre 1995, l'Administration a notifié une nouvelle proposition de redressements, selon la même procédure contradictoire, redressements qui avaient pour effet de voir réintégrer à l'actif successoral une somme de 802.688 francs à la suite d'un dégrèvement d'impôt sur le revenu du 29 novembre 1991 et une somme de 971.710 francs à la suite d'un dégrèvement d''impôt sur le revenu du 6 août 1993 ;
Considérant que l'effet interruptif de prescription de la notification de la proposition de redressement du 22 octobre 1993 ne
vaut que pour les mêmes éléments servant de base au calcul de l'impôt au sens de l'article L 55 du Livre des Procédures Fiscales ; que les propositions de redressements des 22 octobre 1993 et 20 décembre 1995 telles que rapportées ci-dessus ne visent pas les mêmes éléments ; que la proposition de redressements du 20 décembre 1995 porte sur des créances nées des dégrèvements d'impôts sur le revenu accordés les 29 novembre 1991 et 6 août 1993, créances non visées par celle du 22 octobre 1993 ;
Qu'en conséquence, l'effet interruptif de prescription de la notification de la proposition de redressement du 22 octobre 1993 ne vaut pas pour ces créances et par infirmation du jugement, le droit de reprise de l'Administration sera déclaré prescrit ;
Considérant que l'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; PAR CES MOTIFS INFIRME le jugement entrepris, et statuant à nouveau, DIT qu'au 20 décembre 1995, s'agissant des créances nées des dégrèvements d'impôts sur le revenu accordés les 29 novembre 1991 et 6 août 1993, le droit de reprise de l'Administration était prescrit, ORDONNE le dégrèvement des impositions résultant de la proposition de redressements datée du 20 décembre 1995, CONDAMNE Monsieur le Directeur des Services Fiscaux de Paris A... à payer à Madame Y... X... de CLERMONT TONNERRE épouse LE GOUZ DE SAINT Z... agissant tant en son nom personnel qu'au nom de sa fille Charlotte une somme de 1.600 euros (mille six cents euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE Monsieur le Directeur des Services Fiscaux de Paris A... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile, LE D...,
LE PRÉSIDENT,