COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 22G
1ère chambre
1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 JANVIER 2011
R.G. N° 09/08249
AFFAIRE :
[Z] [N]
C/
[H] [J] divorcée [N]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Octobre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° chambre : 5
N° Section :
N° RG : 07/00799
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON -GIBOD
- SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIER
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [Z] [N]
né le [Date naissance 4] 1941 à [Localité 8] (IRAN)
[Adresse 3]
représenté par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD - N° du dossier 0947030
Rep/assistant : Me Guillaume FORBIN substitué par Me PORTOS (avocat au barreau de PARIS)
APPELANT
****************
Madame [H] [J] divorcée [N]
née le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 8] (IRAN)
[Adresse 1]
représentée par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIER - N° du dossier 20099126
Rep/assistant : Me Jean-Michel VIVES (avocat au barreau de PARIS)
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Décembre 2010, Madame Bernadette WALLON, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Bernadette WALLON, président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
M. [Z] [N] et Mme [H] [J] se sont mariés le [Date mariage 5] 1966 à [Localité 8].
Une ordonnance de la Cour suprême de Colombie Britannique en date du 05 juin 2000 a prononcé le divorce de M. [Z] [N] et Mme [H] [J] le 5 juin 2000. Cette décision est devenue définitive.
Par assignation du 26 septembre 2001, M. [Z] [N] a saisi le tribunal de grande instance de Nanterre d'une demande d'exequatur de l'ordonnance rendue par la Cour suprême de Colombie Britannique le 05 juin 2000.
Par jugement du 11 juin 2003, le tribunal de grande instance de Nanterre a déclaré exécutoire en France l'ordonnance rendue le 05 juin 2000 par la cour suprême de Colombie Britannique de Vancouver, devenue définitive le 06 juillet 2000, qui a prononcé le divorce des époux [N]
Le jugement du 11 juin 2003 a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 09 septembre 2004.
Par arrêt du 10 mai 2006, le pourvoi formé par Mme [H] [N] a été rejeté.
Le 12 janvier 2007, M. [Z] [N] a assigné Mme [H] [J] devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin de voir compléter le jugement d'exequatur du 11 juin 2003 par la désignation de la chambre départementale des notaires des [Localité 6] aux fins de liquidation du régime matrimonial des époux et subsidiairement d'ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux et de désigner la chambre des notaires de [Localité 6] pour y procéder.
Par déclaration du 23 octobre 2009, M.[Z] [N] a interjeté appel du jugement rendu le 26 octobre 2007par le tribunal de grande instance de Nanterre qui l'a débouté de ses demandes et l'a condamné aux dépens.
Vu les conclusions de M. [Z] [N] en date du 29 octobre 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et par lesquelles il demande à la cour, au visa des articles 544 et 815-1 du code civil, 51 et 509 du code de procédure civile, de :
* le dire recevable et fondé en son appel,
* infirmer la décision entreprise,
* à titre principal,
- dire que le juge de l'exequatur a compétence pour trancher des demandes additionnelles, reconventionnelles ou connexes à celles qui ont été tranchées par le juge étranger,
- en conséquence désigner la chambre départementale des notaires, avec faculté de délégation, à l'effet de procéder à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux des époux pour leurs biens situés en France,
* à titre subsidiaire,
- ordonner le partage des biens situés en France appartenant indivisément à M. [Z] [N] et à Mme [H] [J],
- désigner en conséquence la chambre départementale des notaires des [Localité 6], avec faculté de délégation, à l'effet de procéder au partage des biens immobiliers et mobiliers situés [Adresse 1], appartenant aux ex-époux [J]- [N],
* en tout état de cause
- condamner Mme [H] [J] aux entiers dépens, ceux d'appel pouvant être recouvrés directement par la SCP Lissarague Dupuis Boccon Gibod.
Vu les dernières conclusions de Mme [H] [J] divorcée [N] en date du 12 mai 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et par lesquelles elle demande à la cour de :
- débouter M. [Z] [N] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- condamner M. [Z] [N] aux entiers dépens d'instance d'appel qui seront recouvrés par la SCP Jullien Lecharny Rol Fertier, selon l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [H] [J] oppose aux demandes de l'appelant :
- que le juge de l'exequatur ne peut ni modifier ni compléter ni amender de quelque manière que ce soit le dispositif de la décision étrangère,
- qu'en vertu des articles 264-1 ancien et 267 du code civil, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux relève de la compétence du juge aux affaires familiales,
- qu'en l'espèce, le juge du divorce a été le juge canadien des affaires familiales et le juge de l'exequatur français n'est pas compétent en matière de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux des époux,
-que dans le cadre de la procédure initiale d'exequatur ayant abouti au jugement du 11 juin 2003, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 09 septembre 2004, une telle demande n'a jamais été formulée par M.[N],
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 novembre 2010.
MOTIFS DE LA DECISION
Si le juge de l'exequatur n'a pas le pouvoir de réviser la décision étrangère ni en conséquence d'y ajouter, il ne lui est pas pour autant interdit de statuer sur une demande additionnelle à la demande principale d'exequatur lorsque l'objet de la demande additionnelle à la demande principale d'exequatur se présente comme une conséquence nécessaire de la décision étrangère.
M.[N] justifie que, postérieurement à la procédure d'exequatur qui a abouti à ce que l'ordonnance rendue le 05 juin 2000 par la cour suprême de British Columbia de Vancouver (Canada) prononçant son divorce soit exécutoire en France, il a saisi la chambre départementale des notaires des [Localité 6], qui, par lettre du 19 septembre 2006, lui a opposé l'absence dans le jugement du 11 juin 2003 de la désignation du président de la chambre des Notaires des [Localité 6] concernant la liquidation du régime matrimonial.
Il résulte des pièces régulièrement versées aux débats que par acte notarié du 16 septembre 1981, pendant leur mariage, M et Mme [N] ont acquis les lots de copropriété n°11,80, 81, 152 et 47 dans un immeuble sis [Adresse 1], l'acte indiquant qu'ils sont mariés sans contrat préalable à leur union.
Le certificat de coutume établi par le cabinet Shapray CramerLLP , avocats à Vancouver, indique , sans que ces éléments de fait et de droit soient démentis, que le partage du patrimoine familial situé en Colombie britannique s'est effectué dans le cadre d'une autre procédure que le divorce, le partage du patrimoine familial pouvant s'opérer en Colombie Britannique séparément de la procédure de divorce.
Ce certificat précise, sans être contredit :
- que si le divorce ne peut s'obtenir au Canada qu'en vertu d'une loi fédérale, qui régit le divorce et les obligations alimentaires entre ex-époux, cette loi fédérale ne régit pas le partage du patrimoine matrimonial qui est laissé aux juridictions provinciales, à savoir en Colombie britannique le Family Relations Act,
- que les lois provinciales, tels que le FRA, n'ont aucune portée extra-juridictionnelle en sorte qu'il n'est pas possible d'obtenir le partage de biens situés hors juridiction, les tribunaux provinciaux n'ayant compétence in rem que sur les biens mobiliers ou immobiliers situés à l'intérieur de la province,
- que s'ils peuvent utiliser leur compétence in personam pour forcer une partie résidente en Colombie Britannique à effectuer des transactions ayant une portée extra juridictionnelle dans la mesure où l'ordonnance peut être exécutoire, tel n'était pas le cas en l'espèce dans la mesure où Mme [N] résidait en France,
- qu'en conséquence, la cour suprême n'avait compétence que sur les biens des époux situés en Colombie Britannique.
Le fait que les biens que les époux [N] possédaient en Colombie Britannique ont déjà été partagés et que cette répartition du patrimoine n'a pas concerné l'appartement de [Localité 7] est confirmé par la production de l'ordonnance de la cour suprême de Colombie Britannique du 22 juillet 1997 et de sa traduction, alors même qu'il résulte du certificat du cabinet Shapray Cramer LLP, qui relate plusieurs procédures ayant opposé au Canada les époux [N], que l'existence de ce bien immobilier indivis situé en France était connu du juge canadien.
La demande de nomination d'un notaire en ce qu'elle tend à procéder à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux des ex-époux en France n'est que la conséquence de droit du divorce prononcé par une décision étrangère exécutoire en France.
Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de désigner le président de la chambre départementale des notaires des [Localité 6], avec faculté de délégation, à l'effet de procéder à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux de M [N] et de Mme [J] pour leurs biens situés en France.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris,
STATUANT À NOUVEAU,
DÉSIGNE le président de la chambre départementale des notaires des [Localité 6], ou son délégataire, afin de procéder à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux situés en France de M [Z] [N] et de Mme [H] [J] divorcée [N],
DIT que les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de partage avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avoués de la cause.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne LOUYS conseiller pour le Président empêché et par Madame Sylvie RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le conseiller,