COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 23 DECEMBRE 2014
R.G. N° 12/03861
SB/CA
AFFAIRE :
[G] [S]
C/
SAS SODICHAR
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Juillet 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES
Section : Commerce
N° RG : 11/00604
Copies exécutoires délivrées à :
la SARL GUERIN
Copies certifiées conformes délivrées à :
[G] [S]
SAS SODICHAR
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT TROIS DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [G] [S]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparante en personne, assistée de M. François NORMAND (Délégué syndical ouvrier) selon pouvoirs
APPELANTE
****************
SAS SODICHAR
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Isabelle GUERIN de la SARL GUERIN, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000053
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BOSI, Président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie BOSI, Président,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
La Cour renvoie pour l'exposé des faits et de la procédure à son précédent arrêt avant-dire droit du 10 avril 2014.
Il sera rappelé que la société SODICHAR exploite un commerce sous l'enseigne E.LECLERC au centre commercial [Localité 2].
la société SODICHAR a embauché [G] [S] comme employée commerciale.
[G] [S] travaillait en dernier lieu au rayon droguerie, parfumerie, hygiène. Elle mettait en rayon les produits destinés à la vente.
[G] [S] a été arrêtée plusieurs fois pour maladie entre le 30 novembre 2009 et le 20 novembre 2010.
Elle a été victime d'un accident du travail qui a donné lieu aux arrêts médicaux du 13 décembre 2010 au 18 décembre 2010, du 16 décembre 2010 au 31 décembre 2010 et du 8 janvier 2011 au 15 janvier 2011.
Elle a de nouveau été en arrêt maladie du 17 janvier au 8 février 2011 et du 9 février au 10 février 2010.
Lors de la visite médicale du 10 février 2011, le médecin du travail l'a déclarée apte au travail avec des restrictions d'aptitude comprenant le port de charges de plus de 10 kg.
Les 11 février 2011, l'employeur a écrit au médecin du travail que la salariée ne pouvait être réintégrée pour des raison de sécurité car son poste de travail l'amenait inévitablement à porter des charges de plus de 10 kg. Il sollicitait en urgence une étude de poste afin de pouvoir y apporter d'éventuels aménagements.
L'employeur et la salariée ont eu des contacts.
[G] [S] s'est notamment plainte auprès de lui de faire l'objet de harcèlement moral.
Par lettre du 15 février 2011, la société SODICHAR l'a informée des démarches qu'elle avait faites pour son emploi, lui a précisé qu'elle n'avait pas l'intention de s'engager dans une rupture conventionnelle de son contrat de travail, s'est étonnée des accusations de harcèlement qu'elle avait portées contre sa supérieure hiérarchique et lui a dit qu'elle ferait une enquête interne si elle les maintenaient.
Le même jour, [G] [S] a contesté la suspension de son contrat de travail.
Le 22 février 2011, la société SODICHAR lui a répondu que la visite de reprise avait dû être repoussée au 24 février 2011 compte tenu de la prolongation de son arrêt de travail ; que son contrat de travail étant suspendu, elle n'avait pas à lui verser une rémunération ; qu'elle déclenchait une enquête en interne et informait le CHSCT de ses accusations de harcèlement contre sa supérieure hiérarchique.
Lors de la visite du 24 février 2011, le médecin du travail a estimé que [G] [S] était 'apte à la reprise, sous réserve d'éviter au maximum le port de charges de plus de 10 kilos pour un mois et de favoriser l'utilisation de transpalette électrique. Restriction portée pour un mois. A revoir le 15 mars 2011 à 14 heures 50 ou visite occasionnelle à la demande du médecin du travail.'
Par lettre du 25 février 2011 la société SODICHAR a indiqué à [G] [S] qu'elle ne pouvait la réintégrer à son poste de travail et qu'elle interrogeait le médecin du travail sur les possibilités d'aménagement tout en précisant qu'elle ne disposait actuellement d'aucun autre poste disponible. La société a ajouté qu'elle transmettait une copie de la lettre de la salariée contenant les accusations de harcèlement au médecin du travail.
Le même jour, la société SODICHAR a écrit au médecin du travail.
Le 15 mars 2011, après une nouvelle visite, le médecin du travail a déclaré [G] [S] inapte à tout poste dans l'entreprise, en urgence : ' Madame [S] n'ayant pas repris le travail à la suite de l'inaptitude posée le 24 février 2011, par manque d'un poste aménagé disponible (voir courrier de l'employeur du 25 février dernier),la visite médicale de ce jour est considérée comme visite de reprise de travail. Inapte à la reprise de travail à son poste antérieur, l'état de santé de la salariée ne permettant pas de formuler de possibilité de reclassement dans l'entreprise. Cet avis est formulé dans le cadre de la procédure d'urgence prévue à l'article R.4624-31 du code du travail. De ce fait, l'inaptitude est définitive et prononcée en une seule fois.'
Le 18 mars 2011, l'employeur a écrit à [G] [S] qu'il disposait d'un mois à compter du 15 mars 2011 pour rechercher un reclassement ou à défaut pour s'orienter vers un éventuel licenciement, pendant ce délai, le contrat de travail de [G] [S] était suspendu sans rémunération.
L'employeur a également indiqué que le médecin du travail était venu dans l'entreprise et avait constaté qu'aucun aménagement de poste n'était envisageable.
Le 30 mars 2011, le médecin du travail a réalisé une nouvelle visite médicale et rendu l'avis suivant : ' Suite à l'entretien avec l'employeur le 17 mars 2011, la visite d'inaptitude définitive en une seule visite selon la procédure d'urgence le 15 mars dernier est transformée en une première visite d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise. Sur la deuxième visite d'inaptitude, ce jour, dans le cadre de l'article R 4624-31 du Code du travail : Madame [S] [G] est inapte définitivement dans tout poste dans le magasin E.LECLERC, situé à [Localité 2]. Par contre, la salariée est apte à son poste antérieur d'employée commerciale dans tous les autres magasins de l'enseigne E.LECLERC, sous réserve de tenir compte des recommandations CARSAT sur le port maximal de charges répétitives chez les femmes.'
la société SODICHAR, qui affirmait avoir procédé vainement aux recherches de reclassement auprès de sociétés du même secteur d'activité que le sien, a convoqué [G] [S] à un entretien préalable le 11 avril 2011.
[G] [S] ne s'est pas présentée à l'entretien fixé au 20 avril 2011.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 avril 2011, la société SODICHAR lui a notifié son licenciement pour cause d'inaptitude et impossibilité de reclassement à compter de la première présentation du courrier.
Le 29 avril 2011, [G] [S] a signé son solde de tout compte.
[G] [S] a interjeté appel principal du jugement rendu le 30 juillet 2012 par le conseil des prud'hommes de Chartres qu'elle avait saisi pour obtenir la condamnation de la société SODICHAR à lui payer diverses sommes et qui l'avait déboutée de ses demandes sauf celle relative au paiement du complément de salaire à laquelle il avait fait droit à concurrence de 3.941 euros et celle relative à l'indemnisation des frais irrépétibles de procédure à laquelle il avait fait droit à concurrence de 800 euros . Le conseil avait par ailleurs débouté la société SODICHAR de sa demande reconventionnelle et l'avait condamnée aux dépens.
Dans son arrêt du 10 avril 2014, la cour a ordonné la réouverture des débats pour permettre à [G] [S] de conclure en motivant et argumentant clairement chacune de ses demandes et à la société SODICHAR de répliquer si elle le souhaitait.
Par conclusions du 10 octobre 2014, [G] [S] a réitéré ses précédentes demandes.
Par conclusions du même jour la société SODICHAR a maintenu les siennes sauf sur l'article 700 du code de procédure civile. Elle demande désormais la condamnation de [G] [S] à lui payer la somme de 3.000 euros sur ce fondement.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.
MOTIFS
Sur l'absence de visite médicale de reprise,
Considérant que [G] [S] reproche à l'employeur de ne pas avoir organisé la visite médicale de reprise 'depuis le 3 janvier 2011" ainsi que 'dans les 8 jours qui ont suivi la fin de son 1er arrêt de travail du 2 janvier 2011 et de son 2ème arrêt de travail du 15 janvier 2011" ;
Qu'elle en déduit que 'son contrat reste toujours suspendu au titre de l'accident du travail' et qu'en ' l'absence de visite de reprise suite à l'accident du travail, c'est la législation Accidents du travail-MP qui s'applique, même si la salariée a été par la suite consolidée puis en arrêt maladie ; le contrat reste suspendu en conséquence de l'accident du travail' ;
Considérant que la société SODICHAR conteste les faits reprochés et estime que [G] [S] ne tire pas les conséquences juridiques de ce qu'elle soutient ;
Considérant qu'en l'espèce, la société SODICHAR indique, sans soulever de contestation de la part de la partie adverse, que [G] [S] a cessé de travailler pour maladie :
- du 30 novembre au 11 décembre 2009
- du 10 décembre au 16 décembre 2009
- du 16 décembre au 10 janvier 2010
- du 3 juin au 15 juin 2010
- du 15 juin au 22 juin 2010
- du 22 juin au 3 juillet 2010
- du 3 juillet au 17 juillet 2010
- du 2 août au 4 août 2010
- du 6 septembre au 8 septembre 2010
- du 12 novembre au 20 novembre 2010
Considérant qu'il ressort de la feuille d'accident du travail versée aux débats que [G] [S] a eu un accident du travail le 11 décembre 2010 et qu'elle s'est plainte de douleurs au dos ;
Que les certificats médicaux pour maladie professionnelle et accident du travail produits par l'appelante montrent qu'elle a été arrêtée à cause de l'accident de travail du 31 décembre 2010 au 3 janvier 2011 et du 8 janvier 2011 au 12 janvier 2011 inclus;
Que les attestations de paiement des indemnités journalières qu'elle communique font apparaître qu'elle a été arrêtée davantage et qu'elle a été indemnisée à cause de l'accident du travail pour la période du 14 décembre au 18 décembre 2010, du 19 décembre 2010 au 31 décembre 2010, et du 9 janvier au 15 janvier 2011 ;
Considérant que l'employeur démontre par la production des avis d'arrêt maladie que la salariée n'a pas repris son travail après le 15 janvier 2011 et qu'elle a été arrêtée cette fois pour maladie du 17 janvier au 8 février 2011 ;
Considérant qu'aux termes de l'article R 4624-21 du Code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du licenciement, le salarié, après au moins huit jours d'absence pour cause d'accident du travail, doit bénéficier d'un examen de reprise du travail par le Médecin du travail ;
Que l'article R 4624-22 du même code précise que cet examen doit avoir lieu lors de la reprise du travail ou au plus tard dans un délai de huit jours ;
Considérant qu'en l'espèce, le 2 janvier 2011 était un dimanche ; qu'il n'était pas anormal pour l'employeur de ne pas organiser de visite médicale de reprise un jour de repos ;
Que le délai de huit jours suivant le 2 ou le 3 janvier 2011 ne s'était pas écoulé lorsque [G] [S] a de nouveau été arrêtée le dimanche 9 janvier 2011 à cause de l'accident du travail ;
Que son arrêt de travail a duré jusqu'au samedi 15 janvier 2011 ;
Que le lundi 17 janvier 2011, elle n'a pas repris son travail puisqu'elle a bénéficié d'un nouvel arrêt de travail mais cette fois pour maladie jusqu'au mardi 8 février 2011 ;
Considérant en conséquence que [G] [S] ne saurait reprocher avec pertinence à la société SODICHAR de ne pas lui avoir permis de passer la visite médicale de reprise les 2 et 3 janvier 2011 ainsi que le 15 janvier 2011 ;
Qu'elle sera convoquée dans les délais légaux, le 9 février 2011, dès la fin de son dernier arrêt de travail pour une visite médicale avec le médecin du travail fixée au 10 février 2011 ;
Qu'il échet de relever que la salariée a bénéficié par la suite de trois autres visites médicales auprès de ce même médecin les 24 février 2011, 15 mars 2011 et 30 mars 2011 ;
Que dans ces circonstances, [G] [S] sera déboutée de sa demande;
Sur le licenciement pour inaptitude,
Considérant que la lettre de licenciement du 27 avril 2011 fixe les limites du litige;
Que [G] [S] a été licenciée 'pour inaptitude physique en raison de l'impossibilité de [la]reclasser dans l'entreprise, à la suite de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail.' ;
Considérant que les parties n'ont pas contesté l'avis de ce médecin sur l'inaptitude professionnelle de la salariée ; qu'il s'impose ;
Considérant que [G] [S] reproche à la société SODICHAR de ne pas lui avoir proposé un autre emploi approprié à ses capacités après avoir demandé l'avis des délégués du personnel ainsi que de ne pas avoir procédé à des recherches sérieuses de reclassement dans son intérêt ;
Considérant que la société SODICHAR affirme que l'inaptitude professionnelle n'est pas liée à l'accident du travail et qu'elle a été décidée après une hospitalisation de [G] [S] ;
Mais considérant que l'avis d'inaptitude professionnelle du 30 mars rappelle l'obligation de tenir compte des recommandations sur le port maximal des charges répétitives pour la salariée ; que cette mention renvoie aux précédents avis des 10 et 24 février 2011 qui préconisaient déjà d'éviter au maximum le port des charges de plus de 10 kg ; que cette réserve implique que l'avis d'inaptitude présente un lien même partiel avec l'accident du travail qui avait provoqué des douleurs au dos et un lumbago aigu selon les indications portées sur les feuilles d'accident du travail des 11 décembre 2010 et 8 janvier 2011 ainsi que sur le certificat médical d'accident du travail du 8 janvier 2011 ;
Considérant que le grief consistant dans l'absence d'avis des délégués du personnel est inopérant ; que la société SODICHAR justifie par la production de la délibération du 8 avril 2011 avoir consulté les délégués du personnel sur les possibilités de reclassement de [G] [S] et leur avoir fourni les avis d'inaptitude ; qu'il est indiqué dans cette délibération que des échanges ont eu lieu à partir des avis du médecin du travail et de la liste des postes existant au sein de l'entreprise et que les délégués ont pris acte de l'inaptitude de [G] [S] à son poste d'employée commerciale, aux postes d'hôtesse de caisse et à tout autre poste au sein de l'hypermarché ; qu'ils ont estimé en conséquence qu'aucun autre poste ne peut lui être proposé ;
Considérant que, s'agissant du grief tiré de l'absence de recherche de reclassement, le médecin du travail a indiqué dans son avis du 30 mars 2011 qu'après entretien avec l'employeur le 17 mars 2011, il s'est placé dans le cadre de la procédure d'urgence et que la visite du 15 mars 2011 a été transformée en 1ère visite ; que ce médecin a conclu après la 2ème visite d'inaptitude du 30 mars 2011 que [G] [S] était inapte à tous postes dans le magasin E LECLERC situé à [Localité 2] mais que par contre elle était apte à son poste antérieur d'employée commerciale dans les autres magasin de l'enseigne E.LECLERC, sous réserve de tenir compte des recommandations CARSAT sur le port maximal de charges répétitives pour les femmes ;
Considérant que pour établir les démarches faites pour permettre le reclassement de la salariée, l'employeur produit les lettres qu'il a adressées le 5 avril 2011 aux magasins CARREFOUR, INTERMARCHE, LIDL, ALDI, GEANT, LEADER PRICE de [Localité 1], [Localité 2] ou [Localité 3] ainsi qu'une seule réponse, celle du magasin GEANT CASINO, laquelle est négative ;
Considérant que malgré les préconisations du médecin du travail, il apparaît que l'employeur n'a pris attache avec aucun magasin exploitant sous l'enseigne E. LECLERC pour permettre à l'employée de retrouver un poste identique à son poste antérieur ;
Considérant que la société SODICHAR explique qu'elle n'appartient pas à un groupe de sociétés ; qu'elle ne possède pas de lien capitalistique ou financier avec d'autres sociétés exploitant leurs activités sous la même enseigne qu'elle ; que son capital est détenu par une personne physique, M [F] et qu'elle paie une rétribution pour pouvoir utiliser l'enseigne E. LECLERC ;
Mais considérant que le seul fait de revendiquer son indépendance juridique et financière ne permet pas à l'employeur de caractériser l'impossibilité d'assurer une permutation de personnel avec d'autres entreprises participant au même réseau de distribution et ayant des activités, des objectifs et des emplois identiques ;
Considérant dès lors que la société SODICHAR est défaillante à démontrer qu'elle s'est acquittée de son obligation de reclassement ; que le licenciement de [G] [S] a été prononcé sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;
Sur les demandes pécuniaires liées au licenciement,
Considérant qu'en application de l'article L.1226-15 du code du travail, lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte et en l'absence de réintégration, le tribunal octroi une indemnité au salarié qui ne peut être inférieure à douze mois de salaires; que cette indemnité se cumule avec l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L1226-14 ;
Considérant que [G] [S] demande le paiement de la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article L.1226-15 sus-visé ;
Considérant que suivant les bulletins de paie fournis, sur la base de 151,67 heures, le salaire mensuel de base de [G] [S] était de 1433, 25 euros ;
Que d'après l'attestation Assedic, en raison de ses absences, la salariée a reçu à titre de salaire brut la somme de 9772,73 euros pour la période allant du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 ; qu'à cette somme s'est ajoutée celle de 779,48 euros au titre de 14 jours de congés payés soit un total de 10.552,21 euros;
Considérant en conséquence que la cour dispose des éléments d'appréciation pour fixer à la somme de 17.500 euros le montant de l'indemnité due pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement ;
*
Considérant que sur le fondement de l'article L.1226-14 du code du travail, [G] [S] demande la paiement de la somme de 2.866,50 euros à titre d'indemnité compensatrice outre la somme de 666,69 euros à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement ;
Considérant que l'article L.1226-14 alinéa 1 du code du travail dispose que la rupture du contrat de travail dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelle plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L1234-9 ;
Considérant que [G] [S] a été recrutée le 30 mars 2009 par la société SODICHAR par un contrat à durée déterminée ; que son contrat a été transformé en contrat à durée indéterminée à compter du 2 juin 2009 ; qu'elle a été licenciée le 27 avril 2011 ; que son ancienneté étant au moins de deux ans, elle a droit à une indemnité compensatrice d'un montant égal à deux mois de salaire ;
Qu'il sera fait droit à sa demande en paiement de la somme de 2.866,50 euros;
Considérant que l'indemnité spéciale de licenciement est due ; qu'il sera fait droit à la demande en paiement qui est limitée à la somme de 666,69 euros par l'appelante ;
*
Considérant que [G] [S] réclame le paiement de la somme de 3.500 euros pour le non-respect des dispositions de l'article R.1234-9 du Code du travail;
Considérant que [G] [S] se contente d'alléguer un préjudice qu'elle ne précise pas ;
Que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande indemnitaire de ce chef ;
Considérant qu'il sera par contre fait droit à la demande de remise de documents dans les termes du dispositif ;
Que l'astreinte de 50 euros par jour de retard sollicitée pour obtenir la remise d'une attestation Assedic n'est pas nécessaire ;
Sur la demande en paiement liée au contrat de travail,
Considérant que le conseil des prud'hommes a condamné la société SODICHAR à payer à [G] [S] la somme de 3.941 euros sur le fondement de l'article L1226-11 du code du travail au motif qu'entre la visite médicale du 10 février 2011 et la lettre de licenciement du 27 avril 2011, il s'est écoulé plus de deux mois et demi ;
Considérant que la société SODICHAR demande l'infirmation de la décision de première instance en faisant valoir qu'elle a respecté les dispositions de l'article L 1226-11 du code du travail et le délai d'un mois suivant l'examen médical de reprise de travail pour procéder au licenciement de la salariée ;
Considérant que la salariée demande la confirmation de la condamnation au paiement de la somme de 3.941 euros mais sur le fondement de l'article L 1226-8 du Code du travail ;
Considérant que la société SODICHAR n'a pas permis à [G] [S] de reprendre son travail après l'avis aptitude avec réserve sur le port de charges;
qu'elle a indiqué qu'elle avait demandé des études pour permettre un aménagement de poste mais que de fait elle n'a rien proposé à la salariée pour que celle-ci puisse retravailler en sécurité dans un délai raisonnable ;
Considérant que le comportement de l'employeur a conduit à priver [G] [S] de son salaire à partir du 10 février 2011, et ce, jusqu'à la date de son licenciement ;
Que la condamnation de la société SODICHAR au paiement de la somme de 3.941 euros sera confirmée;
Sur le harcèlement moral,
Considérant que [G] [S] développe son argumentation sur le harcèlement moral au visa de l'article L.1152-1 du code du travail ;
Qu'elle affirme que le médecin du travail a pris en compte le harcèlement moral qu'elle a vécu en visant sa pièce n°22 ;
Qu'elle rappelle qu'elle a, elle-même, informé sa direction des faits de harcèlement et que la société SODICHAR n'aurait pas manqué de porter plainte à son encontre si ses accusations avaient été mensongères ;
Que la volonté de l'employeur de ne pas la reclasser est 'peut être lié à la dénonciation du harcèlement';
Que la société SODICHAR n'a pas respecté les dispositions de l'article L.4624-1 du Code du travail ;
Qu'elle réclame en conséquence la condamnation de la société à lui verser la somme de 2.500 euros ;
Considérant que la société SODICHAR s'oppose aux demandes ;
Considérant que la pièce n°22 visée par l'appelante correspond à l'avis d'inaptitude du 30 mars 2011 ;
Considérant que [G] [S] s'est plainte dans sa lettre du 7 mars 2001 des agissements de sa supérieure hiérarchique directe (N+1) et ultérieurement du harcèlement sexuel qu'elle subissait de la part du supérieur hiérarchique de celle -ci (N+2) ;
Qu'elle indique que sa supérieure hiérarchique directe 'se complaisait à désorganiser sa réserve' ; qu'elle se plaignait ensuite auprès de son propre supérieur hiérarchique (N+2) ; que celui-ci lui enjoignait de tout remettre en ordre en la menaçant d'être licenciée tandis que la N+1 se moquait d'elle ; que les faits se passaient devant des témoins dont elle citait les noms;
Que la salariée relate également les propos que le N+2 lui a tenus de façon répétée entre le mois de février 2009 et le 6 juin 2009 ; qu'il s'agit soit d'allusions soit de propos et de comportement lui faisant comprendre qu'il cherchait à avoir une relation intime avec elle ; que plus particulièrement le 23 mai 2009, il lui a dit : 'je pense que tous les deux, on va finir au lit' et que le 6 juin 2009, il a tenté de l'embrasser dans la réserve ;
Considérant que les éléments dénoncés par la salariée pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ;
Considérant que les lettres de dénégation des deux personnes mises en cause ne sont pas suffisantes pour établir l'absence de harcèlement ;
Considérant que l'employeur verse également aux débats les lettres qu'il a écrites:
- au médecin du travail le 25 février 2011 pour lui signaler les faits de harcèlement dont se plaignait [G] [S] et pour lui demander d'intervenir ainsi que de lui faire des préconisations ; qu'il y mentionne également avoir demandé au CHSCT de réaliser une enquête en interne ;
- à la DIRECCTE le 6 juillet 2011 pour l'informer des faits et de ses démarches; qu'il rapporte que le Médecin du travail n'a pas préconisé de mesure spécifique, que la N+1 a été choquée par les accusations portées contre elle, qu'il n'a pris aucune sanction, [G] [S] étant dans l'incapacité de relater des faits précis mais qu'il a rappelé au responsables des rayons l'importance de la fonction de management auprès de leurs équipes ;
Considérant que les conclusions des enquêtes réalisées dans la société ne sont pas produites ; que les éléments fournis par l'employeur sont insuffisants pour prouver que les agissements dénoncés ne sont pas constitutifs de harcèlement au moins en ce qui concerne le N+2 ;
Considérant par ailleurs que [G] [S] produit plusieurs prescriptions médicales de produits anti-dépresseurs depuis 2009 et un certificat médical du 26 février 2011 faisant état de la prise en charge d'une 'symptologie anxio dépressive' que la patiente met en lien avec ses difficultés professionnelles;
Considérant que ces faits ont directement contribué à dégrader les conditions de travail de la salariée ;
Considérant dès lors qu'il sera fait droit à la demande de réparation du préjudice moral subi par la salariée dans la limite de 1.000 euros ;
Que l'employeur sera condamné au paiement de cette somme à titre de dommages et intérêts ;
Sur les intérêts de retard,
Considérant que les créances salariales sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation soit le 12 septembre 2011 ;
Considérant que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Sur l'article 700 du Code de procédure civile,
Considérant que l'équité commande d'indemniser [G] [S] des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en cause d'appel;
Que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a fixé à la somme de 800 euros le montant de cette indemnité ; que la somme de 500 euros sera ajoutée en sus en cause d'appel ;
Que la société SODICHAR sera condamnée au paiement de ces sommes ;
Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer une indemnité pour frais irrépétible de procédure à l'encontre de la société SODICHAR ;
Considérant que la société SODICHAR qui succombe à l'action sera condamnée aux entiers dépens de la procédure ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant contradictoirement,
Infirme partiellement le jugement du conseil des prud'hommes de Chartres du 30 juillet 2012,
Statuant de nouveau sur les chefs infirmés,
Dit que le licenciement de [G] [S] par la société SODICHAR est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la société SODICHAR à payer à [G] [S] les sommes suivantes :
- 17.500 euros en indemnisation de la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement ;
- 2.866,50 euros à titre d'indemnité compensatrice ;
- 666,69 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement ;
- 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Dit que les créances indemnitaires sont productives d'un intérêt au taux légal à compter du présent arrêt;
Confirme le jugement entrepris sur la condamnation de la société SODICHAR à payer à [G] [S] la somme de 3.941 euros à titre de salaire ;
Y ajoutant,
Dit que la créance salariale est productive d'un intérêt au taux légal à compter du 12 septembre 2011;
Ordonne à la société SODICHAR de remettre à [G] [S] une attestation Assedic et
des bulletins de salaire conformes à la présente décision ;
Condamne la société SODICHAR à payer à [G] [S] une indemnité de 500 euros en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus de l'indemnité de 800 euros fixée par le conseil des prud'hommes de Chartres ;
Déboute les parties en leurs autres demandes plus amples ou contraires ;
Condamne la société SODICHAR aux dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l'art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT