Arrêt no 34 du 10 Avril 1986Source : SIJIP - Système d'informations juridiques, institutionnelles et politiques (A.I.F.)
A Af c. JOSSOU Hountognon ThéodoreCRITERE DE LA QUALITE DES PARTIES AU PROCES - COMPETENCE DU JUGE DES REFERES ET LES DELAIS D'ASSIGNATION EN MATIERE DE SAISIE-ARRET - L' EXPLOIT D'ASSIGNATION DETERMINE LA QUALITE DES PARTIES AU PROCES (OUI) - SAISIE-ARRET PRATIQUEE SUR AUTORISATION PRESIDENTIELLE (OUI) - SAISINE DU JUGE DES REFERES POSTERIEUREMENT A L'ASSIGNATION EN VALIDITE (OUI) - VIOLATION DE LA LOI SUR LES DELAIS D'ASSIGNATION (OUI) - INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES (OUI) - CONTESTATION SERIEUSE (OUI) - INFIRMATION
1 - TOUTE SOCIÉTÉ, PERSONNE MORALE, AGIT PAR L'INTERMÉDIAIRE DE SES REPRÉSENTANTS LÉGAUX, GÉRANT, DIRECTEUR, DONT LES ACTES ACCOMPLI AU NOM DE LA PERSONNE MORALE ENGAGENT TOUS LES ASSOCIÉS. LORSQU'UN ASSOCIÉ SE PRÉSENTE À UN TIERS COMME DIRECTEUR D'UNE PERSONNE MORALE, IL DOIT ÊTRE CONSIDÉRÉ COMME TEL AINSI QU'IL EST PRÉCISÉ DANS L'EXPLOIT D'ASSIGNATION ET CES ACTES SONT OPPOSABLES AU DIRECTEUR RÉEL.
2 - EN MATIÈRE DE SAISIE-ARRÊT, UNE DEMANDE EN RÉTRACTATION DE SAISIE NE PEUT PLUS ÊTRE ADRESSÉE AU JUGE DES RÉFÉRÉS LORSQUE LE JUGE DU FOND EST DÉJÀ SAISI DE LA DEMANDE EN VALIDITÉ.
DOIT ÊTRE INFIRMÉE POUR VIOLATION DE LA LOI EN CE QUI CONCERNE LES DÉLAIS D'AJOURNEMENT, UNE ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DANS LAQUELLE LE JUGE DES RÉFÉRÉS A RECONNU SA COMPÉTENCE ALORS QUE SA SAISINE TARDIVE LE RENDAIT INCOMPÉTENT ET QU'EN OUTRE LES PROBLÈMES SOULEVÉS PAR LES PLAIDEURS ENTRAINAIENT SON INCOMPÉTENCE POUR CONTESTATION SÉRIEUSE.
Président : DURAND AlexandreConseillers : ALKOIRET TRAORE B Ousmane ; ATIOUKPE AlexisGreffier : AITCHEDJI O IrèneAvocats : Aa Ab ; Yves MONNOU
La Cour
Attendu que par exploit du 2 Mai 1985 de Me Hortense de SOUZA, clerc assermenté de Me C. R. SANT'ANA, huissier à cotonou, le sieur A Af, ayant pour conseil Me CAMPBELL da SILVA, Avocat à la Cour, a interjeté appel de l'ordonnance no I du 18 Avril 1985 rendue par le President du Tribunal de Première Instance de Porto-Novo en matière de référé ;
Attendu que cet appel fait dans les forme et délai de la loi est recevable ;
Attendu que Af A expose que courant 1984, il s'est associé de fait à la PIDEFI afin de pouvoir soumissionner un appel d'offre de la Société Nationale pour la promotion agricole (SO. NA. PRA) ; Que par lettres en date des 28 Septembre et 2 Octobre 1984 PIDEFI s'est vu notifier l'adjudication d'un marché portant sur 550.000 sacs de jute neufs d'une valeur totale de 229.350.000 Frs CFA ; Qu'il a eu à accomplir toutes les formalités nécessaires, à la bonne réalisation de ce marché assisté en cela du sieur GOUNONGBE Jean, Directeur Général de PIDEFI. Que la livraison terminée, le compte relatif à ce marché a été entièrement apuré par la SO. NA. PRA depuis le 11 Janvier 1985 sur le compte bancaire PIDEFI No 32.10.000.266/25, ouvert à l'Agence Kokoyè de la Banque Commerciale du Bénin ;
Que depuis lors il s'est heurté à la résistance de GOUNONGBE Jean qui se refuse à partager le bénéfice résultant de ce marché ; que c'est alors qu'il a obtenu du Président du Tribunal de Porto-Novo l'ordonnance de saisie-arrêt no 4/85 en date du 20 Février 1985 qui lui permit de saisir-arrêter entre les mains de la B. C. B. le compte précité qui était créditeur de la somme de 11.916.233 Frs CFA ;
Que le 1er Mars 1985, il assignait en validité ; Que la cause portée devant le Juge du fond le 28 Mars 1985 a été renvoyée contradictoirement au 11 Avril 1985 ; que dans cette instance PIDEFI est représenté par GOUNONGBE Jean, assisté de Me Pognon ; Que X Ad Ac assignait en référé pour voir rétracter l'ordonnance no 4/85 du 20 Février 1985, voir ordonner main-levée de l'opposition, voir annuler la saisie-pratiquée le 22 Février 1985 ;
Attendu que l'ordonnance de référé no I du 18 Avril 1985 rendue par le Président du Tribunal de Première Instance de Porto-Novo a rétracté l'ordonnance no 4/85 du 20 Février 1985 et ordonné main-levée de l'opposition faite sur le compte bancaire aux motifs que la saisine du juge du fond ne saurait empêcher le juge des référés de statuer dès lors qu'il est saisi d'un problème urgent, touchant à coeur à la partie qui se sent lésée et dont la non résolution dans l'immédiat risque de causer un tort grave à celle-ci ;
Attendu que Af A a relevé appel de cette décision et soulève l'incompétence du juge des référés ;
Attendu que la Cour doit rechercher la compétence du juge des référés ;
Attendu qu'il convient de noter que toute société, en tant que personne morale, agit par ses organes d'expression, Directeur Général, Gérant, Administrateurs, Président, suivant le Type de société concernée, ceux-ci étant des personnes physiques ;
Que les actes accomplis par ces organes au nom et pour le compte de la société engagent tous les associés ;
Attendu que GOUNONGBE Jean s'est présenté à A Af comme Directeur Général de PIDEFI ; qu'il y a lieu de le considérer comme tel ou du moins comme gérant ou directeur apparent ; Qu'en conséquence, les actes accomplis par celui-ci sont opposables au directeur réel, en l'occurrence le sieur X Ad Ac ;
SUR L'INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES, LE JUGE DU FOND ETANT DEJA SAISI
Attendu qu'il échet de rappeler que la saisine du juge des référés en matière de rétractation de saisie est soumise à des délais précis ; que la demande en rétractation ne peut plus être portée devant le Juge des référés dès l'instant où le Juge du fond est saisi de la demande en validité de saisie-arrêt (civ. 10 Nov. 1885 S.86-I-9 ; Civ 2, 21 Mai 1953 Gaz Pal 1954- 2.49) ;
Que dans le cas d'espèce, si la demande en validité est du 1er Mars 1985, la demande en rétractation n'est intervenue que postérieurement à la demande en validité soit le 1er Avril 1985 par X Ad Ac en qualité de Président Directeur Général seul de l'Etablissement PIDEFI ; Que cette saisine tardive rend radicalement incompétent le Juge des référés pour rétractation de l'ordonnance de saisie ;
SUR L'INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES POUR CONTESTATION SERIEUSE
Attendu qu'il n'existe pas de critère de la contestation sérieuse ou non sérieuse ; que cette question est abandonnée à la sagesse du Magistrat ; qu'il convient cependant de noter que lorsqu'il s'élève une difficulté de cette matière, le Juge des référés se doit d'examiner les moyens soulevés, vérifier si la contestation offre une apparence de fondement et ne passer outre que si elle lui paraît vouée à l'insuccès (Dijon, 10 Mars 1931, Ae B 1931 No 5 P.114) ;
Attendu que dans le cas qui nous occupe, A Af a soulevé un certain nombre de problèmes auxquels le juge n'a porté aucune solution, ni donné aucune réponse tels que : l'interrogatoire sollicité des responsables de la SONAPRA au sujet des opérations financières concernant le marché SONAPRA pour savoir si ces opérations ont été effectuées sur le compte bancaire de X Ad Ac, la sollicitation d'une enquête au niveau des affaires économiques pour savoir à quel nom ont été délivrées les licences d'importation relatives à ce marché, sollicitation de la comparution des parties au procès et GOUNONGBE Jean pour éclaircir la réligion du Juge sur l'ignorance de l'existence de A Af par GOUNONGBE Jean et sa participation dans ce marché, toutes choses qui, si elles avaient été vérifiées, examinées, analysées par le magistrat, lui eurent permis de rendre compte de ce que le fondement de la contestation soulevée par A Af offrait une apparence de sérieux entraînant ici l'incompétence du Juge des référés.
Par ces motifs :
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale en référé et en dernier ressort ;
En la Forme :
Reçoit l'appel de A Af comme régulièrement interjeté ;
Au Fond :
Infirme ;
Dit que seul l'exploit d'assignation détermine la qualité des parties ;
Que seul l'Etablissement PIDEFI a été assigné en tant que personne morale, représentée par son Directeur apparent GOUNONGBE Jean ;
Que les actes faits par le Directeur C Ag sont opposables au Directeur réel, X Ad Ac ;
Qu'il y a de la part de Gounongbé Jean violation de la loi en ce qui concerne les délais d'assignation en référé pour retractation de l'ordonnance ayant autorisé la saisie ;
Dit que la saisine du juge des référés est intervenue postérieurement à l'assignation en validité ;
Se déclare incompétente pour en connaître ;
Condamne X Ad Ac aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d'Appel de Cotonou.