Vu la requête en règlement de juges formée par le Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou (Dahomey) dans la procédure instruite contre BARA Athanase, inculpé de violences et voies de fait avec préméditation sur mineure âgée de moins de quinze ans en application de l'article 311 §1 et 2 du code pénal;
Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;
Vu les articles 534 et suivants du code de procédure pénale en vigueur au Dahomey;
Vu l'ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour Suprême;
Ouï à l'audience publique le jeudi six février 1969, Monsieur le Président MATHIEU en son rapport;
Monsieur le Procureur Général AÏNADOU, en ses conclusions;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que, par ordonnance du 14 février 1968, du juge d'instruction près le tribunal de 1ère Instance de Porto-Novo, le nommé BARA Athanase, a été renvoyé devant le Tribunal de Police correctionnelle de ladite ville pour violence et voies de fait avec préméditation sur une mineure âgée de moins de quinze ans, délit prévu et puni par l'article 311 § 1 et 2 du code pénal;
Attendu que, par jugement du 29 août 1968, le tribunal de 1ère instance de Porto-Novo a déclaré le prévenu coupable des faits mis à sa charge, et l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement assortie du bénéfice du sursis et au paiement de la somme de 20.000 francs de dommage intérêts à la partie civile;
Attendu qu'appel n'a pas été interjeté dans les délais de droit ni par la partie civile, ni par le parquet de première instance de Porto-Novo;
Attendu par ailleurs qu'appel fut interjeté de ce jugement le 31/5/68 par le Procureur Général près la Cour d'Appel; et la Cour d'Appel, en conséquence de ce moyen de recours, s'est, dans son arrêt du 25 octobre 1968, déclaré incompétente et a renvoyé le Ministère Public à se pourvoir ainsi qu'il avisera; les faits reprochés à l'inculpé étant de nature à entraîner une peine criminelle.
Attendu qu'aucun pourvoi n'ayant été formé contre cet arrêt, celui-ci a acquis l'autorité de la chose jugée.
Attendu que si l'ordonnance définitive du Magistrat instructeur en date du 14 février 1968 est favorable au prévenu, précisément en ce qu'elle disqualifie les faits et le renvoie devant le tribunal correctionnel de Porto-Novo, l'arrêt en date du 25 octobre 1968 de la Cour d'Appel de Cotonou, par contre, considère la cause comme étant criminelle et échappant, par là même, à la compétence d'une quelconque juridiction correctionnelle et classe les faits du procès dans une autre catégorie.
Attendu que ces deux décisions sont contradictoires entre elles, et qu'étant passées, l'une et l'autre, en force de chose jugée; il en résulte un conflit négatif de juridiction qu'il appartient à la Cour Suprême de trancher dans l'intérêt d'une prompte et bonne administration de la justice qu'il importe de faire cesser ce conflit.
PAR CES MOTIFS
Réglant de juges, sans s'arrêter à l'ordonnance du juge d'instruction de Porto-Novo en date du 14 février 1968, laquelle sera considérée non avenue, renvoie la cause, la partie civile, le prévenu en l'état où ils se trouvent devant la chambre des mises en accusation de la Cour d'Appel de Cotonou, qui, au vu de l'instruction déjà faite ou à compléter, et de tout supplément d'information, s'il y a lieu, statuera, tant sur la prévention que sur la compétence conformément à la loi.
Ordonne que le présent arrêt sera notifié à qui de droit.
Ainsi jugé et prononcé par la Cour Suprême (Chambre Judiciaire) en son audience du jeudi six février Mil Neuf Cent Soixante Neuf, à laquelle siégeaient Messieurs:
Edmond MATHIEU, Président de la Chambre Judiciaire - Président
Grégoire GBENOU et Corneille Taofiqui BOUSSARI - Conseillers
Cyprien AÏNADOU - Procureur Général
Et Honoré GERO AMOUSSOUGA - Greffier
Et ont signé:
Le Président-Rapporteur Le Greffier
E. MATHIEU H.GERO AMOUSSOUGA