N° 16/CJC du Répertoire EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DE LA
COUR SUPREME DE LA REPUBLIQUE DU
N° 71-1/CJC du Greffe DAHOMEY SEANT A COTONOU
Arrêt du 21 juillet 1972 AU NOM DU PEUPLE DAHOMEEN
- SODAC COUR SUPREME
- Compagnie d'Assurances
Générales de France CHAMBRE JUDICIAIRE (Civil)
C/
Succession AKAKPO Paul
Vu la déclaration de pourvoi en cassation faite le 8 septembre 1970 au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, par Maître Adrien HOUNGBEDJI, Avocat défenseur, agissant au nom et pour le compte de la SODAC et de la Compagne d'Assurances Générales de France contre l'arrêt n° 40 en date du 23 juillet 1970 rendu par la Cour d'Appel de Cotonou (Chambre Judiciaire) ;
Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;
Vu l'arrêt attaqué;
Ensemble le mémoire ampliatif en date du 27 novembre 1970 par Maître Adrien HOUNGBEDJU, conseil des parties en cause;
Vu toutes les pièces produites et jointes au dossier;
Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour Suprême;
Ouï à l'audience publique du vendredi seize juin mil neuf cent soixante douze, Monsieur le Président MATHIEU en son rapport;
Monsieur le Procureur Général GBENOU en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que comparaissant le septembre 1970 au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, Me HOUNGBEDJI, Avocat, agissant au nom de la SODAC et de la Cie d'Assurances Générales de France, a élevé un pourvoi en cassation contre l'arrêt n° 40 du 23 juillet rendu par la Chambre Civile de la Cour d'Appel du Dahomey;
Attendu que par bordereau n° 261/PG du 19 janvier 1971, le Procureur Général près la Cour d'Appel transmettait avec trois autres le dossier de la procédure au Procureur Général près la Cour Suprêmeet qu'il était enregistré arrivée au greffe le 21 janvier ;
Attendu que par lettre n° 118/GCS du 8 février 1971, le Greffier en Chef près la Cour Suprême rappelait à Maître HOUNGBEDJI auteur du pourvoi les termes de l'article 45 de l'ordonnance n° 21/PR sur la nécessité de consigner et par ailleurs lui allouait un délai de deux mois pour la production de ses moyens;
Attendu que la consignation fut effectuée le 16 février 1971 et que le mémoire ampliatif figure au dossier sans que sa date d'enregistrement ne soit indiquée, mais étant daté lui-même du 27 novembre 1970, ce qui laisserait entendre qu'il était parvenu au greffe avant le dossier lui même;
Attendu quoi qu'il en soit que par transmission n° 205/GCS du 25 février 1971 le Greffier en Chef adressait au Commandant de la Brigade de Gendarmerie de Bohicon, une communication n° 204/GCS aux héritiers AKAKPO Paul, représentés par Madame Antoinette HOUNTONDJI, faisant tenir copie du mémoire ampliatif et accordant deux mois pour la réponse;
Que ces pièces firent l'objet d'un bordereau de retour n° 266/2-Gend. du 29 mai 1971 du commandant de la Brigade de Gendarmerie de Bohicon indiquant que dame HOUNTONDJI se trouverait à Cotonou;
Que la pièce est enregistrée arrivée à la Cour Suprême le 11 juin 1971;
Que par lettre n° 945/GCS du 6 juillet 1971, objet du S.T. 946/GCS du même jour au Commissaire Central de la ville de Cotonou, même notification était adressée à la défenderesse;
Que cette pièce fit l'objet d'un procès-verbal de renvoi n° 1524/CIA du 27 juillet 1971 retourné à la Cour Suprême le 4 août 1971;
Attendu que, sans nouvelles de la dame HOUNTONDJI le Greffier en Chef la fit convoquer à son étude par lettre du 6 décembre 1971 remise le 9 décembre par P.-V. n° 7207/CCC.;
Attendu que par lettre du 20 décembre 1971 la dame HOUNTONDJI demanda un délai supplémentaire de deux mois pour pouvoir au remplacement de son conseil Me FORTUNE qui avait quitté le Dahomey;
Que ce délai fut accordé par lettre n° 12/GCS du 7 janvier 1972 remise le 19 janvier selon P.-V. n° 112/CIA;
Qu'un accord fut donné au pied de la lettre et notifié le 15 mars en l'étude;
Qu'enfin le 8 avril parvenait une nouvelle lettre de Maître ANGELO déclarant qu'il n'entendait pas produire de mémoire et qu'il s'en rapportait à la sagesse de la Cour;
Attendu que l'affaire est donc en état;
En la forme
Attendu que la consignation a été effectuée en temps utile et que les retards à produire la défense ont été excusées. Que le pourvoi est bien recevable;
Au fond
Les faits: Ils sont très simples, non contestés le dossier d'ailleurs est extrêmement réduit et ne prête pas à discussion de ce côté;
Un sieur AKAKPO Paul a subi une fracture de la jambe dans une collision avec une voiture alors qu'il roulait en vespa. On ne sait si une procédure pénale a été engagée, mais en tout cas au cours d'une instance civile débutant par un exploit du 27 juillet 1968, le demandeur décédait le 23 octobre et sur continuation de l'action par ses héritiers le tribunal civil de Cotonou leur alloua certaines sommes dont 50.000 francs au titre de l'ITT, 50.000 francs au titre du préjudice esthétique, 500.000 au titre du prétium doloris et un million au titre de l'incapacité partielle permanente subie par la victime;
Sur appel en réduction de ces chiffres la Cour sans faire apparaître dans ses attendus que la situation devait être considérée compte tenu du décès de la victime, pour cause étrangère, en cours d'instance, se contenta d'amodier ces chiffres en confirmant cependant le plus important relatif à l'ITT qui avait été fixée à 40%;
C'est l'arrêt attaqué;
Moyen unique de cassation:
Violation des articles 1382 du Code civil et 320 du code pénal, défaut de base légale-
en ce que la Cour a condamné la SODAK à payer aux héritiers AKAKPO la somme de 1 Million de francs au titre de l'IPP par ces seuls motifs que:
- l'infirmité laissée par la fracture de sa jambe devait réduire sensiblement l'activité professionnelle en particulier de feu AKAKPO ainsi que l'a souligné l'expert,
- compte tenu de la profession qu'il exerçait, de ses revenus, l'évaluation faite par le premier juge paraît équitable;
alors que par conclusion d'appel du 13 juillet 1970, les demanderesses au pourvoi avaient sollicité la réduction de cette somme au motif que:
- la victime est décédée en cours d'instance pour une cause étrangère à l'accident et l4IPP n'a ainsi duré que 13 mois.
- le préjudice a cessé au jour du décès et doit être évalué par la Cour d'Appel à la date de cet événement.
Attendu qu'il est certain que l'indication du décès en cours de procédure et de la limitation de l'IPP à 13 mois était un moyen et non pas un simple argument et qu'il devait y être répondu par la Cour d'Appel de façon explicite;
Attendu par ailleurs qu'il est de doctrine et de jurisprudence admises que l'évaluation du préjudice se fait au jour du jugement;
D'où il résulte 1°/- qu'il faudra tenir compte de l'amélioration de l'état de la victime depuis le dommage;
2°/- qu'en cas de décès de la victime entre le jour du délit et le jour du jugement, pour une cause autre que le délit, il faudra tenir compte de la cessation du dommage au jour du décès (Crim. 3 février 1938 - Gaz Trib. 1938; Caen 19 novembre 1940, D.A. 1941, 75).
3°/- que les intérêts de l'indemnité antérieure au jugement auront un caractère d'indemnité complémentaire qui devra être précisé (Crim. 15 mars 1961. D. 1961. Sommaire 71 - Crim.21 février 1962 D 1962 Sommaire 58).
Attendu que ces solutions découlent du principe que les jugements allouant des dommages-intérêts sont attributifs de droit (Lalon et Azard n° 111) (Vpir Dalloz Nouveau Répertoire IV Responsabilité Civile n° 228);
Attendu qu'en conséquence l'arrêt manque de base légale, en ce qu'il n'a pas tenu compte de la cessation du dommage au jour du décès; et qu'il a alloué une indemnité au titre de l'IPP alors qu'elle ne pouvait être calculée qu'en qualité d'indemnité complémentaire pour la durée effective allant de la consolidation du décès;
Attendu que le conseil du défendeur a d'ailleurs renoncé à présenter une argumentation contre les très solides développements des requérants;
Attendu qu'il y a lieu de recevoir le pourvoi et de renvoyer l'affaire devant la Cour d'Appel autrement composée.
PAR CES MOTIFS;
Accueille le pourvoi en la forme et au fond;
Casse et renvoie devant la Chambre civile de la Cour d'Appel autrement composée.
Ordonne la notification du présent arrêt au Procureur Général près la Cour d'Appel ainsi qu'aux parties;
Ordonne la transmission en retour du dossier au Parquet Général près la Cour d'Appel de Cotonou;
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Judiciaire) composée de Messieurs:
Edmond MATHIEU, Président de la Chambre Judiciaire, PRESIDENT;
Gaston FOURN et Frédéric HOUNDETON, CONSEILLERS.
Et prononcé à l'audience publique du vendredi vingt et un juillet mil neuf cent soixante douze, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:
Grégoire GBENOU, PROCUREUR GENERAL;
Et de Maître Honoré GERO AMOUSSOUGA, GREFFIER.
Et ont signé:
Le Président-Rapporteur Le Greffier en Chef
E. MATHIEU H. GERO AMOUSSOUGA