R.C.C. 10.322 PREMIER FEUILLET H.L.
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LA COUR SUPREME, CHAMBRE DE CASSATION
A RENDU L'ARRET SUIVANT:
------------------------------------------------------------------------------ AUDIENCE PUBLIQUE DU 24 MARS 2005.-
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EN CAUSE:
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Succession X Evariste: représentée par Maître BIGIRIMANA Jean-Bosco.-
CONTRE:
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NDAYISENGA Mathilde : représentée par Maître NZEYIMANA Déogratias.-
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Vu la lettre du 11/9/2002 adressée au Président de la Cour Suprême par laquelle la requérante demande la cassation de l'arrêt R.C.A. 251 rendu par la Cour d'Appel de Ngozi en date du 30/5/2002 et dont le dispositif est libellé comme suit:
« Sentare ikuye urubanza mu mwiherero w'abacamanza nk'uko amategeko abivuga;
« Ishinze ko: Yakiriye iyunguruzwa ry'urubanza nk'uko ryagizwe n'abasigwa ba
« HAKIZIMANA Evariste baserukiwe n'Umushingwamanza A C
« ariko ivuze ko imburano zabo zidashemeye;
« Ikomeje amasezerano y'ubuguzi bw'inzu bwabaye hagati ya HAKIZIMANA Evariste na
« A Ab ku wa 6/11/1998;
« Amagarama atangwa n'abasigwa ba HAKIZIMANA Evariste = 16.400FBU»;
Vu la signification de cet arrêt à la requérante en date du 16/7/2002;
Vu la réplique de la partie défenderesse en cassation;
Vu les avis écrits du Conseiller Rapporteur et du Ministère Public;
Vu la fixation de la cause à l'audience publique du 18/9/2003;
Vu les remises successives de la cause aux audiences publiques des 18/9/2003, 29/12/2003, 5/4/2004 et 29/7/2004;
Vu spécialement l'audience publique de ce dernier jour à laquelle les parties comparaissent et plaident;
Après quoi la Cour prend la cause en délibéré pour statuer comme suit:
R.C.C. 10.322 DEUXIEME FEUILLET H.L.
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ATTENDU que la requérante a été signifiée de l'arrêt entrepris en date du 16/7/2002; que la requête de pourvoi en cassation est parvenue au greffe de la Cour Suprême le 11/9/2002 et que l'intéressée a consigné le même jour;
ATTENDU que la dite requête a été introduite dans les formes et délais prescrits par la loi et qu'elle est partant recevable;
ATTENDU que le litige au cour du procès prend sa source dans la vente d'une parcelle bâtie située à Ngozi quartier Kigwati conclue en date du 6/11/1998 entre HAKIZIMANA Evariste, vendeur et A Ab, acheteur;
ATTENDU que l'actuelle partie défenderesse en cassation a payé au comptant le jour même de la rédaction de l'acte de vente et a aussitôt pris possession de la maison qu'elle a faite louer depuis;
ATTENDU que la requérante est décédée en date du 16/10/1999 et la défenderesse en cassation en 2001; que c'est donc quelques trois ans après la passation de ce contrat et après la mort des co-contractants que les ayants droit respectifs se sont disputés à propos de cette vente, ceux du vendeur prétextant qu'elle a été faite en violation des articles 126 du code des personnes et de la famille et 340 du code foncier, et ceux de l'acheteur estimant qu'elle est parfaite et régulière, car conclue en bonne et due forme;
ATTENDU que les juges du fond ont donné gain de cause aux ayants-droit de l'acheteur, que c'est cette décision qui a été déférée par la requérante devant l'instance de cassation en invoquant les moyens ci-après;
1°. De la méconnaissance de l'article 197 du C.C.L.III.
ATTENDU que la requérante souligne qu'elle a toujours contesté l'existence de cette convention de vente portant sur l'immeuble querellé en qualifiant de faux le document du 6/11/1998, que le juge ne s'est jamais donné la peine de procéder à une moindre vérification à ce sujet, se contentant de reprendre les allégations mensongères de la partie adverse à savoir que la partie demanderesse en cassation n'a rien répondu à la question de savoir pourquoi elle qualifie de faux le document précité;
QUE c'est la défenderesse en cassation qui devait plutôt prouver le caractère réel du document brandi comme étant un contrat de vente du moment que l'existence de ce contrat est contesté;
QUE la succession HAKIZIMA Evariste a prouvé son droit de propriété sur l'immeuble querellé en exhibant un document authentique (le certificat d'enregistrement) daté de plus de deux ans le 12/2/2001 après le fameux document du 6/11/1998 sur lequel se fonde l'imposture de NDAYISENGA Mathilde;
QU'en définitive le juge d'appel a violé l'article 197 du C.C.L.III dans la mesure où il n'a jamais demandé à NDAYISENGA Mathilde la preuve de la véracité de ce document pour réclamer cette mutation immobilière;
R.C.C. 10.322 TROISIEME FEUILLET H.L.
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2°. Violation de l'article 207 du C.C.L.III.
ATTENDU que pour le deuxième moyen, la requérante souligne que pour être valable, tout contrat synallagmatique doit être produit en autant d'originaux qu'il y a des parties à l'acte et affirme qu'elle n'a pris connaissance de la vente querellée qu'en audience publique;
Qu'à ce moment, elle venait d'obtenir le certificat d'enregistrement de l'immeuble litigieux titre qui doit primer sur le contrat vanté fut-il régulièrement conclu;
QUE par ailleurs, le juge d'appel n'a pas daigné ni faire vérifier les signatures des parties apposées sur l'acte de vente contesté ni auditionner les témoins de cette vente, malgré la demande insistante de la requérante;
3°. Interprétation erronée de l'article 126 du C.P.F.
ATTENDU que concernant ce moyen, la requérante soutient que l'immeuble querellé ne rentre pas dans la catégorie de ceux dépendant de la Communauté conjugale au seul motif qu'il ne servait ni de logement ni de moyen de logement à famille du vendeur, que l'arrêt attaqué a mal interprété la disposition légale rappelée au moyen;
QUE c'est ignorer que les fruits de sa location servaient à la fois au financement de l'instruction des enfants et à l'entretien de la famille; que le de cujus ne pouvait aliéner cet immeuble sans en aviser préalablement sa famille; en l'occurrence son épouse;
4°. Méconnaissance des articles 335 et 340 du Code Foncier.
ATTENDU que s'agissant de ce moyen, la requérante entend reprocher au juge d'appel le fait d'avoir validé la vente litigieuse fut-elle régulière, alors que l'acheteur n'avait pas reçu de son vendeur le titre de propriété (le certificat d'enregistrement), le seul acte qui opère juridiquement la mutation immobilière;
ATTENDU que la requérante rappelle à cet effet que la loi interdit formellement la mutation immobilière en vertu des contrats d'aliénation non revêtus du caractère authentique (art. 340 C.F); ce qui n'est pas le cas en l'espèce fait-elle observer;
ATTENDU en définitive que la requérante demande que l'arrêt entrepris soit cassé afin que toutes ces irrégularités dénoncées soient rectifiées;
ATTENDU que répondant au premier moyen, le conseil de l'actuelle défenderesse en cassation souligne que sa cliente a versé au dossier, dès le premier degré de jugement, la convention signée par feu HAKIZIMANA Evariste (vendeur) et feu A Ab (acheteur) et deux témoins; qu'il a été donc satisfait à l'article 197 du C.C.L.III et à la règle sacro-sainte «actori incumbit probatio»;
QU'il revenait donc à l'actuelle requérante de démontrer que la preuve produite ex adverso ne tient pas; ce qui n'a jamais été fait;
R.C.C. 10.322 QUATRIEME FEUILLET H.L.
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ATTENDU par ailleurs que la défenderesse en cassation signale que la requérante n'a nullement demandé qu'une expertise en écriture soit ordonnée, que l'article 197 du C.C.L.III n'a donc jamais été violé, que ce moyen serait fondé, s'il était démontré que la demande d'expertise a été faite et que le juge a refusé d'y faire suite;
ATTENDU que concernant le deuxième moyen, la défenderesse en cassation rétorque que la requérante n'a jamais démontré devant le juge d'appel que la convention n'a pas été faite en deux originaux; qu'il ne revenait pas à la partie défenderesse en cassation de produire l'original gardé par le vendeur dans la mesure où il existe;
QUE la disposition de l'article 207 du C.C.L.III n'a pas non plus été violée parce que le certificat d'enregistrement qu'a obtenu la succession HAKIZIMANA Evariste prime sur la convention comme le prétend la requérante; que chacun des deux titres a sa valeur et la convention de vente a été conclue pour que ce certificat change de mains;
ATTENDU que la défenderesse en cassation se demande par ailleurs si le juge d'appel devait ordonner une vérification des signatures portées sur le document du 6/11/1998 en vertu de l'article 206 du C.C.L.III;
ATTENDU que cette question, la défenderesse en cassation souligne que la requérante n'a pu préciser qu'elle contestait cette convention parce qu'elle ignorait son existence ou alors à motif que la signature de feu HAKIZIMANA Evariste portée par cette convention aurait été imitée;
QUE sans demande d'expertise; la Cour d'Appel de Ngozi n'a nullement violé la disposition d'ordre privée dont il est question; en ordonnant pas une expertise qui n'a jamais été demandée;
ATTENDU que pour le troisième moyen pris de l'interprétation erronée de l'article 120 du code des personnes et de la famille, la défenderesse en cassation réplique en signalant que l'immeuble querellé étant situé à Ad et la famille HAKIZIMANA logée dans sa maison de Rusaka à Mwaro, le juge d'appel a à juste titre indiqué que cet immeuble ne rentrait pas dans la catégorie de ceux dépendant de la Communauté Conjugale;
QUE la requérante veut faire entrer dans cette catégorie d'autres besoins comme les moyens de survie et de scolarités; ce qui serait une interprétation erronée dans la mesure où la disposition dont il s'agit ne vise qu'à prévenir que les familles se retrouvent sans toit;
ATTENDU que s'agissant du quatrième moyen pris de la méconnaissance des articles 335 et 340 du Code Foncier, la défenderesse en cassation soutient que pour le premier article (335 du C.F.), l'arrêt attaqué n'a jamais soutenu que la convention de vente vaut mutation; qu'elle permet simplement de l'exiger par délivrance du certificat d'enregistrement pour mutation;
QUE concernant l'article 340 du Code Foncier, cette disposition ne signifie pas que les conventions sous seing privé ne sont pas valides tant qu'ils ne sont pas viciés par le dol, l'erreur, la violence, l'authentification pouvant intervenir par la suite;
R.C.C. 10.322 CINQUIEME FEUILLET H.L.
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QUE le défaut d'authentification retard la mutation mais n'entraîne pas nullité, que ces dispositions n'ont donc pas été méconnues par le juge d'appel;
ATTENDU que pour la Cour de céans, le premier moyen avancé par la requérante et qui est tiré de la violation de l'article 197 du C.C.L.III n'est nullement fondé;
ATTENDU en effet que la requérante qui était partie demanderesse au niveau d'appel contestait toujours la vente litigieuse malgré sa constatation par un contrat écrit en bonne et due forme produit aux débats par l'actuelle défenderesse en cassation;
ATTENDU qu'il appartenait incontestablement à la requérante qui contestait la vente litigieuse en question de démontrer sa fausseté dans la mesure où l'intimée avait déjà fourni la preuve qui lui incombait;
ATTENDU que la partie adverse ayant suffisamment prouvé l'obligation dont elle réclame l'exécution, la charge de la preuve contraire incombait à la requérante;
ATTENDU que pour le deuxième moyen pris de la violation de l'article 207 du C.C.L.III, il y a lieu de signaler qu'il est invoqué pour la première fois devant l'instance de cassation et qu'il devrait être déclaré irrecevable; qu'en effet la non conformuté des actes synallagmatiques sous seing privé au prescrit de l'article 207 du C.C.L.III ne peut être invoqué que devant les seuls juges du fond, ce moyen étant un mélange de fait et de droit;
ATTENDU par ailleurs que la requérante n'a jamais démontré devant le juge d'appel que la convention n'a pas été faite en deux originaux; que l'on peut même admettre que les dispositions de l'article 207 du C.C.L.III sont sans application en l'espèce, dès lors qu'au jour de la rédaction de l'acte querellé l'une des parties a pleinement exécuté son obligation (acheteur qui a payé tout le prix convenu le jour du contrat) de sorte que l'autre partie n'ayant plus aucun droit de faire valoir est sans intérêt à posséder un original;
ATTENDU que concernant le grief dénonçant la méconnaissance des dispositions de l'article 206 du C.C.L.III. , il y a lieu de renvoyer la requérante à l'article 205 du même code qui dispose que celui auquel on oppose un acte sous seing privé est obligé d'avouer ou de désavouer formellement son écriture ou sa signature, ses héritiers mêmes pouvant déclarer qu'ils ne connaissent pas cette écriture ou signature de leur auteur;
ATTENDU qu'en l'espèce la requérante n'a jamais formellement désavoué les mentions portées sur l'acte de vente contesté se contentant seulement de dire que le dit acte est douteux ou qu'elle ne le reconnaît pas;
ATTENDU que la requérante ne s'est pas inscrite en faux contre cet acte; seule procédure qui aurait permis le juge du fond de faire vérifier l'écriture et la signature de l'actuelle partie demanderesse en cassation et plus précisément le véritable vendeur;
ATTENDU que le deuxième moyen est inopérant et qu'il faut le rejeter;
R.C.C. 10.322 SIXIEME FEUILLET H.L.
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ATTENDU que le troisième moyen pris de l'interprétation erronée de l'article 126 du C.P.F. est également non fondé;
ATTENDU qu'il faut rappeler que cette disposition interdit tout époux d'aliéner un immeuble dépendant de la communauté conjugale sans le consentement de l'autre;
ATTENDU que le juge d'appel a indiqué que l'immeuble querellé étant situé à Ad et la famille HAKIZIMANA logée dans sa maison de Rusaka; qu'autrement dit la maison litigieuse est distincte du foyer familial érigée sur la propriété foncière du vendeur; que c'est finalement à bon droit que l'arrêt RCA. 251 de la Cour d'Appel de Ngozi affirme que l'immeuble querellé ne rentre pas dans la catégorie de ceux protégés par l'article 126 du C.P.F.;
ATTENDU enfin que pour le moyen pris de la méconnaissance des articles 335 et 340 du code foncier par lequel la requérante
conditionne la validité du contrat de vente contesté à la procédure de mutation qui suit la vente et son authentification devant l'autorité compétente, il y a lieu de signaler que l'arrêt RCA 251 n'a nullement soutenu que la convention de vente vaut mutation, qu'elle permet de l'exiger par délivrance du certificat d'enregistrement pour mutation d'une part et que le défaut d'authentification retarde la mutation mais n'entraîne pas la nullité de la vente d'autre part;
ATTENDU qu'il découle des développements qui précèdent que les moyens à l'appui du pourvoi en cassation de la requérante ne sont pas fondés et qu'il faut les rejeter;
P A R C E S M O T I F S:
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La Cour Suprême, Chambre de Cassation ;
Vu la Constitution de la République du Burundi;
Vu la nouvelle loi du code de l'organisation et de la compétence judiciaires;
Vu la Loi n° 1/07 du 25 Février 2005 régissant la Cour Suprême;
Statuant publiquement, contradictoirement après avoir délibéré conformément à la loi;
Reçoit le pourvoi mais le déclare non fondé et le rejette;
Ordonne la transcription du présent dispositif dans les registres de la Cour d'Appel de Ngozi en marge de l'arrêt RCA 251 non cassé;
R.C.C. 10.322 SEPTIEME FEUILLET H.L.
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Met les frais à charge de la requérante soit 9.800FBU;
Ainsi arrêté et prononcé à Aa en audience publique du 24 Mars 2005où siégeaient Adrien NYANKIYE, Président, Thérèse NTIJINAMA et Nestor NIYONGABO, Conseillers, assistés de NDAYISENGA Charles, Officier du Ministère Public et de B Ac, Greffier.-
LES CONSEILLERS: LE PRESIDENT:
Thérèse NTIJINAMA Adrien NYANKIYE.-
Nestor NIYONGABO.-
LE GREFFIER:
NDIHOKUBWAYO Liliane.-