ARRET
N°012/2011
DU 31 MARS 2011
- Banque Ai du
Cameroun
(Mes P. Am AO et M.
AZ)
(Me M. H. ABAKAR)
- Autorité Monétaire du
Cameroun
(Mes Y. NGO MINYOGOG et A. An AAR
Ab Al Ac AT
(Me T. P. Charles)
Arrêt n°010/CJ/CEMAC/CJ/09
du 13 Novembre 2009 défendu par messieurs Ar
AW, Aj AV,
AG AN et la
Compagnie d’Assurance C.P.A. (Me Guy SILINOU et ia SCP
MBOCK- MBENDANG NDOCK — LEN NGUEMMHE et
NGADJADOUM Josué)
Présents :
M. Antoine MARADAS, Président M. DADJO GONI, Juge
Mme Julienne ELENGA
M. Georges TATY, Avocat Général
Requêtes en tierce opposition
COUR DE JUSTICE
DE LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET
MONETAIRE DE L’AX Aa
‘ AU NOM DE LA COMMUNAUTE”
La Cour (Chambre Judiciaire) de Justice de la Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC),
réunie en audience publique le trente un mars deux mille
onze à N’'Djaména (République du Tchad), à laquelle
siégeaient :
- M. Antoine MARADAS, Président,
- Mme Julienne ELENGA NGAPORO, Juge Rap.,
- M. DADJO GONI, Juge,
En présence de M. Georges TATY, Avocat
Général,
Assistée de Maître RAMADANE GOUNOUTCH,
Greffier,
A RENDU LE PRESENT ARRET :
ENTRE
La Société Banque Ai Ac, assistée
de Maître Gabriel Parfait KALDJOB, Avocat au
Barreau du Cameroun, BP. 7226 — DOUALA et
Magloire MBAHDJE, Avocat au Barreau du Tchad,
BP. 1475 N'Djamena, en l'étude duquel domicile
est élu :
La Commission Bancaire de l'Afrique Centrale
(COBAC), représentée par M. Af AN et
Mme B X, assistés de Maître
MAHAMAT HASSAN ABAKAR, Avocat au Barreau
du Tchad, BP. 2065 N'Djaména,
(Demanderesses en tierce opposition);
- L'Autorité Monétaire du Cameroun, représentée
par Ah AI Ak à AP et Ad
AM, assistés par Maître Yolande NGO
MINYOGOG, Avocat au Barreau du Cameroun,
BP. 20501 Yaoundé et ALLAÏSSEM K. DJAÏBE,
Avocat au Barreau du Tchad, BP. 1011
N’C, en l’étude duquel domicile est élu ;
Ab Al Ac, assistée par Maître
Charles TCHAKOUTE PATIE, Avocat au Barreau
du Cameroun, BP. 12288 AY, et Jean —
Bernard PADARE, Avocat au Barreau du Tchad,
BP. 5110 N'Djaména, en l’étude duquel domicile
est élu,
(Intervenantes volontaires)
CONTRE
L'arrêt n°010/CJ/CEMAC/CJ/09 du 13
novembre 2009, défendu par Ah AW
Ar, Aj AV, AG AN et la
Compagnie d'Assurances CPA, assistés par Maître Guy
SILINOU Avocat au Barreau du Cameroun, BP. 5556 —
AY, et la SCP MBOCK — MBENDANG — NDOCK -— LEN
— NGUENMHE, Avocats au Barreau du Cameroun, BP. 8775 —
AY,
(Défendeurs en tierce opposition)
LA COUR
Vu la requête en tierce opposition introduite par Maître Gabriel Parfait
KALDJOB, agissant au nom et pour le compte de la Banque Ai du
Cameroun, contre l'arrêt n°010/CJ/CEMAC/CJ/09 rendu le 13 Novembre 2009 par la
Cour de céans laquelle a été enregistrée au greffe de la Cour (Chambre Judiciaire) le
07 janvier 2010 sous le n°003 ;
Vu la requête en tierce opposition formée au nom et pour le compte de la
COBAC par Maître MAHAMAT HASSAN ABAKAR contre le même arrêt et
enregistrée au greffe de la Cour ( Chambre Judiciaire) le 13 février 2010 sous le
n°006 ;
Vu les observations écrites de MM. Ar AW, M. Aj
AV, AG AN et la Société CPA du 28 juin 2010, enregistrées au greffe
de la Cour ( Chambre Judiciaire) le 15 juillet 2010 sous le n°081 ;
Vu les conclusions en réplique de Ab Al Ac du 12 octobre 2010,
enregistrées au greffe de la Cour le 21 octobre 2010 sous le n°006/10 — 11 ;
Vu les conclusions en réplique de la Banque Ai Ac du 12
octobre 2010, enregistrées au greffe de la Cour le 27 octobre 2010 sous le n°009/10
Vu le mémoire en défense de l'Autorité Monétaire du Cameroun du 27 octobre
2010, enregistré au greffe de la Cour ( Chambre Judiciaire) le 28 octobre 2010 sous
le n°010/10 — 11 ;
Vu les conclusions en réplique de M. AW Ar et autres du 28
octobre 2010, enregistrées au greffe de la Cour à la même date sous le n°011/10 —
Vu les conclusions en duplique de la Banque Ai Ac du 07
Novembre 2010, enregistrées au greffe de la Cour le 11/11/2010 sous le n°020/10 —
Vu les observations aux conclusions en réplique du 28 octobre 2010 des
défendeurs en tierce opposition, datées du 10 Novembre 2010, enregistrées au
greffe de la Cour le 17 Novembre 2010 sous le n°059, émanant de l’Autorité
Monétaire du Cameroun ;
Vu la procédure ayant donné lieu à l’arrêt n°010/CJ/CEMAC/CJ/09 du 13
Vu les autres pièces produites au dossier ;
Vu le traité instituant la CEMAC et l’additif audit traité relatif au système
institutionnel et juridique de la Communauté ;
Vu la Convention du 05 juillet 1996 régissant la Cour de Justice de la
CEMAC ;
Vu l’Acte Additionnel n°006/CEMAC/041 — CCE — CJ — 02 du 14 Décembre
2000 portant statuts de la Chambre Judiciaire ;
Vu l’Acte Additionnel n°004/CEMAC/041 — CCE — CJ — 02 du 14 Décembre
2000 portant règlement de procédure devant la Chambre Judiciaire de la Cour de
Justice de la CEMAC ;
Vu les Actes Additionnels n°10/06/CEMAC/CJ/CCE du 13 juillet 2006
n°11/06/CEMAC/CJ/CCE du 07/08/2006 et n°14/07-CEMAC-008-CJ-CCE-08 du
25/04/2007 portant nomination des membres de la Cour de Justice de la CEMAC ;
Oui Madame Julienne ELENGA NGAPORO en son rapport ;
Oui les conseils des parties en leurs observations tant écrites qu’orales ;
Oui l’Avocat Général en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément au droit communautaire :
Par requête datée à AY du 30 décembre 2009, enregistrée au greffe de la
Chambre Judiciaire le 07 janvier 2010 sous le n°013, Maîtres Parfait Gabriel
KALDJOB, avocat au barreau du Cameroun — BP 7226 — Douala, et Magloire
BAHDJE, avocat au barreau du Tchad — BP 1475 — N'Djaména, agissant au nom et
pour le compte de leur cliente, la Banque Ai Ac, ont saisi la Cour d'un
recours en tierce opposition contre l’arrêt n° 010/CJ/CEMAC/C.J/09 rendu par la Cour
de céans le 13 novembre 2009.
Par requête datée à N'Djaména du 11 février 2010, enregistrée au greffe de la
Chambre Judiciaire le 12 février 2010 sous le n°006, Maître Mahamat Hassan
ABAKAR, avocat au barreau du Tchad — BP 2065 — N’C, agissant au nom et
pour le compte de sa cliente, la Commission Bancaire de l’AX Aa en sigle
(COBAC) a saisi la Cour d’un recours en tierce opposition contre le même arrêt dont
le dispositif est le suivant :
« se déclare compétente, déclare recevables les requêtes au fond et en exception
d’illégalité ; reçoit l'Autorité Monétaire du Cameroun et Ab Al Ac AT
en leur intervention volontaire ; reçoit les demandes de rabat de délibéré ;
Au fond :
— rejette les demandes de rabat de délibéré ; déclare nul et non advenu le protocole
d'accord conclu entre la COBAC et le groupe Ai le 10 janvier 2008 pour vice
de procédure ; annule par voie de conséquence la décision COBAC D-2008/52 du 04
juillet 2008 portant avis conforme de la COBAC pour la publication de l’arrêté de la
mise en restructuration d’Ab Al Ac AT et toutes les décisions
subséquentes ; déclare l’article 12 alinéa 1 de l'ordonnance n°96/03 du 24 juillet
1996 relative à la restructuration des établissements de crédit en République du
Cameroun non conforme à la législation communautaire ; constate que la
restructuration d'Amity Al Ac AT ayant pour fondement légal
l'ordonnance camerounaise n°96/03 s’est superposée à celle ayant pour base les
textes communautaires ; dit qu’une restructuration assise sur le cadre légal national
ne saurait se superposer à une restructuration décidée sur la base des textes
communautaires, en raison du principe de la hiérarchie des normes juridiques qui
veut que les textes communautaires priment sur les lois nationales ; constate que la
COBAC a accordé pour la restructuration d'Amity Al Ac AT des
avantages dont le provisionnement du portefeuille des créances douteuses sur une
durée de 10 ans , tout en interdisant aux actionnaires la distribution des dividendes
avant le provisionnement intégral desdites créances ; constate que le Gouvernement
de la République du Cameroun s’est engagé à apporter son concours à la
restructuration de Ab Al Ac AT par la prise en charge d’un certain
nombre de ses créances en souffrance ;dit que ces concours doivent être
maintenus ; ordonne la notification du présent arrêt à la Commission Bancaire de
l'Afrique Centrale (COBAC), à la Banque des Etats de l’AX Aa AHAJ) et à
l'Autorité monétaire Camerounaise pour les conséquences de droit. »
A l’audience du 26 juin 2010 où l'affaire a été appelée pour la première fois, la Cour
(Chambre Judiciaire) a enregistré l'intervention volontaire de l'Autorité Monétaire du
Cameroun, représentée par Ah AI Ak à AP, Ad AM
AL et par Me Yolande NGO MINYOGOG ; l'intervention volontaire de
Messieurs Ar AW, Aj AV, AG AN et la
Compagnie d'assurances C.P.A. SA, représentés par Me Guy SILINOU et la SCP
MBOCK-MBENDANG-NDOCK LEN-NGUEMHE ;
Les deux requêtes en tierce opposition ont été notifiées à toutes les parties
intervenantes ce 25 juin 2010 ; elles ont été notifiées au conseil d’Ab Al
Ac, absent à cette première audience, par courrier n
095/CJ/CEMAC/CJ/G/10 du 08 juillet 2010 ;
Dans ses conclusions datées du 12 octobre 2010, le conseil de la Banque Ai
a sollicité la jonction des tierces oppositions et l'insertion du dossier issu de cette
jonction au dossier de la procédure originelle ; par ailleurs, dans ses conclusions,
l’'Avocat Général a demandé à la Cour de se déclarer incompétente, dans
l'hypothèse où, dans le cas d'espèce, il y a violation des normes OHADA sur les
Sociétés Commerciales, car l’'Acte Uniforme dont la violation est invoquée n’est pas
une norme de la CEMAC ;
I! faut dès lors, examiner la compétence de la Cour ; Pour ce faire, un bref rappel des
faits s'impose ;
|. Rappel des faits
Courant 2003-2005, les contrôles effectués par la COBAC au sein de Ab Al
Ac ont révélé de graves infractions à la réglementation bancaire ; la COBAC
a formulé des injonctions dont le respect devait permettre de restaurer l'équilibre
financier au sein de la banque ;
Pour en contrôler l'exécution et les résultats, la COBAC a diligenté une mission au
sein de Ab Al du 09 avril au 18 mai 2007 ; Au cours de ce contrôle, la COBAC
a constaté que malgré les promesses, les dirigeants de cette banque n’ont pas
restauré l'équilibre financier de la banque et que la gestion de cette dernière ne peut
- plus être assurée dans des conditions normales ;
Au terme de ce constat, faisant application des dispositions de l’article 16 de
[annexe à la Convention portant création d’une Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale, lequel dispose que la Commission Bancaire est habilitée à désigner un
administrateur provisoire doté de toute attribution nécessaire à l'administration et à la
direction de l'établissement, si la gestion de l’établissement ne peut plus être assurée
dans des conditions normales, la COBAC a décidé de placer Ab Al sous
administration provisoire ; Par décision COBAC 2007/216 du 26 mai 2007, elle a
nommé « un mandataire » de la COBAC à Ab Al Ac AT avec pour
mission de :
- poursuivre la gestion courante de la banque ;
- rechercher toutes personnes intéressées par l'entrée dans le capital de Ab
Al Ac AT en vue de rétablir sa structure financière à travers un
plan de restructuration crédible soumis à l'approbation de la COBAC , l’article
3 spécifie que le mandataire dispose de tous les pouvoirs d'administration, de
direction et de représentation de Ab Al Ac AT ; l’article 4 dit
que le mandataire exerce ce pouvoir dans la limite de l’objet social et sous
réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées
d'actionnaires ;
En date du 12 octobre 2007, une Assemblée générale de la banque à laquelle ont
pris part des représentants du Secrétariat général de la COBAC s'est tenue à
A l'issue de cette réunion, les actionnaires ont approuvé les comptes de l’exercice
clos au 31 décembre 2006, décidé de la poursuite des activités et arrêté qu’une
nouvelle assemblée générale devait être convoquée dans les meilleurs délais pour,
d'une part, examiner les modalités de reconstitution des fonds propres en vue de la
poursuite des activités et d'autre part, examiner en détail, le plan de restructuration
qui conviendrait pour ces activités ;
Alors que cette assemblée n’est pas encore convoquée, le « mandataire » de la
COBAC à Ab Al Ac AT a élaboré avec Banque Ai Ac,
un protocole d'accord faisant office de plan de restructuration, approuvé par la
COBAC au cours de sa session du 14 décembre 2007 et signé par le mandataire
COBAC au nom d'Amity Bank et par la Banque Ai le 10 janvier 2008, sans
que ce protocole ait été examiné et approuvé par les actionnaires ;
Ues derniers ont écrit au « mandataire’ de la COBAC pour avoir communication dudit
protocole afin d'en connaître la teneur ;
Le « mandataire » COBAC a refusé de le leur communiquer au motif qu’il contenait
des clauses de confidentialité et d’exclusivité ;
Les actionnaires découvrent dans les colonnes du quotidien camerounais
« Ac At n°9/95/5394 du jeudi 02 octobre 2008, l'arrêté n° 0483/MINFI
signé depuis le 19 septembre 2008 dont un extrait est ainsi libellé : « la banque
Ab Al Ac AT, est placée en position de restructuration ;
Cette restructuration s'effectuera conformément au plan de restructuration contenu
dans le protocole d’accord conclu entre Ab Al Ac AT et le groupe
Banque Ai dont la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale a pris acte lors
de sa session ordinaire du 14 décembre 2007 à Yaoundé ; les dispositions détaillées
du plan de restructuration ne peuvent être rendues publiques » ;
C'est alors que par requête datée à AY du 03 octobre 2008, enregistrée au
greffe de la Chambre Judiciaire le 06 octobre 2008 sous le n° 007, Monsieur
Ar AW et autres ont saisi la Cour d’un recours tendant à l’annulation
de ce protocole d’accord et de la décision COBAC D.2008/52 du 04 juillet 2008
portant avis conforme de la Commission bancaire d'Afrique Centrale pour la
publication de l'arrêté de mise sous restructuration de Ab Al Ac AT ;
Dans l'additif à cette requête introductive d’instance, enregistré au greffe de la
Chambre Judiciaire le 17 octobre 2008 sous le numéro 051, les requérants ont
soulevé l'exception d’illégalité des trois textes suivants :
- l'ordonnance camerounaise n° 96/03 du 24 juillet 1996 relative à la
restructuration des établissements de crédit ;
- l’arrêté n° 0483/MINFI pris le 19 septembre 2008 portant restructuration de
Ab Al Ac AT ;
- la décision COBAC D-2007/216 du 26 mai 2007 portant désignation d’un
mandataire de la COBAC à Ab Al Ac AT ;
Par un autre additif produit à l’audience du 04 juin 2009 enregistré au greffe de la
Cour de céans le 29 mai 2009 sous le n° 044, les requérants ont formulé d’autres
demandes au travers d’un dispositif ainsi libellé :
- par ces motifs et autres
- accorder aux concluants le bénéfice de leurs précédentes écritures ;
- leur donner acte de ce que, tout en maintenant leurs précédentes écritures, ils
produisent la décision COBAC D-2009/025 qui tient parfaitement lieu de
protocole litigieux ;
- donner acte aux exposants de ce que par les présentes écritures, ils
demandent le retrait des actes suivants ;
- la décision COBAC D-2009/025 prise en violation de la décision COBAC D-
2007/216 en outrepassant le cadre de la mission que cette décision avait
impartie au mandataire ;
- l'avenant au protocole d'accord signé le 10 janvier 2008 entre Ab Al et le
groupe Banque Ai » ;
Il. Sur la compétence de la Cour
Attendu que s'agissant d’un recours en annulation, la compétence de la Cour est
régie par la combinaison des articles 4, 14 et 15 de la Convention régissant la Cour
de Justice de la CEMAC, et 48 a3 et b3 de l’acte additionnel n° 06/CEMAC-041-
CEE-CJ-02 portant Statut de la Chambre Judiciaire, lesquels disposent :
Article 4 : « Dans son rôle juridictionnel, la Cour de Justice rend, en dernier ressort
des arrêts sur les cas de violation des traités de la CEMAC et des Conventions
subséquents dont elle est saisie conformément à ses règles de procédure… Elle est
juge en appel et en dernier ressort des litiges opposant la Commission bancaire
d'Afrique Centrale (COBAC) aux établissements de crédit assujettis ».
Article 14 : « La Chambre Judiciaire connaît, sur recours de tout Etat membre, de “ fout organe de la CEMAC ou de toute personne physique, morale qui justifie d’un intérêt certain et légitime, de tous les cas de violation des dispositions des traités de la CEMAC et des Conventions subséquentes.
Toute partie peut, à l’occasion d’un litige, soulever l'exception d'illégalité d’un acte juridique d’un Etat membre ou d’un organe de la CEMAC.
La Chambre Judiciaire saisie conformément aux alinéas précédents, contrôle la légalité des actes juridiques déférés à sa censure ».
Article 15 : « Statuant en matière de contrôle de légalité des actes juridiques de la CEMAC ou d'actes s’y rapportant, la Chambre Judiciaire peut prononcer la non- conformité des actes entachés de vice de forme, d’incompétence, de détournement de pouvoir ou de violation des règles de droit découlant de la présente Convention ou pris en application de celle-ci ».
Article 48 alinéa a3 et b3 du Statut de la Chambre Judiciaire dispose : « La chambre connaît notamment : -en premier et dernier ressort- des recours en contrôle de la légalité des actes juridiques déférés à sa censure ;
En dernier ressort, des litiges opposant la Commission bancaire d'Afrique Centrale (COBAC) aux établissements de crédit assujettis ».
Attendu que dans le cas d'espèce, le mandataire de la COBAC à Ab Al a opposé aux actionnaires de ladite banque la confidentialité du protocole d’accord signé à l'insu de l’Assemblée des actionnaires et contrairement aux termes du mandat reçu, alors et surtout que la clause de confidentialité excipée n’est opposable qu'aux tiers et non à l'entité elle-même prise dans ses différents démembrements dont l'assemblée générale constitue l'organe suprême ;
Attendu que le mandataire agit au nom et pour le compte du mandant, et les actes qu’il pose sont sensés être posés par le mandant lui-même ; qu'il s'en suit que faisant office de plan de restructuration, le protocole d'accord élaboré et signé par le mandataire de la COBAC à Ab Al et approuvé par le mandant, est un acte de la COBAC, pris dans le cadre d’une procédure disciplinaire ouverte contre un
établissement de crédit assujetti ; que le litige né de sa contestation par un groupe
d’actionnaires dudit établissement de crédit, est bien un litige opposant la COBAC à
un établissement de crédit, au sens des articles 4, 48 a3 et b3 susvisés ;
Attendu qu’il est tout à fait évident que le législateur communautaire CEMAC a
expressément chargé la Cour de « réaliser par ses décisions, l’harmonisation
des jurisprudences dans les matières relevant du domaine des traités »
notamment en contrôlant la légalité des actes juridiquement déférés à censure d’une
part, et qu’il a confié à la COBAC « l’harmonisation et le contrôle de l’activité
bancaire dans le cadre d’un environnement juridique approprié » d’autre part ;
Attendu qu’il va sans dire que le contrôle de la légalité ne se limite pas aux actes
communautaires figurant dans la nomenclature prévue aux articles 20 et suivants de
l’'Additif au traité de la CEMAC relatif au système institutionnel et judiciaire de la
Communauté, mais s'étend à d'autres actes communautaires innommés ;
mttendu que le contexte factuel et juridique dans lequel « le protocole d'accord
faisant office de plan de restructuration » a été élaboré et signé par la mandataire de
la COBAC et approuvé par cet organe mandant, justifie le caractère communautaire
de cet acte juridique et fonde la compétence de la Chambre Judiciaire de la Cour de
Justice de la CEMAC ;
II. Sur la forme des procédures en tierce opposition
1- Sur la jonction de procédures
Attendu que dans ses conclusions datées du 12 octobre 2010 enregistrées au greffe
de la Chambre Judiciaire le 27 octobre 2010 sous le n° 009/10-11, la Conseil de la
Banque Ai a sollicité la jonction des deux procédures en ce que les requêtes
en tierce opposition visent la rétractation de l’arrêt attaqué ;
Attendu qu'il y a lieu d’accéder à cette requête et de statuer sur les deux requêtes
par un seul et même arrêt pour une bonne administration de la justice ;
2- Sur la recevabilité des tierces oppositions
Attendu que l’article 95 de l'acte additionnel n° 004/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02
portant règles de procédure devant la Chambre Judiciaire de la Cour dispose que :
«le tiers qui n’a été ni appelé ni représenté peut faire tierce opposition à l'arrêt qui lui
fait grief » ;
a — La tierce opposition de la Banque Ai
Attendu que la requérante justifie la recevabilité de son recours par son absence au
procès ayant donné lieu à l'arrêt attaqué, n’y ayant jamais été appelée ou
représentée ;
que de plus, l'arrêt incriminé qui annule le protocole d’accord conclu entre la COBAC
et le Groupe Banque Ai Ac le 10 janvier 2008 pour vice de
procédure, annule par voie de conséquence la décision COBAC D-2008/052 du 4
juillet 2008 portant avis conforme de la COBAC pour la publication de l'arrêté de
mise en restructuration d'Amity Al Ac AT et toutes les décisions
subséquentes, énonce à la page 23 que « cette nullité emporte la caducité de
l'agrément octroyé à la Banque Ai du Cameroun en ce qu’il ne l’a été que
dans le cadre de la restructuration d’Ab Al Ac AT » ; que cet arrêt lui
fait grief, d’où son intérêt à l’attaquer en tierce opposition ; qu’elle demande par
conséquent à la Cour de :
- déclarer recevable la tierce opposition qu’elle forme contre l'arrêt n°
010/CJ/CEMAC/CJ/09 rendu le 13 novembre 2009 par la Cour de céans ;
- constater que l'arrêté ministériel n° 0000483/MINFI du 19 septembre 2008 et
l'ordonnance camerounaise n° 96/03 du 24 juin 1996 ne sont pas des actes
dont la Cour de Justice de la CEMAC a compétence pour connaître de la
violation ;
- dire qu’en prononçant la nullité de ces deux actes, la Chambre Judiciaire de la
Cour de Justice de la CEMAC a outrepassé sa compétence et violé les règles
sur l’exception d'’illégalité, s'immisçant ainsi à tort dans l’ordonnancement
juridique d'un Etat souverain qu'est le Cameroun ;
- dire n’y avoir lieu à nullité des trois actes, objets de l'exception d’illégalité ;
- dire qu’au cours du procès, une demande aux fins de maintien de concours
financiers n’a été formulée par aucune partie, à titre préjudiciel ou
reconventionnel ;
- statuer ainsi qu'il appartiendra sur les dépens ;
Attendu qu'il ressort des pièces de la procédure que la requérante n’était ni appelée
ni présente dans l'instance où l'arrêt attaqué a été prononcé ; qu’elle est
effectivement tiers par rapport à cette instance ; que cet arrêt qui annule le protocole
d’accord conclu entre la requérante et le mandataire AQ à Ab Al
Ac et par voie de conséquence la décision COBAC D-2008/052 du 4 juillet
2008 portant avis conforme de la COBAC pour publication de l’arrêté de mise en
restructuration d’Ab Al Ac AT ainsi que toutes les décisions
subséquentes, tout en constatant que cette nullité emporte caducité de l’agrément
octroyé à la requérante, préjudicie à ses droits ; qu’elle est donc recevable à former
tierce opposition ;
b- La tierce opposition de la COBAC
Attendu que par requête reçue au greffe de la Chambre Judiciaire le 06 octobre
2008, enregistrée sous le n° 07, Messieurs Ar AW, Aj AV,
AG AN et la Compagnie Professionnelle d'Assurance (NPA) ont saisi la
Cour d’un recours tendant à l’annulation du protocole d'accord conclu entre Ab
Al Ac AT et le Groupe Banque Ai, signé par le mandataire
COBAC au nom de Ab Al, le 10 janvier 2008 et de ia décision COBAC D-
2008/052 du 4 juillet 2008 portant avis conforme de la commission Bancaire de
l'Afrique Centrale pour la publication de l'arrêté de mise sous restructuration de Ab
Al Ac AT ;
Attendu que cette requête était assortie d'une requête en sursis à exécution
des décisions attaquées ;
que par requête additives enregistrée au greffe de la Chambre Judiciaire le 17
octobre 2008 sous le n° 051, les requérants soulevaient l’exception d’illégalité contre
trois actes qui sont :
- la décision COBAC D-2007/216 du 26 mai 2007 portant désignation d’un
mandataire de la Commission Bancaire à Ab Al Ac AT, au
sens de l’article 16 de l'annexe à la Convention portant création de la
COBAC ;
- l’arrêté n° 0000483/MINFI pris le 19 septembre 2008 par le Ministre
camerounais des Finances portant restructuration de Ab Al Ac
AT ;
l'ordonnance camerounaise n° 96/03 du 24 juin 1996 relative à la
restructuration des établissements de crédit au Cameroun ;
Attendu que les requêtes en annulation et en sursis à exécution ont été notifiées au
Gouverneur de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC) par courrier n°
051/CJ/CEMAC/CJ/G/08 et au secrétariat Général de la COBAC par courrier n°
052/CJ/CEMAC/CJ/G/08 datées du 13 octobre 2008, reçues au Secrétariat Général
de la COBAC le 17 octobre 2008 ;
que dans ces correspondances, il était indiqué que l’audience relative à l'examen de
la requête aux fins de sursis à exécution était fixée au 23 octobre 2008, et qu'un
délai de quarante-cinq jours après réception de cette notification, était imparti à la
COBAC pour produire son mémoire en défense quant au fond ;
que par courrier n° COB/915/DAJ/IEB du 22 octobre 2008, le Président de la COBAC
a sollicité le renvoi de l'audience d'examen de la requête aux fins de sursis à
exécution prévue pour le 23 octobre 2008 à une date ultérieure, afin de lui laisser le
temps de transmettre le dossier de la procédure à la Commission de la CEMAC, pour
suites à donner et notamment, pour la constitution d’un avocat ;
que par lettre n° COB/916/DAJ/IEB du 22 octobre 2008, le Président de la COBAC a
sollicité de la Cour, qu’un délai supplémentaire soit accordé au Secrétariat Général
de la COBAC pour l’accomplissement de toutes les diligences prescrites pour la mise
en état du dossier ;
Attendu qu’'accédant à la requête du Président de la COBAC, le Président de la
Chambre Judiciaire a renvoyé l'examen de la demande de sursis à exécution, appelé
à l’audience publique du 23 octobre 2008, à celle du 13 novembre 2008 ;
que par courrier n° COB/969/DAJ/IEB du 13 novembre 2008, le Secrétaire Général
de la COBAC a transmis au juge rapporteur ses observations préliminaires dans
lesquelles il a sollicité le rejet de la demande de sursis à exécution formulée par les
iequérants, et informé la Cour de ce que la procédure de saisine de la Commission
de la CEMAC pour défendre les intérêts de la Communauté dans cette affaire a été
activée ; qu’il a en conséquence demandé à la Cour de revoir les dates d'audience
retenues « pour permettre une meilleure organisation de la défense des décisions
prises par la COBAC » ;
Attendu que par courrier n° 0011/ABC/MC/09 du 15 janvier 2009, le mandataire
COBAC à Ab Al a rendu compte au Secrétaire Général de la COBAC du
déroulement de la procédure ; qu'il y est notamment dit : « le MINFI par le biais de
Me Yolande NGO MINYOGOG Aa sollicité l'implication formelle de Ab Al dans
la procédure juridictionnelle. Y faisant suite, une réunion de concertation entre la
division des affaires juridiques du MINFI et leur conseil cité plus haut, Ab Al et
son conseil Me TCHAKOUTE PATIE Charles, a eu lieu à AY dans nos locaux le
04.12.08. Advenue cette concertation, notre conseil a sollicité le rabat de délibéré et
le renvoi de la cause à une date ultérieure. (.…) après une brève concertation, la
Cour s’est ravisée et a finalement rabattu le délibéré et renvoyé la cause au 28
janvier 2009 afin que Ab Al produise ses moyens en défense. (.….) Je vous
tiendrai informé sur l’évolution de l'affaire ».
Attendu que dans l'arrêt n° 001/CJ/CEMAC/CJ/09 rendu le 26 février 2009 sur la
demande de sursis à exécution, la Cour de céans, examinant le bien fondé de cette
iequête, a largement exposé les observations préliminaires formulées par le
Secrétaire Général de la COBAC, en réponse aux prétentions de la partie adverse ;
qu’en effet, la juridiction dit: « Considérant que la COBAC, organisme
communautaire à compétence juridictionnelle et juridiction de première instance dont
la décision est querellée, a fait parvenir à la Cour un rapport daté du 13 novembre
2008 et enregistré au greffe le 17 novembre 2008 ; Qu'elle (la COBAC) expose que
c’est en application de l’article 9 de l’annexe à la Convention du 16 octobre 1990 et
de l'article 32 de l’annexe à la Convention du 17 janvier 1990 qui l'ont dotée de
pouvoir nominatif de fixer les règles destinées à assurer l’équilibre de la structure
Hnancière des établissements de crédit dans l'intérêt des déposants, des tiers et de
l'ensemble du système bancaire sous-régional, qu'elle s’est préoccupée du cas
d'Amity Bank en difficulté ; Qu'en conséquence les mesures qu’elle adopte doivent
être respectées en permanence ;
Que malheureusement Ab Al contrevient depuis de très nombreuses années à
cette réglementation ; Que des mesures disciplinaires ont été infligées aux dirigeants
de Ab Al pour leur manquement répétitif aux engagements pris pour le
redressement de l’établissement ; La prise de la décision COBAC D-2007/216 est
une véritable mesure de sauvegarde d'Amity Bank pour éviter sa liquidation pure et simple et prévenir le risque sismique ; Qu’ainsi un mandataire a été nommé pour
poursuivre la gestion courante de la banque en collaboration avec le personnel et
rechercher tout partenaire intéressé par l'entrée dans le capital d’Ab Al en vue
de rétablir sa structure financière à travers un plan de restructuration crédible soumis
à l'approbation de la COBAC ; Que la COBAC conclut à l'urgence et à la nécessité
de poursuivre la mise en œuvre du plan de restructuration annexé à l'arrêté n°
0000483/MINFI du 19 septembre 2008 portant restructuration d’Ab Al car c’est
le contraire qui menacerait l’ordre et la sécurité publics .»
Attendu que dans la procédure au fond et par lettre n° 042/CJ/CEMAC/PC.J/09 du 28
mai 2009 reçue le 1°" juin 2009, le Président de la Chambre Judiciaire a invité le
mandataire COBAC à Ab Al à comparaître personnellement à l'audience du 04
juin 2009 muni de toutes les pièces relatives au déroulement de la mission qui lui a
été confiée par décision COBAC D-2007/216 du 26 mai 2007 et complétée par
l'arrêté ministériel n° 0000483/MINFI du Ministre camerounais des Finances, à savoir
la restructuration d’Ab Al ;
que le mandataire COBAC ne s’est pas présenté à cette audience, retenu au
Cameroun dit-il par la plume du Conseil d’Ab Al, pour des problèmes
familiaux ;
qu’alors que l'affaire est renvoyée à l’audience du 02 juillet 2009 sur demande du
conseil d’Ab Al, ce dernier ne s’y présente pas ; que l'affaire est plaidée et mise
en délibéré pour arrêt devant être rendu le 05 novembre 2009 ; que l'avocat d’Ab
Al a sollicité le rabat du délibéré et la réouverture des débats ;
Attendu que tout ce qui précède, il est établi que la Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale (COBAC) a été appelée, qu'elle était présente dans la procédure tant par
ses observations préliminaires que par sa demande de renvoi de l'audience publique
consacrée à l'examen de la requête aux fins de sursis à exécution qui avait été
accueillie; Qu'elle était régulièrement informée par son mandataire à Ab Al de
l’évolution de la procédure ;
qu’au surplus, la COBAC qui est caractérisée par le dualisme de ses fonctions
(fonction de contrôle administratif et fonction juridictionnelle) a agi en l'espèce en tant
au’organe juridictionnel et comme juridiction de première instance dont les décisions
sont examinées par la Cour ; qu’elle n’est pas partie à l'instance d'appel devant ladite
Cour, de sorte qu'elle n’est pas fondée à former tierce opposition contre l'arrêt
querellé ; qu’elle doit être déclarée irrecevable ;
c- Sur les interventions volontaires
Attendu que l’article 71 de l’acte additionnel n°04 portant règles de procédure devant
la Chambre judiciaire dispose : « l'intervention d’un tiers est recevable en tout état
de cause jusqu’à la clôture des débats. »
qu’en application de ces dispositions, l'intervention volontaire de l’Autorité Monétaire
du Cameroun, celle d’Ab Al Ac AT et celle de Messieurs Ar
AW, FUTE Raphaël, AN AG et la Compagnie Professionnelle
d’Assurances (CPA) sont recevables ;
/
3- Sur la note en délibéré
Attendu que M. Ar AW et autres ont fait parvenir au greffe de la
Cour une note en délibéré datée à AY du 24 janvier 2011, enregistrée au greffe
de la Chambre Judiciaire sous le n° 057/10-11 ;
que cette note vise à préciser l'irrecevabilité de la tierce opposition de la Banque
Ai Ac, puis à répondre très succinctement aux conclusions de
Attendu que le conseil de l'Autorité Monétaire a sollicité le rejet de cette note en
délibéré ;
Attendu qu’au sens de l’article 68 de l’Acte additionnel n°04 susvisé, l'admission
d’une note en délibéré n’est possible que s’il y a un point à éclaircir ou nécessité
d'une mesure d’instruction complémentaire, auquel cas les débats doivent être
rouverts ;
qu'en l’occurrence, la Cour a été suffisamment éclairée sur tous les points soulevés
par les parties, de sorte que la note en délibéré déposée par Monsieur Ar
AW et autres doit être rejetée ;
4-Sur les demandes reconventionnelles
Attendu que dans leurs observations écrites datées du 28 juin 2010, Monsieur
Ar AW et autres ont saisi la Cour d’une demande reconventionnelle
par laquelle il sollicite de la Cour qu’elle :
- prononce la caducité de l'agrément octroyé à la Banque Ai
Ac ;
- ordonne le délaissement et l'expulsion de la société Banque Ai
Ac de tous les éléments du fonds de commerce d'Amity Al
Ac AT ainsi que de tous les locaux et sites d'exploitation dudit fonds
occupés par la société Banque Ai Ac S.A. ;
- réhabilite tous les organes d’Ab Al Ac existants avant les
décisions annulées ;
- dire que la décision à intervenir sur le délaissement et l’expulsion sera assortie
d'une astreinte journalière de cinq cent millions (500 000 000) FCFA à
l'encontre de la société Banque Ai du Cameroun et au bénéfice de
Messieurs Ar AW, FUTE Raphaël, AN AG et la
Compagnie Professionnelle d'Assurances (CPA) S.A. ;
Attendu que répondant à ces conclusions, la Banque Ai, l'Autorité Monétaire
du Cameroun et Ab Al ont conclu à l’irrecevabilité de ces demandes
reconventionnelles en ce qu'il est de principe que la tierce opposition n’est ouverte
que contre le dispositif de l’arrêt attaqué ; que les demandes nouvelles ne peuvent
donc pas être admises ;
Attendu qu’il est en effet de principe que l'effet dévolutif de la tierce opposition ne se
limite qu’au dispositif de l’arrêt attaqué, en ne remettant en question que les points
déjà jugés ; qu’il s'ensuit que les demandes reconventionnelles déposées par M.
Ar AW et autres doivent être repoussées ;
IV. Sur les Moyens des parties contre l’arrêt entrepris
Attendu que la Banque Ai (requérante), l’Autorité monétaire et Ab Al
(intervenantes volontaires) ont soulevé pour l'essentiel les mêmes moyens ;
Le moyen pris de l'irrecevabilité de la requête introductive d'instance pour défaut
d'indication des adresses des défendeurs ;
Le moyen pris de l’irrecevabilité de la demande de nullité du protocole de 10 janvier
2008 pour défaut de production de l'acte attaqué et forclusion ;
Le moyen pris de l’irrecevabilité de la requête additive comportant les exceptions
AS 19 À,
Le moyen pris de la violation du principe de l'immutabilité du litige en ce que l'arrêt a
déclaré caduc l’agrément alors que cette demande n’a pas été formulée par les
requérants à la procédure originelle ;
Le moyen pris du défaut de motifs en ce que l'arrêt attaqué n’a pas répondu à
l'exception d’irrecevabilité de la requête initiale pour défaut de production de l’acte
attaqué ;
Le moyen pris de la violation du principe de neutralité en ce que les premiers juges
en parlant de la pratique des restructurations d’autres banques dans la région
CEMAC ont fait état de leurs connaissances personnelles;
Attendu que la Banque la Banque Ai soulève outre ces moyens, le moyen
pris de la dénaturation des faits en ce que les premiers juges ont affirmé sans
aucune preuve que le protocole d'accord opérait transfert de l’actif et du passif
d’Ab Al Ac AT au Groupe Banque Ai du Cameroun et que
l'agrément octroyé à la Banque Ai du Cameroun l'a été dans le cadre de la
restructuration de Ab Al Ac AT ;
qu’elle demande enfin à la Cour de prononcer l’irrecevabilité et le rejet du dossier de
la procédure, de l’ensemble des actes diligentés par Me Pierre BOUBOU en ce que
cet avocat ne peut plaider contre Ab Al Ac AT avec laquelle il est lié
par un contrat de prestation ;
Attendu que l'Autorité monétaire ajoute le moyen pris de la contrariété entre certains
moyens notamment lorsque la Cour annule des actes tout en maintenant le concours
financier prévu dans le cadre strict de la restructuration qu'elle vient d'annuler
totalement y compris tous les actes en découlant ;
Le moyen pris de l’irrecevabilité de la requête introductive d'instance pour défaut de
demande en ce que les demandeurs y sollicitent en même temps trois choses
contradictoires à savoir: la nullité des actes attaqués, leur retrait et leur
inopposabilité ; que cette contrariété de demandes équivaut à une absence de
demande entraînant l’irrecevabilité de l’action ;
Attendu que la requérante, l’Autorité monétaire et Ab Al (intervenantes
volontaires) demandent à la Cour de rétracter l'arrêt attaqué et statuant à nouveau :
- déclarer irrecevable la requête introductive d'instance pour défaut de
production de l'acte attaqué ;
- déclarer irrecevable la demande de nullité du protocole d’accord du 10 janvier
2008 pour défaut de production dudit acte ;
- déclarer irrecevable la demande de nullité de la décision COBAC D-2008/052
du 4 juillet 2008 en raison d'une part de l'invalidité de la demande, d'autre part
de la forclusion consécutive au dépassement du délai de deux mois prévu à
l’article 12 de l'acte additionnel n° 004/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 du 14
décembre 2000 portant règles de procédure devant la Chambre Judiciaire de
la Cour ;
- dire que c'est en violation flagrante des droits de la Banque Ai
Ac, tiers au procès, que l'arrêt querellé a déclaré caduc l’agrément de
cette banque, agrément au demeurant non produit aux débats par les
demandeurs, alors et surtout que les premiers juges ont statué ultra petita
dans la mesure où aucune demande de caducité ne leur a été adressée au
cours de l'instance ;
- dire qu’il n’y a pas lieu de prononcer la caducité de l'agrément de la Banque
Ai Ac ;
- déclarer irrecevable la demande de nullité de la décision D-2009/025 du''°"
avril 2009, pour n’avoir pas été formulée par requête introductive d’instance
ainsi que l’exige la législation applicable ;
- déclarer irrecevable l’exception d’illégalité soulevée contre les trois actes
susvisés, pour avoir été formulée par voie d'action après l’expiration du délai
de deux mois prévu par l'article 12 de l'acte additionnel n°004/00/CEMAC-
041-CCE-CJ-02 ;
- dire qu'en tout état de cause, la sanction de l'exception d'illégalité est
l'’inapplicabilité de l’acte incriminé et non la nullité de celui-ci comme l’a fait à
tort l'arrêt dont tierce opposition ;
- constater que l’application de l'arrêté ministériel n° 0000483/MINFI du 19
septembre 2008 n’a pas été requise par aucune partie au procès et a fortiori
Ab Al Ac AT ou l’Autorité Monétaire du Cameroun, qui au
demeurant n’avaient pas la qualité de demandeurs ;
- constater que l'arrêté ministériel n° 0000483/MINFI du 19 septembre 2008 et
l'ordonnance camerounaise n° 96/03 du 24 juin 1996 ne sont pas des actes
dont la Cour de Justice de la CEMAC a compétence pour connaître de la
violation ;
- dire qu’en prononçant la nullité de ces deux actes, la Chambre Judiciaire de la
Cour de Justice de la CEMAC a outrepassé sa compétence et violé les règles
sur l’exception d'’illégalité, s'immisçant ainsi à tort dans l’ordonnancement
juridique d’un Etat souverain qu’est la Cameroun ;
- dire n'y avoir lieu à nullité des trois actes objets de l'exception d’illégalité ;
- dire qu’au cours du procès, une demande aux fins de maintien de concours
financiers n'a été formulée par aucune partie, à titre principal ou
reconventionnel ;
- dire qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une telle demande ;
- statuer ainsi qu’il appartiendra sur les dépens ;
V. Appréciation des moyens
1°) Sur le moyen pris de l’irrecevabilité de la requête introductive d’instance en
raison de la non indication de l’identité des défendeurs
Attendu que la requête introductive d'instance datée à AY du 03 octobre 2008
enregistrée au greffe de la Chambre Judiciaire le 06 octobre 2008 sous le n° 007
indique qu’elle est introduite par Me Pierre BOUBOU, avocat au Barreau du
Cameroun, BP 3424 AY, ayant élu domicile à l'Etude de Me NGADJADOUM
Josué, avocat au barreau du Tchad, 72 rue Ap AS, BP 5554 N’C,
aux noms et pour le compte de Messieurs AW Ar, FUTE Raphaël,
AN AG et la Compagnie Professionnelle d’Assurances (CPA)
Contre
- Protocole d'accord conclu entre Ab Al Ac AT et le groupe
Banque Ai par la COBAC au nom de Ab Al le 10 janvier 2008,
acte défendu par la COBAC, institution de la CEMAC, dont le siège est à
Yaoundé, représenté par ses représentants légaux ;
- Décision COBAC D-2008/52 du 04 juillet 2008 portant avis conforme de la
Commission Bancaire de l’AX Aa pour la publication de l'arrêt de
mise sous restructuration de Ab Al Ac AT, décision défendue
par la COBAC, institution de la CEMAC dont le siège est à Yaoundé
représentée par ses représentants légaux ;
Attendu que ces indications ont permis au greffe de la Chambre Judiciaire de faire
toutes les notifications, lesquelles notifications ont eu pour conséquence
l'intervention volontaire de l'Autorité Monétaire du Cameroun, celle de Ab Al et
la présentation par la COBAC de ses observations ; qu’il en résulte, qu’étant devant
la Cour de Justice de la CEMAC, ces indications suffisent à l’identification de la
personne concernée, de sorte que ce moyen est inopérant ;
2°/ Sur l’exception d’irrecevabilité de la demande introductive d’instance pour
défaut de production de l’acte attaqué
Attendu que la requérante expose que l’article 16 de l'acte additionnel n°
004/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 du 14 décembre 2000 portant règles de procédure
devant la Chambre Judiciaire de la Cour prévoit que : « /a requête doit à peine
d'irrecevabilité indiquer les noms, professions et adresse des parties, l'objet de la
demande, contenir l'exposé sommaire du litige et les moyens invoqués à l'appui de la
zemande et être accompagnée de l’acte attaqué » ;
Que l’arrêt querellé n’a pas fait application de cette disposition légale impérative et a
cru devoir occulter le fait que les demandeurs n’ont jamais produit aux débats le
protocole d’accord attaqué ;
Que faute de production du protocole au dossier de la procédure, la demande de
nullité dudit acte est irrecevable en vertu des dispositions légales sus rappelées ;
Attendu que la Cour a, par courrier n° 042/CJ/CEMAC/PCJ/09 du 28 mai 2009,
invité le mandataire COBAC à Ab Al Ac AT à comparaître «
personnellement à l'audience du 4 juin 2009, muni de toutes les pièces relatives
au déroulement de la mission qui lui a été confiée par décision n°D-2007/216 du
26 mai 2007 complétée par l'arrêté ministériel n" 483/MINFI du ministre
camerounais des finances, à savoir la restructuration d'Amity Bank» ; que ce dernier
n'a pas déféré à la convocation, retenu au Cameroun disait-il sous la plume du
conseil d'Amity Al Ac AT, par des problèmes familiaux pour lesquels il
est sur le qui vive;
que le but de cette convocation était d’obtenir communication de l’acte attaqué,
frappé de confidentialité ;
Attendu que devant le refus manifeste du mandataire COBAC de présenter cet acte
à la Cour, la question qui s’est posée au juge communautaire est celle de savoir s'il
faut priver un requérant ordinaire de son droit de saisir la Cour, d’un recours en
annulation d’un acte qui nuit à ses intérêts, parce que le caractère secret que revêt
ledit acte, détenu par son adversaire, l’empêche de le produire devant la Cour ;
Attendu qu’à cet égard, le préambule du traité instituant la Communauté Economique
et Monétaire de l’AX Aa AHAK), relève en son l'alinéa 6 que les
gouvernements des Etats signataires, réaffirment, « leur attachement aux
principes de liberté, de démocratie et de respect des droits fondamentaux des
personnes et de l’Etat de droit » ;
Attendu que le droit au recours ou droit au juge faisant partie des droits
fondamentaux qui se trouvent au cœur de l'Etat de droit, le législateur CEMAC n’est
pas resté en marge de la problématique communautaire de la protection des
iusticiables ; qu’il assure l'effectivité du droit d’accès à la Cour de Justice
communautaire, notamment en permettant à « toute personne physique et morale
qui justifie d’un intérêt certain et légitime d'exercer un recours dans les cas de
vioiation des Traités de la CEMAC, des Conventions subséquentes » et « de
soulever l'exception d'illégalité d’un acte juridique … d'un Organe de la CEMAC »,
ainsi qu'il ; ressort des dispositions de.l’article_14 de la Convention régissant la Cour de Justice communautaire ;
Attendu que le droit d'accès au juge communautaire ainsi reconnu par le Traité et consacré par la Convention resterait lettre morte s’il était permis à un individu ou un Organe de la CEMAC de retenir par devers lui, sous le prétexte de confidentialité, un acte objet d’un recours'en annulation devant la Cour de Justice CEMAC ;
que d’ailleurs, au nom du droit d'accès effectif à un tribunal, la Commission européenne des droits de l'Homme a consacré le droit d'accès aux documents administratifs classés « secret défense » dès lors que ces documents permettaient d'étayer utilement une action en justice qui, sinon, serait vouée à l’échec ;
Attendu que l’irrecevabilité d’un recours pour défaut de production de tels documents, participerait d'un déni de justice ; qu’il importe donc de limiter le champ de cette irrecevabilité aux exigences strictes de l’ordre public communautaire, qui n’est pas intéressé en l'espèce ;
Attendu que l’Acte additionnel qui subordonne la recevabilité d’un recours en contrôle de la légalité d'un acte à sa production, ne peut valablement modifier la Convention qui consaère le droit d’accès au juge communautaire, des requérants ordinaires que sont les personnes physiques ou morales justifiant d’un intérêt certain et légitime ;
qu’au surplus, les droits fondamentaux dont le respect est ainsi prescrit, sont contenus dans les instruments internationaux que sont la Déclaration universelle des droits de l'Homme et la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples qui ont toutes été ratifiées par les Etats membres de la CEMAC ;
que la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples reconnait en son article 7, le droit pour toute personne à ce que sa cause soit entendue par une juridiction, et s'impose aux Institutions, Organes et Institutions spécialisées de la CEMAC
que les modalités de mise en œuvre et de la protection desdits droits sont envisagées notamment dans la Convention révisée de l’Union Economique de
d'Afrique Centrale (UEAC) qui consacre sa section 8 à la bonne gouvernance, aux
droits de l'Homme entre autres, et prescrit à l’article 47 de ladite section
l’engagement des actions susceptibles « d’améliorer l’accès à la justice » ;
qu’au reste, la Déclaration de Bamako du 03 novembre 2000, qui est un des
instruments de référence de la francophonie, confirme l'adhésion des pays
francophones aux principes de démocratie, parmi lesquels, la garantie et la
consolidation de l'Etat de droit par «la promotion d’une justice efficace et
accessible »;
Attendu surabondamment que la primauté du droit qui découle du préambule du
Traité de la CEMAC ne se conçoit guère sans la possibilité d’accès au juge
communautaire ; que nul ne peut établir une violation de ses droits et libertés devant
le juge, s'il n’est pas à même de le saisir ;
qu'il appartient à la Cour de veiller que l’assurance de bénéficier d’un droit garanti
par le traité instituant la CEMAC et les textes internationaux ne puisse pas être
dévoyé ;
Attendu que certes, l’annexe à la Convention portant création de la COBAC, institue
en son article 6 le principe de la soumission au secret professionnel, de la
commission et des personnes habilitées à agir en son nom ;
que cependant, la mise sous restructuration de Ab Al Ac AT est la
sanction du non respect des règles prudentielles bancaires, et comme telle, elle doit
être soumise au respect des droits de la défense des personnes physiques et
morales contrôlées, notamment le droit d’accès au dossier, lequel exclut toute
confidentialisation de principe en raison de ses conséquences sur les droits des
actionnaires, de sorte que tous les actes posés dans le cadre de la restructuration
doivent être communiqués aux actionnaires historiques, au risque d'être invalidés
pour violation des droits de la défense et du droit d'accès au juge; qu’en effet, les
actionnaires disposent du droit de communication, des droits sur les actifs de la
société, du droit de décider de tous les éléments susceptibles d'affecter la valeur
patrimoniale de la société ou leurs propres droits, et pouvant être considérés comme
des actes de disposition ;
que dès lors, l'on ne saurait valablement opposer aux actionnaires historiques
d'une banque contrôlée, la clause de confidentialité d'un document qui comporte
pour la banque, les plus graves conséquences puisqu'il décide de sa cession-
liquidation ;
Attendu encore qu’en l'espèce, ces actionnaires ne disposent pas d’un recours en
droit national, l'ordonnance appliquée dans la procédure interdisant tout recours
contre les actes pris dans le cadre de cette procédure;
Attendu que le secret ici affecte les droits des actionnaires, notamment le droit
d’accès au juge et leur droit à la défense, car comme l’affirme la CJCE « le droit
d'accès au dossier vise à garantir les droits de la défense » (CJCE le 15 octobre
2002 / Affaire AU Z et autres/COMMISSION).
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que déclarer irrecevable le recours dont la
tour est saisie, pour non production de l'acte attaqué revêtu du sceau de la
confidentialité et retenu par les Autorités de la restructuration de la banque, serait
une atteinte au droit au recours, droit fondamental garanti par le traité de la CEMAC
et constituerait un déni de justice;
Attendu qu’au surplus, la lecture des pièces versées au dossier par les requérants et
régulièrement communiquées aux parties adverses, atteste de l’existence du
protocole d'accord litigieux dont le contenu ne fait plus mystère :
- la lettre du Président de la COBAC au Ministre camerounais des finances,
référencée C/19 du 18 février 2008 où il est dit: « En date du 10 janvier 2008
il a été procédé entre le mandataire de la COBAC auprès d'Amity Al
Ac AT et le Groupe Bank Ai à la signature d'un
protocole d'accord qui prévoit la cession par Ab Al Ac
AT de certains des éléments de son patrimoine à la Banque Ai
Ac (.…) La publication de l'arrêté de mise sous restructuration s'avère
indispensable pour réaliser la restructuration selon le schéma inscrit dans le
protocole d'accord à savoir le transfert d'actif et de passif de Ab
Al à une nouvelle entité avant sa mise sous liquidation. »
- la lettre du Secrétaire Général de la COBAC au Ministre camerounais des
finances, référencée COB/246/DCP/ERC du 14 mars 2008 dit que : « Le
protocole d'accord fait office de plan de restructuration, qu'il est en
définitive un contrat de cession et non un contrat d'apport comme prévu
initialement. La conséquence essentielle de cette disposition est que les
actionnaires d'Amity Bank qui voudraient figurer autour de la table de la
nouvelle entité devront souscrire individuellement au capital et procéder
à un apport en numéraire. »
- la décision COBAC D-2009/025 du 1°" avril 2009 portant prorogation du
mandat du mandataire COBAC à Ab Al dit dans ses considérants que:
«L'avenant au protocole d'accord signé le 10 janvier 2008 entre Ab
Al et le Groupe Banque Ai consigne le transfert des éléments
d'actif et de passif de Ab Al à la Banque Ai Ac,
qu'après la réalisation de ce transfert, la disparition de la personne
morale Ab Al obéit à la fois aux procédures de retrait d'agrément
de l'article 17 de l'annexe à la convention du 17 février 1992 et de liquidation
des biens prévue par l'Acte uniforme OHADA du 10 avril 1998 portant
organisation des procédures collectives d'apurement du passif.»
l'arrêté de mise sous restructuration prise par le Ministre camerounais des
finances le 19 septembre 2008 sous le n°0000483 dit que: «la
restructuration d'Amity Al Ac AT s'effectuera conformément
au plan de restructuration contenu dans le protocole d'accord conclu
entre Ab Al Ac AT et le Groupe Banque Ai dont la
COBAC a pris acte lors de sa session ordinaire du 14 décembre 2007 à
Yaoundé. »
Attendu qu'il s'avère constant que le protocole d'accord objet du recours existe, que
son contenu qui fait grief n’est pas contesté ; que c’est à juste titre que la Cour
déclare la requête introductive d'instance régulière et recevable en la forme ;
qu’il s'ensuit qu'il n’y a plus lieu d'examiner les moyens pris du défaut de motifs et de
l'exception d'irrecevabilité de la demande de nullité du protocole pour non production
de l'acte attaqué, en ce qu’il a été répondu à ces exceptions au travers de la
recevabilité de la demande introductive d’instance ;
3°) Sur le moyen pris de la dénaturation des faits en ce que selon la
requérante, l'arrêt querellé a déclaré caduc l'agrément de la requérante alors
qu'aucune demande de caducité n'a été adressée à la juridiction, et que
l'agrément dont s'agit n'a pas été délivré dans le cadre de la restructuration
d'Amity Al Ac AT comme dit dans l'arrêt, mais constitue un acte
autonome, sollicité et obtenu par la Banque Ai Ac, aux fins de
son établissement dans le pays;
Attendu que l'invitation à se prononcer sur l'agrément accordé au Groupe Banque
Ai, en ce qu'il l'a été dans le cadre de la restructuration d'Amity Al
Ac AT, a été formulée par les avocats de la partie demanderesse au
recours en annulation du protocole d'accord, dans leurs écritures datées à AY
du 20 octobre 2009 et enregistrées au Greffe de la Chambre Judiciaire de la Cour,
le 26 octobre 2009 sous le n°066 ;
Attendu que sur cet agrément, il convient de dire, qu'il ressort des correspondances
régulièrement versées au dossier par les demandeurs en nullité du protocole
litigieux, ce qui suit:
- Dans la lettre référencée COB/003/ING du Secrétariat Général de la COBAC au
mandataire COBAC à Ab Al Ac AT, datée à Yaoundé du 16 janvier
2008 ayant pour objet, le protocole d'accord entre Ab Al et Groupe Banque
Ai : « Le deuxième tiret de l'article 7 doit être remplacé par ce qui suit:
pour les créances en souffrance à la différence entre d'une part les éléments du
passif et d'autre part les éléments d'actifs transférés. Les créances en souffrance
reçues d'Amily Bank seront traitées par la Banque Ai Ac comme un
ensemble homogène dont le provisionnement intégral sera étalé sur une durée de
dix ans, selon un calendrier qui sera inséré dans le dossier de demande
d'agrément de la Banque Ai Ac. »
- Dans la lettre du Président de la COBAC au Président du Conseil d'Administration
d’Ai Ag Ao Aa Ae Aq, référencée C/176 datée à Yaoundé A du 4 décembre 2008, ayant pour objet, la mise en œuvre du plan de restructuration de Ab Al Ac AT, il est dit: « Tenant compte de ces éléments, la Commission Bancaire m'a habilité au terme de sa délibération: - soit, en cas d'aboutissement heureux de la requête formulée par le Groupe Banque Ai, à approuver les éventuelles modifications du plan de restructuration et à émettre un avis conforme favorable pour l'arrêté portant prorogation de la restructuration de Ab Al Ac AT; - soit, en cas d'échec de la négociation, à prononcer la fin de l'administration provisoire à la date butoir initiale du 2 janvier 2009 et à en tirer toutes les conséquences de droit. Ces conséquences de droit se traduiront notamment pour la Banque Ai Ac par la caducité des agréments octroyés à la Banque, ses dirigeants et ses commissaires aux comptes, pour l'exercice de l'activité bancaire, l'octroi de l’avis conforme de la COBAC ayant été lié à l'exécution du plan de restructuration approuvé par la COBAC le 14 décembre 2007. »
- Dans la lettre du Président de la COBAC au Ministre Camerounais des finances référencée C/19 datée à Yaoundé du 18 février 2008, ayant pour objet, la restructuration de Ab Al Ac AT, il est dit: « Le 10 janvier 2008, il a été procédé entre le mandataire COBAC auprès de Ab Al Ac AT et le Groupe Banque Ai à la signature d'un protocole d'accord qui prévoit la cession par Ab Al Ac AT de certains éléments de son patrimoine à la Banque Ai Ac, établissement de crédit en voie de création ( … ) La publication de l'arrêté de mise sous restructuration s'avère indispensable pour réaliser la restructuration selon le schéma inscrit dans le protocole d'accord, à savoir le transfert des éléments d'actif et de passif de Ab Al à une nouvelle entité avant sa mise en liquidation (...). Dans cette procédure, il est envisagé de procéder à un retrait d'agrément par la COBAC suivi immédiatement de la cession à la Banque Ai Ac par le liquidateur bancaire, qui aura été nommé concomitamment au retrait d'agrément, des éléments d'actif et de passif de Ab Al (. . .). Dans cette hypothèse, le retrait d'agrément pourrait vous être notifié à ce mois de février sachant que vous disposerez alors d'un délai d'un mois pour réagir, le cas échéant (. . .) Bien entendu, la Banque Ai Ac devra avoir été agréée au préalable, au moyen d'un arrêté pris après avis
conforme ; de la COBAC. »
- La décision COBAC D-2008/060 du 4 juillet 2008 portant avis conforme pour l'agrément de la Banque Ai Ac en qualité d'établissement de crédit vise la décision COBAC 0-2008/052 du 4 juillet 2008 portant avis conforme pour la restructuration de Ab Al Ac AT ;
- Enfin, la lettre du Secrétaire Général de la COBAC à Monsieur As Y, COB/1027/DCP/ERC datée à Yaoundé du 11 décembre 2008, ayant pour objet, la demande de codes dit: « le protocole d'accord du 10 janvier 2008 signé entre le mandataire de la COBAC et le Groupe Banque Ai fait partie intégrante du plan de restructuration envisagé pour Ab Al Ac AT; (...) C'est dans ce cadre que l'avis conforme de la COBAC pour l'agrément de la Banque Ai Ac a été délivré par décision COBAC D- 2008/060 le 4 juillet 2008. II en découle que l'attribution d'un code Banque à la Banque Ai Ac serait prématurée d'autant plus que l'acte de cession des éléments du patrimoine de Ab Al Ac n'a pas encore été signé et la restructuration de cette dernière non achevée.»
Attendu qu’il résulte de tout ce qui précède, que l'agrément accordé au Groupe Banque Ai, l'a bien été dans le cadre de la restructuration de Ab Al Ac AT ; de sorte que son sort est lié à celui du protocole d'accord qui fait office de plan de restructuration de Ab Al Ac AT et constitue sa base juridique ; l’invalidation dudit protocole entraîne la caducité de l’agrément qu’il a généré
A/ Sur le moyen pris de l’exception d’irrecevabilité de la requête introductive
d'instance pour défaut de demande en ce que les demandeurs y sollicitent en
même temps trois choses contradictoires, à savoir: la nullité des actes
attaqués, leur retrait et leur inopposabilité ;
Attendu que l’Autorité Monétaire, intervenante volontaire dit que cette contrariété de
demandes équivaut à une absence de demande entrainant l’irrecevabilité ;
Attendu que dans la requête introductive d'instance datée du 03 octobre 2008, les
requérants demandent à la Cour, avant dire droit, d’ordonner à la COBAC de
communiquer à l’Assemblée générale d’Ab Al, le protocole d’accord signé
entre elle et le groupe Banque Ai ;
Au fond :
En ce qui concerne le protocole d'accord signé entre la COBAC et le groupe Banque
Ai :
- constater que ce protocole recèle de nombreux vices ;
- constater que la décision COBAC D-2007/216 portant désignation d’un
mandataire de la COBAC a expressément exclu de la compétence du
mandataire de la COBAC « les pouvoirs que la loi attribue expressément aux
assemblées des actionnaires » ;
Par conséquent
- constater la nullité du protocole d’accord ;
- constater que la décision D-2008 /52 du 04 juillet 2008 est entachée de
nombreux vices en ce qu’elle a été prise sur la base d’un protocole d'accord
signé par la COBAC en violation du mandat qui lui a été confié par décision n°
D-2007/216 du 26 mai 2007 portant désignation d'un mandataire ;
- la restructuration engagée sur la base d’un texte camerounais (l'ordonnance
n° 96/03 du 24 juin 1996 relative à la restructuration des établissements de
crédit) fait double emploi avec la procédure de restructuration en cours,
engagée en vertu du droit communautaire ;
- constater la nullité de la décision COBAC D-2008/52 du 04 juillet 2008 portant
avis conforme de la COBAC pour la publication de l'arrêté de mise sous
restructuration de Ab Al AT, ainsi que toutes les décisions
subséquentes contenant des dispositions contraires aux intérêts des
actionnaires de Ab Al ;
Subsidiairement :
Déclarer inopposable à l'assemblée générale des actionnaires de Ab Al :
1- la décision COBAC D-2008/52 du 04 juillet 2008 portant avis conforme de la
COBAC pour la publication de l'arrêté de mise sous restructuration de Ab
Al AT
2- le protocole d’accord signé le 10 janvier 2008 entre le groupe Banque
Ai
3- toutes les décisions subséquentes contenant des dispositions contraires aux
intérêts des actionnaires de Ab Al
Attendu qu’il résulte de la lecture de cette demande, qu’il y a d’abord une demande
de nullité et subsidiairement une demande d’inopposabilité, lesquelles demandes ne
s'opposent pas mais sont alternatives ; que le défaut de demande soulevé au moyen
n’est donc pas fondé ;
5/ Sur l’exception d’irrecevabilité de la demande de nullité du protocole pour
forclusion en raison du dépassement du délai de deux mois prévu à l’article 12
de l’acte additionnel n° 04 portant règles de procédure devant la Chambre
Judiciaire
Attendu que l’Autorité Monétaire et Ab Al, intervenantes volontaires
soutiennent que le protocole ayant été signé le 10 janvier 2008, le délai de recours
contre cet acte expirait le 29 mars 2008 ;
que les défendeurs à la tierce opposition répondent qu’on ne peut opposer le délai
de deux mois prévu par l’article 12 de l’acte additionnel n° 04 susvisé pour introduire
un recours contre un acte qu'à compter de sa notification ; que l'acte contesté ne leur
ayant pas été notifié, le délai de deux mois ne peut leur être opposé ;
Attendu que l’article 12 de l'acte additionnel n°04 visé au moyen dispose « le délai de
recours contre les actes est de deux mois … » et l’article 11 du même acte
additionnel apporte la précision suivante : « les délais de procédure courent à
compter du lendemain du jour où survient l’évènement, la publication ou la
notification de l’acte attaqué » ;
Attendu qu'en l'espèce, l'acte est frappé du sceau de la confidentialité et la preuve
de la connaissance acquise par les actionnaires, de la teneur dudit protocole, n'étant
pas rapportée, le délai de deux mois ne peut être valablement computé, de sorte que
re moyen est inopérant ;
£/ Sur le moyen pris de la violation du principe de neutralité du juge
Attendu que la requérante, l’Autorité Monétaire et Ab Al soutiennent que les
premiers juges ont fait état de leurs connaissances personnelles, en parlant de la
restructuration d’autres banques dans la région CEMAC, ce qui n'est pas conforme
aux règles du droit processuel civil ;
que M. AW et autres font observer que ce procès n’est pas un procès de
uroit civil mais de droit communautaire, de sorte que le juge communautaire statue
comme juge administratif communautaire et comme tel, il n'est pas un juge passif ;
que la pratique de la restructuration des banques en zone CEMAC a été relevée tant
dans leur requête introductive que dans leur note en délibéré et dans leurs plaidoiries
orales ; qu’en tout état de cause, les usages font partie des règles de droit et qu'à ce
titre, tout juge peut s'y référer pour rendre sa décision ;
Attendu que c’est pour trancher le débat soulevé par les parties au procès sur le
point de savoir s’il existe un cadre communautaire en matière de restructuration, que
le juge s'est référé non seulement aux textes relatifs à l’organisation et au
fonctionnement de la Commission Bancaire, mais aussi à la pratique de cette
dernière en matière de restructuration, pour affirmer l’existence du cadre juridique
communautaire en la matière ;
que par ailleurs, lors des plaidoiries du 02 juillet 2009 et dans la note de plaidoiries
déposée par les conseils de M. AW et autres, il est fait mention de la
pratique de la Commission bancaire en matière de restructuration en zone CEMAC ;
que loin de violer le principe évoqué dans le moyen, le juge communautaire a joué
son rôle de gardien du droit communautaire et répondu à l’argumentation des
parties ;
7I/ Sur le moyen pris de la violation du principe du contradictoire en ce que
l’égalité des plaideurs et la libre discussion des arguments respectifs n’ont pas
été observées, l’arrêt attaqué ayant entériné l’analyse défendue par les
requérants, sans avoir au préalable recueilli les arguments des parties
adverses et les avoir discutés ;
Attendu que par requête introductive datée du 03 octobre 2008 enregistrée le 06
octobre 2008 sous le n° 007, M. AW et autres ainsi que la Compagnie
professionnelle d’Assurances (CPA) ont saisi la Cour aux fins d'obtenir l’annulation
du protocole d'accord conclu le 10 janvier 2008 entre le groupe Banque Ai et
le mandataire AQ à Ab Al ; la nullité de la décision COBAC D-2008/52
portant avis conforme de la COBAC pour la publication de l’arrêté de mise sous
restructuration de Ab Al Ac ; que cette requête était assortie d’une
requête en sursis à exécution des mêmes décisions ; que ces deux requêtes ont été
notifiées au Gouverneur de la BEAC par courrier du 13 octobre 2008 référencé
051/CJ/CEMAC/CJ/G/08, à l'Autorité Monétaire du Cameroun par courrier n°
081/CJ/CEMAC/CJ/JR/08 du 16 octobre 2008 et au Secrétaire général de la COBAC
par courrier n° 052/CJ/CEMAC/CJ/G/08 du 13 octobre 2008 ;
que les additifs à ces requêtes ont été notifiées régulièrement à l’Autorité Monétaire
du Cameroun par courrier n° 087/CJ/CEMAC/CJ/PC/08 du 21 octobre 2008 et au
gouverneur de la BEAC par courrier n° 053/CJ/CEMAC/CJ/G/08 du 21 octobre
2008 comme précité plus haut ;
que par conclusions datées du 07 novembre 2008, enregistrées au greffe de la
Chambre Judiciaire de la Cour le 13 novembre 2008 sous le n° 069, l'Autorité
Monétaire du Cameroun a fait intervention volontaire dans la procédure ; que cette
requête a été notifiée aux parties adverses le même jour ;
+
que l'Autorité Monétaire a été représentée à l’audience du 13 novembre 2008 ; que
son conseil a déposé ce même 13 novembre 2008 une requête aux fins de rabat de
délibéré, enregistrée au greffe de la Chambre Judiciaire sous le n° 077 ; que le
conseil d'Amity Bank a aussi formulé la même demande ; que suite à ces
demandes, le délibéré a été prorogé au 18/12/2008 ;
qu'advenue l’audience du 18/12/2008, le délibéré a été prorogé au 08 janvier 2009
en raison de l’absence du président de la formation de jugement ;
qu'à l'audience du 08/01/2009, le délibéré a été rabattu et l'affaire renvoyée au
29/01/2009 pour réouverture des débats et ce, sur demande du conseil de l’Autorité
Monétaire et du conseil de Ab Al ;
qu'à l’audience du 29 janvier 2009, l’affaire a été plaidée et à nouveau mise en
délibéré pour arrêt devant être rendu le 26/02/2009 ;
Attendu que l’attention portée au respect du contradictoire était constante durant
toute la procédure, de sorte que la procédure déclenchée par M. AW et
autres a été notifiée à toutes les parties susceptibles d’être intéressées par cette
procédure ; que la Cour a accédé aux demandes de rabat de délibéré de l’Autorité
Monétaire et du conseil d’Ab Al par respect du principe du contradictoire ;
que loin d’avoir violé ce principe, la Cour en a au contraire assuré le respect, de
sorte que ce moyen ne peut prospérer ;
8/ Sur le moyen pris de l’irrecevabilité et le rejet du dossier de la procédure des
actes diligentés par Me BOUBOU
“ttendu que la Banque Ai soutient que la Cour ayant déclaré que Me
BOUBOU ne peut pas plaider dans la cause contre Ab Al Ac AT avec
laquelle il est lié par un contrat de prestation, la reprise en compte des actes
diligentés par Maître Pierre BOUBOU pour la suite de la procédure par Maîtres
Dieudonné HAPPY, Patrice MONTHE et Josué NGADJADOUM ne saurait les
régulariser en ce qu'ils ont été diligentés par un avocat non habilité à cet effet ;
que les défendeurs relèvent que Me BOUBOU est un avocat qu’ils avaient constitué ;
que le fait que l’on ait trouvé un possible conflit d'intérêts ne peut avoir pour
conséquence, l’invalidation des actes de procédure qu’il a posés comme
mandataire ;
Attendu que l’article 42 de la loi n° 90/059 portant organisation de la profession
d’avocat au Cameroun dispose : « l’avocat ne peut ni au cours de l'exécution de sa
mission, ni après l’achèvement de celle-ci, représenter, assister ou conseiller dans la
même affaire ou une affaire connexe, une personne dont les intérêts sont
partiellement contraires à ceux de son client » ;
que cette disposition légale ne prévoyant pas de sanction et encore moins la nullité,
ce moyen est inopérant ;
9/ Sur la demande de nullité du protocole
Attendu que la décision COBAC D-2007/216 portant désignation d’un mandataire de
la COBAC à Ab Al Ac AT dit à son article 2 que la mission du
mandataire consiste à :
- poursuivre la gestion courante de la banque en collaboration avec le
personnel actuel ;
- rechercher toutes personnes intéressées par l’entrée dans le capital de Ab
Al Ac AT en vue de rétablir sa structure financière à travers un
plan de restructuration crédible soumis à l'approbation de la COBAC ;
Attendu que l’article 3 précise que le mandataire dispose de tous les pouvoirs
d’administration, de direction et de représentation de Ab Al Ac AT ;
que l’article 4 ajoute que le mandataire exerce ce pouvoir dans la limite de l’objet
social et sous réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées
d'actionnaires, à l'exemple des actes de disposition ;
Attendu que les actes que doit accomplir le mandataire étant circonscrits dans le
mandat ainsi reçu, il s’ensuit qu’en signant ce protocole d’accord qui est un
acte de disposition, en ce qu'il transfert l’actif et le passif de la banque Amity à
la Banque Ai Ac, sans consulter l’assemblée générale des
actionnaires, le mandataire a outrepassé son mandat ;
qu’il y a lieu de rappeler que le protocole d’accord signé entre la Banque Ai
Ac et « le mandataire » COBAC auprès de Ab Al Ac AT n’a
pas été approuvé par les actionnaires contrairement aux délibérations de
l'Assemblée générale du 12 octobre 2007, à l'esprit et à la lettre de la
correspondance de la COBAC COB/969/DAJ/IEB du 13 novembre 2008 ;
que cette lettre dit entre autres que le protocole d'accord n’entend pas organiser
des opérations de restructuration emportant des conséquences sur les droits
des actionnaires attachés aux actions ;
qu’elle rappelle à juste titre les termes de l’article 4 de la décision COBAC D-
2007/216 suivant lesquels le mandataire de la COBAC exerce ses pouvoirs dans la
limite de l’objet social et sous réserve de ceux que la loi attribue expressément
aux assemblées d’actionnaires ; que de plus, cette lettre contient une mention
eusceptible de rassurer les actionnaires quant à la préservation de leurs droits
lorsqu'elle indique que « le protocole d’accord ne constitue qu’une manifestation
d’intention portant sur les actes que les signataires entendent accomplir une
fois remplies toutes les conditions légales y afférents » ;
que les conditions légales se rapportent notamment à la prise en compte des
pouvoirs attribués par la loi aux assemblées d'actionnaires ;
qu’il résulte de ce qui précède, que l’acte élaboré et signé par le mandataire
AQ est entaché d’un vice de procédure, parce qu’il n’obéit pas à l’acte de
mission AQ et que le sceau de confidentialité dont il est revêtu viole à la
i0is les droits de la défense et le droit d’accès au juge ; qu’il doit être déclaré
non conforme, de sorte qu'aucun acte de restructuration subséquent ne peut
valablement s’y adosser, notamment la décision COBAC D-2008/052 du 04
juillet 2008 portant avis conforme de la COBAC pour la publication de l’arrêté
de mise sous restructuration et toutes autres décisions communautaires ou
nationales subséquentes ;
qu'en effet, la Cour qui est en droit de l’annuler « peut » dans l’intérêt général de
la Communauté et conformément à l’article 15 de la Convention la régissant,
« prononcer cette non-conformité » ;
qu'il convient dès lors et eu égard au caractère déclaratoire de l'arrêt à intervenir et
aux spécificités des problèmes bancaires, de ne pas substituer l’appréciation de la
Cour à celle des Autorités compétentes de restructuration, le contrôle de légalité des
actes n'étant pas un contentieux de pleine juridiction ; qu’ il y a simplement lieu de
renvoyer la cause et les parties devant les Autorités précitées auxquelles il
appartient, en vertu de l’article 16 de la Convention régissant la Cour, « de prendre
toutes les mesures nécessaires à l’exécution du présent arrêt» ;
10/ Sur les exceptions d’illégalité
Attendu que l’article 14 de la Convention régissant la Cour dispose en ses deuxième
et troisième alinéas que « toute partie peut à l’occasion d’un litige, soulever
l’exception d'’illégalité d’un acte juridique d’un Etat membre ou d’un organe de
la CEMAC. La Chambre Judiciaire saisie conformément aux alinéas précédents
contrôle la légalité des actes déférés à sa censure ».
qu’il résulte de ces dispositions que, l'exception d'illégalité n'est pas enfermée dans
un délai, de sorte que la demande formée par M. AW et autres est recevable
en ce qui concerne tout au moins l’ordonnance camerounaise et l'arrêté n°
0483/MINFI du 19 septembre 2008, dans l'additif du 17 octobre 2008 ;
a - Sur l'arrêté ministériel
Attendu que les demandeurs à l'action soutenaient qu'en vertu des dispositions de
l'article 7 de l'annexe à la Convention portant création de la COBAC, les autorités
nationales ne sont compétentes que dans les matières qui ne relèvent pas de la
compétence des autorités communautaires;
Qu'en prenant une décision de restructuration d'une banque déjà sous
restructuration de la COBAC, cet arrêté a violé la Convention de 1990 ;
Que par ailleurs, cet arrêté a dénaturé les termes de la décision COBAC D-2008/052
portant avis conforme pour la restructuration de Ab Al Ac AT en ce
qu'il y est mentionné que le protocole d'accord est conclu entre Ab Al
Ac AT et le groupe Banque Ai, alors que dans la décision
COBAC D-2008/052, il est mentionné que le protocole d'accord a été signé entre le
mandataire de la COBAC et le groupe Banque Ai ;
Que cet arrêté est illégal parce que non conforme à l'avis conforme de la COBAC ;
Attendu qu’il faut relever que l'exception d’illégalité tend non pas à faire annuler
l'acte qui en fait l’objet, mais simplement à le déclarer inapplicable au cas d'espèce ;
que l'arrêté ministériel n° 0483/MINFI du 19 septembre 2008 a donc été annulé à
tort, sur le moyen pris de l'exception d'illégalité ; que l'arrêt querellé doit être rétracté
sur ce point ;
Attendu toutefois que la non-conformité du protocole d'accord rejaillit sur tous les
actes qu’il soutend et notamment la décision COBAC D-2008/052 du 04 juillet 2008,
l'arrêté ministériel n° 0483/MINFI du 19 septembre 2008, en dépouillant ces actes
subséquents de leur base légale ;
b- Sur l'article 12 de l'ordonnance 96/03
Attendu qu'il est reproché à alinéa 1de cet article de ne pas être conforme à l'article
18 de la Convention du 16 octobre 1990 portant création de la COBAC, dans la
mesure où elle exclut toute voie de recours en faveur des personnes physiques ou
morales frappées par des sanctions prises dans le cadre d'une restructuration d'un
établissement de crédit ;
Attendu que sans contester cette violation d'un texte communautaire par
l'ordonnance litigieuse, les parties intervenantes se contentent de dire que la
juridiction communautaire n'a pas compétence pour modifier l'ordonnancement
juridique national ;
40
Attendu qu’il n'est pas demandé à la Cour de modifier le texte attaqué, mais
seulement de dire et juger que les dispositions de l’alinéa 1 de l'article 12 de
l’ordonnance n° 96/03 sont inapplicables aux requérants parce que contraires
aux dispositions de l'article 18 de l'annexe à la Convention du 16 octobre 1990
susvisée, lequel prévoit que « les sanctions prises en vertu de l'article 18 ainsi que
les avis formulés au titre des articles 7 et 8 sont susceptibles de recours dans le
strict respect des dispositions de celui-ci » ;
qu'il importe de noter sans qu'il soit besoin d’examiner les affirmations des
requérants relatives à la violation des articles 7 et 8 précités que le principe de
nrimauté permet de faire prévaloir la norme communautaire sur la norme nationale,
d'écarter l'application de la norme nationale contraire au droit communautaire;
Attendu que la primauté évoquée est « une condition existentielle » du droit
communautaire qui, « en raison de sa nature spécifique originale, ne peut se
voir opposer un texte interne quel qu’il soit, sans perdre son caractère
communautaire et sans que soit mis en cause la base juridique de la
Communauté elle-même ».
que la norme interne incompatible est donc inapplicable, et de plein droit ; que
selon la doctrine établie et la jurisprudence constante, tout juge de
l'application du droit communautaire, toute autorité nationale ou
communautaire a l'obligation absolue de la laisser inapplicable ;
Attendu qu'à cet égard, les dispositions de l'alinéa 1 de l'article 12 de l'ordonnance
camerounaise n° 96/03, constituent un obstacle juridique à l'application effective du
droit au juge consacré par la législation communautaire CEMAC, que cette
ordonnance est inapplicable en l'espèce, étant entendu que cette déclaration
d’inapplicabilité n'aura autorité de chose jugée qu’à l'égard des parties à l’instance ;
c- Sur la décision COBAC D-2007/216 du 26 mai 2007
Attendu que les requérants reprochent à cette décision d'avoir désigné un
mandataire en se fondant sur un texte qui ne parle que d'administrateur provisoire
et de liquidateur;
qu’ils soutiennent qu'en nommant un mandataire en lieu et place d'un administrateur
provisoire, la COBAC a voulu assumer elle-même les actes de son mandataire; elle
ne peut le contrôler, encore moins le sanctionner dans la mesure où si elle le
sanctionnait, elle se sanctionnerait elle-même;
Qu'il s'ensuit qu'en nommant un mandataire, la COBAC s'est faite juge et partie dans
le processus de restructuration de Ab Al; Que tout contrôle juridictionnel ou
administratif des actes est désormais exclu;
Attendu que l’Autorité Monétaire rétorque qu'aucune disposition de l'annexe à la
Convention du 16 octobre 1990 n'interdit l'utilisation du mot « mandataire» ; que la
décision attaquée est donc légale;
Attendu que la Cour relève que la décision litigieuse est une décision individuelle qui
n'a pas été attaquée en nullité dans le délai de deux mois suivant sa notification ;
que ce délai étant largement dépassé, l'exception d'illégalité soulevée contre cet
acte non réglementaire devenu définitif, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS
- Ordonne la jonction des deux procédures,
- Rétracte l’arrêt n°010/CJ/CEMAC/CJ/09 du 13 novembre 2009 ;
Statuant à nouveau
En la forme :
- se déclare compétente,
- reçoit la Banque Ai en sa tierce opposition ;
- rejette la tierce opposition de la COBAC ;
- reçoit l’Autorité Monétaire du Cameroun, Ab Al et Monsieur
AW et autres en leur intervention volontaire ;
- rejette la note en délibéré déposée par Monsieur AW et autres ;
- rejette les demandes reconventionnelles formulées par M. AW et
autres ;
- déclare recevable la requête introductive d’instance ;
- déclare recevable l’additif du 17 octobre 2008 en ses dispositions
relatives à l’article 12 alinéa 1 de l’ordonnance n° 96/03 du 24 juin 1996 et
l’arrêté ministériel n° 0483/MINFI du 19 septembre 2008 ;
- déclare recevable l’additif du 29 mai 2009 ;
- déclare irrecevable l’exception d’illégalité soulevée contre la décision
COBAC D-2007/216 du 26 mai 2007 ;
Au fond :
- déclare non conforme le protocole d’accord signé par le mandataire de
la COBAC à Ab Al et la Banque Ai, ainsi que tous les actes subséquents ;
- dit que l’article 12 alinéa 1 de l’ordonnance n° 96/03 du 24 juin 1996 est
inapplicable en l’espèce ;
- dit que l’agrément accordé à la Banque Ai Ac l’a été dans
le cadre de la restructuration de Ab Al Ac AT;
- déboute les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions ;
- renvoie la cause et les parties devant les Autorités compétentes de
restructuration, auxquelles il appartient de prendre, en vertu des
dispositions de l’article 16 de la Convention régissant la Cour, toutes les
mesures nécessaires à l’exécution du présent arrêt ;
- dit que chacune des parties supportera ses propres frais ;
- ordonne la notification du présent arrêt au gouverneur de la Banque des
Etats de l’AX Aa AHAJ), à l’Autorité Monétaire du Cameroun
et au président de la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale
(COBAC).
Ainsi jugé et prononcé en audience publique à N’C, le trente un
mars deux mille onze ;
Ont signé le Président, les Juges et le Greffier.
M. Antoine MARADAS M. DADJO GONI Mme Julienne ELENGA NGAPORO
44