CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. JOSEPH GAND,
PRÉSENTÉES LE 18 JUIN 1969
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
L'affaire sur laquelle vous avez à vous prononcer aujourd'hui porte sur l'étendue des droits financiers auxquels peut prétendre M. Pasetti à la suite de la décision qui a mis fin définitivement à ses fonctions dans les conditions prévues à l'article 4 du règlement du Conseil 259/68.
I
Le requérant, engagé en janvier 1956 au service juridique de la Haute Autorité, a été soumis la même année au statut du personnel de la C.E.C.A. et a été titularisé dans le grade A 3. A ce titre — et comme les titulaires des grades A 1 et A 2 — il pouvait se voir retirer à tout moment son emploi dans l'intérêt du service (article 42 du statut); il avait droit, dans ce cas, à une indemnité temporaire, puis à une retraite, calculées dans des conditions plus avantageuses que celles accordées par
l'article 34 aux fonctionnaires mis en disponibilité à la suite d'une réduction de personnel comportant des suppressions d'emploi.
Ce régime a été modifié par l'article 50 du statut des fonctionnaires C.E.C.A. de 1962. Seuls les titulaires des grades A 1 et A 2 peuvent désormais se voir retirer leur emploi dans l'intérêt du service, et leurs droits pécuniaires se trouvent rapprochés de ceux reconnus par le nouveau statut aux agents mis en disponibilité dont la situation paraît être d'autre part moins favorable qu'en 1956. Toutefois, en vertu de l'article 99, ceux des agents A 1 et A 2 qui ont été titularisés avant le
1er janvier 1962 peuvent opter, en cas de retrait ultérieur de leur emploi, pour le bénéfice des dispositions de l'article 42 de l'ancien statut.
A la suite de la fusion des exécutifs, l'article 4 du règlement du Conseil 259/68 a autorisé la Commission à prendre à l'égard des fonctionnaires de tous grades, jusqu'au 30 juin 1968, des mesures de cessation définitive des fonctions que nous aurons à caractériser de façon plus précise. Disons simplement que, d'une façon générale, le régime financier appliqué par l'article 5 du règlement aux agents ainsi éliminés n'est pas très éloigné de celui fixé par l'article 50 du statut de 1962. Mais
l'article 7 apporte à ce régime un double tempérament:
— il ouvre, au paragraphe 1, l'option pour les dispositions de l'article 34 du statut de 1956 (ancien régime financier de la disponibilité) aux anciens fonctionnaires C.E.C.A. à l'exception de ceux qui, antérieurement au 1er janvier 1962, étaient titulaires des grades A 1 et A 2;
— quant a ces derniers, ils peuvent, en vertu du paragraphe 2, opter pour l'application de l'article 42 du statut de 1956 (ancien régime financier du retrait d'emploi).
Le 14 mars 1968, M. Pasetti a demandé que fût prise à son égard une mesure de cessation définitive des fonctions «conformément à l'article 4, paragraphe 1, du règlement». Satisfaction lui fut donnée par une décision du 21 mai 1968, confirmée le 20 juin, et, par lettre du 21 juin, il lui fut demandé de faire connaître son choix quant aux droits financiers afférents à sa cessation de fonctions.
Cette lettre se référait sans autre précision à l'article 7 du règlement, mais il suffisait de lire ce dernier article pour voir que, sauf application de l'article 5 du règlement, la seule option possible était celle de l'article 34 du statut de 1956 et non celle de l'article 42.
Le requérant ne s'y est pas trompé; aussi vous demande-t-il l'annulation partielle de la décision du 21 mai 1968, confirmée le 20 juin, dans la mesure où elle s'oppose à ce que ses droits pécuniaires soient liquidés sur la base de l'article 42 du statut de 1956. Sans doute cette décision n'est-elle qu'une application — et une application exacte de l'article 7 du règlement 259/68, mais c'est cet article que le requérant considère comme illégal pour deux raisons: d'une part, en n'accordant pas aux
fonctionnaires A 3 titularisés dans le cadre C.E.C.A. avant le 1er janvier 1962 le bénéfice de l'article 42, il violerait leurs droits acquis — d'autre part, en leur refusant ce qu'il accorde aux agents titularisés en A 1 et A 2 avant la date indiquée, il consacrerait une discrimination entre les uns et les autres et violerait le principe de l'impartialité de l'administration. Si cette argumentation est fondée, il en découlera nécessairement l'illégalité partielle de la décision individuelle qui le
concerne.
La Commission et le Conseil qui intervient pour défendre le règlement dont il est l'auteur considèrent le recours de M. Pasetti comme irrecevable, et en tout cas mal fondé.
Mais, avant d'aborder l'argumentation à la fois subtile et nourrie développée par les parties, nous pensons qu'il n'est pas inutile de prendre une vue plus précise du règlement 259/68 et de comparer le régime qu'il institue avec ceux qui figuraient dans le statut, ce qui permettra peut-être de ramener à l'essentiel une discussion qui a eu tendance à s'égarer au fur et à mesure que se poursuivait la procédure.
Le régime nouveau est propre a la Commission et temporaire; pendant sa durée d'application — soit jusqu'au 30 juin 1968 — il exclut la possibilité pour les autorités de cette institution de prendre des décisions de mise en disponibilité ou de retrait d'emploi dans les conditions prévues par le statut.
— La cessation définitive des fonctions qu'il institue peut concerner les fonctionnaires de tous grades, mais les conditions dans lesquelles elle est prise diffèrent suivant qu'il s'agit des fonctionnaires de grade A 1 et A 2 ou des autres. Pour les premiers, la Commission dispose d'un pouvoir discrétionnaire qu'elle doit cependant exercer de façon objective (Reinaz contre Commission des Communautés, 6 mai 1968, 17-68, Recueil, XV-1969, p. 61), et l'on reste donc près du système du retrait d'emploi
tel qu'il est prévu au statut.
— En revanche, le régime appliqué aux fonctionnnaires des autres grades — y compris ceux de grade A 3 — comporte une série d'éléments qui caractérisaient précédemment la procédure de la disponibilité: obligation de réduire les effectifs de l'organigramme, intervention de la Commission paritaire, fixation de critères d'appréciation pour le choix des agents auxquels s'applique la mesure. D'autre part, ceux-ci ont la faculté d'opter entre la cessation définitive des fonctions et la disponibilité qui
n'écarte pas toute éventualité de retour au service.
On notera que, comme dans le régime de la disponibilité prévu au statut, il peut être tenu compte, si l'intérêt du service le permet, des demandes des fonctionnaires sollicitant l'application d'une mesure de cessation définitive des fonctions. Mais il n'est pas sûr alors, à s'en tenir au texte (car telle n'a peut-être pas été l'application qui en a été faite), que le volontaire puisse opter pour la mise en disponibilité. De tous ces éléments il nous paraît résulter que le règlement 259/68 établit un
régime qui, pris dans son ensemble, n'est entièrement réductible à aucun des modes de sortie du service prévus au statut et qui s'explique par les nécessités temporaires et exceptionnelles auxquelles il fallait parer. Il fallait rationaliser les services, parvenir à une réduction du nombre des emplois; on a cherché à bâtir un système ouvrant à la Commission comme aux agents des possibilités très variées suivant la diversité des situations. Du point de vue du choix des agents dégagés des cadres, ce
système combine le pouvoir discrétionnaire, la désignation unilatérale mais contrôlée, le départ volontaire. Du point de vue du régime financier fait à ces agents, il offre également un éventail assez large pour donner à chacun des possibilités différentes selon son âge ou son ancienneté de service. Ce régime fait un tout et doit être apprécié dans son ensemble.
II
C'est à la lumière de ces observations générales que nous examinerons d'abord les fins de non recevoir opposées tant par la Commission que par le Conseil au recours de M. Pasetti.
1. La Commission soutient en premier lieu que ce recours serait irrecevable parce que la mesure attaquée ne pourrait faire grief au requérant. Celui-ci a demandé lui-même à bénéficier d'une mesure de cessation définitive des fonctions «conformément à l'article 4, paragraphe 1 du règlement no 259/68 du Conseil», or, ce paragraphe précise que les mesures en question sont prises «dans les conditions définies ci-dessous», qui sont explicitées dans les articles suivants, notamment quant à leurs effets
financiers. C'est donc l'application de l'ensemble des dispositions du règlement qu'aurait sollicitée M. Pasetti, lequel n'a assorti sa demande d'aucune réserve; la décision prise a donc tout entière été voulue par lui, et la Commission invoque l'adage «volenti non fit injuria».
A cette argumentation, M. Pasetti répond en invoquant les conditions dans lesquelles il a présenté sa demande sur un formulaire préétabli qui lui aurait été adressé alors qu'il n'avait pu encore prendre connaissance du texte du règlement, ce qui nous paraît de peu de poids en l'espèce. Il relève qu'on ne peut tirer de sa demande une renonciation anticipée à former un recours contre une décision qui n'était pas encore prise, ce qui nous paraît plus sérieux. Mais ce qui nous retient surtout
d'accueillir la fin de non recevoir opposée par la Commission, c'est que l'adage «volenti non fit injuria» ne nous paraît pas pouvoir trouver sa place dans les rapports entre la Communauté et ses agents, alors surtout que ces rapports, nous y reviendrons tout à l'heure, sont d'ordre statutaire et non d'ordre contractuel. L'administration est tenue de respecter le droit. Si la décision qu'elle prend comporte un vice de nature à l'entacher d'illégalité — ce que seul révèle l'examen du fond — elle
doit pouvoir faire l'objet d'un recours, même si elle est intervenue sur la demande du fonctionnaire intéressé.
2. Deux autres fins de non recevoir opposées par la Commission ne nous retiendront pas davantage. L'une est tirée de ce que, le régime accordé au requérant par le règlement 259/68 étant plus favorable que le régime antérieur, M. Pasetti serait sans intérêt à l'attaquer. L'autre de ce que la mesure instituée par le règlement serait distincte du retrait d'emploi prévu au statut et qui seul ouvrait au fonctionnaire le droit au bénéfice de l'article 42 du texte de 1956. Comme la Commission le reconnaît
elle-même, cette argumentation est étroitement liée au fond. D'une part, en effet, les droits financiers que le fonctionnaire retire de l'application de tel ou tel régime ne peuvent être appréciés de façon générale et abstraite; suivant son âge, son ancienneté de service, ou d'autres éléments encore, un agent peut avoir davantage à bénéficier de l'un ou de l'autre, et cette considération largement subjective ne paraît pas pouvoir influer sur la recevabilité du recours. D'autre part, il faut
démontrer la différence entre le «retrait d'emploi» du statut et la «cessation définitive des fonctions» du règlement 259/68 pour établir que l'article 42 du statut de 1956 est applicable à la première de ces mesures et non à la seconde; quelle que soit la position que nous avons prise plus haut, cela n'est pas évident à première vue.
3. C'est sur un autre terrain que se place le Conseil dans son intervention pour émettre certains doutes sur la recevabilité du recours de M. Pasetti.
Celui-ci demande que l'article 7 du règlement soit déclaré inapplicable à son cas; mais y a-t-il intérêt?
En effet, si l'article 7, dans ses deux paragraphes, lui est déclaré inapplicable, il perdra le bénéfice des dispositions relatives à la mise en disponibilité en vigueur avant 1962, sans pour autant se voir accorder le bénéfice qu'il réclame des dispositions relatives au retrait d'emploi en vigueur avant cette même date.
Nous pensons qu'il convient d'interpréter le recours de M. Pasetti comme invoquant l'illégalité — et donc l'inopposabilité en ce qui le concerne — de l'article 7, paragraphe 2, en tant qu'il laisse hors de son champ d'application les fonctionnaires A 3 titularisés avant 1962. A supposer que cette illégalité soit démontrée, ce qui ici encore intéresse le fond, la décision prise par la Commission devrait être annulée, et l'exécution de votre arrêt comporterait pour la Commission l'obligation de
prendre une nouvelle décision qui tiendrait compte des droits que vous auriez reconnus à M. Pasetti. Cela implique que le requérant a certainement intérêt à contester, dans les conditions et limites que nous venons de dire, la légalité de l'article 7 du règlement, et, par voie de conséquence, de la décision individuelle qui le concerne. Son recours nous paraît donc recevable.
III
Mais est-il fondé ?
Nous dirons tout de suite que la réponse est pour nous négative.
1. Le premier moyen est tiré de la violation des droits acquis du requérant sur la base de l'article 42 du statut de 1956. Il a été présenté sous deux formes un peu différentes au cours de la procédure.
a) Pour l'appuyer, le recours se fonde uniquement sur ce que l'article 7 du règlement 259-68 reconnaîtrait de façon indirecte l'existence de ce droit car il réserve expressément les droits acquis par les fonctionnaires des grades A 1 et A 2 sur la base de l'article 42; c'est à tort qu'il ne tient pas compte de ce que les fonctionnaires de grade A 3 ont acquis le même droit sur la base du même article, puisque ce dernier s'appliquait aux uns comme aux autres.
A l'argumentation ainsi présentée, la Commission oppose la règle selon laquelle il n'y a de droit au maintien des avantages reconnus par un statut que dans la mesure où tous les faits acquisitifs du droit sont intervenus sous l'emprise de ce statut, Plus précisément, le droit aux prestations pécuniaires à l'occasion de la cessation de l'emploi ne se concrétise qu'au moment de cette cessation. Or, lorsqu'il a été mis fin définitivement aux fonctions de M. Pasetti, l'article 42 du statut de 1956
avait cessé depuis longtemps d'être en vigueur.
Cette thèse qui, comme le rappelle la défense à l'aide d'un certain nombre de citations, est celle du droit de la fonction publique des États membres, est la conséquence logique de l'idée que le fonctionnaire ne se trouve pas dans une situation contractuelle mais réglementaire, car le statut est un véritable règlement qui peut toujours être modifié par l'autorité compétente. Elle a été défendue par M. l'avocat général Roemer dans ses conclusions relatives à l'affaire Boursin contre Haute
Autorité (1er décembre 1964, 102-63, Recueil, X-1964, p. 1394).
Elle paraît cependant archaïque au requérant qui ne l'estime concevable que «selon la conception dépassée de la toute puissance du législateur» et prétend lui opposer dans un domaine qui lui semble plus proche de celui qui vous occupe les solutions adoptées par le tribunal administratif de l'O.N.U. pour déterminer toute une série de droits intangibles des fonctionnaires internationaux. Mais cette prétention manque de pertinence pour deux raisons. En premier lieu, comme le rappelait M. l'avocat
général Roemer dans ses conclusions déjà citées, le droit de la fonction publique internationale est avant tout un droit conventionnel avec des contrats de travail dont la durée est en général étroitement limitée dans le temps, alors que les fonctionnaires des Communautés sont sous un régime statutaire; il est donc normal de s'en tenir ici à des principes analogues à ceux qui sont adoptés dans les fonctions publiques nationales. Il semble bien d'autre part que la jurisprudence des tribunaux
administratifs internationaux tend à reconnaître de plus en plus largement à l'institution la faculté de modifier la situation juridique d'agents titulaires de contrats. Même dans ces organisations, il existe un règlement ou un statut dont les dispositions sont reprises dans les contrats individuels, et seules certaines de ces dispositions peuvent être véritablement considérées comme contractuelles, et donc non susceptibles d'être modifiées. Le Conseil, dans son intervention, a cité par
exemple un jugement no 61, Lindsey, du 4 septembre 1962, du tribunal administratif de l'Organisation internationale du travail, qui fait très nettement cette distinction.
b) Abandonnant alors le terrain de l'abstraction et des principes, le requérant cherche dans sa réplique et plus encore dans la procédure orale à découvrir une filiation et même une identité entre le règlement 259/68 et le texte antérieur qui justifierait l'application de ce dernier. C'est donc un système un peu différent de celui des droits acquis.
La Commission avait soutenu d'une part que le statut de 1962 avait mis fin à la fois au droit de l'administration d'imposer le retrait d'emploi aux fonctionnaires de grade A 3 et en même temps au droit de ces fonctionnaires de bénéficier de l'article 42 du statut de 1956, d'autre part que si le règlement 259/68 soumet temporairement ces fonctionnaires comme ceux de tous grades à un régime de cessation de fonctions, ce régime, ainsi que nous l'avons exposé, est différent du régime précédent.
Pour combattre cette thèse, le requérant rappelle d'abord que l'article 4 du règlement donne pour justification aux mesures qu'il institue «l'intérêt du service» qui constitue la raison d'être du retrait d'emploi; c'est donc celui-ci seul qui serait visé, la mise en disponibilité ne constituant qu'une option. Il ajoute que cet article parle de mesures de cessation définitive des fonctions «au sens de l'article 47 du statut». Or, si l'on se reporte à ce dernier article qui figure d'ailleurs à
un chapitre intitulé «cessation définitive des fonctions», on y trouve toute une série d'hypothèses sans rapport avec la situation présente, telles que la démission, le licenciement pour insuffisance professionnelle, mais aussi, lettre c, le retrait d'emploi dans l'intérêt du service dont le régime est explicité à l'article 50. La boucle serait ainsi fermée: en se référant à l'article 47, le règlement renverrait purement et simplement à l'article 50 qui deviendrait donc applicable aux
fonctionnaires de grade A 3 exclus du régime précédent, et il n'y aurait pas de raison de ne pas faire bénéficier ceux d'entre eux qui avaient été titularisés sous le régime C.E.C.A. avant 1962 de l'article 42 du statut de 1956, au même titre que les fonctionnaires de grade A 1 et A 2 placés dans la même situation.
Cette construction nous paraît très artificielle. En premier lieu, l'article 4 donne également pour justification aux mesures instituées les «nécessités pouvant découler d'une réduction du nombre des emplois», ce qui est classiquement l'hypothèse de la disponibilité. On peut aussi se demander pourquoi le règlement ne renvoie pas directement à l'article 50, au lieu de passer par le détour de l'article 47, et nous pensons que, s'il ne l'a pas fait, c'est justement pour exclure cette assimilation
que le requérant prétend établir. Par ailleurs, parmi les cas de cessation définitive de fonctions qu'énumère l'article 47, il en est un que le requérant a oublié et qui est la démission d'office; or, celle-ci est la mesure qui rompt le lien avec le service lorsque la disponibilité est parvenue à son terme extrême sans qu'il ait pu y avoir réintégration (article 41, paragraphe 4). On peut donc voir dans la référence générale utilisée par le règlement 259/68 la marque que celui-ci entend
envisager différentes formes de cessation du service. Plus exactement, comme nous l'avons déjà dit, le règlement établit un système autonome qui emprunte ses traits à plusieurs types antérieurs de mesures et qui n'est absolument réductible à aucune d'elles. L'effort par le requérant pour justifier ses droits acquis par une sorte d'assimilation entre le texte de 1968 et celui de 1962 nous paraît donc voué à l'échec.
2. Le second moyen est tiré de la disparité du traitement accordé aux fonctionnaires C.E.C.A. de grade A 3 titularisés avant 1962 par rapport à leurs homologues de grade A 1 et A 2 remplissant les mêmes conditions, disparité qui violerait le principe fondamental de l'impartialité de l'administration. Comme on le voit, il n'est pas très différent du précédent, et il ne nous paraît pas mieux fondé. Nous serons donc très bref sur ce point.
On peut noter en premier lieu, comme l'a fait l'agent du Conseil dans sa plaidoirie, que le texte de 1968 se borne à maintenir la situation respective du point de vue financier des différentes catégories de fonctionnaires en cas de départ du service. Étant donné que les agents C.E.C.A. de grade A 1 et A 2 titularisés avant 1962 avaient jusqu'en 1968 un régime plus favorable, le Conseil a estimé opportun, dans les limites de son pouvoir discrétionnaire, de leur conserver ce régime sans l'accorder
à d'autres, mais, ce faisant, pas plus qu'il n'a reconnu de véritables droits acquis, il n'a créé aucune discrimination, car la position au moment de l'entrée en vigueur du règlement n'était pas la même pour les diverses catégories d'agents. C'est lors du statut de 1962 que le sort respectif des fonctionnaires de grade A 1 et A 2 d'une part, de grade A 3 d'autre part, a divergé, mais cela pour les raisons que nous avons indiquées en commençant, et qui sont sans influence sur la légalité de la
solution adoptée par le règlement 259/68.
En second lieu, c'est justement en suivant le raisonnement du requérant que l'on créerait une discrimination qui jouerait en faveur de la catégorie d'agents à laquelle il appartient. Discrimination vis-à-vis des fonctionnaires de grade A 1 et A 2 qui, à égalité de traitement financier, auraient des garanties de procédure plus réduites. Discrimination par rapport aux autres fonctionnaires C.E.C.A. en service avant 1962 mais de grade inférieur à A 3 qui auraient un régime financier moins favorable
sans avoir plus de garanties. Ces remarques nous paraissent suffire pour écarter le moyen.
Nous concluons:
— au rejet comme non fondé du recours de M. Pasetti,
— et à ce qu'il soit statue sur les dépens dans les conditions prévues à l'article 70 du règlement de procédure.