CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. ALAIN DUTHEILLET DE LAMOTHE,
PRÉSENTÉES LE 9 JUIN 1971
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
M. Vinck est un fonctionnaire affecté au service de la Commission.
Avant la «fusion», il dirigeait, au sein de l'Euratom, un service spécialisé pour l'exécution de travaux de sécurité dans les installations nucléaires.
A la suite de la «fusion», il estima que ce service aurait dû être réorganisé en une division, que lui-même aurait dû être placé à tête de cette division ou éventuellement d'une autre, et en tout cas promu du grade A 4 qu'il détenait au grade A 3.
En 1968-1969, il adressa en ce sens de nombreuses demandes successives à Commission qui les rejeta toutes.
Il vous demande par la présente requête d'annuler une décision du 21 mai 1970 par laquelle le président de la Commission a rejeté la demande qu'il lui avait adressée le 16 février 1970.
La Commission a soulevé «in limine litus» une exception d'irrecevabilité tirée de la tardiveté.
Cette exception d'irrecevabilité paraît fondée.
Vous avez jugé en effet à maintes reprises que les recours formés contre des décisions explicites qui sont purement confirmatives de décisions implicites devenues définitives pour n'avoir pas été attaquées dans les délais de recours contentieux, étaient irrecevables.
Vous avez même été plus loin et vous avez jugé dans un arrêt récent (Bode, du 26 mai 1971) que des recours contre des décisions explicites confirmatives de décisions implicites, même introduits dans les délais, étaient irrecevables pour défaut d'intérêt.
Cette jurisprudence est, à notre avis, entièrement applicable en l'espèce.
Par une lettre datée du 16 février 1970, parvenue au plus tard le 18 février, le requérant avait demandé au président de la Commission que soit réparé, sous la forme d'une promotion ou sous la forme de dommages et intérêts, le préjudice de carrière qu'il estimait avoir subi.
Le président n'ayant pas répondu à cette lettre dans le délai de deux mois prévu par l'article 91, paragraphe 2, second alinéa, le requérant devait donc regarder sa demande comme rejetée le 18 ou le 19 avril et se pourvoir contre cette décision implicite au plus tard avant le 20 ou le 21 juin 1970.
Or, son recours n'a été déposé au greffe de la Cour que le 28 août 1970, soit plus de deux mois après l'expiration du délai de recours contentieux contre la décision implicite.
Le requérant fait bien état de l'intervention, le 21 mai 1970, d'une décision explicite rejetant sa demande.
Mais cette décision est purement confirmative de la décision implicite et elle n'a donc pas eu pour effet d'ouvrir un nouveau délai de recours contentieux.
Certes, et c'est la particularité de la présente affaire, cette décision explicite est intervenue alors que le délai de recours contre la décision implicite n'était pas expiré.
Mais cette circonstance est, selon nous, sans influence sur l'application de la jurisprudence que nous vous rappelions tout à l'heure. Dès lors qu'une décision implicite doit être considérée comme acquise, c'est, en application de l'article 91 du statut, à la date à laquelle cette décision est réputée être intervenue, et à cette seule date, que commence à courir le délai de deux mois prévu par cette disposition.
Nous concluons donc:
— au rejet de la requête comme irrecevable,
— à ce que chacune des parties supporte ses propres dépens.