Avis juridique important
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61974J0067
Arrêt de la Cour du 26 février 1975. - Carmelo Angelo Bonsignore contre Oberstadtdirektor der Stadt Köln. - Demande de décision préjudicielle: Verwaltungsgericht Köln - Allemagne. - Ordre public et sécurité publique. - Affaire 67-74.
Recueil de jurisprudence 1975 page 00297
édition spéciale grecque page 00111
édition spéciale portugaise page 00125
édition spéciale espagnole page 00137
édition spéciale suédoise page 00455
édition spéciale finnoise page 00463
Sommaire
Parties
Objet du litige
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES - NON-DISCRIMINATION - DEROGATIONS - INTERPRETATION STRICTE - ATTEINTE A L ' ORDRE PUBLIC NATIONAL - RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE - EXPULSION - COMPORTEMENT PERSONNEL - MESURE DE PREVENTION GENERALE - INTERDICTION
( TRAITE CEE , ART . 48 ET 56 ; DIRECTIVE DU CONSEIL NO 64/221 , ART . 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 )
Sommaire
LA DIRECTIVE NO 64/221 VISE A COORDONNER LES MESURES JUSTIFIEES PAR LA SAUVEGARDE DE L ' ORDRE PUBLIC ET DE LA SECURITE PUBLIQUE ENVISAGEE PAR LES ARTICLES 48 ET 56 DU TRAITE , AFIN DE CONCILIER L ' APPLICATION DE CES MESURES AVEC LE PRINCIPE FONDAMENTAL DE LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES DANS LA COMMUNAUTE ET L ' ELIMINATION DE TOUTE DISCRIMINATION , DANS LE DOMAINE D ' APPLICATION DU TRAITE , ENTRE LES NATIONAUX ET LES RESSORTISSANTS DES AUTRES ETATS MEMBRES .
LES DEROGATIONS AUX REGLES RELATIVES A LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES CONSTITUANT DES EXCEPTIONS A INTERPRETER STRICTEMENT , LA NOTION DE " COMPORTEMENT PERSONNEL " EXPRIME L ' EXIGENCE QU ' UNE MESURE D ' EXPULSION NE PEUT VISER QUE DES MENACES A L ' ORDRE PUBLIC ET A LA SECURITE PUBLIQUE QUI POURRAIENT ETRE LE FAIT DE L ' INDIVIDU QUI EN EST L ' OBJET .
IL EN RESULTE QUE L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE NO 64/221 FAIT OBSTACLE A L ' EXPULSION D ' UN RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE SI CETTE EXPULSION EST DECIDEE DANS UN BUT DE DISSUASION A L ' EGARD D ' AUTRES ETRANGERS , C ' EST-A-DIRE SI ELLE EST FONDEE SUR DES MOTIFS DE " PREVENTION GENERALE " .
Parties
DANS L ' AFFAIRE 67-74
AYANT POUR OBJET LA DEMANDE ADRESSEE A LA COUR , EN APPLICATION DE L ' ARTICLE 177 DU TRAITE CEE , PAR LE " VERWALTUNGSGERICHT " ( TRIBUNAL ADMINISTRATIF ) DE COLOGNE ET TENDANT A OBTENIR , DANS LE LITIGE PENDANT DEVANT CETTE JURIDICTION ENTRE CARMELO ANGELO BONSIGNORE , OUVRIER CHIMISTE , DEMEURANT A COLOGNE ,
ET
LE " OBERSTADTDIREKTOR " ( CHEF DE L ' ADMINISTRATION MUNICIPALE ) DE LA VILLE DE COLOGNE , EN PRESENCE DU REPRESENTANT DU MINISTERE PUBLIC PRES DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE COLOGNE ,
Objet du litige
UNE DECISION A TITRE PREJUDICIEL SUR L ' INTERPRETATION DE L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE DU CONSEIL NO 64/221 , DU 25 FEVRIER 1964 , POUR LA COORDINATION DES MESURES SPECIALES AUX ETRANGERS EN MATIERE DE DEPLACEMENT ET DE SEJOUR JUSTIFIEES PAR DES RAISONS D ' ORDRE PUBLIC , DE SECURITE PUBLIQUE ET DE SANTE PUBLIQUE ,
Motifs de l'arrêt
1 ATTENDU QUE , PAR ORDONNANCE DU 30 JUILLET 1974 , PARVENUE AU GREFFE DE LA COUR LE 14 SEPTEMBRE SUIVANT , LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE COLOGNE A POSE , EN VERTU DE L ' ARTICLE 177 DU TRAITE CEE , DEUX QUESTIONS RELATIVES A L ' INTERPRETATION DE L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE DU CONSEIL NO 64/221 , DU 25 FEVRIER 1964 , POUR LA COORDINATION DES MESURES SPECIALES AUX ETRANGERS EN MATIERE DE DEPLACEMENT ET DE SEJOUR JUSTIFIEES PAR DES RAISONS D ' ORDRE PUBLIC , DE SECURITE
PUBLIQUE ET DE SANTE PUBLIQUE ( JO , P . 850 ) ;
2 QUE CES QUESTIONS ONT ETE SOULEVEES DANS LE CADRE D ' UN RECOURS INTENTE PAR UN RESSORTISSANT ITALIEN , DEMEURANT DANS LA REPUBLIQUE FEDERALE D ' ALLEMAGNE , A L ' ENCONTRE D ' UNE DECISION D ' EXPULSION PRISE A SON EGARD , PAR L ' AUTORITE COMPETENTE EN MATIERE DE POLICE DES ETRANGERS , A LA SUITE D ' UNE CONDAMNATION ENCOURUE PAR LUI POUR INFRACTION A LA LOI SUR LES ARMES ET HOMICIDE PAR IMPRUDENCE ;
QU ' IL RESULTE DE L ' ORDONNANCE DE RENVOI QUE LE REQUERANT AU PRINCIPAL , ENTRE ILLEGALEMENT EN POSSESSION D ' UNE ARME A FEU , AVAIT , PAR SUITE D ' UNE MANIPULATION IMPRUDENTE DE CELLE-CI , CAUSE ACCIDENTELLEMENT LA MORT DE SON FRERE ;
QUE , DE CE FAIT , LA JURIDICTION REPRESSIVE COMPETENTE L ' A CONDAMNE A UNE AMENDE POUR INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES ARMES ;
QU ' ELLE A EGALEMENT RETENU SA CULPABILITE EN CE QUI CONCERNE L ' HOMICIDE PAR IMPRUDENCE , SANS CEPENDANT LUI INFLIGER DE CE CHEF UNE SANCTION QUELCONQUE , ESTIMANT QU ' UNE PEINE AURAIT ETE DENUEE DE SENS EN RAISON DES CIRCONSTANCES , COMPTE TENU NOTAMMENT DE LA SOUFFRANCE MORALE RESULTANT , POUR L ' AUTEUR , DES CONSEQUENCES DE SON IMPRUDENCE ;
3 QUE POSTERIEUREMENT A LA CONDAMNATION PENALE , L ' AUTORITE COMPETENTE EN MATIERE DE POLICE DES ETRANGERS A ORDONNE L ' EXPULSION DE L ' INTERESSE SUR BASE DE LA LOI SUR LES ETRANGERS , DU 28 AVRIL 1965 ( BUNDESGESETZBLATT , TEIL I , P . 353 ) , EN CONNEXION AVEC LA LOI RELATIVE A L ' ENTREE ET AU SEJOUR DE RESSORTISSANTS DES ETATS MEMBRES DE LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE , DU 22 JUILLET 1969 ( BUNDESGESETZBLATT , TEIL I , P . 927 ) , PRISE POUR L ' APPLICATION , DANS LA REPUBLIQUE FEDERALE
D ' ALLEMAGNE , DE LA DIRECTIVE NO 64/221 ;
4 QUE , SAISI DU RECOURS CONTRE CETTE DECISION , LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF A ESTIME QU ' EN RAISON DES CIRCONSTANCES PARTICULIERES DE L ' ESPECE , L ' EXPULSION NE SAURAIT ETRE JUSTIFIEE PAR DES MOTIFS DE " PREVENTION SPECIALE " FONDES SUR LES FAITS QUI AVAIENT DONNE LIEU A LA CONDAMNATION PENALE OU SUR LE COMPORTEMENT , ACTUEL ET PREVISIBLE , DU REQUERANT AU PRINCIPAL ;
QUE , SELON LE TRIBUNAL , LA SEULE RAISON POUVANT EVENTUELLEMENT JUSTIFIER LA MESURE PRISE POURRAIT CONSISTER DANS DES MOTIFS DE " PREVENTION GENERALE " , MIS EN AVANT TANT PAR L ' AUTORITE COMPETENTE EN MATIERE DE POLICE DES ETRANGERS QUE PAR LE MINISTERE PUBLIC , ET TIRES DE L ' EFFET DE DISSUASION QUE DEVRAIT AVOIR , DANS LES MILIEUX D ' IMMIGRES , EN PRESENCE D ' UNE RECRUDESCENCE DE LA VIOLENCE DANS LES GRANDS CENTRES URBAINS , L ' EXPULSION D ' UN ETRANGER TROUVE EN POSSESSION ILLEGALE D ' UNE
ARME ;
QUE LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF , APPELE A FAIRE APPLICATION DE DISPOSITIONS LEGISLATIVES - NOTAMMENT DU PARAGRAPHE 12 DE LA LOI DU 22 JUILLET 1969 - PRISES POUR L ' EXECUTION D ' UNE DIRECTIVE DE LA COMMUNAUTE , ESTIME NECESSAIRE D ' OBTENIR DE LA COUR UNE INTERPRETATION DES DISPOSITIONS CORRESPONDANTES DE CETTE DIRECTIVE , EN VUE D ' ASSURER A LA LOI NATIONALE UNE APPLICATION CONFORME AUX EXIGENCES DU DROIT COMMUNAUTAIRE ;
QUE , DANS CES CONDITIONS , LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF A SOUMIS A LA COUR DEUX QUESTIONS AINSI LIBELLEES :
L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE DU CONSEIL NO 64/221 , DU 25 FEVRIER 1964 , POUR LA COORDINATION DES MESURES SPECIALES AUX ETRANGERS EN MATIERE DE DEPLACEMENT ET DE SEJOUR JUSTIFIEES PAR DES RAISONS D ' ORDRE PUBLIC , DE SECURITE PUBLIQUE ET DE SANTE PUBLIQUE DOIT-IL ETRE INTERPRETE EN CE SENS QU ' IL FAIT OBSTACLE A L ' EXPULSION D ' UN RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE DE LA CEE PAR LES AUTORITES NATIONALES D ' UN AUTRE ETAT MEMBRE DECIDEE EN VUE DE DISSUADER D ' AUTRES
ETRANGERS DE COMMETTRE UN DELIT IDENTIQUE OU SEMBLABLE A CELUI QUI EST REPROCHE A L ' EXPULSE OU D ' AUTRES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE ET L ' ORDRE PUBLICS , C ' EST-A-DIRE MOTIVEE PAR DES RAISONS DE PREVENTION GENERALE ?
CETTE MEME DISPOSITION SIGNIFIE-T-ELLE QU ' UN RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE DE LA CEE NE PEUT ETRE EXPULSE QUE S ' IL EXISTE DES INDICES PROBANTS PERMETTANT DE PENSER QUE CET ETRANGER , RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE DE LA COMMUNAUTE , CONDAMNE DU CHEF D ' UN DELIT , COMMETTRA UNE NOUVELLE INFRACTION OU QU ' IL PORTERA ATTEINTE , D ' UNE AUTRE MANIERE , A LA SECURITE ET A L ' ORDRE PUBLICS D ' UN ETAT MEMBRE DE LA CEE , C ' EST-A-DIRE POUR DES RAISONS DE PREVENTION SPECIALE ?
5 ATTENDU QU ' AUX TERMES DE L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE NO 64/221 , " LES MESURES D ' ORDRE PUBLIC OU DE SECURITE PUBLIQUE DOIVENT ETRE FONDEES EXCLUSIVEMENT SUR LE COMPORTEMENT PERSONNEL DE L ' INDIVIDU QUI EN FAIT L ' OBJET " ET QUE " LA SEULE EXISTENCE DE CONDAMNATIONS PENALES NE PEUT AUTOMATIQUEMENT MOTIVER CES MESURES " ;
QUE CES DISPOSITIONS DOIVENT ETRE INTERPRETEES A LA LUMIERE DES OBJECTIFS DE LA DIRECTIVE , QUI VISE NOTAMMENT A COORDONNER LES MESURES JUSTIFIEES PAR LA SAUVEGARDE DE L ' ORDRE PUBLIC ET DE LA SECURITE PUBLIQUE ENVISAGEE PAR LES ARTICLES 48 ET 56 DU TRAITE , AFIN DE CONCILIER L ' APPLICATION DE CES MESURES AVEC LE PRINCIPE FONDAMENTAL DE LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES DANS LA COMMUNAUTE ET L ' ELIMINATION DE TOUTE DISCRIMINATION , DANS LE DOMAINE D ' APPLICATION DU TRAITE , ENTRE LES NATIONAUX
ET LES RESSORTISSANTS DES AUTRES ETATS MEMBRES ;
6 QUE , DANS CETTE PERSPECTIVE , L ' ARTICLE 3 DE LA DIRECTIVE FAIT RECONNAITRE QUE NE SAURAIENT ETRE RETENUES , A L ' EGARD DES RESSORTISSANTS DES ETATS MEMBRES DE LA COMMUNAUTE , EN CE QUI CONCERNE LES MESURES VISANT A LA SAUVEGARDE DE L ' ORDRE PUBLIC ET DE LA SECURITE PUBLIQUE , DES JUSTIFICATIONS DETACHEES DU CAS INDIVIDUEL , AINSI QU ' IL RESSORT NOTAMMENT DE L ' EXIGENCE FORMULEE PAR LE PARAGRAPHE 1 , AUX TERMES DUQUEL C ' EST " EXCLUSIVEMENT " LE " COMPORTEMENT PERSONNEL " DE CEUX QUI EN
FONT L ' OBJET QUI DOIT ETRE DETERMINANT ;
QUE , LES DEROGATIONS AUX REGLES RELATIVES A LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES CONSTITUANT DES EXCEPTIONS A INTERPRETER STRICTEMENT , LA NOTION DE " COMPORTEMENT PERSONNEL " EXPRIME L ' EXIGENCE QU ' UNE MESURE D ' EXPULSION NE PEUT VISER QUE DES MENACES A L ' ORDRE PUBLIC ET A LA SECURITE PUBLIQUE QUI POURRAIENT ETRE LE FAIT DE L ' INDIVIDU QUI EN EST L ' OBJET ;
7 QU ' IL Y A DONC LIEU DE REPONDRE AUX QUESTIONS POSEES QUE L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHE 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE NO 64/221 FAIT OBSTACLE A L ' EXPULSION D ' UN RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE SI CETTE EXPULSION EST DECIDEE DANS UN BUT DE DISSUASION A L ' EGARD D ' AUTRES ETRANGERS , C ' EST-A-DIRE SI ELLE EST FONDEE , SELON LES TERMES DE LA JURIDICTION NATIONALE , SUR DES MOTIFS DE " PREVENTION GENERALE " ;
Décisions sur les dépenses
8 ATTENDU QUE LES FRAIS EXPOSES PAR LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE ITALIENNE ET LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES , QUI ONT SOUMIS DES OBSERVATIONS A LA COUR , NE PEUVENT FAIRE L ' OBJET D ' UN REMBOURSEMENT ;
QUE LA PROCEDURE REVETANT A L ' EGARD DES PARTIES AU PRINCIPAL LE CARACTERE D ' UN INCIDENT SOULEVE AU COURS DU LITIGE PENDANT DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE COLOGNE , IL APPARTIENT A CELUI-CI DE STATUER SUR LES DEPENS ;
PAR CES MOTIFS ,
Dispositif
LA COUR ,
STATUANT SUR LES QUESTIONS A ELLE SOUMISES PAR LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE COLOGNE PAR ORDONNANCE DU 30 JUILLET 1974 ,
DIT POUR DROIT :
L ' ARTICLE 3 , PARAGRAPHES 1 ET 2 , DE LA DIRECTIVE DU CONSEIL NO 64/221 , DU 25 FEVRIER 1964 , POUR LA COORDINATION DES MESURES SPECIALES AUX ETRANGERS EN MATIERE DE DEPLACEMENT ET DE SEJOUR JUSTIFIEES PAR DES RAISONS D ' ORDRE PUBLIC , DE SECURITE PUBLIQUE ET DE SANTE PUBLIQUE , FAIT OBSTACLE A L ' EXPULSION D ' UN RESSORTISSANT D ' UN ETAT MEMBRE SI CELLE-CI EST DECIDEE DANS UN BUT DE DISSUASION A L ' EGARD D ' AUTRES ETRANGERS .