CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,
PRÉSENTÉES LE 26 JUIN 1975
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
I — Les faits
Entré au service de la Commission en 1960, le requérant est fonctionnaire du grade C 3 (commis). Jusqu'en 1968, il a travaillé à l'imprimerie de cette institution, dans l'atelier «offset».
Depuis 1964, il est atteint d'une affection de l'appareil respiratoire, dont il attribue l'origine aux conditions dans lesquelles il a exercé son activité professionnelle. Il était en effet employé dans un local insalubre, en sous-sol, et exposé à l'action de substances irritantes.
Il sollicita et obtint, à partir de cette époque, des congés de maladie répétés.
Notamment, de septembre 1965 à septembre 1968, soit en trois années, la durée cumulée de ces congés a excédé douze mois.
L'article 59, paragraphe 1er , dernier alinéa, du statut permet, dans un tel cas, à l'autorité investie du pouvoir de nomination de saisir une commission d'invalidité.
C'est ce que fit l'administration en demandant, le 27 septembre 1968, à une telle commission d'examiner le requérant en vue de déterminer s'il était atteint d'une invalidité permanente totale le mettant dans l'impossibilité d'exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière.
La commission d'invalidité alors constituée parvint à la conclusion que l'état de santé de M. Vellozzi — à l'époque — ne l'empêchait pas de travailler, mais exigeait qu'il soit affecté à un poste à l'abri des intempéries, dans un local salubre et dans une atmosphère exempte de toute substance irritante pour les voies respiratoires. Elle admit enfin que les conditions dans lesquelles le requérant avait précédemment travaillé, depuis 1960, «sont intervenues, pour une bonne part, comme cause de sa
bronchite asthmatique ou asthmatiforme».
Dès avant avoir eu connaissance de ces conclusions, l'administration avait d'ailleurs muté le requérant, à partir du 5 juillet 1968, dans un autre emploi, à la direction générale de la concurrence, où il devait être chargé de travaux de classement de documents et de distribution de fournitures de bureau.
Mais M. Vellozzi déduisit de l'appréciation de la commission d'invalidité que sa maladie était d'origine professionnelle et devait donc lui ouvrir droit à indemnité pour incapacité permanente partielle au sens de l'article 73 du statut, ainsi qu'au remboursement de l'intégralité des frais médicaux et pharmaceutiques afférents au traitement de son affection.
Il demanda, en vain, le bénéfice de ces dispositions statutaires et saisit la Cour, le 9 juin 1971, d'une requête tendant à l'annulation du refus implicite opposé à ses prétentions. Il demandait que lui fut reconnue une invalidité partielle de 30 % et réclamait, de ce chef, l'application, à son profit, de l'article 73.
Par arrêt du 13 juillet 1972, la Cour (deuxième chambre) a rejeté son recours aux motifs que le requérant ne saurait se fonder sur le rapport de la commission d'invalidité instituée en 1968 pour soutenir que celle-ci l'aurait reconnu atteint d'une invalidité permanente partielle; que dès lors l'intéressé n'était pas fondé à demander que la nouvelle commission d'invalidité dont il réclamait la réunion fût simplement chargée de fixer le taux de cette prétendue incapacité et de déterminer le montant
des frais médicaux et pharmaceutiques à lui rembourser; que, par contre, la teneur du rapport de la commission d'invalidité en date du 5 décembre 1968 justifiait l'institution d'une nouvelle commission chargée, entre autres, de se prononcer sur les causes de l'invalidité éventuelle du requérant.
Après l'introduction du recours, l'administration avait d'ailleurs donné mission à une commission d'invalidité composée du Dr Therasse, désigné par la Cour de justice, du Dr d'Avanzo, médecin traitant du requérant, et du Dr de Coster, désigné d'un commun accord par les deux autres médecins, de se prononcer non seulement sur l'existence d'une éventuelle invalidité permanente totale de M. Vellozzi, mais aussi de rechercher si celui-ci était atteint d'une invalidité permanente partielle due à ses
conditions de travail et, dans l'affirmative, de déterminer le taux de cette invalidité.
C'est le 31 mars 1973 que cette nouvelle commission a communiqué à l'administration ses conclusions, établies par le Dr de Coster et approuvées par le Dr Therasse. Ce rapport conclut que le requérant est atteint d'une incapacité permanente partielle évaluée au taux de 10 % et que la symptomatologie de son affection n'a pas d'étiologie professionnelle prouvée.
Le 10 décembre 1973, l'administration a adressé au requérant une copie desdites conclusions. Celui-ci a refusé de les considérer comme valables parce qu'elles n'avaient pas été adoptées à l'unanimité par les trois médecins composant la commission d'invalidité.
Il a, le 2 janvier 1974, demandé la constitution d'une troisième commission d'invalidité.
C'est contre la décision de rejet opposée à sa demande le 23 avril suivant qu'il a formé un premier recours enregistré sous le no 42-74.
Entre-temps, le chef de la division «droits individuels» avait, le 3 avril, rappelé au requérant que le Dr Romain, médecin conseil de la Commission, l'ayant examiné le 15 mars 1973, l'avait jugé apte au travail dans les conditions définies par la commission d'invalidité de 1968. En conséquence, il lui notifiait la décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination de le considérer comme étant en situation d'absence irrégulière, de lui faire application de l'article 60 du statut en imputant, à
compter de la réception de sa lettre, cette absence sur son congé annuel et de suspendre, par la suite, son traitement.
Après que cette décision eût été confirmée les 10 et 14 mai 1974, M. Vellozzi a été informé, le 11 juillet, que ses droits à congé annuel étant épuisés pour l'année en cours, son traitement du mois de juillet était bloqué à titre conservatoire, conformément à l'article 60.
Les 16 mai et 5 août 1974, le requérant a introduit des réclamations contre cette décision dont il vous demande l'annulation par un deuxième recours enregistré sous le no 62-74.
Les deux affaires ayant été jointes, aux fins de la procédure et de l'arrêt, vous êtes donc saisis, d'une part, de conclusions tendant à annuler le refus opposé à la demande de constitution d'une commission d'invalidité en vue de faire application au requérant des dispositions de l'article 73 du statut, relatives à l'indemnisation de l'incapacité permanente partielle et tendant, par voie de conséquence, à juger que l'administration est tenue de réunir, à cette fin, une nouvelle commission
d'invalidité, d'autre part, de conclusions tendant à annuler les décisions faisant application au requérant de l'article 60 du statut, et notamment celle du 11 juillet 1974 par laquelle a été bloqué son traitement mensuel.
Avant d'exposer notre opinion sur les recours, il nous faut enfin rappeler, Messieurs, que, lors de la procédure orale qui s'est déroulée le 20 février dernier, votre chambre a pris l'initiative de suggérer aux parties d'engager des pourparlers en vue de mettre fin aux litiges qui les opposent. Mais aucun règlement amiable n'a pu intervenir. Le 28 avril dernier, en effet, les représentants de la Commission ont proposé l'affectation immédiate du requérant à un emploi jugé compatible avec son état de
santé par les médecins-conseil. Le travail afférent à cet emploi — qui dépend de la division IX de la direction générale du personnel (documentation, reproduction et diffusion des documents) — consiste en la retouche de films. Le local dans lequel est exercé ce travail est, selon une note produite par la direction du personnel, bien éclairé, aéré par quatre fenêtres. La retouche des films se fait avec un produit non nocif et inodore à 20 cm. Deux médecins de l'institution, consultés, ont estimé que
le requérant était parfaitement apte à occuper cet emploi.
A condition que M. Vellozzi, qui n'avait encore repris aucune activité professionnelle, acceptât sans délai de prendre effectivement le poste qui lui était proposé, la Commission se déclarait disposée à lui payer son traitement, à compter seulement toutefois du 20 février 1975, date à laquelle les parties avaient résolu, à la demande de votre chambre, de rechercher une solution amiable.
Mais, de son côté, le requérant a maintenu ses exigences de voir retirer purement et simplement la décision d'application de l'article 60 du statut et de recevoir paiement de l'intégralité des rémunérations retenues depuis le mois de juillet 1974.
Il a, d'ailleurs, refusé de recevoir communication de la décision de mutation et de la description des nouvelles fonctions qui lui étaient proposées; il a demandé que ces actes lui soient notifiés par lettre recommandée.
Considérant que le requérant a, d'autre part, persisté à refuser de reprendre son service, dans le poste qui lui était offert, et a adressé à l'administration, pour couvrir son absence du 1er janvier au 24 mai 1975, cinq certificats médicaux de son médecin traitant, portant le même diagnostic que précédemment, la Commission a, dans ces conditions, estimé qu'un règlement amiable s'avérait impossible et a demandé à votre chambre de statuer sur les recours.
De son côté, le conseil du requérant a maintenu sa position.
C'est dans ces conditions que la procédure, suspendue afin de permettre cette tentative d'accord amiable, est aujourd'hui reprise.
II — Sur les conclusions de la commission d'invalidité réunie en 1973
Au premier des deux recours, la Commission a opposé une exception d'irrecevabilité fondée sur l'article 91 du statut, en vertu duquel un recours contentieux formé par un fonctionnaire contre une décision lui faisant grief n'est recevable qu'à la condition que l'intéressé ait, préalablement, introduit une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, dans le délai prévu par cette disposition.
Il est constant, Messieurs, que le requérant s'est pourvu directement devant la Cour contre la décision, en date du 23 avril 1974, par laquelle l'autorité compétente a rejeté sa demande de constitution d'une nouvelle commission d'invalidité, sans avoir présenté une réclamation préalable. Son premier recours n'est donc pas recevable. Toutefois, nous vous proposerons de ne pas retenir cette fin de non-recevoir et de statuer au fond.
Cette solution est, à notre avis, d'autant plus opportune que la contestation, par le requérant, de la régularité des conclusions de la commission d'invalidité réunie en 1973 a une incidence sur la solution de chacune des deux affaires portées devant vous.
Nous examinerons donc le fond des litiges sans nous arrêter à la recevabilité du premier recours.
Cet examen portera, tout d'abord, sur les conditions dans lesquelles ont été adoptées les conclusions de la commission d'invalidité constituée en vue de rechercher, notamment, si le requérant était atteint d'une invalidité permanente partielle due à ses conditions de travail.
On sait que ces conclusions, communiquées à l'administration le 3.1 mars 1973, établissent que l'intéressé est effectivement atteint d'une invalidité permanente partielle évaluée à 10 % ; mais qu'en revanche elles estiment que la symptomatologie de M. Vellozzi n'a pas d'étiologie professionnelle prouvée, ce qui revient à dire que la commission n'a pas retenu l'existence d'un lien de causalité entre l'invalidité et les conditions de travail antérieures du requérant.
Or, celui-ci soutient que l'administration n'a pu valablement se fonder sur de telles conclusions pour lui refuser le bénéfice de l'article 73 du statut, au motif qu'elles n'ont été adoptées qu'à la majorité, par deux des médecins composant la commission, le troisième, médecin traitant du requérant, désigné par lui, ayant refusé de se rallier à l'opinion commune de ses deux confrères.
Nous estimons, Messieurs, que ce moyen ne peut être admis.
Bien que la section IV de l'annexe II du statut ne précise pas que les conclusions d'une commission d'invalidité peuvent être prises à la majorité des membres qui la composent, il nous paraît hors de doute que la règle de l'unanimité, dont se prévaut le requérant, ne s'impose pas en l'absence de toute disposition expresse.
D'une manière générale, en effet, les organismes collégiaux, prévus par le statut des fonctionnaires et dont l'avis préalable est requis avant que l'administration ne puisse prendre certaines décisions à l'égard de ses agents, comportent un nombre impair de membres. Il en est ainsi non seulement des commissions d'invalidité, mais aussi, par exemple, des conseils de discipline visés à la section III de la même annexe II. Cette règle est destinée à permettre que leurs avis ou leurs conclusions soient
prises à la majorité des voix.
Admettre le principe de l'unanimité aboutirait à paralyser le fonctionnement de ces organismes et ferait obstacle à ce qu'ils puissent légalement se prononcer dès lors qu'un seul de leurs membres refuserait de se rallier à la majorité.
En second lieu, la composition des commissions d'invalidité, organes indépendants de l'administration, est organisée de manière à garantir leur impartialité: un seul des trois médecins qui les composent est nommé par l'institution concernée; le fonctionnaire dont le cas est examiné peut désigner, de son côté, le médecin de son choix; le troisième médecin est choisi d'un commun accord par les deux premiers. Dans ces conditions, il peut arriver que soit le médecin désigné par le fonctionnaire, soit
celui que nomme l'administration soit d'un avis non conforme à l'opinion commune des deux autres membres de la commission, mais cette situation ne vicie pas la validité des conclusions prises à la majorité.
La question a d'ailleurs été tranchée en ce sens par l'arrêt de la deuxième chambre du 14 décembre 1966 (affaire 3-66, Alfieri contre Parlement européen, Recueil 1966, p. 634). Cette solution vient d'être confirmée par un arrêt de la première chambre, du 12 mars 1975 (affaire 31-71, Gigante contre Commission), non encore publié.
En l'espèce, il n'est pas contesté que les conclusions de la commission d'invalidité ont été établies par le Dr de Coster, médecin choisi d'un commun accord par les deux autres membres de la commission, et contresignées par le Dr Therasse. Seul le Dr d'Avanzo, médecin désigné par le requérant, a refusé de les approuver.
Ces conclusions ont donc été légalement adoptées. L'administration pouvait se fonder sur l'avis ainsi rendu par la commission d'invalidité pour en déduire que l'invalidité permanente partielle dont le requérant est atteint n'est pas inputable au service et ne peut dès lors justifier l'octroi d'une indemnité en application de l'article 73 du statut.
Or, Messieurs, ces considérations nous permettent également de conclure au rejet au fond du recours no 42-74. En effet, pour justifier sa demande de constitution d'une nouvelle commission d'invalidité, le requérant s'est précisément fondé sur l'irrégularité qui entacherait, selon lui, l'avis de la commission réunie pour examiner son cas en 1973 du fait que cet avis n'avait pas été adopté à l'unanimité.
C'est dès lors à bon droit que l'administration a rejeté cette demande, puisqu'elle disposait de conclusions arrêtées légalement à la majorité de ses membres par la commission d'invalidité qu'elle avait précédemment constituée. Elle n'était pas tenue de réunir une nouvelle commission d'invalidité dont la mission ne pourrait être qu'identique à celle qui avait été confiée à la précédente.
III — Sur l'application de l'article 60 du statut
Nous en venons à présent au litige portant sur l'application de l'article 60 du statut, aux termes duquel : «sauf en cas de maladie ou d'accident, le fonctionnaire ne peut s'absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique. Sans préjudice de l'application éventuelle des dispositions prévues en matière disciplinaire, toute absence irrégulière dûment constatée est imputée sur la durée du congé annuel de l'intéressé. En cas d'épuisement de ce congé, le fonctionnaire perd
le bénéfice de sa rémunération pour la période correspondante».
Il faut rappeler que M. Vellozzi avait, de 1964 à 1968, déjà bénéficié de nombreux congés de maladie jusqu'à ce que la première commission d'invalidité chargée d'examiner son cas eût estimé que, bien qu'atteint d'une affection des bronches, il était apte à exercer une activité professionnelle, sous réserve que les conditions de travail qui lui seraient assignées fussent compatibles avec son état de santé. Le requérant n'a, par la suite, repris un emploi que de manière très épisodique. De 1971 à
1974, ses absences «pour maladie» ont été presque interrompues. En n'y incluant pas les périodes de congé annuel, il a cumulé ses absences à raison de 244 jours pour l'année 1971, de 337 pour 1972, de 307 jours pour 1973, enfin de 174 jours pour le seul premier semestre de 1974.
Nous savons d'ailleurs qu'il n'a pas, depuis le 1er juillet de l'an dernier, repris son activité.
Après la communication des conclusions de la deuxième commission d'invalidité qui, tout en le reconnaissant atteint d'une invalidité permanente partielle légère, admettait qu'il était apte à travailler, le requérant fut expressément invité à reprendre son poste et, dès ce moment, mis en garde contre les conséquences d'un refus de sa part. Des examens de contrôle sont alors pratiqués périodiquement par le service médical de la Commission entre octobre 1973 et la fin de mai 1974. Chacun de ces examens
aboutit à la conclusion que le requérant était effectivement apte au travail.
C'est pourquoi l'administration prit, le 3 avril 1974, la décision de lui appliquer les dispositions de l'article 60 du statut. Encore devait-elle attendre jusqu'au mois de juillet suivant pour constater que, les droits à congé annuel du requérant étant épuisés, il convenait désormais de suspendre, à titre conservatoire d'ailleurs, le service de son traitement.
Contre cette décision, M. Vellozzi fait valoir un premier moyen, tiré de ce que l'article 60 ne pouvait être appliqué à un fonctionnaire dont l'absence a pour cause la maladie. En effet, cet article fait expressément réserve du cas de maladie ou d'accident, et l'article 59, paragraphe 1er , du statut dispose, de son côté : «le fonctionnaire qui justifie être empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident bénéficie de plein droit d'un congé de maladie».
Mais, Messieurs, cette disposition subordonne le droit au congé de maladie à la justification, par le fonctionnaire, qu'il soit empêché d'exercer ses fonctions par la maladie dont il est atteint. Non seulement l'intéressé est-il tenu d'aviser, dans les délais les plus brefs, l'administration de son indisponibilité, mais il doit fournir, à partir du quatrième jour d'absence, un certificat médical. Enfin, il est tenu de se soumettre à tout contrôle médical organisé par l'institution dont il dépend.
Ces prescriptions suffisent à démontrer qu'il ne suffit pas d'invoquer un état de santé déficient, une quelconque maladie, pour que l'absence soit considérée comme régulière et échappe, de ce fait, à l'application de l'article 60. Il est nécessaire que le fonctionnaire justifie d'une affection de nature à l'empêcher d'exercer ses fonctions, sous le contrôle du service médical de l'administration.
La seule production de certificats, émanant du médecin traitant et prescrivant un arrêt de travail, ne répond pas à cette exigence de justification. Or, il nous paraît, en l'espèce, établi que les certificats médicaux produits par le requérant ne font état que de la même affection bronchitique dont la première commission d'invalidité avait jugé qu'elle ne rendait pas M. Vellozzi inapte au travail, même si elle recommandait, en même temps, son affectation à un emploi différent. Quant à la deuxième
commission d'invalidité, elle concluait à l'existence d'une incapacité permanente partielle d'un taux si réduit que, de toute évidence, elle ne pouvait justifier que l'intéressé fût empêché d'exercer des fonctions qui lui avaient été assignées depuis 1968.
Enfin, les contrôles médicaux effectués d'octobre 1973 à mai 1974 ont tous conclu à l'aptitude au travail de requérant. Même si, à l'occasion d'un de ces examens, en avril 1974, le Dr Turner, médecin-conseil, a estimé qu'il était nécessaire d'exclure des attributions de l'emploi alors réservé au requérant le travail dans les archives, cette restriction n'était certainement pas de nature à infirmer la constation de son aptitude à occuper un emploi. Aussi bien, cette observation était-elle motivée par
le transfert, intervenu le mois précédent, du service dans lequel aurait dû travailler M. Vellozzi dans un nouveau bâtiment dont la visite par le Dr Turner a déterminé celui-ci à recommander cette restriction qui, auparavant, n'eût pas été justifiée.
Dès lors, Messieurs, la production, systématiquement répétée pendant plus de trois ans, de certificats délivrés par le médecin traitant et fondés sur la maladie même déjà constatée en 1968 par la première commission d'invalidité ne pouvait nullement fournir la justification, exigée par l'article 59, paragraphe 1er , que le requérant fût empêché de remplir ses fonctions, alors surtout que les examens de contrôle avaient clairement confirmé son aptitude au travail, du moins dans des conditions
compatibles avec son état de santé.
L'autorité investie du pouvoir de nomination était dès lors fondée à considérer — et elle ne s'y est résolue qu'après une longue patience — que les absences du requérant étaient irrégulières au sens de l'article 60.
Reste, Messieurs, un dernier moyen qui ne peut être mieux accueilli. Il est tiré des dispositions du paragraphe 3 de l'article 59 du statut, aux termes duquel : «en cas de contestation, la commission d'invalidité est saisie pour avis».
Le requérant soutient que l'obligation faite à l'administration de consulter la commission d'invalidité vaudrait aussi bien dans le cas, qui est le sien, d'une contestation qui s'élève sur le point de savoir si un fonctionnaire est ou non empêché, par suite de maladie, d'exercer ses fonctions (paragraphe 1), que dans l'hypothèse, prévue par le paragraphe 2 de l'article 59, de la mise en congé d'office d'un fonctionnaire par l'administration à la suite d'un examen pratiqué par un médecin-conseil, si
l'état de santé de cet agent l'exige ou si une maladie contagieuse s'est déclarée dans son foyer.
La défenderesse soutient, au contraire, que l'avis de la commission d'invalidité ne serait requis que dans cette seconde hypothèse.
Nous penchons pour cette dernière interprétation, car, dans le cas du congé de maladie octroyé, sur sa demande, à un fonctionnaire, il nous paraît résulter clairement du dernier alinéa de l'article 59, paragraphe 1er , que la saisine d'une commission d'invalidité n'est prévue que si ces congés cumulés excèdent douze mois pendant une période de trois ans. C'est d'ailleurs une solution logique: si, pendant une période aussi prolongée, un fonctionnaire a justifié avoir été empêché d'exercer ses
fonctions pendant au total plus de douze mois, il convient certainement de rechercher s'il est effectivement encore apte à une activité professionnelle ou si, au contraire, il est en réalité atteint d'une invalidité permanente totale le rendant définitivement inapte à tout emploi. C'est d'ailleurs à cette procédure qu'en 1968 la Commission a eu recours, rappelons-le, après que M. Vellozzi eut bénéficié de congés cumulés d'une durée supérieure à douze mois, de septembre 1965 à septembre 1968.
En revanche, on conçoit difficilement que, dans tous les cas où un fonctionnaire s'étant absenté, fût-ce pour quelques jours, en invoquant une maladie, l'administration soit tenue de saisir la commission d'invalidité si une contestation s'élève entre elle et ce fonctionnaire au sujet de la réalité de l'état d'inaptitude temporaire au travail de celui-ci. Admettre un telle interprétation extensive serait obliger les institutions à saisir trop fréquemment les commissions d'invalidité. La défenderesse
a raison de dire qu'une telle procédure ne doit être mise en œuvre que dans les cas graves.
Mais, Messieurs, en admettant même la thèse du requérant, il nous paraît qu'en l'espèce il n'y avait, en tout état de cause, pas lieu de saisir la commission d'invalidité pour la simple raison que cela avait déjà été fait en 1973 et que la commission saisie à l'époque n'avait nullement retenu, dans ses conclusions, l'inaptitude au travail du requérant du fait de l'affection constatée. Ce n'est que si ce dernier avait invoqué, par la suite, soit une aggravation majeure de son état, soit une maladie
de nature différente de celle qui avait été précédemment constatée, qu'une contestation sérieuse aurait pu surgir et que la saisine d'une nouvelle commission eût été alors justifiée. Or, c'est bien par la même affection de l'appareil respiratoire que le requérant prétend justifier ses absences depuis plus de trois années et il n'allègue même pas une aggravation de cette maladie qui serait de nature à l'empêcher d'exercer ses fonctions.
Aussi bien, sa demande tendant à la constitution, en 1974, d'une troisième commission d'invalidité n'était motivée, on le sait, que par l'irrégularité qui aurait, selon lui, vicié les conclusions de la commission d'invalidité réunie antérieurement.
Dans ces conditions, Messieurs, nous concluons au rejet des deux recours nos 42 et 62-74 et à ce que, en application de l'article 70 du règlement de procédure, chacune des parties supporte ses propres dépens.