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15/06/1988 | CJUE | N°7

CJUE | CJUE, Conclusions jointes de l'Avocat général Mancini présentées le 15 juin 1988., Christopher Stanton et SA belge d'assurances "L'Étoile 1905" contre Inasti (Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants)., 15/06/1988, 7


Avis juridique important

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61987C0143

Conclusions jointes de l'Avocat général Mancini présentées le 15 juin 1988. - Christopher Stanton et SA belge d'assurances "L'Étoile 1905" contre Inasti (Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants). - Demande de décision préjudicielle: Tribunal du t

ravail de Bruxelles - Belgique. - Affaire 143/87. - Institut national d'a...

Avis juridique important

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61987C0143

Conclusions jointes de l'Avocat général Mancini présentées le 15 juin 1988. - Christopher Stanton et SA belge d'assurances "L'Étoile 1905" contre Inasti (Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants). - Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Bruxelles - Belgique. - Affaire 143/87. - Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants (Inasti) contre Heinrich Wolf et NV Microtherm Europe et autres. - Demandes de décision préjudicielle:
Hof van Cassatie - Belgique. - Affaires jointes 154 et 155/87. - Recours préjudiciel - Prestation de service - Conditions de cotisations au régime belge des travailleurs indépendants - Articles 7 et 52 du traité CEE.
Recueil de jurisprudence 1988 page 03877
édition spéciale suédoise page 00527
édition spéciale finnoise page 00535

Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Par les trois renvois préjudiciels en question, le tribunal du travail de Bruxelles et la Cour de cassation belge vous demandent d' interpréter les dispositions du traité CEE relatives à la libre circulation des personnes et des services .

Les parties aux procédures correspondantes sont, d' une part, l' Institut national d' assurances sociales pour travailleurs indépendants ( ci-après "Inasti ") et, d' autre part, MM . Christopher Stanton, ressortissant du Royaume-Uni employé d' une compagnie d' assurances britannique ( affaire 143/87 ), Heinrich Wolf, ressortissant allemand et ingénieur salarié de la société Degussa, de Francfort, et Wilfried Dorchain, ressortissant belge qui travaille en Allemagne au service de la Ford-Werke AG (
affaires jointes 154 et 155/87 ).

Outre lesdites activités principales, chacune de ces personnes accomplit depuis quelque temps les fonctions d' administrateur dans une société belge : respectivement, L' Étoile 1905, la Microtherm Europe SA et l' Almare SARL . Or, puisque le droit belge considère l' administrateur d' une société commerciale comme un travailleur indépendant, l' Inasti exige que MM . Stanton, Wolf et Dorchain paient les cotisations de sécurité sociale correspondantes . A l' opposé, les trois administrateurs
soutiennent qu' ils ne doivent rien verser et ils avancent, à cet égard, les arguments suivants : a ) ils sont obligatoirement affiliés, en qualité de travailleurs salariés, au régime de sécurité sociale de leurs États d' emploi respectifs; b ) selon la législation belge, le travailleur indépendant qui cotise déjà en tant que travailleur salarié à un régime national est, pour cette raison, exonéré du paiement de charges sociales supplémentaires; c ) le fait d' exciper, comme le fait l' Inasti, de ce
que leurs cotisations sont versées à des régimes d' États membres autres que la Belgique est contraire au principe d' égalité de traitement et aux dispositions communautaires relatives à la libre circulation des travailleurs .

Eu égard à ces arguments, le tribunal du travail de Bruxelles ( affaire 143/87 ) et la Cour de cassation belge ( affaires 154 et 155/87 ) vous ont posé, par jugements des 30 avril et 4 mai 1987, des questions en substance identiques . Nous les résumerons comme suit : les articles 52 et suivants du traité CEE doivent-ils être interprétés en ce sens qu' est incompatible avec ceux-ci la législation d' un État membre en vertu de laquelle les travailleurs indépendants sont exonérés du paiement des
cotisations de sécurité sociale lorsqu' ils sont déjà affiliés à un régime de sécurité sociale de cet État alors que cet avantage n' est pas accordé aux travailleurs indépendants couverts, en ce qui concerne leur activité salariée, par le régime de sécurité sociale d' un autre État membre?

Dans notre procédure, des observations écrites ont été présentées par l' Inasti, le gouvernement de Bruxelles et la Commission des Communautés européennes ( affaire 143/87 et affaires jointes 154 et 155/87 ), M . Stanton et la société L' Étoile 1905 ( affaire 143/87 ), M . Wolf et la Microtherm Europe SA ( affaires jointes 154 et 155/87 ). L' Inasti, la Commission et M . Wolf sont intervenus à l' audience .

2 . Quelques mots sur la législation nationale dont la compatibilité est litigieuse . L' article 3, paragraphe 1, de l' arrêté royal n° 38 du 27 juillet 1967, par lequel a été institué le statut social des travailleurs indépendants, dispose que "toute personne physique qui exerce en Belgique une activité professionnelle en raison de laquelle elle n' est pas engagée dans les liens d' un contrat de louage de travail" doit cotiser au régime de sécurité sociale . Selon l' article 2 de l' arrêté royal du
19 décembre 1967, qui a donné exécution à ce statut, l' exercice d' un mandat à titre onéreux dans une société commerciale est considéré comme activité professionnelle .

En outre, l' article 12, paragraphe 2, de la première source de droit dispose que "l' assujetti qui, ..., exerce habituellement et en ordre principal une autre activité professionnelle, n' est redevable d' aucune cotisation si ses revenus ... en qualité de travailleur indépendant" n' atteignent pas un montant déterminé . La notion d' exercice habituel et en ordre principal d' une autre activité professionnelle est précisée à l' article 35, paragraphe 1, du deuxième arrêté . Elle intervient : "a )
lorsque ... ( l' )occupation ( de l' assujetti ) comme ouvrier, employé, ouvrier mineur ou marin navigant sous le pavillon belge répond à la notion d' occupation habituelle ... au sens du régime applicable à ces travailleurs; b ) lorsque ... son activité relève d' un autre régime de pension établi par ... une loi, par un règlement provincial ou par la Société nationale des chemins de fer belges ". Enfin, le paragraphe 3 du même texte dispose que "l' occupation au service d' un organisme
international ... dont la Belgique fait partie est assimilée à une occupation comme ouvrier ou employé ".

3 . Après avoir souligné qu' en la matière des dispositions communautaires de coordination n' ont été introduites que par le règlement n° 1390/81, du 12 mai 1981 ( JO L 143, p . 1 ), l' Inasti observe que la réglementation précitée avait pour objectif de garantir une protection sociale suffisante à toute personne exerçant une activité professionnelle sur le territoire belge sans tenir compte, même indirectement, de sa nationalité . D' autre part, l' activité salariée exercée en ordre principal dans
un autre État membre est soumise au régime propre de cet État et ne peut donc pas avoir d' incidence sur l' application de la législation sociale belge . En définitive, pour donner droit à l' exonération des cotisations, l' activité salariée doit être soumise à un régime de sécurité sociale belge ou - mais c' est la seule exception - être exercée au service d' un organisme international dont la Belgique fait partie .

Cette thèse ne convainc pas . Observons d' abord que le problème posé par les juges a quibus vise une situation dans laquelle le refus d' accorder l' exonération se fonde non pas sur la nationalité du travailleur salarié qui administre une société belge, mais sur le fait que le régime de sécurité sociale auquel il cotise n' est pas soumis à la législation nationale . Or, il n' est pas nécessaire de se demander si cet état de choses dissimule une discrimination indirecte pour reconnaître qu' il fait
dépendre le droit du travailleur indépendant de bénéficier dudit avantage de la circonstance qu' il exerce une activité salariée en Belgique . Faute de remplir cette condition, ce travailleur est donc tenu de payer une somme ( les cotisations pour l' activité indépendante ) dont la perception n' est justifiée par aucune exigence d' ordre social, étant donné qu' il est affilié à un régime de sécurité sociale, fût-ce d' un État différent .

Il en résulte que la réglementation litigieuse est susceptible d' entraver la liberté des travailleurs de s' établir dans un autre État membre et est, de ce fait même, incompatible avec le droit communautaire . Rappelons à cet égard que l' article 52 du traité constitue une disposition fondamentale de cet ordre juridique et est directement applicable dans les États membres depuis la fin de la période transitoire . Il vise "à assurer le bénéfice du traitement national à tout ressortissant d' un État
membre qui s' établit, ne serait-ce qu' à titre secondaire, dans un autre État membre pour y exercer une activité non salariée" ( arrêt rendu le 28 janvier 1986 dans l' affaire 270/83, Commission/France, Rec . p . 285, points 13 et 14 des motifs ).

On ne saurait opposer à la conclusion à laquelle nous sommes ainsi parvenus que les arrêtés royaux des 27 juillet et 19 décembre 1967 ont été adoptés alors que des dispositions communautaires de coordination faisaient encore défaut . Comme cela résulte de votre jurisprudence, l' article 52 prescrit en effet "une obligation de résultat précise, dont l' exécution devait être facilitée, mais non conditionnée par la mise en oeuvre d' un programme de mesures progressives . Par conséquent, on ne saurait
invoquer, à l' encontre de l' application de cette obligation, la circonstance que le Conseil a manqué d' adopter les directives prévues par les articles 54 et 57" ( arrêt rendu le 12 juillet 1984 dans l' affaire 107/83, Klopp, Rec . p . 2971, point 10 des motifs ).

4 . A la lumière des considérations qui précèdent, nous vous suggérons de répondre aux questions posées par le tribunal du travail de Bruxelles et par la Cour de cassation belge, respectivement par jugement du 30 avril et arrêt du 4 mai 1987, comme suit :

"Les articles 52 et suivants du traité CEE doivent être interprétés en ce sens qu' est incompatible avec ceux-ci la législation d' un État membre en vertu de laquelle l' exonération du paiement des cotisations de sécurité sociale pour les travailleurs indépendants qui y exercent leur activité dépend de leur affiliation simultanée, au titre d' un contrat de travail salarié, à un régime de sécurité sociale de cet État ."

(*) Traduit de l' italien .


Synthèse
Numéro d'arrêt : 7
Date de la décision : 15/06/1988
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Bruxelles - Belgique.

Affaire 143/87.

Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants (Inasti) contre Heinrich Wolf et NV Microtherm Europe et autres.

Demandes de décision préjudicielle: Hof van Cassatie - Belgique.

Affaires jointes 154 et 155/87.

Droit d'établissement

Libre circulation des travailleurs


Parties
Demandeurs : Christopher Stanton et SA belge d'assurances "L'Étoile 1905"
Défendeurs : Inasti (Institut national d'assurances sociales pour travailleurs indépendants).

Composition du Tribunal
Avocat général : Mancini
Rapporteur ?: Galmot

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1988:310

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