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29/09/2004 | CJUE | N°T-394/02

CJUE | CJUE, Ordonnance du Tribunal de première instance, Arnaldo Lucaccioni contre Commission des Communautés européennes., 29/09/2004, T-394/02


ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

29 septembre 2004 (*)

« Pension – Procédure de saisie-arrêt sur salaire – Exécution d'un jugement d'une juridiction nationale »

Dans l'affaire T-394/02,

Arnaldo Lucaccioni, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à St-Leonards-on-Sea (Royaume-Uni), représenté par Mes J. R. Iturriagagoitia Bassas et K. Delvolvé, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité

d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulati...

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

29 septembre 2004 (*)

« Pension – Procédure de saisie-arrêt sur salaire – Exécution d'un jugement d'une juridiction nationale »

Dans l'affaire T-394/02,

Arnaldo Lucaccioni, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à St-Leonards-on-Sea (Royaume-Uni), représenté par Mes J. R. Iturriagagoitia Bassas et K. Delvolvé, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission de procéder à une saisie-arrêt sur la pension du requérant à la suite du jugement d'une juridiction italienne condamnant le requérant au paiement des honoraires du médecin désigné par lui pour le représenter à la commission d'invalidité et à la commission médicale ainsi que, d'autre part, des demandes visant au remboursement de certains frais et honoraires et au paiement de dommages-intérêts,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, N. J. Forwood et S. Papasavvas, juges,

greffier : M. H. Jung,

rend la présente

Ordonnance

Cadre juridique

1 L’article 78, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») dispose :

« Dans les conditions prévues aux articles 13 à 16 de l’annexe VIII, le fonctionnaire a droit à une pension d’invalidité lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière. »

2 L’article 13, premier alinéa, de l’annexe VIII du statut dispose :

« Sous réserve des dispositions de l’article 1^er, paragraphe 1, le fonctionnaire âgé de moins de 65 ans qui, au cours de la période durant laquelle il acquérait des droits à pension, est reconnu par la commission d’invalidité comme atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et qui, pour ce motif, est tenu de suspendre son service aux Communautés a droit, tant que dure cette
incapacité, à la pension d’invalidité visée à l’article 78 du statut. »

3 L’article 7, premier alinéa, de l’annexe II du statut dispose :

« La commission d’invalidité est composée de trois médecins désignés :

– le premier par l’institution dont relève le fonctionnaire intéressé,

– le second par l’intéressé,

– le troisième du commun accord des deux médecins ainsi désignés. »

4 L’article 8, premier alinéa, de l’annexe II du statut dispose :

« Les frais des travaux de la commission d’invalidité sont supportés par l’institution à laquelle appartient l’intéressé. »

5 L’article 73, paragraphe 1, premier alinéa, du statut dispose :

« Dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord des institutions des Communautés, après avis du comité du statut, le fonctionnaire est couvert, dès le jour de son entrée en service, contre les risques de maladies professionnelles [...] »

6 L’article 19, premier alinéa, de la réglementation relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la « réglementation de couverture ») dispose :

« Les décisions relatives [...] à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente sont prises par l’autorité investie du pouvoir de nomination suivant la procédure prévue à l’article 21 :

– sur la base des conclusions émises par le ou les médecins désignés par les institutions ; et

– si le fonctionnaire le requiert, après consultation de la commission médicale prévue à l’article 23. »

7 L’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la réglementation de couverture dispose :

« La commission médicale est composée de trois médecins désignés :

– le premier, par l’autorité investie du pouvoir de nomination,

– le deuxième, par le fonctionnaire ou ses ayants droit,

– le troisième, du commun accord des deux médecins ainsi désignés. »

8 L’article 23, paragraphe 2, premier alinéa, de la réglementation de couverture dispose :

« Les frais des travaux de la commission médicale sont supportés par l’institution dont relève le fonctionnaire.

[…] »

Faits et procédure

9 Le 15 janvier 1990, le requérant, fonctionnaire de la Commission à l’époque, a été victime d’une hémoptysie. Il a ensuite été reconnu comme étant atteint d’un cancer bronchique et, le 12 mars 1990, il a subi une lobectomie supérieure gauche du poumon.

10 Le 26 novembre 1990, le requérant a adressé à l’administration et à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), une note dans laquelle il demandait l’adoption d’une décision de reconnaissance de maladie professionnelle et la fixation d’un taux d’invalidité permanente, conformément à l’article 19 de la réglementation de couverture. Le requérant faisait valoir qu’il avait été exposé à la poussière d’amiante dans le bâtiment Berlaymont.

11 Par lettre datée du 18 janvier 1991, le directeur de la direction DO « Personnel – Droits et obligations » de la direction générale Personnel et administration (DG IX) (ci-après le « directeur du personnel ») a informé le requérant que, vu son état de santé, son cas serait soumis à la commission d’invalidité prévue par l’article 78 du statut (ci-après la « commission d’invalidité »).

12 Par lettre au directeur du personnel du 27 février 1991, le requérant a désigné le D^r Cognigni comme membre de la commission d’invalidité et a fait observer qu’il avait déjà fait une déclaration de maladie professionnelle le 26 novembre 1990.

13 La commission d’invalidité, composée du D^r Cognigni (nommé par le requérant), du D^r Mancini (nommé par la Commission) et du P^r Maltoni (nommé par les deux premiers), s’est réunie le 10 juin 1991. Elle a conclu que le requérant était atteint d’une invalidité permanente totale le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et que, pour ce motif, il était tenu de suspendre son service à la Commission.

14 La Commission affirme avoir versé au D^r Cognigni un montant de 350 000 lires italiennes (ITL) à titre de rémunération de sa participation à la commission d’invalidité.

15 Le 16 juillet 1991, le directeur du personnel, agissant en qualité d’AIPN, a pris une décision portant mise à la retraite du requérant, conformément à l’article 53 du statut, et l’admettant au bénéfice d’une pension d’invalidité au titre de l’article 78, troisième alinéa, du statut.

16 Par note du 17 février 1992, dans le cadre de la procédure au titre de l’article 73 du statut, le chef de l’unité « Assurance maladie et accidents » a notifié au requérant un projet de décision de rejet de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, conformément à l’article 21 de la réglementation de couverture.

17 Poursuivant la procédure prévue par l’article 73 du statut, le requérant a demandé la convocation de la commission médicale prévue par l’article 23 de la réglementation de couverture (ci-après la « commission médicale »). Le requérant a nommé le D^r Cognigni à la commission médicale.

18 Il ressort d’une lettre de la Commission du 16 septembre 1992, informant le D^r Cognigni de sa désignation à la commission médicale, que celui-ci devait envoyer sa note relative à sa participation à cette commission directement aux services de l’institution.

19 La Commission a nommé le P^r Brochard à la commission médicale en novembre 1992. Le 29 janvier 1993, le D^r Cognigni et le P^r Brochard ont désigné le P^r Maltoni comme troisième membre de cette commission. La commission médicale a conclu, le 13 avril 1993, que le requérant était atteint d’un carcinome pulmonaire associé histologiquement à une fibrose des septas, mais elle n’était pas unanime sur la relation de cause à effet entre l’exposition du requérant à l’amiante et son carcinome. À la
suite d’une seconde réunion qui s’est tenue le 25 février 1994, la commission médicale a déposé son rapport le 1^er mars 1994, adopté à la majorité, le P^r Brochard exprimant son désaccord.

20 Dans son rapport, la commission médicale a retenu le carcinome pulmonaire du requérant comme maladie professionnelle. Elle a précisé que l’invalidité totale permanente du requérant était de 100 % et qu’elle remontait au moment du diagnostic. Il lui a été accordé en outre une indemnité de 30 %, sur la base de l’article 14 de la réglementation de couverture.

21 Par lettre du 15 avril 1994, le directeur général de la DG IX a informé le requérant des conclusions de la commission médicale et lui a reconnu le taux d’invalidité permanente totale de 130 %. Conformément à l’article 73 du statut, un capital de 25 794 194 BEF a été versé au requérant le 28 avril 1994.

22 Selon le requérant, le D^r Cognigni a demandé à la Commission, à plusieurs reprises, de lui payer les frais et honoraires relatifs à sa participation à la commission d’invalidité et à la commission médicale, s’élevant respectivement à 16 950 000 ITL et à 19 000 000 ITL, soit un total de 35 950 000 ITL, outre les intérêts.

23 Selon la Commission, le D^r Cognigni a introduit, le 25 mai 1994, une demande de paiement d’honoraires d’un montant de 19 900 000 ITL, énumérés dans une note qu’il avait préalablement présentée à la Commission, pour sa participation à la commission médicale. La Commission aurait demandé au D^r Cognigni de lui fournir des précisions supplémentaires sur les prestations couvertes par sa note. Cette correspondance se serait poursuivie jusqu’en octobre 1995.

24 Le 6 mars 1997, le requérant a présenté une demande de paiement des honoraires et frais du D^r Cognigni demeurant impayés, en application de l’article 90, paragraphe 1, du statut. Cette demande a fait l’objet d’une décision implicite de rejet du 6 juillet 1997.

25 Le 29 juillet 1997, le D^r Cognigni a formé un recours devant le Tribunale di Fermo, demandant qu’il soit fait injonction au requérant de lui payer ses prestations professionnelles à concurrence d’une somme de 63 825 480 ITL, à majorer des intérêts et frais légaux.

26 Le 6 octobre 1997, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut pour obtenir le paiement par la Commission des frais et honoraires du D^r Cognigni, d’un montant provisoire destiné à couvrir les frais de justice italiens et d’un montant destiné à compenser son préjudice moral, soit au total 255 707 000 ITL.

27 Le 10 janvier 1998, le président du Tribunale di Fermo a adressé au requérant une injonction de payer lesdits honoraires et frais à concurrence d’une somme de 35 950 000 ITL, plus les intérêts et frais de justice.

28 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mai 1998, le requérant a introduit le recours inscrit au greffe du Tribunal sous le numéro T‑75/98. Ses conclusions étaient rédigées comme suit :

« Le requérant a l’honneur de conclure à ce qu’il plaise au Tribunal :

– condamner la Commission au paiement des honoraires et frais annexes repris dans le decreto ingiunctivo du Tribunale di Fermo du 10 janvier 1998, à savoir la somme de 35 950 000 ITL, majorée des intérêts et des frais légaux dûment actualisés, ainsi qu’au remboursement des frais encourus par le D^r Cognigni pour sa participation à la commission médicale ;

– condamner la Commission à déposer en garantie auprès du tribunal compétent une somme égale au double du point précédent, y compris les intérêts et autres frais, pour garantir le paiement de tous autres frais et dommages et intérêts que le requérant pourrait être tenu de payer au D^r Cognigni sur la base de la procédure en cours devant le Tribunale di Fermo ;

– condamner la Commission à des dommages et intérêts, pour le préjudice moral subi, équivalant à six fois la somme résultant du premier point, y compris les intérêts et autres frais […] ;

– condamner la défenderesse aux dépens. »

29 Par lettre du 7 mai 1998, la Commission a explicitement rejeté la réclamation du requérant du 6 octobre 1997. Le 20 juillet 1998, la Commission a envoyé à l’avocat du requérant une communication dans laquelle elle précisait, notamment, qu’elle verserait au D^r Cognigni les honoraires et frais relatifs aux travaux de la commission médicale à concurrence du montant indiqué par le président du Tribunale di Fermo, outre les intérêts légaux prévus par la loi italienne.

30 Dans sa réplique dans l’affaire T-75/98, le requérant a indiqué qu’il était prêt à réduire ses prétentions sur preuve du paiement par la Commission des montants demandés par le D^r Cognigni. Il ressort des documents annexés au mémoire en duplique dans cette affaire-là que, le 20 juillet 1998, la Commission a versé au D^r Cognigni un montant de 25 898 500 ITL en paiement des honoraires et frais afférents à sa participation à la commission médicale. Le 22 octobre 1998, la Commission lui a
versé un montant de 6 815 247 ITL en paiement des intérêts.

31 Une audience a eu lieu dans l’affaire T-75/98 le 4 février 2000 devant le président du Tribunal siégeant en tant que juge unique. Il ressort du procès-verbal de l’audience que le requérant a renoncé formellement, au cours de celle-ci, à ses demandes concernant les frais et honoraires relatifs à la commission médicale.

32 À la suite de l’audience, il a été tenu le même jour une réunion informelle, lors de laquelle les parties sont arrivées à un accord provisoire permettant un règlement amiable du litige. Le procès-verbal de la réunion informelle résume le contenu de l’accord ainsi intervenu de la manière suivante :

« La partie défenderesse s’engage à verser au requérant le montant de 16 000 000 ITL à titre de paiement supplémentaire pour les travaux de la commission d’invalidité, ainsi que pour les frais encourus devant les juridictions nationales et le Tribunal.

Dans un délai d’une semaine, la Commission marquera formellement son accord sur la résolution à l’amiable du litige.

À compter de la notification dudit accord formel, la partie requérante disposera d’une semaine pour se désister du présent recours, sans pour autant devoir conclure sur les dépens. »

(« La parte convenuta si impegna a versare alla parte ricorrente una somma di lire 16 000 000, a titolo di pagamento supplementare per i lavori della Commissione d’invalidità, nonché per le spese sostenute davanti al giudice nazionale e al Tribunale.

La Commissione, nel termine di una settimana, darà formalmente il suo accordo sulla soluzione amichevole della controversia.

A decorrere dalla notifica di questo accordo formale, la parte ricorrente avrà a disposizione una settimana per rinunciare agli atti del presente ricorso, senza tuttavia dover concludere sulle spese. »)

33 Par lettre du 9 février 2000 adressée au greffier du Tribunal, la Commission a marqué son accord formel sur le règlement amiable, tout en précisant les demandes et montants qui étaient couverts par cet accord. Il ressort de cette lettre que la somme globale de 16 000 000 ITL comprenait 1 000 000 ITL « au titre des honoraires du D^r Cognigni afférents à sa participation à la commission d’invalidité en 1991 (ceci en plus de la somme de 350 000 ITL versée directement au D^r Cognigni à
l’époque) », 8 000 000 ITL « au titre d’honoraires et frais encourus par [le requérant] en défendant les recours introduits à son encontre en Italie par le D^r Cognigni », 5 000 000 ITL « au titre du préjudice moral subi par le requérant » du fait de l’introduction de ces recours et du retard dans le paiement des frais et honoraires relatifs à la commission médicale et, enfin, 2 000 000 ITL « au titre des frais et honoraires […] relatifs à la présente affaire [T-75/98] devant le Tribunal ».

34 Le 27 mars 2000, le conseil du requérant dans l’affaire T-75/98 a écrit au Tribunal pour « confirmer et accepter intégralement les accords proposés par la Commission dans la lettre du 9 février 2000, signifiée à M. Lucaccioni en même temps que les procès-verbaux, datés le 16 février 2000, de la réunion informelle du 4 février 2000 » et signifier qu’il « reste en attente de leur exécution de la part de cette même Commission, par le biais du versement de la somme qui a été convenue de
16 000 000 ITL en plus du remboursement des frais de voyage et de séjour selon les règles administratives communautaires ».

(« confermare ed accettare integralmente gli accordi proposti dalla commissione nella lettera 9.2.2000, notificata al signor Lucaccioni insieme ai verbali della riunione informale del 4.2.2000, in data 16.2.2000, rimanendo in attesa della esecuzione degli stessi da parte della medesima commissione, a mezzo versamento dell’importo concordato di 16 000 000 [ITL] oltre il rimborso delle spese di viaggio e soggiorno secondo le regole amministrative comunitarie »)

35 Les deux parties s’étant ainsi mises d’accord sur le règlement à l’amiable, l’affaire T-75/98 a été radiée du registre par ordonnance du 22 mai 2000.

36 Le requérant fait valoir en l’espèce qu’il a versé les « montants convenus » au D^r Cognigni mais relève que celui-ci ne s’est pas désisté de son action devant le Tribunale di Fermo. En revanche, le D^r Cognigni a introduit un recours devant le Tribunal, inscrit au greffe sous le numéro T-162/00, visant au paiement de ses honoraires par l’institution. Ce recours a été rejeté comme manifestement irrecevable par ordonnance du 15 novembre 2000.

37 Par un jugement du 21 avril 2001, le Tribunale di Fermo a mis fin au litige commencé le 29 juillet 1997 en condamnant le requérant à payer la somme de 11 950 000 ITL au D^r Cognigni, en plus des sommes qui avaient déjà été versées à ce dernier par la Commission et le requérant, majorée des intérêts et frais de justice, soit 22 036 831 ITL au total, soit 11 381,07 euros. Toutefois, le requérant et le D^r Cognigni ont interjeté appel contre ce jugement.

38 À la requête du D^r Cognigni, une saisie-arrêt conservatoire à charge du requérant pour la somme de 11 620,22 euros, intérêts supplémentaires et frais afférents à la saisie-arrêt compris, a été notifiée à la Commission en Belgique le 25 janvier 2002, pour exécution par retenue sur la pension communautaire du requérant, conformément aux dispositions applicables du code civil belge.

39 Par lettre recommandée du 19 février 2002, le requérant et son conseil ont demandé à la Commission de refuser d’exécuter la saisie-arrêt et que toute éventuelle retenue sur sa pension soit compensée par un prêt sans intérêts au titre de l’article 76 du statut. Par lettre du 20 février 2002, la Commission a informé le requérant que les retenues sur sa pension débuteraient au mois de mars 2002, à raison de la fraction saisissable de ses revenus, à savoir 6 280,15 euros par mois. La Commission
a ensuite répondu à la lettre recommandée du 19 février 2002 par lettre du 13 mars 2002 signalant qu’elle était tenue d’exécuter la saisie-arrêt et, en ce qui concerne l’éventuelle application de l’article 76 du statut, qu’il appartenait au requérant d’apporter tout renseignement permettant à l’administration d’apprécier sa demande d’un prêt.

40 Le requérant a réitéré sa demande de prêt par lettre du 11 mars 2002 à laquelle la Commission a répondu par lettre du 2 avril 2002. Par note du 21 mai 2002, le requérant a introduit une réclamation contre la décision de la Commission du 20 février 2002 de donner suite à la saisie-arrêt et, subsidiairement, contre la lettre du 13 mars 2002. Il a demandé, en outre, la levée de la saisie-arrêt exécutée sur sa pension, le dédommagement pour tous les frais encourus dans le cadre de sa défense et
le dédommagement pour les dommages moraux subis. La Commission a rejeté la réclamation par décision explicite du 27 septembre 2002.

41 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 décembre 2002, le requérant a introduit le présent recours. Le mémoire en défense a été déposé au greffe le 8 avril 2003 et, le requérant n’ayant pas déposé de mémoire en réplique dans le délai imparti, la procédure écrite a été close le 4 juin 2003.

Conclusions des parties

42 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– déclarer la présente requête recevable et fondée ;

– annuler la décision de la Commission du 27 septembre 2002 rejetant la réclamation du 21 mai 2002 ;

– ordonner le paiement de l’intégralité des frais et honoraires résultant des travaux accomplis par le D^r Cognigni dans le cadre des commissions d’invalidité et médicale visant le requérant, avec le remboursement des montants saisis sur la pension du requérant, et avec les intérêts moratoires et les frais ainsi que les honoraires de justice, y compris les honoraires d’avocat, de traducteur et d’huissier de justice ;

– condamner la Commission à dédommager le requérant des préjudices moraux qu’il a subis ;

– condamner la Commission aux entiers dépens de l’instance.

43 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner le requérant aux dépens.

En droit

44 Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

45 En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

Arguments des parties

46 Le requérant soutient explicitement dans sa requête que son recours est recevable. N’ayant pas déposé de réplique dans le délai imparti, il n’a pas répondu aux arguments de la Commission sur la recevabilité. Toutefois, le requérant a fait un certain nombre d’observations qui se rapportent au fait que, selon lui, l’ordonnance du 22 mai 2000 ne fait pas obstacle, dans les circonstances du cas d’espèce, à ce qu’il poursuive le remboursement par la Commission, dans le cadre de la présente
procédure, des sommes qu’il a été condamné à verser au D^r Cognigni par le Tribunale di Fermo. Cette question a trait et à la recevabilité et au bien-fondé de son recours.

47 Le requérant fait valoir à cet égard que, en réalité, l’article 8 de l’annexe II du statut et l’article 23 de la réglementation commune créent chacun une dette dans le chef de la Commission européenne envers le D^r Cognigni du fait de la participation de ce dernier, respectivement, à la commission d’invalidité et à la commission médicale. Le requérant n’ayant jamais reçu de mandat de la part de ce dernier pour transiger avec la Commission, la transaction conclue entre la Commission et le
requérant dans le cadre de l’affaire T-75/98 n’a pu éteindre le droit du D^r Cognigni au remboursement de ses honoraires.

48 Selon le requérant, le refus du D^r Cognigni de se désister de son recours devant le juge italien, à la suite du versement par le requérant des sommes convenues entre ce dernier et la Commission dans le cadre de la transaction susmentionnée, était imprévisible et constitue un fait nouveau par rapport aux circonstances dans lesquelles est intervenue l’ordonnance de radiation du 22 mai 2000 mettant fin à l’affaire T‑75/98.

49 En toute hypothèse, les termes de la transaction conclue dans le cadre de l’affaire T-75/98 seraient repris exclusivement dans le procès-verbal de la réunion informelle du 4 février 2000, le requérant n’ayant jamais accepté ceux exposés dans la lettre de la Commission du 9 février 2000.

50 En outre, le requérant fait valoir que la Commission n’aurait pas dû exécuter la saisie-arrêt conservatoire qui lui a été notifiée en Belgique, le 25 janvier 2002. Il fait valoir que la Commission était tenue de vérifier, au préalable, l’état de la procédure devant les juridictions italiennes et de tenir compte du fait que le requérant avait interjeté appel contre le jugement du Tribunale di Fermo du 21 avril 2001.

51 Le requérant fait valoir également que la Commission a méconnu son devoir de sollicitude vis-à-vis du requérant et commis un détournement de pouvoir du fait que, premièrement, elle a refusé de payer les honoraires du D^r Cognigni et, deuxièmement, elle a même contribué, par son exécution de la saisie-arrêt, au recouvrement de sa propre dette vis‑à‑vis de ce dernier auprès du requérant.

52 Enfin, le requérant prétend avoir subi un préjudice moral attribuable à une faute de la Commission du fait de l’exécution de la saisie-arrêt. Elle reproche également à la Commission un défaut de motivation dans sa réponse à la réclamation du fait qu’elle n’a pas répondu explicitement à la demande de réparation du préjudice moral.

53 La Commission, sans soulever formellement d’exception d’irrecevabilité, demande au Tribunal de rejeter le présent recours comme manifestement irrecevable dans son ensemble. Au soutien de cette demande, elle fait valoir, en substance, que le requérant cherche en réalité à remettre en cause l’ordonnance du Tribunal du 22 mai 2000, précitée, mettant fin au litige dans l’affaire T-75/98.

54 La Commission soutient, à titre subsidiaire, que le recours est dépourvu de tout fondement en droit. Elle relève notamment que l’obligation qui résulte de l’article 8 de l’annexe II du statut de supporter les frais des travaux de la commission d’invalidité n’implique évidemment pas qu’elle doit supporter tout montant demandé par les membres de cette instance, quelque disproportionné qu’il soit. Dès lors, elle aurait été en droit de contrôler le caractère raisonnable des notes d’honoraires du
D^r Cognigni et de refuser de payer le montant excessif demandé par ce dernier au titre de ses prestations dans le cadre de la commission d’invalidité. La somme de 1 000 000 ITL convenue dans le cadre du règlement à l’amiable de l’affaire T-75/98 et acceptée par le requérant, à laquelle s’ajoute le montant de 350 000 ITL déjà versé au D^r Cognigni, serait largement suffisante aux fins de rémunérer ses prestations dans le cadre de la commission d’invalidité.

55 Quant aux arguments du requérant en ce qui concerne la régularité de l’exécution par la Commission de la saisie-arrêt, celle-ci invoque l’article 23 du statut, aux termes duquel les fonctionnaires communautaires sont tenus de s’acquitter de leurs obligations privées. La Commission relève qu’elle n’avait aucun pouvoir de refuser l’exécution de la saisie-arrêt et, partant, aucune marge d’appréciation pour vérifier le caractère approprié et licite de cette mesure, de même que tout autre
employeur établi en Belgique. Ce serait au requérant qu’il appartenait, le cas échéant, de former opposition contre la saisie-arrêt.

Appréciation du Tribunal

56 Il convient de rappeler que le recours introduit par un fonctionnaire, ou ancien fonctionnaire, auprès du Tribunal doit être déclaré irrecevable si la procédure précontentieuse n’a pas suivi un cours régulier. À cet égard, les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut, étant destinés à assurer la sécurité juridique, sont d’ordre public et s’imposent aux parties et au juge. Un fonctionnaire ne saurait, dès lors, en saisissant l’AIPN d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1,
du statut, faire renaître, à son profit, un droit de recours contre une décision devenue définitive à l’expiration des délais susvisés.

57 Toutefois, l’existence d’un fait nouveau et substantiel peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une telle décision (ordonnance du Tribunal du 29 avril 2002, Jung/Commission, T‑68/98, RecFP p. I-A-55 et II-251, points 38, 39, 41 et 43). En revanche, si la demande de réexamen n’est pas fondée sur des faits nouveaux et substantiels, le recours contre la décision refusant de procéder au réexamen sollicité sera déclaré irrecevable (arrêt du Tribunal du 7 février 2001,
Inpesca/Commission, T‑186/98, Rec. p. II-557, point 49 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 juillet 1986, Trenti/CES, 153/85, Rec. p. 2427, points 11 à 16, et ordonnance du Tribunal du 9 février 2000, Gómez de la Cruz Talegón/Commission, T‑165/97, RecFP p. I-A-19 et II-79, points 46 et suivants).

58 En l’espèce, il y a lieu de relever, tout d’abord, que, dans la mesure où la demande en annulation formulée dans le cadre du présent recours vise la décision de la Commission du 27 septembre 2002 rejetant la réclamation, elle a néanmoins pour effet, conformément à une jurisprudence constante, de saisir le Tribunal de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 mai 2000, Pipeaux/Parlement, T‑34/99, RecFP p. I-A-79 et II-337,
point 14). En l’espèce, il y a lieu de relever que la décision rejetant la demande du requérant du 19 février 2002, visant, en substance, à la non-exécution de la saisie‑arrêt, est contenue dans la lettre du 13 mars 2002.

59 Il convient de constater également, à titre liminaire, que le requérant n’a demandé explicitement dans sa lettre recommandée du 19 février 2002 que la non-exécution de la saisie-arrêt notifiée à la Commission en Belgique. Dans sa réclamation et sa requête devant le Tribunal, en revanche, il a demandé explicitement le remboursement des frais et honoraires du D^r Cognigni ainsi que des frais et honoraires résultant des procédures judiciaires italiennes et de la saisie-arrêt, de même que la
réparation de son préjudice moral.

60 Il y a lieu de considérer, aux fins de la présente ordonnance, que la demande du 19 février 2002 englobe implicitement les demandes formulées ultérieurement dans la réclamation, dans la mesure où celles‑ci constituent la prolongation logique de la demande initiale, compte tenu de l’exécution de la saisie-arrêt intervenue entre le 19 février et l’introduction de la réclamation le 21 mai 2002. En effet, l’exécution de la saisie-arrêt sur la base du jugement du Tribunale di Fermo du 21 avril
2001 a porté sur les frais et honoraires du D^r Cognigni, pour autant que ceux‑ci sont restés impayés selon la décision de cette juridiction, ainsi que sur les intérêts, dépens et autres frais de justice incidents à cette créance principale.

61 En toute hypothèse, le présent recours doit être rejeté pour d’autres motifs, quelle que soit la portée précise de cette demande initiale.

62 En effet, il y a lieu de rappeler que, selon les termes de l’article 98, paragraphe 1, du règlement de procédure, « [s]i, avant que le Tribunal ait statué, les parties s’accordent sur la solution à donner au litige et si elles informent le Tribunal qu’elles renoncent à toute prétention, le président ordonne la radiation de l’affaire au registre et statue sur les dépens conformément à l’article 87, paragraphe 5, le cas échéant au vu des propositions faites en ce sens par les parties ».

63 En l’espèce, l’accord convenu entre le requérant et la Commission dans le cadre de l’affaire T-75/98 a, selon les termes du procès-verbal de la réunion informelle du 4 février 2000, apporté un « règlement amiable du présent litige ». Sous réserve de l’accord formel de la Commission, il a été convenu que cette dernière verserait la somme de 16 000 000 ITL au requérant et que, en contrepartie, celui-ci se désisterait de son recours sans conclure sur les dépens. Il y a lieu de relever, à cet
égard, que le requérant avait déjà renoncé formellement, au cours de l’audience, à sa demande de remboursement des frais et honoraires du D^r Cognigni relatifs à ses prestations dans le cadre de la commission médicale, la Commission ayant produit la preuve qu’elle avait versé à ce dernier, le 20 juillet 1998, un montant de 25 898 500 ITL à ce titre et, le 22 octobre 1998, un montant de 6 815 247 ITL en paiement des intérêts afférents au principal (voir le point 30 ci-dessus).

64 Ensuite, par la lettre du 27 mars 2000, le requérant a accepté « intégralement les accords proposés par la Commission dans la lettre du 9 février 2000, selon les termes du procès‑verbal de la réunion informelle » (voir le point 34 ci-dessus). Étant donné que la lettre de la Commission du 9 février 2000 se limite à exposer d’une manière plus détaillée les termes de l’accord tels qu’elle les avait compris, sans nullement contredire ceux du procès-verbal, force est de constater que,
contrairement à ce qu’affirme le requérant dans la présente affaire, son acceptation de l’accord, relevée ci-dessus, couvre les termes de ce dernier tels que précisés dans ladite lettre. Or, il ressort de la lettre de la Commission que la transaction conclue entre les parties procédait d’une « évaluation globale des mérites des prétentions avancées » et constituait dès lors une « solution globale » du litige couvrant non seulement les honoraires du D^r Cognigni relatifs à sa participation à la
commission d’invalidité, mais aussi les frais et honoraires encourus par le requérant devant le juge italien, le préjudice moral subi par le requérant dans ce contexte et, enfin, les dépens dans l’affaire T-75/98.

65 Dans ces conditions, il y a lieu de relever que le requérant s’est désisté de son recours dans l’affaire T-75/98 à la suite d’un règlement à l’amiable, conformément à l’article 98, paragraphe 1, du règlement de procédure. Dans la mesure où le requérant a accepté une somme moins importante que celle qu’il réclamait, la décision implicite de rejet, du 7 juillet 1997, de sa demande initiale du 6 mars 1997 est devenue définitive (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 13 décembre 2002, Van
Dyck/Commission, T‑112/02, RecFP p. I-A-317 et II‑1527, point 60) pour le surplus. Ainsi, pour autant que le requérant demande le paiement d’une somme plus importante dans le cadre de la présente procédure, en invoquant la même situation factuelle et la même cause que dans sa demande du 6 mars 1997, force est de constater que ladite décision du 7 juillet 1997 rejetant cette demande subsiste et fait ainsi obstacle à ces prétentions, sauf si le requérant avance des faits nouveaux et substantiels
justifiant le réexamen de cette décision (voir, en ce sens, la jurisprudence citée aux points 56 et 57 supra).

66 Il s’ensuit que le requérant n’était pas recevable à introduire la demande du 19 février 2002, telle que complétée par sa réclamation du 21 mai 2002, pour autant que cette demande réitère sa première demande du 6 mars 1997 (voir, en ce sens, ordonnance Van Dyck/Commission, point 65 supra, point 62, ainsi que la jurisprudence citée point 57 supra). Or, la demande du 6 mars 1997 était fondée sur l’obligation à charge de la Commission de payer les frais et honoraires du D^r Cognigni, afférents
à sa participation aux commissions d’invalidité et médicale, et visait au remboursement des frais et honoraires du D^r Cognigni ainsi qu’au remboursement des dépens et autres frais de justice incidents à cette demande principale et à la réparation du préjudice moral subi par le requérant du fait que la Commission n’avait pas payé lesdits frais et honoraires en temps utile.

67 Dans ces conditions, le présent recours, comme la demande du 19 février 2002 dont il relève, est manifestement irrecevable dans la mesure où il vise à l’annulation de la décision du 13 mars 2002 ainsi qu’au remboursement des sommes retenues sur la pension du requérant pour le même motif que celui invoqué dans l’affaire T-75/98, à savoir que les sommes en cause représentent des frais et honoraires du D^r Cognigni qu’il incombait à la Commission de supporter.

68 De même, le recours est manifestement irrecevable pour autant qu’il vise au remboursement des dépens et autres frais occasionnés par les actions introduites par le D^r Cognigni devant le juge italien, en conséquence de ce manquement dans le chef de la Commission, ainsi que dans la mesure où il vise à la réparation du préjudice moral prétendument subi par le requérant du fait de ces poursuites judiciaires de la part du D^r Cognigni. En effet, l’ensemble de ces questions a été réglé dans le
cadre de l’affaire T-75/98, à la suite de laquelle la décision de la Commission du 6 mars 1997 est devenue définitive dans la mesure où elle subsistait encore.

69 En outre, la demande de remboursement des dépens et autres frais de justice occasionnés par la poursuite de la procédure devant le juge italien et par l’exécution du jugement italien par saisie-arrêt après le règlement à l’amiable doit être rejetée également. En effet, si le remboursement de ces éléments postérieurs n’a pu être demandé par définition dans le cadre de l’affaire T-75/98, force est de constater que la seule base sur laquelle le requérant pouvait prétendre au remboursement de
ces éléments par la Commission était le lien avec la prétendue obligation de la Commission de payer le principal que le requérant avait été condamné à payer par le juge du Tribunale di Fermo du 21 avril 2001. Dès lors, le rejet des demandes d’annulation de la décision du 13 mars 2002 et de remboursement de cette somme comme manifestement irrecevable entraîne nécessairement celui de la demande accessoire de remboursement des frais de justice en cause.

70 Quant au prétendu fait nouveau invoqué par le requérant, à savoir la poursuite « contre toute attente », selon le requérant, par le D^r Cognigni de son action en justice malgré le paiement des « sommes convenues » entre le requérant et la Commission, il suffit de relever que cette circonstance n’était pas imprévisible dès lors que la transaction mettant fin au litige dans l’affaire T-75/98 n’engageait que le requérant et la Commission. Si cette transaction a certes réglé définitivement le
droit du requérant vis-à-vis de la Commission de demander le paiement des frais et honoraires en cause pour les raisons exposées ci-dessus, il était manifeste lors de sa conclusion qu’elle n’éteindrait pas les éventuels droits d’action du D^r Cognigni vis-à-vis du requérant dans le cadre de la relation contractuelle de médecin traitant et patient existant entre eux et relevant de la compétence des juridictions civiles italiennes. Dans ces conditions, le requérant ne saurait prétendre qu’il n’a été
instruit quant aux limites à la portée de sa transaction avec la Commission qu’en prenant connaissance de la décision du D^r Cognigni de poursuivre son action, voire en prenant connaissance du jugement du Tribunale di Fermo du 21 avril 2001 (voir, par analogie, ordonnance Van Dyck/Commission, point 65 supra, point 64).

71 Le requérant avance, en outre, au soutien de sa demande d’annulation de la décision du 13 mars 2002 et du remboursement des sommes retenues sur sa pension en exécution de la saisie-arrêt, le fait que la Commission aurait violé des règles du droit communautaire indépendamment de son obligation de payer les frais et honoraires au D^r Cognigni du fait qu’elle a exécuté la saisie-arrêt sans vérifier la légalité de cette dernière dans les circonstances du cas d’espèce. Or, dès lors que ces
prétentions sont étroitement liées et accessoires aux demandes qui ont été examinées et rejetées ci-dessus et tendent, en substance, à la même finalité, elles ne sauraient être accueillies en ce qu’elles sont également irrecevables.

72 Quand bien même elles seraient considérées comme recevables, le Tribunal estime qu’elles ne sauraient en tout état de cause prospérer au fond. Le Tribunal rappelle à cet égard que l’article 23, premier alinéa, du statut est libellé comme suit :

« Les privilèges et immunités dont bénéficient les fonctionnaires sont conférés exclusivement dans l’intérêt des Communautés. Sous réserve des dispositions du protocole sur les privilèges et immunités [des Communautés européennes du 8 avril 1965], les intéressés ne sont pas dispensés de s’acquitter de leurs obligations privées, ni d’observer les lois et les règlements de police en vigueur. »

73 Le Tribunal relève que la saisie-arrêt en cause est issue de relations juridiques privées entre le requérant et un autre particulier. Pour ces relations, notamment pour ce qui est du respect de leurs obligations privées, conformément à l’article 23, premier alinéa, du statut, les fonctionnaires communautaires sont entièrement soumis au droit national applicable indépendamment de l’existence de certains privilèges et immunités en vertu du protocole sur les privilèges et immunités des
Communautés européennes du 8 avril 1965 (ci‑après le « protocole ») (arrêt du Tribunal du 29 mars 1995, Hogan/Cour de justice, T‑497/93, Rec p. II-703, points 38 et 60).

74 Ainsi, dans cette procédure de saisie-arrêt, l’institution communautaire n’est concernée qu’en tant que tiers, c’est-à-dire en tant qu’employeur, et non pas en qualité de partie à un litige entre un de ses fonctionnaires et un autre particulier (voir, en ce sens, arrêt Hogan/Cour de justice, point 73 supra, point 39).

75 Il ressort en outre d’une jurisprudence constante (ordonnances de la Cour du 11 mai 1971, 1/71 SA, Rec. p. 363, point 7, et du 17 juin 1987, Universe Tankship/Commission, 1/87 SA, Rec. p. 2807, point 5, et arrêt Hogan/ Cour de justice, point 73 supra, point 49) que, compte tenu des objectifs de protection poursuivis par le protocole, ce n’est que dans le cas où l’institution communautaire, entre les mains de laquelle un tiers entend procéder à une saisie-arrêt, soulève des objections fondées
sur l’allégation selon laquelle la saisie-arrêt projetée est susceptible d’apporter des entraves au fonctionnement et à l’indépendance des Communautés que le créancier intéressé doit saisir la Cour d’une demande d’autorisation de pratiquer une saisie-arrêt, conformément à l’article 1^er dudit protocole.

76 Il y a lieu de relever que le requérant n’a avancé en l’espèce aucun motif susceptible d’indiquer en quoi l’exécution de la saisie-arrêt porterait atteinte aux intérêts de la Communauté, ni invoqué aucune disposition de fond du protocole permettant éventuellement à la Commission de déroger en sa faveur à la règle posée à l’article 23 du statut, que ce soit dans sa demande du 19 février 2002, dans ses lettres ultérieures à la Commission, dans sa réclamation du 21 mai 2002 ou dans la requête
introductive de la présente instance.

77 En l’absence d’un privilège ou d’une immunité applicable en l’espèce et compte tenu du libellé explicite et univoque de l’article 23 du statut, c’est à juste titre que la Commission a considéré, dans sa décision du 13 mars 2002, qu’elle était tenue d’exécuter la saisie-arrêt notifiée en Belgique par un huissier de la même manière que tout autre employeur établi sur le territoire belge. À toutes fins utiles, il échet de constater qu’elle était également tenue de l’exécuter, en l’absence d’un
tel privilège ou d’une telle immunité, en vertu du devoir de coopération loyale qui lui incombe avec les instances judiciaires nationales, en toute hypothèse.

78 Ainsi, la demande en annulation de la décision du 13 mars 2002 doit être rejetée comme manifestement non fondée, de même que celle visant au remboursement des sommes retenues par la Commission en exécution de la saisie-arrêt.

79 Quant à la demande de réparation du préjudice moral, le requérant n’a pu subir un préjudice susceptible de réparation par la Commission du fait de l’exécution par cette institution de la saisie-arrêt que dans la mesure où la Commission aurait commis une illégalité en l’exécutant. Or, il a été constaté ci-dessus que la Commission était tenue d’exécuter la saisie-arrêt et, dans ces conditions, son comportement à cet égard n’était pas illicite.

80 Enfin, dans la mesure où le requérant reproche à la Commission un défaut de motivation par rapport au refus de réparer son préjudice moral, il convient de rappeler que l’étendue de l’obligation de motivation dans un cas particulier doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt du Tribunal du 23 avril 2002, Campolargo/Commission,
T‑372/00, RecFP p. I-A-49 et II-223, point 49). En l’espèce, les indications données par la Commission dans la décision du 13 mars 2002 et dans sa réponse à la réclamation du 27 septembre 2002, quant à l’absence de choix pour elle en ce qui concerne l’exécution de la saisie-arrêt, ont constitué une motivation suffisante en l’espèce, dès lors que, pour les raisons exposées au point précédent, il était évident que le requérant ne pouvait avoir droit à la réparation d’un préjudice moral dans ces
conditions.

81 À la lumière de ce qui précède, les demandes formulées par le requérant en l’espèce doivent être rejetées comme manifestement irrecevables et, dans la mesure où elles se fondent sur le caractère prétendument illicite de l’exécution par la Commission de la saisie-arrêt, comme, en tout état de cause, manifestement non fondées.

Sur les dépens

82 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

83 Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

84 La Commission relève à cet égard que, nonobstant la règle rappelée au point précédent, le Tribunal peut, aux termes de l’article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure, condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’autre partie les frais qu’elle lui a fait exposer et qui sont jugés frustratoires ou vexatoires. Elle soutient que tel est le cas en l’espèce.

85 Dans les circonstances de la présente affaire, le Tribunal n’estime pas que les frais exposés par la Commission puissent être considérés comme frustratoires ou vexatoires.

86 Dès lors, le requérant ayant succombé, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1) Le recours est rejeté.

2) Chaque partie supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 29 septembre 2004.

Le greffier Le président

H. Jung J. Pirrung

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* Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : T-394/02
Date de la décision : 29/09/2004
Type de recours : Recours en responsabilité - irrecevable, Recours de fonctionnaires - non fondé, Recours en responsabilité - non fondé, Recours de fonctionnaires - irrecevable

Analyses

Recours manifestement non fondé.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Arnaldo Lucaccioni
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2004:279

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