ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
30 septembre 2009
Affaire T-193/08 P
Carina Skareby
contre
Commission des Communautés européennes
« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation 2004 – Fixation des objectifs et communication des critères d’évaluation »
Objet : Pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 6 mars 2008, Skareby/Commission (F‑46/06, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt.
Décision : L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 6 mars 2008, Skareby/Commission (F‑46/06, non encore publié au Recueil), est annulé en tant que le Tribunal de la fonction publique a rejeté le grief pris de l’absence de fixation préalable des objectifs, de communication préalable des critères d’évaluation et de description du poste de M^me Carina Skareby. La décision du 31 août 2005 établissant le rapport d’évolution de carrière de M^me Skareby pour
la période allant du 1^er janvier au 31 décembre 2004 est annulée, dans la mesure où elle concerne le point 6.1, intitulé « Rendement ». Le recours introduit devant le Tribunal de la fonction publique sous la référence F‑46/06 est rejeté pour le surplus. La Commission des Communautés européennes est condamnée à supporter l’intégralité des dépens afférents à la présente instance et à celle devant le Tribunal de la fonction publique.
Sommaire
1. Pourvoi – Moyens – Dénaturation des éléments de preuve – Inexactitude matérielle des constatations des faits résultant des pièces du dossier – Recevabilité – Examen incomplet des faits – Recevabilité
(Art. 225 CE)
2. Procédure – Requête introductive d’instance – Exigences de forme – Exposé sommaire des moyens invoqués
(Règlement de procédure du Tribunal de première instance, art. 44, § 1)
3. Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Pouvoir d’appréciation des notateurs
(Statut des fonctionnaires, art. 43)
4. Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Délégation à la personne notée des fonctions relevant de la compétence des notateurs – Inadmissibilité
(Statut des fonctionnaires, art. 43)
5. Pourvoi – Moyens – Dénaturation des éléments de preuve – Inexactitude matérielle des constatations des faits résultant des pièces du dossier – Charge de la preuve
(Art. 225 CE)
1. Sont recevables au stade du pourvoi des griefs relatifs à la constatation des faits par le juge de première instance lorsque ces griefs tendent à soutenir que l’inexactitude de cette constatation résulte des pièces du dossier ou d’un examen incomplet des faits.
(voir point 48)
Référence à : Cour 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, points 392 à 405 ; Tribunal 19 septembre 2008, Chassagne/Commission, T‑253/06 P, non encore publié au Recueil, point 57, et la jurisprudence citée
2. Dans l’examen de la conformité d’une requête avec les exigences de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, le contenu d’affirmations présentées à un stade ultérieur de la procédure est, par hypothèse, dépourvu de pertinence.
(voir point 61)
Référence à : Tribunal 19 mai 2008, TF1/Commission, T‑144/04, Rec. p. II‑761, point 30, et la jurisprudence citée
3. En matière de notation des fonctionnaires, les évaluateurs jouissent du plus large pouvoir d’appréciation dans les jugements portés sur le travail des personnes qu’ils ont la charge de noter et il n’appartient pas au juge d’intervenir dans cette appréciation et de contrôler son bien‑fondé, le contrôle juridictionnel exercé sur le contenu des rapports faits par les évaluateurs étant limité, notamment, au contrôle de la régularité procédurale.
En ce qui concerne ce contrôle de la régularité procédurale, dans les cas où une institution de la Communauté dispose d’un pouvoir d’appréciation, le respect des garanties procédurales conférées par l’ordre juridique communautaire revêt une importance d’autant plus fondamentale.
Le pouvoir d’appréciation particulièrement large dont jouissent les évaluateurs aux fins de la notation d’un fonctionnaire doit, dès lors, être contrebalancé par le respect particulièrement scrupuleux des règles régissant l’organisation de cette notation et le déroulement de la procédure prévue à cet effet.
(voir points 68 à 70)
Référence à : Cour 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14 ; Cour 6 novembre 2008, Pays‑Bas/Commission, C‑405/07 P, non encore publié au Recueil, points 56 et 57 ; Tribunal 21 octobre 1992, Maurissen/Cour des comptes, T‑23/91, Rec. p. II‑2377, point 41 ; Tribunal 26 octobre 1994, Marcato/Commission, T‑18/93, RecFP p. I‑A‑215 et II‑681, point 45 ; Tribunal 9 novembre 1995, France-aviation/Commission, T‑346/94, Rec. p. II‑2841, points 32 à 34 ; Tribunal
23 mars 2000, Gogos/Commission, T‑95/98, RecFP p. I‑A‑51 et II‑219, point 37 ; Tribunal 4 mai 2005, Schmit/Commission, T‑144/03, RecFP p. I‑A‑101 et II‑465, point 70, et la jurisprudence citée
4. La délégation à la personne notée de fonctions qui relèvent de la compétence intrinsèque du seul évaluateur, telle que la fixation des objectifs de la personne notée, est en contradiction non seulement avec l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des dispositions générales d’exécution adoptées par la Commission en application de l’article 43 du statut, mais également avec le principe imposant un traitement égal des fonctionnaires en matière de notation. En effet, les rapports
d’évolution de carrière constituent des éléments importants dans les procédures de promotion, le choix du fonctionnaire promu étant effectué notamment sur la base d’un examen comparatif des rapports d’évolution de carrière. Eu égard à la finalité desdits rapports, le principe d’égalité de traitement exige, dans tous les cas, une stricte séparation entre les fonctions du notateur et celles du noté.
(voir points 80 et 81)
Référence à : Tribunal 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission, T‑188/01 à T‑190/01, RecFP p. I‑A‑95 et II‑495, points 97 et 98 ; Tribunal 17 mars 2004, Lebedef/Commission, T‑175/02, RecFP p. I‑A‑73 et II‑313, points 25 et 26
5. En conférant à de simples affirmations unilatérales, de surcroît imprécises, d’une institution communautaire une primauté par rapport aux dénégations expresses d’une requérante sur une question pour laquelle la charge de la preuve incombe à l’institution, le juge de première instance a procédé à un examen incomplet des faits, de sorte que l’arrêt attaqué est entaché d’une inexactitude matérielle des constatations effectuées, résultant des pièces du dossier.
(voir point 87)
Référence à : Cour 6 décembre 2007, Marcuccio/Commission, C‑59/06 P, non publié au Recueil, points 67, 68 et 70
ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
30 septembre 2009 (*)
« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation 2004 – Fixation des objectifs et communication des critères d’évaluation »
Dans l’affaire T‑193/08 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 6 mars 2008, Skareby/Commission (F‑46/06, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,
Carina Skareby, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Louvain (Belgique), représentée par M^es S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant
Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Berscheid et M^me K. Herrmann, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (chambre des pourvois),
composé de M. M. Jaeger (rapporteur), président, M^mes V. Tiili, M. E. Martins Ribeiro, M. O. Czúcz et M^me I. Pelikánová, juges,
greffier : M^me C. Kristensen, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 mars 2009,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, la requérante, M^me Carina Skareby, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 6 mars 2008, Skareby/Commission (F‑46/06, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté comme non fondé son recours tendant, d’une part, à l’annulation du rapport d’évolution de carrière établi pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004
(ci-après le « REC 2004 ») et, d’autre part, à la condamnation de la Commission des Communautés européennes au paiement de dommages et intérêts en réparation des préjudices prétendument subis.
Cadre juridique
2 Aux termes de l’article 43 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) nº 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1), entré en vigueur le 1^er mai 2004 :
« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution conformément à l’article 110 [du statut]. Chaque institution arrête des dispositions prévoyant le droit de former, dans le cadre de la procédure de notation, un recours qui s’exerce préalablement à l’introduction d’une réclamation conformément à l’article 90, paragraphe 2[, du statut].
[...]
Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles. »
3 Le 3 mars 2004, la Commission a adopté une décision relative aux dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut dans sa version en vigueur jusqu’au 30 avril 2004 (ci-après les « DGE »).
4 Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE, « [l]’évaluateur propose au titulaire de poste les objectifs à atteindre dans le cadre du poste, assortis d’une liste de compétences nécessaires ainsi que la manière dont les résultats seront évalués et les conditions dans lesquelles ils sont censés être obtenus[ ; l]es objectifs à atteindre doivent être à la mesure des conditions de travail (temps partiel, détachement ...) et cohérents avec les objectifs du
programme de travail de la direction générale et de l’unité[ ; i]ls constituent la base de référence pour l’évaluation du rendement[ ; e]n cas de désaccord entre l’évaluateur et le titulaire du poste sur le contenu des objectifs, le validateur, après avoir entendu le titulaire du poste, tranchera[ ; l]es objectifs sont intégrés dans le rapport d’évolution de carrière relatif à la période à laquelle ils se rattachent ».
5 Le 23 décembre 2004, la Commission a adopté de nouvelles dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut, sans modifier pourtant les dispositions de l’article 8 susmentionné. Un modèle de rapport d’évolution de carrière (ci-après le « REC »), pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004, a été joint à ces dispositions générales d’exécution et comporte un point 3, intitulé « Description du poste », un point 4.1, intitulé « Objectifs relatifs au programme de travail de
l’unité », et un point 4.2, intitulé « Objectifs de développement personnel ».
Faits à l’origine du litige
6 Les faits à l’origine du litige ont été exposés, aux points 13 à 26 de l’arrêt attaqué, de la manière suivante :
« 13 La requérante est fonctionnaire des Communautés européennes [affectée à] la direction générale (DG) ‘Relations extérieures’ […]
14 Le 18 avril 2003, la requérante a pris ses fonctions à la délégation de la Commission située à Almaty, au Kazakhstan, avant d’être transférée, en avril 2004, à la délégation de Bichkek, située au Kirghizstan, laquelle dépend de la délégation au Kazakhstan.
[…]
16 Le REC 2004 de la requérante a été établi par M. A, chef de la délégation au Kazakhstan, en tant que premier évaluateur, M. B, directeur de la direction E de la DG ‘Relations extérieures’, en tant que deuxième évaluateur, et M. C, directeur de la direction K de la DG ‘Relations extérieures’, en tant que validateur.
17 En mars 2005, M. A a transmis à la requérante […] un projet de REC 2004, lui octroyant la note globale de 12,5/20 […] Ni les évaluateurs ni le validateur n’ont signé le projet de REC 2004.
[…]
19 Le REC 2004, signé […] par MM. A et B […], a été approuvé par M. C le 23 juin 2005. La note globale attribuée à la requérante est de 13/20, composée comme suit : 6/10 pour le rendement, 4/6 pour les aptitudes et 3/4 pour la conduite dans le service. Le REC 2004 a été communiqué à la requérante.
20 Le 1^er juillet 2005, la requérante a introduit une demande de révision de l’évaluation. Le 29 juillet 2005, un dialogue a eu lieu entre la requérante et M. C.
21 Le 2 août 2005, M. C a confirmé que le REC 2004 était cohérent avec une note finale de 13/20.
22 La requérante a fait appel. Le 25 août 2005, le comité paritaire d’évaluation […] a rendu son avis aux termes duquel l’argumentation de la requérante a été considérée comme non fondée et le REC 2004 cohérent.
23 Le 31 août 2005, l’évaluateur d’appel a clôturé le REC 2004.
24 Pour l’exercice de promotion 2005, la requérante a été promue au grade A* 9.
25 Le 29 novembre 2005, la requérante a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre l’établissement de son REC 2004.
26 Par décision du 25 janvier 2006, notifiée à la requérante le 1^er mars 2006, l’autorité investie du pouvoir de nomination […] a rejeté la réclamation. »
Procédure en première instance et arrêt attaqué
7 Par un recours introduit devant le Tribunal de la fonction publique le 4 mai 2006, la requérante a demandé, en substance, l’annulation de son REC de 2004 et la condamnation de la Commission à la réparation des préjudices professionnel, matériel et moral qu’elle aurait subis pour un montant total s’élevant à 20 000 euros.
8 À l’appui de sa demande en annulation, la requérante a soulevé cinq moyens.
9 Les troisième, quatrième et cinquième moyens, tirés d’une violation des droits de la défense, du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration ainsi que d’un détournement de pouvoir et de procédure, ont été rejetés par le Tribunal de la fonction publique. Ces parties de l’arrêt attaqué ne font pas l’objet du présent pourvoi.
10 Le premier moyen, que le Tribunal de la fonction publique a considéré comme étant tiré « de la violation des règles de procédure », a également été rejeté (points 53 à 78 de l’arrêt attaqué).
11 Dans le cadre de ce moyen, la requérante a soulevé devant le Tribunal de la fonction publique, en substance, trois griefs, dont seul le deuxième fait l’objet du présent pourvoi. S’agissant de ce deuxième grief, le Tribunal de la fonction publique a exposé, aux points 38 et 39 de l’arrêt attaqué, l’argumentation de la requérante comme suit :
« 38 Deuxièmement, la requérante souligne que, selon l’article 8 des DGE […], le rendement est apprécié au vu des résultats atteints en fonction des objectifs fixés et dépassés ainsi que du degré de difficulté pour les atteindre et des critères préalablement fixés. Selon la requérante, l’évaluateur doit établir dans un délai raisonnable avec le titulaire du poste, un plan définissant les objectifs à atteindre dans le cadre du poste et les compétences particulières qu’il exige, ainsi que la
manière dont ils seront évalués et les conditions dans lesquelles ils sont censés être obtenus. Or, pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004, la requérante soutient qu’un dialogue portant sur ces éléments n’a jamais eu lieu.
39 À l’audience, la requérante a souligné que les Informations administratives [n° 2‑2005, du 12 janvier 2005, relatives à l’exercice d’évaluation du personnel pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004,] qui indiquent que, si les objectifs n’ont pas pu être fixés pour l’année 2004, l’évaluation sera complétée par d’autres éléments dont le titulaire du poste a connaissance, ne peuvent prévaloir sur les dispositions des DGE […] En outre, la requérante a relevé que l’absence de fixation
des objectifs pour 2004 devait être valablement justifiée, ce qui n’aurait pas été le cas en l’espèce. »
12 Ce deuxième grief est résumé, au point 63 de l’arrêt attaqué, sous les titres « Sur le moyen tiré de la violation des règles de procédure » et « Sur le grief pris de l’absence de fixation des objectifs, de communication des critères d’évaluation et de description du poste de la requérante ». Il est indiqué que « [l]a requérante prétend, en substance, que la Commission a omis, d’une part, de fixer ses objectifs pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004 et de lui communiquer les
critères selon lesquels serait réalisée l’évaluation de ses prestations au titre de cette période et, d’autre part, de décrire son poste ».
13 Statuant sur ce deuxième grief, le Tribunal de la fonction publique, tout en admettant qu’il résultait de l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE une obligation pour l’administration de fixer au titulaire d’un poste des objectifs et des critères d’évaluation, étant donné que le dialogue formel entre l’évaluateur et le titulaire du poste au début de chaque exercice d’évaluation devait porter, notamment, sur la fixation d’objectifs, ces objectifs constituant « la base de
référence pour l’évaluation du rendement » (point 64 de l’arrêt attaqué), a rejeté le grief comme non fondé, aux points 66 à 70 de l’arrêt attaqué, pour les motifs suivants :
« 66 […] il ressort tant des écritures que des débats à l’audience que, lors du dialogue formel qui s’est tenu le 24 avril 2004 entre la requérante et le premier évaluateur, ce dernier s’est borné à demander à la requérante de rédiger elle-même ses objectifs. Il résulte d’un échange de courriers électroniques, datés des 28 et 29 juin 2004 et communiqués à l’audience par la requérante, entre celle-ci et la secrétaire du premier évaluateur, que la requérante a introduit ses objectifs pour la
période du 1^er janvier au 31 décembre 2004, dans le système SysPer 2, en juin 2004, lesquels n’ont été ni contestés ni amendés par l’administration.
67 Certes, ces objectifs pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004 n’ont pas été établis selon la procédure prévue à l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE […] Néanmoins, la requérante en avait nécessairement connaissance.
68 […] s’agissant de la description du poste de la requérante, il y a lieu de rappeler que celle-ci exerçait son activité à la délégation de Bichkek en tant que chargé d’affaires. La Commission a reconnu qu’une description de ce poste n’a été introduite dans le système SysPer 2 que le 9 juin 2005. Toutefois, bien que, avant cette date, aucune description personnalisée du poste ne figurait dans le système SysPer 2, ce système, accessible à la requérante, comportait en revanche, déjà en 2004, une
description générique du poste de chargé d’affaires.
69 Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’affirmation de la requérante selon laquelle la description de poste introduite le 9 juin 2005 dans le système SysPer 2 est contradictoire avec celle résultant de la note d’instruction « publiée » en juillet 2004. La requérante se limite en effet à invoquer cette prétendue contradiction, sans en apporter la moindre preuve, ni même invoquer le contenu de cette note d’instruction.
70 Il découle des considérations qui précèdent que la procédure de fixation des objectifs et de description du poste de la requérante n’a pas été régulièrement suivie et que la requérante a pu être laissée dans une certaine incertitude sur ces aspects. Toutefois, il convient de rappeler qu’il existait, d’une part, des objectifs dès lors que la requérante les avait elle-même rédigés à la demande de son supérieur hiérarchique et également premier évaluateur et, d’autre part, une description
générique du poste de chargé d’affaires. En outre, il importe d’observer que les évaluateurs n’ont pas ignoré l’état d’incertitude dans lequel pouvait se trouver la requérante, puisque, notamment, sous la rubrique « Rendement » du REC 2004, il est expressément indiqué que les circonstances de son affectation à la délégation de Bichkek n’ont jamais été claires, et que sa fonction de chargé d’affaires n’a été formalisée qu’après son affectation. Il y est également ajouté que la première année de son
affectation à Bichkek, soit à partir du mois d’avril 2004, a été une année d’apprentissage au cours de laquelle la requérante s’est progressivement adaptée. »
14 La requérante a également soulevé plusieurs moyens, tirés d’erreurs manifestes d’appréciation et d’une violation de l’obligation de motivation (voir points 79 à 127 de l’arrêt attaqué).
15 Au soutien du moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation, la requérante a fait valoir plusieurs griefs, dont celui pris de ce que ni les objectifs pour l’année 2004 ni la description de son poste n’auraient été définis (point 97 de l’arrêt attaqué). À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a constaté, au point 98 de l’arrêt attaqué que, dans le cadre du premier moyen, il avait déjà été répondu au troisième grief invoqué par la requérante et que, « par identité de
motifs », il devait donc être rejeté.
16 À l’appui du moyen tiré d’erreurs manifestes d’appréciation, la requérante a soulevé, devant le Tribunal de la fonction publique, plusieurs griefs, dont celui pris de ce que l’évaluateur et le validateur n’auraient pas convenablement pris en compte les difficultés de travail auxquelles elle aurait dû faire face dans son travail (point 81 de l’arrêt attaqué) et que l’évaluateur aurait omis de mentionner ces difficultés (point 113 de l’arrêt attaqué). Ce grief a été écarté, aux points 113 à
115 de l’arrêt attaqué, motif pris de ce que le titulaire du poste pouvait lui-même apporter de telles indications dans le REC 2004 s’il avait éprouvé des difficultés, que l’évaluateur n’était pas tenu de mentionner de manière exhaustive les difficultés rencontrées par la requérante lors de la période de référence et que les évaluateurs n’ont nullement ignoré les difficultés rencontrées par la requérante.
17 Aucun des moyens d’annulation avancés n’ayant été retenu, la demande en annulation a été rejetée.
18 En l’absence d’illégalités susceptibles d’engager la responsabilité de la Commission, la demande en indemnité n’a pas non plus été accueillie (points 161 à 172 de l’arrêt attaqué).
19 En conséquence, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours dans son intégralité.
Sur le pourvoi
1. Procédure et conclusions des parties
20 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 21 mai 2008, la requérante a formé le présent pourvoi.
21 Après le dépôt par la Commission de son mémoire en réponse, en date du 11 août 2008, la requérante a été autorisée à présenter un mémoire en réplique, ce qu’elle a fait le 6 novembre suivant. La Commission a déposé un mémoire en duplique le 5 décembre 2008.
22 Par lettre du 16 décembre 2008, la requérante a formulé une demande motivée, au titre de l’article 146 du règlement de procédure du Tribunal, aux fins d’être entendue dans le cadre de la phase orale de la procédure.
23 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a fait droit à cette demande et a ouvert la procédure orale.
24 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer le pourvoi recevable ;
– annuler l’arrêt attaqué ;
– faire droit aux conclusions en annulation et en indemnité présentées en première instance ;
– condamner la Commission aux dépens des deux instances.
25 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le pourvoi ;
– condamner la requérante aux dépens.
2. En droit
26 À l’appui de ses conclusions tendant à l’annulation de l’arrêt attaqué, la requérante soulève trois moyens. Elle reproche au Tribunal de la fonction publique, d’abord, d’avoir méconnu le moyen tiré d’une violation des règles de procédure, ensuite, d’avoir enfreint son obligation de motivation et, enfin, d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation.
Sur le premier moyen
27 Ce moyen est subdivisé en deux branches. Dans le cadre de la première branche, la requérante reproche au juge de première instance, d’une part, de ne pas avoir répondu à un moyen qu’elle prétend avoir soulevé devant lui et, d’autre part, d’avoir rejeté à tort le grief pris de l’absence de fixation des objectifs et de communication des critères d’évaluation. Dans le cadre de la seconde branche, elle dénonce le rejet, par le juge de première instance, du grief tiré de l’absence de description
de son poste.
Arguments des parties
– Sur la première branche du moyen
28 La requérante fait valoir que, en constatant, au point 66 de l’arrêt attaqué, que des objectifs avaient été « rédigés » et « introduits » dans le système SysPer 2, le Tribunal de la fonction publique a commis une « erreur manifeste d’appréciation […] du grief qu’elle formulait ». Il n’aurait pas répondu à la question qui lui était posée de savoir si, au-delà des apparences, les objectifs que la requérante s’était elle-même fixés étaient ceux qui avaient servi à l’évaluation de ses
performances.
29 La requérante soutient également que le Tribunal de la fonction publique a rejeté à tort le grief pris de l’absence de fixation des objectifs et de communication des critères d’évaluation en concluant, au point 67 de l’arrêt attaqué, qu’elle avait « nécessairement connaissance » des objectifs en cause. Elle fait observer que le juge de première instance s’est contenté de constater que des objectifs avaient été « rédigés » et « introduits » par elle dans le système Sysper 2. Or, la note
attribuée, figurant sous le point 6.1, intitulé « Rendement », du REC de 2004, ne s’expliquerait que par l’utilisation de critères d’évaluation différents de ceux qu’elle avait elle-même établis. Son évaluation, réalisée en fonction de critères qui ne lui avaient pas été communiqués, serait donc nécessairement arbitraire.
30 La requérante reproche, en particulier, au Tribunal de la fonction publique d’avoir supposé que, parce que des objectifs avaient été formellement fixés, ils avaient servi à évaluer ses performances.
31 Pour illustrer cette erreur due à une discordance entre les objectifs formellement fixés et les critères réellement retenus aux fins de l’évaluation, la requérante se réfère à « l’épineuse question » du « reporting » économique et politique. Elle rappelle qu’elle s’attendait devoir assumer, en qualité de chargé d’affaires à Bichkek (Kirghizistan), une mission de « reporting » politique et économique complet et formel en direction de la Commission à Bruxelles (Belgique) ou de la délégation à
Almaty (Kazakhstan). Son chef de délégation lui aurait toutefois donné l’instruction orale de se limiter à un « reporting » politique et économique informel et confirmé, par une note d’instruction du 9 juillet 2004 (jointe en annexe A5 du pourvoi), que le « reporting » politique et économique relevait de la responsabilité de la seule délégation à Almaty. Pour tenir compte de cette instruction, la requérante aurait rédigé ses objectifs en ne s’assignant qu’une mission de « reporting » politique et
économique informel. Toutefois, en contradiction manifeste avec ladite instruction, son REC 2004 aurait comporté la critique concernant son aptitude limitée à établir des rapports dans les domaines politique, économique et commercial.
32 Selon la requérante, la question du « reporting » politique et économique démontre l’incertitude dans laquelle elle s’est trouvée quant aux fonctions qu’elle devait réellement assumer, incertitude qui était également regrettée dans le rapport d’inspection de la Commission pour l’année 2004 en ce qui concerne l’attribution des compétences au sein des délégations (extrait joint en annexe A6 au pourvoi).
33 La Commission considère cette branche du moyen comme irrecevable, puisque, au lieu d’invoquer une violation d’une règle de droit quelconque, la requérante se limiterait à alléguer une erreur manifeste d’appréciation. Par cette argumentation, la requérante ne viserait qu’à amener le juge du pourvoi à apprécier, de nouveau, les faits contestés en première instance, à savoir si la requérante pouvait avoir une connaissance de ses objectifs et de ses attributions pendant la période de référence.
Or, l’appréciation des faits échapperait à tout contrôle par le juge du pourvoi. De plus, la requérante s’appuierait sur le rapport d’inspection des délégations qui n’aurait pas été déposé en première instance et ne saurait donc être invoqué dans le cadre du présent pourvoi.
34 La Commission ajoute que, au point 66 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique s’est référé aux écritures et aux débats à l’audience pour conclure, sur ce fondement, que les objectifs introduits dans le système SysPer 2 par la requérante – qui n’ont été ni contestés ni amendés par l’administration – avaient été fixés et portés à sa connaissance en juin 2004. Elle soutient dès lors que, sur le fondement de ces objectifs, le juge de première instance pouvait considérer, faute de
preuve contraire, que le rendement de la requérante avait été correctement évalué.
35 Selon la Commission, la prétendue contradiction entre les « instructions » du chef de délégation de la requérante et les objectifs rédigés par cette dernière ne constitue pas une preuve de l’existence d’autres objectifs, qui seraient implicites et différents de ceux formellement fixés. En effet, le passage pertinent du REC 2004, loin de constituer une « instruction », exprimerait un jugement de valeur de l’évaluateur.
36 La Commission en conclut que le Tribunal de la fonction publique a fondé son appréciation sur les documents disponibles dans le dossier pour établir que les objectifs de la requérante ont été fixés et portés à sa connaissance. Ce faisant, le juge de première instance n’aurait commis aucune erreur manifeste d’appréciation quant au grief formulé par la requérante.
37 À l’audience, la Commission a également invoqué le caractère non fondé d’un éventuel moyen pris, au stade du pourvoi, de l’abstention du Tribunal de la fonction publique de statuer sur un moyen avancé en première instance et tiré de ce que l’évaluation du « rendement » de la requérante aurait été fondée sur des critères et des objectifs autres que ceux qu’elle connaissait. Selon elle, la requérante n’a jamais soulevé un tel moyen devant le juge de première instance. Partant, celui-ci aurait
statué sur tous les moyens présentés par la requérante devant lui.
– Sur la seconde branche du moyen
38 La requérante, premièrement, fait valoir, que la constatation, figurant au point 68 de l’arrêt attaqué, du fait que le système SysPer 2 comportait, déjà en 2004, une description générique du poste de chargé d’affaires, ne résulte manifestement pas de la pièce produite par la Commission en première instance, à savoir l’annexe B5 à son mémoire en défense. La seule date mentionnée dans cette pièce, à savoir le 17 juillet 2006, serait celle à laquelle celle-ci a été imprimée, et ce probablement
aux fins d’être versée au dossier. La requérante ajoute que la seule circonstance, pour la Commission, d’avoir soutenu en première instance, au point 29 du mémoire en défense, qu’il existait une description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2 en 2004 ne constituait pas une preuve suffisante de son allégation. Par conséquent, le Tribunal de la fonction publique aurait dénaturé l’annexe B5 susmentionnée et entaché ses conclusions, au point 70 de l’arrêt attaqué, d’une
inexactitude matérielle au regard des pièces qui lui avaient été soumises. Ces dénaturation et inexactitude seraient susceptibles d’être censurées par le juge du pourvoi.
39 La requérante, deuxièmement, soutient, que, si le Tribunal devait néanmoins constater que, dès 2004, il existait une description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2, il y aurait lieu de préciser la date à laquelle celle-ci y a été introduite. En effet, dans l’hypothèse où cette description générique n’aurait été introduite dans le système SysPer 2 que vers la fin de la période d’évaluation, elle aurait été d’une utilité très réduite, voire inexistante.
40 En tout état de cause, la requérante fait observer que le Tribunal de la fonction publique n’explique pas la raison pour laquelle, à supposer que la description générique du poste de chargé d’affaires ait figuré dans le système SysPer 2 en 2004, elle devait nécessairement prendre en considération celle-ci de sa propre initiative, dans la mesure où cette description générique ne pouvait lui fournir les indications nécessaires à l’accomplissement de sa mission. En effet, à la lecture de ladite
description, il apparaîtrait que, dans la rubrique « Fonctions et responsabilités », sur les sept fonctions listées – dont cinq étaient considérées comme principales et deux comme optionnelles – seules deux fonctions (une principale et une optionnelle) étaient détaillées, alors que cinq fonctions portaient la mention « will follow » (à compléter).
41 La Commission conclut au rejet comme non fondé du grief pris d’une dénaturation d’un élément de preuve. Elle affirme que la date du 17 juillet 2006 et l’heure, à savoir 17 h 13, figurant sur la description générique du poste de chargé d’affaires sont, à l’évidence, la date et l’heure de l’ouverture du fichier relatif à cette description générique figurant dans le système SysPer 2 par un fonctionnaire de la Commission lors de la préparation du mémoire en défense.
42 La Commission fait également valoir que le Tribunal de la fonction publique était en droit de se fier à l’information de la Commission, figurant au point 29 du mémoire en défense, aux termes de laquelle « en 2004, il existait dans [le système] SysPer 2 des descriptions de poste génériques, telle […] celle de ‘Chargés d’affaires’ (annexe B5) ». En effet, l’annexe B5 n’indiquant aucune date d’introduction de la description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2, le
Tribunal de la fonction publique n’aurait pu dénaturer son contenu à cet égard. En outre, aucun élément n’aurait été avancé par la requérante pour remettre en cause l’explication fournie par la Commission sur le fondement de laquelle le Tribunal de la fonction publique a considéré que cette description générique figurait en 2004 dans le système SysPer 2 et était donc accessible à la requérante. Enfin, il s’agirait là d’une constatation souveraine des faits par le juge de première instance.
43 Dans la mesure où la requérante cherche à remettre en cause ses affirmations quant à la date d’introduction de la description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2, la Commission soutient que l’examen de la crédibilité de ses explications fait partie de l’appréciation des faits par le juge de première instance et est ainsi exclu des questions soumises au contrôle effectué dans le cadre d’un pourvoi.
44 Dans la mesure où la requérante critique le contenu de la description générique du poste de chargé d’affaires, la Commission rappelle que le Tribunal de la fonction publique a tenu compte, au point 70 de l’arrêt attaqué, d’un certain état d’incertitude dans lequel elle pouvait se trouver, en concluant toutefois que ses évaluateurs en avaient également tenu compte sous le point 6.1, intitulé « Rendement », du REC 2004. Par ailleurs, l’argumentation de la requérante reviendrait à demander au
juge de pourvoi d’apprécier les faits, à savoir le contenu de cette description générique, alors que c’est le juge de première instance qui est, en principe, seul compétent pour constater et apprécier les faits.
Appréciation du Tribunal
– Sur la recevabilité
45 En vertu de l’article 225 A CE et de l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, le pourvoi formé devant le Tribunal est limité aux questions de droit et peut être fondé sur des moyens tirés de l’incompétence du Tribunal de la fonction publique, d’irrégularités de procédure devant ledit Tribunal portant atteinte aux intérêts de la partie concernée, ainsi que de la violation du droit communautaire par le Tribunal de la fonction publique. En outre, l’article 138, paragraphe
1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure prévoit que le pourvoi doit contenir les moyens et les arguments de droit invoqués.
46 Il résulte des dispositions précitées que le pourvoi ne peut s’appuyer que sur des moyens portant sur la violation de règles de droit, à l’exclusion de toute appréciation des faits. Le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits (arrêt de la Cour du 31 janvier 2008,
Angelidis/Parlement, C‑103/07 P, non publié au Recueil, point 45). L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal (voir arrêt du Tribunal du 12 mars 2008, Rossi Ferreras/Commission, T‑107/07 P, non encore publié au Recueil, point 29, et la jurisprudence citée).
47 En l’espèce, contrairement à l’argumentation de la Commission, la requérante ne demande toutefois pas au Tribunal de réexaminer les faits qui ont été examinés par le juge de première instance. Dans le cadre du premier volet de la première branche du premier moyen, la requérante reproche au juge de première instance de ne pas avoir répondu à un moyen soulevé devant lui. En outre, dans le cadre du second volet de la première branche du premier moyen, elle lui reproche, en substance, de ne pas
avoir tiré les conséquences juridiques du non-respect des règles procédurales prévues par l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE. Par conséquent, soulevant une question de droit, ces griefs sont recevables. Il s’ensuit que la première branche du moyen doit être déclarée recevable.
48 Dans le cadre de la seconde branche du premier moyen, la requérante soutient, en substance, que rien dans le dossier de première instance ne justifie la constatation du Tribunal de la fonction publique, figurant au point 68 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le système SysPer 2, accessible à la requérante, comportait « déjà en 2004 » une description générique du poste de chargé d’affaires. Elle fait ainsi valoir que l’inexactitude de cette constatation résulte des pièces du dossier et
reproche, à titre subsidiaire, au juge de première instance d’avoir procédé à un examen incomplet des faits. À l’égard de l’inexactitude matérielle des constatations effectuées, il y a lieu de rappeler que sont recevables au stade du pourvoi des griefs relatifs à la constatation des faits par le juge de première instance lorsque ces griefs tendent à soutenir que cette inexactitude résulte des pièces du dossier (voir arrêt du Tribunal du 19 septembre 2008, Chassagne/Commission, T‑253/06 P, non encore
publié au Recueil, point 57, et la jurisprudence citée). Par ailleurs, le grief tiré d’un examen incomplet des faits, qui a été invoqué à titre subsidiaire, doit également être considéré comme recevable au stade du pourvoi (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, points 392 à 405). Il s’ensuit que la seconde branche du
moyen doit être déclarée recevable.
49 Il résulte de ce qui précède que le moyen doit être déclaré recevable en ses deux branches.
– Sur le fond
50 En ce qui concerne le grief tiré d’une violation, par le Tribunal de la fonction publique, de son obligation de répondre à un moyen soulevé devant lui, la requérante soutient, en substance, que le juge de première instance a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que son « rendement » n’a pas été évalué sur la base des objectifs qu’elle avait elle-même rédigés et introduits dans le système SysPer 2. Selon la requérante, eu égard à la note médiocre attribuée, cette évaluation a
nécessairement été fondée sur d’autres objectifs, qui ne lui avaient pas été communiqués préalablement (voir points 29 et 30 ci-dessus).
51 Il s’avère donc que ce grief est composé de deux volets. Premièrement, la requérante allègue l’absence de réponse au moyen tiré, en première instance, de ce que son « rendement » n’a pas été évalué sur la base des objectifs qu’elle avait elle-même rédigés et introduits dans le système SysPer 2. Deuxièmement, et en prolongement du premier volet, elle reproche au juge de première instance d’avoir méconnu le fait que son évaluation a été réalisée en fonction d’objectifs qui ne lui avaient pas
été préalablement communiqués, de sorte que l’on ne pouvait pas parler, à leur égard, d’objectifs et de critères au sens des DGE (points 11 et 13 du pourvoi), raison pour laquelle l’administration aurait, en évaluant son « rendement » de cette façon, violé les règles de procédure applicables (point 9 et sous-titre A du pourvoi).
52 Étant donné que, d’une part, le Tribunal de la fonction publique a interprété, au point 67 de l’arrêt attaqué, le moyen en cause comme étant tiré d’une violation des règles de procédure prévues à l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE et que, d’autre part, la Commission estime que le grief tiré, au stade du pourvoi, de ce que le juge de première instance a omis de statuer sur ce moyen doit être rejeté, puisqu’un tel moyen n’avait jamais été soumis à l’examen de ce
juge, il appartient au Tribunal de vérifier si le moyen en cause se dégage de la requête en première instance, étant précisé que la requérante a renvoyé, à l’audience, au point 39 de ladite requête en première instance pour fonder la recevabilité du moyen en cause.
53 À cet égard, il y a lieu de constater que le point 39 de la requête en première instance figure sous les titres et sous-titres « violation des règles de procédure », « non-respect des garanties procédurales » et « absence de dialogue relatif à la description des objectifs à atteindre ». Ce point 39 est libellé comme suit :
« De même, les critères selon lesquels [la requérante] devrait être évaluée ne lui ont pas été communiqués, alors que, de toute vraisemblance, ils ne pouvaient présenter de liens avec les objectifs par ailleurs pleinement réalisés par [elle].»
54 Il résulte notamment du choix des intitulés fait par la requérante, ainsi que du texte même du point 39 de la requête en première instance que le Tribunal de la fonction publique pouvait considérer que celle-ci avait soulevé un grief tiré d’une violation des règles de procédure.
55 Néanmoins, au vu du premier volet du grief mentionné aux points 50 et 51 ci-dessus, il y a lieu d’examiner, en outre, si le point 39 de la requête en première instance devait également être interprété dans le sens préconisé par la requérante.
56 À cet égard, force est de constater que le point 39 de la requête en première instance est rédigé en des termes trop imprécis pour que l’on puisse l’interpréter comme soutenant que le « rendement » de la requérante n’avait pas été évalué sur la base des objectifs qu’elle avait elle-même rédigés et introduits dans le système SysPer 2, d’autant plus que ces objectifs ne sont mentionnés nulle part ailleurs dans la requête en première instance.
57 Il est vrai que la requérante avait indiqué, à la page 10 du REC 2004 (annexé à la requête en première instance), sous la rubrique « Jobholder’s comments » (Commentaires du titulaire du poste), qu’elle avait été invitée par son supérieur hiérarchique à établir elle-même les objectifs à atteindre et à les introduire dans le système SysPer 2, ce qu’elle aurait fait en mai 2004, sans que ces objectifs aient été commentés par sa hiérarchie. La requérante a poursuivi en relevant qu’« [elle
n’avait] pas été évaluée en fonction de la manière dont [elle avait] atteint les objectifs, mais en fonction d’autres critères qui ne [lui avaient] pas été communiqués ».
58 Il est également vrai que, aux points 28 et 45 de sa réclamation (annexée à la requête en première instance), la requérante avait dénoncé la confusion entre l’évaluation de la performance et la définition des objectifs ainsi que les restrictions inhérentes au système SysPer 2 pour l’établissement des objectifs et que, dans la décision portant rejet de cette réclamation, la Commission a expressément relevé que la requérante « connaissait ses objectifs et les avait acceptés », en précisant
qu’elle les avait envoyés au service compétent « en demandant qu’[ils] soient insérés dans le système informatique ».
59 Toutefois, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure – qui correspond à l’article 35, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique –, toute requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence constante, cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de
statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête même. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un
renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans la requête. Il n’appartient pas au juge de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir ordonnance du Tribunal du 19 mai 2008, TF1/Commission, T‑144/04, Rec. p. II‑761, point 29, et la jurisprudence citée).
60 Or, en l’espèce, la requérante n’a pas complété le point 39 de la requête en première instance par un renvoi aux passages susmentionnés du REC 2004, de la réclamation ou de la décision portant rejet de celle-ci. Par conséquent, le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur de droit en ne répondant pas à un moyen dont il n’avait pas été valablement saisi.
61 Par ailleurs, la requérante ne pouvait pas pallier au défaut de présentation du moyen en cause en indiquant, à l’audience de première instance, que son évaluateur lui avait demandé de rédiger elle-même ses objectifs pour 2004 et de les lui soumettre, ce qu’elle aurait fait sans que l’évaluateur ait jamais réagi pour approuver ces objectifs, pour les amender ou pour les commenter (points 40 et 41 de l’arrêt attaqué). En effet, eu égard à son contenu, cette affirmation orale de la requérante
ne saurait être comprise comme visant à soulever le moyen en cause. En tout état de cause, il est reconnu que, dans l’examen de la conformité d’une requête avec les exigences de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, le contenu d’affirmations présentées à un stade ultérieur de la procédure est, par hypothèse, dépourvu de pertinence (voir ordonnance TF1/Commission, point 59 supra, point 30, et la jurisprudence citée).
62 Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché au Tribunal de la fonction publique d’avoir violé l’obligation de motiver ses décisions en s’abstenant de statuer sur le moyen tiré de ce que le « rendement » de la requérante n’aurait pas été évalué en fonction des objectifs qu’elle avait elle-même rédigés et introduits dans le système SysPer 2.
63 Il résulte de ce qui précède que le premier volet du grief exposé aux points 50 et 51 ci-dessus doit être rejeté comme non fondé.
64 En ce qui concerne le second volet dudit grief, tiré d’une violation des règles de procédure applicables à son évaluation, la requérante reproche au juge de première instance d’avoir méconnu l’absence de fixation d’objectifs et l’absence de communication de critères d’évaluation (point 9 ainsi que sous-titres A et A.1 du pourvoi) et d’avoir négligé, par voie de conséquence, de constater que son évaluation avait nécessairement été réalisée en fonction d’objectifs et de critères qui ne lui
avaient pas été préalablement communiqués, de sorte que l’on ne pouvait pas parler, à leur égard, d’objectifs et de critères au sens des DGE.
65 Ainsi qu’il ressort des points 38 et 39 de l’arrêt attaqué, la requérante avait, déjà en première instance, dénoncé l’absence de fixation des objectifs pour l’année 2004 et indiqué que, en vertu de l’article 8 des DGE, le « rendement » devait être apprécié au vu des résultats atteints en fonction des objectifs fixés et dépassés ainsi que du degré de difficulté pour les atteindre et des critères préalablement fixés. Selon elle, l’évaluateur devait établir dans un délai raisonnable avec le
titulaire du poste un plan définissant les objectifs à atteindre dans le cadre du poste, la manière dont ils seraient évalués et les conditions dans lesquelles ils devraient être atteints. Or, pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004, un dialogue portant sur ces éléments n’aurait jamais eu lieu.
66 Il convient également de rappeler que le Tribunal de la fonction publique a résumé ce grief, au point 63 de l’arrêt attaqué, en ce sens que la Commission aurait omis de fixer les objectifs de la requérante pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004 et de lui communiquer les critères selon lesquels serait réalisée l’évaluation de ses prestations durant cette période (voir point 12 ci-dessus). Il s’avère donc que ce grief et le second volet du grief résumé aux points 50 et 51
ci-dessus se recoupent, dans la mesure où la requérante soutient que l’évaluation de son « rendement » a été fondée sur des objectifs qui ne lui avaient pas été communiqués.
67 Or, le Tribunal de la fonction publique a rejeté ce grief, notamment au motif que, si les objectifs pour 2004 n’avaient pas été établis selon la procédure prévue à l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE, la requérante en avait nécessairement eu connaissance.
68 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie en matière de notation des fonctionnaires, les évaluateurs jouissent du plus large pouvoir d’appréciation dans les jugements portés sur le travail des personnes qu’ils ont la charge de noter et il n’appartient pas au juge d’intervenir dans cette appréciation et de contrôler son bien-fondé (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 21 octobre 1992, Maurissen/Cour des comptes, T‑23/91, Rec. p. II‑2377, point 41, et du
4 mai 2005, Schmit/Commission, T‑144/03, RecFP p. I‑A‑101 et II‑465, point 70, et la jurisprudence citée), le contrôle juridictionnel exercé sur le contenu des REC étant limité, notamment, au contrôle de la régularité procédurale (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 octobre 1994, Marcato/Commission, T‑18/93, RecFP p. I‑A‑215 et II‑681, point 45).
69 En ce qui concerne ce contrôle de la régularité procédurale, la Cour et le Tribunal ont jugé de manière générale que, dans les cas où une institution de la Communauté dispose d’un pouvoir d’appréciation, le respect des garanties procédurales conférées par l’ordre juridique communautaire revêt une importance d’autant plus fondamentale (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14 ; du 6 novembre 2008,
Pays-Bas/Commission, C‑405/07 P, non encore publié au Recueil, points 56 et 57, et arrêt du Tribunal du 9 novembre 1995, France-aviation/Commission, T‑346/94, Rec. p. II‑2841, points 32 à 34).
70 Il convient d’en conclure que le pouvoir d’appréciation particulièrement large dont jouissent les évaluateurs aux fins de la notation d’un fonctionnaire doit être contrebalancé par le respect particulièrement scrupuleux des règles régissant l’organisation de cette notation et le déroulement de la procédure prévue à cet effet (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 23 mars 2000, Gogos/Commission, T‑95/98, RecFP p. I‑A‑51 et II‑219, point 37).
71 En l’espèce, les règles régissant le déroulement de la procédure qui a abouti à l’établissement du REC 2004 de la requérante figurent à l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, des DGE. Ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a expressément relevé au point 64 de l’arrêt attaqué, cette disposition impose à l’administration l’obligation de fixer au titulaire d’un poste des objectifs et des critères d’évaluation, étant précisé que le dialogue formel qui se tient entre l’évaluateur
et le titulaire du poste au début de chaque exercice d’évaluation doit porter, notamment, sur la fixation des objectifs à atteindre dans le cadre du poste, ces objectifs constituant « la base de référence pour l’évaluation du rendement ».
72 Il convient d’ajouter que, selon l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE, les objectifs à atteindre doivent être « cohérents avec les objectifs du programme de travail de la direction générale et de l’unité ». En outre, ces objectifs doivent être « intégrés dans le [REC] relatif à la période à laquelle ils se rattachent ». Par ailleurs, le modèle de REC pertinent pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004, prévu par les nouvelles dispositions générales
d’exécution de l’article 43 du statut du 23 décembre 2004, comporte un point 3, intitulé « Description du poste », un point 4.1, intitulé « Objectifs relatifs au programme de travail de l’unité » et un point 4.2, intitulé « Objectifs de développement personnel ».
73 Ces éléments du régime procédural étant relevés, il y a lieu de rappeler que le Tribunal de la fonction publique a expressément admis, aux points 67 et 70 de l’arrêt attaqué, que « ces objectifs pour la période du 1^er janvier au 31 décembre 2004 n’ont pas été établis selon la procédure prévue à l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE » et que « la procédure de fixation des objectifs et de description du poste de la requérante n’a pas été régulièrement suivie ».
74 Le Tribunal de la fonction publique a néanmoins jugé, en substance, que ces irrégularités n’étaient pas de nature à entraîner l’annulation, ne serait-ce que partielle, du REC 2004.
75 Ce raisonnement du Tribunal de la fonction publique est entaché d’une erreur de droit, le juge de première instance ayant méconnu l’importance du respect des règles régissant la procédure de notation.
76 À cet égard, force est de constater que, en violation des règles de procédure susmentionnées, ni le point 4.1, intitulé « Objectifs relatifs au programme de travail de l’unité », ni le point 4.2, intitulé « Objectifs de développement personnel », du REC 2004 de la requérante ne font état d’un quelconque objectif. L’absence de définition et d’intégration dans le REC de 2004 de la requérante de ces deux types d’objectifs se reflète dans le point 6.1, intitulé « Rendement », du REC de 2004 en
ce que le commentaire de l’évaluateur se borne à une appréciation tout à fait générale du travail de la requérante, sans se prononcer sur la manière dont celle-ci aurait atteint ou dépassé ses objectifs personnels ni sur la cohérence entre ces objectifs et les objectifs du programme de travail de l’unité.
77 Ces vices de procédure ne sauraient être régularisés par la circonstance, mentionnée aux points 66, 67 et 70 de l’arrêt attaqué, que la requérante avait nécessairement connaissance de ses objectifs pour 2004, puisque son évaluateur et supérieur hiérarchique lui avait demandé de les rédiger elle-même, que la requérante les a introduits dans le système SysPer 2 en juin 2004 et que l’administration ne les a ni contestés ni amendés.
78 En effet, premièrement, à supposer même que – malgré le non-respect de la règle procédurale selon laquelle les objectifs doivent être intégrés dans le REC – leur introduction dans le système SysPer 2 puisse être considérée comme équivalente et valable aux fins de l’évaluation de la requérante, il y a lieu de souligner que le dossier de première instance ne contient aucun extrait du système SysPer 2 permettant l’identification des objectifs en cause. Il est donc impossible de vérifier
l’étendue des objectifs introduits dans le système SysPer 2. Il n’est pas non plus possible de vérifier si l’appréciation générale du « rendement » de la requérante, dans le REC 2004, tient objectivement compte de tous les objectifs pertinents.
79 S’il est vrai que le REC 2004 contient certains « objectifs », il n’en reste pas moins que ceux-ci figurent sous le point 9, intitulé « Appeal, Jobholder’s motivations » (Opposition, Motifs du titulaire du poste) et ont été formulés par la requérante elle-même, en 2005, c’est-à-dire in tempore suspecto, en réponse à l’évaluation de son « rendement ». Rien dans le dossier ne justifie de considérer que ces objectifs étaient précisément ceux qui avaient été insérés, en 2004, dans le système
SysPer 2.
80 Deuxièmement, le Tribunal de la fonction publique a constaté que les objectifs en cause avaient été « rédigés » et « introduits » dans le système SysPer 2 par la requérante à la demande de son évaluateur et supérieur hiérarchique. Il s’ensuit que la requérante avait été chargée de formuler elle-même les objectifs dont le contenu aurait dû être préalablement défini par sa hiérarchie. Or, une telle délégation à la personne notée de fonctions qui relèvent de la compétence intrinsèque du seul
évaluateur est en contradiction non seulement avec l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE, mais également avec le principe imposant un traitement égal des fonctionnaires en matière de notation.
81 En effet, les REC constituent des éléments importants dans les procédures de promotion, le choix du fonctionnaire promu étant effectué notamment sur la base d’un examen comparatif des REC (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission, T‑188/01 à T‑190/01, RecFP p. I‑A‑95 et II‑495, points 97 et 98, et du 17 mars 2004, Lebedef/Commission, T‑175/02, RecFP p. I‑A‑73 et II‑313, points 25 et 26). Eu égard à cette finalité des REC, le principe d’égalité de traitement
exige, dans tous les cas, une stricte séparation entre les fonctions du notateur et celles du noté.
82 Il convient d’ajouter qu’une délégation au noté de fonctions relevant de la compétence du notateur apparaît particulièrement inappropriée en l’espèce. En effet, la requérante a été invitée, quelques jours seulement après son affectation à la délégation de Bichkek, à rédiger les objectifs qui seraient les siens dans le cadre de son nouveau poste, alors même qu’il ressort des points 68 et 70 de l’arrêt attaqué, d’une part, qu’il n’existait aucune description personnalisée de ce poste pendant
toute l’année 2004 et, d’autre part, que les circonstances de son affectation n’ont jamais été claires, que la première année de son affectation a été une année d’apprentissage et qu’elle se trouvait donc dans un état d’incertitude. Or, laisser dans de telles circonstances au fonctionnaire noté, qui se trouve dans un état d’ignorance quant à la description du poste qu’il occupe, le soin de définir les objectifs destinés à constituer la base de référence pour l’évaluation de son « rendement » est
constitutif d’un non-respect des règles régissant la procédure de notation.
83 Les vices de procédure relevés ci-dessus ne sauraient non plus être régularisés par la circonstance, mentionnée aux points 68 et 70 de l’arrêt attaqué, qu’il existait une description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2.
84 En effet, dans la mesure où le juge de première instance a ainsi estimé que cette description du poste avait permis aux évaluateurs d’apprécier correctement le « rendement » de la requérante, force est de constater – sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question générale de savoir si une description de poste est, en soi, de nature à pallier le non-respect d’une règle procédurale qui exige la détermination préalable d’objectifs personnels ou professionnels du fonctionnaire noté
(voir, à cet égard, arrêt du Tribunal du 28 novembre 2007, Vounakis/Commission, T‑214/05, non encore publié au Recueil, points 40 à 43) – qu’un tel effet compensateur ne pouvait en aucun cas être attribué à la description générique du poste de chargé d’affaires.
85 À cet égard, la requérante a fait valoir, en première instance, qu’aucune description de son poste n’avait été disponible avant le 8 juin 2005, soit cinq mois après la fin de la période de référence concernée (à savoir le 31 décembre 2004), d’où la difficulté manifeste éprouvée par elle au regard des objectifs attendus d’elle (voir point 41 de la requête en première instance et point 42 de l’arrêt attaqué). Par cet argument, la requérante invoquait donc l’absence de disponibilité d’une
description quelconque de son poste durant toute l’année 2004. La Commission a répondu à cet argument en indiquant qu’il existait, « en 2004 », dans le système SysPer 2, des descriptions génériques de postes, telles que celle du poste de chargé d’affaires (point 49 de l’arrêt attaqué). Or, le dossier de première instance ne contient aucun élément permettant de déterminer la date précise à laquelle la description générique du poste de chargé d’affaires aurait été introduite dans le système SysPer 2.
86 Dans ces circonstances, compte tenu du désaccord entre les parties sur le moment auquel la description générique de poste a été accessible à la requérante, l’argumentation présentée par la Commission n’autorisait pas, à elle seule, le juge de première instance à constater, au point 68 de l’arrêt attaqué, que cette description figurait dans le système SysPer 2 « déjà en 2004 », c’est-à-dire pendant la période de référence pertinente (du 19 avril au 31 décembre 2004) ou, à tout le moins,
pendant une partie essentielle de cette période (voir, par analogie, arrêt Vounakis/Commission, point 84 supra, point 42).
87 Il s’avère donc que le Tribunal de la fonction publique a conféré à de simples affirmations unilatérales, de surcroît imprécises, de la Commission une primauté par rapport aux dénégations expresses de la requérante, en négligeant le fait que la Commission supportait la charge de la preuve en ce qui concerne l’introduction de la description générique du poste de chargé d’affaires dans le système SysPer 2 (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 décembre 2007, Marcuccio/Commission, C‑59/06 P,
non publié au Recueil, points 67, 68 et 70). Ce faisant, le Tribunal de la fonction publique a procédé à un examen incomplet des faits, de sorte que l’arrêt attaqué est entaché d’une inexactitude matérielle des constatations effectuées, laquelle résulte des pièces du dossier (voir point 48 ci-dessus).
88 En tout état de cause, le simple fait que le système Sysper 2 comportait, déjà en 2004, une description générique du poste de chargé d’affaire ne permet pas de considérer que cette description générique est pertinente pour l’évaluation du rendement de la requérante. En effet, le Tribunal de la fonction publique ne saurait arriver à cette conclusion sans examiner préalablement le contenu de la description générique et vérifier si les fonctions et les responsabilités principales avaient été
définies de manière complète et significative. Or, il n’a pas été procédé à un tel examen en l’espèce.
89 Il s’ensuit qu’il y a lieu de déclarer fondé en ses deux branches le premier moyen du pourvoi. Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la recevabilité, contestée par la Commission, de l’argument relatif au « reporting » économique et politique soulevé par la requérante ainsi que des annexes A5 et A6 présentées dans ce contexte.
Conclusion
90 Il résulte de tout ce qui précède que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en refusant d’accueillir partiellement le recours en première instance après avoir constaté l’irrégularité de procédure relevée ci-dessus.
91 Il convient d’ajouter que l’irrégularité de procédure viciant le REC 2004 de la requérante n’était de nature à entacher la validité de l’arrêt attaqué que si, en l’absence de cette irrégularité, ledit REC aurait pu avoir un contenu différent (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 9 mars 1999, Hubert/Commission, T‑212/97, RecFP p. I‑A‑41 et II‑185, point 53, et du 5 mars 2003, Staelen/Parlement, T‑24/01, RecFP p. I‑A‑79 et II‑423, point 53).
92 À cet égard, la Commission se réfère aux points 70, 113, 115, 123 et 125 de l’arrêt attaqué dans lesquels le Tribunal de la fonction publique a constaté que le REC 2004 de la requérante mentionnait l’état d’incertitude et les difficultés de la requérante en soulignant que celle-ci avait su faire face aux nombreux problèmes qu’elle avait rencontrés. Selon elle, le juge de première instance a ainsi apporté une réponse, dépourvue d’erreur de droit, à la question de savoir si les évaluateurs
avaient commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du « rendement » de la requérante.
93 Pour autant que la Commission semble ainsi soutenir que l’irrégularité de procédure relevée ci-dessus n’est pas de nature à vicier le REC 2004 de la requérante, il y a toutefois lieu de rappeler que la notation du « rendement » de la requérante, qui a abouti à la note « bien » (6/10 points), n’a pas été effectuée selon des critères d’évaluation établis par l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE. Il ne ressort notamment pas du REC 2004 de la requérante que les objectifs
fixés ont été atteints, ratés ou dépassés, compte tenu des difficultés auxquelles elle était exposée sur son poste, en fonction de quoi elle aurait pu prétendre à la note « exceptionnel » (10/10 points), à la note « très bien » (8/10 points) ou à la note « bien » (6/10 points). Or, il est évident que, en l’absence des irrégularités viciant le REC 2004 de la requérante, celui-ci aurait pu avoir un contenu différent.
94 Par conséquent, il y a lieu d’annuler partiellement l’arrêt attaqué (voir, en ce sens, notamment arrêt de la Cour du 28 février 2008, Neirinck/Commission, C‑17/07 P, non publié au Recueil) dans la mesure où le juge de première instance a rejeté le grief pris de l’absence de fixation des objectifs, de communication des critères d’évaluation et de description du poste de la requérante. Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire d’examiner les deuxième et troisième moyens du pourvoi.
Sur les conséquences de l’annulation partielle de l’arrêt attaqué
95 Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal de la fonction publique, statuer lui-même sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé. Tel est le cas en l’espèce.
1. Sur les conclusions en annulation
96 Il résulte des points 64 à 88 ci-dessus qu’il y a lieu de faire droit au recours formé en première instance et visant à l’annulation du REC 2004 de la requérante, en ce qui concerne le point 6.1, intitulé « Rendement ». En effet, d’une part, c’est en violation des dispositions de l’article 8, paragraphe 5, quatrième alinéa, sous b), des DGE, et contrairement au modèle de REC prescrit, que le REC 2004 de la requérante ne fait état d’aucun des objectifs à atteindre par cette dernière, de sorte
qu’il est impossible de vérifier en fonction de quels objectifs son « rendement » a été évalué. D’autre part, il ressort du dossier que la requérante ne disposait d’aucune description de son poste pendant la période pertinente, qui aurait pu servir à cette évaluation. Il s’ensuit que l’évaluation du « rendement » de la requérante doit être considérée comme entachée d’illégalité.
97 En conséquence, la décision du 31 août 2005 établissant le REC 2004 doit être annulée, dans la mesure où elle concerne le point, intitulé « Rendement ». En revanche, les conclusions en annulation doivent être rejetées pour le surplus, le présent pourvoi étant limité au raisonnement du juge de première instance au regard dudit point (voir, en ce sens, notamment arrêt Vounakis/Commission, point 84 supra).
2. Sur les conclusions en indemnité
98 La requérante réclame la somme de 20 000 euros au titre de la réparation des préjudices professionnel, matériel et moral qu’elle aurait subis.
99 Dans la mesure où ces conclusions indemnitaires trouvent leur fondement dans l’illégalité partielle du REC 2004 de la requérante, il suffit de relever que l’annulation partielle prononcée par le Tribunal constitue en elle-même une réparation adéquate du préjudice moral que la requérante peut avoir subi dans le cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêt Neirinck/Commission, point 94 supra, point 98 ; arrêt du Tribunal du 11 septembre 2002, Willeme/Commission, T‑89/01, RecFP p. I‑A‑153 et II‑803,
point 97), alors que la preuve de l’existence d’un préjudice réel et certain de nature professionnelle et financière n’a pas été rapportée. En effet, sur ce dernier point, la requérante n’a avancé que de pures suppositions relatives, notamment, aux perspectives négatives d’évolution de sa carrière, qui sont d’ailleurs contredites par le fait qu’elle a été, malgré le REC 2004, promue au grade A* 9 pour l’exercice de promotion 2005.
100 Dans la mesure où lesdites conclusions sont fondées sur des motifs autres que l’illégalité du REC 2004, tels que le retard dans son établissement, il convient de rappeler que le présent pourvoi ne porte pas sur le rejet, par le juge de première instance, de cette partie des conclusions indemnitaires (points 170 et 171 de l’arrêt attaqué).
101 Il s’ensuit que ces conclusions doivent être rejetées dans leur ensemble.
Sur les dépens
102 Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que le Tribunal juge lui-même le litige, il statue sur les dépens.
103 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
104 La Commission ayant succombé pour l’essentiel en ses conclusions présentées tant devant le Tribunal que devant le Tribunal de la fonction publique, il y a lieu de la condamner, dans les circonstances particulières de l’espèce, à supporter la totalité des dépens exposés dans le cadre du pourvoi ainsi qu’en première instance.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 6 mars 2008, Skareby/Commission (F-46/06, non encore publié au Recueil), est annulé en tant que le Tribunal de la fonction publique a rejeté le grief pris de l’absence de fixation préalable des objectifs, de communication préalable des critères d’évaluation et de description du poste de M^me Carina Skareby.
2) La décision du 31 août 2005 établissant le rapport d’évolution de carrière de M^me Skareby pour la période allant du 1^er janvier au 31 décembre 2004 est annulée, dans la mesure où elle concerne le point 6.1, intitulé « Rendement ».
3) Le recours introduit devant le Tribunal de la fonction publique sous la référence F‑46/06 est rejeté pour le surplus.
4) La Commission des Communautés européennes est condamnée à supporter l’intégralité des dépens afférents à la présente instance et à celle devant le Tribunal de la fonction publique.
Jaeger Tiili Martins Ribeiro
Czúcz Pelikánová
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 2009.
Signatures
Table des matières
Cadre juridique
Faits à l’origine du litige
Procédure en première instance et arrêt attaqué
Sur le pourvoi
1. Procédure et conclusions des parties
2. En droit
Sur le premier moyen
Arguments des parties
– Sur la première branche du moyen
– Sur la seconde branche du moyen
Appréciation du Tribunal
– Sur la recevabilité
– Sur le fond
Conclusion
Sur les conséquences de l’annulation partielle de l’arrêt attaqué
1. Sur les conclusions en annulation
2. Sur les conclusions en indemnité
Sur les dépens
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** Langue de procédure : le français.