CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. PEDRO CRUZ VILLALÓN
présentées le 17 mars 2011 (1)
Affaire C‑503/09
Lucy Stewart
contre
Secretary of State for Work and Pensions
[demande de décision préjudicielle formée par l’Upper Tribunal (Administrative Appeals Chamber)]
«Sécurité sociale – Règlement (CEE) n° 1408/71 – Prestations de maladie – Prestations d’invalidité – Prestations spéciales à caractère non contributif – Notions – Prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés – Conditions d’octroi – Conditions de résidence et de présence sur le territoire de l’État membre – Admissibilité – Article 10 du règlement (CEE) n° 1408/71 – Articles 19 et 28 du règlement (CEE) n° 1408/71»
I – Le cadre juridique
A – La réglementation de l’Union
B – La réglementation nationale
II – Les faits à l’origine du litige au principal
III – Les questions préjudicielles
IV – Sur le traitement de la structure et du contenu spécifique des questions posées par le juge de renvoi
A – La prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés
B – La triple condition de résidence et de présence
V – La résidence, une condition a priori suspecte d’octroi des prestations sociales au regard du droit de l’Union
A – Les prestations d’invalidité
B – Les prestations de maladie
VI – La condition de résidence renforcée en tant que condition «constitutive» d’un lien de rattachement au regard des exigences du droit de l’Union
A – L’examen des possibilités de principe
B – L’examen des conditions d’admissibilité
VII – Conclusion
1. La présente affaire donne à la Cour l’opportunité d’examiner la question de savoir si, posé de façon extrêmement simple, le règlement (CEE) n° 1408/71 (2) permet au législateur d’un État membre de subordonner le bénéfice d’une prestation sociale à la condition pour le demandeur de résider et d’être présent sur le territoire de cet État membre à la date de la demande et d’avoir antérieurement résidé sur ledit territoire pendant une période déterminée, sachant que la configuration de cette
prestation est tout à fait particulière. En l’occurrence, la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés en cause dans l’affaire au principal est définie par la réglementation nationale comme une dérogation au régime de la prestation d’incapacité de droit commun. La condition de résidence ainsi renforcée par une condition de présence à laquelle le bénéfice de cette prestation sociale est subordonné viendrait se substituer, purement et simplement, à la condition de cotisation au
régime général de sécurité sociale à laquelle la prestation de droit commun est par ailleurs soumise. La prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés se présente, ainsi, comme une prestation matériellement non contributive, soumise à une condition «constitutive» de résidence et de présence, dérogeant aux conditions de droit commun d’une prestation présentant toutes les caractéristiques d’une prestation contributive.
2. C’est par un raisonnement en deux étapes que je me propose d’aborder cette situation quelque peu paradoxale. Dans un premier temps, je m’emploierai à soumettre cette condition de résidence renforcée par la condition de présence à un traitement «ordinaire», en examinant sa compatibilité avec les dispositions pertinentes du règlement n° 1408/71. Une telle condition est-elle admissible au regard du principe de la levée des clauses de résidence, tel qu’établi par l’article 10 du règlement
n° 1408/71, et du principe de l’«exportabilité» de certaines prestations sociales, tel qu’il se dégage de la jurisprudence de la Cour? Dans un second temps, je m’efforcerai de proposer à la Cour une lecture de la jurisprudence «ajustée» à la spécificité de la condition de résidence et de présence et à la particularité de la situation en cause dans l’affaire au principal.
I – Le cadre juridique
A – La réglementation de l’Union
3. L’article 4 du règlement n° 1408/71 définit le champ d’application matériel de ce dernier dans les termes suivants:
«1. Le présent règlement s’applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent:
a) les prestations de maladie et de maternité;
b) les prestations d’invalidité, y compris celles qui sont destinées à maintenir ou à améliorer la capacité de gain;
[…]
2. Le présent règlement s’applique aux régimes de sécurité sociale généraux et spéciaux, contributifs et non contributifs, ainsi qu’aux régimes relatifs aux obligations de l’employeur ou de l’armateur concernant les prestations visées au paragraphe 1.
2 bis. Le présent article s’applique aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif relevant d’une législation qui, de par son champ d’application personnel, ses objectifs et/ou ses conditions d’éligibilité, possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale visée au paragraphe 1, et de l’assistance sociale.
On entend par ‘prestations spéciales en espèces à caractère non contributif’, les prestations:
a) qui sont destinées:
i) à couvrir à titre complémentaire, subsidiaire ou de remplacement, les risques correspondants aux branches de la sécurité sociale visées au paragraphe 1, et à garantir aux intéressés un revenu minimal de subsistance eu égard à l’environnement économique et social dans l’État membre concerné, ou
ii) uniquement à assurer la protection spécifique des personnes handicapées, en étant étroitement liées à l’environnement social de ces personnes dans l’État membre concerné, et
b) qui sont financées exclusivement par des contributions fiscales obligatoires destinées à couvrir des dépenses publiques générales et dont les conditions d’attribution et les modalités de calcul ne sont pas fonction d’une quelconque contribution pour ce qui concerne leurs bénéficiaires. Les prestations servies à titre de complément d’une prestation contributive ne sont toutefois pas considérées, pour ce seul motif, comme des prestations contributives, et
c) qui sont énumérées à l’annexe II bis.»
4. L’article 5 du règlement n° 1408/71 précise que ce sont les États membres qui mentionnent les prestations spéciales à caractère non contributif visées à l’article 4, paragraphe 2 bis, dudit règlement.
5. L’article 10 du règlement n° 1408/71 pose le principe de la levée des clauses de résidence des prestations d’invalidité, notamment. Son paragraphe1 dispose:
«À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, les prestations en espèces d’invalidité, de vieillesse ou de survivants, les rentes d’accident du travail ou de maladie professionnelle et les allocations de décès acquises au titre de la législation d’un ou de plusieurs États membres ne peuvent subir aucune réduction, ni modification, ni suspension, ni suppression, ni confiscation du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire d’un État membre autre que celui où se trouve l’institution
débitrice.»
6. Le chapitre premier du titre III du règlement n° 1408/71 regroupe les dispositions particulières aux prestations de maladie et de maternité, dont l’article 19, qui prévoit:
«1. Le travailleur salarié ou non salarié qui réside sur le territoire d’un État membre autre que l’État compétent et qui satisfait aux conditions requises par la législation de l’État compétent pour avoir droit aux prestations, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l’article 18, bénéficie dans l’État de sa résidence:
a) des prestations en nature servies, pour le compte de l’institution compétente, par l’institution du lieu de résidence, selon les dispositions de la législation qu’elle applique, comme s’il y était affilié;
b) des prestations en espèces servies par l’institution compétente selon les dispositions de la législation qu’elle applique. Toutefois, après accord entre l’institution compétente et l’institution du lieu de résidence, ces prestations peuvent être servies par cette dernière institution, pour le compte de la première, selon les dispositions de la législation de l’État compétent.
2. Les dispositions du paragraphe 1 sont applicables par analogie aux membres de la famille qui résident sur le territoire d’un État membre autre que l’État compétent, pour autant qu’ils n’aient pas droit à ces prestations en vertu de la législation de l’État sur le territoire duquel ils résident.
En cas de résidence des membres de la famille sur le territoire d’un État membre selon la législation duquel le droit aux prestations en nature n’est pas subordonné à des conditions d’assurance ou d’emploi, les prestations en nature qui leur sont servies sont censées l’être pour le compte de l’institution à laquelle le travailleur salarié ou non salarié est affilié, sauf si son conjoint ou la personne qui a la garde des enfants exerce une activité professionnelle sur le territoire dudit État
membre.»
7. L’article 28 du règlement n° 1408/71 est ainsi rédigé:
«1. Le titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre ou de pensions ou de rentes dues au titre des législations de deux ou plusieurs États membres qui n’a pas droit aux prestations au titre de la législation de l’État membre sur le territoire duquel il réside bénéficie néanmoins de ces prestations pour lui-même et les membres de sa famille, dans la mesure où il y aurait droit en vertu de la législation de l’État membre ou de l’un au moins des États
membres compétents en matière de pension, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l’article 18 et de l’annexe VI, s’il résidait sur le territoire de l’État concerné. Le service des prestations est assuré dans les conditions suivantes:
a) les prestations en nature sont servies pour le compte de l’institution visée au paragraphe 2 par l’institution du lieu de résidence, comme si l’intéressé était titulaire d’une pension ou d’une rente en vertu de la législation de l’État sur le territoire duquel il réside et avait droit aux prestations en nature;
b) les prestations en espèces sont servies, le cas échéant, par l’institution compétente déterminée conformément aux dispositions du paragraphe 2, selon les dispositions de la législation qu’elle applique. Toutefois, après accord entre l’institution compétente et l’institution du lieu de résidence, ces prestations peuvent être servies par cette dernière institution pour le compte de la première, selon les dispositions de la législation de l’État compétent.»
B – La réglementation nationale
8. La loi de 1992 sur les cotisations et les prestations de sécurité sociale (Social Security Contributions and Benefits Act 1992 (3)) institue une prestation d’incapacité («incapacity benefit») garantissant un revenu de remplacement aux personnes n’ayant pas encore atteint l’âge légal de la retraite dans l’incapacité de travailler en raison d’une maladie ou d’un handicap. Définie comme une prestation sociale à caractère contributif par l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la SSCBA, cette
prestation d’incapacité est versée, en vertu de l’article 163 de la loi de 1992 sur l’administration de la sécurité sociale (Social Security Administration Act) par le Fonds d’assurance national (National Insurance Fund, article 1^er, paragraphe 1, de la SSCBA), dont le budget est alimenté par les cotisations versées par les bénéficiaires de revenus, les employeurs et autres.
9. La prestation d’incapacité se compose d’une prestation de courte durée, prévue à l’article 30A, paragraphe 4, de la SSCBA, qui peut être versée pour une durée maximale de 364 jours, et d’une prestation de longue durée, prévue à l’article 30A, paragraphe 5, de la SSCBA.
10. La prestation d’incapacité de courte durée est versée à un taux réduit pendant les 196 premiers jours, puis à un taux supérieur, mais qui demeure inférieur au taux de la prestation d’incapacité de longue durée. Le bénéfice de la prestation d’incapacité de courte durée est exclu, en vertu de l’annexe 12, paragraphe 1, de la SSCBA, si le demandeur perçoit une indemnité légale de maladie («statutory sick pay»), laquelle peut être versée pour une période maximale de 28 semaines (196 jours). Le
montant de la prestation d’incapacité peut être réduit du montant des prestations de retraite auxquelles le demandeur a droit.
11. Le droit à la prestation d’incapacité de courte durée dépend essentiellement de l’état des cotisations du demandeur.
12. Les demandeurs ne satisfaisant pas aux conditions de cotisation mais incapables de travailler peuvent prétendre à un complément de revenu, qui est une prestation liée aux ressources.
13. Il ressort, par ailleurs, de l’ordonnance de renvoi ainsi que des observations présentées que, en vertu de l’article 30A, paragraphe 1, de la SSCBA, les personnes dans l’incapacité de travailler mais ne satisfaisant pas aux conditions de cotisation, notamment parce que, souffrant d’un handicap avant d’avoir atteint l’âge légal (16 ans) pour travailler, elles n’ont jamais pu verser au régime de sécurité sociale les cotisations leur ouvrant droit à la prestation d’incapacité de courte durée,
ont néanmoins droit à cette dernière, sans devoir produire un état de cotisations, à condition de répondre aux conditions prévues à l’article 30A, paragraphe 2A, de la SSCBA, entré en vigueur le 6 avril 2001 (4).
14. L’article 30A, paragraphe 1, de la SSCBA dispose:
«En application des dispositions suivantes du présent article, une personne qui:
a) soit remplit l’une des conditions énoncées au paragraphe 2 ci-dessous; soit, si elle ne remplit aucune de ces conditions;
b) remplit chacune des conditions énumérées à l’alinéa 2A ci-dessous;
est en droit de percevoir une prestation d’incapacité de courte durée pour toute journée où il a été dans l’incapacité de travailler […] incluse dans une période d’incapacité de travail.»
15. L’article 30A, paragraphe 2A, de la SSCBA dispose:
«(2A) Les conditions figurant au paragraphe 1, sous b), ci-dessus sont les suivantes:
a) [le demandeur] est âgé de seize ans ou plus à la date concernée;
b) il a moins de 20 ans ou, dans les cas prévus, 25 ans à une date qui fait partie de la période d’incapacité de travail;
c) il a été incapable de travailler au cours d’une période de 196 jours consécutifs précédant immédiatement la date concernée, ou à une date antérieure au cours de la période d’incapacité de travailler à laquelle il était âgé de 16 ans ou plus;
d) il répond à la date concernée aux conditions définies en matière de résidence en Grande-Bretagne, ou de présence dans ce pays; et
e) il n’est pas, à cette date, une personne qui bénéficie d’un enseignement à plein temps.»
16. La prestation d’incapacité ainsi allouée à ces conditions, qui remplace l’allocation pour handicap grave, est de ce fait présentée comme «prestation d’incapacité pour jeunes handicapés».
17. Le bénéficiaire de la prestation d’incapacité de courte durée peut, aux termes de l’article 30A, paragraphe 5, de la SSCBA, bénéficier de la prestation d’incapacité de longue durée si la maladie ou le handicap perdure. Cette dernière disposition est ainsi rédigée:
«Lorsqu’en application [de l’article 30A, paragraphe 4, de la SSCBA], le droit du bénéficiaire à une prestation d’incapacité de courte durée expire, celui-ci acquiert un droit à une prestation d’incapacité de longue durée pour chaque journée ultérieure comprise dans la même période d’incapacité et pendant laquelle il n’a pas atteint l’âge légal de la retraite.»
18. La condition de résidence ou de présence visée à l’article 30A, paragraphe 2A, sous d), de la SSCBA est définie par l’article 16, paragraphe 1, du règlement de sécurité sociale (prestation d’incapacité) de 1994 [Social Security (Incapacity Benefit) Regulations 1994 (5)], ainsi rédigé:
«16. Conditions liées à la résidence ou à la présence
1) Les conditions imposées aux fins de l’article 30A, paragraphe 2A, sous d), [de la SSCBA] quant à la résidence ou à la présence en Grande-Bretagne sont, pour toute personne, à la date concernée, celles de la date où:
a) elle réside de manière habituelle en Grande-Bretagne;
b) elle n’est pas une personne soumise au contrôle de l’immigration au sens de l’article 115, paragraphe 9, de l’Immigration and Asylum Act 1999 [loi de 1999 relative à l’immigration et à l’asile] […];
c) elle est présente en Grande-Bretagne; et
d) elle a été présente en Grande-Bretagne pour une période ou des périodes représentant une durée totale d’au moins 26 semaines au cours des 52 semaines précédant immédiatement cette date.»
II – Les faits à l’origine du litige au principal
19. Lucy Stewart, la requérante dans l’affaire au principal, une ressortissante britannique née le 20 novembre 1989, vit en Espagne avec ses parents depuis le mois d’août 2000. Atteinte du syndrome de Down, elle n’a jamais travaillé et il est constant qu’elle ne pourra, selon toute vraisemblance, jamais exercer d’activité professionnelle, à tout le moins normale.
20. La requérante dans l’affaire au principal bénéficie, depuis sa création en avril 1992, d’une allocation de subsistance pour handicapés («disability living allowance» (6)). Il ressort de la décision de renvoi qu’elle a probablement reçu, auparavant, une allocation pour aide d’une tierce personne. Ces allocations lui ont été versées en Espagne au titre de l’article 95 ter du règlement n° 1408/71. L’allocation de subsistance pour handicapés peut, d’après les indications fournies par la
juridiction de renvoi, être allouée pour une durée illimitée, c’est-à-dire aussi longtemps que les circonstances déterminant le droit ne sont pas modifiées.
21. La mère de la requérante dans l’affaire au principal perçoit une pension de retraite depuis le 25 juillet 2005 et bénéficiait, auparavant, d’une prestation d’incapacité.
22. Le père de la requérante dans l’affaire au principal, qui a travaillé en dernier lieu au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au cours de l’année fiscale 2000/2001, perçoit une pension professionnelle et, depuis octobre 2009, une pension de retraite de cet État membre.
23. Le 31 octobre 2005, la requérante dans l’affaire au principal, représentée par sa mère, a présenté une demande tendant à l’octroi, à compter de son seizième anniversaire, de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés prévue à l’article 30A, paragraphe 2A, de la SSCBA.
24. Le 24 novembre 2005, le Secretary of State for Work and Pensions, partie défenderesse au principal, a rejeté cette demande au motif que la requérante dans l’affaire au principal «n’[était] pas présente en Grande-Bretagne».
25. Il est constant que la requérante dans l’affaire au principal ne satisfaisait ni à la condition de résidence, ni à la condition de présence, ni à la condition de présence antérieure, respectivement prévues à l’article 16, paragraphe 1, sous a), c) et d), du SSIBR.
26. Saisi sur recours de la requérante dans l’affaire au principal, représentée par sa mère toujours, le Secretary of State for Work and Pensions a réexaminé et confirmé sa décision du 24 novembre 2005. Soulignant que la requérante dans l’affaire au principal avait vécu en Espagne les cinq années précédant sa demande, le Secretary of State for Work and Pensions indiquait qu’elle ne remplissait pas la condition d’avoir été présente en Grande-Bretagne le premier jour à compter duquel elle
entendait bénéficier de la prestation d’incapacité. Il ajoutait que la législation de l’Union ne pouvait lui permettre de satisfaire cette condition.
III – Les questions préjudicielles
27. C’est dans ces circonstances que, saisie en appel de cette dernière décision, l’Upper Tribunal (Administrative Appeals Chamber), a décidé, le 16 novembre 2009, de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
«1) Une prestation présentant les caractéristiques d’une prestation d’incapacité de courte durée pour les jeunes handicapés constitue-t-elle une prestation de maladie ou une prestation d’invalidité aux fins du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (ci-après le «règlement n° 1408/71»)?
2) Si la réponse à la première question est qu’une telle prestation doit être considérée comme une prestation de maladie:
a) Une personne, telle que la mère de la requérante, qui a définitivement cessé toute activité salariée ou indépendante du fait de son départ en retraite est-elle néanmoins un «travailleur salarié» aux fins de l’article 19 en raison de son activité salariée ou indépendante antérieure, ou les articles 27 à 34 (titulaires de pensions ou de rentes) contiennent-ils les règles applicables?
b) Une personne, telle que le père de la requérante, qui n’a pas effectué d’activité salariée ou indépendante depuis 2001, est-elle néanmoins un «travailleur salarié» aux fins de l’article 19 du fait de son activité salariée ou indépendante antérieure?
c) Un demandeur doit-il être considéré comme un «titulaire» aux fins de l’article 28 du fait de l’attribution d’une prestation acquise conformément à l’article 95 ter du règlement n° 1408/71, nonobstant le fait que: i) le demandeur en cause n’ait jamais été un travailleur salarié au sens de l’article 1^er, sous a), du règlement n° 1408/71; ii) qu’il n’ait pas atteint l’âge légal de la retraite; et iii) qu’il ne relève du champ d’application personnel du règlement n° 1408/71 qu’en qualité de
membre de la famille?
d) Lorsqu’un titulaire relève de l’article 28 du règlement n° 1408/71, un membre de sa famille ayant toujours résidé avec lui et dans le même État que lui peut-il demander, conformément à l’article 28, paragraphe 1, lu en combinaison avec l’article 29, une prestation de maladie en espèces auprès de l’institution compétente déterminée par l’article 28, paragraphe 2, lorsque cette prestation est (éventuellement) due au membre de la famille (et n’est pas due au titulaire)?
e) Le cas échéant [en fonction des réponses aux points a) à d) ci-dessus], l’application d’une condition prévue par la législation nationale en matière de sécurité sociale limitant l’acquisition initiale du droit à une prestation de maladie aux personnes ayant antérieurement accompli une période imposée de résidence antérieure dans l’État membre compétent au cours d’une période antérieure définie est-elle compatible avec les dispositions des articles 19 et/ou 28 du règlement n° 1408/71?
3) Si la réponse à la première question est qu’une telle prestation doit être considérée comme une prestation d’invalidité, le libellé de l’article 10 du règlement n° 1408/71, qui vise les prestations «acquises au titre de la législation d’un ou de plusieurs États membres», signifie-t-il que les États membres demeurent habilités au titre du règlement n° 1408/71 à fixer des conditions d’acquisition initiale d’une telle prestation d’invalidité qui sont fondées sur la résidence dans l’État membre
ou sur la preuve de périodes de présence antérieures imposées dans l’État membre, de manière à ce qu’un demandeur ne puisse pas prétendre en premier lieu avoir droit à une telle prestation de la part d’un autre État membre?» (7).
IV – Sur le traitement de la structure et du contenu spécifique des questions posées par le juge de renvoi
28. La particularité de la présente affaire réside dans le fait que, au cours notre réponse, il va nécessairement falloir nous pencher tant sur la structure que sur la pertinence des différentes questions posées, lesquelles seront soumises à une cure d’amaigrissement. Tout simplement dit, je vais m’employer à montrer en quoi la distinction entre prestation de maladie et prestation d’invalidité, objet de la première question et structurant le reste des questions, est pratiquement sans
conséquences; je vais m’efforcer de révéler combien il est difficile de traiter de façon autonome la condition de résidence et la condition de présence; je vais, enfin, m’attacher à démontrer que la question cruciale soulevée par cette affaire est celle de la «résidence habituelle» et que ce n’est que dans ce contexte qu’il sera véritablement possible de se pencher, le moment venu, sur le statut de la requérante, sur sa qualité de membre de la famille d’une personne titulaire d’une pension au sens
du règlement n° 1408/71. Le problème est que cette «reconstruction» des questions posées par la juridiction de renvoi ne peut pas être simplement opérée au tout début de la réponse que nous nous proposons d’apporter, elle ne peut que résulter du raisonnement à suivre. Il faut, à cette fin, présenter au préalable la singularité de ce qui est ici appelé la «prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés».
A – La prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés
29. La singularité de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés, introduite en 2001 (8), réside dans le fait qu’elle constitue une prestation matériellement non contributive (9) inscrite au cœur d’un dispositif plus général, la prestation d’incapacité de droit commun, présentant toutes les caractéristiques d’une prestation contributive.
30. La prestation d’incapacité de droit commun est, en effet, octroyée sous condition, principalement, de cotisation au régime général de sécurité sociale, alors que la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés est octroyée, par dérogation à cette condition, indépendamment de toute cotisation mais sous réserve, pour le demandeur, de remplir une triple condition (10) de résidence et de présence sur le territoire de l’État membre.
31. Elle peut, en effet, être octroyée, à titre personnel, en tant que revenu de remplacement, à toute personne qui, parvenue à l’âge légal de travailler, se trouve dans l’incapacité de travailler en raison d’une maladie ou d’un handicap et ne peut bénéficier de la prestation d’incapacité de droit commun faute d’avoir préalablement cotisé. Telle est la situation de la requérante dans l’affaire au principal, jeune handicapée n’ayant jamais travaillé, qui a demandé à bénéficier de la prestation
d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés à compter du jour de ses 16 ans.
B – La triple condition de résidence et de présence
32. Plus concrètement dit, le bénéfice de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés est subordonné à la triple condition, pour le demandeur, de résider de manière habituelle sur le territoire de l’État membre (condition de résidence habituelle), d’être présent à la date de la demande sur ledit territoire (condition de présence actuelle) et d’avoir été présent sur ce même territoire pendant au moins 26 semaines au cours des 52 semaines précédant la date de la demande
(condition de présence antérieure). Il s’agit donc d’une condition de résidence habituelle en quelque sorte «renforcée» par une double condition de présence.
33. Il faut noter à ce propos et comme le souligne la juridiction de renvoi que, si la demande de la requérante dans l’affaire au principal a été rejetée faute pour celle-ci de remplir la condition de présence sur le territoire de l’État membre à la date de la demande, elle aurait pu tout autant être rejetée faute pour elle de remplir la condition de résidence ou la condition de présence antérieure. Il semble, par ailleurs, ressortir de la deuxième question, sous e), qui ne vise que la
condition de présence antérieure, et de la troisième question, qui vise à la fois la condition de résidence et la condition de présence antérieure, que la juridiction de renvoi considère que ces conditions sont «autonomes», qu’elles jouent de manière autonome et qu’elles doivent, en conséquence, être appréhendées de manière autonome.
34. Or, il doit être insisté sur le fait que les deux conditions de présence n’ont de sens, sur le plan systémique, qu’en relation avec la condition de résidence. Il semble, en effet, exclu de considérer que le législateur national ait pu envisager la possibilité d’octroyer la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés sur le seul fondement de la présence antérieure et/ou de la présence actuelle du demandeur, c’est-à-dire dans un cas dans lequel le demandeur, tout en ne
disposant pas d’une résidence habituelle sur le territoire de l’État membre, remplit les deux autres conditions. Cela revient à dire que, pour autant qu’il puisse être argumenté sur la compatibilité d’une condition de présence antérieure avec le droit de l’Union, en exceptant de manière constante que la condition de résidence habituelle n’est, en tout état de cause, pas compatible, il est clair que la condition de présence antérieure n’a, au sein de la structure de la prestation d’incapacité de
courte durée pour jeunes handicapés, aucune chance d’exister de façon autonome.
35. En conclusion, la distinction tirée par le juge de renvoi entre prestations de maladie et prestations d’invalidité n’emporte, s’agissant de la compatibilité des conditions respectivement soumises à interrogation, savoir la condition de résidence habituelle dans un cas et les conditions de résidence habituelle et de présence antérieure dans l’autre, aucune conséquence, à tout le moins si la condition de résidence habituelle s’avère illégitime dans un cas comme dans l’autre, ce que je
soutiendrai dans un premier temps.
V – La résidence, une condition a priori suspecte d’octroi des prestations sociales au regard du droit de l’Union
36. Les conditions de résidence sont, par principe, «suspectes» en droit de l’Union. Elles sont, d’une manière générale, considérées comme incompatibles avec les dispositions du règlement n° 1408/71 applicables aux prestations de maladie comme aux prestations d’invalidité, dès lors en tout cas qu’elles interviennent à titre «additionnel», c’est-à-dire qu’elles s’ajoutent aux conditions d’ouverture des droits que les États membres sont en droit d’imposer. Je m’efforcerai dans ce premier moment,
ainsi que je l’ai déjà annoncé, de présenter le droit applicable comme si nous avions affaire à une clause de résidence ordinaire.
A – Les prestations d’invalidité
37. L’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, qui pose le principe de la levée des clauses de résidence (11) et garantit l’«exportabilité» des prestations d’invalidité, notamment, a pour objet de favoriser, conformément à l’article 42 CE, la libre circulation des travailleurs en protégeant les intéressés contre les préjudices qui pourraient résulter du transfert de leur résidence d’un État membre à un autre (12).
38. Cette disposition implique non seulement que les intéressés conservent le droit de bénéficier des pensions, rentes et allocations acquises en vertu de la législation de l’un ou de plusieurs États membres, même après avoir fixé leur résidence dans un autre État membre, mais également, ce qui est particulièrement important en l’occurrence, que l’acquisition d’un tel droit ne peut leur être refusé pour la seule raison qu’ils ne résident pas sur le territoire de l’État où se trouve
l’institution débitrice (13). Comme a pu le souligner l’avocat général M. Darmon dans ses conclusions dans l’affaire Stanton Newton(14), précitée, si une telle distinction était admise, il serait très facile de tourner l’interdiction posée par l’article 10 du règlement n° 1408/71: «il suffirait au législateur de ranger les conditions de résidence parmi les conditions d’attribution pour les faire échapper à cette interdiction».
B – Les prestations de maladie
39. L’article 19, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1408/71 prescrit, pour sa part, que le travailleur salarié ou non salarié qui réside sur le territoire d’un État membre autre que l’État membre compétent bénéficie, dans l’État membre de sa résidence, des prestations en espèces servies dans l’État membre compétent, dès lors qu’il satisfait à toutes les autres conditions requises par la législation de ce dernier pour avoir droit auxdites prestations.
40. Cette disposition s’oppose également à toute disposition d’un État membre subordonnant le versement des prestations de maladie à une condition de résidence(15).
41. De même, le membre de la famille d’un travailleur a, en vertu de l’article 19, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71, le droit de réclamer, à l’État membre d’emploi dudit travailleur, le versement des prestations de maladies dans un autre État membre où il a sa résidence, dès lors qu’il en remplit toutes les conditions d’octroi et pour autant qu’il n’ait pas droit à une prestation analogue en vertu de la législation de l’État sur le territoire duquel il réside (16).
42. La Cour a précisé, dans son arrêt Hosse, précité, que l’article 19, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71 visait notamment à ce que l’octroi de prestations de maladie ne soit pas conditionné par la résidence des membres de la famille du travailleur dans l’État membre compétent, afin de ne pas dissuader le travailleur communautaire d’exercer son droit à la libre circulation. Il serait, juge la Cour, «contraire à l’article 19, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71 de priver la fille d’un
travailleur du bénéfice d’une prestation à laquelle elle aurait droit si elle résidait dans l’État compétent» (17).
43. La Cour a, enfin, également reconnu aux titulaires d’une pension ou d’une rente un droit, en vertu de l’article 28 du règlement n° 1408/71, à l’exportation des prestations de maladie (18).
44. Eu égard à la logique de la jurisprudence évoquée ci-dessus, il peut, enfin, être admis que ce droit à l’exportation des prestations de maladie doit également être reconnu aux membres de la famille d’une personne titulaire d’une pension.
45. À cet égard, s’il est vrai que, ainsi que le gouvernement du Royaume-Uni l’a fait valoir, la Cour a pu, dans un premier temps, juger qu’un descendant à charge d’un travailleur migrant ne pouvait, en sa qualité de membre de la famille d’un travailleur prétendre à une allocation pour handicapé prévue par la législation nationale en tant que droit propre (19), elle a, toutefois, ultérieurement sérieusement circonscrit la portée de cette jurisprudence (20).
46. La Cour a, en effet, jugé que la distinction entre droits propres du travailleur et droits dérivés des membres de sa famille n’était pertinente que lorsqu’un membre de la famille invoquait des dispositions du règlement n° 1408/71 applicables exclusivement aux travailleurs, à l’exclusion des membres de leur famille (21).
47. Par conséquent, si le principe de la levée de clauses de résidence de l’article 10 du règlement n° 1408/71 ou le principe de l’«exportabilité» des prestations de maladie s’exprimant à travers la jurisprudence relative aux articles 19 et 28 dudit règlement étaient rigoureusement, et pour ainsi dire, mécaniquement appliqués à la situation en cause dans l’affaire au principal, la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés devrait être versée à la requérante dans ladite
affaire.
48. En conclusion, la Cour pourrait dire pour droit, d’après toute cette jurisprudence, que l’article 10 ou les articles 19 et 28 du règlement n° 1408/71 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application, à une personne dans la situation de la requérante dans l’affaire au principal, d’une condition de résidence renforcée telle que celle en cause au principal, ou encore que le règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la réglementation d’un État
membre subordonnant l’octroi d’une prestation sociale telle que la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés à la condition que le bénéficiaire remplisse des conditions de résidence et de présence antérieure sur le territoire dudit État membre
49. C’est dans cette perspective, et avant de passer aux développements suivants, qu’il importe d’insister sur le fait que la condition de résidence renforcée en cause dans l’affaire au principal ne joue pas un rôle «additionnel» pour assumer, au contraire, une fonction d’une tout autre nature. Dans ces conditions, si telle devait être la réponse de la Cour aux questions préjudicielles de la juridiction de renvoi, la conséquence ne serait pas mineure. Il faut, pour pleinement prendre la mesure
de cette option, garder à l’esprit que, en l’absence de la condition de résidence renforcée, toute personne ressortissante d’un État membre se trouvant dans la situation de la requérante dans l’affaire au principal, c’est-à-dire ayant entre 16 et 20 ans (25 ans au maximum) mais incapable de travailler dans les 196 jours précédant la date de ses 16 ans et ne bénéficiant pas d’un enseignement à plein temps, pourrait demander, et obtenir, la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes
handicapés, sans peut être avoir jamais été affiliée au régime de sécurité sociale dans cet État membre.
50. Cela revient à se poser la question de savoir si le droit de l’Union doit être interprété de telle manière qu’il puisse contraindre un État membre à choisir inéluctablement entre la suppression d’une prestation sociale ainsi conçue et dont les conditions d’octroi dépasseraient les limites du raisonnable et la transformation de ladite prestation sociale de manière à ce qu’elle puisse être qualifiée, en conformité avec la jurisprudence de la Cour, de prestation spéciale à caractère non
contributif. Je ne suis pas d’avis que le droit de l’Union impose une telle alternative.
VI – La condition de résidence renforcée en tant que condition «constitutive» d’un lien de rattachement au regard des exigences du droit de l’Union
51. Il ressort de l’ensemble de la jurisprudence évoquée ci-dessus que, dans tous les cas dans lesquels les conditions de résidence ont été considérées comme incompatibles avec les prescriptions du droit de l’Union, elles intervenaient essentiellement comme conditions «additionnelles» ou complémentaires aux conditions d’acquisition du droit aux prestations sociales, en règle générale les conditions de cotisation au régime de sécurité sociale, et remplissaient donc principalement une fonction
d’exclusion des bénéficiaires ayant fait usage de leur droit à la liberté de circulation. C’est, dans de telles circonstances, à juste titre que la jurisprudence s’est montrée particulièrement exigeante dans son application du principe de levée des clauses de résidence ou du principe d’«exportabilité» des prestations sociales.
52. Pourtant, la condition de résidence renforcée à laquelle la Cour est, dans la présente affaire, confrontée se présente dans un contexte tout à fait différent. C’est sous cet angle qu’il faut apprécier l’argumentation du gouvernement du Royaume-Uni, lorsqu’il fait valoir que la condition de résidence renforcée est une condition d’acquisition du droit à la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés, qui se substitue, dans l’intérêt de ses bénéficiaires, à la condition de
cotisation de droit commun.
53. Disons, à cet égard et de prime abord, que la Cour a itérativement jugé que les États membres avaient conservé leur compétence pour aménager leur système de sécurité sociale, à condition pour ces derniers d’exercer cette compétence dans le respect du droit de l’Union (22). Cette compétence implique qu’il leur appartient de définir à la fois le périmètre de leur système de sécurité sociale et les conditions auxquelles le bénéfice des prestations sociales dispensées dans le cadre dudit
système est subordonné, sous réserve que ces conditions soient conformes au droit de l’Union et principalement qu’elles ne soient pas discriminatoires. C’est aux seuls États membres qu’il incombe de définir l’étendue de la solidarité nationale et les conditions dans lesquelles celle-ci doit s’exprimer. Il leur appartient notamment de distinguer parmi les différentes prestations dispensées, celles qui auront un caractère contributif de celles qui revêtiront les caractéristiques d’une prestation
spéciale à caractère non contributif, toujours dans le respect du droit de l’Union (23).
54. Le règlement n° 1408/71 ne poursuit, en effet, conformément à l’article 42 CE, qu’un objectif de coordination des législations des États membres en matière de sécurité sociale, et non leur harmonisation. Il appartient, ainsi, conformément à une jurisprudence itérative, aux seules législations nationales de sécurité sociale de déterminer les conditions du droit ou de l’obligation de s’affilier à un régime de sécurité sociale ou à telle ou telle branche dudit régime, pour autant que ces
conditions n’opèrent aucune discrimination entre les ressortissants nationaux et les ressortissants des autres États membres (24).
55. C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner la présente condition de résidence renforcée à laquelle le bénéfice de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés est subordonnée, dans la mesure où elle remplace la condition de cotisation de droit commun et remplit, par conséquent, la fonction de lien de rattachement normalement dévolue à cette dernière. Dans cette perspective, je vais, dans un premier temps, m’efforcer d’examiner s’il est, en
principe, possible d’admettre une telle condition de résidence pour, dans un second temps, essayer de dégager les conditions auxquelles elle devrait être soumise.
A – L’examen des possibilités de principe
56. Il importe de faire observer, tout d’abord, que le règlement n° 1408/71 n’exclut pas de façon absolue que la résidence puisse, sous certaines conditions, constituer un critère de rattachement au régime de sécurité sociale d’un État membre, au même titre qu’une période d’emploi. En témoigne, en particulier, l’article 18 du règlement n° 1408/71, qui envisage la possibilité qu’une législation nationale «subordonne l’acquisition, le maintien ou le recouvrement du droit aux prestations à
l’accomplissement de périodes d’assurance, d’emploi ou de résidence» (25).
57. L’article 10 bis du règlement n° 1408/7 prévoit, par ailleurs, expressément la faculté pour les États membres de soumettre l’octroi des prestations spéciales à caractère non contributif à une condition de résidence.
58. Dans un autre registre, si les conditions de résidence sont généralement considérées comme des restrictions à la liberté de circulation au sens de l’article 18 CE, notamment, il est également admis qu’elles peuvent être justifiées (26), au regard du droit de l’Union, à la condition de se fonder sur des considérations objectives d’intérêt général indépendantes de la nationalité des personnes concernées et d’être proportionnées à l’objectif légitimement poursuivi par la réglementation
nationale (27).
59. La Cour a, ainsi, admis que l’utilisation, par le législateur national, de la résidence comme critère de délimitation du cercle des bénéficiaires d’une prestation sociale et donc de l’étendue de l’obligation de solidarité dont cette dernière témoigne, pouvait, en tant que manifestation du degré de rattachement des personnes ainsi incluses à la société à l’origine de cet effort de solidarité, constituer une considération objective d’intérêt général (28) de nature à justifier une restriction
à la liberté de circulation des personnes.
60. C’est à la lumière de ces considérations que le caractère en soi matériellement non contributif de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés prend toute son importance.
61. À bien des égards, en effet, les conditions mêmes d’octroi de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés, en tant que dérogation aux conditions d’octroi de droit commun de la prestation d’incapacité fondées sur le principe des cotisations préalables, constituent la manifestation d’un effort de solidarité répondant incontestablement à des considérations objectives d’intérêt général, en l’occurrence la nécessité de protéger les jeunes travailleurs en incapacité de
travailler non couverts par le régime d’assurance maladie de droit commun.
62. Ainsi que le gouvernement du Royaume-Uni l’a fait valoir, si la condition de résidence renforcée fait effectivement office de condition d’acquisition du droit à la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés, c’est seulement pour pallier l’absence de cotisations préalables de ses bénéficiaires.
63. Ce qui importe n’est pas tant le fait que la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés soit matériellement non contributive que le rôle que la condition de résidence renforcée est appelée à jouer en l’absence de cotisations, c’est-à-dire dans une situation dans laquelle il n’existe aucun autre lien de rattachement entre la prestation et son bénéficiaire, ni même entre l’État membre considéré comme compétent et le demandeur de la prestation.
64. Autrement dit, la condition de résidence renforcée fait office de substitut aux cotisations au régime de sécurité sociale (29), elle intervient en tant que lien de rattachement indispensable et c’est ainsi qu’elle doit être analysée, c’est-à-dire comme un lien de rattachement entre la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés et ses bénéficiaires. Elle remplit alors une fonction non pas «additionnelle» aux conditions d’ouverture du droit à la prestation mais
«constitutive» du lien de rattachement entre le régime de sécurité sociale dans lequel la prestation s’inscrit et ses bénéficiaires ne remplissant pas les conditions de cotisation.
65. De ce point de vue, cette condition de résidence renforcée est conçue dans l’objectif d’inclure, dans le cercle des bénéficiaires de la prestation d’incapacité en général, les jeunes handicapés qui ne remplissent pas les conditions de cotisation et non en vue d’exclure du bénéfice de la prestation les jeunes handicapés résidant dans un autre État membre.
66. Toutefois, la seule circonstance que la condition de résidence renforcée ne poursuive aucun objectif discriminatoire n’implique pas qu’elle doive automatiquement être regardée comme compatible avec le droit de l’Union. Encore faut-il s’assurer quelle ne produise aucun effet discriminatoire et veiller à ce que son application soit parfaitement compatible avec les dispositions du règlement n° 1408/71 ainsi qu’avec les dispositions du traité et les principes généraux du droit de l’Union. C’est
ainsi que se pose l’incontournable question de ses conditions d’admission.
B – L’examen des conditions d’admissibilité
67. Une condition de résidence renforcée comme celle posée par la réglementation du Royaume-Uni en cause dans l’affaire au principal ne peut, le cas échéant, être justifiée qu’à la double condition qu’elle joue le rôle d’un lien de rattachement et qu’elle ne puisse jouer qu’en l’absence de tout autre lien de rattachement.
68. La Cour a jugé, à cet égard, qu’une condition de résidence ne peut pas être réputée constituer un signe suffisamment indicatif du rattachement des demandeurs à l’État membre qui octroie la prestation lorsqu’elle est susceptible de conduire à des résultats divergents pour des personnes établies dans un autre État membre et dont le niveau d’intégration dans la société de l’État membre qui octroie la prestation considérée est en tous points comparable (30).
69. C’est dans cette perspective qu’il convient d’examiner la deuxième question, sous e), de la juridiction de renvoi. Cette dernière se demande, en effet, si la condition de présence antérieure, qu’elle envisage isolément en faisant abstraction des autres conditions et en particulier de la condition de résidence habituelle, est compatible avec les dispositions des articles 19 et/ou 28 du règlement n° 1408/71. Or, à supposer même que la condition de résidence antérieure puisse trouver à
s’appliquer indépendamment de la condition de résidence habituelle (31), il incomberait à la juridiction de renvoi d’examiner si et dans quelle mesure elle peut remplir une fonction de lien de rattachement et être considérée comme suffisante pour établir le degré d’intégration requis.
70. La condition de résidence éventuellement admise comme lien de rattachement ne saurait, par ailleurs, sous peine de méconnaître la jurisprudence relative aux principes de levée des clauses de résidence et d’«exportabilité» des prestations évoquée ci-dessus, être opposée à une personne déjà titulaire du droit à une prestation de maladie ou d’invalidité.
71. Une condition «constitutive» de résidence n’est donc admissible que dans une fonction d’inclusion, à titre de condition d’ouverture du droit à la prestation. Une fois sa fonction de lien de rattachement consommée, elle ne doit plus pouvoir jouer.
72. Enfin, les circonstances de l’espèce nous conduisent à examiner la question de savoir si un lien indirect d’affiliation peut être considéré comme un lien de rattachement suffisant de nature à exclure, dans le cas d’espèce, qu’une condition de résidence puisse être opposable.
73. Serait-il possible d’admettre que la condition de résidence renforcée en cause dans l’affaire au principal est inopposable à la requérante dans ladite affaire, dans la mesure où ses liens de parenté avec une personne relevant du champ d’application du règlement n° 1408/71 constituent un lien indirect de rattachement au régime de sécurité sociale du Royaume-Uni?
74. C’est, on le perçoit aisément, de ce point de vue que la question du statut de la requérante au regard du règlement n° 1408/71, et de celui de ses parents au regard du régime de sécurité sociale du Royaume-Uni, se pose avec une particulière acuité, ces derniers devant être examinés en considération des caractéristiques de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés.
75. La requérante dans l’affaire au principal peut-elle revendiquer l’«exportation» d’une prestation, à laquelle elle a droit à titre personnel, en exploitant sa qualité de membre de la famille d’une personne titulaire d’une pension relevant des dispositions de l’article 28 du règlement n° 1408/71, en exploitant le lien de rattachement unissant cette personne au régime de sécurité sociale dispensateur?
76. Il faut rappeler qu’un État membre peut en principe, ainsi que nous venons de le voir, organiser un régime de sécurité sociale subordonnant le bénéfice d’une prestation sociale, qu’il s’agisse d’une prestation de maladie ou d’une prestation d’invalidité, à la condition pour le demandeur de remplir une condition de résidence, pour autant que cette condition ait pour seul objet d’établir un lien de rattachement dudit demandeur audit régime et ne soit opposable qu’en l’absence de tout autre
lien de rattachement comparable.
77. Il est, de même et a fortiori, en droit de décider de l’intensité et de la nature du lien de rattachement requis. Les États membres demeurant compétents, ainsi qu’il a été souligné ci-dessus, pour établir les conditions d’affiliation au régime de sécurité sociale national et fixer les conditions d’ouverture du droit à une prestation, pour autant qu’elles soient conformes au droit de l’Union, il peut s’en déduire que c’est normalement au législateur national qu’il appartient, plus largement
et le cas échéant, d’identifier les liens de rattachement éventuellement susceptibles de se substituer aux traditionnels liens d’emploi ou de cotisation(32).
78. Par conséquent, en l’absence de toute prescription à cet égard dans la réglementation nationale, c’est à la juridiction de renvoi qu’il incombe de déterminer si le lien de parenté de la requérante dans l’affaire au principal pourrait être constitutif d’un tel lien de rattachement et, en conséquence, considéré comme suffisant pour écarter l’application de la condition de résidence renforcée et se substituer à celle-ci. Dans les circonstances de l’affaire au principal, la Cour ne saurait, en
effet, substituer son appréciation à celle de la juridiction de renvoi aux fins de déterminer si, eu égard au fait que la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés est versée à titre personnel aux personnes dans l’incapacité de travailler, elle peut ou doit être versée à une personne dans la situation de la requérante dans l’affaire au principal, du seul fait qu’elle est membre de la famille de personnes affiliées au régime de sécurité sociale de l’État membre en cause et
dépendante de ces derniers.
VII – Conclusion
79. Je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées à la Cour par l’Upper Tribunal (Administrative Appeals Chamber) de la manière suivante:
«1) Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale soumettant à une condition de résidence le bénéfice d’une prestation sociale telle que la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés en cause au principal, que cette dernière soit classée comme prestation d’invalidité ou comme prestation de maladie en vertu du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité
sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, pour autant que cette condition, appliquée par dérogation à une condition de cotisation préalable et se substituant à cette dernière, premièrement ne remplisse qu’une fonction de lien de rattachement du demandeur au régime de sécurité sociale dans lequel s’inscrit ladite prestation et deuxièmement
ne puisse être opposée à des personnes justifiant éventuellement d’un lien de rattachement de valeur comparable.
2) Il appartient, dans les circonstances de l’affaire au principal, à la juridiction de renvoi de déterminer, en l’absence de toute précision à cet égard dans la réglementation nationale, s’il peut être considéré que la situation de la requérante dans l’affaire au principal, et en particulier sa qualité de membre de la famille d’une personne titulaire d’une pension au sens de l’article 28 du règlement n° 1408/71, tel que modifié par le règlement n° 647/2005, permet de conclure à l’existence
d’un lien de rattachement suffisant de nature à exclure que puisse lui être opposée ladite condition de résidence.»
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1 – Langue originale: le français.
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2 – Règlement du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005 (JO L 117, p. 1, ci-après le «règlement n° 1408/71»).
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3 – Telle que modifiée par le Social Security (Incapacity for Work) Act 1994, article 1, paragraphe 1, et le Welfare Reform and Pensions Act 1999, article 64; ci-après la «SSCBA».
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4 – Welfare Reform and Pensions Act 1999, article 64.
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5 – Ci-après le «SSIBR».
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6 – Ci-après la «DLA».
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7 – Dans sa décision de renvoi, la juridiction de renvoi a également indiqué que la Commission avait engagé contre le Royaume-Uni une procédure en constatation de manquement à l’égard de la condition de résidence antérieure à laquelle l’octroi des prestations d’invalidité classifiées comme prestations de maladie est subordonné. Elle a, toutefois, expressément indiqué qu’elle n’estimait pas devoir modifier ses questions préjudicielles pour en tenir compte. Il ressort, en effet, d’un communiqué
de presse («Sécurité sociale: l’UE prend des mesures pour garantir le versement de prestations aux Britanniques résidant à l’étranger», communiqué de presse IP/10/7999, 24 juin 2010) que la Commission a officiellement enjoint au Royaume-Uni de verser à ses propres ressortissants résidant dans un autre État membre certaines prestations de sécurité sociale. Elle considère comme contraire au droit de l’Union, tant aux règlements n° 1408/71 et n° 883/2004 qu’aux règles relatives à la citoyenneté
européenne et à la libre circulation des personnes, la condition de présence antérieure à laquelle serait subordonné le bénéfice de l’allocation de subsistance pour handicapés («disability living allowance»), l’allocation pour aide d’une tierce personne («attendance allowance») et l’allocation pour garde d’invalide («carer’s allowance»), considérées comme des «prestations de maladie en espèces» destinées à protéger les personnes qui ont besoin de soins particuliers, ainsi que celles et ceux qui
veillent sur elles. Ces trois prestations avaient été classées comme prestations spéciales à caractère non contributif et comme telles inscrites à l’annexe II bis du règlement n° 1408/71 avant d’être requalifiées par la Cour dans son arrêt du 18 octobre 2007, Commission/Parlement et Conseil (C‑299/05, Rec. p. I‑8695).
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8 – La prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés, mise en place en vertu du Welfare Reform and Pensions Act 1999, section 64, modifiant l’article 30A de la SSCBA, est entrée en vigueur le 6 avril 2001.
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9 – Elle est, pourtant, qualifiée de contributive par la réglementation du Royaume-Uni et, par voie de conséquence, par la juridiction de renvoi, et doit également être considérée comme n’étant pas une prestation spéciale à caractère non contributif relevant des dispositions de l’article 10 bis du règlement n° 1408/71, faute de figurer dans la liste de l’annexe II bis dudit règlement et faute de pouvoir l’être en l’absence de modification dudit règlement par le législateur de l’Union, ainsi qu’il
résulte des articles 5 et 97 du règlement n° 1408/71. Il semble, pourtant, que cette absence de cotisation n’exerce aucune influence ni sur le financement de la prestation d’incapacité de courte durée pour jeunes handicapés ni sur les modalités de son versement par le Fonds d’assurance national.
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10 – Sous réserve de ce qui se révélera par la suite.
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11 – En l’absence, toutefois, de modalités particulières d’application au sens de l’annexe VI du règlement n° 1408/71; voir, notamment, arrêts du 2 mai 1990, Winter-Lutzins (C‑293/88, Rec. p. I‑1623) et du 25 février 1986, Spruyt (284/84, Rec. p. 685). En l’occurrence, l’annexe VI dudit règlement ne comporte aucune modalité particulière concernant la prestation sociale en cause au principal ou encore la situation de la requérante dans l’affaire au principal.
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12 – Déjà, sous l’empire du règlement n° 3 du Conseil, du 25 septembre 1958, concernant la sécurité sociale des travailleurs migrants (JO 1958, 30, p. 561), voir arrêts du 7 novembre 1973, Smieja (51/73, Rec. p. 1213, points 14 et 15); pour les prestations de vieillesse, celui du 5 mai 1983, Piscitello (139/82, Rec. p. 1427, point 15); Winter-Lutzins, précité, point 15, et du 30 mars 1993, de Wit (C‑282/91, Rec. p. I‑1221, point 18).
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13 – Sous l’empire du règlement n° 3 déjà, voir arrêt du 10 juin 1982, Camera (92/81, Rec. p. 2213, point 14); pour les prestations d’invalidité, arrêts du 23 octobre 1986, van Roosmalen (300/84, Rec. p. 3097, point 39), et du 20 juin 1991, Stanton Newton (C‑356/89, Rec. p. I‑3017, points 23-24); pour une prestation spécifique, assimilable à une prestation de vieillesse et à une prestation d’invalidité, arrêts du 24 février 1987, Giletti e.a. (379/85 à 381/85 et 93/86, Rec. 1987 p. 955, points 14 à
16); du 12 juillet 1990, Commission/France (C‑236/88, Rec. p. I‑3163, point 11), et du 6 juillet 2000, Movrin (C‑73/99, Rec. p. I‑5625, point 33).
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14 – Conclusions du 5 mars 1991, point 23.
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15 – Arrêts du 5 mars 1998, Molenaar (C‑160/96, Rec. p. I‑843, points 38 et 39), et du 8 mars 2001, Jauch (C-215/99, Rec. p. I-1901).
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16 – Arrêt du 21 février 2006, Hosse (C‑286/03, Rec. p. I‑1771, points 47 à 56).
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17 – Ibidem, point 55.
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18 – Arrêt Molenaar, précité (points 38 et 39). Voir également les conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire da Silva Martins, pendante devant la Cour (C-388/09, points 69 et suiv.).
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19 – Arrêts du 23 novembre 1976, Kermaschek (40/76, Rec. p. 1669, points 6 à 9); du 20 juin 1985, Deak (94/84, Rec. p. 1873, points 12 à 14); du 16 juillet 1992, Hughes (C‑78/91, Rec. p. I‑4839, point 25), et du 27 mai 1993, Schmid (C‑310/91, Rec. p. I‑3011, points 12 à 14); pour un ressortissant d’un État tiers, conjoint d’un travailleur ressortissant d’un État membre, voir arrêt du 8 juillet 1992, Taghavi (C‑243/91, Rec. p. I‑4401).
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20 – Arrêts du 30 avril 1996, Cabanis-Issarte (C‑308/93, Rec. p. I‑2097), et du 10 octobre 1996, Hoever et Zachow (C‑245/94 et C‑312/94, Rec. p. I‑4895).
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21 – Ce principe ne joue pas dans le cas des prestations familiales; voir, outre les deux arrêts cités ci-dessus, arrêt du 15 mars 2001, Offermanns (C‑85/99, Rec. p. I‑2261, point 34). Il ne joue pas non plus dans le cas des prestations de maladie; voir arrêt Hosse, précité (point 53).
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22 – Voir, notamment, arrêts du 28 avril 1998, Kohll (C‑158/96, Rec. p. I‑1931, points 17 à 19); du 28 avril 1998, Decker (C‑120/95, Rec. p. I‑1831, points 21 à 23); du 26 janvier 1999, Terhoeve (C‑18/95, Rec. p. I‑345, points 34 et 35); du 23 novembre 2000, Elsen (C‑135/99, Rec. p. I‑10409, point 33); du 7 juillet 2005, van Pommeren-Bourgondiën (C‑227/03, Rec. p. I‑6101, point 39), et du 1^er avril 2008, Gouvernement de la Communauté française et Gouvernement wallon (C‑212/06, Rec. p. I‑1683, point
43).
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23 – La Cour a eu l’occasion, à cet égard, aussi bien de confirmer (voir arrêt du 4 novembre 1997, Snares, C‑20/96, Rec. p. I‑6057) que d’infirmer, dans le cadre d’une procédure préjudicielle (arrêt du 31 mai 2001, Leclere et Deaconescu, C-43/99, Rec. p. I-4265) comme dans le cadre d’un recours en constatation de manquement (arrêt du 18 octobre 2007, Commission/Parlement et Conseil, C‑299/05, Rec. p. I‑8695), la qualification d’une prestation comme prestation spéciale à caractère non contributif.
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24 – Voir, notamment, arrêts du 12 juillet 1979, Brunori (266/78, Rec. p. 2705); du 24 avril 1980, Coonan (110/79, Rec. p. 1445, point 12); du 24 septembre 1987, de Rijke (43/86, Rec. p. 3611, point 12); du 18 mai 1989, Hartmann Troiani (368/87, Rec. p. 1333, point 21); du 21 février 1991, Daalmeijer (C‑245/88, Rec. p. I‑555, point 15); du 20 octobre 1993, Baglieri (C‑297/92, Rec. p. I‑5211, point 13), et du 9 mars 2006, Piatkowski (C‑493/04, Rec. p. I‑2369, point 32).
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25 – La mention des périodes «d’emploi ou de résidence» résulte déjà de la modification de cette disposition par le règlement (CEE) n° 2864/72 du Conseil, du 19 décembre 1972, modifiant le règlement n° 1408/71 (JO L 306, p. 1). Cette modification s’imposait à raison des orientations définies à la partie VII de l’annexe II de l’acte relatif aux conditions d’adhésion et aux adaptations des traités, annexé aux actes relatifs à l’adhésion aux Communautés européennes du Royaume de Danemark, de l’Irlande
et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (JO 1972, L 73, p. 143).
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26– Au delà des «limitations et conditions prévues par le […] traité et par les dispositions prises pour son application», pour reprendre la formulation de l’article 18, paragraphe 1, CE.
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27 – Arrêts du 18 juillet 2006, De Cuyper (C‑406/04, Rec. p. I‑6947, point 40), et du 4 décembre 2008, Zablocka-Weyhermüller (C‑221/07, Rec. p. I‑9029, point 37).
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28 – Arrêt du 26 octobre 2006, Tas-Hagen et Tas (C‑192/05, Rec. p. I‑10451, point 34).
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29 – Le gouvernement du Royaume-Uni se réfère, à cet égard, de façon tout à fait significative à l’arrêt du 21 février 1991, Daalmeijer (C‑245/88, Rec. p. I‑555).
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30 – Arrêt Tas-Hagen et Tas, précité (point 38). Dans cette affaire, le bénéfice de la prestation en cause était subordonné à la condition pour le demandeur de résider sur le territoire de l’État membre à la date de la demande, condition qui ne pouvait permettre d’établir l’intégration du demandeur à la société dudit État membre et donc servir véritablement de lien de rattachement. Voir, à cet égard, l’analyse de l’avocat général M^me Kokott (points 66 à 68).
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31 – Cette hypothèse semble, ainsi qu’il a déjà été souligné ci-dessus, difficile à envisager, mais c’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient, le cas échéant, de se prononcer à cet égard.
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32 – Il doit, à cet égard, être souligné, plus largement, que c’est aux États membres qu’il appartient de configurer leur système de sécurité sociale et de définir l’orientation générale des objectifs sociaux qu’ils entendent poursuivre en décidant, notamment, dans le respect du droit de l’Union, de la répartition de leurs efforts de solidarité entre prestations sociales, prestations spéciales à caractère non contributif et aide sociale.