CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. Yves Bot
présentées le 30 juin 2011 (1)
Affaires jointes C‑463/10 P et C‑475/10 P
Deutsche Post AG (C‑463/10 P),
République fédérale d’Allemagne (C‑475/10 P)
contre
Commission européenne
«Pourvois – Aides d’État – Mesures prises par les autorités allemandes en faveur de Deutsche Post AG – Règlement (CE) n° 659/1999 – Article 10, paragraphe 3 – Article 230 CE – Recevabilité du recours en annulation formé contre une décision portant injonction de fournir des informations – Notion d’‘acte attaquable’ – Principe de la protection juridictionnelle effective – Qualité pour agir de Deutsche Post AG»
1. Les présentes affaires devraient conduire la Cour à préciser si une décision par laquelle la Commission européenne enjoint à un État membre de fournir des informations concernant une aide prétendument illégale constitue un acte attaquable.
2. Par leurs pourvois, Deutsche Post AG (2) et la République fédérale d’Allemagne demandent l’annulation des ordonnances du Tribunal de l’Union européenne du 14 juillet 2010, Deutsche Post/Commission (T‑570/08), et Allemagne/Commission (T‑571/08) (3). Par ces ordonnances, celui-ci a rejeté comme étant irrecevables leurs recours tendant à l’annulation de la décision par laquelle la Commission a, conformément à l’article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659/1999 (4), enjoint à la
République fédérale d’Allemagne de fournir des informations concernant les coûts et les recettes de Deutsche Post pour la période allant de l’année 1989 à l’année 2007 (5).
3. Dans les présentes conclusions, nous proposerons à la Cour d’accueillir ces pourvois, d’annuler les ordonnances attaquées et de statuer définitivement sur la recevabilité des recours introduits en première instance.
4. Nous soutiendrons, en effet, que, malgré le caractère préparatoire d’une injonction de fournir des informations, cet acte constitue le terme ultime de la procédure d’enquête ouverte par la Commission et produit des effets juridiques contraignants et immédiats à l’égard de l’État membre concerné. Nous exposerons, par conséquent, que ledit acte doit pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel de façon à garantir une protection juridictionnelle effective audit État, et ce conformément
à la jurisprudence de la Cour.
I – Le cadre juridique de l’Union
5. Le règlement a codifié la pratique des pouvoirs conférés à la Commission par le traité CE. Il édicte des règles qui ont été rédigées en conformité avec la jurisprudence de la Cour (6).
6. Lorsqu’un État membre notifie un projet d’octroi d’une aide nouvelle à la Commission, cet État est, conformément à l’article 2, paragraphe 2, du règlement, tenu de fournir «tous les renseignements nécessaires pour permettre à la Commission de prendre une décision conformément aux articles 4 et 7 [du règlement]».
7. L’article 5, paragraphes 1 et 2, du règlement dispose ce qui suit:
«1. Si la Commission considère que les informations fournies par l’État membre concerné au sujet d’une mesure notifiée conformément à l’article 2 sont incomplètes, elle demande tous les renseignements complémentaires dont elle a besoin. Si un État membre répond à une telle demande, la Commission informe l’État membre de la réception de la réponse.
2. Si l’État membre ne fournit pas les renseignements demandés dans le délai imparti par la Commission, ou les lui fournit de façon incomplète, celle-ci lui adresse un rappel, en fixant un délai supplémentaire adéquat dans lequel les renseignements doivent être communiqués.»
8. Les articles 10 à 13 du règlement s’inscrivent dans le chapitre III de celui-ci, intitulé «Procédure en matière d’aides illégales».
9. L’article 10 du règlement est rédigé dans les termes suivants:
«1. Lorsque la Commission a en sa possession des informations concernant une aide prétendue illégale, quelle qu’en soit la source, elle examine ces informations sans délai.
2. Le cas échéant, elle demande à l’État membre concerné de lui fournir des renseignements. L’article 2, paragraphe 2, et l’article 5, paragraphes 1 et 2, s’appliquent mutatis mutandis.
3. Si, en dépit du rappel qui lui a été adressé en vertu de l’article 5, paragraphe 2, l’État membre concerné ne fournit pas les renseignements demandés dans le délai imparti par la Commission ou les fournit de façon incomplète, la Commission arrête une décision lui enjoignant de fournir lesdits renseignements […]. Cette décision précise la nature des informations requises et fixe un délai approprié pour leur communication.»
10. En vertu de l’article 11 du règlement, la Commission peut, après avoir donné à l’État membre concerné la possibilité de présenter ses observations, arrêter une décision enjoignant audit État de suspendre le versement de l’aide en cause et/ou de la récupérer provisoirement, jusqu’à ce qu’elle statue sur la compatibilité de cette aide avec le marché commun.
11. L’article 12 du règlement est libellé comme suit:
«Dans le cas où l’État membre omet de se conformer à une injonction de suspension ou de récupération, la Commission est habilitée, tout en examinant le fond de l’affaire sur la base des informations disponibles, à saisir directement la Cour […] afin qu’elle déclare que ce non-respect constitue une violation du traité.»
12. Enfin, aux termes de l’article 13, paragraphe 1, du règlement:
«L’examen d’une éventuelle aide illégale débouche sur l’adoption d’une décision au titre de l’article 4, paragraphes 2, 3 ou 4. Dans le cas d’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, la procédure est clôturée par voie de décision au titre de l’article 7. Au cas où un État membre omet de se conformer à une injonction de fournir des informations, cette décision est prise sur la base des renseignements disponibles.»
II – Les faits à l’origine des présentes affaires
13. À la suite de plaintes déposées par des opérateurs privés, la Commission a constaté que Deutsche Post facturait les colis de porte à porte à des prix inférieurs aux coûts marginaux et que cette politique de rabais agressive ne relevait pas de l’obligation de service universel de l’entreprise.
14. Par décision du 19 juin 2002 (7), la Commission a estimé que les pertes d’un montant de 572 millions d’euros qui en ont résulté constituaient une aide d’État incompatible avec le marché commun et a ordonné à la République fédérale d’Allemagne de prendre toutes les mesures qui s’imposaient pour exiger de Deutsche Post la restitution de l’aide.
15. Par la suite, la Commission a reçu de nouvelles plaintes de la part de concurrents privés, alléguant que Deutsche Post bénéficiait d’avantages considérablement plus importants que ceux visés dans la décision 2002/753. La Commission a estimé nécessaire de traiter l’intégralité des distorsions de concurrence résultant des ressources d’État accordées à Deutsche Post en ouvrant, le 12 septembre 2007, une nouvelle procédure formelle d’examen conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE (8).
16. Par un arrêt du 1^er juillet 2008 (9), le Tribunal a annulé la décision 2002/753, jugeant que la Commission avait violé l’article 87, paragraphe 1, CE dans le cadre de son examen de la compatibilité de l’aide en cause avec le marché commun.
17. Le 17 juillet 2008, la Commission a transmis à la République fédérale d’Allemagne une demande de renseignements comprenant un questionnaire sur les recettes et les coûts de Deutsche Post pour la période allant de l’année 1989 à l’année 2007. Les 12 et 21 août 2008, la Commission a envoyé une lettre de rappel demandant une nouvelle fois audit État la communication des informations demandées (10).
18. Dans ses réponses des 5 août, 14 août et 29 septembre 2008, la République fédérale d’Allemagne a confirmé qu’elle refusait de transmettre les données relatives aux produits et aux charges de Deutsche Post postérieures à l’année 1995, estimant que l’examen de la Commission devrait se limiter à la période allant de l’année 1989 à l’année 1994 et que la réponse à ce questionnaire exigerait un investissement en temps et en travail disproportionné.
19. Par courrier du 30 octobre 2008, la Commission a enjoint à la République fédérale d’Allemagne, en application de l’article 10, paragraphe 3, du règlement, de fournir dans les 20 jours toutes les informations nécessaires pour répondre audit questionnaire. La Commission a ajouté que, si, malgré cette injonction, les autorités allemandes ne fournissaient pas dans les délais les informations demandées, elle prendrait sa décision sur la base des renseignements disponibles, conformément à
l’article 13, paragraphe 1, du règlement.
20. Dans un arrêt du 2 septembre 2010 (11), la Cour a confirmé, sur pourvoi, l’annulation de la décision 2002/753.
III – La procédure devant le Tribunal et les ordonnances attaquées
21. Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 22 décembre 2008, Deutsche Post (affaire T‑570/08) et la République fédérale d’Allemagne (affaire T‑571/08) ont chacune introduit un recours en annulation contre l’acte litigieux.
22. Par actes séparés déposés au greffe du Tribunal le 19 mars 2009, la Commission a soulevé, dans chacune de ces affaires, une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.
23. Le Tribunal a fait droit à cette exception en jugeant que l’acte litigieux ne constitue pas un acte attaquable au sens de la jurisprudence.
24. Le Tribunal (12) a, tout d’abord, rappelé les principes fixés par la Cour dans les arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (13), et du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission (14). D’une part, il a relevé qu’il y a lieu de s’attacher à la substance d’un acte, et non à sa forme, afin de déterminer si celui-ci constitue un acte attaquable au sens de l’article 230 CE. D’autre part, il a indiqué que seules les mesures qui fixent définitivement la position de la Commission et qui
produisent des effets juridiques constituent des actes attaquables. Par conséquent, le Tribunal a examiné si, comme le soutenait la Commission, l’acte litigieux constitue une mesure intermédiaire dont l’objectif est de préparer la décision finale de la Commission et qui est dépourvue d’effets juridiques.
25. En ce qui concerne les effets de l’acte litigieux, le Tribunal a indiqué que le législateur communautaire n’a prévu aucune sanction à l’égard de l’État membre dès lors que celui-ci omet de se conformer à l’injonction de la Commission (15). Cela permettrait de distinguer l’acte litigieux des injonctions de suspension et de récupération des aides que la Commission est autorisée à adopter en vertu de l’article 11 du règlement. En effet, si un État membre omettait de se conformer à l’une de ces
deux injonctions, l’article 12 du règlement autoriserait la Commission à saisir directement la Cour afin que soit constatée une violation du traité.
26. Le Tribunal a, ensuite, relevé que l’acte litigieux ne constitue qu’une mesure intermédiaire permettant à la Commission de préparer sa décision finale (16). Il assurerait le respect du principe du contradictoire en permettant à la Commission d’obtenir les informations nécessaires à l’appréciation de la compatibilité de l’aide avec le marché commun, mais il ne préjugerait pas de la décision finale de la Commission, celle-ci pouvant encore, à ce stade, conclure à l’inexistence d’une aide
d’État, à la compatibilité ou à l’incompatibilité de celle-ci avec le marché commun.
27. Puis, le Tribunal a rejeté les arguments des requérantes tendant à dresser un parallèle entre l’acte litigieux et la décision par laquelle la Commission ouvre la procédure formelle d’examen de l’aide (17). Les requérantes, en se référant à la jurisprudence relative à la recevabilité des recours introduits contre une telle décision, soutenaient que, malgré sa nature provisoire, cette décision était considérée comme un acte attaquable (18). Le Tribunal a refusé de faire un tel parallèle au
motif que les effets de ladite décision ne sont pas comparables à ceux de l’acte litigieux.
28. En ce qui concerne les effets juridiques concrets de l’acte litigieux sur la situation de la République fédérale d’Allemagne, le Tribunal a constaté que cet acte n’a pas pour effet de clôturer la procédure formelle d’examen (19). Ce serait uniquement le refus de l’État membre de répondre à l’injonction sollicitée qui permettrait à la Commission de clôturer celle-ci.
29. S’agissant de la détérioration prétendue de la situation procédurale de Deutsche Post et de la République fédérale d’Allemagne en cas de non‑respect de l’acte litigieux, le Tribunal a fait valoir, aux points 42 des ordonnances attaquées, que c’est le refus des autorités allemandes de fournir à la Commission les informations requises dans l’acte litigieux, et non pas l’acte litigieux en tant que tel, qui est susceptible de priver les intéressés concernés de la possibilité de dénoncer le
caractère lacunaire du fondement factuel de la décision finale. Selon le Tribunal, si les autorités allemandes considèrent que les informations demandées par la Commission ne sont pas nécessaires pour établir les faits ou que les recherches demandées sont trop onéreuses par rapport au résultat escompté, elles peuvent choisir d’ignorer l’injonction qui leur est faite.
30. En tout état de cause, le Tribunal a rappelé, aux points 43 des ordonnances attaquées, que l’acte litigieux ne saurait être considéré comme mettant fin à l’obligation de la Commission d’étayer suffisamment sa décision finale et interdisant à Deutsche Post et à la République fédérale d’Allemagne toute contestation du fondement de celle-ci.
31. S’agissant du respect des droits de la défense de la République fédérale d’Allemagne, le Tribunal a relevé que ceux-ci ont été assurés par la possibilité de contester les faits allégués par la Commission tout au long de la procédure administrative et qu’ils le demeurent par la possibilité de former un recours contre la décision finale.
32. Le Tribunal a conclu, au point 46 de l’ordonnance Deutsche Post/Commission, précitée, et au point 45 de l’ordonnance Allemagne/Commission, précitée, que l’acte litigieux ne constitue pas un acte attaquable au sens de l’article 230 CE.
IV – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties
33. Dans l’affaire C‑463/10 P, Deutsche Post demande à la Cour d’annuler l’ordonnance Deutsche Post/Commission, précitée, et de condamner la Commission aux dépens.
34. La Commission demande, quant à elle, à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner Deutsche Post aux dépens.
35. Dans l’affaire C‑475/10 P, la République fédérale d’Allemagne demande à la Cour d’annuler l’ordonnance Allemagne/Commission, précitée, et de condamner la Commission aux dépens.
36. La Commission demande, quant à elle, à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner la République fédérale d’Allemagne aux dépens.
37. Par ordonnance du 15 décembre 2010, le président de la Cour a décidé de joindre les affaires C‑463/10 P et C‑475/10 P aux fins de la procédure orale ainsi que de l’arrêt.
V – Sur les pourvois
A – L’argumentation des parties
38. Deutsche Post et la République fédérale d’Allemagne soutiennent que les ordonnances attaquées sont entachées de plusieurs erreurs de droit en ce que le Tribunal n’a pas qualifié l’acte litigieux d’acte attaquable au sens de l’article 230 CE. Elles soutiennent que, contrairement à ce que le Tribunal a jugé, une injonction de fournir des informations au titre de l’article 10, paragraphe 3, du règlement produit des effets juridiques obligatoires et constitue, dès lors, un acte attaquable au
sens de l’article 230 CE.
39. Elles invoquent cinq moyens à l’appui de leurs pourvois. Les trois premiers moyens sont tirés de la méconnaissance, respectivement, de l’article 249 CE, de la jurisprudence de la Cour relative à la nature des actes attaquables et des effets juridiques de l’acte litigieux. Le quatrième moyen est tiré de la violation du principe de la protection juridictionnelle effective et le cinquième moyen est tiré de la méconnaissance de la répartition des compétences entre la Commission et les États
membres.
1. Sur le premier moyen, tiré de la méconnaissance de l’article 249 CE
40. Deutsche Post et la République fédérale d’Allemagne font valoir que l’article 10, paragraphe 3, du règlement habilite expressément la Commission à adopter une décision formelle. Or, en vertu de l’article 249, quatrième alinéa, CE, un tel acte serait obligatoire dans tous ses éléments à l’égard des personnes qu’il désigne.
41. Deutsche Post et la République fédérale d’Allemagne se réfèrent également au principe de coopération loyale visé à l’article 10 CE ainsi qu’au sixième considérant du règlement afin de démontrer le caractère contraignant de l’acte litigieux. L’État membre qui ne s’acquitterait pas de l’obligation fixée dans l’acte litigieux violerait le traité et s’exposerait, par conséquent, à une procédure en manquement.
42. Le caractère obligatoire de l’acte litigieux affecterait également Deutsche Post en tant que bénéficiaire de l’aide. En effet, la République fédérale d’Allemagne devrait nécessairement obtenir la collaboration de cette entreprise afin de s’acquitter de son obligation. En outre, cette dernière serait la seule à disposer des informations demandées.
43. La Commission soutient, en substance, que, conformément à la jurisprudence, il convient de se fonder non pas sur la forme d’un acte, mais sur sa substance afin de déterminer si un recours en annulation peut être introduit. Seules les mesures susceptibles de produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant constitueraient des actes attaquables au sens de l’article 230 CE (20). Or, une décision au sens de l’article 249 CE ne remplirait pas
automatiquement ce critère (21).
2. Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance de la jurisprudence relative à la nature des actes attaquables
44. La République fédérale d’Allemagne conteste l’application au cas d’espèce du principe établi dans l’arrêt IBM/Commission, précité (22), selon lequel ne constitue un acte attaquable que la mesure qui fixe définitivement la position de l’institution au terme d’une procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires. En se référant à la jurisprudence de la Cour, la République fédérale d’Allemagne soutient qu’un tel principe n’est pas transposable dans le domaine des aides d’État.
45. Deutsche Post souligne que la nature provisoire des injonctions de fournir des informations et des injonctions de suspension n’implique pas que ces actes soient dépourvus d’effet juridique propre (23). À cet égard, la Cour aurait déjà reconnu que les injonctions de suspension constituent des actes attaquables (24).
46. La Commission rappelle qu’aucun recours ne peut être formé contre des actes ne fixant pas définitivement sa position mais servant uniquement à préparer sa décision finale. Selon elle, si un recours était possible contre des actes préparatoires, le bénéficiaire d’une aide pourrait considérablement ralentir le processus décisionnel en attaquant systématiquement en justice tout acte préparatoire. De surcroît, les actes préparatoires n’arrêtant aucune position définitive de la Commission, le
juge de l’Union pourrait être amené à préjuger de la décision finale pour être en mesure de statuer sur la légalité de l’acte provisoire. Enfin, les illégalités éventuelles qui entacheraient les actes préparatoires pourraient être invoquées à l’appui du recours dirigé contre l’acte définitif dont elles constituent un stade d’élaboration (25).
47. Les principes établis dans l’arrêt IBM/Commission, précité, auraient été appliqués par le juge de l’Union non seulement dans le contexte du droit de la concurrence, mais aussi dans toute une série d’autres matières. Par ailleurs, la jurisprudence concernant l’ouverture d’une procédure en matière d’aides d’État confirmerait que des recours en annulation contre des actes préparatoires sont, en principe, irrecevables. Ce ne serait que lorsque la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen
emporterait directement des effets juridiques qui seraient différents de celui de la décision finale que le recours serait recevable contre une telle décision d’ouverture.
3. Sur le troisième moyen, tiré de la méconnaissance des effets juridiques d’une injonction de fournir des informations
48. Deutsche Post et la République fédérale d’Allemagne soutiennent que, contrairement à ce que le Tribunal a jugé (26), une injonction de fournir des informations au titre de l’article 10, paragraphe 3, du règlement entraîne des effets juridiques obligatoires au détriment de l’État membre et de l’entreprise concernés. Selon la République fédérale d’Allemagne, une telle décision clôturerait la procédure administrative en matière d’aides d’État dans la mesure où elle mettrait fin à l’obligation
de la Commission d’établir les faits sous sa propre responsabilité. En l’absence de réponse de la part de l’État membre, une telle injonction permettrait à la Commission de rendre sa décision au vu des pièces figurant au dossier. Cela entraînerait une rupture dans le déroulement de la procédure, puisque la phase de coopération entre l’État membre et la Commission laisserait place à une phase formelle dont le calendrier et le fond seraient directement fixés par la Commission.
49. Les requérantes ajoutent que le non-respect de l’injonction allège la charge de la preuve incombant à la Commission et les empêche d’invoquer l’insuffisance en fait de la décision finale dans le cadre d’un recours ultérieur. En outre, elles soulignent qu’un recours contre la décision finale ne permettrait pas de remédier aux conséquences qu’entraîne le défaut de coopération de l’État membre. Afin de sauvegarder leurs droits de la défense, les requérantes seraient donc contraintes de déférer
à l’injonction.
50. Enfin, les requérantes notent que l’absence de sanction évoquée au point 29 de l’ordonnance Deutsche Post/Commission, précitée, et au point 28 de l’ordonnance Allemagne/Commission, précitée, n’est pas déterminante.
51. La Commission soutient que, dans le cadre d’une procédure en matière d’aides d’État, l’obligation pour l’État membre concerné de communiquer les informations demandées résulte de l’article 10 CE plutôt que de l’acte litigieux. Dans la mesure où elle ne disposerait d’aucune autre compétence d’enquête, la Commission ne pourrait éclaircir les faits sans la coopération loyale des États membres. Par conséquent, ce serait non pas l’injonction de fournir des informations, mais le refus de l’État
membre de déférer à cette injonction qui permettrait à la Commission de décider sur la base des informations disponibles et d’engager une action en manquement. Or, une telle action ne serait pas de nature à affecter les intérêts de la République fédérale d’Allemagne et encore moins ceux de Deutsche Post. De la même façon, l’acte litigieux, qui tendrait à assurer le respect du principe du contradictoire, n’affecterait pas la position juridique de cet État membre.
52. Enfin, la Commission insiste sur le fait qu’aucune sanction ne résulte du non‑respect de l’acte litigieux. La circonstance que des parties ne pourront plus invoquer à un stade ultérieur des faits qu’elles n’ont pas révélés au cours de la procédure administrative constituerait non pas une sanction, mais le corollaire du principe du contradictoire.
4. Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe de la protection juridictionnelle effective
53. Deutsche Post et la République fédérale d’Allemagne font valoir que les ordonnances attaquées violent le principe de la protection juridictionnelle effective.
54. Le juge de l’Union devrait, d’une part, pouvoir contrôler si la Commission a respecté les conditions de procédure fixées par le règlement et, d’autre part, pouvoir vérifier la proportionnalité et la nécessité des renseignements demandés par la Commission. Selon les requérantes, les intérêts des parties concernées ne seraient pas suffisamment garantis par le caractère attaquable de la décision finale.
55. La République fédérale d’Allemagne fait encore valoir que le Tribunal viole le principe de l’État de droit aux points 42 des ordonnances attaquées dans la mesure où il suggère que cet État membre est libre de déférer ou non à l’acte litigieux. En effet, un État de droit ne devrait pas être conduit à violer une obligation imposée par la Commission. De plus, les désavantages procéduraux liés à un tel agissement seraient extrêmement graves.
56. La Commission, tout d’abord, rétorque que les requérantes jouissent d’une protection juridictionnelle effective dans la mesure où elles peuvent soulever l’illégalité de l’acte litigieux dans le cadre d’un recours introduit contre la décision finale.
57. La Commission, ensuite, distingue la procédure de contrôle des aides d’État de celle prévue dans le cadre des pratiques anticoncurrentielles. En effet, dans le règlement n° 17 (27), le législateur communautaire aurait expressément prévu qu’une entreprise peut former un recours contre une injonction formulée par la Commission. Il aurait également prévu que la Commission peut infliger des amendes et des astreintes lorsque l’entreprise omet de se conformer à cette injonction. Les deux systèmes
ne seraient donc pas comparables.
5. Sur le cinquième moyen, tiré de la méconnaissance de la répartition des compétences entre la Commission et les États membres
58. La République fédérale d’Allemagne estime que le Tribunal a méconnu le système de répartition des compétences en jugeant que les États membres peuvent choisir d’ignorer l’injonction qui leur est faite. Ces derniers pourraient donc refuser de communiquer les informations qu’ils estiment ne pas être nécessaires pour établir les faits. Or, selon la République fédérale d’Allemagne, un tel raisonnement emporterait un transfert aux États membres de l’obligation d’établir les faits et de
déterminer l’objet de la procédure.
59. La Commission rétorque que les ordonnances attaquées n’entraînent aucun transfert de compétence. En effet, la Commission, ne disposant d’aucune compétence d’enquête, dépendrait de la coopération de l’État membre, du bénéficiaire de l’aide et des tiers intéressés pour l’éclaircissement des faits. Toutefois, la définition de ce qui devrait être considéré comme des informations nécessaires pour permettre à la Commission de prendre une décision finale concernant une aide d’État appartiendrait à
ladite institution.
B – Notre appréciation
60. Nous sommes d’avis que l’acte litigieux constitue un acte attaquable au sens de l’article 230 CE.
61. Pour parvenir à cette conclusion, il est nécessaire de rappeler, à titre liminaire, la jurisprudence de la Cour relative à la nature des actes attaquables ainsi que le cadre processuel dans lequel s’inscrit l’acte litigieux.
1. Les observations liminaires
a) La jurisprudence de la Cour relative à la nature des actes attaquables dans le cadre d’un recours en annulation
62. La jurisprudence de la Cour relative à la nature des actes attaquables dans le cadre d’un recours en annulation a été dégagée il y a quelques décennies dans les arrêts Commission/Conseil, dit «AETR» (28), et IBM/Commission, précité (29). Cette jurisprudence a été appliquée de façon constante dans le domaine des aides d’État et, en dernier lieu, dans les arrêts Athinaïki Techniki/Commission, précité, ainsi que NDSHT/Commission (30).
63. Pour qu’un acte puisse faire l’objet d’un recours en annulation, deux conditions doivent être satisfaites.
64. Premièrement, conformément à l’article 230 CE, il doit s’agir d’un acte adopté par l’une des institutions de l’Union.
65. Deuxièmement, il doit s’agir d’un acte susceptible de produire des effets de droit obligatoires. En d’autres termes, les intérêts des requérants doivent être affectés et leur situation juridique doit être modifiée de façon caractérisée. La forme dans laquelle un acte ou une décision est adopté est, en principe, indifférente (31). Il convient donc de s’attacher à sa substance afin de déterminer s’il produit de tels effets (32).
66. Cette jurisprudence permet d’étendre le champ du recours à des actes qui ne répondent pas formellement à la qualification de «décision», mais qui, en substance, produisent des effets juridiques contraignants. Elle permet également d’éviter que les institutions ne se soustraient au contrôle du juge de l’Union par la simple méconnaissance d’exigences formelles telles que l’intitulé de l’acte, sa motivation ou la mention de dispositions qui constituent sa base légale.
67. Cette seconde condition revêt une importance particulière lorsqu’il s’agit d’apprécier le caractère attaquable d’un acte qui s’inscrit dans une procédure administrative comportant plusieurs phases telle que celle relative au contrôle des aides d’État (33).
68. Dans cette matière, la Commission adopte de nombreux actes par lesquels non seulement elle porte une appréciation définitive concernant la qualification et la compatibilité d’une mesure avec le marché commun, mais également elle décide des mesures d’investigation et d’organisation de la procédure. Or, tous ces actes n’emportent pas d’effets juridiques à l’égard des États membres et des entreprises concernés.
69. La Cour classe donc ces actes en différentes catégories.
70. Les premiers sont les actes par lesquels la Commission fixe définitivement sa position à l’issue de la procédure. Ceux-ci constituent des actes attaquables dans la mesure où ils produisent des effets juridiques obligatoires et ne sont suivis d’aucun autre acte susceptible de donner lieu à un recours en annulation.
71. Tel est le cas des décisions par lesquelles la Commission, à l’issue de la procédure formelle d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE, estime que la mesure en cause ne constitue pas une aide ou que celle-ci est compatible ou incompatible avec le marché commun (34). Tel est également le cas de l’acte par lequel la Commission classe une plainte relative à une aide prétendument illégale (35).
72. Les seconds sont les actes intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale.
73. D’une part, nous trouvons des mesures qui, bien qu’elles soient adoptées dans le cadre de la procédure préparatoire, constituent le terme d’une phase distincte de la procédure principale et produisent des effets de droit (36).
74. Nous trouvons de nombreux exemples dans le cadre des procédures de mise en œuvre des articles 81 CE et 82 CE. Celles-ci sont organisées en plusieurs phases successives, comme la phase d’enquête préalable, la phase d’instruction contradictoire, puis la phase d’audition. Ainsi, dans les arrêts Hoechst/Commission (37) et Orkem/Commission (38), la Cour a admis que les décisions par lesquelles la Commission demande des renseignements aux entreprises ou diligente des enquêtes sur place
constituent des actes attaquables.
75. De la même façon, la Cour a considéré que la décision par laquelle la Commission ouvre, à l’issue de son analyse préliminaire, la procédure formelle d’examen constitue un acte attaquable (39). Elle estime qu’une telle décision emporte des effets juridiques à l’égard de l’État membre et des entreprises concernés, puisque la Commission peut ordonner la suspension de la mesure. Selon la Cour, ces effets sont autonomes par rapport à la décision finale et ne sont pas susceptibles d’être
régularisés dans le cadre d’un recours contre la décision finale, privant ainsi les requérants d’une protection juridictionnelle suffisante (40).
76. D’autre part, nous trouvons des mesures de nature «purement» (41) ou «simplement» (42) préparatoire. Ces mesures ne constituent que l’une des étapes permettant à l’institution d’adopter sa décision finale. Elles ne produisent aucun effet de droit et ne constituent pas, conformément à la jurisprudence, des actes attaquables. Dans cette perspective, la Cour considère que les irrégularités susceptibles d’entacher lesdites mesures peuvent être invoquées à l’appui d’un recours dirigé contre la
décision finale, dont elles constituent un stade d’élaboration (43). Tel est le cas, en droit de la concurrence, de l’acte par lequel la Commission communique ses griefs à l’encontre des entreprises.
77. L’évocation de cette jurisprudence permet de connaître les impératifs qui guident l’action de la Cour dans cette matière.
78. Comme nous venons de le voir, la Cour tend à garantir une protection juridictionnelle effective des droits que tirent les justiciables du droit de l’Union. Dans l’arrêt Athinaïki Techniki/Commission, précité, la Cour a rappelé que l’Union européenne étant une communauté de droit, les modalités procédurales applicables aux recours doivent être interprétées d’une manière telle que ces modalités puissent contribuer à la mise en œuvre d’un tel objectif (44). C’est pourquoi les actes
préparatoires susceptibles de produire des effets de droit et constituant le terme d’une procédure accessoire à la procédure principale doivent, selon la Cour, pouvoir faire l’objet d’un recours en annulation.
79. Néanmoins, la Cour tend aussi à éviter une multiplication des recours contre les mesures préparatoires susceptibles de paralyser l’action des institutions. Elle vise, également, à préserver la répartition des compétences et le système des voies de recours organisés par le traité. La Cour est, ainsi, peu encline à admettre la recevabilité d’un recours contre un acte préparatoire dès lors que celui-ci l’oblige à porter une appréciation sur des questions sur lesquelles la Commission n’a pas
encore eu l’occasion de se prononcer. Cela aurait pour conséquence une anticipation des débats au fond et une confusion des différentes phases des procédures administratives et judiciaires (45).
80. C’est dans ce contexte jurisprudentiel qu’il nous appartient de qualifier l’acte litigieux. Constitue-t-il, comme le fait valoir le Tribunal dans les ordonnances attaquées, une mesure de «nature purement préparatoire», qui n’est pas susceptible de recours, ou s’agit-il, comme le soutiennent Deutsche Post ainsi que la République fédérale d’Allemagne, d’un acte attaquable?
81. Afin de répondre à cette question, il faut également examiner le cadre processuel dans lequel s’inscrit l’acte litigieux.
b) Sur le cadre processuel dans lequel s’inscrit l’acte litigieux
82. Dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, la Commission dispose d’une compétence exclusive en ce qui concerne l’appréciation de la compatibilité d’une aide avec le traité (46). En particulier, la Commission a l’obligation de veiller à ce qu’aucune aide contraire au traité ne soit octroyée ou maintenue, et ce conformément à l’article 87 CE (47).
83. Afin d’assurer la mise en œuvre de cette disposition et de concilier le droit d’intervention des États membres avec la garantie d’une concurrence non faussée au sein de l’Union, le traité a prévu une procédure de contrôle et d’autorisation préalable des aides d’État, au cours de laquelle s’instaure un dialogue entre l’État membre concerné et la Commission. Le premier est tenu à une obligation de coopération loyale. Quant à la seconde, elle dispose de pouvoirs d’investigation et doit, à
cette fin, respecter un certain nombre d’exigences procédurales.
84. Il ressort du sixième considérant du règlement que les États membres doivent, conformément à l’article 10 CE, coopérer avec la Commission. Cela signifie qu’ils sont tenus, d’une part, de notifier à la Commission les projets d’aides nouvelles et, d’autre part, de fournir à cette institution tous les renseignements nécessaires pour lui permettre d’apprécier la compatibilité des aides avec le marché commun. Ces deux obligations sont intimement liées puisque la Commission peut, conformément à
l’article 5 du règlement, considérer que la notification a été retirée dès lors qu’un État membre refuse de fournir les renseignements complémentaires dont elle a besoin, dans le délai fixé.
85. Si tel est le cas, la Commission procède à l’examen de l’aide conformément aux articles 10 à 15 du règlement relatifs aux aides illégales (48).
86. Dans ce cadre, la Commission dispose de pouvoirs d’injonction lui permettant d’obtenir des renseignements et de limiter les préjudices liés à la mise en œuvre de l’aide non notifiée.
87. Conformément à l’article 10 du règlement, la Commission est autorisée à recueillir auprès de l’État membre concerné tous les documents, informations et données nécessaires à l’examen de la compatibilité de l’aide avec le marché commun. Il s’agit du seul pouvoir d’investigation reconnu à la Commission dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État. Celui-ci est gradué. La Commission peut demander (49) à l’État membre concerné de lui fournir ces renseignements en lui adressant, si
nécessaire, un rappel et en fixant un délai supplémentaire. Le cas échéant, elle peut lui adresser une injonction (50).
88. Il est important de souligner que la Commission ne peut user de ce pouvoir d’injonction que dans le cadre d’une procédure en matière d’aides illégales, c’est-à-dire lorsque l’État membre omet de notifier un projet tendant à instituer une aide ou lorsque celui-ci, malgré une notification, ne fournit pas les renseignements complémentaires demandés par la Commission, conformément à l’article 5, paragraphe 3, du règlement.
89. L’injonction doit préciser la nature des informations requises et fixer un délai approprié pour leur communication.
90. Lorsque l’État membre ne satisfait pas à son devoir de coopération et s’abstient de fournir les informations demandées, la Commission a le pouvoir de mettre fin à la procédure et peut adopter une décision constatant la compatibilité ou l’incompatibilité de l’aide avec le marché commun sur la seule base des éléments dont elle dispose. Ces principes ont été fixés par la Cour dans l’arrêt du 14 février 1990, France/Commission (51), et ont été concrétisés à l’article 13, paragraphe 1, du
règlement.
91. Les autres pouvoirs d’injonction, prévus à l’article 11 du règlement, doivent, quant à eux, permettre à la Commission d’adopter des mesures provisoires afin de limiter les préjudices liés à la mise en œuvre de l’aide non notifiée. La Commission peut, ainsi, enjoindre à l’État membre concerné de suspendre le versement de l’aide ou de la récupérer provisoirement auprès des bénéficiaires jusqu’à ce qu’elle statue sur la compatibilité de celle-ci avec le marché commun (52). Si l’État membre
omet de se conformer à l’une de ces injonctions, l’article 12 du règlement autorise expressément la Commission à saisir la Cour afin que celle-ci constate la violation du traité.
92. Dans l’arrêt du 9 octobre 2001, Italie/Commission, précité, la Cour a jugé que l’injonction de suspension est susceptible d’un recours en annulation introduit soit par l’entreprise bénéficiaire, soit par l’État membre concerné. Elle a estimé que cet acte a un caractère immédiatement contraignant à l’égard de l’État membre et des entreprises concernés et emporte des conséquences irréversibles qu’un recours en annulation contre la décision finale ne permet pas d’effacer (53).
93. L’exposé de ce cadre processuel nous permet de tirer deux conclusions.
94. En premier lieu, nous constatons que l’État membre est tenu à un devoir de coopération loyale. Comme la Commission, il doit collaborer de bonne foi en vue de surmonter les difficultés que soulève l’appréciation de la compatibilité d’une aide dans le respect des dispositions du traité (54).
95. En second lieu, nous constatons que le législateur communautaire sanctionne différemment le non-respect, par l’État membre, d’une injonction émise par la Commission, selon que celle-ci tend à obtenir des informations ou vise à suspendre ou à récupérer provisoirement une aide. Cela ressort très nettement des termes du douzième considérant du règlement ainsi que des articles 12 et 13 de celui-ci.
96. En effet, lorsque l’État membre omet de se conformer à une injonction de fournir des informations, la Commission est habilitée à se prononcer sur la seule base des informations disponibles. En revanche, lorsque cet État refuse de suspendre ou de récupérer provisoirement une aide, la Commission est autorisée à saisir directement la Cour.
97. À notre avis, cette distinction s’explique au vu des conséquences que le refus de coopération de l’État membre entraîne.
98. En effet, dans le premier cas, l’injonction de fournir des informations tend à éclairer la Commission le plus complètement possible avant qu’elle n’adopte une décision susceptible d’affecter les intérêts de l’État membre concerné. Dès lors, si l’État membre refuse de coopérer, son comportement est susceptible d’affecter en premier lieu ses intérêts.
99. En revanche, dans le second cas, les injonctions de suspension et de récupération provisoire d’une aide doivent permettre à la Commission de rétablir, sans délai, une concurrence effective au sein du marché commun. Si l’État membre refuse de s’y conformer, son comportement n’affecte plus seulement ses propres intérêts, mais il est également susceptible de causer un préjudice grave et immédiat aux concurrents, affectant de la même façon le bon fonctionnement du marché.
100. Cette différence justifie-t-elle pour autant que l’injonction de fournir des informations ne soit pas un acte attaquable, contrairement aux injonctions de suspension et de récupération d’une aide?
101. Nous ne le pensons pas. En effet, si l’acte litigieux présente, à l’évidence, un caractère préparatoire à la décision finale, il satisfait, néanmoins, à l’ensemble des conditions fixées par la jurisprudence afin de faire l’objet d’un recours en annulation.
2. Sur l’application au cas d’espèce de la jurisprudence de la Cour
102. Nous rappelons que, en vertu de la jurisprudence, un acte préparatoire est attaquable dès lors qu’il constitue le terme d’une phase distincte de la procédure principale et produit des effets de droit.
103. Premièrement, nous croyons que l’acte litigieux constitue bien le terme de la procédure d’enquête ouverte par la Commission. L’injonction de fournir des informations constitue même le cœur de la phase d’instruction de la procédure, au cours de laquelle l’État membre est tenu de coopérer.
104. Ce pouvoir est large puisque la Commission peut demander à l’État membre de lui fournir tous les documents, informations et données qui lui paraissent nécessaires (55) à l’appréciation de l’aide, la Commission étant uniquement tenue de préciser leur nature. Ce droit implique donc la faculté de rechercher des renseignements divers qui ne sont pas encore connus ou identifiés de façon précise par la Commission tels que le montant de l’aide en cause, sa nature, les entreprises bénéficiaires ou bien
encore la période au cours de laquelle elle a été versée. Néanmoins, si l’institution se heurte à un refus de coopération de l’État membre concerné, il lui devient difficile de recueillir les éléments nécessaires à l’appréciation de l’aide. En effet, la Commission ne dispose d’aucun autre pouvoir d’investigation, contrairement à ceux qui lui sont reconnus en droit de la concurrence dans le cadre du règlement n° 1/2003 (56). Ainsi, lorsque l’État membre ne satisfait pas à son devoir de coopération et
s’abstient de fournir les informations demandées, la Commission est habilitée à adopter une décision sur la seule base des éléments dont elle dispose. Comme l’a expressément reconnu la Cour, la Commission dispose ainsi du «pouvoir de mettre fin à la procédure» (57).
105. Deuxièmement, nous pensons que l’acte litigieux produit des effets juridiques contraignants et immédiats à l’égard de l’État membre concerné.
106. D’une part, il se présente sous la forme d’une décision, qui, aux termes de l’article 249 CE, est obligatoire dans tous ses éléments pour le destinataire qu’elle désigne. En outre, une injonction comporte, en elle-même, un commandement de faire, ce qui crée à la charge de l’État membre concerné une obligation d’exécution immédiate et effective.
107. D’autre part, il ressort clairement des termes de l’article 10, paragraphes 2 et 3, du règlement, que le législateur communautaire a entendu distinguer l’injonction de la simple demande de renseignements visée à l’article 10, paragraphe 2, de celui-ci. Cette dernière est, en tant que telle, effectivement dépourvue de caractère contraignant.
108. Cette distinction n’a de sens que si l’injonction revêt une force obligatoire à l’égard de l’État membre concerné et entraîne des conséquences juridiques lorsque celui-ci ne s’y conforme pas.
109. En effet, la Commission est habilitée à apprécier la compatibilité de l’aide sur la seule base des informations disponibles.
110. Par ailleurs, elle est libre d’introduire un recours en manquement à l’égard de l’État membre en raison de la violation du traité. Nous rappelons que ledit État n’a pas notifié l’aide, celle-ci étant dès lors mise en œuvre de façon illégale, et refuse de coopérer en fournissant les renseignements demandés par la Commission.
111. Contrairement à ce que soutient la Commission, l’introduction d’un tel recours n’est pas anodine. L’action en constatation de manquement a pour fonction de sanctionner une violation du droit de l’Union imputable à l’État membre et d’assurer le rétablissement effectif de la légalité communautaire. L’arrêt rendu par la Cour, à caractère déclaratoire, implique donc, en vertu de l’article 228 CE, une obligation d’exécution dont le non-respect peut être sanctionné par un nouveau recours en
manquement ou par le prononcé d’astreintes. En outre, nous ne devons pas oublier que l’arrêt en constatation de manquement est susceptible de faciliter la mise en jeu de la responsabilité de l’État membre devant les juridictions nationales.
112. Nous pouvons donc difficilement partager l’opinion du Tribunal selon laquelle l’État membre «[peut] choisir d’ignorer l’injonction qui [lui] est faite» par la Commission (58). En effet, nous ne pouvons pas conduire un État membre à manquer à ses obligations, à violer les dispositions du droit de l’Union et à s’exposer à l’introduction d’un recours juridictionnel. Comme le soutient la République fédérale d’Allemagne, cela est effectivement contraire aux principes de l’État de droit et à une
protection juridictionnelle effective.
113. Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous croyons donc que l’acte litigieux entraîne des effets juridiques contraignants à l’égard de l’État membre concerné.
114. Cet acte doit donc pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.
115. La reconnaissance d’un pouvoir de contrainte dans le chef de la Commission, qui engendre, de surcroît, la possibilité d’introduire un recours en manquement à l’égard de l’État membre, doit s’accompagner, à notre avis, de la reconnaissance de garanties procédurales au profit des États membres.
116. Le juge de l’Union devrait pouvoir contrôler si la Commission a respecté les conditions de procédure fixées aux articles 5, paragraphe 2, et 10, paragraphe 2, du règlement avant qu’elle n’adopte la décision finale.
117. Il devrait, en outre, pouvoir examiner la nature, la nécessité et la proportionnalité des renseignements demandés par la Commission.
118. En effet, comme nous l’avons vu, les termes du règlement font apparaître que les demandes de renseignements peuvent avoir une portée très large, la Commission ayant le droit de demander toutes les informations qu’elle estime nécessaires (59), celle-ci étant uniquement tenue de préciser la nature (60) de celles-ci. Le juge de l’Union devrait donc pouvoir contrôler si les renseignements demandés ont effectivement pu être considérés comme nécessaires au regard de l’objectif que poursuit la
Commission lors de la procédure formelle d’examen et n’excèdent pas le cadre de celle-ci.
119. Ce contrôle ne porte donc pas sur l’appréciation, au fond, de la compatibilité de l’aide avec le marché commun et ne doit pas conduire le juge de l’Union à porter une appréciation sur des questions sur lesquelles la Commission n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer, évitant ainsi une anticipation des débats au fond. Dans les présentes affaires, l’acte litigieux n’exprime aucune opinion provisoire quant à l’existence d’une aide ou quant à la compatibilité de celle-ci avec le marché commun.
L’introduction d’un recours en annulation contre l’acte litigieux ne devrait donc pas créer de risque de confusion des différentes phases des procédures administratives et judiciaires.
120. Ce contrôle en amont permettrait d’éviter la situation dans laquelle un État membre doit attendre l’adoption de la décision finale pour invoquer, dans le cadre d’un recours introduit contre cette dernière, l’illégalité de l’injonction. En effet, une telle situation risquerait de compromettre le déroulement régulier de la procédure administrative ainsi que la bonne administration de la justice.
121. Deux hypothèses permettent d’illustrer ce point.
122. Dans la première hypothèse, nous pouvons imaginer que l’État membre omet de se conformer à l’injonction parce qu’il considère, à juste titre ou non, que les règles de procédure n’ont pas été respectées ou que les informations demandées sont disproportionnées.
123. Dans l’attente de l’adoption de la décision finale, l’État membre se place donc en violation des dispositions du droit de l’Union et l’introduction d’un recours en manquement ne constitue pas la voie de recours appropriée pour lui permettre d’exciper de l’illégalité de l’injonction. Quant à la Commission, elle doit adopter une décision qui ne repose pas sur des éléments complets et fiables.
124. Dans la seconde hypothèse, nous pouvons imaginer que l’État membre défère à l’injonction de la Commission avant d’exciper de l’illégalité de celle-ci dans le cadre du recours introduit contre la décision finale. Cette situation ne permet pas de garantir une protection juridictionnelle suffisante contre les irrégularités susceptibles d’avoir entaché cette injonction. En effet, des renseignements ont été fournis et ont orienté l’appréciation de la Commission. Or, dans certains cas, il peut
sembler difficile d’apprécier l’impact de ces renseignements sur le cours de la procédure. Ainsi, même au cas où le recours introduit contre la décision finale serait accueilli, nous ne sommes pas certain que tous les effets qu’implique ladite injonction soient susceptibles d’être effacés.
125. La solution que nous proposons, si elle conduit effectivement à une multiplication des recours intermédiaires, ne devrait pas entraver l’action de la Commission. En effet, nous savons que l’introduction d’un recours en annulation à l’encontre d’un acte ne fait pas disparaître l’obligation, pour son destinataire, de s’y conformer, et ce compte tenu de l’absence d’effet suspensif du recours et pour autant qu’un sursis à l’exécution n’a pas été prononcé par le juge des référés (61).
126. En outre, cette solution nous semble parfaitement en ligne avec les principes fixés dans le cadre du contentieux du droit de la concurrence.
127. En effet, il ressort sans équivoque des textes ainsi que de la jurisprudence de la Cour que les demandes de renseignements formulées par la Commission dans le cadre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles constituent des actes attaquables au sens de l’article 230 CE (62). Ces demandes de renseignements étaient prévues à l’article 11 du règlement n° 17 (63) avant d’être codifiées à l’article 18 du règlement n° 1/2003. Les informations exigées par la Commission doivent être nécessaires,
comme doivent l’être celles demandées lors de la procédure de contrôle des aides d’État. Or, dans le cadre du contentieux du droit de la concurrence, cela signifie que la Cour a le pouvoir de vérifier si les renseignements demandés n’excèdent pas ce qui est nécessaire pour permettre à la Commission de cerner l’infraction et de déterminer sa durée ainsi que le cercle des entreprises impliquées (64).
128. Au vu de ces éléments et compte tenu des considérations qui précèdent, nous pensons que l’acte litigieux doit également pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.
129. Par conséquent, nous estimons que l’acte litigieux constitue un acte attaquable.
130. Les pourvois formés par les requérantes sont donc bien fondés et les ordonnances attaquées doivent, par conséquent, être annulées.
VI – Sur les conséquences de l’annulation des ordonnances attaquées
131. Conformément à l’article 61, premier alinéa, seconde phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, cette dernière peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer elle‑même définitivement sur le litige, lorsque celui‑ci est en état d’être jugé.
132. Dans le cadre de l’affaire C‑475/10 P, l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission à l’encontre du recours introduit par la République fédérale d’Allemagne doit, au vu des développements qui précèdent, être rejetée. Le recours en annulation formé par cet État doit donc être jugé recevable.
133. Dans le cadre de l’affaire C‑463/10 P, la Commission a invoqué un second moyen à l’appui de son exception d’irrecevabilité du recours formé par Deutsche Post, tiré du défaut de qualité à agir de cette dernière.
134. Nous sommes d’avis que la Cour dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur ce moyen.
A – Les arguments des parties
135. La Commission soutient que Deutsche Post n’est ni individuellement ni directement concernée par l’acte litigieux au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE.
136. En ce qui concerne l’affectation individuelle, la Commission relève que l’acte litigieux est uniquement adressé à la République fédérale d’Allemagne et qu’il ne crée aucune obligation à la charge de Deutsche Post. En ce qui concerne l’affectation directe, la Commission soutient que l’exécution de l’injonction laisse un pouvoir d’appréciation à l’État membre. En effet, c’est ce dernier qui déterminerait à qui s’adresse l’injonction et fixerait la manière d’obtenir les informations demandées.
137. Deutsche Post conteste ces appréciations. Elle estime être individualisée au sens de l’arrêt Plaumann/Commission (65), puisqu’elle serait la seule détentrice des informations demandées et la seule entreprise tenue de restituer l’aide en cause. Deutsche Post estime également être directement concernée par l’acte litigieux, puisque, contrairement à ce que soutient la Commission, la République fédérale d’Allemagne n’aurait aucune marge d’appréciation quant à l’exécution de l’injonction. Il n’y
aurait aucune incertitude possible quant aux informations requises par la Commission, lesquelles ressortiraient de l’acte litigieux sans que la République fédérale d’Allemagne ait à adopter des mesures intermédiaires.
B – Notre appréciation
138. Contrairement à la Commission, nous croyons que Deutsche Post est individuellement et directement concernée par l’acte litigieux, de sorte que le recours en annulation introduit devant le Tribunal est recevable.
139. Nous fondons cette analyse sur les considérations suivantes.
140. Dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, les décisions prises par la Commission ont uniquement pour destinataires les États membres concernés (66). Les personnes physiques ou les personnes morales qui souhaitent introduire un recours contre ces décisions doivent donc démontrer que celles-ci les concernent directement et individuellement, conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE.
1. En ce qui concerne l’affectation individuelle de Deutsche Post
141. Il ressort d’une jurisprudence constante que les sujets autres que les destinataires d’une décision ne peuvent prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait (67).
142. Il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, lorsque la décision affecte un groupe de personnes qui étaient identifiées ou identifiables au moment où cet acte a été pris et en fonction de critères propres aux membres du groupe, ces personnes peuvent être individuellement concernées par ledit acte en tant qu’elles font partie d’un cercle restreint d’opérateurs économiques (68).
143. Or, dans les présentes affaires, il est évident que Deutsche Post est individualisée par l’acte litigieux. La procédure ouverte par la Commission concerne expressément les mesures prises par la République fédérale d’Allemagne en faveur de cette entreprise et l’acte litigieux porte spécifiquement sur les coûts et les recettes de ladite entreprise au cours des 20 dernières années. Cet acte, en tant qu’il oblige Deutsche Post à fournir des informations, l’affecte donc particulièrement.
144. Au vu de ces éléments, nous sommes d’avis que Deutsche Post est donc individuellement concernée par l’acte litigieux.
2. En ce qui concerne l’affectation directe de Deutsche Post
145. Conformément à une jurisprudence constante, la condition selon laquelle une personne physique ou morale doit être directement concernée par l’acte attaqué requiert les deux éléments suivants, à savoir que cet acte doit produire directement des effets sur la situation juridique du particulier, en le privant d’un droit ou en lui imposant une obligation, et qu’il ne doit laisser aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre. Cette condition doit donc avoir un caractère
purement automatique et doit découler de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (69).
146. En l’occurrence, il nous semble que ces deux conditions sont réunies.
147. Premièrement, nous pensons que l’acte litigieux entraîne, par lui‑même, des conséquences directes sur la situation juridique de Deutsche Post. En exigeant de la République fédérale d’Allemagne qu’elle communique l’ensemble des informations relatives aux coûts et aux recettes de l’entreprise depuis l’année 1989, cet acte oblige Deutsche Post à transmettre ces données, dont elle est seule en possession. L’acte litigieux place donc cette entreprise dans une situation analogue à celle de la
République fédérale d’Allemagne. Ainsi, bien que l’injonction soit adressée à l’État membre, celui-ci constitue, en réalité, un intermédiaire entre la Commission et l’entreprise nommément visée par l’enquête (70).
148. Deuxièmement, nous croyons que la République fédérale d’Allemagne ne dispose d’aucun pouvoir d’appréciation dans l’exécution de l’acte litigieux.
149. Il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cas où un acte communautaire est adressé à un État membre par une institution, si l’action que doit entreprendre l’État membre pour exécuter cet acte présente un caractère automatique ou si, d’une manière ou d’une autre, les conséquences dudit acte s’imposent sans équivoque, celui‑ci concerne alors directement n’importe quelle personne qui est affectée par cette action (71).
150. Dans le cas où il existe une mesure nationale d’exécution qui s’interpose entre l’acte attaqué et le requérant, la Cour considère qu’il ne s’agit pas, en soi, d’un facteur d’irrecevabilité du recours si cette mesure a un caractère purement automatique ou si son sens est prévisible et peut se déduire de la réglementation de l’Union (72). La Cour a, par exemple, jugé que tel était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Infront WM, précité. Malgré l’existence d’une marge de
manœuvre dans l’exécution de l’acte attaqué, la Cour a constaté, aux points 59 à 63 dudit arrêt, que les autorités nationales ne jouissaient d’aucun pouvoir d’appréciation concernant le résultat à atteindre, puisque celui‑ci était uniquement déterminé par cet acte (73).
151. Or, dans les présentes affaires, la République fédérale d’Allemagne ne dispose d’aucune marge de manœuvre dans l’exécution de l’acte litigieux. Cet acte a une nature décisoire et contraint cet État membre à agir dans le sens déterminé par la Commission, c’est-à-dire, en d’autres termes, à fournir l’ensemble des renseignements demandés par l’institution, et ce quel que soit le moyen employé.
152. Au vu de ces éléments, nous sommes donc d’avis que Deutsche Post est bien directement concernée par l’acte litigieux.
153. Pour ces motifs, nous estimons que le recours en annulation formé par Deutsche Post est recevable et que l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission à l’encontre dudit recours doit être rejetée.
154. Nous invitons, à présent, la Cour à renvoyer les deux affaires devant le Tribunal pour qu’il statue sur les conclusions de Deutsche Post et de la République fédérale d’Allemagne tendant à l’annulation de l’acte litigieux.
VII – Conclusion
155. Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer de la manière suivante:
– annuler les ordonnances du Tribunal de l’Union européenne du 14 juillet 2010, Deutsche Post/Commission (T‑570/08), et Allemagne/Commission (T‑571/08);
– rejeter comme non fondées les exceptions d’irrecevabilité soulevées par la Commission européenne devant le Tribunal de l’Union européenne;
– renvoyer l’affaire devant le Tribunal de l’Union européenne pour qu’il statue sur les conclusions de Deutsche Post AG et de la République fédérale d’Allemagne tendant à l’annulation de la décision de la Commission européenne du 30 octobre 2008 enjoignant à cet État membre de fournir des informations concernant les recettes et les coûts de Deutsche Post AG pour la période allant de l’année 1989 à l’année 2007, et
– réserver les dépens.
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1 – Langue originale: le français.
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2 – Ci-après «Deutsche Post».
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3 – Ci-après, ensemble, les «ordonnances attaquées».
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4 – Règlement du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1, ci-après le «règlement»).
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5 – Ci-après l’«acte litigieux».
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6 – Deuxième considérant du règlement.
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7 – Décision 2002/753/CE concernant des mesures prises par la République fédérale d’Allemagne en faveur de Deutsche Post AG (JO L 247, p. 27).
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8 – Aide d’État C 36/07 (ex NN 25/07) (JO C 245, p. 21).
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9 – Arrêt Deutsche Post/Commission (T‑266/02, Rec. p. II‑1233).
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10 – Dans leurs pourvois, les requérantes contestent ce point.
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11 – Arrêt Commission/Deutsche Post (C‑399/08 P, non encore publié au Recueil).
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12 – Ordonnances précitées Deutsche Post/Commission (points 24 et 25) ainsi que Allemagne/Commission (points 22 à 24).
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13 – 60/81, Rec. p. 2639, point 10.
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14 – C‑521/06 P, Rec. p. I‑5829, point 46.
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15 – Ordonnances précitées Deutsche Post/Commission (points 28 et 29) ainsi que Allemagne/Commission (points 27 et 28).
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16 – Ordonnances précitées Deutsche Post/Commission (points 30 à 32) ainsi que Allemagne/Commission (points 29 à 31).
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17 – Ordonnances précitées Deutsche Post/Commission (points 33 à 37) ainsi que Allemagne/Commission (points 32 à 36).
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18 – Arrêt du 9 octobre 2001, Italie/Commission (C‑400/99, Rec. p. I‑7303).
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19 – Ordonnance Allemagne/Commission, précitée (points 37 et 38).
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20 – Voir, notamment, arrêt IBM/Commission, précité (point 9).
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21 – Voir, concernant la décision de nommer un jury d’un concours général, arrêts du Tribunal du 22 juin 1990, Marcopoulos/Cour de justice (T‑32/89 et T‑39/89, Rec. p. II‑281, point 21), ainsi que du 15 juillet 1993, Camara Alloisio e.a./Commission (T‑17/90, T‑28/91 et T‑17/92, Rec. p. II‑841, point 39).
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22 – Point 23.
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23 – Deutsche Post se réfère, à cet égard, à l’arrêt du 13 avril 1994, Allemagne et Pleuger Worthington/Commission (C‑324/90 et C‑342/90, Rec. p. I‑1173).
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24 – Arrêt du 10 mai 2005, Italie/Commission (C‑400/99, Rec. p. I‑3657, points 15 à 18).
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25 – Arrêt IBM/Commission, précité (point 12).
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26 – Les requérantes visent, respectivement, le point 46 de l’ordonnance Deutsche Post/Commission, précitée, et le point 45 de l’ordonnance Allemagne/Commission, précitée.
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27 – Règlement du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81] et [82] du traité (JO 1962, 13, p. 204).
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28 – Arrêt du 31 mars 1971 (22/70, Rec. p. 263, point 42).
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29 – Points 9 à 12.
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30 – Arrêt du 18 novembre 2010 (C‑322/09 P, non encore publié au Recueil, points 45 à 48 et jurisprudence citée).
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31 – Voir, en particulier, arrêts AETR, précité (point 42); IBM/Commission, précité (point 9), ainsi que du 22 juin 2000, Pays‑Bas/Commission (C‑147/96, Rec. p. I‑4723, point 25 et jurisprudence citée). Voir, pour une application récente, ordonnance du 21 juin 2007, Finlande/Commission (C‑163/06 P, Rec. p. I‑5127, point 40).
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32 – Arrêt Pays‑Bas/Commission, précité (point 27).
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33 – C’est également le cas dans le cadre de la procédure de contrôle des pratiques anticoncurrentielles, organisée par le règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1).
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34 – Voir notamment, en ce qui concerne les décisions de la Commission de ne pas soulever d’objections à l’égard de l’octroi d’une aide, arrêts du 19 mai 1993, Cook/Commission (C‑198/91, Rec. p. I‑2487), et du 15 juin 1993, Matra/Commission (C‑225/91, Rec. p. I‑3203).
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35 – Voir arrêt NDSHT/Commission, précité (points 45 à 48 et jurisprudence citée). Dans cette hypothèse, la Cour s’est fondée sur la substance de l’acte ainsi que sur les intentions de la Commission. En outre, la Cour a constaté que l’acte de classement administratif produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la plaignante, en tant que celle-ci se voyait privée de la possibilité de déposer des observations dans le cadre de la procédure formelle d’examen visée à
l’article 88, paragraphe 2, CE.
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36 – Arrêt IBM/Commission, précité (point 11).
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37 – Arrêt du 21 septembre 1989 (46/87 et 227/88, Rec. p. 2859).
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38 – Arrêt du 18 octobre 1989 (374/87, Rec. p. 3283).
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39 – Arrêt du 9 octobre 2001, Italie/Commission, précité.
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40 – Ibidem (points 59, 60, 62 et 63).
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41 – Arrêt IBM/Commission, précité (point 12).
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42 – Arrêt du 9 octobre 2001, Italie/Commission, précité (point 63).
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43 – Voir arrêt IBM/Commission, précité (point 12).
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44 – Point 45 et jurisprudence citée.
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45 – Dans l’arrêt IBM/Commission, précité, la Cour a ainsi considéré qu’un recours dirigé contre l’engagement d’une procédure et contre une communication des griefs ne serait pas compatible avec le système de répartition des compétences entre la Commission et la Cour (point 20).
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46 – Sous réserve des pouvoirs conférés au Conseil de l’Union européenne par l’article 88, paragraphe 2, troisième alinéa, CE.
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47 – Arrêts du 15 juillet 1964, Costa (6/64, Rec. p. 1141, 1162), ainsi que du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C‑182/03 et C‑217/03, Rec. p. I‑5479, points 73 et 74).
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48 – La Commission peut également agir ainsi lorsque l’État membre manque à son devoir de notification et qu’elle est informée de l’existence d’une aide prétendument illégale par l’intermédiaire, par exemple, d’une plainte déposée par des concurrents.
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49 – Souligné par nos soins.
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50 – Voir article 10, paragraphes 2 et 3, du règlement.
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51 – C‑301/87, Rec. p. I‑307, points 19 et 22. Voir, également, arrêt du Tribunal Deutsche Post/Commission, précité (point 75 et jurisprudence citée).
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52 – Arrêt France/Commission, précité (points 19 et 20).
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53 – Points 51, 59, 60 et 63.
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54 – Voir arrêt du 22 décembre 2010, Commission/Italie (C‑304/09, non encore publié au Recueil, point 37 et jurisprudence citée).
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55 – Souligné par nos soins.
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56 – Voir, en particulier, les pouvoirs d’enquête visés aux articles 18 à 21 de ce règlement (demandes de renseignements, pouvoir de recueillir des déclarations et pouvoirs en matière d’inspection).
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57 – Voir arrêt France/Commission, précité (point 22).
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58 – Points 42 des ordonnances attaquées.
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59 – Souligné par nos soins.
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60 – Idem.
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61 – Voir article 242 CE.
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62 – Voir arrêt Orkem/Commission, précité, et arrêt du Tribunal du 20 février 2001, Mannesmannröhren-Werke/Commission (T‑112/98, Rec. p. II‑729).
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63 – Cette disposition prévoyait le respect d’une procédure en deux phases [voir arrêt du 26 juin 1980, National Panasonic/Commission (136/79, Rec. p. 2033, point 10)] analogue à celle prévue à l’article 10 du règlement.
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64 – Voir arrêt Orkem/Commission, précité (point 15).
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65 – Arrêt du 15 juillet 1963 (25/62, Rec. p. 197).
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66 – Arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 45).
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67 – Voir, notamment, arrêt du 13 mars 2008, Commission/Infront WM (C‑125/06 P, Rec. p. I‑1451, point 70 et jurisprudence citée).
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68 – Voir, notamment, arrêts du 17 janvier 1985, Piraiki‑Patraiki e.a./Commission (11/82, Rec. p. 207, point 31); Belgique et Forum 187/Commission, précité (point 60), ainsi que Commission/Infront WM, précité (point 71).
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69 – Voir arrêt Commission/Infront WM, précité (point 47 et jurisprudence citée).
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70 – Nous renvoyons aux termes exprimés par le professeur G. Isaac qui considère que «le requérant n’est directement concerné que si l’acte attaqué a par lui‑même pour effet immédiat de le priver d’un droit ou de lui imposer une obligation, de telle sorte qu’il le met dans une situation analogue à laquelle il se trouverait s’il en était destinataire» (Isaac, G., Droit communautaire général, 7^e édition, Colin, Paris, 1999, p. 266).
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71 – Arrêt du 5 mai 1998, Dreyfus/Commission (C‑386/96 P, Rec. p. I‑2309, point 43 et jurisprudence citée), ainsi que ordonnance du Tribunal du 10 septembre 2002, Japan Tobacco et JT International/Parlement et Conseil (T‑223/01, Rec. p. II‑3259, point 46).
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72 – Voir, notamment, arrêts du 13 mai 1971, International Fruit Company e.a./Commission (41/70 à 44/70, Rec. p. 411, point 25), ainsi que du 23 novembre 1971, Bock/Commission (62/70, Rec. p. 897, points 7 et 8).
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73 – Si, en revanche, l’acte attaqué laisse un véritable choix à l’État membre destinataire, celui‑ci ayant la possibilité d’agir ou de ne pas agir ou n’étant pas contraint d’agir dans un sens déterminé, alors la Cour considère qu’un particulier ne saurait prétendre avoir une qualité directe pour le contester. Voir, notamment, arrêt du 21 janvier 1999, France/Comafrica e.a. (C‑73/97 P, Rec. p. I‑185). Dans cette affaire, la Cour a jugé que le règlement (CE) n° 3190/93 de la Commission, du 19
novembre 1993, fixant le coefficient uniforme de réduction pour la détermination de la quantité de bananes à attribuer à chaque opérateur des catégories A et B dans le cadre du contingent tarifaire pour 1994 (JO L 285, p. 28), ne concernait pas directement les opérateurs, puisqu’il revenait, en réalité, aux autorités nationales compétentes de fixer de façon définitive les quantités de bananes qu’ils seraient en droit d’importer au cours de cette période, sur la base de ce règlement.