CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. PAOLO MENGOZZI
présentées le 6 novembre 2013 ( 1 )
Affaire C‑423/12
Flora May Reyes
contre
Migrationsverket
[demande de décision préjudicielle formée par le Kammarrätten i Stockholm – Migrationsöverdomstolen (Suède)]
«Droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres — Directive 2004/38/CE — Article 2, point 2, sous c) — Droit de séjour des membres de la famille d’un citoyen de l’Union — Notion de ‘membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union’ — Obligation pour le descendant direct, âgé de plus de 21 ans, d’un citoyen de l’Union de prouver qu’il a recherché sans succès un emploi, ou sollicité auprès des
administrations de l’État membre d’origine une aide sociale, ou cherché à subvenir à ses besoins par tout autre moyen — Incidences des déclarations du membre de la famille qui demande un titre de séjour en tant que ‘membre de la famille à charge’ quant à sa volonté d’occuper, dans l’État membre d’accueil, un emploi»
1. Pour se voir reconnaître un droit de séjour sur le territoire de l’Union européenne au titre de descendant direct, âgé de plus de 21 ans, d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les
directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE ( 2 ), le demandeur doit-il se contenter de démontrer la réalité du soutien matériel apporté par ledit citoyen ou les autorités peuvent-elles encore exiger de lui qu’il apporte la preuve de la nécessité du soutien?
2. Pour répondre à cette question, la Cour est notamment invitée à clarifier et, le cas échéant, à actualiser sa jurisprudence relative aux membres de la famille du citoyen de l’Union dits «à charge» en tant que bénéficiaires indirects des droits consacrés par la directive 2004/38.
I – Le cadre juridique
A – La directive 2004/38
3. Le considérant 5 de la directive 2004/38 énonce que «[l]e droit de tous les citoyens de l’Union de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres devrait, pour qu’il puisse s’exercer dans des conditions objectives de liberté et de dignité, être également accordé aux membres de leur famille, quelle que soit leur nationalité».
4. Au considérant 6 de la directive 2004/38, il est précisé que, «[e]n vue de maintenir l’unité de la famille au sens large et sans préjudice de l’interdiction des discriminations fondées sur la nationalité, la situation des personnes qui ne sont pas englobées dans la définition des membres de la famille au titre de la présente directive et qui ne bénéficient donc pas d’un droit automatique d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil devrait être examinée par ce dernier sur la base de sa
législation nationale, afin de décider si le droit d’entrée ou de séjour ne pourrait pas être accordé à ces personnes, compte tenu de leur lien avec le citoyen de l’Union et d’autres circonstances telles que leur dépendance pécuniaire ou physique envers ce citoyen».
5. Le considérant 28 de la directive 2004/38 prévoit que «[l]es États membres devraient pouvoir adopter les mesures nécessaires pour se préserver de l’abus de droit ou de la fraude».
6. Le considérant 31 de la directive 2004/38 rappelle que ladite directive «respecte les droits et libertés fondamentaux et observe les principes qui sont reconnus notamment par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne».
7. L’article 2 de la directive 2004/38 est libellé comme suit:
«Aux fins de la présente directive, on entend par:
[…]
2) ‘membre de la famille’:
[…]
c) les descendants directs qui sont âgés de moins de vingt-et-un ans ou qui sont à charge […];
3) ‘État membre d’accueil’: l’État membre dans lequel se rend un citoyen de l’Union en vue d’exercer son droit de circuler et de séjourner librement.»
8. L’article 3 de la directive 2004/38 est libellé comme suit:
«1. La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent.
2. Sans préjudice d’un droit personnel à la libre circulation et au séjour de l’intéressé, l’État membre d’accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l’entrée et le séjour des personnes suivantes:
a) tout autre membre de la famille, quelle que soit sa nationalité, qui n’est pas couvert par la définition figurant à l’article 2, point 2), si, dans le pays de provenance, il est à charge ou fait partie du ménage du citoyen de l’Union bénéficiaire du droit de séjour à titre principal, ou lorsque, pour des raisons de santé graves, le citoyen de l’Union doit impérativement et personnellement s’occuper du membre de la famille concerné;
[…]
L’État membre d’accueil entreprend un examen approfondi de la situation personnelle et motive tout refus d’entrée ou de séjour visant ces personnes.»
9. L’article 7, paragraphe 2, de la directive 2004/38 prévoit que «[l]e droit de séjour prévu au paragraphe 1 s’étend aux membres de la famille n’ayant pas la nationalité d’un État membre lorsqu’ils accompagnent ou rejoignent dans l’État membre d’accueil le citoyen de l’Union, pour autant que ce dernier satisfasse aux conditions énoncées au paragraphe 1, points a), b) ou c)».
10. L’article 10, paragraphe 2, sous d), de la directive 2004/38 dispose que, pour la délivrance de la carte de séjour, les États membres demandent la présentation «dans les cas visés à l’article 2, paragraphe 2, points c) et d), [d]es pièces justificatives attestant que les conditions énoncées dans cette disposition sont remplies».
11. L’article 14, paragraphe 2, de la directive 2004/38 précise que «[l]es citoyens de l’Union et les membres de leur famille ont un droit de séjour tel que prévu aux articles 7, 12 et 13 tant qu’ils répondent aux conditions énoncées dans ces articles».
B – Le droit suédois
12. La directive 2004/38 a été transposée en droit suédois par des modifications apportées à la loi 2005:716 relative aux étrangers [Utlänningslagen (2005:716), ci‑après l’«UtlL»] et au règlement 2006:97 sur les étrangers [Utlänningsförordningen (2006:97)].
13. Le chapitre 3 bis, article 2, de l’UtlL définit le membre de la famille du ressortissant de l’Espace économique européen (EEE) comme étant un étranger qui accompagne ou rejoint un ressortissant de l’EEE en Suède et qui est, notamment, un descendant en ligne directe dudit ressortissant de l’EEE ou de son conjoint ou concubin s’il est à la charge de l’un d’entre eux ou s’il est âgé de moins de 21 ans.
14. Le chapitre 3 bis, article 5, de l’UtlL prévoit que le droit de séjour accordé aux membres de la famille du ressortissant de l’EEE demeure tant que les conditions y relatives sont remplies.
15. Le chapitre 3 bis, article 9, du règlement 2006:97 sur les étrangers dispose que, dans le cadre de la procédure de délivrance d’un titre de séjour, les autorités suédoises peuvent exiger la production, par le demandeur, d’un passeport en cours de validité, de documents établissant les liens familiaux avec le ressortissant de l’EEE, des titres d’immatriculation ou d’autres pièces établissant que le ressortissant de l’EEE dont dérive le droit de séjour bénéficie effectivement d’un droit de séjour
en Suède ainsi que, dans la mesure où il peut conditionner le droit de séjour du demandeur, tout document attestant qu’il est à la charge du ressortissant de l’EEE ou de son conjoint ou concubin.
II – Le litige au principal et les questions préjudicielles
16. Née en 1987, la requérante au principal, Mme Reyes, est une ressortissante philippine. Elle réside aux Philippines depuis toujours. Lorsqu’elle était âgée de 3 ans, sa mère, Mme Hansen, a quitté les Philippines pour aller travailler en Allemagne, dont elle a acquis la nationalité. Mme Hansen avait alors confié sa fille à la grand-mère de celle-ci. Lorsqu’elle a eu 14 ans, Mme Reyes a rejoint sa sœur, aujourd’hui décédée, et s’est installée à Manille (Philippines). Mme Reyes a étudié au lycée et
poursuivi des études supérieures, d’une durée de quatre ans, pour devenir une aide‑soignante. Il lui manque toutefois une expérience pratique – payante – pour compléter sa formation. Elle n’a ainsi jamais travaillé et ne bénéficie d’aucune aide sociale aux Philippines.
17. Mme Hansen s’est mariée avec un ressortissant norvégien en 2011. Le couple vit en Suède depuis l’année 2009 et Mme Hansen est titulaire d’un titre de séjour délivré par les autorités suédoises. Depuis le moment où elle a quitté les Philippines pour s’installer en Europe, elle a toujours entretenu des liens étroits avec sa famille restée dans son pays d’origine. Elle envoyait régulièrement de l’argent à sa famille et lui rendait tout aussi régulièrement visite. Mme Hansen ne travaille pas, mais
son mari perçoit une confortable pension, partiellement dédiée à l’assistance financière de la famille de son épouse.
18. Au début de l’année 2011, Mme Reyes a demandé un visa auprès de l’ambassade de Suisse à Manille pour rendre visite à sa mère et à son beau-père en Suède. Ledit visa a été accordé et Mme Reyes est entrée sur le territoire de l’espace Schengen le 13 mars 2011. Le 29 mars de la même année, Mme Reyes sollicitait la délivrance d’un titre de séjour de la part des autorités suédoises en sa qualité de «membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union».
19. En effet, en tant que descendante directe du ressortissant de l’Union qu’elle souhaite rejoindre et âgée de plus de 21 ans, Mme Reyes peut prétendre à la délivrance d’un titre de séjour en Suède à la condition qu’elle remplisse les conditions fixées par l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, c’est‑à‑dire à la condition qu’elle soit à la charge dudit ressortissant.
20. Le 11 mai 2011, le Migrationsverket a rejeté sa demande au motif qu’elle n’avait pas établi que les sommes versées avaient servi à assurer ses besoins essentiels, c’est-à-dire son logement, son alimentation et son accès aux soins. Elle n’avait pas davantage établi comment le système philippin de protection sociale pouvait venir en aide aux personnes placées dans une situation comme la sienne. En revanche, il était clair que Mme Reyes était diplômée dans son pays d’origine et qu’elle y avait
suivi des stages. Considérant qu’elle était, en fait, à la charge de sa grand-mère et en se fondant, notamment, sur l’arrêt Jia ( 3 ), le Migrationsverket a estimé que Mme Reyes ne pouvait pas être considérée comme membre de la famille «à charge» d’un ressortissant de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38.
21. Mme Reyes a contesté ce rejet devant le Förvaltningsrätten i Göteborg (tribunal administratif de Göteborg, Suède) siégeant en qualité de juridiction de première instance en matière de nationalité et de droit des étrangers. Ladite juridiction a confirmé la décision des autorités suédoises. Si elle a reconnu que les besoins essentiels de Mme Reyes étaient bel et bien assurés par sa mère et son beau-père, elle a, en revanche, considéré que la situation sociale de la demanderesse au principal
n’était pas telle qu’elle ne pouvait subvenir elle-même à ses besoins aux Philippines, sans leur aide, notamment en raison de son âge, de son niveau de qualification et du fait qu’elle avait de la famille auprès d’elle. Le Förvaltningsrätten i Göteborg a conclu qu’il ne suffisait pas d’établir la régularité des transferts d’argent pour remplir la condition de membre de la famille «à charge», au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38.
22. Mme Reyes a interjeté appel devant le Kammarrätten i Stockholm – Migrationsöverdomstolen (Suède) qui statue en dernière instance dans l’affaire au principal.
23. Les autorités suédoises ont développé devant ladite juridiction une argumentation tendant à confirmer la décision du Migrationsverket et du Förvaltningsrätten i Göteborg. Elles maintiennent que, eu égard à la jurisprudence Jia précitée, les seuls transferts d’argent ne sont pas suffisants pour démontrer qu’une personne est à la charge du membre de sa famille citoyen de l’Union. Les États membres doivent pouvoir exiger des demandeurs qu’ils soient effectivement à charge, c’est-à-dire qu’ils ne
doivent pas avoir d’a utres choix ni d’autres solutions que de dépendre entièrement, pour la satisfaction de leurs besoins essentiels, du membre de leur famille qu’ils souhaitent rejoindre. Ainsi, une personne qui fait le choix délibéré de ne pas chercher de travail ou de se laisser entretenir dans son pays d’origine ne saurait être considérée comme «à charge», au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38.
24. Pour sa part, Mme Reyes a fait valoir une position radicalement opposée. Elle a d’abord fourni à ladite juridiction un certain nombre d’éléments tenant à la régularité des versements effectués par le couple Hansen à Mme Reyes, au fait que 11 % du produit intérieur brut des Philippines est constitué par l’apport financier des ressortissants philippins travaillant à l’étranger, à l’état général du marché du travail philippin et à l’absence de toute assistance sociale fournie par l’État philippin
aux personnes qui, comme Mme Reyes, n’ont jamais travaillé. Elle a ensuite fait état de son niveau de qualification qui ne lui permet pas, en l’état actuel, d’accéder à un emploi d’aide‑soignante aux Philippines en raison du caractère incomplet de sa formation et du taux de chômage particulièrement élevé qui frappe cette catégorie professionnelle. Elle a néanmoins fait part à la juridiction de renvoi de son intention de poursuivre des études en Suède et d’y travailler. Enfin, se fondant tant sur
l’arrêt Lebon ( 4 ) que sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant les lignes directrices destinées à améliorer la transposition et l’application de la directive 2004/38 ( 5 ) (ci‑après les «lignes directrices»), Mme Reyes a soutenu qu’il n’est pas nécessaire de rechercher si les membres de la famille sont théoriquement en mesure de subvenir à leurs besoins par l’exercice d’une activité rémunérée, par exemple. Les autorités nationales doivent apprécier,
au cas par cas, si, compte tenu de sa situation financière et sociale, le demandeur a besoin d’un soutien matériel. La preuve de ce besoin peut être apportée par tout moyen, sans qu’aucune condition de durée minimale de la situation de dépendance ou du montant du soutien ne soit exigée, sous réserve, toutefois, du caractère réel et structurel de ladite situation.
25. C’est dans ces conditions que le Kammarrätten i Stockholm – Migrationsöverdomstolen a décidé de surseoir à statuer et, par décision de renvoi parvenue au greffe de la Cour le 17 septembre 2012, de saisir cette dernière, sur le fondement de l’article 267 TFUE, des deux questions préjudicielles suivantes:
«1) L’article 2, point 2, sous c), de la directive [2004/38] peut-il être interprété en ce sens que, dans certaines circonstances, un État membre peut exiger que, pour pouvoir être considéré comme étant à charge et relever ainsi de la définition de la notion de ‘membre de la famille’ de cette disposition, le descendant en ligne directe âgé de 21 ans ou plus doit établir avoir vainement tenté de trouver un travail ou de recevoir une aide à la subsistance des autorités du pays d’origine et/ou
essayé par tout autre moyen d’assurer sa subsistance?
2) Pour l’interprétation de la condition d’être ‘à charge’ figurant à l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, quelle est l’incidence du fait qu’un membre de la famille qui, en raison de circonstances personnelles telles que son âge, ses qualifications professionnelles et son état de santé, est considéré comme ayant des chances raisonnables de trouver un emploi et qui, en outre, entend travailler dans l’État membre concerné, ce qui impliquerait que les conditions pour être
considéré comme étant un membre de la famille à charge (au sens de cette disposition) ne sont plus réunies?»
III – La procédure devant la Cour
26. La requérante au principal, les gouvernements suédois, tchèque, néerlandais et du Royaume-Uni ainsi que la Commission européenne ont déposé des observations écrites devant la Cour.
27. Lors de l’audience qui s’est tenue le 5 septembre 2013, ont formulé oralement leurs observations la requérante au principal, les gouvernements suédois et du Royaume-Uni ainsi que la Commission.
IV – Analyse juridique
A – Sur la première question préjudicielle
28. La présente question porte sur l’interprétation de la notion de membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38. Cette directive, s’il est encore besoin de le rappeler, a notamment procédé à la modification du règlement (CEE) no 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté ( 6 ), et à l’abrogation de la directive 73/148/CEE du Conseil, du 21 mai 1973,
relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des États membres à l’intérieur de la Communauté en matière d’établissement et de prestation de services ( 7 ). La directive 2004/38 a regroupé dans un texte unique les droits des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire de cette dernière.
29. Ces deux textes antérieurs contenaient également – j’y reviendrai plus tard – une référence à cette notion de membre de la famille «à charge» sans pour autant en préciser les contours, tout comme d’autres textes de droit dérivé actuellement en vigueur ( 8 ). L’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38 ne contenant aucune précision quant à la manière dont il faut comprendre l’expression «à charge» ni aucun renvoi aux droits nationaux, nous avons ici affaire à une notion autonome du
droit de l’Union qui doit recevoir une interprétation uniforme sur le territoire de l’ensemble des États membres. Or, la détermination de la signification et de la portée des termes pour lesquels le droit de l’Union ne fournit pas de définition doit être établie en tenant compte du contexte dans lequel ces termes sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie ( 9 ).
30. À cette fin, il apparaît nécessaire, en premier lieu, de replacer l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38 dans le contexte plus large de cette dernière avant de rappeler, en deuxième lieu, le sens des jurisprudences précitées Lebon et Jia. Je m’attacherai ensuite à en tirer les conclusions qui s’imposent pour pouvoir répondre à la question posée. Enfin, je terminerai par quelques remarques conclusives relatives à l’examen du cas concret qui nous est aujourd’hui soumis.
1. Analyse textuelle, téléologique et systémique de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38
31. À la lecture de la directive 2004/38, il est tout à fait clair que l’élément central est le citoyen de l’Union qui a exercé sa liberté de circulation au sein de l’Union. Il en est le bénéficiaire principal et direct ( 10 ). Par ricochet, et parce que l’éloignement familial ne devait pas constituer une entrave à l’exercice de la liberté de circulation, les membres de la famille du citoyen de l’Union qui a exercé ladite liberté se voient également reconnaître des droits, non pas propres, mais
seulement dérivés, c’est-à-dire acquis en leur qualité de membres de la famille du bénéficiaire ( 11 ).
32. Le fait que les droits reconnus aux membres de la famille ne soient que des droits dérivés met en lumière l’objectif fondamental poursuivi par la directive 2004/38 qui est non pas le regroupement familial ni le respect de la vie privée et familiale des citoyens de l’Union, mais bien leur «droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres» ( 12 ). Ce n’est que pour servir cet objectif fondamental que les droits de circuler et de séjourner
sont «également accordé[s] aux membres de leur famille quelle que soit leur nationalité» ( 13 ). La préservation de l’unité de la cellule familiale n’a pas été ignorée par le législateur de l’Union, mais elle n’était pas sa préoccupation principale ( 14 ).
33. En outre, les membres de la famille du citoyen de l’Union qui entend exercer ou a déjà exercé sa liberté de circulation ne constituent pas une catégorie uniforme aux termes de la directive 2004/38, de sorte que l’on pourrait être tenté de distinguer entre les membres de la famille nucléaire visés à l’article 2, point 2, sous c), de cette directive, d’une part, et les autres membres de la famille visés à l’article 3, paragraphe 2, de ladite directive, d’autre part.
34. Les membres de la famille nucléaire sont, ainsi, le conjoint ou le partenaire du citoyen de l’Union, leurs descendants directs âgés de moins de 21 ans ou âgés de plus de 21 ans s’ils sont à charge, ainsi que les ascendants à charge. La directive 2004/38, dont ils sont également les bénéficiaires ( 15 ), leur octroie un droit automatique d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil ( 16 ).
35. En ce qui concerne les descendants directs – catégorie qui nous intéresse ici au premier plan – il faut noter que la Commission avait initialement proposé que l’ensemble des ascendants et des descendants directs du citoyen bénéficiaire du droit de circuler et de séjourner ou de son conjoint soit inclus dans la famille nucléaire, sans autre condition ( 17 ). Le Conseil de l’Union européenne, à l’unanimité, a décidé d’introduire la condition d’être «à charge» dans le libellé de l’article 2 de la
directive 2004/38, tant pour les ascendants directs que pour les descendants directs âgés de plus de 21 ans, considérant que cela reflétait l’acquis alors existant ( 18 ).
36. La situation des autres membres de la famille diffère substantiellement puisque les États membres ont seulement l’obligation, à leur égard, de «favoriser, conformément à [leur] législation nationale, l’entrée et le séjour» desdits membres ( 19 ). Pour ce faire, les États membres peuvent entreprendre «un examen approfondi de la situation personnelle» du demandeur ( 20 ). Ces autres membres sont définis de manière restrictive puisque soit ils sont à charge dans le pays d’origine ou font partie du
ménage du citoyen de l’Union concerné, soit il s’agit d’une personne nécessitant impérativement, pour des raisons de santé graves, que ledit citoyen s’en occupe personnellement, soit, enfin, il s’agit du partenaire non enregistré du citoyen de l’Union à condition que la relation durable avec ce dernier soit dûment attestée.
37. Alors que la directive 2004/38 prévoit pour ces autres membres de la famille que les autorités de l’État membre d’accueil procèdent à un examen approfondi de leur situation au moment où ils demandent à rejoindre le citoyen de l’Union, rien n’est précisé quant aux modalités de contrôle et le niveau d’exigences opposable aux membres de la famille nucléaire. Il relève cependant de l’esprit de la directive 2004/38 que, dans la pratique, le législateur de l’Union a entendu favoriser la situation de
ces derniers. Ainsi la Cour a-t-elle jugé qu’«il découle tant du libellé de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38 que du système général de celle-ci que le législateur de l’Union a établi une distinction entre les membres de la famille du citoyen de l’Union définis à l’article 2, point 2, de la directive 2004/38, qui bénéficient, dans les conditions énoncées dans cette directive, d’un droit d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil dudit citoyen, et les autres membres de la
famille visés à l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la même directive, dont l’entrée et le séjour doivent uniquement être favorisés par cet État membre» ( 21 ). À cet égard, la Cour a jugé que, tant en raison de l’absence de règles plus précises contenues dans la directive 2004/38 que du renvoi opéré aux législations nationales par l’article 3, paragraphe 2, de cette dernière, «chaque État membre dispose d’une large marge d’appréciation quant aux choix des facteurs à prendre
en compte» tout en précisant que «l’État membre d’accueil doit veiller à ce que sa législation comporte des critères […] conformes au sens habituel du terme ‘favorise’ ainsi que des termes relatifs à la dépendance employés audit article 3, paragraphe 2, et qui ne privent pas cette disposition de son effet utile» ( 22 ). Parmi ces facteurs, la Cour a notamment mentionné «le degré de dépendance économique ou physique et le degré de parenté entre le membre de la famille et le citoyen de l’Union
qu’il souhaite accompagner ou rejoindre» ( 23 ).
38. En tant que telle, la notion de membre de la famille à charge, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, n’a jamais été explicitée ( 24 ). Selon les lignes directrices ( 25 ), «la qualité de membre de la famille ‘à charge’ résulte d’une situation de fait caractérisée par le fait que le soutien matériel de ce membre de la famille est assuré par le citoyen de l’Union ou par son conjoint/partenaire. […] Il n’est pas nécessaire de se demander si les membres de la famille
concernés seraient, théoriquement, en mesure de subvenir à leurs besoins, par exemple par l’exercice d’une activité rémunérée. Pour déterminer si des membres de la famille sont à charge, il convient d’apprécier au cas par cas si, compte tenu de leur situation financière et sociale, ils ont besoin d’un soutien matériel pour subvenir à leurs besoins essentiels dans leurs pays d’origine» ( 26 ).
39. Ce faisant, la Commission a fondé son interprétation de la notion de membre de la famille à charge, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, sur la jurisprudence existante de la Cour, mais antérieure à l’entrée en vigueur de ladite directive, jurisprudence à propos de laquelle les parties intéressées qui sont intervenues au cours de la présente procédure ont tiré des conclusions radicalement différentes.
40. Ainsi, il appert désormais utile de présenter les deux arrêts fondateurs en question, tout en gardant bien à l’esprit les éléments ci‑dessus dégagés, propres à la directive 2004/38.
2. Retour sur les arrêts Lebon et Jia
41. L’arrêt Lebon, précité, rendu en 1987, a permis à la Cour de fournir la toute première interprétation de la notion de membre de la famille à charge d’un ressortissant de l’Union, alors contenue dans l’article 10, paragraphe 2, du règlement no 1612/68 ( 27 ). Les faits au principal mettaient en présence un ressortissant français, résident belge bénéficiant sur le territoire belge d’une pension de retraite, et sa fille, également de nationalité française et hébergée par son père, laquelle avait
sollicité, auprès des autorités belges, l’octroi d’une aide sociale. La Cour a alors dit pour droit que «la qualité de membre de la famille à charge résulte d’une situation de fait. Il s’agit d’un membre de la famille dont le soutien est assuré par le travailleur, sans qu’il soit nécessaire de déterminer les raisons du recours à ce soutien et de se demander si l’intéressé est en mesure de subvenir à ses besoins par l’exercice d’une activité rémunérée. Cette interprétation est exigée par le
principe selon lequel les dispositions qui consacrent la libre circulation des travailleurs, partie des fondements de la Communauté, doivent être interprétées largement» ( 28 ). Une telle définition, que la Cour aura l’occasion de réitérer par la suite ( 29 ), contrastait alors nettement avec les conclusions de l’avocat général Lenz rendues dans cette affaire ( 30 ).
42. Dans l’arrêt Jia, précité, la Cour était invitée à interpréter la notion d’«ascendant à charge», au sens de l’article 1er, paragraphe 1, sous d), de la directive 73/148 ( 31 ). En l’espèce, les parents d’un ressortissant chinois, vivant auprès de son épouse allemande en Suède, avaient demandé aux autorités suédoises une carte de séjour en se prévalant de leur lien de parenté avec un citoyen de l’Union. Aux points 35 et 36 de son arrêt, la Cour a rappelé les enseignements de sa jurisprudence
Lebon, précitée. Ainsi, après avoir réaffirmé que la qualité de membre de la famille à charge résulte d’une situation de fait caractérisée par la circonstance que le soutien matériel dudit membre est assuré par le ressortissant de l’Union ayant fait usage de sa liberté de circulation, sans qu’il soit nécessaire de déterminer les raisons du recours à ce soutien ni de se demander si l’intéressé est en mesure de subvenir à ses besoins par l’exercice d’une activité rémunérée, la Cour a ajouté que,
«afin de déterminer si les ascendants du conjoint d’un ressortissant communautaire sont à charge de celui-ci, l’État membre d’accueil doit apprécier si, eu égard à leurs conditions économiques et sociales, ceux‑ci ne sont pas en mesure de subvenir à leurs besoins essentiels. La nécessité de ce soutien matériel doit exister dans l’État d’origine» ( 32 ). Le dispositif de l’arrêt Jia, précité, reprend cette idée – nouvelle par rapport à l’arrêt Lebon, précité – de la nécessité du soutien matériel
afin de subvenir aux besoins essentiels dans l’État d’origine du demandeur.
43. Toutefois, les deux questions de principe soulevées par cette affaire étaient relatives à, d’une part, l’exigence préalable d’un séjour légal sur le territoire de l’État membre par le territoire duquel un ressortissant d’État tiers, membre – pas nécessairement à charge – de la famille d’un citoyen de l’Union, est entré dans l’Union ( 33 ) ainsi que, d’autre part, au caractère conditionnel, ou non, des prérogatives que le droit dérivé de l’Union accordait audit membre de la famille, lorsque le
citoyen de l’Union qu’il entendait rejoindre n’avait pas vu sa liberté de circulation entravée en raison du fait qu’il l’avait exercée depuis longtemps ( 34 ). Pour le reste, l’autre question adressée à la Cour portait non pas exactement sur ce qu’il fallait entendre par «membre de la famille à charge», mais plutôt sur le fait de savoir, premièrement, si ledit membre devait dépendre économiquement du citoyen de l’Union pour parvenir à un niveau de vie seulement décent dans son pays d’origine ou
dans celui où il réside habituellement et, deuxièmement, quels moyens de preuve pouvaient être exigés par les autorités nationales ( 35 ).
44. Il n’en demeure pas moins que l’on ne peut ignorer les termes du dispositif de l’arrêt Jia, précité, et sa référence à la nécessité du soutien.
3. Appréciation
45. Les débats devant la Cour se sont focalisés, en très grande partie, sur la confrontation des arrêts précités Lebon et Jia.
46. D’une part, il a été soutenu que l’arrêt Jia, précité, en raison des particularités du cas d’espèce et des spécificités de l’affaire, ne pouvait pas être perçu comme un revirement de l’arrêt Lebon, précité. Dans ces conditions, pour qu’un membre de la famille soit considéré comme à charge, la seule preuve du soutien financier apporté par le citoyen de l’Union doit être suffisante.
47. D’autre part, les gouvernements qui sont intervenus au cours de la présente procédure ont, en substance, défendu la thèse selon laquelle l’arrêt Jia, précité, avait précisé, si ce n’est révisé, l’arrêt Lebon, précité, et ouvert la porte à un contrôle plus précis de la qualité de membre «à charge» par les autorités nationales afin d’exclure tout risque d’abus. La seule preuve du soutien financier ne suffit pas, la nécessité du soutien doit être avérée, ledit membre ainsi assisté ne devant pas
avoir d’autres choix. Le gouvernement du Royaume-Uni va jusqu’à défendre l’idée que ne peuvent être considérées à charge que des personnes qui, en raison de leur état de santé, de leur handicap ou de leur âge, nécessitent un réel soutien de la part du citoyen de l’Union concerné. Le gouvernement suédois propose, pour sa part, de répondre à la question posée à la Cour en ce sens que, du moins dans certaines circonstances, un État membre peut exiger que quiconque se prévaut de la qualité de membre
de la famille à charge, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, doit établir avoir vainement tenté de trouver du travail ou de recevoir une aide à la subsistance des autorités du pays d’origine et/ou essayé par tout autre moyen de subvenir à ses besoins.
48. En ce qui me concerne, je demeure convaincu que le débat doit être élargi au-delà des seuls termes des arrêts précités Lebon et Jia et qu’il faut, pour répondre à la question posée à la Cour, garder à l’esprit tant les spécificités de la directive 2004/38 que l’époque dans laquelle s’inscrit le litige au principal.
49. Ainsi, les préoccupations exprimées par les gouvernements doivent être entendues et la Cour doit s’efforcer de dégager une solution pragmatique, afin d’éviter tout encouragement à la passivité et toute mise en scène artificielle de la situation de dépendance. Je suis donc plutôt enclin à penser que la seule preuve du soutien financier fourni par le citoyen de l’Union n’est pas suffisante pour déterminer la qualité de membre de la famille à charge. Je note, à cet égard, que Mme Reyes ne s’est pas
contentée de fournir aux autorités suédoises les seules preuves de l’existence et de la régularité des virements bancaires en provenance de l’Union.
50. Pour autant, il doit être tiré des conséquences juridiques très concrètes de la distinction qui existe entre les membres de la famille nucléaire et les autres membres de la famille. Le libellé de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38 ne contient pas de prescription qui pourrait venir au soutien de la position défendue par le gouvernement du Royaume-Uni ( 36 ). Je ne saurai me rallier à une interprétation aussi restrictive.
51. Par ailleurs, la mise en œuvre pratique de la solution proposée par le gouvernement suédois serait indéniablement génératrice d’insécurité juridique – voire de discrimination – pour le demandeur. Quelles sont les circonstances particulières en présence desquelles la démonstration de la recherche d’un travail dans le pays d’origine serait exigée? Le demandeur doit-il avoir cherché du travail dans son seul domaine d’expertise ou exige-t-on de lui qu’il ait cherché, à toute fin et quelles que
soient les conditions, à travailler? Le critère selon lequel le demandeur doit avoir essayé «par tout autre moyen» d’assurer sa subsistance est précédé des conjonctions «et/ou». S’agit-il d’un critère supplétif ou alternatif? S’il est supplétif, cela tend à renforcer le caractère déjà très exigeant de la proposition et s’il est alternatif, le demandeur ne peut anticiper quand il pourrait lui être demandé de fournir les éléments de preuve y relatifs – que j’imagine, au demeurant, fort difficiles
à réunir ( 37 ). En tout état de cause, de telles vérifications m’apparaissent davantage tenir de l’«examen approfondi de la situation personnelle» du demandeur, pourtant réservé, selon les termes mêmes de la directive 2004/38, aux autres membres de la famille.
52. Une personne à charge est une personne qui se trouve dans une situation de dépendance à l’égard du citoyen de l’Union concerné. La dépendance doit être telle qu’il est nécessaire pour ladite personne de recourir au soutien du citoyen de l’Union pour la satisfaction de ses besoins matériels essentiels c’est-à-dire de base.
53. C’est cette situation de fait – un soutien matériel apporté par le citoyen de l’Union nécessaire pour la satisfaction des besoins essentiels du membre de sa famille – qui doit être démontrée par les demandeurs. Pour autant, le caractère nécessaire du soutien ne doit pas être impossible à prouver.
54. Dès lors, la question posée à la Cour prend tout son sens, car ce n’est pas tant la définition de membre de la famille à charge qui importe dans le cadre du présent litige au principal que le niveau d’exigences que les autorités nationales peuvent opposer, en matière de preuves, aux demandeurs.
55. Or, si, en tant que telle, la notion de membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union est une notion autonome du droit de l’Union devant recevoir, à ce titre, une interprétation uniforme, c’est au niveau de la preuve exigée des demandeurs que la distinction souhaitée par le législateur de l’Union entre les membres de la famille nucléaire à charge et les autres membres de la famille à charge pourra prendre tout son sens.
56. Non seulement la directive 2004/38 octroie un droit quasi automatique aux membres de la famille nucléaire à charge ( 38 ), mais la Cour a également jugé que «la preuve de la nécessité du soutien matériel peut être faite par tout moyen approprié» ( 39 ), ce qu’est venu confirmé l’article 10, paragraphe 2, sous d), de la directive 2004/38.
57. Dès lors, même sous l’angle du régime de la preuve, la proposition du gouvernement suédois ne peut être retenue en raison du fait qu’elle ne satisfait pas le principe de la liberté des moyens de preuve, indispensable pour ne pas rendre excessivement difficile le séjour sur le territoire de l’État membre d’accueil des membres de la famille nucléaire du citoyen de l’Union.
58. La nécessité du soutien matériel doit ainsi ressortir de preuves documentaires suffisantes, lesquelles peuvent combiner, outre les preuves relatives au soutien fourni par le citoyen de l’Union, tant des éléments subjectifs tenant à la situation économique et sociale personnelle du demandeur que tout autre élément objectif de nature à attester la réalité de la situation de dépendance. Il peut ainsi s’agir de tout élément pertinent susceptible d’illustrer la configuration structurelle de l’État
d’origine, notamment relatif à la situation économique, sociale, sanitaire ou humanitaire dans le pays concerné.
4. Remarques finales
59. Dans le cas très précis de Mme Reyes, et même s’il appartient, bien sûr, à la juridiction de renvoi de se prononcer, in fine, sur sa demande, je souhaite rappeler que son lien de parenté avec un citoyen de l’Union n’a pas été mis en doute. Il n’a pas été fait non plus allusion, au cours de la présente procédure, au caractère abusif que présenterait concrètement la demande de Mme Reyes. La régularité du soutien matériel fourni par Mme Hansen et son époux est avérée. Mme Reyes a, en outre, fait
valoir qu’aucun type d’aide ne pouvait lui être octroyé par le système d’assistance philippin et a également fourni des chiffres – qui ne semblent pas avoir été contestés jusque-là – sur la situation générale du marché du travail philippin et sur le taux endémique de désoccupation qui frappe le secteur d’activité pour lequel Mme Reyes a été formée.
60. Dans ces conditions, je partage pleinement l’interrogation formulée par le conseil de Mme Reyes lors de l’audience devant la Cour, lequel se demandait bien ce que la demanderesse au principal aurait pu produire de plus comme preuves pour qu’un sort favorable fût réservé à sa demande, et tiens à rappeler, comme le fait la directive 2004/38 ( 40 ), que les autorités nationales doivent veiller à garantir le respect des droits fondamentaux et la protection de la dignité des membres de la famille des
citoyens de l’Union lorsqu’elles procèdent à l’examen de leurs demandes de séjour.
61. Il ressort ainsi des considérations qui précèdent qu’est considéré à charge, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, tout membre de la famille qui, quelle qu’en soit la raison, s’avère dans l’incapacité de subvenir à ses besoins essentiels dans son pays d’origine et se trouve, de fait, dans une situation de dépendance telle que le soutien matériel fourni par le citoyen de l’Union est nécessaire à sa subsistance. L’existence d’une telle situation doit être réelle et
peut être prouvée par tout moyen. Le demandeur peut ainsi fournir aux autorités de l’État membre d’accueil tant des éléments subjectifs, tenant à sa propre situation économique et sociale, que tout autre élément pertinent, susceptible d’illustrer, de manière utile pour lesdites autorités, le contexte objectif dans lequel s’inscrit la demande. En tout état de cause, il incombe aux autorités de l’État membre d’accueil de veiller à préserver l’effet utile des droits indirectement conférés aux
membres de la famille nucléaire par la directive 2004/38 et de ne pas rendre excessivement difficile, en faisant notamment peser sur les demandeurs une charge de la preuve trop lourde, l’accès au territoire de l’Union.
B – Sur la seconde question préjudicielle
62. Par sa seconde question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si, au moment d’apprécier la qualité de membre de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, les autorités nationales doivent accorder une quelconque importance au fait que ledit membre, en raison de son âge, de ses qualifications professionnelles ou de son état de santé, a des chances raisonnables de trouver un emploi dans l’État membre d’accueil et a exprimé
le désir d’y travailler. En effet, dans un tel cas, le demandeur du titre de séjour, qui semble être en mesure de réussir, après son arrivée dans l’État membre d’accueil, son insertion professionnelle, ne serait plus à la charge du citoyen de l’Union qu’il a rejoint, s’il devait y exercer une activité rémunérée. Il ne remplirait, dès lors, plus les conditions qui devaient être réunies au moment de la délivrance du titre de séjour et ne pourrait plus prétendre au bénéfice des droits indirectement
conférés par la directive 2004/38 aux membres de la famille visés audit article 2, point 2, sous c).
63. Outre que des décisions aussi fondamentales que celles relatives au droit d’entrée et de séjour des membres de la famille des citoyens de l’Union – à tout le moins en ce qui concerne la famille nucléaire – ne sauraient reposer sur des conjectures, il ressort d’une jurisprudence itérative de la Cour que le fait d’être «à charge» doit être apprécié au moment où le membre de la famille du citoyen de l’Union demande à rejoindre ce dernier ( 41 ).
64. Contrairement à ce que semble sous-entendre la juridiction de renvoi, il n’y a pas d’incohérence systémique à accorder un droit de séjour à un membre de la famille d’un citoyen de l’Union parce qu’il est à charge, au sens de la directive 2004/38, alors même que les autorités nationales pressentent – ou déduisent des intentions affichées du demandeur, comme cela semble être le cas en l’espèce – que ce dernier apparaît en mesure de s’insérer professionnellement dans la société de l’État membre
d’accueil. En effet, et comme l’a relevé à juste titre la Commission, parmi les droits connexes qui sont reconnus par la directive 2004/38 aux «membres de la famille du citoyen de l’Union quelle que soit leur nationalité, qui bénéficient du droit de séjour ou du droit de séjour permanent» figure «le droit d’entamer [dans l’État membre d’accueil] une activité lucrative à titre de travailleur salarié ou de non salarié» ( 42 ).
65. Ainsi, les préoccupations exprimées par la juridiction de renvoi en rapport avec l’article 14 de la directive 2004/38 n’ont pas lieu d’être. Si l’article 14, paragraphe 2, premier alinéa, de ladite directive énonce que «[l]es citoyens de l’Union et les membres de leur famille ont un droit de séjour tel que prévu aux articles 7, 12 et 13 tant qu’ils répondent aux conditions énoncées de ces articles», il y a lieu de relever, d’une part, que lesdits articles 12 et 13, relatifs au maintien du droit
de séjour des membres de la famille respectivement en cas de décès ou de départ du citoyen de l’Union ou en cas de divorce, d’annulation du mariage ou de rupture d’un partenariat enregistré, ne sont pas pertinents pour la situation de Mme Reyes. D’autre part, le droit de séjour d’une durée supérieur à trois mois est reconnu au membre de la famille qui n’a pas la nationalité d’un État membre qui accompagne ou rejoint un citoyen de l’Union seulement si ce dernier – le citoyen de l’Union, donc –
satisfait ou continue de satisfaire les conditions énoncées à l’article 7, paragraphe 1, sous a), b) ou c), de la directive 2004/38 ( 43 ). Ledit article 7 régit ainsi ce qu’il advient du droit de séjour des membres de la famille du citoyen de l’Union lorsque ce dernier cesse de répondre aux conditions nécessaires à la reconnaissance, pour lui-même, d’un droit de séjour d’une durée supérieure à trois mois, mais n’a pas vocation à réglementer la situation dans laquelle le descendant direct d’un
citoyen de l’Union, âgé de plus de 21 ans, un temps reconnu comme à charge dudit citoyen et bénéficiant, à ce titre, d’un droit de séjour, cesserait de l’être en raison du fait qu’il exerce désormais une activité rémunérée dans l’État membre d’accueil.
66. Enfin faut-il répondre à l’inquiétude de la juridiction de renvoi qui voit dans l’octroi d’un titre de séjour à un membre de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union pourtant en capacité de travailler dans l’État membre d’accueil la consécration d’une sorte de stratégie de contournement des législations nationales relatives à l’accès à l’emploi des ressortissants d’États tiers, notamment lorsqu’il s’agit de leur première entrée sur le territoire de l’Union ( 44 ).
67. Certes, l’on ne saurait nier que la reconnaissance d’un droit de séjour pour les membres de la famille visés à l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38 entraine, comme le législateur de l’Union l’a expressément prévu, l’accès au marché du travail de l’État membre d’accueil. Pour autant, le cercle des bénéficiaires des droits indirectement conférés par la directive 2004/38 est défini de manière plutôt restrictive et, en ce qui concerne plus précisément cet article 2, point 2,
sous c), les descendants directs âgés de plus de 21 ans doivent, en tout état de cause, être reconnus à charge par les autorités de l’État membre d’accueil. Le législateur de l’Union, à l’initiative du Conseil ( 45 ), a ainsi posé un garde-fou tout en veillant à préserver, pour les citoyens de l’Union concernés, l’essence même du regroupement familial. Je rappelle que l’appréciation de la qualité de membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union, si elle se fait selon ma proposition
contenue au point 61 des présentes conclusions, devrait garantir l’identification des situations artificiellement créées et rassurer ainsi les États membres quant aux risques auxquels ils pensent leur marché du travail exposé, et ce d’autant plus que le droit d’accéder audit marché n’est octroyé qu’aux composantes de la famille nucléaire telles que je les ai décrites plus haut.
68. Je suggère donc à la Cour de répondre à la seconde question posée que, pour être considéré comme membre de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, la situation de dépendance doit exister dans l’État d’origine du demandeur et doit être appréciée par les autorités de l’État membre d’accueil au moment où il demande à rejoindre le citoyen de l’Union dont il se prétend être à la charge. J’invite également la Cour à préciser que
le fait, pour le demandeur, d’avoir exprimé sa volonté de travailler dans l’État membre d’accueil ou d’être considéré par les autorités dudit État, au moment où il introduit sa demande, comme ayant des chances raisonnables d’obtenir un emploi ne peut constituer un obstacle à la reconnaissance de sa qualité de membre de la famille «à charge» au sens de la disposition susmentionnée s’il ressort, par ailleurs, de l’examen de sa demande qu’il se trouve, dans son pays d’origine, dans une réelle
situation de dépendance à l’égard du citoyen de l’Union qu’il entend rejoindre.
V – Conclusion
69. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles posées par le Kammarrätten i Stockholm – Migrationsöverdomstolen:
1) L’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, doit être interprété en ce sens qu’est réputé «à charge» le
membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui, quelle qu’en soit la raison, s’avère dans l’incapacité de subvenir à ses besoins essentiels dans son pays d’origine et se trouve, de fait, dans une situation de dépendance telle que le soutien matériel fourni par le citoyen de l’Union est nécessaire à sa subsistance. En ce qui concerne les membres de la famille nucléaire réputés à charge, l’existence d’une telle situation doit être réelle et peut être prouvée par tout moyen. Le demandeur peut
ainsi fournir aux autorités de l’État membre d’accueil tant des éléments subjectifs, tenant à sa propre situation économique et sociale, que tout autre élément pertinent, susceptible d’illustrer, de manière utile pour lesdites autorités, le contexte objectif dans lequel s’inscrit la demande. En tout état de cause, il incombe aux autorités de l’État membre d’accueil de veiller à préserver l’effet utile des droits indirectement conférés aux membres de la famille nucléaire par la directive
2004/38 et de ne pas rendre excessivement difficile, en faisant notamment peser sur les demandeurs une charge de la preuve trop lourde, l’accès au territoire de l’Union européenne.
2) Pour être considéré comme membre de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, sous c), de la directive 2004/38, la situation de dépendance doit exister dans l’État d’origine du demandeur et doit être appréciée par les autorités de l’État membre d’accueil au moment où il demande à rejoindre le citoyen de l’Union dont il se prétend être à la charge. Le fait, pour le demandeur, d’avoir exprimé sa volonté de travailler dans l’État membre d’accueil ou d’être
considéré par les autorités dudit État, au moment où il introduit sa demande, comme ayant des chances raisonnables d’obtenir un emploi ne peut constituer un obstacle à la reconnaissance de sa qualité de membre de la famille «à charge» au sens de la disposition susmentionnée s’il ressort, par ailleurs, de l’examen de sa demande qu’il se trouve, dans son pays d’origine, dans une réelle situation de dépendance à l’égard du citoyen de l’Union qu’il entend rejoindre.
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( 1 ) Langue originale: le français.
( 2 ) JO L 158, p. 77, et rectificatif JO 2004, L 229, p. 35.
( 3 ) Arrêt du 9 janvier 2007 (C-1/05, Rec. p. I-1).
( 4 ) Arrêt du 18 juin 1987 (316/85, Rec. p. 2811).
( 5 ) COM(2009) 313 final.
( 6 ) JO L 257, p. 2.
( 7 ) JO L 172, p. 14.
( 8 ) Voir, notamment, articles 1er, sous i), point 2, et 68 bis du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 166, p. 1), ainsi que article 4, paragraphe 2, sous a), de la directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial (JO L 251, p. 12).
( 9 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Ziolkowski et Szeja (C-424/10 et C-425/10, Rec. p. I-14035, points 32 et suiv. ainsi que jurisprudence citée).
( 10 ) Article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38.
( 11 ) Arrêts du 5 mai 2011, McCarthy (C-434/09, Rec. p. I-3375, point 42); du 15 novembre 2011, Dereci e.a. (C-256/11, Rec. p. I-11315, point 55); du 8 novembre 2012, Iida (C‑40/11, point 63), du 8 mai 2013, Ymeraga et Ymeraga-Tafarshiku (C‑87/12, point 31) ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa e.a. (C‑86/12, points 22 et 32).
( 12 ) Considérant 1 de la directive 2004/38.
( 13 ) Considérant 5 de la directive 2004/38. Pour autant, l’existence ou la potentialité d’une entrave à la libre circulation du citoyen concerné ne semblent plus nécessaires pour invoquer les dispositions du droit de l’Union destinées à assurer la liberté de circuler et de séjourner aux citoyens de l’Union, la Cour ayant reconnu le bénéfice des droits que ces dispositions consacraient à des citoyens depuis longtemps installés sur le territoire de l’État membre d’accueil, sans intention de le
quitter, et dont le membre de la famille qui demandait un droit de séjour n’avait pas la nationalité d’un État membre de l’Union. C’était, par exemple, le cas dans l’arrêt Jia, précité, comme c’est le cas dans le cadre de la présente affaire.
( 14 ) Voir, sur ce thème, point 36 des conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 5 septembre 2012, Rahman e.a. (C‑83/11).
( 15 ) Article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38.
( 16 ) Considérant 6 et article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38.
( 17 ) Voir p. 9 de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit des citoyens de l’Union et aux membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres [COM(2001) 257 final) et, particulièrement, la citation de Mme Veil qui y est rapportée ainsi que l’article 2, point 2, de ladite proposition.
( 18 ) Voir projet d’exposé des motifs du Conseil (doc. 13263/03 ADD 1 du 28 octobre 2003, p. 12), ainsi que la communication de la Commission au Parlement européen conformément à l’article [251, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE] concernant la position commune arrêtée par le Conseil en vue de l’adoption d’une directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres
[SEC(2003) 1293 final, point 3.3.2].
( 19 ) Article 3, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 2004/38.
( 20 ) Article 3, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 2004/38.
( 21 ) Arrêt Rahman e.a., précité (point 19).
( 22 ) Ibidem (point 24).
( 23 ) Ibidem (point 23).
( 24 ) Par souci d’exhaustivité, on renverra cependant au point 25 de l’arrêt Alokpa e.a., précité, dans lequel la Cour évoque brièvement le statut de membre de la famille à charge d’un citoyen de l’Union titulaire d’un droit de séjour en paraphrasant l’arrêt Lebon, précité, mais à la seule fin de rappeler qu’un ascendant ressortissant d’un État tiers qui a la charge d’un citoyen de l’Union ne peut être considéré comme ascendant à charge au sens de la directive 2004/38.
( 25 ) Point 24 des présentes conclusions.
( 26 ) Point 2.1.4 des lignes directrices.
( 27 ) Point 28 des présentes conclusions.
( 28 ) Arrêt Lebon, précité (points 22 et 23).
( 29 ) Voir arrêt du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C-200/02, Rec. p. I-9925, point 43).
( 30 ) Voir, notamment, point 43 des conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Lebon, précité.
( 31 ) Point 28 des présentes conclusions.
( 32 ) Arrêt Jia, précité (point 37).
( 33 ) Sur ce point, voir notamment points 26 et suiv. des conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Jia, précité.
( 34 ) Voir points 68 et suiv. des conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Jia, précité.
( 35 ) Pour le libellé exact des questions préjudicielles, voir point 24 de l’arrêt Jia, précité.
( 36 ) Contrairement, par exemple, à l’article 4, paragraphe 2, sous b), de la directive 2003/86.
( 37 ) La preuve de l’épuisement de tout autre moyen m’apparaît, en fait, impossible à apporter.
( 38 ) Voir considérant 6 de la directive 2004/38 et arrêt Rahman e.a., précité (points 19 et 20).
( 39 ) Voir dispositif de l’arrêt Jia, précité.
( 40 ) Voir considérant 31 de la directive 2004/38.
( 41 ) Voir arrêts précités Lebon (point 20) et Jia (point 43). La Cour suit également la même approche lorsqu’il s’agit d’apprécier la situation de dépendance dans laquelle se trouvent des membres de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union qui relèvent de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38 (voir arrêt Rahman e.a., précité, points 33 à 35).
( 42 ) Article 23 de la directive 2004/38.
( 43 ) Voir article 7, paragraphe 2, de la directive 2004/38. Voir, également, article 7, paragraphe 4, de ladite directive pour ce qui concerne le cas particulier des citoyens de l’Union relevant dudit article 7, paragraphe 1, sous c).
( 44 ) Sur ce point, les préoccupations de la juridiction de renvoi font écho à celles exprimées par l’avocat général Geelhoed au point 67 de ses conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Jia, précité.
( 45 ) Voir point 35 des présentes conclusions.