ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)
20 juillet 2016 ( *1 )
«Fonction publique — Concours général — Avis de concours EPSO/AD/293/14 — Nombre insuffisant de points à l’épreuve de l’“évaluateur de talents” — Non-admission au centre d’évaluation — Rejet de la demande de réexamen»
Dans l’affaire F‑123/15,
ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,
GY, demeurant à Luxembourg (Luxembourg), représenté par Mes S. Orlandi et T. Martin, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. G. Gattinara et Mme F. Simonetti, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre),
composé de MM. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, E. Perillo et A. Kornezov, juges,
greffier : M. P. Cullen, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 mai 2016,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 21 septembre 2015, GY demande l’annulation de la décision du 11 juin 2015 par laquelle le jury du concours général EPSO/AD/293/14 (ci-après le « jury ») a refusé de l’admettre aux épreuves de sélection organisées au centre d’évaluation de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) (ci-après la « décision attaquée »).
Faits à l’origine du litige
2 Le requérant a fait acte de candidature au concours général EPSO/AD/293/14 (JO 2014, C 376 A, p. 1) organisé par l’EPSO pour l’établissement de listes de réserve destinées à pourvoir des postes vacants de fonctionnaires de niveau « administrateurs » au sein de la Commission européenne dans cinq domaines, dont celui du droit de la concurrence choisi par le requérant (ci-après le « concours »).
3 Sous le titre I « C[adre général] », l’avis de concours EPSO/AD/293/14 (ci-après l’« avis de concours ») disposait au point 2, intitulé « Remarques », que « [l]a sélection sera[it] effectuée dans un premier temps au moyen de l’“évaluateur de talent[s]” » visé au titre V dudit avis, l’objet de cet « évaluateur de talents » étant d’« identifier les meilleurs candidats selon des critères spécifiques correspondant aux besoins du service et aux priorités de la Commission ».
4 Le titre III « C[onditions d’admission] » de l’avis de concours énumérait les conditions générales et spécifiques que les candidats devaient remplir à la date de clôture des inscriptions au concours.
5 Sous le titre IV « T[ests d’accès] », l’avis de concours indiquait que des tests d’accès sur ordinateur seraient organisés par l’EPSO si le nombre de candidats inscrits était supérieur à un seuil fixé par le directeur de l’EPSO, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination.
6 L’avis de concours précisait, au titre V « A[dmission au concours et sélection sur titres] » :
« L’examen des conditions générales et spécifiques et la sélection sur titres sont effectués dans un premier temps sur la base de vos déclarations faites dans l’acte de candidature.
a) Vos réponses aux questions relatives aux conditions générales et spécifiques seront traitées afin de déterminer si vous faites partie de la liste des candidats qui remplissent toutes les conditions d’admission au concours (voir titre III).
b) Ensuite, le jury procède, pour les candidats admissibles au concours, à une sélection sur titres afin d’identifier les candidats qui possèdent les qualifications les plus pertinentes (notamment diplômes et expérience professionnelle) par rapport à la nature des fonctions et aux critères de sélection décrits dans le présent avis de concours. Cette sélection s’effectue uniquement sur la base de vos déclarations faites dans l’onglet “évaluateur de talents” et se déroule en deux étapes :
— chaque critère de sélection (voir point 4 des annexes) est pondéré de 1 à 3, en fonction de l’importance que le jury lui accorde,
— le jury examine les réponses des candidats et attribue une note de 0 à 4 pour chaque réponse, en fonction des qualifications du candidat. Les notes, multipliées par la pondération de chaque question, sont additionnées afin d’obtenir une note globale.
[…] »
7 Sous le titre VII « V[érifications des déclarations des candidats] » de l’avis de concours, il était précisé ce qui suit :
« À l’issue et à la lumière des résultats du centre d’évaluation, les déclarations faites par les candidats dans leur acte de candidature électronique seront vérifiées par [l’]EPSO pour les conditions générales et par le jury pour les conditions spécifiques, sur la base des pièces justificatives fournies par les candidats.
[…]
Pour l’évaluation des titres, les pièces justificatives ne seront prises en compte que pour confirmer les réponses déjà données dans l’onglet “évaluateur de talent[s]”. S’il ressort de cette vérification que ces déclarations ne sont pas corroborées par les pièces justificatives pertinentes, les candidats concernés seront exclus du concours. »
8 Selon le point 3, intitulé « Expérience professionnelle », de l’annexe I de l’avis de concours, consacrée au profil spécifique recherché dans le domaine du droit de la concurrence choisi par le requérant, les candidats devaient avoir « [a]u moins six années d’expérience professionnelle, dont trois au moins en rapport avec l’application des règles et procédures de concurrence » à la date de clôture fixée pour l’inscription électronique.
9 Le point 4, intitulé « Critères de sélection », de l’annexe I de l’avis de concours précisait encore :
« Dans le cadre de la sélection sur titres, les critères suivants seront pris en considération par le jury :
1. Expérience professionnelle dans l’application des règles et procédures du droit de la concurrence de l’Union européenne, des États membres ou des pays tiers (par exemple A[ssociation européenne de libre-échange], États-Unis) (ententes, accords restrictifs, abus de position dominante, cartels, concentrations ou aides d’État) acquise :
— dans un cabinet d’avocats,
— en tant que juriste d’entreprise,
— dans un cabinet de conseil juridique,
— dans une organisation professionnelle.
2. Expérience professionnelle dans l’application des règles et procédures du droit de la concurrence de l’Union européenne, des États membres ou des pays tiers (par exemple A[ssociation européenne de libre-échange], États-Unis) (ententes, accords restrictifs, abus de position dominante, cartels, concentrations ou aides d’État) acquise au sein d’une juridiction ou d’une autorité publique nationale ou internationale.
3. Expérience professionnelle en droit européen, en droit commercial ou en droit du commerce acquise :
— dans un cabinet d’avocats,
— en tant que juriste d’entreprise,
— dans un cabinet de conseil juridique,
— dans une organisation professionnelle.
4. Expérience professionnelle en droit européen, en droit commercial ou en droit du commerce acquise au sein d’une juridiction ou d’une autorité publique nationale ou internationale.
5. Études universitaires ou post-universitaires dans le domaine du droit européen ou du droit de la concurrence, en plus de celles requises pour obtenir l’accès au concours.
6. Expérience professionnelle dans les processus législatifs dans le domaine du droit européen ou du droit de la concurrence.
7. Expérience dans la recherche ou l’enseignement universitaire en droit européen ou en droit de la concurrence.
8. Articles dans des revues spécialisées ou participation, en tant qu’orateur ou contributeur, à des conférences ou à des ateliers dans le domaine du droit européen ou du droit de la concurrence. »
10 L’EPSO ayant reçu 1175 candidatures, des tests d’accès ont été organisés conformément au titre IV de l’avis de concours. Le requérant a été informé, par courrier du 19 mars 2015, qu’il avait réussi ces tests. Ledit courrier ajoutait qu’il serait informé dans les meilleurs délais, via son compte EPSO, de son admission au centre d’évaluation après la sélection sur titres prévue au titre V de l’avis de concours.
11 Par courrier du 15 avril 2015, l’EPSO a annoncé au requérant que le jury s’était livré à un examen approfondi des réponses qu’il avait données aux questions de l’« évaluateur de talents » et que le score de 15 points qu’il avait obtenu était insuffisant pour être invité au centre d’évaluation, le score minimum requis ayant été fixé à 22 points (ci-après la « décision initiale »).
12 En annexe à la décision initiale figurait une fiche de résultats basée sur les réponses fournies par le requérant aux questions posées dans le cadre de l’« évaluateur de talents » et qui mentionnait également la pondération appliquée par le jury pour chacun des critères de sélection figurant au point 4 de l’annexe I de l’avis de concours. Un second document intitulé « Annexe 1 – Évaluateur de talents » était également annexé à cette décision par le truchement d’un hyperlien. Ce second document
précisait les objectifs et la méthode utilisés par le jury de concours dans le cadre de l’« évaluateur de talents ». S’agissant de la méthode utilisée pour noter les candidats, il était précisé que le jury de concours fixait tout d’abord la pondération de chaque question de l’« évaluateur de talents », puis examinait de manière approfondie chaque réponse à laquelle les candidats avaient répondu par « oui » dans l’onglet « évaluateur de talents » de leur acte de candidature électronique. Le jury
accordait entre 0 et 4 points à chaque réponse en fonction de sa pertinence, points eux-mêmes multipliés par la pondération préalablement arrêtée.
13 Le 20 avril 2015, le requérant a demandé au jury de réexaminer son score et de lui fournir de plus amples informations quant aux points qui lui avaient été attribués pour les différents critères de sélection.
14 Le 11 juin 2015, par la décision attaquée, l’EPSO a répondu à la demande de réexamen du requérant que le jury avait décidé de confirmer sa décision de ne pas l’admettre au stade suivant du concours au centre d’évaluation. La décision attaquée précisait en outre qu’une lettre contenant les commentaires du jury sur la demande de réexamen serait publiée dans son compte EPSO dans les semaines à venir, mais qu’une importante charge de travail pourrait causer certains retards. Au jour de l’introduction
de la requête, le requérant n’avait pas reçu ces commentaires.
15 Enfin, parallèlement à l’introduction du présent recours, le requérant a saisi la Commission d’une demande d’indemnisation pour le préjudice subi du fait de fautes de service.
Conclusions des parties et procédure
16 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision attaquée ;
— condamner la Commission aux dépens.
17 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours comme non fondé ;
— condamner le requérant aux dépens.
18 Par lettre du greffe du Tribunal du 18 mars 2016, le Tribunal a demandé à la Commission de produire les tableaux de présence des membres du jury aux sessions consacrées à l’appréciation des qualifications et de l’expérience professionnelle de l’ensemble des candidats au stade de l’« évaluateur de talents », ainsi que tout autre document de nature à accréditer l’effectivité de cette appréciation ; il était également demandé à la Commission de préciser le nombre de candidats admis à l’épreuve de
l’« évaluateur de talents » qui avaient sollicité le réexamen de leurs réponses par le jury. La Commission a donné suite à cette mesure d’organisation de la procédure par lettre du 20 avril 2016.
En droit
19 Le requérant prend quatre moyens, le premier étant tiré d’une violation de l’obligation de motivation, le deuxième, d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation du principe de bonne administration, le troisième, de l’illégalité de l’avis de concours et, le quatrième, de la violation dudit avis.
20 Il convient de statuer successivement sur les troisième, quatrième, deuxième et premier moyens.
Sur le troisième moyen, tiré de l’illégalité de l’avis de concours
Arguments des parties
21 Le requérant fait valoir que l’avis de concours est illégal en ce qu’il n’a pas fixé suffisamment de critères permettant de baliser les évaluations subjectives du jury, rendant de ce fait impossible, pour celui-ci, de parvenir à une sélection cohérente et objective des candidats.
22 De surcroît, la sélection des candidats effectuée sur la base de l’« évaluateur de talents » aurait été opérée uniquement à partir des réponses données par ceux-ci aux questions figurant dans l’onglet correspondant de leur acte de candidature électronique et reposerait ainsi sur l’idée qu’ils se faisaient de leurs diplômes et de leur expérience professionnelle. Or, selon une telle méthode, un candidat pourrait se trouver éliminé du concours du seul fait que d’autres candidats ont répondu
positivement à certaines questions à la suite d’une interprétation qui leur était excessivement favorable des critères posés, d’une mauvaise compréhension des questions ou d’une mauvaise appréciation de la valeur de leurs diplômes ou expériences professionnelles. Une telle méthode ne garantirait donc pas suffisamment l’objectivité et la cohérence de la sélection et aurait déjà été censurée par la jurisprudence, notamment dans l’arrêt du 16 septembre 2013, Glantenay e.a./Commission (F‑23/12 et
F‑30/12, EU:F:2013:127).
23 La Commission conteste tout d’abord la recevabilité de l’exception d’illégalité soulevée par le requérant. Elle fait valoir que le requérant excipe d’une illégalité qui découlerait du contenu même de l’avis de concours et qu’il n’était donc pas nécessaire qu’il attende la décision du jury de l’écarter pour savoir s’il avait un intérêt légitime à contester la légalité dudit avis. Selon la Commission, le requérant aurait ainsi dû introduire une réclamation contre l’avis de concours dans les délais
statutaires courant à dater de sa publication.
24 S’agissant du fond, la Commission soutient que la jurisprudence citée par le requérant ne concerne que la situation dans laquelle un jury de concours ne contrôle pas le contenu des réponses fournies par les candidats quant à la pertinence de leurs qualifications, alors que, en l’espèce, le jury aurait concrètement vérifié le contenu de chacune de leurs réponses.
Appréciation du Tribunal
25 Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du troisième moyen, il suffit, en tout état de cause, de constater que, contrairement à ce que soutient le requérant, l’avis de concours énumère de façon suffisamment précise les critères de sélection pour permettre au jury de procéder de manière impartiale et objective à la sélection des candidats présentant les qualifications les plus pertinentes. L’avis de concours prévoit ainsi de manière détaillée les critères de sélection au regard
tant de l’expérience professionnelle que des titres possédés par les candidats, ainsi qu’il ressort du point 4 de l’annexe I dudit avis. L’avis de concours précise en outre clairement le nombre minimal d’années d’expérience professionnelle requis pour pouvoir se présenter au concours et encadre également la méthode d’évaluation que le jury doit suivre en précisant la fourchette de pondération qu’il peut attribuer à chaque critère de sélection et le nombre de points susceptibles d’être octroyés
pour chaque réponse, ainsi qu’il ressort clairement du titre V dudit avis.
26 Le moyen tiré de l’exception d’illégalité, tel qu’il est formulé, ne saurait donc être accueilli.
27 Une telle conclusion n’est pas contraire à l’arrêt du 16 septembre 2013, Glantenay e.a./Commission (F‑23/12 et F‑30/12, EU:F:2013:127), dont se prévaut le requérant. En effet, la solution dégagée dans cet arrêt, aux points 70 à 76, concerne, en tout état de cause, la situation dans laquelle un jury de concours ne contrôle pas le contenu des réponses fournies par les candidats quant à la pertinence de leurs qualifications, alors que, en l’espèce, la mission du jury, ainsi qu’il ressort des
titres V et VII de l’avis de concours, était de vérifier concrètement le contenu de chacune des réponses et de sélectionner les candidats admis au centre d’évaluation après avoir examiné la pertinence des diplômes et des expériences professionnelles renseignés.
28 En conséquence, le troisième moyen doit être écarté.
Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’avis de concours
Arguments des parties
29 Le requérant doute que le jury ait procédé, conformément à l’avis de concours, et en particulier à son titre V, premier alinéa, sous b), à un examen approfondi des diplômes et de l’expérience professionnelle des 274 candidats admis au stade de la sélection sur titres sur la base de l’« évaluateur de talents ». Il en déduit, en conséquence, que le jury n’a pas pu effectivement procéder « à une sélection cohérente et objective de l’ensemble des candidats basée sur la pertinence de leurs
qualifications ». Le requérant fait observer, à cet égard, que les lettres de notification de la décision initiale et de la décision attaquée ne contenaient pas le moindre élément d’appréciation de la part du jury et qu’elles n’étaient pas signées par un de ses membres. Il fait de surcroît remarquer que la note attribuée à la plupart de ses réponses aux questions de l’« évaluateur de talents » témoignerait soit d’une méconnaissance manifeste du domaine visé par le concours, à savoir le droit de
la concurrence, soit d’une erreur manifeste dans l’évaluation de la pertinence de ses qualifications et de son expérience dans ce domaine.
30 En l’absence de la moindre motivation contenue dans la décision initiale et dans la décision attaquée, le requérant demande au Tribunal d’enjoindre à l’EPSO de communiquer les tableaux de présence des membres du jury, afin d’évaluer le temps qu’ils ont mis pour évaluer « de manière approfondie » les qualifications et l’expérience professionnelle de l’ensemble des candidats au stade de l’« évaluateur de talents ».
31 Par ailleurs, lors de l’audience, le requérant a également fait valoir que le jury n’avait pas pu, sans méconnaître son pouvoir d’appréciation ainsi que les critères qu’il avait adoptés et la portée de l’avis de concours, n’accorder qu’entre 0 et 2 points aux réponses à la question 5 et n’attribuer qu’une note de 0 ou 1 aux questions 6 à 8, alors qu’il aurait eu l’obligation, en application du titre V, premier alinéa, sous b), deuxième tiret, de l’avis de concours, d’attribuer une note comprise
entre 0 et 4 pour chaque question.
32 La Commission répond que le contenu du réexamen par le jury des réponses du requérant aux questions de l’« évaluateur de talents » ne peut être apprécié indépendamment de la décision initiale, décision initiale que précisément la décision attaquée confirme. Or, expose la Commission, la décision initiale était assortie d’une grille mentionnant les points attribués au requérant au vu de la pertinence de ses qualifications sur la base des informations que celui-ci avait introduites dans
l’« évaluateur de talents » et ces points reflétaient ainsi l’appréciation du jury. De plus, à la décision initiale aurait aussi été annexée une note contenant une explication sur le fonctionnement de cet « évaluateur ». Les commentaires du jury sur les réponses du requérant au questionnaire de l’« évaluateur de talents » annexés au mémoire en défense attesteraient également que le jury a effectivement apprécié la pertinence des qualifications du requérant à la suite de sa demande de réexamen.
Par ailleurs, le fait que ni la décision initiale ni la décision du jury n’ont été signées par un de ses membres s’expliquerait par la circonstance que, aucun contact entre le jury et les candidats n’étant permis, il reviendrait à l’EPSO de signer les décisions du jury pour le compte de celui-ci.
33 Enfin, la Commission conteste, en raison de sa tardiveté, la recevabilité du grief tiré du plafonnement par le jury à deux points ou à un point seulement susceptibles d’être attribués aux réponses fournies respectivement à la cinquième et aux sixième, septième et huitième questions de l’« évaluateur de talents ». Sur le fond, la Commission soutient que l’attribution d’une note maximale d’un ou deux points pour les questions en rapport avec les « études », l’expérience dans les « processus
législatifs », la « recherche », l’« enseignement universitaire » et les « publications » exprimait le choix opéré par le jury, conformément à l’avis de concours et, en particulier, au point 4 de son annexe I, d’attacher plus de poids à l’« expérience pratique » dans « l’application des règles et procédures du droit de la concurrence » qu’aux qualifications visées par les quatre questions litigieuses.
Appréciation du Tribunal
34 Compte tenu de la formulation du quatrième moyen, telle qu’elle ressort de la requête et des débats lors de l’audience, il convient, à titre liminaire, d’observer que le requérant entend soutenir, en premier lieu et en substance, que le jury n’a pas procédé à un examen effectif, objectif et cohérent des candidatures en méconnaissance de ses prérogatives, telles que prévues dans l’avis de concours. En second lieu, et en particulier, le requérant fait valoir que le jury a méconnu les dispositions
du titre V, premier alinéa, sous b), deuxième tiret, de l’avis de concours dans son appréciation des réponses apportées aux questions 5 à 8 de l’« évaluateur de talents ».
35 En premier lieu, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le jury de concours est tenu de vérifier que les candidats possèdent les connaissances et l’expérience professionnelle nécessaires pour les fonctions relatives à l’emploi à pourvoir mentionnées dans l’avis de concours en cause. Il est également tenu de procéder à l’examen comparatif des connaissances et aptitudes des candidats afin de retenir les plus aptes par rapport aux fonctions à exercer (arrêt du 24 avril 2013,
BX/Commission, F‑88/11, EU:F:2013:51, point 39).
36 Dans ce cadre, le jury de concours est tenu de garantir que ses appréciations sur tous les candidats examinés soient portées dans des conditions d’égalité et d’objectivité et il importe que les critères de notation soient uniformes et appliqués de manière cohérente à tous les candidats (arrêt du 22 septembre 2015, Gioria/Commission, F‑82/14, EU:F:2015:108, point 50).
37 Enfin, lorsqu’un jury de concours procède à un réexamen des candidatures, il accomplit cette tâche avec la diligence nécessaire et un soin particulier (voir, en ce sens, arrêts du 28 février 1989, Basch e.a./Commission, 100/87, 146/87 et 153/87, EU:C:1989:97, point 16, et du 17 janvier 2001, Gerochristos/Commission, T‑189/99, EU:T:2001:12, point 19).
38 En l’espèce, il ressort de la fiche de réexamen de la candidature du requérant (ci-après la « fiche de réexamen »), annexée au mémoire en défense, que ses compétences ont été appréciées au regard d’une grille d’analyse préétablie définissant, pour chaque question, une série de critères de notation communs à l’ensemble du jury, tels que la durée minimale de l’expérience considérée comme pertinente, le nombre de points attribués selon la durée de l’expérience pertinente ou encore la cotation des
différentes catégories de diplômes. En outre, il ressort également des commentaires de la fiche de réexamen que le jury, après avoir repris les éléments énoncés par le requérant dans son acte de candidature et fait application à son égard des critères de notation susmentionnés, a indiqué, lorsque l’expérience du requérant ne lui rapportait aucun point, les raisons pour lesquelles celle-ci n’avait pas pu être retenue comme pertinente dans le cadre de la question en cause.
39 Ainsi, le jury a précisé dans le cadre de la question 1 que l’expérience du requérant avait été considérée comme pertinente, mais qu’elle ne lui avait rapporté qu’un point, car sa durée était comprise entre 3 mois et 2 ans ; qu’elle avait été regardée comme pertinente et notée 2 dans le cadre de la question 2, car sa durée était comprise entre 2 et 4 ans, et qu’elle avait également été jugée pertinente dans le cadre de la question 4 et notée 1 dans la mesure où sa durée était comprise entre
3 mois et 2 ans. S’agissant de la question 3, le jury a précisé que l’expérience du requérant en qualité d’avocat stagiaire ne pouvait être retenue, car elle avait déjà été prise en compte au titre de la question 1 et ne pouvait, pour cette raison, être comptabilisée une seconde fois. Le jury a expliqué, en outre, que l’expérience du requérant en tant qu’assistant au Collège d’Europe à Bruges (Belgique) ne répondait pas aux critères posés dans le cadre de la question 3, car elle n’avait été
acquise ni au sein d’un cabinet d’avocats, ni en tant que juriste d’entreprise, ni au sein d’un cabinet de conseil juridique ou d’une organisation professionnelle. S’agissant, ensuite, des questions 6, 7 et 8, le jury a souligné que le requérant avait obtenu la note maximale qu’un candidat dont l’expérience aurait été jugée pertinente pouvait obtenir auxdites questions et, pour ce qui concerne la question 5, il a indiqué qu’au regard de la grille d’évaluation utilisée, et dont il a rappelé, une
nouvelle fois, les critères de notation, le diplôme LLM en droit européen du requérant n’avait pu lui rapporter qu’un point sur les deux points qu’un candidat pouvait obtenir dans le cadre de cette question. Un commentaire précisait, en outre, dans la fiche de réexamen que, « même si [le requérant avait été] spécialisé en droit de la concurrence et aurait [ainsi] pu obtenir deux points, ceci n’aurait rien changé [à] la situation [puisque, dans ce cas,] le total de points aurait été de 16 plutôt
que de 15, ce qui restait encore loin du seuil de 22 points nécessaires pour réussir [l’épreuve de l’“évaluateur de talents”] ».
40 Au total, de tels commentaires et appréciations témoignent de ce que le jury, notant chaque élément de la candidature du requérant au regard d’une grille d’analyse et de notation prédéfinie et indiquant les raisons pour lesquelles, le cas échéant, il n’attribuait aucun point au requérant, a effectué le réexamen de ladite candidature avec le soin et l’impartialité exigés par l’avis de concours.
41 En réponse à la mesure d’organisation de la procédure visée au point 18 du présent arrêt, la Commission a, par ailleurs, transmis au Tribunal les tableaux de présence des membres du jury aux sessions consacrées à l’examen des qualifications et de l’expérience de l’ensemble des candidats au stade de l’épreuve de l’« évaluateur de talents ». Elle a également précisé que le jury avait examiné 39 demandes de réexamen dans le domaine du droit de la concurrence, lesquelles ont été examinées
conformément au calendrier des travaux du jury qu’elle avait joint au mémoire en défense, soit sur deux jours.
42 S’agissant de l’examen des candidatures au stade de l’« évaluateur de talents », il ressort des tableaux transmis que le jury a examiné 274 candidatures sur trois jours, les 30, 31 mars et 1er avril 2015, de 10 h 30 à 17 h 00 le premier jour, de 9 h 00 à 17 h 00 les deux autres jours. Le temps passé par dossier pourrait ainsi paraître court, puisque, selon de telles données, il s’établirait entre 4 et 5 minutes. Il convient toutefois de noter, d’une part, que l’examen s’est effectué de manière
collégiale. D’autre part, il y a lieu de noter qu’il suffisait à ce stade au jury d’appliquer une grille de notation préétablie aux réponses fournies par les candidats à un nombre restreint de questions sur la base des déclarations des candidats, lesquelles, comme dans le cas du requérant, se résumaient, pour chaque question, à deux ou trois courtes lignes. En outre, il convient de remarquer qu’un tel examen a été précédé de deux réunions préparatoires, le 2 décembre 2014 et le 11 mars 2015, afin
de déterminer, d’un commun accord entre les membres du jury, la pondération de chacune des huit questions de l’« évaluateur de talents » ainsi que les critères de notation.
43 Surtout, s’agissant du réexamen de la candidature du requérant, objet de la décision attaquée, il ressort du dossier que le réexamen des 39 demandes dans le domaine du droit de la concurrence s’est déroulé sur deux jours, entre le 6 et le 8 mai 2015. Le jury, ayant examiné entre une vingtaine et une trentaine de demandes par jour, a consacré au total entre 25 et 35 minutes par demande. Dans ces conditions, il ne saurait être valablement soutenu qu’il n’aurait pas eu le temps d’évaluer de
« manière approfondie » la demande de réexamen du requérant. À cet égard, si, dans sa requête, le requérant a néanmoins indiqué, à l’appui de son quatrième moyen, que les notes qui lui avaient été attribuées auraient témoigné d’une méconnaissance par le jury du droit de la concurrence, susceptible de faire douter de son implication réelle dans l’examen des candidatures, une telle affirmation est purement gratuite et n’est étayée d’aucun élément de nature à en établir le bien-fondé.
44 Il ne ressort ainsi ni de la fiche de réexamen ni des éléments apportés par la Commission en réponse à la mesure d’organisation de la procédure que l’examen effectué par le jury dans le cadre du concours n’aurait pas été effectué avec soin et impartialité.
45 Une telle conclusion ne saurait être remise en cause par la circonstance que les lettres par lesquelles ont été notifiées la décision initiale ainsi que la décision attaquée n’ont pas été signées par l’un des membres du jury, mais par un chef d’unité de l’EPSO, au nom du président du jury. Une telle circonstance ne saurait révéler, par elle-même, une absence d’examen effectif de la candidature du requérant ni même contribuer à douter de « l’implication concrète du jury dans ces deux décisions ».
Une telle procédure de notification des décisions du jury par l’EPSO ne fait que se conformer aux dispositions générales applicables aux concours généraux, dans leur version applicable au litige (JO 2014, C 60 A, p. 1), l’EPSO étant chargé, pour le compte et au nom du jury, d’informer les candidats de leurs résultats à travers un compte personnel, dit « compte EPSO ». Au surplus, et en tout état de cause, il convient de rappeler que, d’une manière générale, une irrégularité dans la notification
d’une décision administrative est sans incidence sur la légalité de ladite décision, une telle circonstance étant, en tout état de cause, postérieure à cette même décision (voir, en ce sens, arrêts du 14 juillet 1972, Imperial Chemical Industries/Commission, 48/69, EU:C:1972:70, point 39, et du 2 juillet 2002, SAT.1/OHMI (SAT.2), T‑323/00, EU:T:2002:172, point 12).
46 Le requérant ne saurait davantage, pour les mêmes raisons, se fonder sur le fait que les lettres de notification de la décision initiale et de la décision attaquée n’auraient pas contenu « le moindre élément d’appréciation de la part du jury, celles-ci se limitant à la communication d’une note », pour conclure à un défaut d’examen par le jury de sa candidature.
47 Il découle de tout ce qui précède que le requérant n’a avancé aucun élément susceptible de douter de l’effectivité de l’examen des candidatures sur la base de l’« évaluation de talents », tel qu’il ressort des éléments fournis en défense.
48 En second lieu, s’agissant du grief tiré du plafonnement des points attribués pour les réponses aux questions 5 à 8, si la Commission a estimé, au cours de l’audience, que ce grief constituait un moyen nouveau et donc irrecevable, il convient toutefois d’observer qu’il ne constitue que l’ampliation du moyen tiré de la violation de l’avis de concours, lequel moyen a été soulevé dans le cadre de la requête. En tout état de cause, l’article 56 du règlement de procédure, relatif aux moyens nouveaux,
permet de présenter après le premier échange de mémoires un moyen nouveau lorsqu’il se fonde sur des éléments de droit ou de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Or, ce n’est qu’en cours d’instance, après la réception des commentaires du jury annexés au mémoire en défense, que le requérant a été en mesure de faire valoir son argumentation sur la notation des réponses aux questions 5 à 8 retenue par le jury. Une telle argumentation est donc recevable.
49 Sur le fond, il y a lieu d’observer que, selon les termes de l’annexe I de l’avis de concours, s’agissant du recrutement d’administrateurs dans le domaine du droit européen de la concurrence, le jury est chargé de sélectionner des « juristes disposant de connaissances et d’une expertise en droit européen de la concurrence (ententes, concentrations ou aides d’État) et d’une expérience pratique dans l’application des règles et des procédures de concurrence, acquise dans un cabinet d’avocats, au
sein d’une juridiction, en tant que juriste d’entreprise, dans un cabinet de conseil juridique, dans une organisation professionnelle ou auprès d’une autorité nationale ou internationale ». Au stade de l’admission au concours et de la sélection sur titres, l’avis de concours prévoit, au titre V, premier alinéa, sous b), que le jury procède, sur la base des déclarations faites dans le cadre de l’« évaluateur de talents », « à une sélection sur titres afin d’identifier les candidats qui possèdent
les qualifications les plus pertinentes (notamment diplômes et expérience professionnelle) par rapport à la nature des fonctions et aux critères de sélection » énoncés, s’agissant du domaine du concours choisi par le requérant, au point 4 de l’annexe I de l’avis de concours, et ce, d’abord, en pondérant de 1 à 3 chacun de ces critères « en fonction de l’importance que le jury lui accorde » et, ensuite, en attribuant une note allant de 0 à 4 à chacune des réponses des candidats, cette note étant
fonction des « qualifications d[es] candidat[s] ».
50 Il ressort ainsi du libellé de l’avis de concours que, aux fins d’identifier, dans un premier temps au moyen de l’« évaluateur de talents », « les meilleurs candidats » selon les besoins du service et les priorités de la Commission, le jury était tenu, d’abord, d’évaluer, en l’affectant d’une pondération de 1 à 3, l’importance de chaque critère de sélection figurant à l’annexe concernée de l’avis de concours et, ensuite, d’attribuer une note allant de 0 à 4 pour chaque réponse des candidats en
fonction de la pertinence de leurs qualifications au regard des critères de sélection eux-mêmes pondérés en fonction de leur importance. Or, il ressort du dossier que le jury a réservé, contrairement à ce que prévoit l’avis de concours, une note maximale inférieure à 4 pour les réponses fournies par les candidats relativement à quatre critères de sélection sur les huit critères énumérés à l’annexe I dudit avis. Ce faisant, le jury a, une nouvelle fois, fixé le degré d’importance des critères
considérés en le diminuant encore au-delà du cadre imposé par l’avis de concours. Telle était d’ailleurs l’intention du jury, ainsi qu’il ressort des observations orales et écrites de la Commission.
51 En procédant de la sorte, le jury a donc confondu, contrairement à ce que prévoit l’avis de concours, le paramètre relatif à l’« importance » accordée à chaque critère de sélection avec celui, distinct, concernant les « qualifications » des candidats.
52 De fait, les questions 6 à 8 ont été affectées d’une pondération de 1 et les réponses afférentes des candidats, quelles que soient leurs qualifications en rapport avec les critères de sélection en cause, n’ont jamais pu se voir attribuer plus d’un point, ce qui signifie que, au total, pour chacune de ces trois questions, un candidat pouvait au maximum obtenir un seul point, alors que, selon le titre V, premier alinéa, sous b), deuxième tiret, de l’avis de concours, un critère de sélection dont
l’importance est évaluée au plus bas, en l’occurrence affecté d’une pondération de 1, permet néanmoins l’obtention d’un maximum de quatre points. La même observation peut être faite à propos de la question 5, dont l’importance a également été évaluée au plus bas (1 point) et à laquelle les réponses des candidats ne pouvaient justifier l’attribution de plus de deux points, soit plus de deux points au total, alors qu’elles auraient également pu justifier l’attribution, au maximun, de quatre points
selon le titre V, premier alinéa, sous b), deuxième tiret, de l’avis de concours. Le plafond retenu par le jury pour les quatre questions susmentionnées revient ainsi à diminuer fortement l’importance des critères de sélection en cause, alors qu’ils figurent parmi les huit critères de sélection qu’il incombe au jury de prendre en considération, conformément au point 4 de l’annexe I de l’avis de concours et dont l’importance doit être évaluée, selon le titre V, premier alinéa, sous b), premier
tiret, de l’avis de concours, uniquement par le biais d’une pondération de 1 à 3.
53 Or, il est de jurisprudence constante que, nonobstant son pouvoir d’appréciation en ce qui concerne les modalités et le contenu des épreuves d’un concours, le jury est lié par le texte et, en particulier, par les conditions d’admission fixées par l’avis de concours (arrêts du 25 mars 2004, Petrich/Commission, T‑145/02, EU:T:2004:91, point 34 ; du 11 juillet 2006, Tas/Commission, F‑12/05, EU:F:2006:68, point 43, et du 12 mars 2009, Hambura/Parlement, F‑4/08, EU:F:2009:25, point 46). En effet, le
rôle essentiel de l’avis de concours, tel qu’il a été conçu par le statut des fonctionnaires de l’Union européenne, consiste à informer les intéressés, d’une façon aussi exacte que possible, de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s’agit, afin, notamment, de les mettre en mesure d’apprécier s’il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (ordonnance du 3 avril 2001, Zaur-Gora et Dubigh/Commission, T‑95/00 et T‑96/00, EU:T:2001:114, point 47, et arrêt du 24 avril
2013, Demeneix/Commission, F‑96/12, EU:F:2013:52, point 41).
54 Il y a donc lieu d’accueillir le quatrième moyen, pris de la violation de l’avis de concours.
Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation du principe de bonne administration
55 Le requérant considère, en substance, que les notes que le jury lui a attribuées dans le cadre de l’« évaluateur de talents » témoignent d’une erreur manifeste d’appréciation et que, si le jury avait correctement pris en compte son expérience et ses qualifications, il aurait pu facilement obtenir les 22 points nécessaires pour être admis au centre d’évaluation, spécialement en raison de l’effet multiplicateur des coefficients appliqués par le jury aux réponses aux quatre premières questions.
56 La Commission fait valoir, pour l’essentiel, que, compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont bénéficient les jurys de concours, leurs appréciations ne sauraient être considérées comme entachées d’une erreur manifeste que si le requérant produit des éléments de nature à les priver de toute plausibilité. Or, le requérant se serait limité à faire état de ses convictions personnelles sur la manière dont ses qualifications auraient dû être appréciées, ce qui ne saurait constituer un élément
suffisant. La Commission souligne également que, aux termes de l’annexe I, point 3, de l’avis de concours, une expérience professionnelle d’au moins six années, dont au moins trois dans l’application des règles et procédures de concurrence, était requise et que le point 4 de cette annexe donnait une « importance relativement majeure » à l’expérience professionnelle des candidats par rapport à d’autres qualifications, comme les publications ou les diplômes.
57 Par ailleurs, la Commission relève que, dans l’intitulé de son deuxième moyen, le requérant mentionne aussi une prétendue violation du devoir de bonne administration. Elle fait cependant valoir, en substance, que, à défaut de développements à cet égard, la décision attaquée ne saurait être considérée comme violant celui-ci.
58 À cet égard, il convient de constater, à titre liminaire, ainsi que le fait valoir à bon droit la Commission, que le requérant n’a apporté aucun élément spécifique dans sa requête pour établir que la décision attaquée aurait révélé ou aurait été entachée d’une violation du principe de bonne administration. À supposer que le requérant ait entendu soulever de manière autonome le moyen tiré d’une violation du principe de bonne administration, faute de précisions utiles pour en apprécier le
bien-fondé, un tel moyen est irrecevable, conformément à l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure.
59 Au surplus, si lors de l’audience le requérant a précisé qu’il entendait soutenir que la Commission avait méconnu le principe de bonne administration pour ne pas avoir communiqué les commentaires du jury accompagnant la décision attaquée alors qu’elle l’avait annoncé, une telle argumentation a été soulevée dans le cadre du moyen tiré de l’insuffisance de motivation et non dans celui tiré de l’erreur manifeste d’appréciation. Le requérant n’établit ni même n’allègue en effet qu’une telle
méconnaissance, à la supposer avérée, aurait pu entacher d’une erreur manifeste l’appréciation faite par le jury de ses qualifications et de son expérience.
60 Cela étant précisé, s’agissant du grief tiré de l’erreur manifeste d’appréciation, il convient de constater, ainsi qu’il ressort de l’examen du quatrième moyen, tiré de la violation de l’avis de concours, que l’appréciation faite par le jury des réponses du requérant dans le cadre des questions 5 à 8 de l’« évaluateur de talents » repose sur une erreur de droit ayant conduit le jury à confondre le paramètre relatif à l’importance accordée à chaque critère de sélection avec celui concernant les
qualifications des candidats. Or, une telle erreur, qui a porté sur quatre des huit questions de l’« évaluateur de talents », est de nature à fausser l’appréciation globale faite par le jury des qualifications et de l’expérience du requérant, laquelle se reflète dans le score final que celui-ci a obtenu à l’ensemble des questions posées dans ce cadre.
61 Dans ces conditions, l’examen du point de savoir si la décision attaquée serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation se fonderait sur des prémisses erronées et soit conduirait à constater l’existence d’une telle erreur qui ne serait que la conséquence de la violation de l’avis de concours, ce qui opérerait une confusion quant à la nature de ces différents vices, soit anticiperait sur l’examen que le jury sera amené à effectuer en exécution de l’arrêt à venir (voir, en ce sens, arrêt du
26 mars 2014, CP/Parlement, F‑8/13, EU:F:2014:44, point 91).
62 Il n’y a, par conséquent, pas lieu d’examiner le deuxième moyen, en ce qu’il est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation.
63 Compte tenu de tout ce qui précède et sans qu’il soit besoin d’examiner le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, il convient d’accueillir le quatrième moyen, pris de la violation de l’avis de concours, et d’annuler, par voie de conséquence, la décision attaquée.
Sur les dépens
64 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux
dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
65 Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que la Commission est la partie qui succombe. En outre, le requérant a, dans ses conclusions, expressément demandé que la Commission soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, la Commission doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par le requérant.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision du 11 juin 2015 par laquelle le jury du concours général EPSO/AD/293/14 a refusé d’admettre GY aux épreuves de sélection organisées au centre d’évaluation est annulée.
2) La Commission européenne supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par GY.
Van Raepenbusch
Perillo
Kornezov
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juillet 2016.
Le greffier
W. Hakenberg
Le président
S. Van Raepenbusch
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( *1 ) Langue de procédure : le français.