CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MACIEJ SZPUNAR
présentées le 7 septembre 2017 ( 1 )
Affaire C‑265/16
VCAST Limited
contre
R.T.I. SpA
[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale di Torino (tribunal de Turin, Italie)]
« Renvoi préjudiciel – Propriété intellectuelle et industrielle – Droit d’auteur et droits voisins – Droit de reproduction – Exception – Reproduction à usage privé – Fourniture d’un service d’enregistrement vidéo à distance (cloud computing) de reproductions à usage privé d’émissions de télévision sans l’accord des titulaires des droits d’auteur – Intervention du prestataire du service dans ledit enregistrement – Mise à disposition desdites émissions »
Introduction
1. L’informatique en nuage, connue principalement sous son nom anglais « cloud computing », se définit comme l’accès, via un réseau de télécommunication (Internet), à la demande et en libre-service, à des ressources informatiques partagées configurables. Il s’agit donc d’une délocalisation de l’infrastructure informatique ( 2 ). Le cloud computing a pour particularité que, contrairement aux modes classiques d’utilisation de l’infrastructure informatique, l’utilisateur n’acquiert pas ou ne loue pas
d’équipements informatiques concrets, mais utilise, sous forme de services, les capacités de l’infrastructure appartenant à un tiers, dont l’emplacement ne lui est pas connu et qui peut d’ailleurs varier. Du point de vue de cet utilisateur, ces capacités se trouvent donc « quelque part dans le nuage » (non pas atmosphérique, mais bien entendu informatique). Une telle configuration permet une meilleure utilisation des ressources, ainsi que leur adaptation automatique aux fluctuations de la
demande.
2. Les services fournis sous forme de cloud computing (ci-après le « nuage ») sont très variés et peuvent aller de la simple fourniture d’infrastructures informatiques, de logiciels et d’outils de communication (courrier électronique) jusqu’aux services les plus sophistiqués. Parmi les services dans le nuage fournis aux consommateurs, l’un des plus répandus est le stockage des données. Ainsi, plusieurs fournisseurs proposent des capacités de stockage de différentes tailles, gratuites ou payantes,
sous différentes formules commerciales. Ces capacités de stockage sont habituellement destinées à l’usage privatif du bénéficiaire, mais elles peuvent également comporter des fonctionnalités de partage. Les services de stockage offrent souvent des prestations connexes, comme l’indexation des données stockées ou leur traitement, par exemple des outils de traitement des images.
3. Les données stockées en nuage peuvent contenir, entre autres, des reproductions d’œuvres protégées par le droit d’auteur effectuées par les utilisateurs de ces services de stockage dans le cadre de l’exception dite de copie privée. Cependant, contrairement à l’utilisation d’un matériel de reproduction se trouvant à la disposition directe du copiste, dans le cas d’une reproduction dans le nuage, une intervention du fournisseur du service de stockage ou d’une autre personne est normalement
nécessaire. Il est donc légitime de se poser la question si, dans une telle situation, la reproduction est encore effectuée « par » le bénéficiaire de l’exception de copie privée, comme exigé par la législation. C’est sur cette question que se sont concentrés les débats dans la présente affaire.
4. Je pense cependant que celle-ci soulève, au vu des circonstances factuelles du litige au principal, une question plus fondamentale : celle des limites de l’exception de copie privée en ce qui concerne la provenance de l’œuvre faisant l’objet de la reproduction. La Cour avait déjà abordé cette question dans un certain nombre d’affaires concernant la redevance au titre de l’exception de copie privée. Je pense que la jurisprudence en la matière mérite certaines précisions.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
5. La directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique ») ( 3 ) prévoit, à son article 3, paragraphes 2 et 3 :
« 2. Les États membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre État membre.
3. Les paragraphes 1 et 2 ne sont pas applicables aux domaines visés à l’annexe. »
6. L’annexe de la directive 2000/31, intitulée « Dérogations à l’article 3 », prévoit à son premier tiret :
« Comme prévu à l’article 3, paragraphe 3, les paragraphes 1 et 2 de l’article 3 ne s’appliquent pas dans les cas suivants :
– le droit d’auteur, les droits voisins […] »
7. L’article 2 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information ( 4 ) dispose :
« Les États membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction directe ou indirecte, provisoire ou permanente, par quelque moyen et sous quelque forme que ce soit, en tout ou en partie :
a) pour les auteurs, de leurs œuvres ;
b) pour les artistes interprètes ou exécutants, des fixations de leurs exécutions ;
c) pour les producteurs de phonogrammes, de leurs phonogrammes ;
d) pour les producteurs des premières fixations de films, de l’original et de copies de leurs films ;
e) pour les organismes de radiodiffusion, des fixations de leurs émissions, qu’elles soient diffusées par fil ou sans fil, y compris par câble ou par satellite. »
8. L’article 5, paragraphe 2, sous b), et paragraphe 5, de la directive 2001/29, prévoit :
« 2. Les États membres ont la faculté de prévoir des exceptions ou limitations au droit de reproduction prévu à l’article 2 dans les cas suivants :
[…]
b) lorsqu’il s’agit de reproductions effectuées sur tout support par une personne physique pour un usage privé et à des fins non directement ou indirectement commerciales, à condition que les titulaires de droits reçoivent une compensation équitable qui prend en compte l’application ou la non-application des mesures techniques visées à l’article 6 aux œuvres ou objets concernés ;
[…]
5. Les exceptions et limitations prévues aux paragraphes 1, 2, 3 et 4 ne sont applicables que dans certains cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ou autre objet protégé ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit. »
Le droit italien
9. Le droit d’auteur est régi en droit italien par la legge n. 633/1941 – Protezione del diritto d’autore e di altri diritti connessi al suo esercizio (loi no 633/1941, sur la protection du droit d’auteur et d’autres droits connexes à son exercice), du 22 avril 1941 (ci-après la « loi sur le droit d’auteur »). L’exception de copie privée est prévue à l’article 71 sexies de cette loi, ainsi rédigé :
« 1. Est autorisée la copie privée de phonogrammes et de vidéogrammes sur tout support, effectuée par une personne physique pour un usage exclusivement personnel, sans but de lucre et à des fins non directement ni indirectement commerciales, dans le respect des mesures techniques visées à l’article 102 quater.
2. La reproduction visée au paragraphe 1 ne saurait être effectuée par des tiers. La prestation de services conçue pour permettre la reproduction de phonogrammes et de vidéogrammes par une personne physique pour son usage personnel constitue une activité de reproduction régie par les articles 13, 72, 78 bis, 79 et 80.
[…]
4. Sauf dans le cas visé au paragraphe 3, les titulaires des droits sont tenus de permettre, nonobstant l’application des mesures technologiques prévues à l’article 102 quater, que la personne physique, qui a acquis la possession légitime d’exemplaires de l’œuvre ou du matériel protégés ou y a eu accès de manière légitime, puisse en faire une copie privée, même seulement analogique, pour son usage personnel, à condition que cette possibilité ne soit pas contraire à la jouissance normale de
l’œuvre ou des autres matériaux et ne constitue pas un enrichissement indu au préjudice des titulaires des droits. »
10. L’article 71 septies de cette loi introduit la compensation pour les titulaires des droits d’auteur au titre de l’exception de copie privée. Cette compensation est financée par une redevance prélevée sur le prix de vente des appareils et des supports permettant d’effectuer des copies d’œuvres protégées par le droit d’auteur. Le paragraphe 1, dernière phrase, de cet article est formulé de manière suivante :
« Pour les systèmes d’enregistrement vidéo à distance, la compensation visée au présent paragraphe est due par la personne qui fournit le service et est proportionnée à la rémunération obtenue pour la prestation du service lui-même. »
11. Cette dernière phrase a été insérée par une modification législative du 31 décembre 2007. Selon les informations fournies par le gouvernement italien, son introduction a provoqué une procédure en manquement de la part de la Commission européenne pour violation alléguée de l’article 2, intitulé « Droit de reproduction », et de l’article 3, intitulé « Droit de communication d’œuvres au public […] », de la directive 2001/29. Du fait des allégations de la Commission, les autorités italiennes
auraient décidé de ne pas fixer de redevance sur les services d’enregistrement à distance. Ce choix aurait été considéré licite par les juridictions italiennes. Notamment, le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie) aurait jugé que les autorités ont décidé « en toute légalité de surseoir temporairement à l’application dudit paragraphe 1, dernière phrase ».
Les faits, la procédure et les questions préjudicielles
12. VCAST Limited est une société de droit anglais qui met à la disposition de ses usagers un système d’enregistrement dans le nuage des émissions d’organismes de télévision italiens transmises par voie terrestre en libre accès, dont celles de R.T.I. SpA (ci-après « RTI »). En pratique, l’utilisateur choisit une émission sur le site Internet de VCAST, sur lequel figure toute la programmation des chaînes de télévision comprises dans le service. L’utilisateur peut soit indiquer une émission donnée,
soit une plage horaire, en sachant que, dans le premier cas, c’est la plage horaire pendant laquelle l’émission choisie est programmée qui sera enregistrée. Ensuite, le système géré par VCAST capte le signal de télévision à l’aide de ses propres antennes et enregistre la plage horaire d’émission choisie sur l’espace de stockage des données dans le nuage indiqué par l’utilisateur. Cet espace de stockage est fourni non pas par VCAST, mais par des fournisseurs indépendants ( 5 ). Les données
audiovisuelles ainsi enregistrées sont mises ensuite à la disposition de l’utilisateur selon les modalités prévues par le fournisseur du service de stockage. Le service de VCAST se décline en trois formules : une formule gratuite pour l’utilisateur, qui est financée par la publicité, et deux formules payantes.
13. VCAST a assigné RTI devant le Tribunale di Torino (tribunal de Turin, Italie), la juridiction de renvoi, afin que celui-ci constate la légalité de ses activités, le cas échéant après avoir posé soit une question de constitutionnalité de l’article 71 sexies, paragraphe 2, de la loi sur le droit d’auteur, soit une question préjudicielle à la Cour sur l’interprétation du droit de l’Union. VCAST prétend, en substance, que son activité relève de l’exception de copie privée, car c’est l’utilisateur
qui effectue en réalité l’enregistrement, VCAST fournissant uniquement l’équipement nécessaire, à savoir le système d’enregistrement vidéo à distance. Selon VCAST, la légalité de son service serait confirmée notamment par l’article 71 septies, paragraphe 1, dernière phrase, de la loi sur le droit d’auteur qui, en soumettant les services d’enregistrement à distance à la redevance, assimilerait ces services à l’exercice de l’exception de copie privée.
14. RTI, partie défenderesse au principal, conteste le caractère légal de l’activité de VCAST. Elle a présenté une demande reconventionnelle d’interdiction de la poursuite de l’activité en cause et de réparation du préjudice subi du fait de cette activité. Par ordonnance en référé du 30 octobre 2015, la juridiction de renvoi a adopté des mesures provisoires, notamment en interdisant à VCAST de poursuivre son activité en ce qui concerne les émissions des chaînes de télévision de RTI.
15. Ayant considéré que la solution du litige exigeait l’interprétation des dispositions du droit de l’Union, notamment celles de l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29, le Tribunale di Torino (tribunal de Turin) a sursis à statuer et a déféré à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Une disposition nationale qui interdit à un entrepreneur commercial de fournir à des particuliers un service d’enregistrement à distance de copies privées d’œuvres protégées par le droit d’auteur au moyen d’un système informatique en nuage, en intervenant activement dans l’enregistrement, sans autorisation du titulaire de droit, est-elle conforme au droit de l’Union, notamment à l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la [directive 2001/29] (ainsi qu’à la [directive 2000/31], et au traité
fondateur) ?
2) Une disposition nationale qui permet à un entrepreneur commercial de fournir à des particuliers un service d’enregistrement à distance de copies privées d’œuvres protégées par le droit d’auteur au moyen d’un système informatique en nuage en intervenant activement dans l’enregistrement, sans autorisation du titulaire de droit, en contrepartie d’une compensation forfaitaire rémunérant le titulaire de droit, ce qui revient en substance à un régime de licence obligatoire, est-elle conforme au
droit de l’Union, notamment à l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la [directive 2001/29] (ainsi qu’à la [directive 2000/31], et au traité fondateur) ? »
16. La demande de décision préjudicielle est parvenue à la Cour le 12 mai 2016. Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal, les gouvernements italien, français et portugais, ainsi que par la Commission. Les parties au principal, le gouvernement italien et la Commission ont été représentés à l’audience qui s’est tenue le 29 mars 2017.
Analyse
Remarques liminaires
17. Les deux questions préjudicielles concernent en fait le même problème juridique, considéré sous deux angles différents. Il s’agit en substance de savoir si les dispositions du droit de l’Union mentionnées dans lesdites questions imposent ou, au contraire, interdisent aux États membres ayant transposé dans leur droit interne l’exception de copie privée de permettre l’activité consistant à fournir, sans l’autorisation des titulaires des droits d’auteur, un service d’enregistrement en ligne (dans
le nuage) d’émissions de télévision librement accessibles par voie terrestre sur le territoire de l’État membre concerné.
18. En ce qui concerne l’identification des dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est demandée, seul l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 a été clairement indiqué.
19. Concernant la directive 2000/31, la disposition qui pourrait éventuellement s’appliquer au cas d’espèce est son article 3, paragraphe 2, qui interdit aux États membres de restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre État membre. En effet, le service fourni par VCAST semble bien remplir les critères de la définition de service de la société de l’information. Cependant, selon le paragraphe 3 du même article, en liaison avec l’annexe de la
directive 2000/31, sont exclues du champ d’application de cette interdiction les restrictions découlant de la protection du droit d’auteur et des droits voisins. Or, c’est précisément sur ce fondement que l’activité de VCAST est susceptible d’être considérée illégale en droit italien. L’article 3, paragraphe 2, de la directive 2000/31 ne semble donc pas applicable en l’espèce.
20. Ensuite, concernant le « traité fondateur », ni le libellé des questions préjudicielles ni les développements contenus dans la demande de décision préjudicielle ne fournissent d’indications précises pour identifier la disposition du droit primaire à laquelle la juridiction de renvoi fait référence. Cela permet d’ailleurs, comme le soutien RTI dans ses observations, de douter de la recevabilité des questions préjudicielles dans la mesure où elles concernent « le traité fondateur ». Dans un esprit
de bienveillance et dans la ligne de raisonnement présentée au point précédent en ce qui concerne la directive 2000/31, je peux supposer que la disposition visée par la juridiction de renvoi est celle concernant la liberté de prestation des services, consacrée à l’article 56 TFUE. En effet, VCAST étant une société établie au Royaume-Uni, elle fournit son service de manière transfrontalière, ce qui lui permet de bénéficier de cette liberté.
21. Cependant, en tout état de cause, selon une jurisprudence constante, la protection du droit d’auteur constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à la libre prestation des services ( 6 ). Il s’agit d’ailleurs d’un domaine harmonisé, dans lequel le constat du caractère illicite de l’activité concernée au regard d’une disposition du droit de l’Union suffit à justifier la restriction corrélative à la libre prestation des services. Ainsi, au vu de la
réponse aux questions préjudicielles que j’envisage de proposer à la Cour, l’éventuelle restriction à la libre prestation des services fournis par VCAST serait de toute façon largement justifiée par l’objectif de la protection efficace du droit d’auteur.
22. Au vu de ce qui précède, je propose donc d’analyser les questions préjudicielles uniquement sous l’angle de l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29. Cette analyse, afin d’être utile à la solution du litige au principal, qui concerne la légalité du service fourni par VCAST, tiendra compte en outre du mode de fonctionnement particulier de ce service.
Sur la question de l’enregistrement dans le nuage dans le cadre de l’exception de copie privée
23. Pour rappel, l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 définit la copie privée comme des « reproductions effectuées sur tout support par une personne physique pour un usage privé et à des fins non directement ou indirectement commerciales » ( 7 ). Or, il est constant que la réalisation des reproductions et leur stockage dans le nuage nécessitent l’intervention de personnes tierces : en premier lieu celle du fournisseur des capacités de stockage et, éventuellement, d’autres
personnes. Il est donc légitime de se demander si et dans quelle mesure la disposition susmentionnée admet une telle intervention.
24. Premièrement, en ce qui concerne la possession et la mise à disposition des capacités de stockage, la jurisprudence de la Cour relative à la compensation liée à l’exception de copie privée semble donner des repères assez clairs. En effet, selon cette jurisprudence, même si les redevables de la compensation sont, en principe, les utilisateurs qui réalisent les reproductions dans le cadre de cette exception, pour des raisons pratiques, les État membres sont en droit de percevoir ladite
compensation auprès des personnes qui mettent à disposition du public des supports ou des équipements d’enregistrement ( 8 ). Si cette mise à disposition s’effectue le plus souvent par la vente de supports ou d’équipements, la compensation étant prélevée sur le prix de cette vente, il n’existe selon moi aucun obstacle de principe s’opposant à ce qu’elle prenne la forme d’une mise à disposition des capacités de stockage dans le nuage. Cette position est corroborée par la jurisprudence de la Cour
selon laquelle la compensation au titre de l’exception de copie privée peut concerner des reproductions effectuées par une personne privée à l’aide d’un dispositif qui appartient à un tiers ( 9 ).
25. Deuxièmement, en ce qui concerne l’intervention de tiers dans l’acte de reproduction lui-même, je suis d’avis qu’une interprétation excessivement rigoureuse de l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 ne serait pas justifiée. Il est clair que la reproduction d’une œuvre dans le cadre de l’exception de copie privée et son enregistrement dans le nuage, c’est-à-dire dans un espace de stockage de données se trouvant hors de la portée directe de l’utilisateur qui effectue cette
reproduction, nécessitent l’intervention d’un tiers, que ce soit le fournisseur de cet espace de stockage ou une autre personne. En effet, l’initialisation de la reproduction par l’utilisateur enclenche un certain nombre de procédés, plus ou moins automatisés, qui aboutissent à la création d’une copie de l’œuvre en question. Je ne pense pas qu’il faille exclure cette forme de reproduction du champ d’application de l’exception de copie privée du seul fait de l’intervention d’un tiers allant
au-delà d’une simple mise à disposition de supports ou d’équipements. Aussi longtemps que c’est l’utilisateur qui prend l’initiative de la reproduction et qui en définit l’objet et les modalités, je ne vois pas de différence décisive entre un tel acte et la reproduction effectuée par ce même utilisateur à l’aide d’équipements qu’il maîtrise directement ( 10 ). Par ailleurs, la jurisprudence citée au point précédent admet explicitement que la compensation au titre de l’exception de copie privée
concerne les reproductions effectuées dans le cadre de la prestation de services de reproduction ( 11 ).
26. Le fait que l’intervention d’un tiers dans la réalisation de la reproduction puisse se faire contre rémunération n’infirme pas cette constatation, car l’exigence de fins non commerciales posée à l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 concerne non pas l’intervention éventuelle d’un tiers, mais l’utilisation de la copie par le bénéficiaire de l’exception en question.
27. J’ajouterais enfin que le fait, soulevé par RTI à l’audience, que l’utilisateur puisse partager le contenu enregistré dans le nuage avec d’autres utilisateurs d’Internet, dépassant ainsi le cadre de l’utilisation privée de la copie, ne me semble pas pertinent. En effet, les services de stockage de données dans le nuage comportent souvent des fonctionnalités de partage de ces données. Ainsi, dès lors qu’une copie privée d’un objet protégé est enregistrée dans le cadre d’un tel service, il est
techniquement possible à l’utilisateur de partager cette copie avec un nombre indéfini, et potentiellement important, de personnes tierces. Un tel partage pourrait dépasser le cadre de l’utilisation permise de la copie privée et être, de ce fait, qualifié de mise à disposition non autorisée. Cette possibilité n’est cependant pas propre à l’enregistrement dans le nuage car, à l’heure actuelle, chaque copie, notamment numérique, peut être facilement partagée à l’aide d’Internet, en violation du
droit d’auteur. Il est de la responsabilité des utilisateurs de ne pas commettre de telles violations. En revanche, je ne suis pas convaincu que la seule existence de cette possibilité théorique doive conduire à exclure l’enregistrement dans le nuage du bénéfice de l’exception de copie privée.
28. Ainsi, aucun élément ne me semble indiquer que l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 s’opposerait à ce que la reproduction dans le cadre de l’exception prévue à cet article soit effectuée sur un espace de stockage dans le nuage.
Sur la question de l’accès à l’objet de la reproduction
29. Les choses semblent plus compliquées en ce qui concerne la provenance des œuvres reproduites dans le cadre de l’exception de copie privée. Si la jurisprudence de la Cour admet, d’une part, que les copies privées soient effectuées à l’aide de dispositifs appartenant à des tiers, elle exige, d’autre part, que l’utilisateur ait accès à l’objet de la reproduction de manière licite. Je doute qu’un service tel que celui proposé par VCAST remplisse cette dernière exigence.
L’accès à l’objet de la reproduction selon la jurisprudence de la Cour
30. La Cour avait déjà eu l’occasion de répondre à la question de savoir si l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 s’opposait à une réglementation nationale prévoyant la compensation au titre des copies d’œuvres protégées effectuées non seulement à l’aide d’un dispositif appartenant à un tiers, mais également à partir d’un tel dispositif ( 12 ). La Cour avait répondu par la négative en considérant que cette disposition ne réglementait en aucune manière le lien juridique existant
entre la personne effectuant la reproduction dans le cadre de l’exception de copie privée et le dispositif utilisé à cette fin ( 13 ), et que le dispositif utilisé pouvait donc très bien appartenir à un tiers ( 14 ).
31. Cette constatation de la Cour pourrait conduire à penser que toute copie effectuée à des fins d’utilisation privée d’une personne physique relève de l’exception prévue à l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29. Cette conclusion doit cependant être nuancée.
32. En effet, la Cour a également jugé que le bénéfice de l’exception de copie privée est conditionné par le caractère licite de la source de la reproduction ( 15 ). En d’autres termes, l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 « suppose nécessairement que l’objet de la reproduction visée par [cette] disposition soit une œuvre protégée, non contrefaite ou piratée » ( 16 ).
33. Ainsi, avant d’être en droit d’effectuer une reproduction pour son usage privé, l’utilisateur doit avoir eu licitement accès à l’œuvre en question. Comme nous l’avons vu, cet accès ne doit pas forcément passer par l’achat d’un support matériel contenant l’œuvre. Il peut se faire dans le cadre d’une communication de l’œuvre au public avec l’autorisation des titulaires des droits d’auteur. Je suppose que cet accès peut également avoir lieu dans le cadre d’une des exceptions aux droits d’auteur ou
aux droits voisins prévues dans la législation de l’Union. En revanche, l’accès aux fins du bénéfice de l’exception de copie privée ne saurait se faire dans le cadre d’une distribution ou d’une communication de l’œuvre au public sans le consentement des titulaires des droits d’auteur.
34. Il convient dès lors, à la lumière de ces considérations, d’analyser les conditions dans lesquelles les utilisateurs ont accès aux émissions de télévision dans le cadre du service d’enregistrement fourni par VCAST.
L’accès à l’objet de la reproduction dans le cadre du service fourni par VCAST
35. Pour rappel, selon la description du service fourni par VCAST, contenue dans la demande de décision préjudicielle et non contestée par les parties, dans le cadre de ce service, l’utilisateur choisit la chaîne de télévision et la plage horaire à enregistrer sur le site Internet de VCAST. Ensuite, c’est VCAST qui capte, à l’aide de ses propres installations de réception, le signal de télévision distribué par voie terrestre (c’est-à-dire par ondes hertziennes) et enregistre la plage horaire choisie
par l’utilisateur sur le service de stockage dans le nuage que celui-ci a indiqué.
36. Il ressort donc clairement, à mon avis, de cette description que la possibilité de bénéficier de la reproduction effectuée par VCAST n’est nullement conditionnée par l’accès préalable de l’utilisateur aux émissions de la télévision terrestre en Italie. L’utilisateur peut donc ne pas y avoir du tout accès, en ne possédant ni antenne ni poste de télévision, VCAST lui fournissant cet accès en mettant à sa disposition les émissions choisies. Ce faisant, il est clair que VCAST ne procède pas à une
retransmission intégrale de la programmation des chaînes de télévision italiennes. Toutefois, cela n’a aucune incidence sur la question qui nous intéresse en l’espèce, qui ne concerne pas la possibilité de regarder la télévision en général, mais l’accès aux émissions reproduites dans le cadre du service fourni par VCAST.
37. Le fait que c’est VCAST qui est la source de l’accès de ses utilisateurs aux émissions qui font l’objet de la reproduction est corroboré par la circonstance, confirmée à l’audience, que le service fourni par VCAST n’est pas (ou, en tout cas, n’était pas à l’époque des faits dans la procédure au principal) limité au territoire italien. Ainsi, les utilisateurs de ce service, pour avoir accès aux émissions, n’ont même pas besoin de se trouver dans la zone de couverture de la télévision terrestre
italienne ( 17 ). Autrement dit, le service de VCAST n’est pas limité aux personnes ayant réellement accès aux émissions de la télévision terrestre italienne, ni même aux personnes qui pourraient théoriquement y avoir accès.
38. Certes, le représentant de VCAST a déclaré à l’audience que le service pourrait être limité géographiquement au besoin. Cependant, le problème n’est pas de savoir si ce service est géographiquement limité ou pas. D’ailleurs, une telle limitation pourrait être contraire, sinon à la lettre, au moins à l’esprit des règles du marché interne ( 18 ). En fait, le seul fait que le service en question puisse fonctionner en dehors de la zone de couverture de la télévision terrestre italienne démontre
qu’il ne repose pas sur la logique de l’exception de copie privée, car celle-ci présuppose un accès préalable et licite de l’utilisateur à l’œuvre faisant l’objet de la reproduction. Or, dans le cas de ce service, c’est la reproduction elle-même qui constitue la seule voie d’accès de l’utilisateur à l’œuvre reproduite.
39. Quel est donc le rôle joué par VCAST ? La réponse n’est pas univoque, car son rôle combine un acte de mise à disposition et un acte de reproduction. J’adopte une interprétation favorable à VCAST, dans laquelle il y a bien place pour une copie privée effectuée par l’utilisateur. Mon analyse est donc la suivante.
40. VCAST met à la disposition de ses utilisateurs les émissions des organismes de télévision italiens, ce qui est une forme de communication au public relevant de l’article 3 de la directive 2001/29. L’utilisateur accède à l’émission en commandant une reproduction de celle-ci qui sera effectuée sur son espace de stockage dans le nuage. Si l’acte de reproduction lui-même peut, en principe, bénéficier de l’exception de copie privée, ce n’est pas le cas de l’acte préalable de mise à disposition qui
constitue la source de cette reproduction. Pour que toute l’opération soit licite, la mise à disposition doit donc être licite, car son illicéité exclurait l’application de l’exception ( 19 ).
41. VCAST met les émissions à la disposition de ses utilisateurs sans le consentement des titulaires des droits d’auteur. S’il s’agissait d’œuvres se trouvant normalement dans le commerce moyennant une rémunération versée aux titulaires des droits, telles que les phonogrammes ou vidéogrammes, il n’y aurait alors à mon avis aucun doute que cette mise à disposition constitue une contrefaçon. La spécificité de la présente affaire réside dans le fait qu’il s’agit d’émissions de télévision terrestre,
accessibles librement à tous les utilisateurs se trouvant dans la zone de couverture de la diffusion ( 20 ). Il convient alors d’analyser si cette spécificité influe de manière décisive sur la solution du problème.
La protection des droits des organismes de télévision en libre accès
42. Je dois signaler d’emblée qu’à mon avis la réponse à cette question est négative, et ce pour une série de raisons.
– L’étendue géographique du service
43. Comme je l’ai indiqué dans les points précédents, le service fourni par VCAST, en tout cas à l’époque des faits au principal, n’était pas limité au territoire italien, qui est également le territoire de couverture de la télévision terrestre italienne. Ainsi, chaque utilisateur d’Internet dans le monde entier pouvait demander et recevoir sur son espace de stockage dans le nuage la reproduction d’une émission de télévision à laquelle il n’aurait pas eu accès sans le service de VCAST. Cet élément
suffit à lui seul, à mon avis, à exclure un tel service du champ d’application de l’exception de copie privée. Le fait que ces émissions soient librement et gratuitement accessibles ne change rien à ce constat, car cette accessibilité, et donc la limitation éventuelle du monopole des titulaires des droits d’auteur, est restreinte à la zone de couverture de la télévision terrestre et ne saurait produire d’effets en dehors de cette zone.
– La protection des organismes de radiotélévision contre la violation de leurs droits d’auteur
44. Indépendamment de l’étendue géographique du service fourni par VCAST, l’interprétation des dispositions de la directive 2001/29 qui découle de la jurisprudence de la Cour s’oppose, à mon avis, au constat selon lequel les organismes de télévision seraient dépourvus de la protection de leurs droits d’auteur du fait de l’accessibilité libre à leurs émissions.
45. En effet, à propos du droit de communication d’œuvres au public (protégé par l’article 3 de la directive 2001/29), la Cour a jugé, en se fondant principalement sur la convention de Berne ( 21 ) et son guide explicatif, qu’une communication faite par un organisme de retransmission différent de l’organisme d’origine doit être analysée comme faite à un public distinct du public visé par l’acte de communication originaire de l’œuvre, c’est-à-dire à un public nouveau ( 22 ). Cela découle du fait,
selon la Cour, que l’auteur, en autorisant la radiodiffusion de son œuvre, prend en considération uniquement les usagers directs, c’est-à-dire les détenteurs d’appareils de réception qui, individuellement ou dans leur sphère privée ou familiale, captent les émissions. En revanche, dès lors que cette captation se fait à l’intention d’un auditoire plus vaste, et parfois à des fins lucratives, une fraction nouvelle du public réceptionnaire est admise à bénéficier de l’écoute ou de la vision de
l’œuvre ( 23 ).
46. La Cour en a conclu que la retransmission du signal de télévision par le gérant d’un établissement hôtelier vers les chambres de l’hôtel constitue une communication au public nécessitant l’autorisation des titulaires des droits d’auteur. En effet, toujours selon la Cour, les clients de cet établissement forment un public nouveau qui, en l’absence de l’intervention dudit gérant, tout en se trouvant à l’intérieur de la zone de couverture de l’émission originaire, ne pourrait, en principe, jouir de
l’œuvre diffusée ( 24 ). Cette position de la Cour a ensuite été confirmée en ce qui concerne d’autres types d’établissements ( 25 ).
47. À mon avis, il en va de même dans le cas d’un service comme celui que VCAST fournit. Cette société est indubitablement un organisme différent des organismes de télévision qui sont à l’origine des émissions. Les utilisateurs de ce service, indépendamment du fait qu’ils se trouvent ou non dans la zone de couverture des émissions originaires, forment donc un public nouveau qui n’a pas été pris en compte par les titulaires des droits d’auteur aux fins de l’autorisation de ces émissions. De plus, ce
service est fourni dans un but lucratif ( 26 ). Il s’ensuit que la mise à disposition des émissions de télévision par VCAST dans le cadre de son service d’enregistrement constitue une violation des droits d’auteur des organismes de télévision et, éventuellement, d’autres ayants droit, si elle est effectuée sans leur autorisation.
48. Cette mise à disposition est également illicite au regard des constatations de la Cour dans l’arrêt ITV Broadcasting e.a. ( 27 ). Dans cette affaire, qui concernait la retransmission sur Internet d’émissions de télévision et qui était donc similaire à l’affaire au principal, la Cour a jugé que le législateur de l’Union, en régissant les situations dans lesquelles une œuvre donnée fait l’objet d’utilisations multiples, a entendu que chaque transmission ou retransmission d’une œuvre qui utilise un
mode technique spécifique doit être, en principe, individuellement autorisée par l’auteur de l’œuvre en cause. Or, étant donné qu’une mise à disposition des œuvres par le biais de la retransmission sur Internet d’une radiodiffusion télévisuelle terrestre se fait suivant un mode technique spécifique qui est différent de celui de la communication d’origine, elle doit être considérée comme une communication au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29 ( 28 ).
49. La Cour est parvenue à cette conclusion bien que le fournisseur du service en cause dans cette affaire se soit assuré du fait que les utilisateurs de ses services obtenaient l’accès uniquement à un contenu qu’ils étaient déjà légalement en droit de visionner dans l’État membre concerné (à savoir le Royaume-Uni) au moyen de leur licence de télévision ( 29 ) et que donc, selon les arguments de ce fournisseur, ces utilisateurs ne pouvaient pas être considérés comme un public nouveau par rapport au
public déjà ciblé par les émissions d’origine. La Cour a en effet considéré que, dans le cas de la transmission des œuvres incluses dans une radiodiffusion terrestre et de la mise à disposition des mêmes œuvres sur Internet, chacune de ces deux transmissions doit être autorisée individuellement et séparément par les auteurs concernés, étant donné que chacune d’elles est effectuée dans des conditions techniques spécifiques, suivant un mode différent de transmission des œuvres protégées et chacune
destinée à un public différent. Dans ces conditions, il n’y a plus lieu d’examiner, en aval, la condition relative au public nouveau, qui n’est pertinente que dans les situations où le moyen technique de communication est le même ( 30 ).
50. En concluant, la Cour a dit pour droit que la notion de communication au public, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29, doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre une retransmission des œuvres incluses dans une radiodiffusion télévisuelle terrestre :
– qui est effectuée par un organisme autre que le radiodiffuseur original ;
– au moyen d’un flux Internet mis à disposition des abonnés de cet organisme qui peuvent recevoir cette retransmission en se connectant au serveur de celui-ci ;
– bien que ces abonnés se trouvent dans la zone de réception de ladite radiodiffusion télévisuelle terrestre et puissent recevoir légalement celle-ci sur un récepteur de télévision ( 31 ).
51. Il suffit de remplacer le deuxième tiret du point précédent par « au moyen de reproductions mises à la disposition des abonnés de cet organisme qui peuvent recevoir cette retransmission en se connectant à leur service de stockage » pour que cette jurisprudence soit pleinement applicable à la présente affaire. En outre, il convient de souligner que VCAST ne vérifie même pas que ses utilisateurs aient le droit et les moyens techniques de recevoir les émissions de la télévision terrestre italienne.
– L’inapplicabilité de l’« exception AKM »
52. Il est vrai que la position de la Cour semble quelque peu atténuée par le récent arrêt AKM ( 32 ). Dans cet arrêt, la Cour a en effet jugé qu’une transmission simultanée, complète et non modifiée d’émissions radiodiffusées de l’organisme national de radiodiffusion, à l’aide de câbles sur le territoire national, c’est-à-dire par un moyen technique différent de celui employé lors de la transmission radiodiffusée initiale, ne constitue pas une communication au public au sens de l’article 3,
paragraphe 1, de la directive 2001/29, car le public auquel cette transmission est faite ne saurait être considéré comme un public nouveau ( 33 ). Cependant, il me semble que cette solution repose sur la condition, dont la vérification a été laissée aux soins du juge de renvoi, que les titulaires des droits d’auteur avaient bien pris en compte la retransmission en cause dans le cadre de l’autorisation qu’ils avaient donnée pour l’émission initiale ( 34 ).
53. L’arrêt en question n’est pas tout à fait clair à cet égard. Cependant, toute autre interprétation signifierait qu’il constitue un net revirement de la règle découlant de l’arrêt ITV Broadcasting e.a. ( 35 ), selon laquelle, en présence d’un mode technique différent, la question de l’existence du public nouveau n’est pas pertinente ( 36 ). Or, rien dans l’arrêt mentionné n’indique que la Cour ait voulu effectuer un tel revirement.
54. Par ailleurs, une règle générale, selon laquelle la transmission d’une œuvre ayant déjà fait l’objet d’une radiodiffusion par un autre organisme que celui à l’origine de cette radiodiffusion ne constitue pas une communication au public, semblerait contraire à l’article 11 bis, paragraphe 1, point 2, de la convention de Berne, qui accorde aux auteurs le droit exclusif d’autoriser « toute communication publique […] de l’œuvre radiodiffusée, lorsque cette communication est faite par un autre
organisme que celui d’origine ». Or, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, l’interprétation de la notion de « communication au public » au sens de l’article 3 de la directive 2001/29 doit être opérée en conformité avec ladite disposition conventionnelle ( 37 ).
55. Il doit être également noté que l’arrêt AKM ( 38 ) concerne la transmission simultanée, complète et non modifiée des émissions radiodiffusées ( 39 ). Dans le cas d’une telle transmission, les utilisateurs peuvent bénéficier des émissions dans les mêmes conditions que celles de la radiodiffusion initiale. En revanche, dans le cas d’un service tel que celui fourni par VCAST, ils disposent d’une copie numérique de l’émission qu’ils peuvent regarder au moment voulu et autant de fois qu’ils le
souhaitent, ainsi qu’en faire des reproductions et les transférer sur n’importe quel équipement. Cette situation n’est donc pas comparable à celle de l’arrêt AKM. En tout état de cause, dans l’affaire au principal, VCAST ne prétend bénéficier d’aucune autorisation de la part des titulaires des droits d’auteur pour mettre à la disposition de ses utilisateurs les œuvres radiodiffusées par les organismes de télévision italiens. Il ne saurait donc se prévaloir de l’arrêt AKM ( 40 ).
56. Pour conclure cette partie, il est à mon avis clair, à la lumière de la jurisprudence de la Cour, que la mise à disposition d’émissions de télévision aux utilisateurs du service fourni par VCAST sans le consentement des titulaires des droits d’auteur constitue une violation de ces droits, bien qu’il s’agisse d’émissions librement accessibles, et indépendamment de la question de savoir si cette mise à disposition est limitée à la zone de couverture de la diffusion de ces émissions ou pas. La
reproduction de ces émissions dans le cadre du même service, effectuée à partir d’une source illicite, ne saurait donc bénéficier de l’exception de copie privée.
Le test en trois étapes
– Remarques liminaires
57. L’article 5, paragraphe 5, de la directive 2001/29 introduit une limitation au droit des États membres de prévoir dans leur législation interne les exceptions mentionnées au même article, en disposant que « ces exceptions ne doivent s’appliquer que dans certains cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ou autre objet protégé ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit ». Cette disposition trouve son origine dans
l’article 9, paragraphe 2, de la convention de Berne, qui limite ainsi la possibilité de prévoir des exceptions au droit de reproduction ( 41 ). Cette triple condition de l’applicabilité des exceptions est communément appelée « test en trois étapes » ou « triple test ».
58. Il est vrai que selon la Cour, l’article 5, paragraphe 5, de la directive 2001/29 ne modifie pas le contenu des exceptions prévues au même article ( 42 ). Cela étant, la Cour a simultanément jugé que cette disposition intervient au moment de l’application des exceptions par les États membres ( 43 ). Elle sert donc de repère d’interprétation des exceptions lors de leur application dans le droit interne des États membres, mais également aux fins de l’interprétation des dispositions de la directive
2001/29 par la Cour. Ainsi, concernant l’exception de copie privée, c’est en se basant notamment sur l’article 5, paragraphe 5, de la directive 2001/29 que la Cour a dit pour droit que cette exception ne s’applique qu’aux reproductions ayant une source licite ( 44 ).
59. Il s’ensuit que l’article 5, paragraphe 5, de la directive 2001/29 doit également être pris en compte pour répondre à la question de savoir si un service tel que celui fourni par VCAST peut relever, dans le droit interne des États membres, de l’exception au droit de reproduction basée sur l’article 5, paragraphe 2, sous b), de cette directive.
– L’application dans des cas spéciaux et l’interdiction du préjudice injustifié
60. Les première et troisième « étapes » du triple test consistent à vérifier que l’exception est appliquée dans des cas spéciaux qui ne causent pas un préjudice injustifié aux titulaires des droits d’auteur. Comme chaque exception au monopole de l’auteur, en tant que limitation de ses droits, lui cause un certain préjudice, cette règle commande que l’application d’une exception donnée soit limitée aux situations dans lesquelles cette application est justifiée par la raison d’être de l’exception.
Seule cette raison d’être peut en effet justifier le préjudice causé par l’application de l’exception.
61. Si les fondements de l’exception de copie privée peuvent être recherchés dans différents facteurs, il est assez communément admis que sa raison d’être principale réside dans le fait qu’il est impossible, ou à tout le moins très difficile, pour les titulaires de droits d’auteur de contrôler l’utilisation qui est faite de leurs œuvres protégées par les personnes qui y ont licitement accès. Un tel contrôle pourrait d’ailleurs constituer une ingérence intolérable dans la vie privée des
utilisateurs ( 45 ).
62. Or, cette justification ne se présente pas dans le cas d’un service tel que celui fourni par VCAST. En effet, ce service ne se limite pas à la sphère privée des utilisateurs, car la phase préalable à la création de la reproduction, à savoir la fourniture par VCAST d’accès aux émissions de télévision, se fait publiquement, dans le cadre de l’activité économique de cette société et est facilement contrôlable par les titulaires des droits d’auteur. Rien ne s’oppose à ce que ces titulaires exigent
que soit demandée leur autorisation pour ledit service et à ce que VCAST demande une telle autorisation. La raison d’être de l’exception de copie privée ne justifie donc pas le préjudice qui découlerait, pour les titulaires des droits d’auteur, de l’application de cette exception à des services tels que celui fourni par VCAST.
63. Je tiens à souligner que la situation de VCAST est différente de celle des opérateurs qui mettent à la disposition des utilisateurs des équipements ou supports d’enregistrement, ou qui fournissent des services de reproduction. En effet, ces équipements, supports et services peuvent être utilisés afin de reproduire des œuvres protégées, mais peuvent également servir à d’autres fins. En plus, l’identité des œuvres éventuellement reproduites, et donc des titulaires des droits, n’est pas connue à
l’avance. Il serait donc insensé d’exiger desdits operateurs de demander l’autorisation des titulaires des droits d’auteur pour la vente ou la location de tels équipements ou la fourniture de tels services. En revanche, un service tel que celui fourni par VCAST a pour objet exclusif la mise à disposition et la reproduction d’œuvres protégées qui sont concrètement désignées à l’avance (car prévues dans la programmation des chaînes de télévision) et dont les titulaires des droits d’auteur sont
connus.
64. Dans le cas des copies d’œuvres provenant de sources illicites, la Cour a jugé que l’application de l’exception de copie privée causerait un préjudice injustifié aux titulaires des droits d’auteur, car ils seraient obligés de tolérer, outre l’usage des œuvres dans la sphère privée des utilisateurs, des actes de piratage ( 46 ). De la même manière, l’application de l’exception de copie privée à des services qui peuvent facilement relever du monopole normal des titulaires des droits leur porterait
également un préjudice injustifié.
– L’exploitation normale de l’œuvre
65. L’analyse de la deuxième étape du test, qui exige l’absence d’atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre, répond à la question de savoir quel est concrètement le préjudice subi par les titulaires des droits.
66. La seule impossibilité, pour les titulaires des droits d’auteur, de contrôler l’exploitation que des tiers font de leurs œuvres, du fait de la définition trop large du périmètre de l’exception de copie privée, constitue déjà une atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre, car un tel contrôle, en dehors du champ légitimement réservé à la sphère privée de l’utilisateur, relève de cette exploitation normale.
67. Qui plus est, l’enregistrement d’une émission de télévision permet, premièrement, de regarder cette émission en dehors de la plage horaire dans laquelle elle a été programmée et, deuxièmement, d’en garder une copie pour la regarder une deuxième fois ou pour la transférer sur un autre équipement que le poste de télévision, par exemple sur un appareil portatif. Cela constitue donc un service supplémentaire par rapport à la radiodiffusion initiale. Les organismes de télévision pourraient vouloir
fournir eux-mêmes un tel service, en exploitant ainsi les œuvres dont ils détiennent les droits et en en tirant des revenus supplémentaires. Le fait que ce service soit fourni par VCAST sans l’autorisation desdits organismes de télévision porte donc atteinte à cette forme d’exploitation des œuvres.
68. Par ailleurs, les organismes de télévision dont les émissions sont d’accès libre se financent principalement par des revenus publicitaires, à l’exception des organismes publics qui peuvent percevoir une redevance. Ces revenus sont la contrepartie de l’exploitation des œuvres dont ces organismes détiennent les droits d’auteur. En effet, la diffusion des œuvres attire les téléspectateurs, grâce à quoi les annonceurs sont prêts à acheter du temps d’émission. Or, comme l’a fait remarquer RTI dans
ses observations, VCAST se trouve en concurrence directe avec ces organismes sur le marché de la publicité. Dès lors que VCAST exploite sans autorisation des œuvres dont ces organismes de télévision détiennent les droits d’auteur, cette concurrence devient déloyale. Autoriser une telle concurrence par le jeu de l’exception de copie privée porterait nécessairement atteinte à l’exploitation normale de ces œuvres.
69. Dès lors, l’application de l’exception prévue à l’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29 à des services tels que celui fourni par VCAST ne serait pas, à mon avis, conforme aux exigences établies au paragraphe 5 du même article.
Remarques finales
70. Pour résumer mes considérations concernant l’interprétation de l’exception de copie privée face à un service tel que celui fourni par VCAST, cette exception présuppose un accès licite de l’utilisateur à l’œuvre faisant l’objet de reproduction. Or, dans le cadre du service en cause, c’est la reproduction elle-même qui donne à l’utilisateur l’accès à l’œuvre reproduite. Ce service constitue donc une forme de mise à disposition des œuvres par son fournisseur. Cette mise à disposition est illicite
tant qu’elle est effectuée sans l’autorisation des titulaires des droits d’auteur, ce qui exclut l’application de l’exception de copie privée. D’ailleurs, l’application de cette exception à un tel service se heurterait aux exigences énoncées à l’article 5, paragraphe 5, de la directive 2001/29.
Conclusion
71. Au vu de ces considérations, je propose à la Cour de donner la réponse suivante aux questions préjudicielles posées par le Tribunale di Torino (tribunal de Turin, Italie) :
L’article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui permet l’activité consistant à fournir, sans l’autorisation des titulaires des droits d’auteur, un service d’enregistrement en ligne d’émissions de télévision librement accessibles par voie
terrestre sur le territoire de cet État membre, lorsque c’est le fournisseur dudit service, et non son utilisateur, qui capte le signal de la radiodiffusion terrestre à partir duquel l’enregistrement est effectué.
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( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) Wikipédia, version française, entrée « cloud computing ».
( 3 ) JO 2000, L 178, p. 1.
( 4 ) JO 2001, L 167, p. 10.
( 5 ) Il s’agit de services généraux de stockage dans le nuage, tels que Google Drive.
( 6 ) Voir, notamment, arrêt du 4 octobre 2011, Football Association Premier League e.a. (C‑403/08 et C‑429/08, EU:C:2011:631, point 94 et jurisprudence citée).
( 7 ) C’est moi qui souligne.
( 8 ) Voir, notamment, arrêt du 21 octobre 2010, Padawan (C‑467/08, EU:C:2010:620, points 45 et 46).
( 9 ) Arrêt du 5 mars 2015, Copydan Båndkopi (C‑463/12, EU:C:2015:144, point 91).
( 10 ) J’ajouterais, même si cela ne fait pas l’objet de la présente affaire, qu’une interprétation de l’exception de copie privée excluant toute intervention de tiers poserait à ce jour également d’autres problèmes. En effet, de plus en plus souvent, ce sont non seulement des espaces de stockage qui sont proposés sous forme de services, mais également les logiciels nécessaires aux fins d’effectuer les reproductions. Ainsi, la reproduction d’une œuvre à partir d’un support matériel (par exemple un
CD) appartenant à un utilisateur concerné sur le disque dur de son ordinateur, acte relevant par excellence de l’exception de copie privée, peut se faire à l’aide d’un logiciel d’enregistrement des données qui ne serait pas installé sur l’ordinateur dudit utilisateur, mais mis à sa disposition à distance par un prestataire en tant que service. L’intervention de ce prestataire serait donc indispensable pour que la reproduction puisse avoir lieu. Or, il ne serait pas logique d’exclure une telle
reproduction du bénéfice de l’exception de copie privée, alors qu’une reproduction effectuée à l’aide d’un logiciel installé sur l’ordinateur de l’utilisateur en bénéficierait.
( 11 ) Arrêt du 21 octobre 2010, Padawan (C‑467/08, EU:C:2010:620, point 46).
( 12 ) Voir arrêt du 5 mars 2015, Copydan Båndkopi (C‑463/12, EU:C:2015:144, point 80).
( 13 ) Voir arrêt du 5 mars 2015, Copydan Båndkopi (C‑463/12, EU:C:2015:144, point 86).
( 14 ) Voir arrêt du 5 mars 2015, Copydan Båndkopi (C‑463/12, EU:C:2015:144, point 89).
( 15 ) Voir arrêt du 10 avril 2014, ACI Adam e.a. (C‑435/12, EU:C:2014:254, point 41).
( 16 ) Arrêt du 5 mars 2015, Copydan Båndkopi (C‑463/12, EU:C:2015:144, point 82).
( 17 ) Cette zone de couverture est normalement limitée, grosso modo, au territoire de chaque État. Bien entendu, les programmes peuvent être retransmis, sous licence, dans d’autres États, notamment par câble ou satellite. Dans ce cas cependant, l’accès aux émissions se fait par le biais du service de l’opérateur effectuant la retransmission, qui est habituellement payant.
( 18 ) Voir arrêt du 4 octobre 2011, Football Association Premier League e.a. (C‑403/08 et C‑429/08, EU:C:2011:631, points 87 à 89). Je ne développerai pas ce sujet plus en détail, car il ne concerne pas les questions juridiques soulevées dans la présente affaire.
( 19 ) Une autre analyse est également possible, selon laquelle VCAST n’effectuerait pas de mise à disposition préalable, mais une reproduction de l’émission à partir du signal de télévision qu’il capte lui-même et mettrait par le même acte cette reproduction, à des fins lucratives, à la disposition de l’utilisateur (car la reproduction est enregistrée directement sur le service de stockage disponible à celui-ci). Cependant, dans un tel cas, c’est clairement VCAST et non pas l’utilisateur de son
service qui serait l’auteur véritable de la reproduction, ce qui exclurait tout recours à l’exception de copie privée.
( 20 ) Le paiement d’une éventuelle redevance obligatoire ne constitue pas une contrepartie du service de radiodiffusion publique et n’est pas une condition pour en bénéficier (voir arrêt du 22 juin 2016, Český rozhlas, C‑11/15, EU:C:2016:470, points 23 à 27).
( 21 ) Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (acte de Paris du 24 juillet 1971), dans sa version résultant de la modification du 28 septembre 1979.
( 22 ) Arrêt du 7 décembre 2006, SGAE (C‑306/05, EU:C:2006:764, point 40).
( 23 ) Arrêt du 7 décembre 2006, SGAE (C‑306/05, EU:C:2006:764, point 41).
( 24 ) Arrêt du 7 décembre 2006, SGAE (C‑306/05, EU:C:2006:764, point 42).
( 25 ) Voir, notamment, arrêt du 31 mai 2016, Reha Training (C‑117/15, EU:C:2016:379, point 46 et jurisprudence citée, ainsi que point 62).
( 26 ) Selon la formule choisie par l’utilisateur, ce service est soit payant, soit financé par la publicité.
( 27 ) Arrêt du 7 mars 2013 (C‑607/11, EU:C:2013:147).
( 28 ) Arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a. (C‑607/11, EU:C:2013:147, points 24 et 26).
( 29 ) Arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a. (C‑607/11, EU:C:2013:147, point 10).
( 30 ) Arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a. (C‑607/11, EU:C:2013:147, point 39).
( 31 ) Arrêt du 7 mars 2013, ITV Broadcasting e.a. (C‑607/11, EU:C:2013:147, point 40 et point 1 du dispositif).
( 32 ) Arrêt du 16 mars 2017 (C‑138/16, EU:C:2017:218).
( 33 ) Arrêt du 16 mars 2017, AKM (C‑138/16, EU:C:2017:218, points 18, 26, 29 et 30).
( 34 ) Voir arrêt du 16 mars 2017, AKM (C‑138/16, EU:C:2017:218, points 28 et 29, ainsi que premier alinéa du dispositif).
( 35 ) Arrêt du 7 mars 2013 (C‑607/11, EU:C:2013:147).
( 36 ) Cette règle a ensuite été confirmée, voir notamment arrêt du 8 septembre 2016, GS Media (C‑160/15, EU:C:2016:644, point 37 et jurisprudence citée).
( 37 ) Voir, en dernier lieu, le même arrêt du 16 mars 2017, AKM (C‑138/16, EU:C:2017:218, point 21).
( 38 ) Arrêt du 16 mars 2017 (C‑138/16, EU:C:2017:218).
( 39 ) Arrêt du 16 mars 2017, AKM (C‑138/16, EU:C:2017:218, point 18).
( 40 ) Arrêt du 16 mars 2017 (C‑138/16, EU:C:2017:218).
( 41 ) Selon cette disposition : « Est réservée aux législations des pays de l’Union [constituée par la convention de Berne] la faculté de permettre la reproduction desdites œuvres dans certains cas spéciaux, pourvu qu’une telle reproduction ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ni ne cause un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur. »
( 42 ) Arrêt du 10 avril 2014, ACI Adam e.a. (C‑435/12, EU:C:2014:254, points 25 et 26).
( 43 ) Arrêt du 10 avril 2014, ACI Adam e.a. (C‑435/12, EU:C:2014:254, point 25 in fine).
( 44 ) Arrêt du 10 avril 2014, ACI Adam e.a. (C‑435/12, EU:C:2014:254, points 38 à 41).
( 45 ) Pour de plus amples développements ainsi que diverses positions de la doctrine, voir les conclusions que j’ai présentées dans l’affaire EGEDA e.a. (C‑470/14, EU:C:2016:24, point 15).
( 46 ) Arrêt du 10 avril 2014, ACI Adam e.a. (C‑435/12, EU:C:2014:254, points 31 et 40).