CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. YVES BOT
présentées le 30 novembre 2017 ( 1 )
Affaire C‑580/16
Firma Hans Bühler KG
[demande de décision préjudicielle formée par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche)]
« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Livraison de biens expédiés ou transportés à l’intérieur de l’Union européenne – Exonération – Livraison par un assujetti d’un État membre à un acquéreur dans un autre État membre – Situation dans laquelle l’assujetti indique sur la facture son numéro d’identification à la TVA dans un troisième État membre »
1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 141, sous c), et des articles 42 et 265 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ( 2 ), dans sa version applicable au litige au principal, lus en combinaison avec l’article 41, paragraphe 1, et les articles 197 et 263 de cette directive.
2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la société Firma Hans Bühler KG au Finanzamt Graz-Stadt (centre des impôts de la ville de Graz, Autriche) au sujet du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les opérations réalisées entre le mois d’octobre 2012 et le mois de mars 2013.
3. Elle vise à faire préciser les conditions de mise en œuvre d’une mesure de simplification de la taxation des transactions faisant intervenir trois assujettis identifiés à la TVA dans trois États membres différents.
4. Dans ce cas particulier d’acquisitions intracommunautaires, usuellement désignées sous le terme d’« opérations triangulaires » et représentées sous forme de schéma, tel que celui reproduit ci-après, un bien est livré par un assujetti A, identifié à la TVA dans un État membre 1, à un assujetti B, identifié à la TVA dans un État membre 2, qui, à son tour, livre ce même bien à un assujetti C, identifié à la TVA dans un État membre 3, le bien étant directement expédié ou transporté de l’État
membre 1 à l’État membre 3.
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5. L’objectif poursuivi est que l’assujetti B soit exonéré de TVA pour l’acquisition intracommunautaire effectuée par lui dans l’État membre du lieu d’arrivée du bien et, par la suite, de le dispenser de l’obligation d’identification à la TVA (ci-après l’« identification TVA ») dans cet État membre ; la taxation de la livraison consécutive devant être supportée par l’assujetti C dans le même État membre.
6. Nous soutiendrons que, si les conditions de fond des acquisitions intracommunautaires sont réunies, le bénéfice de la mesure de simplification prévue à l’article 141 de la directive TVA ne peut être refusé à l’assujetti B aux motifs qu’il ne doit pas être identifié à la TVA dans l’État membre de départ des biens, ou que l’état récapitulatif concernant les opérations en cause n’a pas été déposé ou rectifié dans le délai requis.
I. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
7. L’article 40 de la directive TVA dispose :
« Le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens est réputé se situer à l’endroit où les biens se trouvent au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur. »
8. Aux termes de l’article 41 de cette directive :
« Sans préjudice des dispositions de l’article 40, le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens visée à l’article 2, paragraphe 1, [sous] b), i), est réputé se situer sur le territoire de l’État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’acquéreur a effectué cette acquisition, dans la mesure où l’acquéreur n’établit pas que cette acquisition a été soumise à la TVA conformément à l’article 40.
Si, en application de l’article 40, l’acquisition est soumise à la TVA dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport des biens après avoir été soumise à la taxe en application du premier alinéa, la base d’imposition est réduite à due concurrence dans l’État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’acquéreur a effectué cette acquisition. »
9. L’article 42 de ladite directive prévoit :
« L’article 41, premier alinéa, ne s’applique pas et l’acquisition intracommunautaire de biens est réputée avoir été soumise à la TVA conformément à l’article 40, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
a) l’acquéreur établit avoir effectué cette acquisition pour les besoins d’une livraison subséquente, effectuée sur le territoire de l’État membre déterminé conformément à l’article 40, pour laquelle le destinataire a été désigné comme redevable de la taxe conformément à l’article 197 ;
b) l’acquéreur a rempli les obligations relatives au dépôt de l’état récapitulatif prévues à l’article 265. »
10. L’article 141 de la même directive dispose :
« Chaque État membre prend des mesures particulières afin de ne pas soumettre à la TVA les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées sur son territoire, en vertu de l’article 40, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
a) l’acquisition de biens est effectuée par un assujetti qui n’est pas établi dans cet État membre, mais identifié à la TVA dans un autre État membre ;
b) l’acquisition de biens est effectuée pour les besoins d’une livraison subséquente de ces biens, effectuée dans ce même État membre par l’assujetti visé au point a) ;
c) les biens ainsi acquis par l’assujetti visé au point a) sont directement expédiés ou transportés à partir d’un État membre autre que celui à l’intérieur duquel il est identifié à la TVA et à destination de la personne pour laquelle il effectue la livraison subséquente ;
d) le destinataire de la livraison subséquente est un autre assujetti, ou une personne morale non assujettie, identifiés à la TVA dans ce même État membre ;
e) le destinataire visé au point d) a été désigné, conformément à l’article 197, comme redevable de la taxe due au titre de la livraison effectuée par l’assujetti qui n’est pas établi dans l’État membre dans lequel la taxe est due. »
11. Aux termes de l’article 197 de la directive TVA :
« 1. La TVA est due par le destinataire de la livraison de biens, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
a) l’opération imposable est une livraison de biens effectuée dans les conditions prévues à l’article 141 ;
b) le destinataire de cette livraison de biens est un autre assujetti, ou une personne morale non assujettie, identifiés à la TVA dans l’État membre dans lequel la livraison est effectuée ;
c) la facture émise par l’assujetti non établi dans l’État membre du destinataire est établie conformément aux dispositions du chapitre 3, sections 3 à 5.
2. Lorsqu’un représentant fiscal est désigné comme redevable de la taxe en application des dispositions de l’article 204, les États membres peuvent prévoir une dérogation au paragraphe 1 du présent article. »
12. L’article 262 de cette directive énonce :
« Tout assujetti identifié à la TVA doit déposer un état récapitulatif dans lequel figurent :
a) les acquéreurs identifiés à la TVA auxquels il a livré des biens dans les conditions prévues à l’article 138, paragraphe 1, et paragraphe 2, [sous] c) ;
b) les personnes identifiées à la TVA auxquelles il a livré des biens qui lui ont été livrés par le biais d’acquisitions intracommunautaires visées à l’article 42 [...] »
13. Aux termes de l’article 263 de ladite directive :
« 1. Un état récapitulatif est établi pour chaque mois de calendrier dans un délai n’excédant pas un mois et selon des procédures qui devront être déterminées par les États membres.
1 bis. Toutefois, les États membres peuvent autoriser les assujettis, dans les conditions et limites qu’ils peuvent fixer, à déposer l’état récapitulatif pour chaque trimestre civil, dans un délai n’excédant pas un mois à partir de la fin du trimestre, lorsque le montant total trimestriel, hors TVA, des livraisons de biens visées à l’article 264, paragraphe 1, [sous] d), et à l’article 265, paragraphe 1, [sous] c), ne dépasse ni au titre du trimestre concerné, ni au titre d’aucun des quatre
trimestres précédents, la somme de 50000 [euros] ou sa contre-valeur en monnaie nationale.
La faculté prévue au premier alinéa cesse d’être applicable dès la fin du mois au cours duquel le montant total, hors TVA, des livraisons de biens visées à l’article 264, paragraphe 1, [sous] d), et à l’article 265, paragraphe 1, [sous] c), dépasse, pour le trimestre en cours, le montant de 50000 [euros] ou sa contre-valeur en monnaie nationale. Dans ce cas, un état récapitulatif est établi pour le ou les mois écoulé(s) depuis le début du trimestre, dans un délai n’excédant pas un mois.
1 ter. Jusqu’au 31 décembre 2011, les États membres peuvent fixer le montant prévu au paragraphe 1 bis à 100000 [euros] ou sa contre-valeur en monnaie nationale.
[...]
2. Les États membres autorisent et peuvent exiger que l’état récapitulatif visé au paragraphe 1 soit déposé par transfert électronique de fichier, dans les conditions qu’ils fixent. »
14. L’article 265 de la même directive prévoit :
« 1. Dans les cas d’acquisitions intracommunautaires de biens visées à l’article 42, l’assujetti identifié à la TVA dans l’État membre qui lui a attribué le numéro TVA sous lequel il a effectué ces acquisitions doit mentionner de manière distincte sur l’état récapitulatif les informations suivantes :
a) son numéro d’identification TVA dans cet État membre, sous lequel il a effectué l’acquisition et la livraison subséquente de biens ;
b) le numéro d’identification TVA, dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport des biens, du destinataire de la livraison subséquente effectuée par l’assujetti ;
c) pour chacun de ces destinataires, le montant total, hors TVA, des livraisons ainsi effectuées par l’assujetti dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport des biens.
2. Le montant visé au paragraphe 1, [sous] c), est déclaré au titre de la période de dépôt établie conformément à l’article 263, paragraphes 1 à 1 ter, au cours de laquelle la taxe est devenue exigible. »
15. Aux termes de l’article 266 de la directive TVA :
« Par dérogation aux articles 264 et 265, les États membres peuvent prévoir que les états récapitulatifs contiennent davantage d’informations. »
B. Le droit autrichien
16. L’article 3, paragraphe 8, de l’Umsatzsteuergesetz 1994 (loi fédérale relative à la taxe sur le chiffre d’affaires), du 23 août 1994 ( 3 ), dispose :
« L’acquisition intracommunautaire est effectuée sur le territoire de l’État membre d’arrivée de l’expédition ou [...] du transport du bien. Si l’acquéreur utilise, dans ses rapports avec le fournisseur, un numéro d’identification TVA qui lui a été attribué par un autre État membre, l’acquisition est alors réputée effectuée sur le territoire de cet État membre jusqu’à ce que l’acquéreur établisse que l’acquisition a été soumise à la TVA dans l’État membre désigné dans la première phrase. Si
cette preuve est rapportée, l’article 16 s’applique mutatis mutandis. »
17. Dans sa version applicable pour l’année 2012 ( 4 ), l’article 25 de l’UStG 1994, intitulé « Opération triangulaire », dispose :
« Définition
(1) Une opération triangulaire est réalisée lorsque trois entrepreneurs de trois États membres différents effectuent des opérations portant sur le même bien, que ce bien est directement transmis par le premier fournisseur au dernier acquéreur, et que les conditions énumérées au paragraphe 3 sont remplies. Il en va de même lorsque le dernier acquéreur est une personne morale qui n’est pas un entrepreneur ou qui n’acquiert pas le bien pour son entreprise.
Lieu de l’acquisition intracommunautaire en cas d’opération triangulaire
(2) L’acquisition intracommunautaire au sens de l’article 3, paragraphe 8, deuxième phrase, est réputée avoir été soumise à la TVA lorsque l’entrepreneur (acquéreur) démontre qu’il s’agit d’une opération triangulaire et qu’il a rempli ses obligations déclaratives conformément au paragraphe 6. Si l’entrepreneur ne remplit pas ses obligations déclaratives, il perd rétroactivement le bénéfice de l’exonération.
Exonération en cas d’acquisition intracommunautaire de biens
(3) L’acquisition intracommunautaire est exonérée de TVA lorsque les conditions suivantes sont réunies :
a) l’entrepreneur (acquéreur) ne réside pas ou n’a pas son siège sur le territoire national, mais est identifié à la TVA sur le territoire de l’[Union] ;
b) l’acquisition est effectuée en vue d’une livraison subséquente de l’entrepreneur (acquéreur) sur le territoire national à un entrepreneur ou une personne morale qui est identifié(e) à la TVA sur le territoire national ;
c) les biens acquis proviennent d’un autre État membre que celui dans lequel l’entrepreneur (acquéreur) est identifié à la TVA ;
d) le pouvoir de disposition sur les biens acquis est transmis directement par le premier entrepreneur ou le premier acheteur au dernier acheteur (destinataire) ;
e) la taxe est due par le destinataire conformément au paragraphe 5.
Émission de la facture par l’acquéreur
(4) ( 5 ) En cas d’application de l’exonération visée au paragraphe 3, la facture doit en outre comporter les indications suivantes :
– une mention expresse relative à l’existence d’une opération triangulaire intracommunautaire et à la qualité de redevable de la taxe du dernier acheteur,
– le numéro d’identification TVA sous lequel l’entrepreneur (acquéreur) a effectué l’acquisition intracommunautaire et la livraison subséquente des biens, et
– le numéro d’identification TVA du destinataire de la livraison.
Redevable de la taxe
(5) En cas d’opération triangulaire, la taxe est due par le destinataire de la livraison imposable lorsque la facture émise par l’acquéreur correspond au paragraphe 4.
Obligations de l’acquéreur
(6) Pour remplir ses obligations déclaratives au sens du paragraphe 2, l’entrepreneur doit mentionner, dans l’état récapitulatif, les indications suivantes :
– le numéro d’identification TVA sur le territoire national sous lequel il a effectué l’acquisition intracommunautaire et la livraison subséquente des biens ;
– le numéro d’identification TVA du destinataire de la livraison subséquente effectuée par l’entrepreneur, qui lui a été attribué dans l’État membre de destination des biens expédiés ou transportés ;
– pour chacun de ces destinataires, le montant total des livraisons effectuées de cette manière par l’entrepreneur dans l’État membre de destination des biens expédiés ou transportés. Ces montants doivent être indiqués pour le trimestre civil au cours duquel l’obligation fiscale a pris naissance.
Obligations du destinataire
(7) Pour calculer la taxe conformément à l’article 20, le montant établi doit être majoré du montant dû au titre du paragraphe 5. »
18. Conformément à l’article 21, paragraphe 3, de l’UStG 1994, les états récapitulatifs doivent être déposés avant la fin du mois qui suit la période de déclaration.
II. Les faits à l’origine du litige au principal et les questions préjudicielles
19. Firma Hans Bühler, société en commandite, établie et identifiée à la TVA en Allemagne, exploite dans cet État membre une entreprise de production et de négoce. Du mois d’octobre 2012 au mois d’avril 2013 ( 6 ), elle était également identifiée à la TVA en Autriche, en raison d’un projet de création d’un établissement stable dans cet autre État membre. Au moment du renvoi préjudiciel, ce projet n’était toujours pas concrétisé ( 7 ).
20. Entre les mois d’octobre 2012 et de mars 2013, cette société a acheté à plusieurs reprises à des fournisseurs établis en Allemagne des produits qu’elle revendait à un client établi et identifié à la TVA en République tchèque. Ces biens étaient directement transportés par les fournisseurs allemands à destination du client tchèque. Firma Hans Bühler a utilisé exclusivement son numéro d’identification TVA autrichien pour ces opérations, qu’elle a considérées comme étant triangulaires.
21. Les fournisseurs allemands ont indiqué leur numéro d’identification TVA allemand ainsi que le numéro d’identification TVA autrichien de Firma Hans Bühler sur les factures qui lui étaient adressées. Celle-ci a établi des factures à son client tchèque comportant son numéro d’identification autrichien et le numéro d’identification TVA tchèque de l’acquéreur. Il y était précisé que les opérations étaient des « opérations triangulaires intracommunautaires » et que l’acquéreur final était, en
conséquence, redevable de la TVA.
22. Le 8 février 2013, Firma Hans Bühler a déposé auprès de l’administration fiscale autrichienne des états récapitulatifs pour la période allant du mois d’octobre 2012 au mois de janvier 2013 dans lesquels elle avait indiqué son numéro d’identification TVA autrichien, ainsi que le numéro d’identification TVA tchèque de l’acquéreur final. Aucune mention n’était portée dans la rubrique « opérations triangulaires ».
23. Puis, le 10 avril 2013, Firma Hans Bühler a corrigé ces états récapitulatifs, en précisant qu’elle avait réalisé des opérations triangulaires, et a déposé d’autres états récapitulatifs pour les mois de février et de mars 2013.
24. Le centre des impôts de la ville de Graz a estimé que les opérations entre les fournisseurs allemands et Firma Hans Bühler devaient être soumises en Autriche à la TVA au titre d’acquisitions intracommunautaires.
25. Il a considéré qu’il s’agissait d’opérations triangulaires « défaillantes » au motif que cet assujetti n’avait pas rempli ses obligations déclaratives et qu’il n’avait pas apporté la preuve que l’opération avait bien été soumise à la TVA au niveau de l’acquisition finale en République tchèque. Cette administration a également considéré que, même si les acquisitions intracommunautaires avaient été effectuées en République tchèque, elles étaient également réputées avoir été effectuées en Autriche,
étant donné que Firma Hans Bühler avait utilisé un numéro d’identification TVA autrichien.
26. Le recours de Firma Hans Bühler contre cette décision a été rejeté par le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances, Autriche) au motif que cet acquéreur avait perdu le bénéfice de l’exonération de la TVA sur ses acquisitions intracommunautaires, en application de l’article 25, paragraphe 2, de l’UStG 1994, faute d’avoir satisfait aux obligations déclaratives spéciales exigées par cette disposition. Le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) a également considéré que le
numéro d’identification TVA autrichien de Firma Hans Bühler n’était plus valide à la date du 10 avril 2013 et que, de ce fait, elle n’avait pas non plus rempli les obligations déclaratives, imposées par l’article 25, paragraphe 6, de l’UStG 1994 pour les opérations des mois de février et de mars 2013.
27. Firma Hans Bühler a formé un recours en Revision contre cette décision devant le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche).
28. Cette juridiction exprime des doutes quant au consensus existant entre l’assujetti, le centre des impôts de la ville de Graz et le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) sur l’applicabilité des règles relatives aux opérations triangulaires.
29. Après avoir relevé que deux « entrepreneurs », au sens de la définition figurant à l’article 25, paragraphe 1, de l’UStG 1994, sont établis dans le même État membre, à savoir la République fédérale, elle s’interroge sur la conséquence à tirer du fait que les biens ont été expédiés ou transportés à partir de cet État membre, au regard des dispositions de l’article 141, sous c), de la directive TVA, et, partant, sur l’élément déterminant pour la qualification de l’opération. S’il devait s’agir
seulement du numéro d’identification TVA utilisé par l’assujetti, elle relève les éventuelles incidences d’une telle solution en cas d’identification à la seule fin de réaliser des opérations triangulaires.
30. Enfin, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) exprime une divergence d’analyse avec le centre des impôts de la ville de Graz et le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) quant aux conséquences juridiques du défaut de respect des obligations déclaratives, au regard des articles 41 et 42 de la directive TVA ainsi que de la jurisprudence de la Cour relative à la rectification des factures.
31. Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) L’article 141, sous c), de la directive [TVA], dont dépend, conformément à l’article 42 (lu en combinaison avec l’article 197) de la directive [TVA], la non‑application de l’article 41, paragraphe 1, de la directive [TVA], doit-il être interprété en ce sens que la condition qu’il prévoit n’est pas remplie lorsque l’assujetti est établi et identifié à la TVA dans l’État membre à partir duquel les biens sont expédiés ou transportés, y compris lorsque cet assujetti utilise le numéro
d’identification TVA d’un autre État membre pour l’acquisition intracommunautaire en cause ?
2) Les articles 42 et 265 [de la directive TVA], lus en combinaison avec l’article 263 de la directive [TVA], doivent-ils être interprétés en ce sens que seul le dépôt en temps utile de l’état récapitulatif entraîne la non-applicabilité de l’article 41, paragraphe 1, de la directive [TVA] ? »
III. Notre analyse
A. Observations liminaires
32. Par sa première question préjudicielle, la juridiction de renvoi invite la Cour à se prononcer, pour la première fois, sur les conditions de mise en œuvre du mécanisme créé à l’article 141 de la directive TVA ( 8 ) qui doivent être réunies afin que l’acquisition intracommunautaire de biens effectuée par un assujetti, pour les besoins d’une livraison subséquente, sur le territoire du même État membre ne soit pas soumise à la TVA de cet État membre.
33. Dès lors qu’il s’agit d’une mesure de simplification, il nous paraît opportun de commencer par la replacer dans le contexte plus général des règles applicables aux échanges intracommunautaires de biens ( 9 ) dans lequel elle s’inscrit.
34. L’article 141 de la directive TVA reprend, en substance, l’article 28 quater, titre E, point 3, premier à cinquième tirets, de la sixième directive.
35. L’article 28 quater, titre E, de la sixième directive a été introduit par l’article 1er, paragraphe 22, de la directive 91/680/CEE du Conseil, du 16 décembre 1991, complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l’abolition des frontières fiscales, la directive 77/388 ( 10 ), qui avait inséré un titre XVI bis, comprenant les articles 28 bis à 28 quaterdecies, organisant le régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres ( 11 ) et, plus
particulièrement, celui des exonérations.
36. Les dispositions de l’article 28 quater, titre E, de la sixième directive n’ont pas été révisées, dans leur substance, depuis leur modification par l’article 1er, paragraphe 13, de la directive 92/111/CEE du Conseil, du 14 décembre 1992, modifiant la directive 77/388 et portant mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée ( 12 ).
37. Le règlement d’exécution (UE) no 282/2011 du Conseil, du 15 mars 2011, portant mesures d’exécution de la directive 2006/112 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ( 13 ), dont l’objectif est, aux termes du considérant 4 de ce règlement, « de garantir l’application uniforme du système actuel de TVA en adoptant des dispositions d’exécution de la directive [TVA] en ce qui concerne, notamment, les assujettis, les livraisons de biens et prestations de services, ainsi que le lieu des
opérations imposables », ne contient aucune disposition particulière relative aux exonérations liées aux opérations intracommunautaires visées aux articles 138 à 142 de la directive TVA ( 14 ).
38. Ainsi, l’article 141 de cette directive constitue un élément du dispositif général d’exonération des acquisitions intracommunautaires. Afin de faciliter la compréhension du mécanisme que cette disposition crée ( 15 ), il nous paraît également nécessaire de rappeler certaines notions essentielles en matière d’échanges intracommunautaires de biens, issues de la directive TVA et de la jurisprudence de la Cour.
39. Tout d’abord, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous b), i), de cette directive, sont soumises à la TVA les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ( 16 ).
40. À l’article 20, premier alinéa, de ladite directive l’« acquisition intracommunautaire de biens » est définie comme « l’obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d’un bien meuble corporel expédié ou transporté à destination de l’acquéreur, par le vendeur, par l’acquéreur ou pour leur compte, vers un État membre autre que celui de départ de l’expédition ou du transport du bien ».
41. L’article 42 de la directive TVA traite du cas particulier de l’acquisition pour les besoins d’une livraison subséquente, comme à l’article 141, sous b), de cette directive.
42. Le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens, soit le lieu de taxation de l’opération, « est réputé se situer », en vertu de l’article 40 de ladite directive, « à l’endroit où les biens se trouvent au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur ».
43. Ensuite, ainsi que la Cour l’a rappelé :
– « une livraison intracommunautaire d’un bien et l’acquisition intracommunautaire de celui-ci constituent, en réalité, une seule et même opération économique, bien que cette dernière crée différents droits et obligations tant pour les parties à la transaction que pour les autorités fiscales des États membres concernés» ( 17 ) ;
– « [a]insi, toute acquisition intracommunautaire taxée dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport intracommunautaire de biens en vertu de l’article 28 bis, paragraphe 1, sous a), premier alinéa, de la sixième directive [ ( 18 )] a pour corollaire une livraison exonérée dans l’État membre de départ de ladite expédition ou dudit transport en application de l’article 28 quater, A, sous a), premier alinéa, de la même directive [ ( 19 )] (arrêt du 6 avril 2006, EMAG Handel Eder,
C‑245/04, EU:C:2006:232)» ( 20 );
– « [i]l s’ensuit que l’exonération d’une livraison intracommunautaire corrélative à une acquisition intracommunautaire permet d’éviter la double imposition et, partant, la violation du principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de la TVA» ( 21 ), et
– « l’acquisition intracommunautaire d’un bien est effectuée et l’exonération de la livraison intracommunautaire ne devient applicable que lorsque le droit de disposer du bien comme un propriétaire a été transmis à l’acquéreur et que le fournisseur établit que ce bien a été expédié ou transporté dans un autre État membre et que, à la suite de cette expédition ou de ce transport, il a quitté physiquement le territoire de l’État membre de livraison» ( 22 ).
44. Enfin, seules les opérations triangulaires font l’objet d’une disposition spéciale dans la directive TVA, soit l’article 141 de celle-ci, qui les définit. Il en résulte qu’elles doivent être réalisées par trois assujettis, identifiés à la TVA dans trois États membres différents, avec cette particularité que les biens concernés sont expédiés ou transportés par le premier assujetti à destination du troisième.
45. Elles doivent donc être distinguées des opérations successives ou en chaîne portant sur les mêmes biens, dont il est résulté un unique transport intracommunautaire ( 23 ), précédemment examinées par la Cour, quand bien même les solutions peuvent être rapprochées ( 24 ).
46. En effet, dans de telles situations, il s’agissait de définir, en l’absence de disposition particulière, les conditions de mise en œuvre du principe de l’exonération de la livraison intracommunautaire afin « d’atteindre de façon simple l’objectif poursuivi [...], à savoir le transfert de la recette fiscale à l’État membre où a lieu la consommation finale des biens livrés » et d’« assure[r] une délimitation claire des souverainetés fiscales des États membres concernés» ( 25 ).
47. La Cour a alors dit pour droit, d’abord, que « cette expédition ou ce transport ne peut être imputé qu’à une seule des deux livraisons, qui sera la seule exonérée en application de l’article 28 quater, titre A, sous a), premier alinéa, de la sixième directive» ( 26 ), et que « [c]ette interprétation est valable quel que soit celui des assujettis – premier vendeur, acquéreur intermédiaire ou second acquéreur – qui détient le pouvoir de disposer des biens pendant ladite expédition ou ledit
transport» ( 27 ).
48. La Cour a ultérieurement précisé ( 28 ) que « la détermination de l’opération à laquelle doit être imputé ce transport, à savoir la première ou la seconde livraison [...], doit être effectuée au regard d’une appréciation globale de toutes les circonstances de l’espèce afin d’établir laquelle de ces deux livraisons remplit l’ensemble des conditions afférentes à une livraison intracommunautaire» ( 29 ).
49. Néanmoins, pour faire application de l’article 141 de la directive TVA, la question de savoir à quelle livraison le transport intracommunautaire doit s’imputer ne se pose pas en raison des conditions qui y sont énumérées aux points b) et c), à savoir, d’une part, une acquisition de biens effectuée « pour les besoins d’une livraison subséquente de ces biens» ( 30 ), effectuée dans l’État membre du lieu d’arrivée des biens par un assujetti, et, d’autre part, une expédition ou un transport direct
des biens ainsi acquis à destination du bénéficiaire de la livraison subséquente.
50. Dès lors, si les questions posées par la juridiction de renvoi portent sur l’identification des assujettis concernés à la TVA dans trois États membres différents, nous estimons nécessaire de souligner ( 31 ) que ce n’est pas uniquement cette identification qui caractérise l’opération triangulaire. Les conditions dans lesquelles l’opération économique en cause est effectuée sont déterminantes. Ainsi, elle doit être réalisée par un acquéreur intermédiaire, ou, autrement dit, un acheteur-revendeur,
qui décide, de manière concomitante, d’acquérir pour revendre et de faire transporter les biens directement de son fournisseur à son client. Dans ce cas, le droit de disposer du bien comme un propriétaire aura nécessairement été transmis au premier acquéreur dès lors que c’est celui qui « prend l’initiative du transport qui réalise l’acquisition intracommunautaire» ( 32 ).
51. En conséquence, il nous paraît essentiel que ces circonstances particulières, qui permettent d’opérer une distinction entre les opérations triangulaires et les opérations successives ou en chaîne, soient vérifiées préalablement ( 33 ), avant d’envisager toute simplification.
52. Il en est de même des conditions plus générales relatives aux opérations intracommunautaires, telles que la réalité de l’expédition ou du transport ( 34 ) ainsi que la désignation du destinataire final de la livraison subséquente comme redevable de la taxe dans l’État membre concerné ( 35 ).
53. Il s’ensuit que, dans la mesure où l’acquisition intracommunautaire en cause au principal serait suivie d’une livraison interne, il pourrait être répondu utilement aux deux questions posées par la juridiction de renvoi relatives à la mise en œuvre de la mesure de simplification instituée au profit de l’assujetti intermédiaire à l’article 141 de la directive TVA.
B. Sur la première question préjudicielle
54. La première question préjudicielle porte sur l’examen de la condition de l’identification TVA de chacun des trois assujettis dans un État membre différent, requise en vertu de l’article 141 de la directive TVA. Cette question invite à préciser s’il faut s’en tenir au simple constat de l’utilisation de trois numéros d’identification différents ou, au contraire, vérifier l’existence d’identifications multiples de l’assujetti intermédiaire.
55. Il convient d’observer que la seule restriction, exprimée expressément dans cet article 141, sous a) et sous e), est que l’assujetti qui réalise une livraison subséquente dans l’État membre du lieu de l’acquisition intracommunautaire des biens, à savoir le lieu de leur arrivée, n’y soit pas « établi ».
56. Les différentes versions linguistiques, notamment celles en langues espagnole, allemande, anglaise, italienne et polonaise ( 36 ), sont rédigées avec cette unique réserve.
57. Celle-ci est justifiée par l’objectif poursuivi par la disposition en cause. En effet, ainsi qu’il est rappelé au point 248 du rapport de 1994, « [l]’objet des mesures de simplification est d’éviter à l’opérateur [intermédiaire] d’avoir à satisfaire à des obligations d’identification [ ( 37 )] et de déclaration dans l’État membre [du lieu d’arrivée des biens] », alors qu’il y effectue une acquisition intracommunautaire de biens suivie d’une livraison intérieure dans ce même État membre, soumise
à la TVA selon les règles applicables dans celui-ci ( 38 ).
58. Il s’agit ainsi de « “désamorcer” la taxation de l’acquisition intracommunautaire en principe imposable dans l’État membre [du lieu d’arrivée du transport] et à déplacer vers le sous-acquéreur [final] la taxation de la vente que lui a consentie [l’opérateur intermédiaire]» ( 39 ).
59. En conséquence, si toutes les autres conditions prévues à l’article 141 de la directive TVA sont réunies, spécialement celle relative à la désignation de l’assujetti redevable de la taxation, l’utilisation d’un numéro d’identification TVA d’un État membre pour l’acquisition intracommunautaire, autre que celui de l’État membre d’arrivée des biens, ne peut avoir pour effet de soumettre cette acquisition à la taxation dans l’État membre qui a attribué une identification à l’assujetti intermédiaire.
60. Toutefois, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’applicabilité de l’article 141 de la directive TVA lorsque l’assujetti est établi dans l’État membre de départ des biens et, spécialement, sur l’interprétation du point c) de cet article. Il convient, dès lors, de préciser l’ensemble des éléments qui doivent être soumis à la discussion.
61. Premièrement, ainsi que l’a exposé la juridiction de renvoi, les termes figurant à l’article 141, sous c), de la directive TVA, relatifs à l’expédition ou le transport des biens « à partir d’un État membre autre que celui à l’intérieur duquel [l’opérateur intermédiaire] est identifié à la TVA », pourraient être interprétés littéralement en ce sens que sont exclus les cas dans lesquels l’assujetti est établi, voire identifié, dans l’État membre de départ des biens, sans considération du choix de
l’identification qui s’offrait à lui lors de la réalisation de l’opération.
62. Deuxièmement, une telle lecture ne serait pas isolée. Ainsi que l’observent les auteurs B. Terra et J. Kajus, l’exclusion de l’identification dans l’État membre de départ des biens est prévue dans différents États membres ( 40 ).
63. Troisièmement, elle trouverait une justification pratique. Dès lors que l’établissement dans un État membre crée des droits ( 41 ) et des obligations en matière de taxation et de déclarations, la mesure de simplification ne présenterait pas d’intérêt pour l’assujetti.
64. Quatrièmement, l’exclusion des situations dans lesquelles l’assujetti est identifié dans l’État membre de départ des biens présenterait l’avantage de limiter les cas d’obtention d’une identification ponctuelle dans le but exclusif de justifier d’une participation à des opérations triangulaires. Sur ce point, la Commission avait souligné, dans le rapport de 1994, l’intérêt d’une certaine vigilance ( 42 ), ainsi que la juridiction de renvoi l’a relevé.
65. Ces divers arguments nous paraissent devoir être écartés pour les raisons exposées ci-dessous.
66. D’emblée, il peut être objecté qu’une interprétation littérale de l’article 141, sous c), de la directive TVA ( 43 ) conduit à exclure les cas d’attribution de numéro d’identification TVA dans l’État membre de départ des biens qui ne sont pas seulement liés à l’établissement de l’assujetti. Or, une telle exclusion ne pourrait être justifiée par des obligations déclaratives ( 44 ).
67. Ensuite, plus fondamentalement, partant du constat de l’absence de dispositions particulières relatives aux cas d’identifications multiples, nous soutenons que l’article 141 de cette directive doit faire l’objet d’une interprétation à la fois stricte et téléologique.
68. En effet, d’une part, une interprétation stricte des dispositions de l’article 141 de la directive TVA s’impose en raison de leur objet, soit l’instauration d’une mesure de simplification qui a pour corollaire une exclusion, celle relative aux cas d’identification dans l’État membre d’arrivée des biens. Autrement dit, l’exclusion de l’identification de l’assujetti dans l’État membre de départ des biens ne peut être déduite de termes généraux.
69. Cette logique ne peut être remise en cause, s’agissant de l’application de l’article 141, sous a), de cette directive par le constat que ce n’est pas seulement l’établissement dans l’État membre d’arrivée des biens qui doit être exclu, mais aussi la simple identification TVA de l’assujetti dans cet État membre. En effet, cette condition se déduit naturellement de l’objectif poursuivi par cette disposition, celui d’éviter à l’assujetti intermédiaire de s’identifier. Le rapport de 1994, dans
lequel il est fait référence à l’utilisation par l’assujetti intermédiaire du « numéro d’identification [...] attribué par un État membre autre que celui d’arrivée du transport des biens », confirme cette analyse ( 45 ).
70. D’autre part, nous estimons, à l’instar de la Commission, que les dispositions de l’article 141 la directive TVA doivent être lues dans leur ensemble et en combinaison avec celles de l’article 265 ( 46 ) de cette directive, visé à l’article 42 de ladite directive, relatif au contenu de l’état récapitulatif qui doit être établi en cas d’acquisition intracommunautaire pour les besoins d’une livraison subséquente. Les termes « numéro d’identification TVA [...] sous lequel [l’acquéreur] a effectué
[cette] acquisition » suggèrent la liberté de choix entre différents numéros. Ce libellé figure également à l’article 41 de la même directive relatif à la détermination du lieu des acquisitions intracommunautaires de biens.
71. Cette interprétation est justifiée par la finalité du mécanisme en cause. Selon nous, le contrôle de la taxation au lieu final de la consommation du bien suffit à justifier le choix du législateur de l’Union de ne pas exclure, à l’article 141 de la directive TVA, toute simplification lorsque l’acquéreur intermédiaire dispose d’une autre identification, correspondant au lieu d’établissement de cet assujetti dans l’État membre du lieu de départ des biens ( 47 ).
72. Une solution contraire, empêchant un assujetti de choisir son identification TVA, créerait une différence significative dans la manière de traiter les assujettis et risquerait de restreindre l’exercice d’activités économiques, alors que le numéro individuel d’identification TVA n’est qu’un moyen de preuve ( 48 ).
73. En outre, ainsi que l’a souligné le gouvernement autrichien ( 49 ), les réalités économiques justifient de favoriser le recours à l’allègement des charges administratives ( 50 ) en préservant le libre choix par les assujettis de leur identification pour les opérations intracommunautaires et en assurant la sécurité juridique des transactions pour l’acquéreur final ( 51 ). De même, lors de l’audience, a été invoqué l’avantage procuré par la simplification pour la gestion de la trésorerie de
l’entreprise exonérée de la taxation.
74. Enfin, l’intérêt pour l’État membre dans lequel l’assujetti intermédiaire est identifié d’opposer une autre identification dans l’État membre de départ des biens reste à démontrer. En effet, dans un tel cas, seul ce dernier État membre peut soumettre la livraison à la taxation.
75. L’ensemble de ces éléments nous conduit à considérer que, pour s’en tenir à « ce qui est nécessaire afin d’assurer l’exacte perception de la taxe» ( 52 ) dans l’État membre d’arrivée des biens, il suffit de constater l’utilisation de trois identifications TVA différentes afin de mettre en œuvre le mécanisme de simplification prévu à l’article 141 de la directive TVA, sous réserve, conformément à la jurisprudence constante de la Cour ( 53 ), que le recours à des numéros d’identification TVA
multiples ne soit pas frauduleux.
76. En effet, ainsi que l’a rappelé la juridiction de renvoi, des circonstances, telles que celles décrites par la Commission dans son rapport de 1994 ( 54 ), peuvent conduire à s’interroger sur le choix d’un numéro d’identification TVA en vue de réaliser des opérations triangulaires ( 55 ).
77. En outre, d’une manière générale, il résulte du plan d’action sur la TVA de la Commission ( 56 ) qu’une vigilance particulière s’impose en l’état actuel de la législation.
78. Au vu de l’ensemble de ces considérations, nous proposons de répondre à la première question préjudicielle que l’article 141, sous c), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que l’assujetti, qui remplit les conditions d’identification visées au point a) de cet article, doit avoir effectué l’acquisition de biens visée au point b) dudit article sous un numéro d’identification TVA attribué par un État membre autre que celui à partir duquel les biens sont expédiés ou transportés pour
l’acquisition intracommunautaire en cause, peu important qu’il soit établi ou identifié dans cet État membre.
C. Sur la seconde question préjudicielle
79. Cette question ne doit être examinée qu’en cas de confirmation de l’existence d’opérations triangulaires.
80. Par cette seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le respect des exigences relatives à l’établissement d’un état récapitulatif, telles que fixées aux articles 263 ( 57 ) et 265 ( 58 ) de la directive TVA, constitue une condition de fond de l’application de l’article 42 de cette directive et, par voie de conséquence, de l’exonération de TVA pour l’assujetti intermédiaire, par application du mécanisme prévu à l’article 141 de ladite directive ( 59 ).
81. Plus concrètement, la juridiction de renvoi s’interroge sur les conséquences à tirer du dépôt tardif des états récapitulatifs concernant les opérations effectuées entre les mois d’octobre et de décembre 2012 ( 60 ) ainsi que des rectificatifs postérieurs à ceux-ci destinés à préciser qu’il s’agissait d’opérations triangulaires ( 61 ).
82. Il convient de relever que, à l’article 265 de la directive TVA, sont énumérées les informations qui doivent être mentionnées par l’assujetti dans l’état récapitulatif qu’il doit établir conformément à l’article 262 de cette directive. Les conséquences de cette exigence sur la détermination du lieu de la taxation sont énoncées à l’article 42 de ladite directive.
83. Ainsi, à l’article 42, sous a) de la directive TVA, sont précisées les conditions de fond requises, par combinaison avec l’article 197 de cette directive, et spécialement au paragraphe 1, sous a), de cet article. Il en résulte que celles prévues à l’article 141 de ladite directive doivent d’abord être réunies afin que l’acquisition intracommunautaire, effectuée « pour les besoins d’une livraison subséquente» ( 62 ), soit réputée soumise à la TVA dans l’État membre d’arrivée des biens.
84. L’exigence de respect « des obligations relatives au dépôt de l’état récapitulatif prévues à l’article 265 », qui figure à l’article 42, sous b), de la directive TVA doit être analysée différemment, dans le droit fil de la jurisprudence de la Cour, comme une condition formelle permettant uniquement de s’assurer de la taxation dans l’État membre du lieu de consommation finale des biens.
85. En effet, il convient de rappeler, tout d’abord, en raison du libellé de l’article 42, premier alinéa, de la directive TVA, que l’article 42, sous b), doit être lu à la lumière des dispositions de l’article 41 de cette directive ( 63 ). Celui-ci a vocation à être appliqué uniquement « dans la mesure où l’acquéreur n’établit pas que [l’]acquisition a été soumise à la TVA conformément à l’article 40 ». Un degré d’exigence plus élevé est exprimé par ces termes dont le sens est plus large que ceux
de l’article 42 de ladite directive relatifs au simple dépôt d’un état récapitulatif. Il convient également de prendre en considération la finalité de ces dispositions, rappelée par la Cour dans l’arrêt du 22 avril 2010, X et fiscale eenheid Facet-Facet Trading ( 64 ), à savoir « garantir l’assujettissement de l’acquisition en cause à la TVA» ( 65 ).
86. Ensuite, nous ne pensons pas, à la différence du gouvernement autrichien, qu’il faille tirer argument de la différence de rédaction de l’article 42 de la directive TVA par rapport à celle de l’article 138 de cette directive, silencieux sur ce point. Selon nous, en l’état actuel de la législation de l’Union ( 66 ), il n’existe aucun obstacle au rapprochement avec la jurisprudence constante de la Cour, transposable au cas d’espèce, selon laquelle, dans la mesure où les conditions matérielles ou de
fond d’une livraison intracommunautaire sont remplies, le droit à l’exonération de la TVA ne peut être subordonné à d’autres exigences d’ordre administratif.
87. Ainsi, la Cour a dit pour droit que le refus d’exonérer de TVA une livraison intracommunautaire, laquelle a effectivement eu lieu, ne peut être fondé sur le seul motif que la preuve d’une livraison n’avait pas été apportée en temps utile ( 67 ). La Cour a d’ailleurs cité « la présentation de l’état récapitulatif à l’administration fiscale » au titre des obligations formelles figurant à l’article 22 de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de cette directive,
devenue, sur ce point, l’article 263 de la directive TVA ( 68 ).
88. Il en est de même, s’agissant des hypothèses transposables à l’affaire au principal, des exigences supplémentaires à celle d’une identification valable, comme l’inscription dans le système d’échange d’informations en matière de TVA [VAT Information Exchange System (VIES)], ou la couverture par un régime de taxation des acquisitions intracommunautaires ( 69 ), ou encore la transmission du numéro d’identification TVA de l’acquéreur ( 70 ).
89. Suivant la même logique, la rectification d’une facture visant une mention obligatoire, à savoir le numéro d’identification TVA, peut produire un effet rétroactif ( 71 ). De plus, l’exonération d’une livraison intracommunautaire ne peut être refusée au seul motif que l’administration fiscale d’un autre État membre a procédé à une radiation du numéro d’identification TVA de l’acquéreur produisant effet à une date antérieure à cette livraison ( 72 ).
90. Enfin, il convient de prendre en considération, d’une part, l’obligation pour tout assujetti identifié à la TVA d’établir des états récapitulatifs ( 73 ), ce qui permet un recoupement des informations fournies. D’autre part, dans une perspective plus large, l’évolution de la réglementation de l’Union concernant la coopération administrative dans le domaine de la TVA ( 74 ) doit être relevée. En effet, le règlement (UE) no 904/2010 du Conseil, du 7 octobre 2010, concernant la coopération
administrative et la lutte contre la fraude dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée ( 75 ), entré en vigueur le 1er janvier 2012, fixe des règles et des procédures communes, notamment pour les échanges d’informations entre les autorités nationales compétentes dans l’objectif d’appliquer correctement la TVA ( 76 ). Cette organisation vient nécessairement atténuer les conséquences d’une déclaration incomplète ou tardive.
91. Cependant, ce « principe du rejet du formalisme» ( 77 ), traditionnellement fondé sur le caractère objectif des notions définies par la directive TVA et le principe de neutralité fiscale, connaît deux exceptions, applicables quel que soit le bénéfice issu d’une norme du droit de l’Union ( 78 ). Il s’agit, d’une part, de la participation intentionnelle à une fraude fiscale ( 79 ) et, d’autre part, du défaut de preuve que les exigences de fond sont satisfaites ( 80 ).
92. C’est bien cette exception qui, selon nous, et contrairement à ce que soutient le gouvernement autrichien ( 81 ), explique la solution retenue dans l’arrêt du 22 avril 2010, X et fiscale eenheid Facet-Facet Trading ( 82 ), dès lors que la Cour a constaté que les biens en cause n’avaient pas été réellement introduits dans l’État membre d’identification ( 83 ).
93. En conséquence, nous estimons que le droit à l’exonération de TVA doit résulter uniquement du respect des conditions fixées à l’article 141 et à l’article 42, sous a), de la directive TVA, celle fixée à l’article 42, sous b), de cette directive ne définissant qu’une modalité de mise en œuvre pratique.
94. Si, toutefois, la Cour devait ne pas partager cette analyse, il conviendrait de prendre en considération, comme la Commission l’a souligné, que, dans l’affaire au principal, le débat ne portait pas sur l’absence d’état récapitulatif ou de toute autre déclaration.
95. Nous proposons donc de répondre à la seconde question préjudicielle que l’article 42, sous b), de cette directive doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que l’administration fiscale d’un État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’assujetti a effectué une acquisition intracommunautaire, pour les besoins d’une livraison subséquente, refuse d’exonérer de TVA celle-ci, au seul motif que l’état récapitulatif, visé à l’article 265 de ladite directive, a été
transmis tardivement ou rectifié ultérieurement par l’assujetti, alors même qu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude et qu’il est établi que les conditions de fond de l’exonération sont réunies.
IV. Conclusion
96. Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche) de la manière suivante :
1) L’article 141, sous c), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens que l’assujetti, qui remplit les conditions d’identification visées au point a) de cet article, doit avoir effectué l’acquisition de biens visée au point b) dudit article sous un numéro d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) attribué par un État membre autre que celui à partir duquel les biens sont
expédiés ou transportés pour l’acquisition intracommunautaire en cause, peu important qu’il soit établi ou identifié dans cet État membre.
2) L’article 42, sous b), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que l’administration fiscale d’un État membre qui a attribué le numéro d’identification à la TVA sous lequel l’assujetti a effectué une acquisition intracommunautaire, pour les besoins d’une livraison subséquente, refuse d’exonérer de TVA celle-ci, au seul motif que l’état récapitulatif, visé à l’article 265 de cette directive, a été transmis tardivement ou rectifié ultérieurement par
l’assujetti, alors même qu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude et qu’il est établi que les conditions de fond de l’exonération sont réunies.
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( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA ».
( 3 ) BGB1. 663/1994, ci-après l’« UStG 1994 ».
( 4 ) BGB1. I, 34/2010.
( 5 ) Ce paragraphe a été modifié par l’Abgabenänderungsgesetz 2012 (loi portant modification de l’imposition), du 14 décembre 2012 (BGB1 I, 112/2012), avec effet au 1er janvier 2013. Il énonce :
« (4) L’émission de la facture est soumise aux règles de l’État membre à partir duquel l’acquéreur exploite son entreprise. Si la livraison est exécutée à partir de l’établissement stable de l’acquéreur, le droit applicable est celui de l’État membre dans lequel l’établissement stable est situé [...]
Si les dispositions de la présente loi fédérale sont applicables à l’émission de la facture, celle-ci doit en outre comporter les indications suivantes :
– une mention expresse relative à l’existence d’une opération triangulaire intracommunautaire et à la qualité de redevable de la taxe du dernier acheteur ;
– le numéro d’identification TVA sous lequel l’entrepreneur (acquéreur) a effectué l’acquisition intracommunautaire et la livraison subséquente des biens, et
– le numéro d’identification TVA du destinataire de la livraison. »
( 6 ) Il est précisé au point 7 de la décision de renvoi que, au 10 avril 2013, le numéro d’identification TVA n’était plus valable.
( 7 ) Lors de l’audience, le représentant de cette société a précisé que celle-ci avait renoncé à son projet.
( 8 ) Il en est de même des dispositions équivalentes de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1, ci-après la « sixième directive »). Voir points 34 et suiv. des présentes conclusions.
( 9 ) Pour une mise en perspective historique, voir conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:7, points 24 à 29).
( 10 ) JO 1991, L 376, p. 1.
( 11 ) Au point 22 de l’arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548), la Cour a rappelé que, « ayant constaté que n’étaient pas encore réunies les conditions qui auraient permis de mettre en œuvre le principe de l’imposition dans l’État membre d’origine des biens livrés sans porter atteinte au principe de l’attribution de la recette fiscale à l’État membre où a lieu la consommation finale, le législateur communautaire a instauré, par le titre XVI bis de la sixième directive, un
régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres fondé sur l’établissement d’un nouveau fait générateur de la taxe, à savoir l’acquisition intracommunautaire de biens (septième à dixième considérants de la directive 91/680) ».
( 12 ) JO 1992, L 384, p. 47, la date de mise en œuvre étant fixée, conformément à l’article 4 de cette directive, au 1er janvier 1993.
( 13 ) JO 2011, L 77, p. 1. Hormis certaines dispositions des articles 3, 11, 23 et 24, ce règlement est entré en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne et est applicable à partir du 1er juillet 2011 (voir article 65 dudit règlement). Le règlement (CE) no 1777/2005 du Conseil, du 17 octobre 2005, portant mesures d’exécution de la directive 77/388/CEE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, a été abrogé [(JO 2005, L 288,
p. 1), voir article 64 du règlement no 282/2011].
( 14 ) Voir, pour l’avenir, proposition de règlement d’exécution du Conseil, du 4 octobre 2017, modifiant le règlement (UE) no 282/2011 en ce qui concerne certaines exonérations liées aux opérations intracommunautaires [COM(2017) 568 final], portant uniquement sur l’article 138 de la directive TVA.
( 15 ) Il convient de noter que ce mécanisme n’est pas obligatoire. Les acquéreurs peuvent choisir de se voir appliquer le régime de principe dans lequel l’assujetti intermédiaire doit remplir les obligations fiscales lui incombant soit dans l’État membre de départ du bien, dans lequel il réalise une livraison intracommunautaire, soit dans l’État membre d’arrivée du bien, dans lequel il réalise une acquisition intracommunautaire, suivie d’une livraison interne taxée au client final.
( 16 ) Le point a) de cet article prévoit la taxation des « livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ».
( 17 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548, point 23).
( 18 ) Devenu l’article 2, paragraphe 1, sous b), i), de la directive TVA.
( 19 ) Devenu l’article 138, paragraphe 1, de la directive TVA.
( 20 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548, point 24).
( 21 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548, point 25).
( 22 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548, point 42). Voir, à titre d’illustration des conséquences du défaut de respect de cette exigence, arrêt du 22 avril 2010, X et fiscale eenheid Facet-Facet Trading (C‑536/08 et C‑539/08, EU:C:2010:217, points 41 et 42).
( 23 ) Voir, à titre d’illustration, s’agissant d’opérations impliquant plus de deux assujettis, arrêts du 22 avril 2010, X et fiscale eenheid Facet-Facet Trading (C‑536/08 et C‑539/08, EU:C:2010:217), du 27 septembre 2012, VSTR (C‑587/10, EU:C:2012:592), du 18 décembre 2014, Schoenimport Italmoda Mariano Previti e.a. (C‑131/13, C‑163/13 et C‑164/13, EU:C:2014:2455), ainsi que du 26 juillet 2017, Toridas (C‑386/16, EU:C:2017:599).
( 24 ) Voir, pour la comparaison avec le régime applicable aux opérations triangulaires, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire EMAG Handel Eder (C‑245/04, EU:C:2005:675, point 65).
( 25 ) Voir arrêt du 6 avril 2006, EMAG Handel Eder (C‑245/04, EU:C:2006:232, point 40).
( 26 ) Devenu l’article 138, paragraphe 1, de la directive TVA.
( 27 ) Voir arrêt du 6 avril 2006, EMAG Handel Eder (C‑245/04, EU:C:2006:232, dispositif, point 1).
( 28 ) Voir arrêt du 16 décembre 2010, Euro Tyre Holding (C‑430/09, EU:C:2010:786, points 27 et suiv.).
( 29 ) Voir point 44 de cet arrêt.
( 30 ) Italique ajouté par nos soins.
( 31 ) Ainsi que la Cour l’a fait à l’attention des parties par sa question posée pour réponse orale lors de l’audience.
( 32 ) Conformément à l’expression utilisée dans les conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire EMAG Handel Eder (C‑245/04, EU:C:2005:675, point 66).
( 33 ) Voir, à titre de comparaison, hypothèses envisagées dans le rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen, du 23 novembre 1994, sur le fonctionnement du régime transitoire de taxation à la TVA des échanges intracommunautaires [COM(94) 515 final, ci-après le « rapport de 1994 »], qui énonce, au point 247, que, « [d]ans l’hypothèse inverse où B prend livraison des biens dans l’État membre 1, ou si son acheteur C se charge, en son propre nom et pour son compte, du transport à
destination de l’État membre d’arrivée 2 [lire « 3 » par cohérence avec le point 4 des présentes conclusions], B réalise un achat intérieur à l’État membre 1 suivi d’une livraison intracommunautaire au départ de cet État membre ». Voir, à titre d’illustration de la première hypothèse, arrêt du 26 juillet 2017, Toridas (C‑386/16, EU:C:2017:599, points 12, 13 et 40).
( 34 ) Voir point 43, quatrième tiret, des présentes conclusions.
( 35 ) Cette exigence figure à l’article 42 et à l’article 141, sous e), de la directive TVA. À défaut, l’article 41 de cette directive doit s’appliquer. La condition est ainsi formulée : « dans la mesure où l’acquéreur n’établit pas que [l’]acquisition a été soumise à la TVA conformément à l’article 40 ». Voir point 85 des présentes conclusions ainsi que points 6 et 17 de la décision de renvoi.
( 36 ) Voir observations écrites du gouvernement autrichien (point 7). Vérification libre de la cohérence des différentes traductions.
( 37 ) Voir article 214 de la directive TVA relatif aux obligations d’identification pour toute opération. Voir aussi, notamment, pour le rappel de la finalité, à savoir assurer le bon fonctionnement du système de la TVA, arrêt du 14 mars 2013, Ablessio (C‑527/11, EU:C:2013:168, points 18 et 19).
( 38 ) Voir rapport de 1994, point 246 relatif aux principes d’imposition.
( 39 ) Voir rapport de 1994, point 249.
( 40 ) Terra, B., et Kajus, J., A Guide to the European VAT Directives, Introduction to European VAT, volume 1, International Bureau of Fiscal Documentation, Amsterdam, 2017, p. 619, spéc. note en bas de page 601. Voir, également, à titre d’exemple, circulaire française BOI-TVA-CHAMP-20-40-20120912, disponible à l’adresse Internet suivante : http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/1342-PGP.html, point 240, ainsi que commentaire de la législation belge dans Baltus, F., La TVA : fondements et mécanismes,
2e éd., Larcier, Bruxelles, 2016, p. 163.
( 41 ) Dans certaines législations nationales il existe des liens entre les numéros d’identification sociaux ou fiscaux d’une entreprise, établie dans l’État concerné. Ainsi, à partir de cette identification, est attribué automatiquement le numéro de la TVA intracommunautaire.
( 42 ) Voir points 252, 254 et 255 de ce rapport.
( 43 ) Voir point 61 des présentes conclusions.
( 44 ) Voir point 63 des présentes conclusions.
( 45 ) Voir point 251 de ce rapport.
( 46 ) Plus précisément, paragraphe 1, sous a), de l’article 265 de cette directive.
( 47 ) Cette solution peut être rapprochée de la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’exonération d’une livraison intracommunautaire ne doit pas dépendre de l’attribution ou de la transmission d’un numéro d’identification TVA ou encore de la radiation de celui-ci. Voir points 87 et suiv. des présentes conclusions.
( 48 ) Voir arrêt du 14 mars 2013, Ablessio (C‑527/11, EU:C:2013:168, points 20 et 32).
( 49 ) Voir points 9 à 11 des observations écrites de ce gouvernement.
( 50 ) Voir, pour des considérations plus générales sur le lien de cet objectif avec la stratégie de croissance de l’Union, notamment pour les PME, exposé des motifs de la proposition de règlement d’exécution du Conseil, du 4 octobre 2017, modifiant le règlement no 282/2011 en ce qui concerne certaines exonérations liées aux opérations intracommunautaires [COM(2017) 568 final, p. 3, paragraphe 6].
( 51 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Teleos e.a. (C‑409/04, EU:C:2007:548, points 48 à 50).
( 52 ) Voir arrêts du 27 septembre 2007, Collée (C‑146/05, EU:C:2007:549, point 29), et du 6 septembre 2012, Mecsek-Gabona (C‑273/11, EU:C:2012:547, point 61).
( 53 ) À rapprocher de l’arrêt du 27 septembre 2012, VSTR (C‑587/10, EU:C:2012:592, point 43 et jurisprudence citée).
( 54 ) Voir points 254 et 255 de ce rapport.
( 55 ) Il convient, à cet égard, de constater que, à la suite de ce rapport, aucune disposition particulière n’a été prise lors de la modification de la directive TVA et de la rédaction des règlements.
( 56 ) Voir communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen, du 4 octobre 2017, sur le suivi du plan d’action sur la TVA, vers un espace TVA unique dans l’Union – Le moment d’agir [COM(2017) 566 final, point 3.1.2., p. 11].
( 57 ) Plus précisément, paragraphe 1, premier alinéa, qui correspond à l’article 28 nonies de la sixième directive, inséré par la directive 91/680, remplaçant l’article 22, paragraphe 6, sous b), deuxième alinéa, première phrase, de la sixième directive.
( 58 ) Plus précisément, paragraphe 1, sous a) et sous b), qui correspond à l’article 28 nonies de la sixième directive, inséré par la directive 91/680, remplaçant l’article 22 paragraphe 6, sous b), cinquième alinéa, premier et deuxième tirets, de la sixième directive.
( 59 ) Voir point 16 des observations écrites du gouvernement autrichien.
( 60 ) Voir point 28 de la décision de renvoi, qui précise que ces états récapitulatifs ont été déposés le 8 février 2013, alors que le délai pour ce dépôt expirait le 31 janvier 2013.
( 61 ) Voir points 5 et 31 de la décision de renvoi. Ces rectificatifs ont été déposés le 10 avril 2013.
( 62 ) Article 42, sous a), de ladite directive.
( 63 ) Correspondant à l’article 28 ter, titre A, paragraphe 2, premier et deuxième alinéas, de la sixième directive. Il peut aussi être relevé, eu égard aux éléments d’analyse exposés par la juridiction de renvoi et par le gouvernement autrichien, dans ses observations écrites, qu’il peut s’agir de cas dans lesquels la destination finale des biens n’est pas connue ou dans lesquels, plus généralement, une des conditions de fond de l’article 42 de la directive TVA n’est pas remplie.
( 64 ) C‑536/08 et C‑539/08, EU:C:2010:217, points 32 à 36.
( 65 ) Voir point 33 de cet arrêt.
( 66 ) Voir, s’agissant des projets en cours, communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen, du 4 octobre 2017, sur le suivi du plan d’action sur la TVA, vers un espace TVA unique dans l’Union – Le moment d’agir [COM(2017) 566 final, point 3.1.1.1., sous b), p. 9].
( 67 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Collée (C‑146/05, EU:C:2007:549, dispositif, point 1).
( 68 ) Voir arrêt du 27 septembre 2007, Collée (C‑146/05, EU:C:2007:549, point 25).
( 69 ) Voir arrêt du 9 février 2017, Euro Tyre (C‑21/16, EU:C:2017:106, point 37).
( 70 ) Voir arrêts du 27 septembre 2012, VSTR (C‑587/10, EU:C:2012:592, points 51 et dispositif), ainsi que du 20 octobre 2016, Plöckl (C‑24/15, EU:C:2016:791, points 52 et suiv.).
( 71 ) Voir arrêt du 15 septembre 2016, Senatex (C‑518/14, EU:C:2016:691, dispositif).
( 72 ) Voir arrêt du 6 septembre 2012, Mecsek-Gabona [C‑273/11, EU:C:2012:547, points 60 et 61 (s’agissant de la condition formelle) ainsi que dispositif, point 2].
( 73 ) Voir articles 262 et 263 de la directive TVA.
( 74 ) À rapprocher de l’arrêt du 22 avril 2010, X et fiscale eenheid Facet-Facet Trading (C‑536/08 et C‑539/08, EU:C:2010:217, point 37).
( 75 ) JO 2010, L 268, p. 1.
( 76 ) Voir considérants suivants du règlement no 904/2010 :
« (7) Afin de collecter la taxe due, les États membres devraient coopérer afin de contribuer à l’assurance de l’établissement correct de la TVA. Par conséquent, ils doivent non seulement contrôler l’application correcte de la taxe due sur leur propre territoire mais devraient également aider les autres États membres à veiller à l’application correcte de la taxe relative à une activité exercée sur leur propre territoire mais due dans un autre État membre.
(8) Contrôler l’application correcte de la TVA sur les opérations transfrontalières imposables dans un État membre autre que celui où est établi le prestataire ou le fournisseur dépend, dans la plupart des cas, des informations détenues par l’État membre d’établissement ou pouvant être obtenues beaucoup plus facilement par ce dernier. Le contrôle effectif de ces opérations dépend donc du fait que l’État membre d’établissement collecte ou soit en mesure de collecter ces informations.
[...]
(19) C’est à l’État membre de consommation qu’il incombe au premier chef de veiller à ce que les fournisseurs non établis remplissent leurs obligations [...] »
( 77 ) Selon l’expression utilisée dans les conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire Plöckl (C‑24/15, EU:C:2016:204, points 82 et suiv.). Son raisonnement est fondé sur les principes énoncés dans l’arrêt du 27 septembre 2007, Collée (C‑146/05, EU:C:2007:549, point 31), repris récemment dans l’arrêt du 9 février 2017, Euro Tyre (C‑21/16, EU:C:2017:106, points 36 à 38).
( 78 ) Voir arrêt du 18 décembre 2014, Schoenimport Italmoda Mariano Previti e.a. (C‑131/13, C‑163/13 et C‑164/13, EU:C:2014:2455, points 42 à 49).
( 79 ) Voir arrêt du 20 octobre 2016, Plöckl (C‑24/15, EU:C:2016:791, points 44 et 45). Voir, également, à titre d’exemple de cas d’absence frauduleuse de déclarations dans l’État membre d’arrivée des biens, dans une relation triangulaire, mais sans recours à la mesure de simplification, arrêt du 18 décembre 2014, Schoenimport Italmoda Mariano Previti e.a. (C‑131/13, C‑163/13 et C‑164/13, EU:C:2014:2455).
( 80 ) Voir arrêt du 9 février 2017, Euro Tyre (C‑21/16, EU:C:2017:106, points 42 et 43).
( 81 ) Voir points 23, 27 et 39 des observations écrites de ce gouvernement.
( 82 ) C‑536/08 et C‑539/08, EU:C:2010:217.
( 83 ) Voir points 41 et 42 de cet arrêt.