ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)
12 avril 2018 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Règlement (CEE) no 2658/87 – Union douanière et tarif douanier commun – Classement tarifaire – Nomenclature combinée – Sous-positions 9021 10 10, 9021 10 90 et 9021 90 90 – Système de fixation de la colonne vertébrale – Règlement d’exécution (UE) no 1214/2014 »
Dans l’affaire C‑227/17,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf, Allemagne), par décision du 19 avril 2017, parvenue à la Cour le 28 avril 2017, dans la procédure
Medtronic GmbH
contre
Finanzamt Neuss,
LA COUR (dixième chambre),
composée de M. E. Levits, président de chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur) et F. Biltgen, juges,
avocat général : M. M. Wathelet,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour Medtronic GmbH, par Me J. Meyer-Burow, Rechtsanwalt, et Mme N. Looks, Steuerberaterin,
– pour la Commission européenne, par MM. M. Wasmeier et A. Caeiros, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte, en substance, sur l’interprétation des sous-positions tarifaires 9021 10 10, 9021 10 90 et 9021 90 90 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), telle que modifiée par le règlement d’exécution (UE) 2015/1754 de la Commission, du 6 octobre 2015 ( JO 2015, L 285, p. 1) (ci-après la
« NC »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Medtronic GmbH au Finanzamt Neuss (bureau des impôts de Neuss, Allemagne) (ci-après le « bureau des impôts ») au sujet du taux de taxe sur le chiffre d’affaires applicable à la livraison de systèmes de fixation de la colonne vertébrale.
Le cadre juridique
La convention sur le SH
3 Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH ») a été élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1)
(ci-après la « convention sur le SH »).
4 En vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous a), de la convention sur le SH, chaque partie contractante s’engage à ce que ses nomenclatures tarifaires et statistiques soient conformes au SH, à utiliser toutes les positions et les sous-positions de celui-ci, sans adjonction ni modification, ainsi que les codes numériques y afférents, et à suivre l’ordre de numérotation du SH. La même disposition impose également aux parties contractantes l’obligation d’appliquer les règles générales pour
l’interprétation du SH ainsi que toutes les notes de sections, de chapitres et de sous-positions du SH et à ne pas modifier la portée de ses sections, chapitres, positions ou sous-positions.
5 L’OMD approuve, dans les conditions fixées à l’article 8 de la convention sur le SH, les notes explicatives et les avis de classement adoptés par le comité du SH.
6 Le point I des notes explicatives du SH relatives à la position 9021 de ce système, intitulé « Articles et appareils d’orthopédie », contient le passage suivant :
« Les articles et appareils orthopédiques [...] servent :
– soit à prévenir ou à corriger certaines difformités corporelles ;
– soit à soutenir ou à maintenir des parties du corps à la suite d’une maladie, d’une opération ou d’une blessure. »
7 Le point II de ces notes explicatives, intitulé « Attelles, gouttières et autres articles et appareils pour fractures », énonce :
« Les articles et appareils pour fractures servent à immobiliser les parties du corps atteintes (aux fins d’extension ou de protection), ou à réduire les fractures. Ils sont également employés dans le traitement des luxations et d’autres lésions articulaires.
[...]
Sous réserve des dispositions de la Note 1 f) du présent Chapitre, relèvent également de la présente position les plaques, broches, etc., introduites dans le corps par les chirurgiens pour tenir juxtaposées les deux parties d’un os cassé ou pour le traitement similaire des fractures. »
8 En vertu du point V desdites notes explicatives, appartiennent au groupe des « autres appareils à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dans l’organisme, afin de compenser une déficience ou une infirmité », notamment :
« 1) Les appareils destinés à faciliter la phonation des personnes ayant perdu l’usage des cordes vocales à la suite d’un traumatisme ou d’une intervention chirurgicale. [...]
2) Les appareils du genre pacemaker, par exemple ceux destinés à stimuler le muscle cardiaque, en cas de déficience de celui‑ci. Ces appareils [...] sont implantés sous la peau du patient. [...] D’autres pacemakers sont utilisés pour stimuler d’autres organes (poumons, rectum, vessie, etc.).
3) Les appareils permettant aux aveugles de se guider. [...]
4) Les appareils à implanter dans l’organisme destinés à soutenir ou à remplacer la fonction chimique de certains organes (sécrétion d’insuline, par exemple). »
Le droit de l’Union
La NC
9 Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC, laquelle est fondée sur le SH.
10 La NC reprend les positions et les sous-positions à six chiffres du SH, seuls les septième et huitième chiffres formant des subdivisions qui lui sont propres.
11 La première partie de la NC comporte un ensemble de dispositions préliminaires. Dans cette partie, sous le titre I, consacré aux règles générales, la section A, intitulée « Règles générales pour l’interprétation de la [NC] », dispose :
« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.
1. Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.
[...]
3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit.
a) La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. [...]
[...]
6. Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette règle, les notes de sections et de chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »
12 La deuxième partie de la NC est divisée en 21 sections. La section XVIII, intitulée « Instruments et appareils d’optique, de photographie ou de cinématographie, de mesure, de contrôle ou de précision ; instruments et appareils médico-chirurgicaux ; horlogerie ; instruments de musique ; parties et accessoires de ces instruments ou appareils », comprend les chapitres 90, 91 et 92 de la NC. Le chapitre 90, qui a pour titre « Instruments et appareils d’optique, de photographie ou de cinématographie,
de mesure, de contrôle ou de précision ; instruments et appareils médico-chirurgicaux ; parties et accessoires de ces instruments ou appareils », concerne les positions 9001 à 9033 de la NC.
13 La position 9021 est structurée comme suit :
« 9021 Articles et appareils d’orthopédie, y compris les ceintures et bandages médico-chirurgicaux et les béquilles ; attelles, gouttières et autres articles et appareils pour fractures ; articles et appareils de prothèse ; appareils pour faciliter l’audition aux sourds et autres appareils à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dans l’organisme, afin de compenser une déficience ou une infirmité :
9021 10 – Articles et appareils d’orthopédie ou pour fractures :
9021 10 10 – – Articles et appareils d’orthopédie
9021 10 90 – – Articles et appareils pour fractures
– Articles et appareils de prothèse dentaire :[...]
– autres articles et appareils de prothèse :[...]
9021 40 00 – Appareils pour faciliter l’audition aux sourds, à l’exclusion des parties et accessoires
9021 50 00 – Stimulateurs cardiaques, à l’exclusion des parties et accessoires
9021 90 – autres :
9021 90 10 – – Parties et accessoires d’appareils pour faciliter l’audition aux sourds
9021 90 90 – – autres »
14 La note 2 du chapitre 90 de la NC énonce :
« Sous réserve des dispositions de la note 1 ci-dessus, les parties et accessoires pour machines, appareils, instruments ou articles du présent chapitre sont classés conformément aux règles ci-après :
a) les parties et accessoires consistant en articles compris dans l’une quelconque des positions du présent chapitre ou des chapitres 84, 85 ou 91 (autres que les nos 8487, 8548 ou 9033) relèvent de ladite position quels que soient les machines, appareils ou instruments auxquels ils sont destinés ;
b) lorsqu’ils sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinés à une machine, un instrument ou un appareil particuliers ou à plusieurs machines, instruments ou appareils d’une même position (même des nos 9010, 9013 ou 9031), les parties et accessoires, autres que ceux visés au paragraphe précédent, sont classés dans la position afférente à cette ou ces machines, instruments ou appareils ;
[...] »
15 Aux termes de la note 3 du chapitre 90 de la NC :
« Les dispositions des notes 3 et 4 de la section XVI s’appliquent également au présent chapitre. »
16 La note 6 de ce chapitre prévoit :
« Au sens du no 9021, on considère comme “articles et appareils orthopédiques” les articles et appareils servant :
– soit à prévenir ou à corriger certaines difformités corporelles,
– soit à soutenir ou à maintenir des parties du corps à la suite d’une maladie, d’une opération ou d’une blessure.
[...] »
17 La note 3 de la section XVI de la NC est libellée comme suit :
« Sauf dispositions contraires, les combinaisons de machines d’espèces différentes destinées à fonctionner ensemble et ne constituant qu’un seul corps, ainsi que les machines conçues pour assurer deux ou plusieurs fonctions différentes, alternatives ou complémentaires, sont classées suivant la fonction principale qui caractérise l’ensemble. »
18 Les notes explicatives de la NC, dans leur version applicable à la date des faits au principal (JO 2011, C 137, p. 1), relatives à la position 9021 de la NC, prévoient :
« Au sens de cette position, on entend par “compenser une déficience ou une infirmité” uniquement des appareils qui reprennent ou remplacent vraiment la fonction de la partie du corps déficiente ou infirme.
Sont toutefois exclus de la présente position les appareils qui servent uniquement à atténuer les effets d’une déficience ou d’une infirmité.
Sont aussi exclus de cette position les appareils identifiables de stomie (sous-position 3006 91 00). »
Le règlement d’exécution (UE) no 1214/2014
19 Le règlement d’exécution (UE) no 1214/2014 de la Commission, du 11 novembre 2014, relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée (JO 2014, L 329, p. 8), contient, à son annexe, un tableau comportant trois colonnes, la première désignant la marchandise concernée, la deuxième indiquant le classement de celle-ci dans la NC qui lui a été attribué et la troisième portant sur les motifs de ce classement.
20 Il ressort de cette annexe que relève du code 9021 10 90 de la NC la marchandise correspondant à la description suivante :
« Un produit résistant, de forme cylindrique, fileté (dénommé “vis double cœur de pangée” “pangea dual core screw”) en alliage de titane extra dur, d’une longueur comprise entre 20 et 45 mm.
La tige est entièrement filetée avec un filetage double cœur comportant une zone de transition pour la modification du diamètre du cœur. Elle a un diamètre extérieur constant de 4,0 mm, est de type autotaraudeuse, et comporte une extrémité filetée épointée.
Le produit présente une tête polyaxiale (mobile), en forme de U, à filetage interne, qui permet une rotation de 25° autour de son axe pour son ajustement.
Le produit comporte une encoche spéciale dans le capuchon de verrouillage pour fixer une tige (présentée séparément) sur sa tête.
Le produit correspond à la norme ISO/TC 150 pour les vis d’implants et est destiné à être utilisé dans le domaine de la traumatologie, en tant qu’élément d’un système de stabilisation postérieure de la colonne vertébrale. Il est placé au moyen d’instruments spécifiques.
Lors de l’importation, l’article n’est pas présenté dans un emballage stérilisé. Le produit est numéroté et sa traçabilité est donc assurée tout au long de la production et de la distribution. »
21 Dans la colonne relative à la motivation du classement retenu, il est indiqué, notamment, que ce dernier « est déterminé par les dispositions des règles générales 1 et 6 pour l’interprétation de la [NC], par la note [2, sous b),] du chapitre 90 et par le libellé des codes NC 9021, 9021 10 et 9021 10 90 ».
Le droit allemand
22 L’article 12 de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires), dans sa rédaction applicable aux faits au principal (ci-après l’« UStG »), dispose :
« (1) Le taux applicable aux opérations imposables s’élève à 19 % de l’assiette [...]
(2) Le taux est réduit à 7 % pour les opérations suivantes :
1. la livraison, l’importation ou l’acquisition intracommunautaire des biens visés à l’annexe 2, à l’exception des biens mentionnés au numéro 49, sous f), et aux numéros 53 et 54 ; [...] »
23 Le point 52 de l’annexe 2 de l’UStG est ainsi libellé :
« Prothèses, articles et appareils d’orthopédie, et autres appareils destinés à compenser une déficience ou une infirmité, à usage humain, tels que
a) prothèses articulaires, à l’exclusion des parties et accessoires sous-position 9021 31 00
b) articles et appareils d’orthopédie, y compris les béquilles, ainsi que les ceintures et bandages médico-chirurgicaux, à l’exclusion des parties et accessoires sous-position 9021 10
c) prothèses, à l’exclusion des parties et accessoires sous-positions 9021 21, 9021 29 00 et 9021 39
d) appareils destinés à faciliter l’audition des malentendants, stimulateurs cardiaques et autres appareils destinés à compenser une déficience ou une infirmité, à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dans l’organisme, à l’exclusion des parties et accessoires sous-positions 9021 40 00 et 9021 50 00 et sous-position 9021 90 »
Le litige au principal et la question préjudicielle
24 Medtronic a pour activité, notamment, la livraison aux hôpitaux et aux médecins libéraux de systèmes de fixation de la colonne vertébrale de la marque CD Horizon SOLERA, constitués, notamment :
– de vis mono-axiales en titane et de vis multiaxiales en titane ou en chrome-cobalt/titane, de, respectivement, différents diamètres et différentes longueurs, codées par couleur, à filetage autotaraudeur, avec, à chaque fois, les vis de fermetures en titane correspondantes,
– de tiges cylindriques en différents matériaux (alliage de titane ou chrome-cobalt), précourbées ou droites, avec un diamètre de 4,75 mm, en différentes longueurs (entre 30 mm et 500 mm),
– de plaques Crosslink CD Horizon X10 en titane, de différentes longueurs (fixes ou ajustables), comprenant une vis de fermeture,
– de crochets codés par couleur en quatre tailles et modèles différents, en alliage de titane, ainsi que
– de connecteurs latéraux en alliage de titane, d’un diamètre de 4,75 mm.
25 Selon les informations fournies par la juridiction de renvoi, ces systèmes de fixation de la colonne vertébrale sont implantés à titre permanent dans le corps du patient en fonction duquel ils sont assemblés spécifiquement.
26 Il ressort également du renvoi préjudiciel que lesdits systèmes sont destinés au traitement de pathologies dégénératives des disques intervertébraux, de sténoses et de dislocations de la colonne vertébrale ou de fusions vertébrales antérieures ayant échoué, de tumeurs, de scolioses ou encore de fractures osseuses.
27 Se fondant sur un renseignement tarifaire non contraignant qui lui avait été délivré le 19 juin 2013 et selon lequel les systèmes de fixation de la colonne vertébrale qu’elle livre relèvent de la sous-position 9021 90 90 de la NC, Medtronic a appliqué, concernant la taxation sur le chiffre d’affaires de ses opérations de livraison, le taux réduit visé à l’article 12, paragraphe 2, point 1, de l’UStG.
28 À la suite de deux contrôles sur place, le bureau des impôts a considéré que lesdits systèmes devaient être classés dans la sous-position 9021 10 90 de la NC. Medtronic s’est conformée à cette appréciation et a, dans sa déclaration préalable au titre du mois de mai 2016, appliqué à ses opérations de livraison le taux de taxation prévu à l’article 12, paragraphe 1, de l’UStG.
29 Medtronic a cependant introduit devant le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf, Allemagne) un recours contre ladite déclaration préalable, dans lequel elle soutient que les systèmes en question relèvent de la sous-position 9021 90 90 de la NC et que leur livraison doit par conséquent être soumise au taux de taxation réduit, conformément à l’article 12, paragraphe 2, point 1, de l’UStG. Selon elle, lesdits systèmes sont conçus pour demeurer à titre permanent dans le corps
du patient, alors que les articles et les appareils pour fractures, visés à la sous-position 9021 10 90 de la NC, n’y restent que de manière temporaire. Medtronic fait valoir en outre que, les systèmes de fixation de la colonne vertébrale n’étant pas utilisés uniquement pour le traitement des fractures, leur classement dans la sous-position 9021 90 90 de la NC serait plus approprié.
30 Le bureau des impôts soutient au contraire que les livraisons de systèmes de fixation de la colonne vertébrale sont soumises au taux de la taxe sur le chiffre d’affaires prévu à l’article 12, paragraphe 1, de l’UStG. Il découlerait en effet du règlement d’exécution no 1214/2014 que de tels systèmes relèvent de la sous-position 9021 10 90 de la NC dans la mesure où les vis multiaxiales qui les composent sont comparables aux « vis double cœur de pangée » que ce règlement classe dans cette
sous-position en application de la note 2, sous b), du chapitre 90 de la NC.
31 Nourrissant des doutes à l’égard du classement des systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal dans la sous-position idoine de la NC, le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« Convient-il d’interpréter la [NC] en ce sens que les systèmes de fixation de la colonne vertébrale du type décrit plus précisément dans l’arrêt doivent être classés dans la sous-position 9021 90 90 ? »
Sur la question préjudicielle
32 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si un système de fixation de la colonne vertébrale, tel que celui en cause au principal, assemblé spécifiquement en fonction du patient dans le corps duquel il est implanté et destiné au traitement de pathologies dégénératives des disques intervertébraux, de sténoses et de dislocations de la colonne vertébrale ou de fusions vertébrales antérieures ayant échoué, de tumeurs, de scolioses ou encore de fractures osseuses, relève de la
sous-position 9021 90 90 de la NC.
33 À titre liminaire, il importe de souligner que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel en matière de classement tarifaire, sa fonction consiste davantage à éclairer la juridiction nationale sur les critères dont la mise en œuvre doit permettre à cette dernière de classer correctement les produits en cause dans la NC qu’à procéder elle-même à ce classement, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard. Ainsi, la juridiction
de renvoi apparaît en tout état de cause mieux placée pour procéder au classement en question (arrêt du 9 février 2017, Madaus, C‑441/15, EU:C:2017:103, point 35 et jurisprudence citée).
34 En vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, en vue de garantir la sécurité juridique et la facilité des contrôles, le critère décisif pour le classement tarifaire de marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de section ou de chapitre de celle-ci (arrêt du 26 mai 2016, Invamed Group e.a., C‑198/15, EU:C:2016:362, point 18 ainsi que jurisprudence
citée).
35 Conformément aux règles générales pour l’interprétation de la NC, le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions, de sections ou de chapitres, les libellés des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres étant considérés comme n’ayant qu’une valeur indicative.
36 Selon une jurisprudence également constante de la Cour, la destination du produit peut constituer un critère objectif de classement à la condition qu’elle soit inhérente audit produit, l’inhérence devant pouvoir s’apprécier en fonction des caractéristiques et des propriétés objectives de celui-ci (arrêt du 26 mai 2016, Invamed Group e.a., C‑198/15, EU:C:2016:362, point 22 ainsi que jurisprudence citée).
37 Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que les notes explicatives du SH, en dépit de leur absence de force contraignante, constituent des instruments importants aux fins d’assurer une application uniforme du tarif douanier commun et fournissent, en tant que telles, des éléments valables pour son interprétation. Il en est de même des notes explicatives de la NC (arrêt du 12 juin 2014, Lukoyl Neftohim Burgas, C‑330/13, EU:C:2014:1757, point 35 et jurisprudence citée).
38 Conformément au libellé de la position 9021 de la NC, celle-ci comprend les « [a]rticles et appareils d’orthopédie [...] ; attelles, gouttières et autres articles et appareils pour fractures ; articles et appareils de prothèse ; appareils pour faciliter l’audition aux sourds et autres appareils à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dans l’organisme, afin de compenser une déficience ou une infirmité ».
39 Ainsi qu’il découle du libellé de ladite position, la fonction de l’article ou de l’appareil concerné est déterminante aux fins de son classement dans l’une des sous-positions qu’elle contient.
40 À cet égard, la juridiction de renvoi relève que les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal, tels que décrits au point 24 du présent arrêt, remplissent plusieurs fonctions. Ils sont en effet utilisés aux fins du traitement tant de fractures osseuses que de pathologies dégénératives des disques intervertébraux, de sténoses et de dislocations de la colonne vertébrale ou de fusions vertébrales antérieures ayant échoué, de tumeurs ou de scolioses.
41 Ladite juridiction en déduit que, au regard des différentes fonctions qu’ils assurent, ces systèmes seraient a priori susceptibles de relever soit de la sous-position 9021 90 90 de la NC en tant qu’autres appareils à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dans l’organisme, afin de compenser une déficience ou une infirmité, soit de la sous-position 9021 10 90 de la NC, en tant qu’articles et appareils pour fractures, soit encore de la sous-position 9021 10 10 de la NC, en tant
qu’articles et appareils d’orthopédie.
42 S’agissant, en premier lieu, de la sous-position 9021 10 10 de la NC, la juridiction de renvoi considère qu’il n’est pas nécessaire d’examiner si les systèmes de fixation de colonne vertébrale en cause au principal peuvent être qualifiés d’appareils d’orthopédie au sens de celle-ci, dans la mesure où ils correspondraient, selon toute vraisemblance, au type d’appareils décrits à la sous-position 9021 90 90 de la NC.
43 À cet égard, il convient cependant de rappeler que, ainsi qu’il résulte de la structure de la position 9021 et du libellé de la sous‑position 9021 90 90 de la NC, cette dernière présente un caractère résiduel par rapport aux autres sous-positions de même niveau, dans la mesure où elle vise les articles et les appareils qui ne relèvent d’aucune des autres sous-positions de la position 9021.
44 Ainsi, un classement dans celle-ci ne pourrait être envisagé que si les systèmes en cause au principal ne correspondent à aucune des autres sous-positions de la position 9021 de la NC (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2006, Uroplasty, C‑514/04, EU:C:2006:464, point 56).
45 Conformément à la jurisprudence rappelée au point 33 du présent arrêt, il appartiendra dès lors à la juridiction de renvoi d’apprécier, tout d’abord, si les systèmes en cause au principal peuvent être qualifiés, notamment, d’articles ou d’appareils d’orthopédie, au sens de la sous-position 9021 10 10 de la NC. À cette fin, ladite juridiction devra tenir compte de la note 6 du chapitre 90 de la NC, selon laquelle les articles et les appareils orthopédiques servent soit à prévenir ou à corriger
certaines difformités corporelles, soit à soutenir ou à maintenir des parties du corps à la suite d’une maladie, d’une opération ou d’une blessure.
46 À cet égard, des articles et des appareils destinés au traitement de pathologies dégénératives des disques intervertébraux, de sténoses, de dislocations de la colonne vertébrale et de fusions vertébrales antérieures ayant échoué, de tumeurs ou de scolioses pourraient relever de la sous-position 9021 10 10 de la NC, sous réserve toutefois de vérification par la juridiction de renvoi.
47 Dans ce contexte, il convient de préciser qu’il ne découle ni de la NC, ni des notes explicatives de la NC, ni encore des notes explicatives du SH que le législateur de l’Union aurait eu l’intention d’exclure de cette sous-position les articles ou les appareils destinés à être implantés dans le corps humain.
48 S’agissant, en deuxième lieu, de la sous-position 9021 10 90 de la NC, il convient de rappeler que les notes explicatives du SH relatives à la position 9021 énoncent que les « articles et appareils pour fractures servent à immobiliser les parties du corps atteintes (aux fins d’extension ou de protection), ou à réduire les fractures », et précisent que « [ces articles et appareils] sont également employés dans le traitement des luxations et d’autres lésions articulaires ».
49 À cet égard, il convient d’emblée de rejeter l’argumentation de Medtronic selon laquelle les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal ne sauraient relever de cette sous-position dans la mesure où, contrairement aux articles et aux appareils pour fractures visés par celle-ci, ils sont conçus pour demeurer à titre permanent dans le corps du patient.
50 En effet, force est de constater qu’il ne découle ni du libellé de ladite sous-position ni des notes explicatives de la NC relatives à la position 9021 que seuls les articles et les appareils pour fractures conçus pour demeurer temporairement dans le corps du patient seraient visés par celle-ci.
51 Il s’ensuit qu’un article ou un appareil pour fractures ne saurait être exclu de la sous-position 9021 10 90 de la NC au seul motif qu’il a été conçu pour demeurer à titre permanent dans le corps humain.
52 Par ailleurs, la juridiction de renvoi relève que le traitement des fractures n’est que l’un des multiples usages des systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal et qu’il ne saurait donc être regardé comme étant leur fonction principale, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de les classer dans la sous-position 9021 10 90 de la NC en application, par analogie, de la note 3 de la section XVI de la NC.
53 Conformément à cette note, applicable au chapitre 90 de la NC en vertu de la note 3 de ce chapitre, il y a lieu, dans la mesure où cette pluralité de fonctions est susceptible de faire relever lesdits systèmes de plusieurs sous-positions de la NC, de les classer « suivant la fonction principale qui caractérise l’ensemble ».
54 Il s’ensuit, ainsi que la juridiction de renvoi l’a constaté à juste titre, que les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal ne sauraient faire l’objet d’un classement dans la sous-position 9021 10 90 de la NC dans l’hypothèse où il serait établi qu’ils ne sont pas principalement destinés au traitement des fractures.
55 En outre, si un classement dans la sous-position 9021 10 10 de la NC était retenu à la suite de la vérification opérée par la juridiction de renvoi conformément au point 46 du présent arrêt, il y aurait lieu de déterminer si lesdits systèmes sont principalement destinés à un usage orthopédique.
56 La juridiction de renvoi se demande néanmoins si les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal ne devraient pas être classés dans la sous-position 9021 10 90 de la NC au motif que ces systèmes sont en partie constitués de vis multiaxiales qui, selon le bureau des impôts, sont comparables aux vis double cœur de pangée visées à l’annexe du règlement d’exécution no 1214/2014 et que celui-ci classe dans cette sous-position.
57 Il importe de relever, à cet égard, que, certes, la note 2, sous b), du chapitre 90 de la NC prévoit que, « lorsqu’ils sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinés à une machine, un instrument ou un appareil particuliers ou à plusieurs machines, instruments ou appareils d’une même position (même des nos 9010, 9013 ou 9031), les parties et accessoires [...] sont classés dans la position afférente à cette ou ces machines, instruments ou appareils ».
58 Cependant, à supposer même que certains éléments des systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal correspondent à la description de l’article visé à l’annexe du règlement d’exécution no 1214/2014, encore faudrait-il que lesdits systèmes soient principalement destinés à être utilisés dans le domaine de la traumatologie, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.
59 Au demeurant, il convient de rappeler que, si l’application par analogie d’un règlement de classement aux produits analogues à ceux visés par ce règlement favorise une interprétation cohérente de la NC ainsi que l’égalité de traitement des opérateurs, une telle application par analogie n’est pas nécessaire ni possible lorsque la Cour, par sa réponse à une question préjudicielle, a fourni à la juridiction de renvoi tous les éléments nécessaires pour le classement d’un produit dans la position
idoine de la NC (arrêt du 26 avril 2017, Stryker EMEA Supply Chain Services, C‑51/16, EU:C:2017:298, points 61 et 62).
60 Il s’ensuit que, si la juridiction de renvoi devait parvenir à la conclusion que les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal, eu égard à leurs caractéristiques et à leurs propriétés objectives, ainsi que compte tenu de l’utilisation à laquelle ils sont destinés et de celle qui en est faite concrètement (voir, en ce sens, arrêts du 4 mars 2015, Oliver Medical, C‑547/13, EU:C:2015:139, points 51 et 52, ainsi que du 25 février 2016, G. E. Security, C‑143/15,
EU:C:2016:115, point 55), n’ont pas pour fonction principale le traitement des fractures, il n’y aurait pas lieu de tenir compte du règlement d’exécution no 1214/2014 aux fins de leur classement dans la sous-position idoine de la NC.
61 En troisième lieu, il importe de rappeler que, dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi parviendrait à la conclusion que les systèmes de fixation de la colonne vertébrale en cause au principal ne relèvent ni de la sous-position 9021 10 10 ni de la sous-position 9021 10 90, le classement de ces systèmes dans la sous-position résiduelle 9021 90 90 de la NC supposerait que ceux-ci soient destinés non seulement à être implantés dans l’organisme, mais également à compenser une déficience ou une
infirmité, ce qu’il appartiendrait à la juridiction de renvoi de vérifier à la lumière des notes explicatives de la NC et du SH relatives à la position 9021.
62 Aux termes des notes explicatives de la NC relatives à la position 9021, seuls les appareils qui reprennent ou remplacent vraiment la fonction de la partie du corps déficiente ou infirme peuvent être considérés comme destinés à compenser une déficience ou une infirmité, les appareils qui servent uniquement à atténuer les effets d’une déficience ou d’une infirmité étant quant à eux exclus de cette définition.
63 En outre, il y a lieu de souligner que, à titre d’exemples d’appareils destinés à compenser une déficience ou une infirmité, les notes explicatives du SH relatives à la position 9021 mentionnent les appareils destinés à faciliter la phonation des personnes ayant perdu l’usage des cordes vocales, les appareils du genre pacemaker, tels ceux destinés à stimuler le muscle cardiaque en cas de déficience de celui‑ci, les appareils permettant aux aveugles de se guider, ou encore ceux destinés à soutenir
ou à remplacer la fonction chimique de certains organes, comme la sécrétion d’insuline.
64 S’agissant de systèmes de fixation de la colonne vertébrale tels que ceux en cause au principal, il appartiendra, le cas échéant, à la juridiction de renvoi d’identifier la partie du corps déficiente ou infirme ainsi que la fonction que lesdits systèmes ont vocation à remplacer.
65 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question préjudicielle que la NC doit être interprétée en ce sens que le classement de systèmes de fixation de la colonne vertébrale tels que ceux en cause au principal dans la sous-position 9021 90 90 de la NC est exclu lorsque ces systèmes peuvent être classés dans une autre sous-position de la position 9021 de la NC. Le classement éventuel de ces systèmes dans la sous-position 9021 10 10 ou dans la
sous-position 9021 10 90 de la NC dépend de la fonction principale qui les caractérise, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer en tenant compte des caractéristiques et des propriétés objectives de tels systèmes, ainsi que de l’utilisation à laquelle ils sont destinés et de celle qui en est faite concrètement.
Sur les dépens
66 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :
La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, telle que modifiée par le règlement d’exécution (UE) 2015/1754 de la Commission, du 6 octobre 2015, doit être interprétée en ce sens que le classement de systèmes de fixation de la colonne vertébrale tels que ceux en cause au principal dans la sous-position 9021 90 90 de la nomenclature combinée est exclu
lorsque ces systèmes peuvent être classés dans une autre sous-position de la position 9021 de la nomenclature combinée. Le classement éventuel de ces systèmes dans la sous-position 9021 10 10 ou dans la sous-position 9021 10 90 de la nomenclature combinée dépend de la fonction principale qui les caractérise, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer en tenant compte des caractéristiques et des propriétés objectives de tels systèmes, ainsi que de l’utilisation à laquelle ils sont
destinés et de celle qui en est faite concrètement.
Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.