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27/03/2019 | CJUE | N°C-716/17

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. M. Szpunar, présentées le 27 mars 2019., Procédure engagée par A., 27/03/2019, C-716/17


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 27 mars 2019 ( 1 )

Affaire C‑716/17

A

[demande de décision préjudicielle formée par l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est, Danemark)]

« Renvoi préjudiciel – Travailleurs – Restrictions à la libre circulation – Ouverture d’une procédure d’assainissement de dettes – Condition de résidence – Admissibilité »

I. Introduction

1. Dans l’arrêt Radziejewski ( 2 ), la Cour a ju

gé qu’une réglementation nationale qui subordonne l’octroi d’une mesure d’effacement de créances à une condition de résidence dans l’État membre con...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 27 mars 2019 ( 1 )

Affaire C‑716/17

A

[demande de décision préjudicielle formée par l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est, Danemark)]

« Renvoi préjudiciel – Travailleurs – Restrictions à la libre circulation – Ouverture d’une procédure d’assainissement de dettes – Condition de résidence – Admissibilité »

I. Introduction

1. Dans l’arrêt Radziejewski ( 2 ), la Cour a jugé qu’une réglementation nationale qui subordonne l’octroi d’une mesure d’effacement de créances à une condition de résidence dans l’État membre concerné constitue une restriction à la libre circulation des travailleurs interdite, en principe, par l’article 45 TFUE.

2. La présente affaire concerne la question de savoir si une réglementation danoise en matière de compétence judiciaire dans les procédures d’effacement de créances est contraire à l’article 45 TFUE. À la différence de la juridiction de renvoi dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Radziejewski ( 3 ), la juridiction à l’origine de l’ordonnance de renvoi dans la présente affaire considère que la réglementation en cause constitue une restriction à la libre circulation des travailleurs. Cela étant,
par sa première question préjudicielle, l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est, Danemark) cherche à savoir si cette restriction peut néanmoins être justifiée. Par sa seconde question, posée à titre subsidiaire, cette juridiction demande à la Cour de juger si, dans les circonstances de l’espèce, l’article 45 TFUE produit un effet direct à l’égard des créanciers privés d’un débiteur ayant introduit une demande d’effacement de créances.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1.   Le règlement (CE) no 44/2001

3. L’article 1er du règlement (CE) no 44/2001 ( 4 ) énonce :

« 1.   Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne recouvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives.

2.   Sont exclus de son application :

[...]

b) les faillites, concordats et autres procédures analogues ;

[...] »

2.   Le règlement (UE) no 1215/2012

4. Aux termes de l’article 1er du règlement (UE) no 1215/2012 ( 5 ) :

« 1.   Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne s’applique notamment ni aux matières fiscales, douanières ou administratives, ni à la responsabilité de l’État pour des actes ou des omissions commis dans l’exercice de la puissance publique (acta jure imperii).

2.   Sont exclus de son application :

[...]

b) les faillites, concordats et autres procédures analogues ;

[...] »

3.   Le règlement (UE) 2015/848

5. L’article 1er du règlement (UE) 2015/848 ( 6 ), intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.   Le présent règlement s’applique aux procédures collectives publiques, y compris les procédures provisoires, qui sont fondées sur des législations relatives à l’insolvabilité et au cours desquelles, aux fins d’un redressement, d’un ajustement de dettes, d’une réorganisation ou d’une liquidation :

[...]

b) les actifs et les affaires d’un débiteur sont soumis au contrôle ou à la surveillance d’une juridiction ; ou

[...] »

6. Or, le considérant 88 du règlement 2015/848 rappelle que le Royaume de Danemark n’est pas lié par ce règlement et n’est pas soumis à son application. Le Royaume de Danemark n’était pas non plus lié par le prédécesseur de ce règlement, le règlement (CE) no 1346/2000 ( 7 ).

B. Le droit danois

7. Aux termes de l’article 3 de la konkursloven (loi sur la faillite) :

« 1.   Toute requête ayant pour objet un redressement, une faillite ou un effacement de créances est adressée au tribunal liquidateur du lieu où est exercée l’activité économique du débiteur.

2.   Si le débiteur n’exerce pas d’activité économique dans le royaume, la requête est adressée au tribunal liquidateur de la circonscription judiciaire où il a son for général.

[...] »

8. La notion de « for général » (« hjemting ») doit être interprétée en conformité, notamment, avec l’article 235 de la retsplejeloven (loi sur l’administration de justice), qui se lit comme suit :

« 1.   Tout recours est intenté devant le for général de la partie défenderesse, à moins que la loi n’en dispose autrement.

2.   Le for général se trouve dans la circonscription judiciaire où la partie défenderesse a son domicile. Si la partie défenderesse est domiciliée dans plusieurs circonscriptions judiciaires, le for général se trouve dans l’une quelconque d’entre elles.

3.   Si la partie défenderesse n’a pas de domicile, le for général se trouve dans la circonscription judiciaire où elle réside.

4.   Si la partie défenderesse n’a pas de domicile ni de lieu de résidence connu, le for général se trouve dans la circonscription judiciaire où se trouvait son domicile ou sa résidence en dernier lieu. »

III. Les faits du litige au principal

9. Le demandeur au principal, A, est un citoyen danois qui exerce son activité professionnelle comme salarié au Danemark où il est également assujetti à l’impôt de manière illimitée. Il est domicilié en Suède.

10. Le 8 février 2017, A a introduit une demande d’effacement de créances auprès du Sø- og Handelsretten (tribunal des affaires maritimes et commerciales, Danemark) à Copenhague (Danemark). La demande concernait des dettes envers des créanciers danois, contractées depuis l’année 1999.

11. Par ordonnance du 6 avril 2017, le Sø- og Handelsretten (tribunal des affaires maritimes et commerciales) a rejeté la demande pour défaut de compétence. Selon cette juridiction, les tribunaux danois ne sont pas compétents pour connaître d’une procédure introduite par A, au motif que celui-ci n’exerce pas d’activité économique indépendante dans le pays et n’y a pas son for général.

12. Ainsi, l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est), statuant comme juridiction de deuxième instance, doit décider si un tribunal danois est compétent pour connaître de la demande de A visant à obtenir un effacement de créances. Cette juridiction estime qu’un tribunal danois pourrait être compétent si les règles danoises de compétence des tribunaux en matière d’effacement de créances étaient contraires au droit de l’Union.

IV. Les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

13. En ces circonstances, l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est) a décidé de surseoir à statuer et de soumettre les questions suivantes à l’appréciation de la Cour :

« 1) L’article 45 TFUE, tel qu’interprété dans l’arrêt [Radziejewski ( 8 )], s’oppose-t-il à une règle de compétence judiciaire qui, à l’instar de ce que prévoit le droit danois, a pour objectif de garantir que le tribunal qui statue sur la demande d’effacement de créances a une connaissance et peut tenir compte, dans son appréciation, de la situation sociale et pécuniaire dans laquelle le débiteur et sa famille vivent concrètement et pourraient vivre à l’avenir, et que ladite appréciation
pourra être effectuée selon des critères préétablis qui déterminent ce qui peut être considéré comme un train de vie modeste acceptable pendant la durée de la mesure d’effacement ?

Pour le cas où la Cour répondrait à la première question que la restriction ne peut pas être considérée comme justifiée, la question suivante lui est posée :

2) L’article 45 TFUE doit-il être interprété en ce sens qu’il jouit, dans une situation comparable au cas d’espèce également, d’un effet direct dans les rapports entre particuliers en sorte que les créanciers privés doivent supporter la réduction ou l’extinction des dettes à leur égard d’un débiteur qui s’est établi à l’étranger ? »

14. La demande de décision préjudicielle est parvenue au greffe de la Cour le 22 décembre 2017.

15. Des observations écrites ont été déposées par A, le gouvernement danois ainsi que par la Commission européenne. Ces parties ont participé à l’audience qui s’est tenue le 15 janvier 2019.

V. Analyse

16. Pour bien comprendre les enjeux posés par la présente affaire, il y a lieu, tout d’abord, de contextualiser les problèmes soulevés par les questions préjudicielles dans le cadre du système de droit international privé de l’Union. À cette fin, je présenterai à titre liminaire quelques remarques sur la procédure danoise d’effacement de créances. J’examinerai ensuite si cette procédure entre dans le champ d’application des instruments du droit de l’Union. Enfin, sur la base de ces considérations,
j’effectuerai l’analyse relative aux questions préjudicielles.

A. La procédure danoise d’effacement de créances

17. La juridiction de renvoi explique qu’une procédure danoise d’effacement de créances est engagée par l’introduction d’une demande par un débiteur auprès du tribunal liquidateur. Ce tribunal rencontre le débiteur et détermine s’il existe des circonstances s’opposant à l’introduction d’une telle procédure. C’est également à ce stade que la compétence des tribunaux danois est examinée et que se situe la procédure ayant donné lieu aux présentes questions préjudicielles.

18. Si le tribunal est compétent et qu’il n’existe pas, à ce stade, de circonstances s’opposant à l’introduction de la procédure d’effacement des créances, le tribunal liquidateur déclenche ladite procédure. À cette fin, ce tribunal désigne un assistant, lequel doit être un avocat, qui doit examiner en détail la situation économique du débiteur et élaborer un plan de désendettement. Ce plan contient une description détaillée de l’actif et du passif du débiteur, ainsi que de la situation économique
du ménage, et inclut une proposition d’effacement de créances.

19. Cette proposition est envoyée aux créanciers qui n’interviennent dans la procédure qu’à partir de ce moment. Un délai leur est imparti pour formuler des objections contre ladite proposition. Le tribunal liquidateur organise ensuite une réunion lors de laquelle est prise une décision sur la demande d’effacement.

20. Le tribunal liquidateur peut rendre une ordonnance d’effacement de créances si, d’une part, le débiteur prouve qu’il n’est pas en mesure de payer ses dettes et n’aura pas la possibilité de le faire pendant plusieurs années et si, d’autre part, il est considéré que l’effacement de ses dettes est susceptible d’aboutir à une amélioration durable de sa situation économique. Une ordonnance d’effacement de créances ne saurait être rendue, notamment, si la situation économique du débiteur n’a pas été
clarifiée. Le tribunal liquidateur peut également refuser un effacement de créances si d’autres circonstances s’y opposent.

21. Il ressort de l’interprétation des dispositions danoises, présentée par la juridiction de renvoi, que le tribunal liquidateur doit pouvoir apprécier la situation sociale et financière passée, présente et à venir du débiteur, afin de déterminer si celui-ci réunit les conditions d’un effacement de créances, ainsi que celle de son conjoint ou cohabitant et de ses enfants. Aux fins de cette appréciation, et notamment de la vérification des informations présentées par le débiteur, une connaissance du
contexte local est souvent nécessaire. Ainsi, selon la juridiction de renvoi, il est essentiel que les demandes d’effacement de créances soient traitées par le tribunal du lieu de domicile ou de résidence du débiteur.

B. Observation liminaire sur l’applicabilité des instruments juridiques du droit international privé de l’Union

22. En premier lieu, la juridiction de renvoi indique que le Royaume de Danemark n’applique pas le règlement no 1346/2000 et fait valoir que, à la lumière de l’arrêt Radziejewski ( 9 ), même si ce règlement y était applicable, la procédure danoise d’effacement de créances ne relèverait pas dudit règlement. Par ailleurs, cette juridiction signale que, à l’instar de la procédure suédoise d’effacement de créances visée dans cet arrêt, la procédure danoise n’entraîne pas le dessaisissement du débiteur.

23. Je relève que, dans l’arrêt Radziejewski ( 10 ), la Cour a indiqué que la procédure suédoise d’effacement de créances ne figurait pas à l’annexe A du règlement no 1346/2000 et que ce règlement s’appliquait uniquement aux procédures énumérées à cette annexe ( 11 ). Dans cet ordre d’idées, la Cour a jugé, dans l’arrêt Bank Handlowy et Adamiak ( 12 ), que la procédure française de sauvegarde relevait du champ d’application du règlement no 1346/2000 au motif qu’elle figurait parmi les procédures
inscrites à l’annexe A de ce règlement. Or, certains auteurs ont exprimé des doutes quant au respect par cette procédure des conditions énoncées à l’article 1er, paragraphe 1, dudit règlement ( 13 ). Ainsi, ces auteurs en ont déduit que, en incluant une procédure dans l’annexe A du règlement no 1346/2000, des États membres peuvent rendre ce règlement applicable à des procédures ne remplissant pas les conditions déterminant son champ d’application ( 14 ).

24. Cela étant, dans la présente affaire, il ne me paraît pas nécessaire de débattre de la question de savoir si une procédure qui ne remplit pas des conditions énoncées à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1346/2000 pourrait être incluse dans l’annexe A de ce règlement. La procédure danoise ne figure pas dans cette annexe tout simplement parce que le Royaume de Danemark n’applique pas le règlement no 1346/2000.

25. En outre, il est vrai, comme l’indiquent le gouvernement danois et la Commission, que le règlement 2015/848, qui a succédé au règlement no 1346/2000, semble couvrir des procédures d’effacement de créances. Il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, sous b), du règlement 2015/848 que ce règlement s’applique aux procédures collectives publiques qui sont fondées sur des législations relatives à l’insolvabilité et au cours desquelles, aux fins d’un ajustement de dettes, les actifs et les affaires
d’un débiteur sont soumis au contrôle ou à la surveillance d’une juridiction, à condition que, ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, troisième alinéa, dudit règlement, ces procédures figurent à l’annexe A de ce même règlement ( 15 ). Toutefois, il importe d’observer que, à l’instar du règlement no°1346/2000, le règlement 2015/848 ne lie pas le Royaume de Danemark. Par ailleurs, le règlement 2015/848 est applicable aux procédures ouvertes postérieurement au 26 juin 2017 ( 16 ),
tandis que la demande ayant donné lieu à la procédure au principal a été introduite le 7 février 2017.

26. En second lieu, la juridiction de renvoi indique que, contrairement aux règlements relatifs à l’insolvabilité, le règlement no 44/2001 s’applique au Royaume de Danemark en vertu de l’« accord parallèle» ( 17 ).

27. Or, selon la juridiction de renvoi, la procédure danoise d’effacement de créances n’entre dans les champs d’application ni du règlement no 44/2001 ni de son successeur, le règlement no 1215/2012. Aux termes de leur article 1er, paragraphe 2, sous b), ces deux règlements ne sont pas applicables aux faillites, aux concordats et aux autres procédures analogues.

28. Je partage, à cet égard, le point de vue de la juridiction de renvoi.

29. Si la procédure d’effacement de créances remplit les conditions fixées à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement 2015/848 et, de ce fait, est susceptible d’entrer dans le champ d’application de ce règlement, cette procédure ne saurait, à mon sens, entrer dans le champ d’application du règlement no 1215/2012. Le règlement no 1215/2012 et le règlement 2015/848 sont complémentaires et leurs champs d’application respectifs ne devraient pas se chevaucher ( 18 ).

30. Le fait que le règlement 2015/848 n’est pas applicable au Danemark n’est pas pertinent ( 19 ). Le champ d’application du règlement no 1215/2012 ne saurait être déterminé en fonction de l’applicabilité ou non, dans l’État concerné, du règlement 2015/848.

31. En outre, ainsi qu’il ressort des points 23 et 24 des présentes conclusions, l’applicabilité du règlement 2015/848 est subordonnée à l’inclusion d’une procédure à l’annexe A de ce règlement ( 20 ). Toutefois, il est évident qu’une procédure qui remplit les conditions énoncées à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement 2015/848 ne saurait entrer dans le champ d’application du règlement no 1215/2012 du seul fait qu’elle ne figure pas à l’annexe A du règlement 2015/848 ( 21 ).

32. Pour résumer, la procédure danoise d’effacement de créances visée par la décision de renvoi n’entre pas dans les champs d’application des règlements nos 1346/2000, 44/2001 et 1215/2012. En conséquence, les normes de ces règlements ne seront pas prises en compte dans l’analyse relative aux questions préjudicielles posées dans la présente affaire. Cela étant, dans mon analyse de la première question préjudicielle, j’envisagerai la problématique relative à l’application du règlement 2015/848 dans
les circonstances telles que celles de l’espèce, étant donné que le gouvernement danois semble tirer de ce règlement un argument en faveur de la thèse selon laquelle l’article 45 TFUE ne s’oppose pas à la condition de résidence prévue par la réglementation danoise.

C. Sur la première question préjudicielle

33. Par sa première question préjudicielle, la juridiction de renvoi cherche à savoir si la condition de résidence, telle que prévue par la réglementation danoise, peut être justifiée par le fait qu’elle permet de garantir que le tribunal saisi de la demande d’effacement de créances puisse statuer sur la base des informations relatives à la situation sociale et pécuniaire passée, présente et à venir du débiteur et de sa famille.

34. En revanche, la juridiction de renvoi ne demande pas à la Cour de se prononcer sur le point de savoir si la condition de résidence prévue par les règles danoises constitue une restriction à la libre circulation des travailleurs interdite, en principe, par l’article 45 TFUE. En faisant référence à l’arrêt Radziejewski ( 22 ), la juridiction de renvoi ainsi que l’ensemble des parties considèrent que la réglementation danoise en cause restreint la libre circulation des travailleurs. Toutefois leurs
avis divergent en ce qui concerne la justification de cette restriction.

35. Avant d’aborder l’analyse au fond, je formulerai quelques remarques sur les éventuelles entraves créées par des règles de compétence à la lumière de l’arrêt Radziejewski ( 23 ). Ensuite, compte tenu des arguments avancés par la juridiction de renvoi et le gouvernement danois, j’examinerai le point de savoir si, dans les circonstances de l’espèce, la condition de résidence peut être considérée comme justifiée.

1.   Sur l’existence de la restriction à la libre circulation

36. La Cour a souligné dans sa jurisprudence qu’une disposition nationale qui prévoit une distinction fondée sur le critère de la résidence risque de jouer principalement au détriment des ressortissants d’autres États membres et, de ce fait, peut constituer une discrimination indirecte fondée sur la nationalité, contraire à la libre circulation des travailleurs ( 24 ).

37. Or, la présente affaire concerne des règles nationales relatives à la compétence internationale. Ces règles, par leur nature, nécessitent des critères de rattachement en vertu desquels les autorités d’un État sont désignées comme compétentes pour connaître d’une catégorie d’affaires. En outre, notamment dans l’intérêt d’une bonne administration de justice, ces règles reposent largement sur la prémisse selon laquelle un lien doit exister entre l’affaire en cause et l’État dont les tribunaux sont
compétents aux fins de connaître cette affaire ( 25 ). Ainsi, il n’est pas surprenant que, s’agissant du critère de rattachement, il soit souvent fait référence au lieu de résidence.

38. Suivre l’approche selon laquelle l’introduction, dans une règle de compétence, d’un critère de rattachement relatif au lieu de résidence constitue une discrimination indirecte fondée sur la nationalité pourrait conduire à considérer que toutes les règles de compétence reposant sur l’existence d’un lien entre le domicile ou la résidence et l’État concerné seraient, par leur nature, discriminatoires et, de ce fait, en principe contraires aux libertés consacrées par le droit de l’Union.

39. Or, il me semble qu’un tel résultat serait paradoxal dans la mesure où la répartition des compétences est, de nos jours, réalisée par des règles de compétence, lesquelles utilisent des critères de rattachement.

40. Il convient de ne pas perdre de vue le fait que la présente affaire concerne une règle de compétence spécifique, relative à la procédure d’effacement de créances. Ces procédures ne font pas, à tout le moins dans le contexte temporel de la présente affaire, l’objet de règles de compétence harmonisées. D’ailleurs, les États membres ne sont pas tenus d’introduire une procédure d’effacement de créances dans leurs droits nationaux.

41. En règle générale, les règles de compétence ne confèrent pas, à tout le moins directement, de droits matériels. Leur rôle se limite à la désignation des autorités qui sont compétentes pour statuer sur l’octroi ou non d’un droit.

42. Toutefois, dans le cas d’une procédure spécifique, telle que la procédure d’effacement des créances, les États membres sont libres de l’introduire ou non dans leur droit national. En conséquence, le rôle d’une règle de compétence ne se limite pas exclusivement à la répartition des compétences entre les autorités de tous les États membres. S’agissant d’une telle procédure, la compétence des juridictions d’un État membre est susceptible de se traduire par un accès à l’effacement de créances et,
partant, à la décision sur l’effacement de créances qui, sur le territoire d’un État membre concerné, sera opposable aux créanciers d’un débiteur.

43. En conséquence, il n’est pas exclu qu’une règle de compétence nationale par laquelle le législateur détermine en pratique qui peut bénéficier d’une certaine procédure puisse empêcher ou dissuader un travailleur ressortissant d’un État membre de quitter son État d’origine pour exercer son droit à la libre circulation, prévu par le droit primaire.

44. Ce raisonnement est celui qu’a suivi la Cour dans l’arrêt Radziejewski ( 26 ), dans lequel elle a jugé qu’une réglementation nationale qui subordonne l’octroi d’une mesure d’effacement de créances à une condition de résidence est susceptible de dissuader un travailleur insolvable, dont l’endettement est tel qu’il n’est guère envisageable qu’il puisse rembourser ses dettes dans un avenir prévisible, d’exercer son droit à la libre circulation.

45. Partant, pour les mêmes raisons, je considère que la condition de résidence, introduite dans le cadre de la réglementation danoise, constitue une restriction à la libre circulation des travailleurs. Il convient maintenant de répondre à la question de savoir si cette restriction pourrait être considérée comme justifiée.

2.   Sur la justification

46. La juridiction de renvoi estime que la condition de résidence, prévue par les règles danoises en matière de compétence judiciaire, devrait être considérée comme justifiée. Sur ce point, les parties ont des positions divergentes. Le gouvernement danois partage la position de la juridiction de renvoi, tandis que A et la Commission sont d’avis que, à la lumière de l’article 45 TFUE, cette condition ne saurait être justifiée.

47. Afin de déterminer si une mesure, dont il a été constaté qu’elle restreint la libre circulation des travailleurs, peut être justifiée, il convient de vérifier si cette mesure, premièrement, poursuit un objectif légitime compatible avec le traité et se justifie par des raisons impérieuses d’intérêt général, deuxièmement, garantit la réalisation de l’objectif en cause et, troisièmement, ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ( 27 ). J’examinerai tout d’abord la
première condition relative à l’existence d’un objectif légitime et, ensuite, les deuxième et troisième conditions, qui se traduisent, respectivement, par le caractère approprié et nécessaire de la réglementation en cause.

a)   Motif de justification invoqué

48. Il ressort de la formulation de la première question préjudicielle, ainsi que du contenu de la décision de renvoi, que l’exigence selon laquelle le for général du débiteur doit se situer au Danemark a pour objectif que la demande d’effacement de créances puisse faire l’objet d’une décision suffisamment éclairée, fondée sur des informations qui permettent, premièrement, d’apprécier les conditions de vie du débiteur sur les plans social et financier afin de déterminer si son endettement tient à un
manque de capacité ou de volonté, deuxièmement, de garantir une amélioration durable de la situation du débiteur et, troisièmement, de faire en sorte que le débiteur ait un train de vie adéquat – modeste mais suffisant – pendant la période qui suit, durant laquelle la dette sera remboursée de façon échelonnée.

49. L’objectif de la condition de résidence, tel qu’explicité par la juridiction de renvoi, vise ainsi à assurer que les circonstances relatives à la situation sociale et financière du débiteur et de ses proches, ainsi que les conditions de vie dans le lieu où ils subviennent à leurs besoins, seront prises en compte lors de l’examen de la demande d’effacement de créances.

50. Dans l’arrêt Radziejewski, la Cour a notamment considéré, en répondant à l’argument du gouvernement suédois selon lequel la condition de résidence était nécessaire pour pouvoir établir, de façon satisfaisante, la situation financière et personnelle du débiteur, qu’il est légitime pour un État membre de vouloir contrôler la situation financière et personnelle du débiteur avant de lui accorder une mesure qui vise à effacer tout ou partie de ses dettes ( 28 ).

51. Il me semble que l’objectif de la condition de résidence prévue par la réglementation danoise ne présente pas de différences avec celui de la condition de résidence visé dans l’arrêt Radziejewski ( 29 ).

52. Selon la juridiction de renvoi et le gouvernement danois, dans cet arrêt, la Cour aurait examiné la condition de résidence à la lumière de la nécessité de contrôler la situation personnelle et financière du débiteur. Toutefois, la Cour ne se serait pas prononcée sur le point de savoir si le fait de réserver l’accès à la procédure d’effacement de créances à des personnes habitant ou, à tout le moins, ayant eu leur dernier domicile dans l’État de la demande, peut être justifié par l’objectif de
garantir que la juridiction saisie d’une telle demande dispose d’une connaissance de la situation sociale et financière concrète du débiteur et peut en tenir compte dans son appréciation.

53. En outre, le gouvernement danois estime que la réglementation suédoise visée dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Radziejewski ( 30 ) impliquait également un contrôle a posteriori du débiteur, permettant aux autorités suédoises de suivre les efforts entrepris par le débiteur pour remplir ses obligations. Ce gouvernement fait valoir que, en conséquence, la condition de résidence n’était pas en mesure de garantir l’objectif poursuivi, car le débiteur pouvait simplement transmettre sa
résidence vers un État membre après l’introduction de sa demande d’effacement de créances. En revanche, dans le cadre de la procédure danoise d’effacement de créances, les tribunaux ne procéderaient pas à un contrôle a posteriori du débiteur.

54. La juridiction de renvoi et le gouvernement danois semblent ainsi faire valoir que la réglementation danoise cherche à assurer un niveau de connaissance de la situation d’un débiteur plus élevé que celui exigé en vertu de la réglementation suédoise visée dans l’affaire Radziejewski ( 31 ).

55. Toutefois, dans ces deux cas, l’objectif de la condition de résidence demeure inchangé. Les différences quant au niveau de connaissance de la situation d’un débiteur pourraient être, à mon sens, reflétées dans l’examen de la nécessité de la réglementation en cause.

56. Par ailleurs, il me semble que l’argument avancé par le gouvernement danois, selon lequel la réglementation danoise ne prévoit pas de contrôle a posteriori, n’est pas cohérent avec certains autres de ses arguments. En effet, ce gouvernement fait valoir dans ses observations qu’une ordonnance d’effacement de créances rendue en faveur d’un débiteur qui est parti à l’étranger peut, dans certaines circonstances, être annulée.

57. La juridiction de renvoi se réfère à une telle éventualité de manière plus claire en indiquant qu’une ordonnance d’effacement de créances peut être annulée lorsque le débiteur a agi frauduleusement au cours de la procédure d’effacement de créances ou a manqué aux obligations qui lui avaient été imposées dans l’ordonnance d’effacement de créances. En tout état de cause, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi et des observations du gouvernement danois, l’annulation d’une ordonnance
d’effacement de créances n’intervient pas automatiquement.

58. L’examen du comportement d’un débiteur après l’adoption d’une telle ordonnance, par lequel les autorités danoises cherchent à savoir si le débiteur respecte les conditions établies dans cette ordonnance constitue, à mon sens, une forme de contrôle a posteriori. Dès lors, je ne suis pas convaincu par l’argument du gouvernement danois selon lequel la présente affaire se distingue de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Radziejewski ( 32 ) dans la mesure où les autorités danoises n’effectuent pas
de contrôle a posteriori.

59. À la lumière de ce qui précède, compte tenu de l’analogie entre l’objectif de la réglementation suédoise visée dans l’arrêt Radziejewski ( 33 ) et celui de la réglementation en cause dans la présente affaire, j’estime que la condition de résidence prévue par la réglementation danoise poursuit un objectif légitime, à savoir que la demande d’effacement de créances fasse l’objet d’une décision éclairée et reposant sur des informations qui permettent d’établir la situation sociale et financière
passée, présente et à venir d’un débiteur et de ses proches, ainsi que les conditions de vie dans le lieu où ils subviennent à leurs besoins.

b)   Le caractère approprié et la nécessité de la réglementation en cause

60. Les considérations de la juridiction de renvoi et du gouvernement danois, par lesquelles ils cherchent à justifier la restriction en cause, reposent sur l’idée que la proximité géographique entre le lieu de résidence d’un débiteur et celui du siège d’un tribunal saisi de la demande d’effacement de créances permet d’assurer que les circonstances relatives à la situation sociale et financière de ce débiteur et de ses proches, ainsi que les conditions de vie dans le lieu où ils subviennent à leurs
besoins, seront prises en compte dans l’examen de cette demande.

61. À cet égard, la juridiction de renvoi et le gouvernement danois soutiennent qu’un tribunal qui connaît des demandes d’effacement de créances n’a pas, et ne peut pas avoir, connaissance des circonstances dans lesquelles vit un demandeur dans un autre État membre. Il n’existerait pas de règles permettant d’exiger d’autres États membres qu’ils fournissent des renseignements sur les circonstances locales en matière de ressources et de dépenses ou sur d’autres facteurs importants pour apprécier une
demande d’effacement de créances. Par ailleurs, un tel tribunal ne serait pas en mesure de vérifier les informations communiquées par le débiteur lui-même.

62. En outre, la juridiction de renvoi indique que, en l’absence de règles harmonisées, il n’existerait pas de moyen moins restrictif d’atteindre ce résultat que celui consistant à restreindre l’accès à la procédure d’effacement de créances aux débiteurs habitant au Danemark. En revanche, selon le gouvernement danois, l’interprétation de l’article 45 TFUE selon laquelle cette disposition fait obstacle à une règle de compétence, telle que la règle danoise, entrave la mise en œuvre effective du
règlement 2015/848.

63. À l’instar de A et de la Commission, je considère que l’application de la condition de résidence à l’égard des travailleurs présente, à tout le moins à deux égards, un défaut de logique et un manque de cohérence. Les arguments du gouvernement danois et de la juridiction de renvoi relatifs, respectivement, à l’existence de dispositions harmonisées et à leur absence, ne sauraient remédier à ces problèmes.

64. Le premier problème concerne le fait que la condition de résidence semble s’appliquer uniquement à l’égard des travailleurs exerçant leur activité professionnelle au Danemark et non aux personnes exerçant une activité économique indépendante au Danemark. Or, dans le cas de ces dernières, le fait de ne pas résider sur le territoire danois ne constitue pas un obstacle à l’introduction d’une demande d’effacement de créances devant des tribunaux de cet État membre.

65. Le second problème concerne le fait que, ainsi qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle et des observations écrites de la partie requérante, selon la réglementation danoise, l’existence de la condition de résidence ne serait appréciée qu’au moment de l’introduction de la demande d’effacement de créances.

1) La cohérence de l’application de la condition de résidence et ses implications sur la réponse à la question préjudicielle

66. La condition de résidence repose sur l’idée que, grâce à la proximité géographique entre le lieu de résidence d’un débiteur et celui du siège du tribunal saisi, ce dernier peut statuer sur une demande d’effacement de créances sur la base des informations relatives à la situation sociale et économique de ce débiteur. Lors de l’appréciation de sa situation socio-économique par le tribunal liquidateur, la même importance devrait, en principe, être accordée à cette condition, qu’il s’agisse d’un
travailleur indépendant ou d’un travailleur salarié. Dans ces deux cas, les mesures permettant d’obtenir des informations provenant d’un autre État membre, ainsi que celles permettant de vérifier les renseignements provenant du débiteur sont quasiment identiques.

67. Or, il me semble que, selon la réglementation danoise, la condition de résidence n’est pas appliquée de manière cohérente. En effet, tandis qu’une personne exerçant une activité économique indépendante sur le territoire danois peut introduire une demande d’effacement de créances devant le tribunal danois du lieu d’exercice de cette activité, bien qu’elle ne réside pas au Danemark, un travailleur salarié n’ayant pas sa résidence sur le territoire danois ne peut introduire une telle demande devant
les tribunaux de cet État membre.

68. En ce qui concerne la présente affaire, il est constant que le demandeur dans l’affaire au principal travaille au Danemark, où il est assujetti à l’impôt de manière illimitée. Dès lors, comme l’admet le gouvernement danois, la situation sociale et économique de ce demandeur pourrait être déterminée, à tout le moins partiellement, sans devoir tenir compte d’informations provenant d’un autre État membre ( 34 ).

69. Toutefois, conformément à la réglementation danoise, le demandeur n’a aucune possibilité d’invoquer les circonstances mentionnées au point précédent afin de saisir un tribunal danois, même si celles-ci mettent en évidence l’existence d’un lien avec le Danemark. Or, si un tel lien est suffisant pour permettre aux tribunaux danois de statuer sur une demande d’effacement de créances introduite par une personne exerçant une activité économique indépendante sur le territoire de cet État membre, ce
lien devrait être également suffisant pour permettre de statuer sur celle introduite par un travailleur salarié.

70. Cela est d’autant plus vrai que, ainsi que l’illustrent les exemples présentés par A dans ses observations écrites ( 35 ), la réglementation danoise n’empêche pas les tribunaux nationaux de statuer sur des demandes d’effacement de créances même s’ils sont tenus de tenir compte d’informations provenant d’un autre État membre.

71. En conséquence, cette application incohérente de la condition de résidence en vertu de la réglementation danoise met en évidence qu’il n’est pas nécessaire de résider sur le territoire danois pour que les tribunaux de cet État membre puissent statuer sur des demandes d’effacement de créances. Il s’agit là d’un indice quant au fait qu’une condition de résidence, telle que celle prévue par la réglementation danoise, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif susmentionné au
point 59 des présentes conclusions.

2) Les implications du principe de la perpetuatio fori sur la justification de la condition de résidence

72. Dans ses observations écrites, A indique que, selon la doctrine et la jurisprudence danoise, une demande donnant lieu à la procédure d’effacement de créances doit être introduite devant le tribunal compétent ratione locis au titre du domicile à la date de cette demande. En revanche, les appréciations effectuées dans le cadre de la procédure d’effacement de créances concernent la situation du demandeur au moment de la prise de décision sur cette demande.

73. Il me semble que la juridiction de renvoi retient, à cet égard, la même interprétation des dispositions danoises. En effet, elle indique dans la décision de renvoi qu’un tribunal danois apprécie l’existence de sa propre compétence au stade de l’introduction d’une demande d’effacement de créances.

74. En fait, selon la règle dite du « principe de la perpetuatio fori », dès lors qu’une juridiction compétente est saisie, elle reste en principe compétente quand bien même le facteur de rattachement en vertu duquel sa compétence a été établie change au cours de la procédure judiciaire ( 36 ).

75. Ainsi, la connaissance des informations relatives à la situation d’un débiteur et des conditions de vie dans le lieu de sa résidence ne saurait être garantie par la condition de résidence dans la mesure où, selon le principe de la perpetuatio fori, une modification du facteur de rattachement postérieure à l’introduction de la demande d’effacement de créances, à savoir le transfert de sa résidence vers un État membre, ne s’oppose pas à ce qu’un tribunal danois statue sur cette demande.

76. En conséquence, étant donné que le rattachement au territoire danois n’est apprécié qu’au moment de l’introduction d’une demande d’effacement de créances, tandis qu’un tribunal liquidateur doit tenir compte, dans l’examen de cette demande, des circonstances antérieures et postérieures à ce moment, la condition de résidence, telle que prévue par la réglementation danoise, va au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer l’objectif de cette condition. Ce raisonnement est celui qu’a suivi la Cour
dans l’arrêt Radziejewski ( 37 ) selon lequel la fixation d’une condition de résidence qui se rapporte exclusivement à la date de l’introduction de la demande va au-delà de ce qui est nécessaire aux fins du contrôle de la situation du demandeur et de la connaissance de la situation dans le lieu où il réside.

77. Cette considération ne saurait être remise en cause ni par les arguments du gouvernement danois relatifs à l’existence de règles de compétence harmonisées ni par ceux de la juridiction de renvoi relatifs à leur absence.

3) L’harmonisation des règles de compétence relatives à des procédures d’effacement de créances

78. Selon la juridiction de renvoi, du fait de l’absence d’harmonisation des règles en matière d’effacement de créances, il n’existerait pas de moyens moins restrictifs d’atteindre ce résultat que celui qui consiste à restreindre l’accès à la procédure d’effacement de créances aux débiteurs habitant au Danemark.

79. En revanche, le gouvernement danois souligne qu’il existe des règles harmonisées concernant la compétence internationale dans les affaires d’ajustement de dettes. Selon ce gouvernement, l’interprétation de l’article 45 TFUE selon laquelle cette disposition fait obstacle à une règle de compétence telle que la règle danoise entraverait la mise en œuvre effective du règlement 2015/848. Conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement 2015/848, dans les circonstances de l’espèce, les
juridictions suédoises seraient compétentes pour connaître de la situation d’un débiteur qui réside et vit en Suède. En effet, la règle de compétence danoise ne serait pas matériellement différente de la règle de compétence internationale de ce règlement.

80. Ces arguments ne sauraient prospérer.

81. Ainsi que je l’ai indiqué au point 25 des présentes conclusions, le règlement 2015/848 n’a pas vocation à s’appliquer ratione temporis au litige au principal. Néanmoins, il convient de tenir compte du fait que les règles danoises prévoyant la condition de résidence continuent d’être appliquées dans cet État membre, tandis que d’autres États membres appliquent les règles du règlement 2015/848 depuis le 26 juin 2017.

82. Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement 2015/848, le centre des intérêts principaux d’une personne physique, autre que celle exerçant une profession libérale ou toute autre activité d’indépendant, est présumé, jusqu’à preuve du contraire, être la résidence habituelle de cette personne. Or, indépendamment du fait que la notion de « résidence habituelle » au sens de l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement 2015/848 ne doit pas nécessairement
correspondre à la notion de « résidence » au sens de la réglementation danoise, cette disposition du règlement 2015/848 ne renvoie pas, de manière automatique, le débiteur devant les juridictions du lieu de sa résidence. En effet, il ne s’agit que d’une présomption, qui est susceptible d’être renversée.

83. Ainsi, d’une part, la solution prévue par le règlement 2015/848 constitue, en reprenant les termes utilisés par la juridiction de renvoi, une illustration d’« un moyen moins restrictif » permettant d’atteindre l’objectif de la condition de résidence, tel que défini par cette juridiction et le gouvernement danois.

84. D’autre part, une réglementation prévoyant la condition de résidence, telle que la réglementation danoise en cause, pourrait affecter le fonctionnement du règlement 2015/848 dans les États membres liés par celui-ci s’il s’avérait que, le cas échéant, la présomption prévue à l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, de ce règlement devait être renversée, par exemple, au profit du lieu d’exécution de la prestation de travail. En pareil cas, la réglementation danoise ignorerait la réfutation de
ladite présomption ( 38 ).

85. Pour résumer cette partie de mon analyse relative à l’harmonisation des règles de compétence, en premier lieu, je ne partage pas le point de vue de la juridiction de renvoi selon lequel il n’existe pas de moyens moins restrictifs pour atteindre l’objectif fixé pour la condition de résidence. En second lieu, contrairement à ce que soutient le gouvernement danois, l’existence des règles de compétence prévues par le règlement 2015/848 ne permet pas de plaider en faveur de la conformité de la
réglementation danoise avec le droit de l’Union.

4) Conclusions finales

86. Pour récapituler les raisonnements que j’ai exposés jusqu’à présent, j’observe que la condition de résidence prévue par la réglementation danoise semble ne pas être appliquée de manière cohérente, ce qui peut constituer un indice quant au fait que cette condition va au-delà de ce qui est nécessaire aux fins du contrôle de la situation du demandeur et de la connaissance de la situation dans le lieu où il réside. Cette considération est confirmée par le fait que la condition de résidence se
rapporte exclusivement à la date de l’introduction de la demande. Enfin, ces considérations ne sont pas remises en cause par les arguments relatifs au règlement 2015/848.

87. À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la première question préjudicielle que l’article 45 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle un travailleur salarié n’ayant pas sa résidence sur le territoire d’un État membre ne peut pas introduire une demande d’effacement de créances devant des tribunaux de cet État membre, même s’il a un lien
suffisant avec ledit État membre, comparable à celui qui découle du fait de résider sur ce territoire.

D. Sur la seconde question préjudicielle

88. Par sa seconde question préjudicielle qui se poserait dans l’hypothèse où la réponse à la première question serait affirmative, la juridiction de renvoi cherche à savoir si un travailleur salarié qui ne remplit pas la condition de résidence devrait néanmoins pouvoir obtenir un ajustement de dettes dans le cas où les autres conditions matérielles seraient remplies, ce qui obligerait les créanciers privés à s’opposer à la réduction ou à l’annulation de la dette qu’un débiteur ayant déménagé à
l’étranger aurait envers eux.

89. Force est d’admettre que la lecture de la seconde question préjudicielle laisse planer une certaine incertitude quant au véritable objet de la question de la juridiction de renvoi. Il ressort de la formulation de cette question que la juridiction de renvoi nourrit des doutes sur l’effet utile de l’article 45 TFUE dans les circonstances telles que celles de l’espèce.

90. À cet égard, la Commission soutient que le litige au principal ne concerne pas directement les rapports entre les particuliers et que, dès lors, la question de savoir si l’article 45 TFUE a un effet direct sur lesdits rapports est sans pertinence. Le gouvernement danois considère que, dans les circonstances de l’espèce, l’application de l’article 45 TFUE donnerait lieu à une situation d’effet horizontal incident.

91. J’observe que, dans le cas de l’espèce, ce sont les dispositions nationales qui font l’objet d’une appréciation à la lumière de l’article 45 TFUE et non pas les comportements de particuliers par lesquels ceux-ci imposent des obligations aux autres particuliers ( 39 ). Par ailleurs, il est évident que des dispositions nationales telles que celles en cause dans la présente affaire entrent dans le champ d’application de l’article 45 TFUE. Lorsque de telles dispositions nationales ne sont pas
conformes au traité, leur application devrait être écartée, peu importe qu’il s’agisse d’un litige entre des particuliers ou entre un particulier et une émanation de l’État.

92. À titre subsidiaire, même si on considère que la seconde question devait être analysée sous l’angle des obligations imposées à des créanciers d’un débiteur bénéficiant d’une procédure d’effacement de créances, il faudrait tenir compte du fait que la condition de résidence, telle que celle en cause au principal, constitue un critère de rattachement prévu par une règle de compétence. Ainsi qu’il ressort de mes considérations précédentes, les règles de compétence n’octroient pas, à tout le moins
directement, de droits matériels ni n’imposent d’obligations matérielles à des particuliers. En l’espèce, la règle de compétence nationale permet uniquement de demander l’ouverture d’une procédure d’effacement de créances auprès d’un tribunal danois. En effet, c’est la décision de ce tribunal qui octroie des droits ou impose des obligations à des particuliers.

93. Enfin, je ne peux pas exclure que par sa seconde question préjudicielle la juridiction de renvoi cherche en substance à savoir quelles conséquences elle devrait tirer de l’arrêt à venir de la Cour dans la présente affaire dans l’hypothèse où la réponse à la première question serait affirmative.

94. Il est vrai que, dans le cadre de la procédure préjudicielle, il n’appartient à la Cour ni d’interpréter le droit interne d’un État membre, ni de déterminer comment cet État membre devrait se conformer à son interprétation du droit de l’Union. Cependant, afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, je présenterai quelques remarques sur ce point.

95. À cet égard, j’observe que la non-conformité d’une condition de résidence avec l’article 45 TFUE n’entraîne pas la nullité absolue de cette condition. Cette non-conformité n’est que la conséquence du fait qu’en vertu d’une réglementation nationale, dans le cas particulier, un débiteur ne peut pas obtenir la décision d’effacement de ses créances, même s’il a un lien suffisant avec le territoire de cet État membre.

96. Dans ce cas et dans d’autres cas similaires, une juridiction nationale n’est pas tenue d’écarter purement et simplement la condition de résidence et de procéder à l’application de la disposition nationale en cause sans aucune exigence relative à l’existence d’un lien entre le débiteur et le territoire danois.

97. En revanche, elle pourrait envisager une solution plus nuancée, consistant en ce que, le cas échéant, la condition de résidence soit assouplie, de sorte que des tribunaux danois pourraient statuer sur des demandes d’effacement de créances lorsqu’il existe un lien suffisant entre le débiteur et le territoire danois. En fait, ainsi que je l’ai indiqué au point 37 des présentes conclusions, notamment dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, la grande majorité des règles de
compétence repose sur l’idée selon laquelle un lien doit exister entre le for compétent et la situation en cause. Ainsi, il faudrait tout simplement affaiblir la rigidité de la condition de résidence prévue par la réglementation danoise pour laisser davantage de place au principe de proximité ainsi défini.

98. À la lumière de cette argumentation, je propose à la Cour de répondre à la seconde question préjudicielle que l’article 45 TFUE doit être interprété en ce sens que, dans les circonstances telles que celles au principal, il exclut l’application de la réglementation nationale en cause, indépendamment du point de savoir si la procédure d’effacement de créances conduit éventuellement à imposer des obligations à des particuliers.

99. J’observe à cet égard que le fait que ces particuliers doivent supporter la réduction ou l’extinction des créances qu’ils détiennent sur un débiteur qui s’est établi à l’étranger découle d’une décision du tribunal danois statuant sur la demande d’effacement de créances.

VI. Conclusion

100. À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour d’apporter la réponse suivante aux questions préjudicielles posées par l’Østre Landsret (cour d’appel de la région Est, Danemark) :

1) L’article 45 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle, un travailleur salarié n’ayant pas sa résidence sur le territoire d’un État membre ne peut pas introduire une demande d’effacement de créances devant les tribunaux de cet État membre, même s’il a un lien suffisant avec ledit État membre, comparable à celui qui découle du fait de résider sur ce territoire.

2) L’article 45 TFUE doit être interprété en ce sens que, dans les circonstances telles que celles au principal, il exclut l’application de la réglementation nationale en cause, indépendamment du point de savoir si la procédure d’effacement de créances conduit éventuellement à imposer des obligations à des particuliers.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, point 32.

( 3 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 4 ) Règlement du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1).

( 5 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1).

( 6 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2015, L 141, p. 19).

( 7 ) Règlement du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2000, L 160, p. 1). Voir considérant 33 de ce règlement.

( 8 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, point 32.

( 9 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, point 23.

( 10 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 11 ) Arrêt du 8 novembre 2012, Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:704, point 24).

( 12 ) Arrêt du 22 novembre 2012, C‑116/11, EU:C:2012:739.

( 13 ) Voir, notamment, Robine, D., Jault-Seseke, F., « Le règlement 2015/848 : vin nouveau et vieilles outres », Revue critique de droit international privé, 2016, p. 21, point 18 ; Hess, B., Oberhammer, P., Bariatti, S., Koller, C., Laukemann, B., Requejo Isidro, M., Villata, F.C. (dirs.), The Implementation of the New Insolvency Regulation: Improving Cooperation and Mutual Trust, Nomos, 2018, p. 65.

( 14 ) Voir doctrine citée à la note en bas de page 13. Voir également Van Calster, G., « COMIng, and Here to Stay: The Review of The European Insolvency Regulation », European business law review, 2016, p. 739.

( 15 ) Voir également considérant 10 du règlement 2015/848, selon lequel « [l]e champ d’application devrait également être étendu aux procédures prévoyant la décharge ou l’ajustement de dettes en ce qui concerne des consommateurs et des indépendants, par exemple en réduisant le montant à payer par le débiteur ou en allongeant le délai de paiement qui lui est accordé. Étant donné que de telles procédures n’entraînent pas nécessairement la désignation d’un praticien de l’insolvabilité, elles devraient
relever du présent règlement si elles sont menées sous le contrôle ou la surveillance d’une juridiction. Dans ce contexte, le terme “contrôle” devrait couvrir les situations dans lesquelles la juridiction n’intervient que sur recours d’un créancier ou d’autres parties intéressées ».

( 16 ) Voir article 84 du règlement 2015/848.

( 17 ) Décision 2005/790/CE du Conseil, du 20 septembre 2005, relative à la signature de l’accord, au nom de la Communauté, entre la Communauté européenne et le Royaume de Danemark sur la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2005, L 299, p. 61).

( 18 ) Ainsi qu’il ressort du considérant 7 du règlement 2015/848, les procédures exclues du champ d’application du règlement no 1215/2012 en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), de celui-ci devraient être couvertes par le règlement 2015/848. Dans cette veine, en ce qui concerne l’articulation entre le prédécesseur du règlement 2015/848 (le règlement no 1346/2000) et le règlement no 44/2001, voir arrêt du 4 septembre 2014, Nickel & Goeldner Spedition (C‑157/13, EU:C:2014:2145, point 21).
La Cour a suivi le même raisonnement dans d’autres contextes. Voir, par analogie, arrêts du 6 octobre 2015, Matoušková (C‑404/14, EU:C:2015:653, point 34), et du 1er mars 2018, Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2018:138, point 41).

( 19 ) Voir, par analogie, mes conclusions dans l’affaire Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2017:965, point 73).

( 20 ) Voir article 1er, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement 2015/848. Voir également son considérant 9.

( 21 ) Voir considérant 7, dernière phrase, du règlement 2015/848, selon lequel le simple fait qu’une procédure nationale ne figure pas à l’annexe A de ce règlement ne saurait impliquer que cette procédure relève du règlement no 1215/2012.

( 22 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, points 52 et 53.

( 23 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 24 ) Voir, notamment, arrêt du 7 mai 1998, Clean Car Autoservice (C‑350/96, EU:C:1998:205, points 29 et 30).

( 25 ) À titre d’illustration, voir mes conclusions dans l’affaire KP (C‑83/17, EU:C:2018:46, point 56).

( 26 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, points 30 et 31.

( 27 ) Arrêt du 8 novembre 2012, Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:704, point 33). Voir également arrêts du 16 mars 2010, Olympique Lyonnais (C‑325/08, EU:C:2010:143, point 38), et du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken (C‑514/12, EU:C:2013:799, point 36).

( 28 ) Arrêt du 8 novembre 2012, Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:704, point 44). Dans ses conclusions présentées dans cette affaire, l’avocate générale Sharpston, après avoir explicité la position du gouvernement suédois, a indiqué qu’« [u]ne décision d’effacement de créances doit, selon toute évidence, se fonder sur une analyse appropriée et détaillée de l’état réel de la situation personnelle et financière du débiteur ». L’avocate générale Sharpston a également indiqué admettre que « l’autorité
compétente d’un État membre doi[t] être en mesure de collecter, d’analyser et de vérifier les informations nécessaires afin de décider en pleine connaissance de cause si le débiteur est éligible au titre de l’effacement de créances. Cette approche est pleinement conforme au principe de bonne administration. Les mesures adoptées à cette fin ont donc un objectif légitime ». Voir ses conclusions dans l’affaire Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:570, point 59).

( 29 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 30 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 31 ) Arrêt du 8 novembre 2012, Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:704).

( 32 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 33 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704.

( 34 ) À cet égard, ces circonstances reflètent partiellement celles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Radziejewski. Dans cette affaire, l’employeur du demandeur était suédois et le demandeur était un « assujetti illimité » à l’impôt en Suède, ce qui a été souligné par la Cour lorsqu’elle a considéré que la condition de résidence allait au-delà de ce qui était nécessaire pour établir, de façon satisfaisante, la situation financière et personnelle du débiteur. Voir arrêt du 8 novembre 2012,
Radziejewski (C‑461/11, EU:C:2012:704, point 48).

( 35 ) A donne l’exemple d’un demandeur qui réside au Danemark, mais travaille dans un autre État membre, cas dans lequel un tribunal danois est tenu de traiter la demande d’effacement de créances sur le fondement d’informations provenant de cet autre État membre, et relatives, notamment, à l’état des dépenses et à la situation fiscale du demandeur. Dans le même ordre d’idées, A se réfère à la situation d’un demandeur ayant travaillé à l’étranger.

( 36 ) Voir ma prise de position dans l’affaire C (C‑376/14 PPU, EU:C:2014:2275, note en bas de page 37).

( 37 ) Arrêt du 8 novembre 2012, C‑461/11, EU:C:2012:704, point 47.

( 38 ) En effet, une telle situation pourrait conduire à une impasse, à condition que la notion d’« État membre » au sens de l’article 3, paragraphe 1, du règlement 2015/848 ne soit pas entendue comme visant tous les États membres auxquels ce règlement s’applique. En ce cas, le salarié ne serait pas en mesure d’introduire une demande relative à l’ouverture d’une procédure d’effacement de créances ni devant des tribunaux danois, ni devant ceux d’un autre État membre. À cet égard, j’observe qu’à la
différence notamment du règlement (CE) no 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) (JO 2008, L 177, p. 6), le règlement 2015/848 ne prévoit pas de disposition selon laquelle on entend par « État membre » tous les États membres auxquels le présent dispositif s’applique. Toutefois, il me semble qu’une telle interprétation de la notion d’« États membres » était suggérée par certains auteurs quand l’interprétation de
l’article 39 du règlement no 1346/2000 qui prévoyait que tout créancier qui a sa résidence habituelle, son domicile ou son siège dans un État membre autre que l’État d’ouverture a le droit de produire ses créances par écrit dans la procédure d’insolvabilité. Voir Herchen, A., dans: Pannen, K. (éd.), European Insolvency Regulation, De Gruyter, Berlin, 2007, p. 465.

( 39 ) Voir, a contrario, arrêt du 6 juin 2000, Angonese (C‑281/98, EU:C:2000:296).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-716/17
Date de la décision : 27/03/2019
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Østre Landsret.

Renvoi préjudiciel – Libre circulation des travailleurs – Restrictions – Ouverture d’une procédure d’effacement de créances – Condition de résidence – Admissibilité – Article 45 TFUE – Effet direct.

Libre circulation des travailleurs


Parties
Demandeurs : Procédure engagée par A.

Composition du Tribunal
Avocat général : Szpunar

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2019:262

Source

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