ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)
4 mars 2020 ( *1 )
« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Règlement (CE) no 207/2009 – Marques verbales et figuratives “BURLINGTON” – Opposition du titulaire de marques verbales et figuratives antérieures “BURLINGTON” et “BURLINGTON ARCADE” – Article 8, paragraphe 1, sous b) – Risque de confusion – Arrangement de Nice – Classe 35 – Notion de “services de vente au détail” – Article 8, paragraphe 4 – Usurpation – Article 8, paragraphe 5 – Renommée – Critères d’appréciation – Similitude entre les produits et les
services – Rejet de l’opposition »
Dans les affaires jointes C‑155/18 P à C‑158/18 P,
ayant pour objet quatre pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits le 22 février 2018,
Tulliallan Burlington Ltd, établie à Saint-Hélier (Jersey), représentée par M. A. Norris, barrister,
partie requérante dans les affaires C‑155/18 P à C-158/18 P,
les autres parties à la procédure étant :
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. M. Fischer et D. Botis, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
Burlington Fashion GmbH, établie à Schmallenberg (Allemagne), représentée par Me A. Parr, Rechtsanwältin,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (quatrième chambre),
composée de M. M. Vilaras, président de chambre, MM. S. Rodin, D. Šváby, Mme K. Jürimäe (rapporteure) et M. N. Piçarra, juges,
avocat général : M. G. Hogan,
greffier : M. M. Longar, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 avril 2019,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 juin 2019,
rend le présent
Arrêt
1 Par ses pourvois, Tulliallan Burlington Ltd demande l’annulation des arrêts du Tribunal de l’Union européenne du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑120/16, EU:T:2017:873), du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (BURLINGTON THE ORIGINAL) (T‑121/16, non publié, EU:T:2017:872), du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑122/16, non publié, EU:T:2017:871), et du 6 décembre 2017,
Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (BURLINGTON) (T‑123/16, non publié, EU:T:2017:870) (ci-après, ensemble, les « arrêts attaqués »), par lesquels celui-ci a rejeté ses recours tendant à l’annulation de quatre décisions de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 11 janvier 2016 (affaires R 94/2014-4, R 2501/2013-4, R 2409/2013‑4 et R 1635/2013-4, ci-après, ensemble, les « décisions litigieuses »), relatives à
quatre procédures d’opposition entre Tulliallan Burlington et Burlington Fashion GmbH.
Le cadre juridique
2 Le règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), a été modifié par le règlement (CE) no 1891/2006 du Conseil, du 18 décembre 2006 (JO 2006, L 386, p. 14) (ci-après le « règlement no 40/94 »).
3 Le règlement no 40/94 a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la [marque de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1), entré en vigueur le 13 avril 2009. Le règlement no 207/2009 a été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), lequel est entré en vigueur le 23 mars 2016. Le règlement no 207/2009, tel que modifié, a été abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre
2017, par le règlement (UE) 2017/1001 de Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).
4 Compte tenu des dates d’introduction des demandes d’enregistrement des marques demandées, en l’occurrence le 19 août 2008 pour les enregistrements nos 982020 et 982021, le 2 avril 2009 pour l’enregistrement no 1007952 ainsi que le 8 septembre 2009 pour l’enregistrement no 1017273, lesquelles sont déterminantes aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi, d’une part, par les dispositions procédurales du règlement no 207/2009 et, d’autre part, par les
dispositions matérielles du règlement no 40/94 pour les enregistrements nos 982020, 982021 et 1007952 ainsi que par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 pour l’enregistrement no 1017273. Les dispositions matérielles de ces deux règlements pertinentes pour les besoins du présent litige sont, en substance, identiques.
5 L’article 8 du règlement no 40/94, intitulé « Motifs relatifs de refus », dont les dispositions ont été reprises à l’article 8 du règlement no 207/2009, disposait :
« 1. Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement :
[...]
b) lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.
[...]
4. Sur opposition du titulaire d’une marque non enregistrée ou d’un autre signe utilisé dans la vie des affaires dont la portée n’est pas seulement locale, la marque demandée est refusée à l’enregistrement, lorsque et dans la mesure où, selon la législation communautaire ou le droit de l’État membre qui est applicable à ce signe :
a) des droits à ce signe ont été acquis avant la date de dépôt de la demande de marque communautaire ou, le cas échéant, avant la date de la priorité invoquée à l’appui de la demande de marque communautaire ;
b) ce signe donne à son titulaire le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente.
5. Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté et, dans le cas d’une marque
nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice. »
6 Aux termes de l’article 43, paragraphes 1 à 3, du règlement no 40/94, intitulé « Examen de l’opposition », dont les dispositions ont été reprises à l’article 42 du règlement no 207/2009 :
« 1. Au cours de l’examen de l’opposition, l’Office invite les parties, aussi souvent que cela est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’il leur impartit, des observations sur les communications émanant des autres parties ou de lui-même.
2. Sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la
marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque communautaire antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.
3. Le paragraphe 2 s’applique aux marques nationales antérieures visées à l’article 8, paragraphe 2, point a), étant entendu que l’usage dans la Communauté est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée. »
7 L’article 44 du règlement no 40/94, intitulé « Retrait, limitation et modification de la demande », dont les dispositions ont été reprises à l’article 43 du règlement no 207/2009, prévoyait :
« 1. Le demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque communautaire ou limiter la liste des produits ou services qu’elle contient. Lorsque la demande a déjà été publiée, le retrait ou la limitation sont également publiés.
2. Par ailleurs, la demande de marque communautaire ne peut être modifiée, à la requête du demandeur, que pour rectifier le nom et l’adresse du demandeur, des fautes d’expression ou de transcription ou des erreurs manifestes pour autant qu’une telle rectification n’affecte pas substantiellement la marque ou n’étende pas la liste des produits ou services. Si les modifications portent sur la représentation de la marque ou la liste des produits ou services, et lorsque ces modifications sont
apportées après la publication de la demande, celle-ci est publiée telle que modifiée. »
8 L’article 63 du règlement no 207/2009, qui figure au titre VII de celui-ci, ce titre étant intitulé « Procédure de recours », prévoit, à son paragraphe 2 :
« Au cours de l’examen du recours, la chambre de recours invite les parties, aussi souvent qu’il est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’elle leur impartit, leurs observations sur les notifications qu’elle leur a adressées ou sur les communications qui émanent des autres parties. »
9 L’article 75 du règlement no 207/2009 énonce :
« Les décisions de l’[EUIPO] sont motivées. Elles ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. »
10 Aux termes de l’article 76 de ce règlement :
« 1. Au cours de la procédure, l’[EUIPO] procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.
2. L’[EUIPO] peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile. »
11 Les paragraphes 1 et 2 de l’article 151 dudit règlement disposent :
« 1. Tout enregistrement international désignant [l’Union européenne] produit, à compter de la date d’enregistrement visée à l’article 3, paragraphe 4, du protocole de Madrid ou de la date d’extension postérieure à [l’Union] prévue à l’article 3 ter, paragraphe 2, du protocole de Madrid, les mêmes effets qu’une demande de [marque de l’Union européenne].
2. Si aucun refus n’est notifié en vertu de l’article 5, paragraphes 1 et 2, du protocole de Madrid ou si, en cas de refus, celui-ci est levé, l’enregistrement international d’une marque désignant [l’Union] produit, à compter de la date visée au paragraphe 1, les mêmes effets que l’enregistrement d’une marque en tant que [marque de l’Union européenne]. »
12 Les paragraphes 1 à 3 de l’article 156 du même règlement prévoient :
« 1. Tout enregistrement international désignant [l’Union] est soumis à la même procédure d’opposition que les demandes de [marque de l’Union européenne] publiées.
2. L’opposition est formée dans un délai de trois mois qui commence à courir six mois après la date de la publication prévue à l’article 152, paragraphe 1. L’opposition n’est réputée formée qu’après paiement de la taxe d’opposition.
3. Le refus de la protection vaut rejet d’une demande de [marque de l’Union européenne]. »
13 La règle 19 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement no 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO 2005, L 172, p. 4), intitulée « Faits, preuves et observations présentés à l’appui de l’opposition », prévoit, à son paragraphe 1 :
« L’[EUIPO] donne à l’opposant l’opportunité de présenter les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition ou de compléter les faits, preuves et observations d’ores et déjà présentés conformément à la règle 15, paragraphe 3, dans un délai fixé par lui [...] »
14 Aux termes de la règle 50, paragraphe 1, de ce règlement :
« Sauf disposition contraire, les dispositions relatives aux procédures devant l’instance qui a rendu la décision attaquée sont applicables mutatis mutandis à la procédure de recours.
[...]
Lorsque le recours est dirigé contre une décision d’une division d’opposition, la chambre de recours limite l’examen du recours aux faits et preuves présentés dans les délais fixés ou précisés par la division d’opposition conformément au règlement et aux présentes règles, à moins que la chambre ne considère que des faits et preuves nouveaux ou supplémentaires doivent être pris en compte conformément à l’article [76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009]. »
15 L’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice »), a été conclu sur le fondement de l’article 19 de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris le 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies,
vol. 828, no 11851, p. 305), qui réserve aux pays de l’Union le droit de prendre séparément, entre eux, des arrangements particuliers pour la protection de la propriété intellectuelle.
16 La classification qu’il établit intitule comme suit la classe 35, afférente à des services :
« Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau. »
17 La note explicative relative à cette classe précise :
« La classe 35 comprend essentiellement les services rendus par des personnes ou par des organisations dont le but principal est :
1. l’aide dans l’exploitation ou la direction d’une entreprise commerciale ou
2. l’aide à la direction des affaires ou des fonctions commerciales d’une entreprise industrielle ou commerciale
ainsi que les services des établissements de publicité se chargeant essentiellement de communications au public, de déclarations ou d’annonces par tous les moyens de diffusion et concernant toutes sortes de marchandises ou de services.
Cette classe comprend notamment :
– le regroupement pour le compte de tiers de produits divers (à l’exception de leur transport) permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément ; ces services peuvent être assurés par des magasins de détail, par des magasins en gros, par l’intermédiaire de distributeurs automatiques, de catalogues de vente par correspondance ou par des moyens électroniques, par exemple : par l’intermédiaire de sites web ou d’émissions de télé-achat ;
– les services comportant l’enregistrement, la transcription, la composition, la compilation ou la systématisation de communications écrites et d’enregistrements, de même que la compilation de données mathématiques ou statistiques ;
– les services des agences de publicité ainsi que des services tels que la distribution de prospectus, directement ou par la poste, ou la distribution d’échantillons. Cette classe peut se référer à la publicité concernant d’autres services, tels que ceux concernant des emprunts bancaires ou la publicité par radio.
[...] »
Les antécédents des litiges et les décisions litigieuses
18 Les antécédents du litige, tels qu’ils ressortent des arrêts attaqués, peuvent être résumés comme suit.
19 Les 20 novembre 2008, 13 août 2009 et 12 novembre 2009, l’intervenante devant le Tribunal, Burlington Fashion, a déposé les demandes de protection dans l’Union pour les enregistrements internationaux suivants :
– l’enregistrement international no 1017273 désignant l’Union et conférant protection de la marque figurative représentée ci-après :
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– l’enregistrement international no 1007952 désignant l’Union et conférant protection pour la marque figurative représentée ci-après :
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– l’enregistrement international no 982021 désignant l’Union et conférant protection pour la marque figurative représentée ci-après :
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– l’enregistrement international no W982020 désignant l’Union et conférant protection pour la marque verbale BURLINGTON.
20 Les produits pour lesquels la protection a été demandée relèvent des classes 3, 14, 18 et 25, au sens de l’arrangement de Nice, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 3 : « Savons à usage cosmétique, savons pour textiles, produits de parfumerie, huiles éthérées, produits pour nettoyer, soigner et embellir la peau, le cuir chevelu et les cheveux ; produits de toilette, compris dans cette classe, déodorants à usage personnel, produits avant-rasage et produits après-rasage » ;
– classe 14 : « Articles de bijouterie, montres » ;
– classe 18 : « Cuir et imitations de cuir, à savoir valises, sacs (compris dans cette classe) ; petits articles en cuir (compris dans cette classe), notamment porte-monnaie, portefeuilles, étuis pour clés ; parapluies et pare-soleil sous forme de parasols », et
– classe 25 : « Articles chaussants, vêtements, articles de chapellerie, ceintures ».
21 Le 12 août 2009, le 17 mai 2010 et le 16 août 2010, Tulliallan Burlington a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009, à l’enregistrement des marques demandées pour les produits compris dans les classes 3, 14 et 18. L’opposition était fondée, notamment, sur la nécessité de protéger les marques et les droits antérieurs reproduits ci-après, dont Tulliallan Burlington est titulaire :
– la marque verbale BURLINGTON, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2314342 le 5 décembre 2003 et dûment renouvelée le 29 octobre 2012, pour des services relevant des classes suivantes :
– classe 35 : « Location et crédit-bail d’espaces publicitaires ; organisation d’expositions à des fins commerciales ou publicitaires ; organisation de foires à des fins commerciales ; services de publicité et de promotion et services d’informations correspondants ; le regroupement, pour le compte des tiers, de produits divers, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé », et
– classe 36 : « Location de magasins et de bureaux ; crédit-bail ou gestion de biens immobiliers ; crédit-bail de bâtiments ou espaces dans des bâtiments ; gérance de biens immobiliers ; services d’informations concernant la location de magasins et de bureaux ; services de biens immobiliers ; placement de fonds, constitution de fonds » ;
– la marque verbale BURLINGTON ARCADE, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2314343 le 7 novembre 2003 et dûment renouvelée le 29 octobre 2012 pour les mêmes services relevant des classes 35 et 36, au sens de l’arrangement de Nice, ainsi que pour les services relevant de la classe 41 de celui-ci et correspondant à la description suivante : « Services de divertissement ; organisation de compétitions ; organisation d’expositions ; fourniture d’informations en matière de loisirs ;
représentation de spectacles ; mise à disposition d’installations sportives ; mise à disposition de musique en direct et de divertissement en direct ; mise à disposition d’équipements et d’installations pour représentations de groupes de musique en direct ; fourniture de divertissement en direct ; services de musique en direct ; services de représentations musicales en direct ; organisation de spectacles en direct » ;
– la marque figurative reproduite ci-après, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 2330341 le 7 novembre 2003 et dûment renouvelée le 25 avril 2013, pour les services susvisés compris dans les classes 35, 36 et 41, au sens de l’arrangement de Nice :
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– la marque figurative de l’Union européenne no 3618857, enregistrée le 16 octobre 2006, reproduite ci-après et limitée, à la suite de la procédure d’annulation no 8715 C, aux services relevant des classes 35, 36 et 41, au sens de l’arrangement de Nice :
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– classe 35 : « services de publicité et de promotion et services d’informations correspondants ; le regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé » ;
– classe 36 : « location de magasins ; crédit-bail ou gestion de biens immobiliers ; crédit-bail de bâtiments ou espaces dans des bâtiments ; services de gestion immobilière ; services d’informations concernant la location de magasins », et
– classe 41 : « services de divertissement ; fourniture de services de divertissement en direct ».
22 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient fondés sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), ainsi que sur l’article 8, paragraphes 4 et 5, du règlement no 207/2009.
23 Par décisions des 10 juillet, 8 octobre, 8 novembre et 22 novembre 2013, la division d’opposition a examiné les oppositions uniquement sur la base de la marque de l’Union européenne antérieure no 3618857, a accueilli les oppositions pour les produits contestés compris dans les classes 3, 14 et 18 et a condamné l’intervenante aux dépens.
24 Les 20 août, 3 et 11 décembre 2013 ainsi que le 2 janvier 2014, Burlington Fashion a formé quatre recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009, contre les décisions de la division d’opposition.
25 Par les décisions litigieuses, la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé les décisions de la division d’opposition et a rejeté lesdites oppositions.
26 Dans ses décisions litigieuses, la quatrième chambre de recours a, en premier lieu, considéré, en substance, s’agissant de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, que la renommée des marques figuratives antérieures était prouvée sur le territoire pertinent pour les services relevant des classes 35 et 36, au sens de l’arrangement de Nice, à l’exception du service « regroupement, pour le compte de tiers, de produits divers permettant aux clients [...] de les acheter commodément dans
une gamme de magasins de vente au détail de commerce non spécialisé ». En deuxième lieu, s’agissant du motif fondé sur l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement, la quatrième chambre de recours a considéré, en substance, que Tulliallan Burlington n’avait pas démontré que les conditions nécessaires pour établir la présentation trompeuse et le préjudice à l’égard du public cible avaient été remplies. En troisième lieu, s’agissant du motif fondé sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit
règlement, elle a considéré, en substance, que les produits et les services en cause étant différents, tout risque de confusion était exclu, indépendamment de la similitude des marques en conflit.
Les procédures devant le Tribunal et les arrêts attaqués
27 Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 23 mars 2016, Tulliallan Burlington a introduit quatre recours contre les décisions litigieuses.
28 À l’appui de chacun de ses recours, Tulliallan Burlington a soulevé trois moyens, tirés, en substance, le premier, d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, d’un vice de procédure et d’une violation des règles de procédure, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation, d’une violation du droit d’être entendu ainsi que d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement et, le troisième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b),
dudit règlement.
29 Par les arrêts attaqués dont les dispositifs et les motifs sont identiques, le Tribunal a écarté l’ensemble des moyens avancés par Tulliallan Burlington.
30 S’agissant du premier moyen, le Tribunal a relevé, au point 28 des arrêts attaqués, que la quatrième chambre de recours avait considéré que, en ce qui concerne les services de vente au détail relevant de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, la renommée des marques antérieures n’avait pas été prouvée.
31 Au point 33 des arrêts attaqués, le Tribunal a considéré que l’interprétation retenue par la Cour, au point 34 de l’arrêt du 7 juillet 2005, Praktiker Bau- und Heimwerkermärkte (C‑418/02, ci-après l’« arrêt Praktiker », EU:C:2005:425), s’oppose à la thèse soutenue par l’EUIPO selon laquelle les services d’une galerie commerciale seraient essentiellement limités à des services de location et de gestion immobilière et que, par conséquent, les clients auxquels ces services s’adressent seraient
principalement les personnes intéressées à prendre en location les magasins ou les bureaux se trouvant dans une galerie commerciale.
32 Le Tribunal en a déduit, au point 34 des arrêts attaqués, que, eu égard au libellé de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, la notion de « services de vente au détail », telle qu’interprétée par la Cour, au point 34 de l’arrêt Praktiker, comprend aussi les services de vente fournis par une galerie commerciale. Il a conclu, au point suivant des arrêts attaqués, que l’interprétation stricte de la notion de « services de vente au détail » retenue par la quatrième chambre de recours était
erronée et que Tulliallan Burlington pouvait se prévaloir de la protection de la renommée des marques antérieures pour l’ensemble des services visés par les marques antérieures relevant de cette classe 35.
33 Après avoir rappelé, aux points 37 à 42 des arrêts attaqués, la jurisprudence de la Cour relative à la protection des marques renommées prévue à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, le Tribunal a estimé, au point 43 des arrêts attaqués, que, en l’espèce, Tulliallan Burlington n’avait pas produit devant la quatrième chambre de recours ou devant le Tribunal des éléments cohérents permettant de conclure que l’usage des marques demandées tirerait indûment profit du caractère
distinctif ou de la renommée des marques antérieures. Aux points suivants des arrêts attaqués, le Tribunal relève que, même si Tulliallan Burlington souligne le caractère « presque unique » de ses marques antérieures, celle-ci n’a pas fourni d’éléments spécifiques susceptibles d’étayer le fait que l’usage des marques demandées diminuerait l’attrait des marques antérieures.
34 Concernant le prétendu vice de procédure dont seraient entachées les décisions litigieuses, le Tribunal a relevé, au point 46 des arrêts attaqués, que les observations de Tulliallan Burlington avaient dûment été prises en compte par les instances de l’EUIPO et, partant, a rejeté le grief comme étant non fondé.
35 S’agissant du deuxième moyen, le Tribunal a rejeté, dans un premier temps, l’argumentation de Tulliallan Burlington prise d’une violation de l’obligation de motivation et celle prise d’une violation du droit d’être entendu. En particulier, il a considéré, au point 53 des arrêts attaqués, que Tulliallan Burlington a bien été en mesure de présenter des observations sur les conditions fixées à l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.
36 À cet égard, le Tribunal a estimé, en substance, aux points 54 et 55 des arrêts attaqués, que, si, devant la quatrième chambre de recours, Tulliallan Burlington n’a pas développé le grief qu’elle avait elle-même invoqué lors de la procédure d’opposition, à savoir la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, il ne saurait être reproché à cette chambre de recours de ne pas avoir demandé aux parties des observations complémentaires à ce sujet.
37 Dans un second temps, le Tribunal, après avoir rappelé, aux points 56 à 58 des arrêts attaqués, la jurisprudence relative aux conditions fixées à l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 et celle relative à la charge de la preuve, a constaté que Tulliallan Burlington n’avait pas fourni les éléments de fait ou de droit nécessaires pour prouver que les conditions relatives à l’application de cette disposition étaient dûment remplies, Tulliallan Burlington s’étant contentée, devant la
quatrième chambre de recours, d’affirmer qu’elle maintenait les arguments présentés devant la division d’opposition.
38 Le Tribunal a donc rejeté le deuxième moyen en considérant que c’était à bon droit que la quatrième chambre de recours avait estimé que Tulliallan Burlington n’avait pas prouvé que les conditions pour fonder les actions en usurpation d’appellation étaient dûment remplies.
39 S’agissant du troisième moyen, le Tribunal a, après avoir rappelé la jurisprudence relative au risque de confusion, aux points 66 à 68 des arrêts attaqués, considéré que la quatrième chambre de recours avait, à bon droit, estimé que les produits visés par les marques demandées n’étaient pas similaires aux services visés par les marques antérieures et désignés par les classes 35 et 36, au sens de l’arrangement de Nice. S’agissant plus particulièrement de cette classe 35, le Tribunal a rappelé, au
point 70 des arrêts attaqués, que le juge de l’Union a établi que, pour les services de vente au détail, il était nécessaire que les produits offerts à la vente soient ponctuellement précisés. Le Tribunal a fait référence, à cet égard, à l’arrêt Praktiker (point 50) et à l’arrêt du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE) (T‑116/06, EU:T:2008:399, point 44).
40 Or, selon le Tribunal, à défaut d’indiquer les produits pouvant être vendus dans les différents magasins composant une galerie commerciale comme la galerie Burlington Arcade, il n’était pas possible d’établir une similitude ou une complémentarité entre les services visés par les marques antérieures et les produits visés par les marques demandées. Il en a déduit, au point 72 des arrêts attaqués, que l’argument de Tulliallan Burlington selon lequel, pour les services de galerie commerciale, il
n’est pas nécessaire de préciser les produits concernés doit être rejeté étant donné que, eu égard au libellé de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, la notion de « services de vente au détail », telle qu’interprétée par la Cour, au point 34 de l’arrêt Praktiker, comprend les services de vente fournis par une galerie commerciale.
41 Le Tribunal a conclu, au point 74 des arrêts attaqués, que l’une des conditions nécessaires visées à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie et que, partant, il convenait de rejeter le troisième moyen ainsi que les recours dans leur ensemble.
La procédure devant la Cour et les conclusions des parties
42 Par ses pourvois, Tulliallan Burlington demande à la Cour :
– d’annuler les arrêts attaqués dans la mesure où ils rejettent ses recours contre les décisions litigieuses ;
– d’annuler les décisions litigieuses, ou, à titre subsidiaire, de renvoyer les affaires devant le Tribunal pour qu’il statue conformément à l’arrêt de la Cour, et
– de condamner l’EUIPO ainsi que Burlington Fashion aux dépens.
43 L’EUIPO demande à la Cour :
– d’annuler les arrêts attaqués dans la mesure où le Tribunal a rejeté les recours fondés sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et les trois marques antérieures britanniques nos 2314342, 2314343 et 2330341 ;
– de rejeter les pourvois pour le surplus, et
– de condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.
44 Burlington Fashion demande à la Cour :
– de rejeter les pourvois dans leur intégralité et
– de condamner Tulliallan Burlington à supporter les dépens et les frais que Burlington Fashion a engagés devant la Cour, le Tribunal ainsi que dans le cadre des procédures devant la quatrième chambre de recours.
45 Par décision du président de la Cour du 12 juin 2018, les affaires ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale ainsi que de l’arrêt.
Sur les pourvois
46 Au soutien de ses pourvois, Tulliallan Burlington invoque trois moyens, identiques dans les quatre affaires en cause, tirés, le premier, d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, le deuxième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, de ce règlement et, le troisième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.
Sur le premier moyen des pourvois
Argumentation des parties
47 Le premier moyen soulevé par Tulliallan Burlington est tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 relatif à l’opposition fondée sur une atteinte à la renommée d’une marque antérieure.
48 Ce premier moyen se subdivise, en substance, en trois branches.
49 Par la première branche du premier moyen, Tulliallan Burlington estime que, compte tenu des éléments de preuve relatifs à la nature et à l’étendue de cette renommée, le Tribunal aurait dû juger, en se fondant sur une appréciation globale prenant en considération les facteurs exposés dans l’arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation (C‑252/07, EU:C:2008:655, point 42), que le public établirait un lien entre les marques antérieures et les marques demandées.
50 En effet, les services de galerie commerciale nécessiteraient une interaction avec les consommateurs finaux des produits vendus dans les magasins. Les détaillants de la galerie commerciale et leurs produits gagneraient en prestige en raison de leur association avec la galerie commerciale Burlington Arcade et le consommateur associerait les marques antérieures à la fourniture de produits de luxe, tels que, notamment, les bijoux, la maroquinerie ou encore les parfums.
51 Or, au lieu de constater l’existence d’un lien entre les marques antérieures et les marques demandées, le Tribunal aurait examiné le préjudice porté au caractère distinctif et le profit indûment tiré de celui-ci.
52 Par la deuxième branche du premier moyen, relative à la dilution du caractère distinctif et du profit indûment tiré de celui-ci, Tulliallan Burlington estime que le Tribunal a considéré, aux points 36 à 44 des arrêts attaqués, qu’elle n’avait pas apporté la preuve d’une telle dilution ou d’un tel profit au regard des critères fixés par la jurisprudence citée.
53 Or, l’approche suivie par le Tribunal, aux points 44 et 45 des arrêts attaqués, serait, à tort, plus exigeante que celle requise par la jurisprudence. Ainsi, il aurait pris en compte la renommée des marques des magasins de la galerie commerciale alors que celle-ci serait sans pertinence. Le Tribunal aurait, de la même façon, tenu compte du fait que le terme « Burlington » était également le nom d’autres lieux très connus alors qu’il ne disposait d’aucune preuve relative à l’éventuelle renommée de
ces lieux, ce qui l’aurait conduit à exiger un niveau de preuve impossible à atteindre. Le Tribunal ne se serait donc pas conformé à l’approche développée par la Cour dans l’arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation (C‑252/07, EU:C:2008:655).
54 Au demeurant, le Tribunal n’aurait pas pris en considération les preuves pertinentes qui lui avait été fournies et qui avaient également été présentées devant la quatrième chambre de recours, lesquelles auraient été suffisantes au regard de la jurisprudence de la Cour (arrêts du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 76 et 77, ainsi que du 14 novembre 2013, Environmental Manufacturing/OHMI, C‑383/12 P, EU:C:2013:741, point 43).
55 Par la troisième branche du premier moyen, Tulliallan Burlington réitère devant la Cour l’un des moyens qu’elle avait soumis au soutien de ses requêtes en annulation des décisions litigieuses selon lequel la quatrième chambre de recours, et désormais le Tribunal, n’a pas pris en compte les arguments qui lui avaient été soumis.
56 Burlington Fashion conclut au rejet du premier moyen des pourvois dans son intégralité.
57 Elle estime, s’agissant des deux premières branches du premier moyen, que Tulliallan Burlington n’a pas expliqué la raison pour laquelle il y aurait un risque d’avantage indu ou de préjudice en ce qui concerne les produits des classes 3, 14 et 18, au sens de l’arrangement de Nice. D’une part, le caractère unique des marques antérieures ne pourrait être retenu dans la mesure où un signe identique ou similaire était également utilisé par Burlington Fashion depuis longtemps en relation avec une
gamme de produits divers. D’autre part, Tulliallan Burlington n’aurait pas non plus apporté de preuve sur le lien entre les signes protégés par les marques antérieures et la galerie commerciale Burlington Arcade.
58 De plus, il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir imposé à Tulliallan Burlington un standard de preuve plus élevé que celui qui ressort de la jurisprudence. Selon celle-ci, l’opposante devrait établir la réunion de deux conditions autonomes, à savoir, d’une part, la dispersion de l’image et de l’identité de la marque renommée dans la perception du public concerné et, d’autre part, la modification du comportement économique de ce public. Or, le Tribunal aurait correctement affirmé, dans ses
conclusions formulées au point 43 des arrêts attaqués, que Tulliallan Burlington n’avait pas produit devant la quatrième chambre de recours ou devant le Tribunal des éléments suffisants pour démontrer que ces conditions étaient remplies.
59 L’EUIPO estime que le premier moyen des pourvois doit être rejeté dans son ensemble.
60 S’agissant de la première branche de ce moyen, l’EUIPO soutient que le Tribunal a explicitement fait référence à la jurisprudence pertinente relative à l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit. Se référant à l’arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation (C‑252/07, EU:C:2008:655), le Tribunal aurait ensuite considéré, en substance, que le fait qu’une marque antérieure jouisse d’une grande renommée ne suffit pas à rapporter la preuve que l’usage de la marque demandée
tire ou risquerait de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou lui porte ou risquerait de lui porter préjudice. Le Tribunal aurait souligné à bon droit qu’il appartient encore au titulaire de celle-ci de démontrer que le comportement économique du consommateur moyen des produits ou des services proposés par le titulaire de la marque antérieure a pu ou pourrait subir une modification en raison de l’usage de la marque demandée.
61 S’agissant de la deuxième branche du premier moyen, l’EUIPO estime que le Tribunal a correctement jugé que Tulliallan Burlington n’avait pas présenté d’éléments de preuve suffisants pour démontrer un tel risque et que les exigences en matière de preuve demandées par le Tribunal ne sont pas trop élevées dans la mesure où celui-ci s’est strictement conformé à la jurisprudence de la Cour.
Appréciation de la Cour
62 Par la première branche de son premier moyen, Tulliallan Burlington soutient que le Tribunal a omis, dans les arrêts attaqués, d’examiner s’il existait un lien entre les marques antérieures, qu’il a reconnues comme étant renommées, et les marques demandées alors que l’existence d’un tel lien serait une condition nécessaire pour caractériser l’atteinte aux marques antérieures, en vertu de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.
63 À cet égard, il convient de relever que la Cour a jugé, dans l’arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation (C‑252/07, EU:C:2008:655, point 30 et jurisprudence citée), que les atteintes aux marques renommées visées à l’article 8, paragraphe 5, de ce règlement, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre les marques antérieures et postérieures, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces marques, à savoir qu’il établit un lien
entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas.
64 À défaut d’un tel lien dans l’esprit du public, l’usage de la marque postérieure n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou de leur porter préjudice (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 31).
65 La Cour a, toutefois, précisé que l’existence d’un tel lien ne saurait suffire, à elle seule, pour conclure à l’existence de l’une des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement, lesquelles constituent la condition spécifique de la protection des marques renommées prévue à cette disposition (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 32).
66 L’application de cette disposition est soumise à la réunion de trois conditions, à savoir, premièrement, l’existence d’un lien entre les marques antérieures et les marques demandées, deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, le risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte préjudice. Ces trois conditions étant
cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à faire échec à l’application de ladite disposition.
67 En l’occurrence, dans le cadre de son appréciation au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, le Tribunal a d’abord constaté, au point 35 des arrêts attaqués, que Tulliallan Burlington peut se prévaloir de la protection de la renommée des marques antérieures pour les services visés par les enregistrements relevant de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice. Il a ensuite relevé, au point 36 de ces arrêts, que la quatrième chambre de recours avait considéré, dans les
décisions litigieuses, qu’il n’y avait pas de lien entre les marques en conflit et que Tulliallan Burlington n’avait pas prouvé que l’usage des marques demandées aurait permis de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou qu’il pourrait leur porter préjudice. Or, sans apprécier s’il existait un lien entre les marques en conflit, le Tribunal est directement passé à l’analyse de la troisième condition fixée à cet article, à savoir celle relative aux
différents risques d’atteinte.
68 À la suite de rappels de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, aux points 37 à 42 des arrêts attaqués, le Tribunal s’est, en effet, contenté, aux points 43 à 45 de ces arrêts, de valider les décisions litigieuses en considérant, en substance, que les preuves apportées par Tulliallan Burlington n’étaient pas suffisantes pour démontrer que l’usage des marques demandées diminuerait l’attrait des marques antérieures.
69 Ainsi que cela a été rappelé au point 66 du présent arrêt, l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 est soumise à la réunion de trois conditions cumulatives, si bien que l’absence de satisfaction de l’une d’entre elles suffit à faire échec à l’application de cette disposition.
70 Il s’ensuit que, dans les arrêts attaqués, le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, examiner, dans un premier temps, si, en partant de la prémisse que les consommateurs établiront un lien entre les marques demandées et les marques antérieures, il existe un risque que l’usage des premières tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des secondes ou leur porte préjudice. En constatant l’absence d’un tel risque, il écartait par là même la nécessité d’examiner le
caractère exact de la prémisse sur laquelle il s’est fondé, à savoir l’existence d’un lien entre les marques antérieures et les marques demandées.
71 Il convient, par conséquent, d’écarter la première branche du premier moyen comme étant non fondée.
72 Par la deuxième branche du premier moyen, Tulliallan Burlington reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit dans l’appréciation de l’existence d’un risque que l’usage sans motif des marques demandées tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures, ou leur porte préjudice, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.
73 À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, que les atteintes contre lesquelles l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 assure la protection en faveur des marques renommées sont, premièrement, le préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure, deuxièmement, le préjudice porté à la renommée de cette marque et, troisièmement, le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de ladite marque (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07,
EU:C:2008:655, point 27).
74 Un seul de ces trois types d’atteinte suffit pour que ladite disposition soit d’application (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 28).
75 D’autre part, si le titulaire de la marque antérieure n’est pas tenu de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, il doit toutefois établir l’existence d’éléments permettant de conclure à un risque sérieux qu’une telle atteinte se produise dans le futur (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 38).
76 L’existence de l’une des atteintes visées à ladite disposition ou d’un risque sérieux qu’une telle atteinte se produise dans le futur doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, au nombre desquels figurent, notamment, l’intensité de la renommée et le degré de caractère distinctif de la marque antérieure, le degré de similitude entre les marques en conflit, ainsi que la nature et le degré de proximité des produits et des services concernés
(arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 68).
77 S’agissant, plus particulièrement, du préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure, également désigné sous les termes de « dilution », de « grignotage » ou de « brouillage », ce préjudice est constitué dès lors que se trouve affaiblie l’aptitude de cette marque à identifier les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et utilisée comme provenant du titulaire de ladite marque, l’usage de la marque postérieure entraînant une dispersion de l’identité de la
marque antérieure et de son emprise sur l’esprit du public. Tel est notamment le cas lorsque la marque antérieure, qui suscitait une association immédiate avec les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, n’est plus en mesure de le faire (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 29).
78 La Cour a encore précisé que la preuve que l’usage de la marque postérieure porte ou serait susceptible de porter préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure suppose que soient démontrés une modification du comportement économique du consommateur moyen des produits et des services pour lesquels la marque antérieure est enregistrée consécutive à l’usage de la marque postérieure ou un risque sérieux qu’une telle modification se produise dans le futur (arrêt du 27 novembre 2008, Intel
Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 77).
79 En l’espèce, au point 43 des arrêts attaqués, le Tribunal a constaté que la requérante n’avait produit ni devant la chambre de recours ni devant lui des éléments cohérents permettant de conclure que l’usage des marques demandées « tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures », se référant ainsi à un seul des trois types d’atteinte, visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.
80 Le Tribunal a motivé cette constatation, au point 44 des arrêts attaqués, en affirmant que la requérante n’avait pas « fourni d’éléments susceptibles d’étayer le fait que l’usage de la marque demandée diminuerait l’attrait de ses marques antérieurs ».
81 Or, d’une part, la référence ambiguë du Tribunal à une éventuelle diminution de « l’attrait » des marques antérieures n’est pas de nature à confirmer avec certitude que celui‑ci a effectivement apprécié l’existence d’un risque de préjudice au caractère distinctif ou à la renommée des marques antérieures, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. D’autre part, la constatation de l’absence d’un risque d’une telle diminution n’est pas, en tout état de cause, susceptible de
démontrer l’absence d’un risque de profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures, au sens de la même disposition.
82 Au point 45 des arrêts attaqués, le Tribunal a ajouté que « le fait qu’un autre sujet économique puisse être autorisé à utiliser une marque incluant le terme “burlington”, pour des produits semblables à ceux en vente dans la galerie londonienne de la requérante, n’est pas de nature, à lui seul, à affecter, aux yeux du consommateur moyen, l’attractivité commerciale de ce lieu ».
83 Toutefois, cette constatation du Tribunal, à la supposer exacte, ne se rapporte directement à aucun des trois types d’atteinte visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Ceux-ci visent non pas « l’attractivité commerciale » d’un lieu désigné par une marque antérieure, mais le risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure, ou qu’il porte préjudice à ceux-ci.
84 Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le Tribunal n’a pas apprécié les éléments de preuve fournis par Tulliallan Burlington à l’appui du motif d’opposition tiré de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, à l’aune des critères prévus par cette disposition, et, partant, a commis une erreur de droit.
85 La deuxième branche du premier moyen est donc fondée. Par conséquent, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la troisième branche du premier moyen, il y a lieu d’accueillir ce moyen.
Sur le deuxième moyen des pourvois
Argumentation des parties
86 Le deuxième moyen invoqué à l’appui des pourvois se subdivise en deux branches. La première branche est tirée d’une violation du droit d’être entendu et la seconde branche d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, relatif à l’action en usurpation d’appellation.
87 S’agissant, de la première branche du second moyen, Tulliallan Burlington relève que la division d’opposition a apprécié la validité des marques demandées seulement sur la base de la marque de l’Union européenne antérieure et au regard de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.
88 Or, Tulliallan Burlington, qui avait également avancé des motifs d’opposition fondés sur l’article 8, paragraphes 1 et 4, de ce règlement, aurait maintenu l’ensemble de ses motifs d’opposition devant la quatrième chambre de recours. Celle-ci aurait, dans sa lettre du 28 septembre 2015, exprimé son intention d’examiner les affaires également sur la base de la marque antérieure britannique no 2314343, en invitant les parties à présenter leurs observations au sujet de cette marque, mais sans évoquer
les autres motifs d’examen ni inviter les parties à présenter des observations sur un autre motif.
89 Tulliallan Burlington reproche donc au Tribunal de ne pas avoir reconnu que la quatrième chambre de recours aurait dû inviter les parties à présenter leurs observations concernant l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009. Au point 54 des arrêts attaqués, le Tribunal aurait affirmé que cette quatrième chambre de recours n’était pas tenue de demander aux parties des observations complémentaires, ce qui contreviendrait au droit d’être entendu, sauf à ne statuer que sur la question
relative à l’article 8, paragraphe 5, de ce règlement.
90 Par la seconde branche de son deuxième moyen, Tulliallan Burlington reproche au Tribunal d’avoir jugé, au point 62 des arrêts attaqués, qu’elle n’avait pas rapporté la preuve que les conditions de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 étaient remplies. Plus précisément, elle lui reproche d’avoir commis une erreur dans ses conclusions, eu égard aux preuves dont disposait la quatrième chambre de recours concernant la renommée des marques antérieures.
91 L’EUIPO et Burlington Fashion concluent au rejet du deuxième moyen soulevé à l’appui des pourvois.
Appréciation de la Cour
92 Par la première branche de son deuxième moyen, Tulliallan Burlington reproche au Tribunal d’avoir violé son droit d’être entendu en ce qu’il n’aurait pas reconnu que la quatrième chambre de recours aurait dû inviter les parties à présenter leurs observations concernant l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 dans la mesure où elle entendait aborder cette question, à la différence de la division d’opposition de l’EUIPO.
93 Il ressort de l’article 75 du règlement no 207/2009 que les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition énonce le droit d’être entendues dans la procédure devant l’EUIPO.
94 Ce droit s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non pas à la position finale que l’administration entend adopter (ordonnance du 8 septembre 2015, DTL Corporación/OHMI, C‑62/15 P, non publiée, EU:C:2015:568, point 45). Il ne commande pas non plus que, avant d’adopter sa position finale sur l’appréciation des éléments présentés par une partie, la chambre de recours de l’EUIPO soit tenue d’offrir à cette dernière une nouvelle
possibilité de s’exprimer au sujet desdits éléments (arrêt du 19 janvier 2012, OHMI/Nike International, C‑53/11 P, EU:C:2012:27, point 53). Par ailleurs, une partie, qui a elle-même produit les éléments de fait et de preuve en cause, a, par hypothèse, été pleinement en mesure d’exposer, à l’occasion de ladite production, la pertinence éventuelle que revêtent ceux-ci pour la solution du litige (ordonnance du 4 mars 2010, Kaul/OHMI, C‑193/09 P, non publiée, EU:C:2010:121, point 66).
95 En l’espèce, c’est Tulliallan Burlington elle‑même qui a invoqué, en tant qu’un des motifs de ses oppositions, l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 et elle a pu présenter à cet égard, les arguments et les éléments de preuve qu’elle estimait pertinents.
96 En effet, le Tribunal a observé, au point 53 des arrêts attaqués, qu’il ressortait du dossier dans l’affaire en cause que, tout au long de la procédure devant les instances de l’EUIPO, Tulliallan Burlington avait bien été en mesure de présenter ses observations. Tulliallan Burlington ne conteste pas cette affirmation et reconnaît elle-même, dans ses pourvois, que, dans ses observations du 20 février 2014 déposées devant la quatrième chambre de recours, elle avait fait savoir qu’elle maintenait
chacun de ses motifs d’opposition, y compris celui qui était fondé sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.
97 En outre, ainsi que la Cour l’a relevé dans son arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 57), de par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait. Il s’ensuit que, en l’espèce, la chambre de recours était tenue de procéder à un nouvel examen de tous les motifs d’opposition invoqués par Tulliallan Burlington, dont, notamment, celui tiré de l’article 8,
paragraphe 4, du règlement no 207/2009. Cette dernière pouvait, dès lors, avancer, dans ses observations devant la chambre de recours, tout argument supplémentaire qu’elle estimait pertinent à l’égard de ce motif d’opposition, sans qu’il soit nécessaire qu’elle fût spécialement invitée à le faire par la chambre de recours.
98 Le Tribunal a donc jugé, à bon droit, qu’il ne saurait être reproché à la quatrième chambre de recours de ne pas avoir demandé aux parties des observations complémentaires à ce sujet.
99 Il s’ensuit que la première branche du second moyen doit être rejetée comme étant non fondée.
100 Par la seconde branche de son deuxième moyen, Tulliallan Burlington reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur d’appréciation relative aux éléments de preuve fournis au soutien de son opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.
101 Selon une jurisprudence constante de la Cour, il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et de ces éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur
dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (arrêt du 13 novembre 2019, Outsource Professional Services/EUIPO, C‑528/18 P, non publié, EU:C:2019:961, point 47).
102 Par ailleurs, une telle dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves. Il incombe au requérant d’indiquer de manière précise les éléments qui auraient été dénaturés par le Tribunal et de démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit celui-ci à cette dénaturation (arrêt du 13 novembre 2019, Outsource Professional Services/EUIPO, C‑528/18 P, non publié,
EU:C:2019:961, point 48).
103 Tulliallan Burlington avance, en substance, que, si le Tribunal avait pris en compte les éléments de preuve apportés de la manière dont elle le préconise, celui-ci aurait dû conclure que l’usurpation d’appellation était établie. Or, il y a lieu de constater que, ce faisant, Tulliallan Burlington se contente de critiquer l’appréciation de nature factuelle retenue dans les arrêts attaqués et n’apporte aucun élément tendant à démontrer que le Tribunal aurait dénaturé les faits ou les preuves
pertinents.
104 Il s’ensuit que la seconde branche de son deuxième moyen doit être écartée comme étant irrecevable.
105 Compte tenu de ce qui précède, le deuxième moyen soulevé à l’appui des pourvois doit être rejeté comme étant, pour partie, non fondé et, pour partie, irrecevable.
Sur le troisième moyen des pourvois
Argumentation des parties
106 Le troisième moyen invoqué au soutien des pourvois est tiré de violations de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Ce moyen se subdivise en quatre branches.
107 Par la première branche du troisième moyen, Tulliallan Burlington fait valoir que la Cour a jugé, dans l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C-501/15 P, EU:C:2017:750, point 48), que l’exigence résultant de l’arrêt Praktiker selon laquelle le demandeur d’une marque désignant des services de vente au détail doit préciser le type de produits concernés par ces services ne s’appliquait pas aux marques qui avaient été enregistrées avant cet arrêt. Elle soutient, en outre, que la jurisprudence
issue de l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C‑501/15 P, EU:C:2017:750), devrait également s’appliquer, conformément au principe de sécurité juridique, aux demandes de marques qui avaient été publiées à la date de l’arrêt Praktiker ainsi qu’à celles qui étaient déjà déposées sans demande de modification émise par l’EUIPO. Ainsi, l’arrêt Praktiker ne serait applicable à aucune des marques antérieures, contrairement à ce qu’a décidé le Tribunal dans les arrêts attaqués.
108 Par la deuxième branche du troisième moyen, Tulliallan Burlington soutient que le Tribunal a, en tout état de cause, commis une erreur d’analyse de l’arrêt Praktiker. La portée de cet arrêt serait très limitée dans la mesure où il ne concernerait spécifiquement que les produits visés par les services de vente au détail et ne pourrait s’appliquer à des marques désignant des services de galerie commerciale.
109 Par la troisième branche du troisième moyen, Tulliallan Burlington estime que, quand bien même les marques antérieures relèveraient effectivement du champ d’application de l’arrêt Praktiker, le Tribunal a conclu de manière erronée que cet arrêt empêchait nécessairement de conclure à l’existence d’une similitude entre les signes. En effet, ledit arrêt n’imposerait pas une telle limite, dans la mesure où il donnerait simplement des indications sur une forme d’enregistrement qui faciliterait
l’analyse d’une similitude prêtant à confusion, mais n’empêcherait pas le titulaire d’une marque antérieure de se prévaloir de la protection prévue à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 à l’égard d’un enregistrement ultérieur qui serait similaire au point de prêter à confusion.
110 Par la quatrième branche du troisième moyen, Tulliallan Burlington avance que, en interprétant de manière erronée l’arrêt Praktiker, le Tribunal a omis de procéder à l’appréciation du risque de confusion ou de renvoyer les affaires devant la quatrième chambre de recours afin que celle-ci puisse apprécier ce risque.
111 Burlington Fashion considère que le troisième moyen des pourvois doit être rejeté dans son ensemble.
112 Premièrement, contrairement à ce qu’affirme Tulliallan Burlington, les services visés par les marques antérieures entreraient bien dans la catégorie des « services de vente au détail ». Ce serait à bon droit que le Tribunal a jugé que ces services relevaient de cette catégorie.
113 Deuxièmement, l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C-501/15 P, EU:C:2017:750), ne permettrait pas d’infirmer la conclusion du Tribunal, exposée au point 71 des arrêts attaqués. D’une part, dans cet arrêt, la Cour aurait précisé que l’arrêt Praktiker ne s’appliquait qu’aux marques enregistrées avant la date du prononcé de celui-ci, ce qui ne serait pas le cas de la marque de l’Union européenne antérieure. D’autre part, même si l’arrêt Praktiker n’est pas directement applicable aux trois
marques antérieures britanniques, la Cour aurait affirmé dans l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C‑501/15 P, EU:C:2017:750), qu’il y avait lieu de tenir compte des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.
114 L’EUIPO estime que certains arguments relevant du troisième moyen des pourvois sont fondés, mais uniquement pour les trois marques antérieures britanniques, à l’exclusion de la marque de l’Union européenne antérieure.
115 D’une part, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en ce qu’il aurait appliqué l’arrêt Praktiker alors que la jurisprudence issue de cet arrêt n’était pas pertinente pour résoudre les affaires en cause au regard des trois marques antérieures britanniques. L’EUIPO relève, à cet égard, que, dans l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C-501/15 P, EU:C:2017:750), la Cour a considéré qu’il ressort de l’arrêt Praktiker que la portée de la protection d’une marque enregistrée avant le prononcé
de cet arrêt ne saurait être affectée par la jurisprudence issue de celui-ci dans la mesure où ce dernier ne porte que sur les nouvelles demandes d’enregistrement.
116 Ainsi, la Cour aurait explicitement rejeté tout effet rétroactif de l’arrêt Praktiker pour les marques déjà enregistrées avant la date de son prononcé. Dans les présentes affaires, les trois marques antérieures britanniques auraient été enregistrées au cours de l’année 2003, à savoir bien avant le prononcé de cet arrêt rendu le 7 juillet 2005.
117 Or, les constatations opérées par le Tribunal dans les arrêts attaqués concluant à la dissemblance des produits désignés par les marques demandées et des services de galeries commerciales reposeraient sur le postulat erroné selon lequel la jurisprudence issue de l’arrêt Praktiker s’applique en l’espèce.
118 Partant, l’EUIPO considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en appliquant la jurisprudence issue de cet arrêt aux trois marques antérieures britanniques.
119 D’autre part, le Tribunal aurait également méconnu les demandes de preuve d’usage des trois marques antérieures britanniques. L’EUIPO relève, dans un premier temps, que la division d’opposition avait accueilli les oppositions sur la seule base de la marque de l’Union européenne antérieure et avait estimé que, pour des raisons d’économie de procédure, un examen des preuves de l’usage déposées pour ces trois marques n’était pas nécessaire. Dans un second temps, l’EUIPO fait observer que la
quatrième chambre de recours a, sans examiner les demandes de preuve de cet usage, annulé les décisions de la division d’opposition et rejeté les oppositions, en ce qui concerne l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en constatant, sans apporter de précision, que les produits contestés n’étaient pas similaires aux services de galerie commerciale relevant de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice.
120 Or, un examen des demandes de preuves de l’usage aurait éventuellement permis de déterminer les produits spécifiques faisant l’objet des « services de galerie commerciale/service de vente au détail » fournis par Tulliallan Burlington sous les trois marques antérieures britanniques. La portée exacte de ces trois marques antérieures aurait pu être déterminée dans la mesure où les produits spécifiques visés par les services de galerie commerciale auraient pu être déterminés. Cela découlerait à la
fois de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009 ainsi que de l’arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus (C-501/15 P, EU:C:2017:750, point 50).
121 Il s’ensuivrait que, en omettant d’examiner les preuves d’usage des trois marques antérieures britanniques, tout en rejetant les recours fondés sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 en raison de la dissemblance des produits, la quatrième chambre de recours aurait commis une erreur de droit que le Tribunal aurait également reproduite. L’EUIPO estime, en revanche, que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion au
regard de la marque de l’Union européenne antérieure.
122 L’EUIPO conclut au rejet des autres arguments.
Appréciation de la Cour
123 Par les différentes branches de son troisième moyen, qu’il convient d’examiner conjointement, Tulliallan Burlington reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit, en ce que celui‑ci s’est, à tort, appuyé sur l’arrêt Praktiker pour considérer, au point 71 des arrêts attaqués, qu’il n’était pas possible d’établir une similitude ou une complémentarité entre les services visés par les marques antérieures et les produits visés par les marques demandées.
124 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, s’agissant des services de vente au détail relevant de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, la Cour a jugé que l’objectif du commerce de détail est la vente de produits aux consommateurs. Cette activité consiste, notamment, en la sélection d’un assortiment des produits proposés à la vente et en l’offre de diverses prestations qui visent à amener le consommateur à conclure ledit acte (voir, en ce sens, arrêt Praktiker, point 34).
125 En outre, il convient de relever que la note explicative relative à la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, précise que cette classe comprend, notamment, le regroupement pour le compte de tiers de produits divers, à l’exception de leur transport, permettant aux clients de les voir et de les acheter commodément. Ces services peuvent être assurés par des magasins de détail, par des magasins en gros, par l’intermédiaire de distributeurs automatiques, de catalogues de vente par
correspondance ou par des moyens électroniques, tels que des sites Internet ou des émissions de téléachat.
126 Il ressort de cette note explicative que la notion de « services de vente au détail » renvoie à trois caractéristiques essentielles, à savoir, premièrement, que ces services ont pour objet la vente de biens aux consommateurs, deuxièmement, qu’ils sont fournis à destination du consommateur afin de permettre à ce dernier de voir et d’acheter ces biens commodément et, troisièmement, qu’ils sont fournis pour le compte de tiers.
127 Il s’ensuit que la notion de « services de vente au détail » couvre des services qui visent le consommateur et qui consistent, pour le compte des enseignes qui occupent les boutiques d’une galerie commerciale, à regrouper des produits divers dans une gamme de boutiques permettant au consommateur de les voir et de les acheter commodément ainsi qu’à offrir diverses prestations distinctes de l’acte de vente, visant à amener ce consommateur à acheter les produits vendus dans ces boutiques.
128 Il ressort des considérations qui précèdent que, comme le Tribunal l’a jugé à bon droit, au point 32 des arrêts attaqués, l’interprétation faite par la Cour, au point 34 de l’arrêt Praktiker ne permet pas d’affirmer que les services fournis par les galeries marchandes ou les centres commerciaux soient, par définition, exclus du champ d’application de la notion de « services de vente au détail » définie dans la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice.
129 Le Tribunal a également relevé, à juste titre, au point 33 des arrêts attaqués, que l’interprétation faite par la Cour, au point 34 de l’arrêt Praktiker, s’oppose à la thèse selon laquelle les services de galerie commerciale seraient essentiellement limités à des services de location et de gestion immobilière. Il fait valoir, en effet, que la notion de « diverses prestations », telle que mentionnée audit point de l’arrêt Praktiker, inclut nécessairement les services organisés par une galerie
commerciale afin de garder toute l’attractivité et les avantages pratiques d’un tel lieu de commerce, le but étant de permettre aux clients intéressés par des produits divers de les voir et de les acheter commodément dans une gamme de magasins.
130 Partant, le Tribunal a pu juger, à bon droit, au point 34 des arrêts attaqués, que la notion de « services de vente au détail » comprend les services fournis par une galerie commerciale à destination du consommateur afin de permettre à ce dernier de voir et d’acheter ces biens commodément et au bénéfice des enseignes qui occupent la galerie concernée.
131 Aux points 70 et 71 des arrêts attaqués, le Tribunal a considéré que, s’agissant des services relevant de la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, le juge de l’Union a établi que, pour les services de vente au détail, il était nécessaire que les produits offerts à la vente soient ponctuellement précisés. Il en a déduit que l’absence de toute indication précise au sujet des produits pouvant être vendus dans les différents magasins composant une galerie commerciale, comme la galerie
Burlington Arcade, empêche toute association entre ces derniers et les produits de la marque demandée, la définition donnée, en l’espèce, par Tulliallan Burlington relative aux produits de luxe n’étant pas suffisante afin de préciser de quels produits il s’agit. Partant, selon le Tribunal, à défaut d’une telle précision, il n’est pas possible d’établir une similitude ou une complémentarité entre les services visés par les marques antérieures et les produits visés par les marques demandées.
132 À cet égard, il y a lieu de relever que, certes, la Cour a jugé que, aux fins de l’enregistrement d’une marque couvrant des services fournis dans le cadre du commerce de détail, il n’est pas nécessaire de désigner concrètement le ou les services pour lesquels cet enregistrement est demandé, mais, en revanche, il doit être exigé du demandeur qu’il précise les produits ou les types de produits concernés par ces services (arrêt Praktiker, points 49 et 50).
133 Toutefois, d’une part, la Cour a précisé que la jurisprudence issue de l’arrêt Praktiker ne porte que sur les demandes d’enregistrement de marques et ne concerne pas la protection des marques enregistrées à la date du prononcé dudit arrêt (arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus, C‑501/15 P, EU:C:2017:750, point 45). Dans la mesure où, en l’occurrence, les trois marques antérieures britanniques de Tulliallan Burlington, invoquées par cette dernière à l’appui de son opposition, ont été
enregistrées avant la date du prononcé de l’arrêt Praktiker, elles n’étaient pas, en tout état de cause, concernées par l’obligation issue de cet arrêt.
134 D’autre part, il ne saurait être déduit des considérations de l’arrêt Praktiker mentionnées au point 132 du présent arrêt que, lorsqu’une marque visant les services de vente au détail, enregistrée postérieurement au prononcé de celui-ci, est invoquée à l’appui du motif d’opposition visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, ce motif d’opposition peut d’emblée être écarté, par la simple invocation de l’absence de toute indication précise au sujet des produits pouvant
être concernés par les services de vente au détail couverts par la marque antérieure.
135 Procéder de la sorte impliquerait de nier à la marque antérieure la capacité d’être invoquée en opposition pour empêcher l’enregistrement d’une marque identique ou similaire pour des produits ou des services similaires et, par voie de conséquence, refuser à lui reconnaître tout caractère distinctif, alors même que cette marque est toujours enregistrée et que sa nullité, pour un des motifs prévus dans le règlement no 207/2009, n’a pas été prononcée.
136 Par ailleurs, ainsi que le relève, en substance, l’EUIPO, il est possible, au moyen d’une requête tendant à obtenir la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, au sens de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, de déterminer les produits précis visés par les services pour lesquels la marque antérieure a été utilisée et, partant, en application de la dernière phrase de ce paragraphe, de ne tenir compte, aux fins de l’examen de l’opposition, que de ces produits.
137 Ainsi, il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en constatant, au point 71 des arrêts attaqués, que l’absence de toute indication précise au sujet des produits pouvant être vendus dans les différents magasins composant une galerie commerciale telle que celle visée par les marques antérieures empêchait toute association entre ces derniers et les produits visés par les marques demandées, le Tribunal a commis une erreur de droit. Partant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner
le reste de l’argumentation de Tulliallan Burlington, il y a lieu d’accueillir le troisième moyen du pourvoi.
Sur les recours de première instance
138 Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour, en cas d’annulation de l’arrêt du Tribunal, peut statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé. Tel est le cas en l’espèce dans les quatre affaires.
139 Par le premier moyen de sa requête soumise devant le Tribunal, Tulliallan Burlington reproche, en substance, à la quatrième chambre de recours d’avoir violé l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.
140 En particulier, la quatrième chambre de recours aurait commis une erreur d’interprétation concernant la notion de « services de vente au détail » désignant une partie des services compris dans la classe 35, au sens de l’arrangement de Nice, et pour laquelle la renommée des marques antérieures n’avait pas été démontrée.
141 Par ailleurs, par le troisième moyen de cette requête, Tulliallan Burlington reproche, en substance, à la quatrième chambre de recours d’avoir violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, au motif, notamment, que celle-ci a omis de tenir compte du fait que les consommateurs visés par les services de sa galerie commerciale sont les mêmes que ceux visés par les produits couverts par les marques demandées.
142 La quatrième chambre de recours, au point 18 des décisions litigieuses, a considéré que l’activité de Tulliallan Burlington est sans lien avec une activité de vente au détail et consiste seulement à louer des boutiques et des bureaux dans sa galerie commerciale. Elle en a conclu que Tulliallan Burlington ne fournit que des services de gestion immobilière à ses clients et non pas des services de vente au détail.
143 À cet égard, il découle des points 124 à 127 du présent arrêt que la notion de « services de vente au détail » comprend, notamment, les services fournis par une galerie commerciale à destination du consommateur afin de permettre à ce dernier de voir et d’acheter commodément et au bénéfice des enseignes qui occupent la galerie concernée.
144 Il en découle que, en retenant une définition restrictive de la notion de « services de vente au détail » et en ne tenant pas compte de ce que Tulliallan Burlington fournissait de tels services, la quatrième chambre de recours a commis, d’une part, une erreur de droit en ce qu’elle a conféré une portée trop restrictive à cette notion et, d’autre part, n’a pas correctement qualifié les éléments factuels.
145 Dès lors, il y a lieu d’accueillir les premier et troisième moyens des recours et d’annuler les décisions litigieuses, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens des requêtes.
Sur les dépens
146 Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.
147 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
148 Tulliallan Burlington ayant conclu à la condamnation de l’EUIPO et de Burlington Fashion aux dépens, et ceux-ci ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens et à supporter, à parts égales, les dépens exposés par Tulliallan Burlington relatifs tant aux procédures de première instance dans les affaires T‑120/16 à T‑123/16 qu’à celles des pourvois.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :
1) Les arrêts du Tribunal de l’Union européenne du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑120/16, EU:T:2017:873), du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (BURLINGTON THE ORIGINAL) (T‑121/16, non publié, EU:T:2017:872), du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑122/16, non publié, EU:T:2017:871), et du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (BURLINGTON)
(T‑123/16, non publié, EU:T:2017:870), sont annulés.
2) Les décisions de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 11 janvier 2016 (affaires R 94/2014-4, R 2501/2013-4, R 2409/2013-4 et R 1635/2013-4), relatives à quatre procédures d’opposition entre Tulliallan Burlington Ltd et Burlington Fashion GmbH, sont annulées.
3) Burlington Fashion GmbH et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) sont condamnés à supporter, outre leurs propres dépens, les dépens exposés par Tulliallan Burlington Ltd relatifs tant aux procédures de première instance dans les affaires T‑120/16 à T‑123/16 qu’à celles des pourvois, à parts égales.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.