ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)
22 octobre 2020 ( *1 )
« Pourvoi – Concurrence – Entente – Marché du conditionnement alimentaire destiné à la vente au détail – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE – Règlement (CE) no 1/2003 Article 23 – Article 6 de la convention européenne des droits de l’homme – Droit fondamental à un procès équitable – Principe d’égalité des armes – Droit “à la confrontation” – Audition de témoins – Motivation – Infraction unique et continue – Plafond de l’amende »
Dans l’affaire C‑702/19 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 20 septembre 2019,
Silver Plastics GmbH & Co. KG, établie à Troisdorf (Allemagne), représentée par Mes M. Wirtz, Rechtsanwalt, et S. Möller, Rechtsanwältin,
Johannes Reifenhäuser Holding GmbH & Co. KG, établie à Troisdorf, représentée par Me C. Karbaum, Rechtsanwalt,
parties requérantes,
l’autre partie à la procédure étant :
Commission européenne, représentée par MM. G. Meessen et I. Zaloguin ainsi que par Mme L. Wildpanner, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (neuvième chambre),
composée de M. M. Vilaras (rapporteur), président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la neuvième chambre, MM. D. Šváby et S. Rodin, juges,
avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par leur pourvoi, Silver Plastics GmbH & Co. KG et Johannes Reifenhäuser Holding GmbH & Co. KG demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 11 juillet 2019, Silver Plastics et Johannes Reifenhäuser/Commission (T‑582/15, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:497), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant, à titre principal, à l’annulation partielle de la décision C(2015) 4336 final de la Commission, du 24 juin 2015, relative à une procédure
d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39563 – Conditionnement alimentaire destiné à la vente au détail) (ci‑après la « décision litigieuse ») et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant des amendes qui leur ont été infligées par cette décision.
Le cadre juridique
2 L’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), prévoit :
« 2. La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :
a) elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE],
[...]
Pour chaque entreprise et association d’entreprises participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.
[...]
3. Pour déterminer le montant de l’amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci. »
Les antécédents du litige
3 Les antécédents du litige figurent aux points 1 à 10 de l’arrêt attaqué et, pour les besoins de la présente procédure, peuvent être résumés de la manière suivante.
4 La première requérante, Silver Plastics, est une société qui fabrique et fournit divers produits de conditionnement alimentaire, dont 99,75 % des parts étaient, à l’époque des faits ayant mené à l’adoption de la décision litigieuse, détenues par la seconde requérante, Johannes Reifenhäuser Holding.
5 Il ressort des points 2 à 6 de l’arrêt attaqué que, à la suite d’une demande de clémence déposée, le 18 mars 2008, par l’entreprise formée par le groupe dont la maison mère est Linpac Group Ltd (ci-après « Linpac »), la Commission européenne a ouvert une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3), dans le secteur du conditionnement alimentaire destiné à la vente au détail, laquelle a abouti à
l’adoption de la décision litigieuse.
6 Comme le Tribunal l’a indiqué aux points 7 et 8 de l’arrêt attaqué, par cette décision, la Commission a constaté que des sociétés actives dans le secteur susmentionné avaient, au cours de périodes comprises entre l’année 2000 et l’année 2008, participé à une infraction unique et continue, constituée par cinq infractions distinctes, délimitées selon la zone géographique desservie, à savoir l’Italie, l’Europe du Sud-Ouest, l’Europe du Nord-Ouest (ci-après l’« ENO »), l’Europe centrale et orientale
et la France (ci-après l’« infraction en cause »). Les produits concernés étaient des barquettes servant au conditionnement d’aliments destinés à la vente au détail en polystyrène et, en ce qui concerne l’entente en ENO, des barquettes rigides.
7 Plus particulièrement, ainsi que le Tribunal l’a rappelé au point 10 de l’arrêt attaqué, le dispositif de la décision litigieuse énonçait :
« Article premier
[...]
3. Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 101 [TFUE] et l’article 53 de l’accord [sur l’Espace économique européen] en participant, au cours des périodes mentionnées, à une infraction unique et continue, constituée par plusieurs infractions distinctes, ayant trait à des barquettes en polystyrène et rigides destinées au secteur du conditionnement alimentaire pour la vente au détail et couvrant le territoire de [l’ENO] :
[...]
d) Silver Plastics [...] et [Johannes Reifenhäuser Holding], du 13 juin 2002 au 29 octobre 2007.
[...]
5. Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 101 [TFUE] en participant, au cours des périodes mentionnées, à une infraction unique et continue, constituée par plusieurs infractions distinctes, ayant trait à des barquettes en polystyrène destinées au secteur du conditionnement alimentaire pour la vente au détail et couvrant le territoire de la France :
[...]
e) Silver Plastics [...] et [Johannes Reifenhäuser Holding], du 29 juin 2005 au 5 octobre 2005.
Article 2
[...]
3. Les amendes suivantes sont infligées pour l’infraction visée à l’article premier, paragraphe 3 :
[...]
e) Silver Plastics [...] et [Johannes Reifenhäuser Holding], conjointement et solidairement : [...] 20317000 [euros].
[...]
5. Les amendes suivantes sont infligées pour l’infraction visée à l’article premier, paragraphe 5 :
[...]
e) Silver Plastics [...] et [Johannes Reifenhäuser Holding], conjointement et solidairement : [...] 893000 [euros] ;
[...] »
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
8 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 septembre 2015, les requérantes ont formé un recours tendant, à titre principal, à l’annulation partielle de la décision litigieuse et, à titre subsidiaire, à la réduction des amendes qui leur ont été infligées par celle-ci. Ce recours a été rejeté par l’arrêt attaqué.
9 En particulier, dans le cadre de l’analyse de la première branche du premier moyen des requérantes, par laquelle ces dernières soutenaient, en substance, que la Commission n’avait apporté aucune preuve fiable et suffisante de l’existence d’un accord ou d’une pratique concertée en ENO, le Tribunal a notamment examiné, aux points 44 à 66 de l’arrêt attaqué, les arguments avancés par les requérantes pour contester la participation de Silver Plastics à une réunion anticoncurrentielle qui a eu lieu le
13 juin 2002. À la suite de cet examen, le Tribunal a considéré, au point 67 de l’arrêt attaqué, que, « même si une certaine ambigüité quant à l’heure exacte du début [d’une autre réunion qui a eu lieu le même jour et dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel] ne peut être écartée, il existe suffisamment d’éléments de preuve établissant que des concurrents, y compris Silver Plastics, se sont rencontrés en marge de [cette autre] réunion pour discuter des stratégies concernant les prix ».
10 Par ailleurs, après examen de la deuxième branche du premier moyen des requérantes, tirée d’une absence d’infraction unique et continue ayant trait au marché des barquettes en polystyrène et des barquettes rigides en ENO, le Tribunal a constaté, au point 191 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait considéré à bon droit que Silver Plastics avait participé à cette infraction unique et continue.
11 Dans le cadre de l’examen du troisième moyen des requérantes, tiré d’une violation du principe d’égalité des armes et du droit « à la confrontation », le Tribunal a examiné, aux points 226 à 236 de l’arrêt attaqué, les demandes des requérantes tendant à ce qu’il auditionne cinq témoins et organise le contre-interrogatoire de l’un de ces témoins. À cet égard, ainsi qu’il ressort des points 232 à 234 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé que, compte tenu du fait que les requérantes avaient
produit devant lui et utilisé des déclarations écrites des témoins qu’elles souhaitaient voir déposer, il ne ressortait pas des arguments avancés par les requérantes à l’appui de leur demande que les témoignages de ces personnes pourraient apporter une valeur ajoutée aux éléments de preuve déjà présents dans le dossier, lesquels, selon le point 235 de l’arrêt attaqué, étaient suffisamment éclairants. Dès lors, le Tribunal a décidé, au point 236 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était ni nécessaire ni
opportun de donner une suite favorable à la demande d’audition de témoins formulée par les requérantes.
12 Aux points 255 à 279 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné le cinquième moyen du recours des requérantes, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 2, premier et deuxième alinéas, du règlement no 1/2003, lu en combinaison avec l’article 101, paragraphe 1, TFUE, en ce que la Commission a considéré que les deux requérantes formaient une unité économique.
13 À cet égard, le Tribunal a, tout d’abord, constaté, aux points 265 et 266 de l’arrêt attaqué, que les requérantes ne contestaient pas que, au cours de la période couvrant l’infraction en cause en ENO, Johannes Reifenhäuser Holding détenait 99,75 % du capital de Silver Plastics et que, dès lors, la Commission pouvait se fonder, à leur égard, sur la présomption de l’exercice d’une influence déterminante par la première sur la seconde, reconnue dans la jurisprudence de la Cour. Ensuite, le Tribunal
a analysé, aux points 267 à 279 de l’arrêt attaqué, les différents arguments avancés par les requérantes et il a conclu, aux points 280 et 281 de cet arrêt, que celles-ci n’avaient pas apporté d’éléments de preuve susceptibles de renverser cette présomption, de telle sorte que le cinquième moyen devait être écarté comme étant non fondé.
14 Enfin, aux points 287 à 314 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné le sixième moyen du recours des requérantes, par lequel celles-ci invoquaient, en substance, une violation de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1/2003, au motif que, aux fins de la détermination du chiffre d’affaires pertinent pour le calcul du plafond de 10 % prévu par cette disposition, la Commission avait tenu compte du chiffre d’affaires de la société Reifenhäuser GmbH & Co. KG Maschinenfabrik
(ci-après « Maschinenfabrik ») bien que, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, Johannes Reifenhäuser Holding ne détenait plus de participation dans cette société.
15 Le Tribunal a, notamment, considéré, aux points 307 à 310 de l’arrêt attaqué, que, dans la mesure où la décision litigieuse a été adoptée le 24 juin 2015, la Commission a, à bon droit, déterminé, à l’égard de Johannes Reifenhäuser Holding, le plafond de l’amende qui lui a été infligée par la décision litigieuse sur le fondement de l’exercice social 2013/2014, lequel était le dernier exercice social complet précédant l’adoption de la décision litigieuse. La circonstance que la cession de
Maschinenfabrik par Johannes Reifenhäuser Holding a été dûment enregistrée le 28 mai 2015, avec effet rétroactif au 30 septembre 2014, n’a pu, selon le Tribunal, exercer aucune incidence sur le chiffre d’affaires de Johannes Reifenhäuser Holding réalisé au cours de l’exercice social 2013/2014, lequel s’était achevé le 30 juin 2014. Après avoir écarté certains autres arguments avancés par les requérantes, le Tribunal a considéré, au point 315 de l’arrêt attaqué, que le sixième moyen devait être
rejeté.
Les conclusions des parties devant la Cour
16 Les requérantes demandent à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal ;
– à titre subsidiaire, d’annuler l’arrêt attaqué et d’annuler la décision litigieuse en ce qu’elle vise Johannes Reifenhäuser Holding et de réduire le montant de l’amende infligée à Silver Plastics à un montant qui ne dépasse pas 10 % du chiffre d’affaires réalisé par celle-ci au cours du dernier exercice social clôturé ;
– à titre encore plus subsidiaire, d’annuler l’arrêt attaqué et de réduire le montant de l’amende solidairement infligée aux requérantes à un montant qui ne dépasse pas 10 % du chiffre d’affaires réalisé par celles-ci sans tenir compte du chiffre d’affaires de Maschinenfabrik, et
– de condamner la Commission aux dépens.
17 La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner les requérantes aux dépens.
Sur le pourvoi
18 À l’appui de leur pourvoi, les requérantes invoquent sept moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), lu en combinaison avec l’article 47, deuxième alinéa, et l’article 48, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), ainsi que du principe de l’immédiateté, le deuxième, de la
violation du droit « à la confrontation », le troisième, de la violation du principe de l’égalité des armes, le quatrième, de la violation de l’obligation de motivation, le cinquième, de la violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003, le sixième, de la violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, en ce qui concerne la constatation de l’existence d’une unité économique, et, le septième, de la violation de la même disposition, en ce qui concerne le plafond de
l’amende solidairement infligée aux requérantes.
Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 6 de la CEDH, lu en combinaison avec l’article 47, deuxième alinéa, et l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, ainsi que du principe de l’immédiateté
Argumentation des parties
19 Les requérantes font valoir que les garanties procédurales et les droits de la défense consacrés à l’article 6, paragraphes 1 et 3, de la CEDH, tels qu’interprétés par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi qu’à l’article 47, deuxième alinéa, et à l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, doivent être pris en considération dans le cadre des procédures menées devant le juge de l’Union, y compris dans les procédures relatives aux ententes, de telles procédures revêtant
un caractère pénal.
20 Or, dans la mesure où le Tribunal se serait limité à prendre en considération les seuls procès-verbaux des déclarations faites par M. W. aux avocats de Silver Plastics, sans convoquer celui-ci pour l’entendre en personne en tant que témoin, il aurait violé le principe du procès équitable garanti à l’article 6 de la CEDH ainsi qu’à l’article 47, deuxième alinéa, et à l’article 48, paragraphe 2, de la Charte et porté atteinte au principe de l’immédiateté de l’administration de la preuve.
21 Selon les requérantes, qui invoquent à cet égard, notamment, d’une part, l’arrêt de la Cour EDH du 16 juillet 2019, Júlíus þór Sigurþórsson c. Islande (CE:ECHR:2019:0716JUD003879717), et, d’autre part, l’arrêt de la Cour du 29 juillet 2019, Gambino et Hyka (C‑38/18, EU:C:2019:628), ainsi que les conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, l’équité de la procédure garantie à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH exige qu’une juridiction qui contrôle une
décision relative à la culpabilité d’une personne recueille tout témoignage nécessaire par une audition personnelle du témoin et ne se fonde pas uniquement sur une déclaration écrite de ce témoin.
22 Il s’ensuit, selon les requérantes, que, contrairement à ce que le Tribunal a estimé au point 230 de l’arrêt attaqué, il ne pouvait pas valablement trancher le litige qui lui était soumis sans entendre en personne M. W. En outre, contrairement à ce que le point 229 de l’arrêt attaqué laisserait entendre, le Tribunal ne saurait juger de la pertinence d’une telle audition sans procéder à celle-ci, en se bornant à considérer qu’elle ne serait de toute façon pas de nature à infléchir le sens de sa
décision.
23 La Commission estime que le premier moyen du pourvoi est irrecevable, dès lors qu’il vise, en réalité, à remettre en question l’appréciation des faits par le Tribunal, et, en tout état de cause, non fondé.
Appréciation de la Cour
24 À titre liminaire, il convient de rappeler que, si, comme le confirme l’article 6, paragraphe 3, TUE, les droits fondamentaux consacrés par la CEDH font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux et si l’article 52, paragraphe 3, de la Charte dispose que les droits contenus dans celle-ci correspondant à des droits garantis par la CEDH ont le même sens et la même portée que ceux que leur confère ladite convention, cette dernière ne constitue pas, tant que l’Union n’y a pas adhéré,
un instrument juridique formellement intégré à l’ordre juridique de l’Union (arrêt du 16 juillet 2020, Facebook Ireland et Schrems, C‑311/18, EU:C:2020:559, point 98 ainsi que jurisprudence citée).
25 À cet égard, la Cour a également indiqué que, dans la mesure où la Charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la CEDH, l’article 52, paragraphe 3, de la Charte vise à assurer la cohérence nécessaire entre les droits contenus dans celle-ci et les droits correspondants garantis par la CEDH, « sans que cela porte atteinte à l’autonomie du droit de l’Union et de la Cour de justice de l’Union européenne » (voir, en ce sens, arrêt du 20 mars 2018, Menci, C‑524/15, EU:C:2018:197,
point 23). Selon les explications relatives à la charte des droits fondamentaux (JO 2007, C 303, p. 17), l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte correspond à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH et l’article 48 de la Charte est « le même » que l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la CEDH. La Cour doit, dès lors, veiller à ce que l’interprétation qu’elle effectue de l’article 47, deuxième alinéa, et de l’article 48 de la Charte assure un niveau de protection qui ne méconnaît pas celui garanti
à l’article 6 de la CEDH, tel qu’interprété par la Cour européenne des droits de l’homme [voir, par analogie, arrêt du 26 septembre 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Effet suspensif de l’appel), C‑175/17, EU:C:2018:776, point 35 et jurisprudence citée].
26 Ces éléments rappelés, il convient de comprendre le premier moyen des requérantes comme tendant à faire valoir, en substance, que, en refusant d’entendre oralement, en tant que témoin, M. W., le Tribunal a violé leur droit à un procès équitable consacré, notamment, à l’article 47, deuxième alinéa, et à l’article 48, paragraphe 2, de la Charte.
27 Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’allègue la Commission, un tel moyen ne vise pas à remettre en cause l’appréciation des faits par le Tribunal mais reproche à ce dernier d’avoir commis une erreur de droit. Il est, dès lors, recevable.
28 S’agissant de l’examen de ce moyen quant au fond, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence constante de la Cour, le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (arrêt du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P et C‑137/07 P, EU:C:2009:576, point 319 ainsi que jurisprudence citée).
29 Ainsi que la Cour l’a déjà jugé, même si une demande d’audition de témoins, formulée dans la requête, indique avec précision les faits sur lesquels il y aurait lieu d’entendre le ou les témoins et les motifs de nature à justifier leur audition, il appartient au Tribunal d’apprécier la pertinence de la demande par rapport à l’objet du litige et à la nécessité de procéder à l’audition des témoins cités (arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non
publié, EU:C:2013:866, point 323 et jurisprudence citée).
30 Ce pouvoir d’appréciation du Tribunal se concilie avec le droit fondamental à un procès équitable, en particulier avec les dispositions de l’article 47, deuxième alinéa, et de l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, lus en combinaison avec l’article 6, paragraphe 3, sous d), de la CEDH. Il ressort en effet de la jurisprudence de la Cour que cette dernière disposition ne reconnaît pas à l’accusé un droit absolu d’obtenir la comparution de témoins devant un tribunal et qu’il incombe en principe
au juge de décider de la nécessité ou de l’opportunité de citer un témoin. L’article 6, paragraphe 3, de la CEDH n’impose pas la convocation de tout témoin, mais vise une complète égalité des armes, assurant que la procédure litigieuse, considérée dans son ensemble, a offert à l’accusé une occasion adéquate et suffisante de contester les soupçons qui pesaient sur lui (arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, points 324
et 325 ainsi que jurisprudence citée).
31 En l’espèce, il y a lieu de constater que, au terme d’un examen circonstancié d’un ensemble d’éléments de preuve que les requérantes ont amplement pu contester, le Tribunal a jugé, d’une part, au point 153 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait établi à suffisance de droit, dans la décision litigieuse, la participation de Silver Plastics à des accords anticoncurrentiels et à des pratiques concertées et, d’autre part, au point 191 de cet arrêt, que Silver Plastics avait participé à une
infraction unique et continue en ENO.
32 Par ailleurs, aux points 232 et 233 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a observé que les requérantes avaient produit devant lui des déclarations de plusieurs personnes, dont celles de M. W., qu’elles ont pu utiliser pour soutenir leurs arguments. Il a ajouté, au point 234 de cet arrêt, que la motivation avancée par les requérantes quant à l’utilité des témoignages de ces personnes ne faisait pas apparaître que leur audition, par le Tribunal, en qualité de témoins, pourrait apporter une valeur
ajoutée aux éléments de preuve déjà présents dans le dossier.
33 C’est ainsi que le Tribunal a estimé, comme il ressort du point 236 de l’arrêt attaqué, que, au regard de l’objet du recours et des éléments du dossier, il n’était ni nécessaire ni opportun de donner une suite favorable à la demande d’audition de témoins formulée par les requérantes. Dès lors, il a pu, sans commettre d’erreur de droit, rejeter cette demande.
34 Cette considération n’est pas remise en cause par l’enseignement qui se dégage de l’arrêt de la Cour EDH du 16 juillet 2019, Júlíus þór Sigurþórsson c. Islande (CE:ECHR:2019:0716JUD003879717), invoqué par les requérantes. Ainsi qu’il ressort, en substance, des paragraphes 39 à 44 de cet arrêt, c’est au regard des circonstances particulières de l’affaire ayant donné lieu à celui-ci que cette juridiction a constaté une violation de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. Or, ces circonstances,
caractérisées par le fait que l’accusé qui avait été acquitté en premier instance a par la suite été condamné par une juridiction d’appel qui a réduit la valeur probante de témoignages oraux effectués devant la juridiction de première instance alors même qu’elle ne pouvait pas, en vertu de son droit national, réévaluer les témoignages oraux présentés devant un tel tribunal sans avoir réentendu leurs auteurs, ne sont en rien comparables aux circonstances de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt
attaqué.
35 L’arrêt du 29 juillet 2019, Gambino et Hyka (C‑38/18, EU:C:2019:628), également invoqué par les requérantes, ne saurait non plus conduire à une conclusion différente.
36 Cet arrêt porte sur l’interprétation de la directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil (JO 2012, L 315, p. 57). La Cour y a dit pour droit que les articles 16 et 18 de la directive 2012/29 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale en vertu de
laquelle, lorsque la victime d’une infraction pénale a été auditionnée une première fois par la formation de jugement d’une juridiction pénale de première instance et que la composition de cette formation est ultérieurement modifiée, cette victime doit, en principe, être de nouveau auditionnée par la formation nouvellement composée, lorsque l’une des parties à la procédure refuse que ladite formation se fonde sur le procès-verbal de la première audition de ladite victime (arrêt du 29 juillet
2019, Gambino et Hyka, C‑38/18, EU:C:2019:628, point 59).
37 C’est dans ce contexte qu’il y a lieu de replacer la considération, figurant aux points 42 et 43 de l’arrêt du 29 juillet 2019, Gambino et Hyka (C‑38/18, EU:C:2019:628), selon laquelle ceux qui ont la responsabilité de décider de la culpabilité ou de l’innocence de l’accusé doivent, en principe, entendre les témoins en personne et évaluer leur crédibilité, l’un des éléments importants d’un procès pénal équitable étant la possibilité pour l’accusé d’être confronté aux témoins en la présence du
juge qui, au bout du compte, statue sur son sort.
38 Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que la procédure devant le Tribunal ne concernait pas une « procédure pénale », au sens de la directive 2012/29, mais un recours en annulation contre une décision administrative ayant infligé aux requérantes, deux personnes morales, une amende pour violation des règles de concurrence de l’Union.
39 Indépendamment de la question de savoir si, dans de telles circonstances, les requérantes peuvent être assimilées aux accusés d’un procès pénal, il suffit de relever que, en l’espèce, il n’est nullement question d’une nouvelle audition d’un témoin déjà auditionné par une formation de jugement différente, mais d’une éventuelle obligation du Tribunal d’auditionner un témoin dont l’audition a été demandée par les requérantes. Or, aucune telle obligation ne saurait être déduite des points 42 et 43 de
l’arrêt du 29 juillet 2019, Gambino et Hyka (C‑38/18, EU:C:2019:628).
40 Enfin, l’argumentation des requérantes selon laquelle, en substance, le Tribunal ne pouvait pas apprécier la crédibilité des déclarations de M. W. sans avoir entendu celui-ci en tant que témoin doit aussi être écartée.
41 En effet, une audition orale n’est pas le seul moyen permettant d’apprécier la crédibilité des déclarations faites par une personne. Le juge peut notamment, à cette fin, se fonder sur d’autres éléments de preuve qui corroborent ces déclarations ou, au contraire, les contredisent.
42 Or, c’est précisément en raison du fait que certaines déclarations de M. W. étaient contredites par d’autres éléments de preuve soumis au Tribunal que celui-ci a jugé, aux points 74, 102 et 107 de l’arrêt attaqué, visés par les requérantes dans leur moyen, que ces déclarations étaient peu, voire pas, crédibles.
43 Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen du pourvoi comme étant non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du droit « à la confrontation »
Argumentation des parties
44 Les requérantes font valoir que le Tribunal a violé leur droit « à la confrontation », consacré à l’article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, sous d), de la CEDH, en rejetant leur demande de pouvoir interroger elles-mêmes M. W., en sa qualité de témoin à charge.
45 Selon les requérantes, il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que, si une juridiction a utilisé des moyens de preuve et fondé sa décision sur ces moyens, pour respecter le droit « à la confrontation », la possibilité doit être accordée à la défense de prendre position sur les conclusions qui découlent desdits moyens.
46 Les requérantes soutiennent, à cet égard, que, en tant que source essentielle de la demande de clémence de Linpac, M. W. était le principal témoin à charge dans la procédure ayant mené à l’adoption de la décision litigieuse, puis à l’arrêt attaqué. Or, le Tribunal aurait fondé, dans une mesure déterminante, la « condamnation » des requérantes sur les déclarations de M. W. figurant dans cette demande, sans accorder à celles-ci une possibilité de confrontation. Le Tribunal aurait ainsi limité le
droit des requérantes à une telle confrontation sans qu’une raison légitime justifie cette limitation.
47 En effet, les agents de la Commission se seraient entretenus avec M. W. en sa qualité de témoin à charge, en ayant exclu la participation des requérantes à cette audition et sans en avoir rédigé de procès-verbal ni l’avoir communiqué aux requérantes. Pour compenser ce déséquilibre, il aurait été nécessaire de permettre aux requérantes d’interroger M. W. elles-mêmes devant la Commission ou, à tout le moins, devant le Tribunal.
48 La Commission conteste cette argumentation. Elle relève que l’argument des requérantes tiré de l’impossibilité d’interroger elles-mêmes M. W. lors de la procédure administrative est irrecevable, dès lors qu’il ne vise pas l’arrêt attaqué. En tout état de cause, l’ensemble des arguments avancés par les requérantes dans le cadre du deuxième moyen devraient être rejetés comme étant non fondés.
Appréciation de la Cour
49 Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que le Tribunal était tenu, en vertu de l’article 47, deuxième alinéa, et de l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, lus en combinaison avec l’article 6 de la CEDH, d’accéder à leur demande d’auditionner M. W. en tant que témoin afin de leur permettre de l’interroger elles-mêmes, au motif que celui-ci était le « principal témoin à charge » dans la procédure les concernant et aurait été auditionné par la Commission sans que
leurs représentants aient pu participer à cette audition.
50 Ce n’est donc qu’à titre incident que les requérantes évoquent l’audition de M. W. par la Commission, de telle sorte que l’affirmation de cette dernière, selon laquelle un tel argument, invoqué dans un pourvoi, est irrecevable, doit être écartée.
51 S’agissant de l’examen de ce moyen quant au fond, il convient de relever que les requérantes reprochent au Tribunal, précisément, de ne pas avoir entendu M. W. en tant que témoin, de telle sorte que celui-ci ne saurait logiquement être qualifié de « témoin à charge » devant le Tribunal.
52 En outre, il ne ressort pas de l’arrêt attaqué que le Tribunal a tenu compte d’une quelconque déclaration écrite de M. W. produite par la Commission. Les seules déclarations écrites de M.W., prises en considération par le Tribunal, sont, ainsi qu’il ressort des points 34 à 39 de l’arrêt attaqué, celles produites par les requérantes elles-mêmes.
53 S’il ressort du point 36 de l’arrêt attaqué que M. W. a été l’une des sources des déclarations effectuées au titre de la clémence par Linpac, son ancien employeur, sur lesquelles la Commission s’est notamment fondée dans la décision litigieuse, il n’en demeure pas moins que les déclarations de cette entreprise ont été effectuées sous sa propre responsabilité, en connaissance des conséquences négatives potentielles de la présentation d’éléments inexacts (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre
2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 138). Dès lors, le fait que M. W. était l’une des sources de ces déclarations, voire la principale source de celles-ci, ne suffit pas pour le qualifier de « témoin à charge ».
54 L’argument des requérantes selon lequel, puisque la Commission a entendu M. W. antérieurement à l’adoption de la décision litigieuse, hors de la présence des représentants des requérantes, le Tribunal était tenu de convoquer M. W. en tant que témoin pour permettre aux requérantes de l’interroger elles-mêmes, ne saurait non plus prospérer. En effet, les requérantes étaient en mesure de contacter elles-mêmes M. W. afin d’obtenir une déclaration de sa part, ce qu’elles ont d’ailleurs fait, les
déclarations écrites ainsi obtenues ayant été produites devant le Tribunal et prises en considération par celui-ci.
55 Il s’ensuit que les arguments avancés à l’appui du deuxième moyen ne sauraient démontrer que, nonobstant le pouvoir souverain d’appréciation du Tribunal à cet égard, rappelé aux points 28 à 30 du présent arrêt, celui-ci n’a pu valablement refuser d’entendre M. W. en tant que témoin. Partant, le deuxième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité des armes
Argumentation des parties
56 Les requérantes font valoir que le Tribunal a violé le principe d’égalité des armes, qui fait partie du droit à un procès équitable, au sens de l’article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, sous d), de la CEDH. Ce principe implique, selon elles, que le Tribunal aurait dû ordonner l’audition personnelle de M. W. ainsi que des autres témoins dont elles avaient demandé l’audition.
57 Les requérantes rappellent qu’elles avaient indiqué les noms des témoins qu’elles voulaient voir auditionnés par le Tribunal ainsi que les faits qu’elles entendaient prouver par ces témoignages. Or, le Tribunal aurait rejeté la demande d’audition de témoins, en se fondant sur une motivation qui ne satisferait pas aux exigences de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, telles que rappelées, notamment, au paragraphe 164 de l’arrêt du 18 décembre 2018, Murtazaliyeva c. Russie
(CE:ECHR:2018:1218JUD003665805).
58 La Commission estime que le troisième moyen du pourvoi est non fondé et doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
59 S’agissant, en premier lieu, de la violation du principe d’égalité des armes, invoquée par les requérantes, il suffit de relever que, dans la mesure où le Tribunal n’a pas entendu de témoins proposés par la Commission, il ne saurait lui être reproché d’avoir violé ce principe, du fait d’avoir décidé, de la même manière, de ne pas entendre les témoins proposés par les requérantes.
60 En second lieu, dans la mesure où les requérantes reprochent au Tribunal, en substance, une violation de l’obligation de motivation en ce qui concerne le rejet de leur demande d’audition de témoins, il y a lieu de relever que, aux points 232 à 235 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé à suffisance de droit les motifs qui l’ont conduit à considérer qu’il n’était ni nécessaire ni opportun de donner une suite favorable à la demande d’audition de témoins présentée par les requérantes. Ce faisant,
il a respecté l’obligation de motiver ses arrêts.
61 L’arrêt de la Cour EDH du 18 décembre 2018, Murtazaliyeva c. Russie (CE:ECHR:2018:1218JUD003665805), ne saurait remettre en cause les considérations qui précèdent. Si cette juridiction a relevé, au paragraphe 164 de cet arrêt, que le raisonnement des juridictions saisies d’une demande d’audition de témoins doit correspondre aux motifs avancés à l’appui de cette demande, c’est-à-dire qu’il doit être aussi étoffé et détaillé que ces motifs, elle a ajouté, au paragraphe 165 dudit arrêt, que, dès
lors que la CEDH n’exige pas la convocation ou l’interrogation de tout témoin à décharge, les juridictions internes ne sont pas censées donner une réponse détaillée à chaque demande formulée en ce sens par la défense, celles-ci devant toutefois motiver adéquatement leur décision.
62 Or, en l’espèce, le Tribunal a tenu compte des motifs avancés par les requérantes à l’appui de leur demande d’audition de témoins, qu’il a résumés aux points 221 à 225 de l’arrêt attaqué et auxquels il a répondu aux points 232 à 235 de cet arrêt, d’une manière qui ne saurait être considérée comme inadéquate.
63 Il s’ensuit que le troisième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant non fondé.
Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation
Argumentation des parties
64 Les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’obligation de motiver ses décisions. D’une part, il serait impossible de comprendre sur quels indices le Tribunal s’est fondé pour considérer, au point 67 de l’arrêt attaqué, que Silver Plastics avait participé à la prétendue réunion anticoncurrentielle du 13 juin 2002. Le Tribunal n’expliquerait à aucun moment pourquoi les notes manuscrites visées au point 54 de l’arrêt attaqué feraient apparaître une infraction au droit de la concurrence de
l’Union. En outre, au point 63 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’efforcerait uniquement de démontrer en quoi les arguments présentés par les requérantes n’attestent pas nécessairement qu’une autre réunion, dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel et qui s’est tenue le même jour avec la participation des représentants de Silver Plastics, a commencé à 9 h 00 et que, par conséquent, les représentants de cette dernière ne pouvaient pas avoir participé à la réunion anticoncurrentielle tenue à la
même heure. En revanche, les raisons pour lesquelles le Tribunal a considéré que la réunion dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel avait débuté plus tardivement demeureraient indéterminées. Les requérantes soulignent qu’elles ne remettent pas en cause l’appréciation des preuves par le Tribunal, mais dénoncent le fait que celui-ci n’a pas positivement étayé ses suppositions.
65 D’autre part, les requérantes reprochent au Tribunal de s’être borné à affirmer à de nombreuses reprises dans l’arrêt attaqué, sans autre forme de motivation, que les déclarations écrites de M. W. n’étaient pas crédibles.
66 La Commission estime que le quatrième moyen du pourvoi est, en partie, irrecevable, dès lors qu’il vise, en réalité, à contester l’appréciation des preuves par le Tribunal, et, en tout état de cause, non fondé.
Appréciation de la Cour
67 Ainsi que les requérantes l’ont elles‑mêmes souligné, le quatrième moyen du pourvoi vise le contrôle du respect, par le Tribunal, de l’obligation de motiver ses arrêts et ne tend pas à une nouvelle appréciation des faits, pour laquelle la Cour n’est pas compétente au stade du pourvoi. Dès lors, il y a lieu d’écarter l’argument de la Commission selon lequel ce moyen est, en partie, irrecevable.
68 En premier lieu, s’agissant de l’argumentation des requérantes relative au point 67 de l’arrêt attaqué, il y a lieu de relever que le Tribunal y a constaté que, le 13 juin 2002, diverses entreprises concurrentes sur le marché concerné, dont Silver Plastics, s’étaient rencontrées pour discuter des stratégies concernant les prix, en marge d’une réunion, tenue le même jour, dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel.
69 Devant le Tribunal, les requérantes avaient, en substance, soutenu que la réunion dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel et la réunion concernant les prix s’étaient tenues en même temps, de telle sorte que les représentants de Silver Plastics, qui avaient participé à la première réunion, ne pouvaient pas avoir aussi participé à la seconde.
70 Or, aux points 47 à 66 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé, de manière exhaustive, tous les éléments qui, selon lui, démontraient que les représentants de Silver Plastics avaient participé à la réunion anticoncurrentielle concernant les prix. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, il n’était nullement nécessaire pour le Tribunal de déterminer, à cet égard, l’heure exacte de début de la réunion dont l’objet n’était pas anticoncurrentiel. Il a pu, sans violer son obligation de
motivation, considérer, au point 67 de l’arrêt attaqué, qu’une ambiguïté existait quant à l’heure de début de cette dernière réunion.
71 Quant aux notes manuscrites évoquées au point 54 de l’arrêt attaqué, contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, il ressort clairement du point 56 de cet arrêt qu’elles portaient sur les prix pratiqués par diverses entreprises concurrentes, dont Silver Plastics, et que, par conséquent, elles faisaient apparaître une infraction au droit de la concurrence de l’Union.
72 Dès lors, contrairement à ce que soutiennent les requérantes dans leur requête, les points 54, 63 et 67 de l’arrêt attaqué ne font apparaître aucune violation de l’obligation de motivation par le Tribunal.
73 En second lieu, les requérantes reprochent au Tribunal de ne pas avoir motivé son affirmation selon laquelle les déclarations de M. W. qu’elles lui avaient soumises n’étaient pas crédibles.
74 Il y a lieu de relever, à cet égard, que, contrairement à ce que les requérantes laissent entendre, le Tribunal n’a pas procédé à une appréciation de la crédibilité des déclarations de M. W. prises dans leur ensemble.
75 Ainsi qu’il a déjà été relevé au point 42 du présent arrêt, dans plusieurs points de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé que seules certaines affirmations de M. W., figurant dans ses déclarations produites devant lui par les requérantes, étaient peu, voire pas, crédibles, dès lors qu’elles étaient contredites par d’autres éléments de preuve, mentionnés par le Tribunal.
76 Partant, il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir manqué à son obligation de motivation s’agissant du caractère crédible ou non des affirmations de M. W. prises dans leur ensemble.
77 Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003
Argumentation des parties
78 Les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’article 101 TFUE et l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003, en jugeant que l’infraction en cause en ENO visée par la décision litigieuse constituait une infraction unique et continue ayant trait au marché des barquettes rigides, qui a notamment porté sur la période allant du 13 juin 2002 au 24 août 2004. Le Tribunal n’aurait pas démontré l’existence, au cours de cette période, sur le marché concerné, d’un plan d’ensemble qui se
serait prolongé dans des infractions individuelles pouvant être reliées entre elles. Au contraire, il concéderait lui-même, au point 177 de l’arrêt attaqué, qu’une réunion ayant pour objet ledit marché se serait tenue pour la première fois le 24 août 2004.
79 L’erreur commise par le Tribunal aurait eu des conséquences sur le montant de l’amende infligée aux requérantes, dans la mesure où celle-ci aurait été fixée à partir d’un montant de départ basé sur le chiffre d’affaires réalisé durant l’exercice 2006 sur la base, notamment, des ventes de barquettes rigides. Ce montant aurait, ensuite, été multiplié par le nombre d’années de l’infraction en cause, ce qui aurait eu pour conséquence d’intégrer dans le calcul de cette amende le chiffre d’affaires
réalisé au moyen des ventes de barquettes rigides, pour la période antérieure au mois de septembre 2004.
80 La Commission conteste l’argumentation des requérantes et estime que le cinquième moyen du pourvoi doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
81 Il y a lieu de rappeler que, la notion d’« infraction unique et continue », telle que reconnue dans la jurisprudence de la Cour, suppose l’existence d’un « plan d’ensemble », dans lequel s’inscrivent différents actes, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence dans le marché intérieur, et ce indépendamment du fait qu’un ou plusieurs de ces actes pourraient également constituer, en eux-mêmes et pris isolément, une violation de l’article 101 TFUE (arrêt du 26 janvier 2017,
Villeroy & Boch/Commission, C‑644/13 P, EU:C:2017:59, point 47 et jurisprudence citée).
82 Il ressort de cette jurisprudence que la participation d’une entreprise à une infraction unique et continue n’exige pas sa participation directe à l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant cette infraction et qu’il n’est pas non plus exigé que toutes les entreprises participant à une infraction unique et continue soient actives sur le même marché (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch/Commission, C‑644/13 P, EU:C:2017:59, points 49 et 51 ainsi que
jurisprudence citée).
83 En l’espèce, il ressort du point 177 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a constaté, dans le cadre de son appréciation souveraine des faits, que l’infraction en cause en ENO, à laquelle les requérantes ont participé, avait trait aussi bien aux barquettes en polystyrène qu’aux barquettes rigides. Par ces motifs, le Tribunal a dès lors considéré qu’il existait un « plan d’ensemble » qui couvrait tant l’un que l’autre de ces produits.
84 Au regard de cette constatation, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a entériné la constatation figurant dans la motivation de la décision litigieuse, selon laquelle les requérantes avaient participé à une infraction unique et continue en ENO portant tant sur les barquettes en polystyrène que sur les barquettes rigides, pendant la période allant du 13 juin 2002 au 29 octobre 2007.
85 En effet, à supposer que la première réunion ayant eu pour objet le marché des barquettes rigides n’ait eu lieu que le 24 août 2004, comme l’allèguent les requérantes, ce fait serait sans pertinence s’agissant de leur participation à une infraction unique et continue ayant trait tant aux barquettes en polystyrène qu’aux barquettes rigides, dès lors que, comme l’a constaté le Tribunal, la mise en œuvre du « plan d’ensemble », au sens de la jurisprudence de la Cour visée au point 81 du présent
arrêt, dans lequel s’inscrivaient également les actions relatives aux barquettes rigides, a débuté le 13 juin 2002.
86 Il s’ensuit que le cinquième moyen du pourvoi doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, en ce qui concerne la constatation de l’existence d’une unité économique
Argumentation des parties
87 Les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’article 23, paragraphe 2, première et deuxième phrases, du règlement no 1/2003, lu en combinaison avec l’article 101, paragraphe 1, TFUE, en ce qu’il a fondé son raisonnement sur la prémisse selon laquelle elles formaient une unité économique, au mépris des éléments de fait et de preuve qu’elles avaient avancés et qui étaient de nature à renverser la présomption en ce sens, fondée sur la détention de la quasi-totalité du capital de Silver
Plastics par Johannes Reifenhäuser Holding. Or, ainsi qu’il ressortirait de plusieurs éléments invoqués devant le Tribunal, Johannes Reifenhäuser Holding ne se serait jamais présentée à l’égard des tiers en tant que propriétaire de Silver Plastics. Johannes Reifenhäuser Holding ne serait qu’une simple coquille administrative et aurait dû être ignorée aux fins de la détermination de l’existence d’une unité économique. Son objet social, largement générique, ne s’opposerait pas à une telle
considération, contrairement à ce qui serait affirmé au point 269 de l’arrêt attaqué.
88 La Commission conteste l’argumentation des requérantes.
Appréciation de la Cour
89 Il y a lieu de rappeler que, au point 265 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que, pendant la période concernée par l’infraction en cause, Johannes Reifenhäuser Holding détenait la quasi-totalité (99,75 %) du capital de Silver Plastics.
90 Le Tribunal a, dès lors, considéré au point 266 de l’arrêt attaqué que la Commission pouvait se fonder sur la présomption selon laquelle, dans le cas particulier où une société mère détient, directement ou indirectement, la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de concurrence de l’Union, il existe une présomption réfragable selon laquelle cette société mère exerce effectivement une influence déterminante sur sa filiale (voir, en ce sens,
arrêts du 25 octobre 1983, AEG-Telefunken/Commission, 107/82, EU:C:1983:293, point 50, et du 16 juin 2016, Evonik Degussa et AlzChem/Commission, C‑155/14 P, EU:C:2016:446, point 28).
91 Après avoir analysé, aux points 267 à 279 de l’arrêt attaqué, les arguments et éléments de preuve invoqués par les requérantes, le Tribunal a considéré, au point 280 de cet arrêt, que ceux-ci ne suffisaient pas pour renverser la présomption mentionnée au point précédent.
92 Par leur argumentation avancée à l’appui du présent moyen, les requérantes réitèrent, en substance, les arguments qu’elles avaient développés devant le Tribunal pour démontrer l’absence d’exercice d’influence déterminante de Johannes Reifenhäuser Holding sur Silver Plastics, sans préciser quelle serait l’erreur que le Tribunal aurait commise dans le cadre de cette appréciation.
93 Or, selon la jurisprudence constante de la Cour, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Ne répond pas à cette exigence un pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont seraient entachés l’arrêt ou l’ordonnance attaqués, se limite à répéter ou à reproduire les
moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal (ordonnance du 4 juillet 2012, Région Nord-Pas-de-Calais/Commission, C‑389/11 P, non publiée, EU:C:2012:408, point 25 et jurisprudence citée).
94 Par conséquent, le sixième moyen doit être écarté comme étant irrecevable.
Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, en ce qui concerne le plafond de l’amende
Argumentation des parties
95 Les requérantes reprochent au Tribunal une violation de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1/2003, en ce qu’il a inclus à tort dans le calcul de l’amende qui leur a été solidairement infligée le chiffre d’affaires réalisé au titre de l’activité par la suite transférée à Maschinenfabrik, ce qui a conduit au dépassement du plafond prévu par cette disposition, correspondant à 10 % du chiffre d’affaires de chaque entreprise concernée par l’infraction. Elles reprochent au
Tribunal d’avoir méconnu la jurisprudence de la Cour relative à l’application de ladite disposition, en ce qu’il a, au point 311 de l’arrêt attaqué, retenu la période de l’infraction comme seul critère pertinent pour déterminer le chiffre d’affaires à prendre en considération aux fins du calcul du plafond de l’amende. Selon les requérantes, il y avait lieu, pour déterminer ce chiffre d’affaires, de choisir un exercice social approprié, eu égard à l’activité économique au cours de la période
infractionnelle, puis d’avoir égard, à titre de correction, à la capacité contributive de l’entreprise concernée au moment de l’adoption de la décision infligeant l’amende. Elles ajoutent que, en l’espèce, leur capacité contributive avait sensiblement diminué à la date de l’adoption de la décision litigieuse, ce dont la Commission aurait été consciente.
96 La Commission conteste l’argumentation des requérantes et estime que le septième moyen doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
97 Aux termes de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, pour chaque entreprise et association d’entreprises ayant participé à une infraction aux dispositions de l’article 101 ou 102 TFUE, l’amende infligée ne peut excéder 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.
98 Au point 307 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la décision litigieuse a été adoptée le 24 juin 2015 et, dans la mesure où l’exercice social de Johannes Reifenhäuser Holding se terminait le 30 juin de chaque année, que l’« exercice social précédent », au sens de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, était, dans son cas, l’exercice social 2013/2014, qui a pris fin le 30 juin 2014.
99 Il ressort du point 309 de cet arrêt que ce n’est que le 28 mai 2015, à savoir à une date postérieure à la fin de l’exercice social 2013/2014, qu’a été dûment enregistrée la scission opérée entre Johannes Reifenhäuser Holding et la future Maschinenfabrik. Ainsi que le Tribunal l’a considéré au même point dudit arrêt, le fait que cette cession avait un effet rétroactif au 30 septembre 2014 était sans influence, cette dernière date étant aussi postérieure au 30 juin 2014.
100 Au regard de ces éléments, non contestés par les requérantes, le Tribunal a fait une correcte application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, en prenant en considération, aux fins du calcul du plafond de l’amende qui leur a été infligée, le chiffre d’affaires réalisé par Johannes Reifenhäuser Holding au cours de l’exercice social 2013/2014, en ce compris celui réalisé dans le cadre de l’activité qui, suite à la scission enregistrée le 28 mai 2015, sera celle de
Maschinenfabrik.
101 L’argumentation des requérantes, selon laquelle leur capacité contributive aurait sensiblement diminué à la date de l’adoption de la décision litigieuse à la suite de la scission de Johannes Reifenhäuser Holding ayant donné naissance à Maschinenfabrik, ne saurait conduire à une conclusion différente.
102 Certes, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, pour la détermination de la notion d’« exercice social précédent », la Commission doit apprécier, dans chaque cas d’espèce et au vu de son contexte ainsi que des objectifs poursuivis par le régime de sanctions établi par le règlement no 1/2003, l’impact recherché sur l’entreprise concernée, notamment en tenant compte d’un chiffre d’affaires qui reflète la situation économique réelle de celle-ci durant la période au cours de laquelle
l’infraction a été commise. Dans des situations dans lesquelles le chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise concernée ne donne aucune indication utile sur sa situation économique réelle et sur le niveau approprié de l’amende à lui infliger, la Commission est habilitée à se rapporter à un autre exercice social afin d’être en mesure d’évaluer correctement les ressources financières de cette entreprise et d’assurer à l’amende un caractère dissuasif suffisant et proportionné (voir, en ce sens,
arrêt du 15 mai 2014, 1. garantovaná/Commission, C‑90/13 P, non publié, EU:C:2014:326, points 15 à 17 et jurisprudence citée).
103 Toutefois, les faits invoqués par les requérantes à l’appui de leur sixième moyen devant le Tribunal, à savoir la scission de Johannes Reifenhäuser Holding ayant donné naissance à Maschinenfabrik à une date largement postérieure à la période au cours de laquelle l’infraction en cause a été commise, n’étaient nullement de nature à jeter un doute sur la capacité du chiffre d’affaires réalisé par Johannes Reifenhäuser Holding au cours de l’exercice 2013/2014 à fournir une indication utile sur la
situation économique réelle de cette entreprise durant la période au cours de laquelle cette infraction a été commise et sur le niveau approprié de l’amende à lui infliger.
104 Au contraire, si l’on admettait qu’une entreprise ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l’Union puisse faire sensiblement diminuer, par la cession à un tiers d’un secteur de ses activités quelques jours avant l’adoption de la décision lui infligeant une amende, le plafond que cette amende ne doit en aucun cas dépasser, l’efficacité des sanctions prévues par le règlement no 1/2003 serait sérieusement compromise.
105 C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a tenu compte, aux fins du calcul du plafond de l’amende qui a été infligée solidairement aux requérantes, du chiffre d’affaires de Johannes Reifenhäuser Holding réalisé par celle-ci au cours de l’exercice social 2013/2014.
106 Il s’ensuit que le septième moyen doit être écarté comme étant non fondé.
107 Partant, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.
Sur les dépens
108 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
109 En vertu de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi conformément à l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute personne qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
110 Les requérantes ayant succombé en leur moyens et la Commission ayant conclu à leur condamnation aux dépens, elles supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Silver Plastics GmbH & Co. KG et Johannes Reifenhäuser Holding GmbH & Co. KG supportent, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.