ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)
30 juin 2021 (*)
« Fonction publique – Agents temporaires – Contrat à durée déterminée – Décision de non-renouvellement – Harcèlement moral – Détournement de pouvoir – Devoir de sollicitude – Égalité de traitement – Responsabilité »
Dans l’affaire T‑641/19,
FD, représenté par M^e M. Casado García-Hirschfeld, avocate,
partie requérante,
contre
Entreprise commune européenne pour ITER et le développement de l’énergie de fusion, représentée par MM. R. Hanak et G. Poszler, en qualité d’agents, assistés de M^e B. Wägenbaur, avocat,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation, en substance, de la décision de l’Entreprise commune européenne pour ITER et le développement de l’énergie de fusion du 3 décembre 2018 de ne pas renouveler le contrat à durée déterminée du requérant et, d’autre part, à la réparation des préjudices matériel et moral que le requérant aurait prétendument subis à la suite de cette décision, concernant une stratégie globale de harcèlement dont il estime
avoir été victime,
LE TRIBUNAL (première chambre),
composé de MM. H. Kanninen, président, M. Jaeger (rapporteur) et M^me N. Półtorak, juges,
greffier : M. L. Ramette, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 13 janvier 2021,
rend le présent
Arrêt
I. Faits à l’origine du litige
1 En 2009, le requérant, FD, a été engagé en tant qu’agent temporaire, conformément à l’article 2, sous a), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), par l’Entreprise commune européenne pour ITER et le développement de l’énergie de fusion (ci-après « Fusion for Energy »).
2 Entre 2009 et 2011, le requérant a exercé ses fonctions au sein de l’unité « Bâtiment, construction et gestion des bâtiments » de Fusion for Energy. Au cours de ces années, il était responsable de la construction du premier bâtiment pour le projet international de construction et d’exploitation d’un réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER).
3 En 2011, le requérant a été transféré au département « Gestion de projets » (Project Management) (ci-après le « département PM ») de l’unité « Planification et contrôle des programmes » (Programme Planning and Controlling).
4 Le 20 août 2013, le requérant a reçu une notification portant sur le renouvellement de son contrat pour une période de cinq ans, soit jusqu’au 31 mars 2019.
5 En 2016, le requérant a été promu au grade AD 7.
6 Le 9 septembre 2016, le requérant a présenté sa candidature, dans le cadre de la procédure F4E/INTERNAL/AD 5-12/2016/20146 (ci-après la « procédure 2016/20146 »), pour le poste de chef d’équipe au sein de l’unité « Planification et contrôle des programmes » de Fusion for Energy.
7 À cette date, le précédent supérieur hiérarchique du requérant avait été remplacé par C. Le requérant soutient que, lors de leur première rencontre, ce dernier lui a demandé de retirer sa candidature. Il affirme également que C l’a menacé de ne pas renouveler son contrat s’il ne le faisait pas, ce que Fusion for Energy conteste.
8 Le 10 octobre 2016, Fusion for Energy a informé le requérant que, après avoir considéré attentivement toutes les candidatures, il avait été décidé de ne pas l’inviter à un entretien dans le cadre de la procédure 2016/20146.
9 En réponse à la demande du requérant, adressée au service des ressources humaines de Fusion for Energy, de motiver cette décision, ledit service lui a fait savoir qu’il répondait aux critères essentiels et à certains autres critères qui constituaient un avantage. Cependant, même si le requérant était un membre du personnel apprécié, à ce stade de son développement personnel, il n’était pas jugé apte pour ce poste de chef d’équipe.
10 En mai 2017, le requérant a appris que le poste de chef d’équipe en cause avait été externalisé et pourvu par D, qui figurait sur la liste de réserve de la procédure de sélection F4E/TA/AD 9/2011/0151 (ci-après la « procédure 2011/0151 »).
11 Le requérant affirme que, après l’entrée en service de D, C a décidé de lui retirer toutes les responsabilités pour lesquelles il avait été recruté et promu en 2016 et lui a confié, d’une part, des objectifs génériques et irréalisables et, d’autre part, certaines tâches en dessous de ses compétences, telles qu’afficher des informations aux murs et mettre en place des écrans de télévision dans les salles et halls des bâtiments. Fusion for Energy conteste ces affirmations.
12 Par une note du 7 septembre 2018, le directeur de Fusion for Energy, en tant qu’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC »), a informé le requérant de son intention de ne pas renouveler son contrat. La note contenait, en annexe, un document, signé par D, expliquant les motifs de la proposition de ne pas renouveler le contrat du requérant. Le directeur de Fusion for Energy invitait le requérant à présenter ses observations sur cette note, le cas échéant lors
d’une réunion.
13 Le 2 novembre 2018, le requérant a envoyé une lettre contenant ses observations.
14 Le 5 novembre 2018, la réunion envisagée dans la note du 7 septembre 2018 du directeur de Fusion for Energy a eu lieu.
15 Par lettre du 3 décembre 2018, le requérant a reçu notification de la décision de non-renouvellement de son contrat de travail (ci-après la « décision attaquée »).
16 Le 14 février 2019, le requérant a adressé au directeur de Fusion for Energy un document unique portant le titre « Réclamation sur pied de l’article 90, paragraphe 2, du Statut et demande d’assistance prévue dans l’article 24 du Statut […] avec plainte pour harcèlement moral ».
17 Par décision du 14 juin 2019, l’AHCC a rejeté la réclamation du requérant contre la décision attaquée (ci-après le « rejet de la réclamation ») ainsi que sa demande d’assistance (ci-après le « rejet de la demande d’assistance »).
II. Procédure et conclusions des parties
18 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 septembre 2019, le requérant a introduit le présent recours.
19 Le 20 décembre 2019, Fusion for Energy a déposé le mémoire en défense.
20 Le 20 février 2020, le requérant a déposé la réplique.
21 Le 11 mai 2020, Fusion for Energy a déposé la duplique.
22 Par acte du 2 juin 2020, le requérant a formulé une demande motivée, au titre de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, aux fins d’être entendu dans le cadre de la phase orale de la procédure.
23 Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal a fait droit à la demande du requérant et a ouvert la phase orale de la procédure.
24 Le 6 novembre 2020, le président de la première chambre a fait droit à la demande de report d’audience, présentée par Fusion for Energy, en raison de l’empêchement de l’un de ses représentants lié à la COVID-19. Ainsi, l’audience, prévue initialement le 10 novembre 2020, a été reportée.
25 Le même jour, le requérant a déposé des observations sur la demande de report d’audience présentée par Fusion for Energy.
26 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 13 janvier 2021.
27 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée et, pour autant que de besoin, le rejet de la réclamation ;
– condamner Fusion for Energy à des dommages et intérêts en raison des préjudices subis ;
– condamner Fusion for Energy aux dépens.
28 Fusion for Energy conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner le requérant aux dépens.
III. En droit
A. Sur l’objet du litige
29 Selon une jurisprudence constante, la réclamation administrative, telle que visée à l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, le recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre
lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 27 octobre 2016, CW/Parlement, T‑309/15 P, non publié, EU:T:2016:632, point 27 et jurisprudence citée).
30 En l’espèce, il y a lieu de constater que le rejet de la réclamation confirme la décision attaquée. La circonstance que l’AHCC a été amenée, en réponse aux arguments avancés par le requérant dans la réclamation, à apporter des précisions concernant les motifs de la décision attaquée ne saurait justifier que le rejet de la réclamation soit considéré comme un acte autonome faisant grief au requérant, la motivation dudit rejet coïncidant, en substance, avec la décision contre laquelle cette
réclamation a été dirigée.
31 Partant, en application de la jurisprudence citée au point 29 ci-dessus, il convient de considérer que l’acte faisant grief au requérant est la décision attaquée, dont la légalité doit être examinée en prenant également en considération la motivation figurant dans le rejet de la réclamation.
B. Sur le fond
1. Sur les conclusions en annulation
32 À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant soulève trois moyens, tirés, le premier, d’une erreur d’appréciation, d’irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146, d’un détournement de pouvoir et d’une violation de l’interdiction de harcèlement, le deuxième, d’une violation du principe de bonne administration, du devoir de sollicitude et de l’article 8 du RAA et, le troisième, de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination.
a) Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation, d’irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146, d’un détournement de pouvoir et d’une violation de l’interdiction de harcèlement
33 À l’appui de son premier moyen, le requérant soulève, en substance, quatre branches, tirées, la première, d’une erreur d’appréciation, la deuxième, d’irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146, la troisième, d’une violation de l’interdiction de harcèlement et, la quatrième, d’un détournement de pouvoir.
34 Avant d’examiner le bien-fondé de ce moyen, il convient de se prononcer sur la recevabilité des troisième et deuxième branches, que Fusion for Energy conteste.
1) Sur la recevabilité des troisième et deuxième branches, tirées de la violation de l’interdiction de harcèlement et d’irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146
35 En premier lieu, en ce qui concerne la troisième branche du premier moyen, Fusion for Energy considère qu’elle est irrecevable, dans la mesure où le requérant n’a pas introduit de réclamation contre le rejet de la demande d’assistance.
36 Dans la réplique, le requérant prend acte du fait que Fusion for Energy n’examine pas le harcèlement invoqué dans la troisième branche de son premier moyen car elle la considère irrecevable. Par ailleurs, interrogé par le Tribunal lors de l’audience, le requérant a indiqué ne pas contester la décision attaquée en ce qui concerne le rejet de la demande d’assistance.
37 Il convient de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle, même si, en raison de sa nature, l’existence d’un harcèlement moral ne peut, par principe, être invoquée qu’au soutien de conclusions aux fins d’annulation dirigées contre le rejet d’une demande d’assistance (arrêt du 13 décembre 2017, HQ/OCVV, T‑592/16, non publié, EU:T:2017:897, point 95), un moyen tiré d’un prétendu harcèlement peut, par exception, être invoqué à l’encontre d’une décision de non-renouvellement s’il
apparaît qu’un lien existe entre le harcèlement en cause et les motifs de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, HQ/OCVV, T‑592/16, non publié, EU:T:2017:897, point 96) puisque, dans un tel cas, cela signifierait que l’AHCC, par l’entremise de ses fonctionnaires et de ses agents hiérarchiquement élevés, aurait usé de son pouvoir en vue d’atteindre un but illégal au regard de l’article 12 bis du statut, lequel prévoit que « [t]out fonctionnaire s’abstient de toute forme de
harcèlement moral et sexuel » (voir, en ce sens, arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 92).
38 Cependant, dans le cadre d’un recours visant l’annulation d’une décision de non-renouvellement, il faut que la personne intéressée démontre l’incidence des agissements qui seraient constitutifs d’un harcèlement moral sur la teneur de l’acte attaqué ou, plus généralement, le lien entre le harcèlement en cause et les motifs de cet acte (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, HQ/OCVV, T‑592/16, non publié, EU:T:2017:897, point 96 et jurisprudence citée).
39 En outre, la jurisprudence précise également que, dans ce contexte, le contrôle du juge est limité à la vérification de l’erreur manifeste commise par l’AHCC (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 6 juin 2019, Bonnafous/EACEA, T‑614/17, non publié, EU:T:2019:381, point 223).
40 En l’espèce, il convient de relever que, même si, lors de l’audience, le requérant a précisé que l’annulation du rejet de la demande d’assistance ne faisait pas l’objet de son recours, il est néanmoins recevable à invoquer l’existence d’un harcèlement moral au soutien de ses conclusions visant l’annulation de la décision attaquée.
41 Partant, la fin de non-recevoir soulevée par Fusion for Energy à l’encontre de la troisième branche du premier moyen doit être rejetée.
42 En second lieu, en ce qui concerne la deuxième branche du premier moyen, Fusion for Energy fait valoir qu’elle est également irrecevable, dans la mesure où les prétendues irrégularités, d’une part, de la procédure 2011/0151 et, d’autre part, de la procédure 2016/20146 concernent des événements qui se sont produits en 2016 et en 2017.
43 Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, dans les recours introduits par des fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge de l’Union européenne ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés, devant le juge de l’Union, par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas
nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (voir arrêt du 28 mai 2020, Cerafogli/BCE, T‑483/16 RENV, non publié, EU:T:2020:225, point 92 et jurisprudence citée).
44 En outre, la jurisprudence précise que toute décision, adoptée lors de la période pendant laquelle une personne soutient avoir été victime d’un prétendu harcèlement, dont la légalité n’a pas été contestée, en tant que telle, est un élément factuel qui peut constituer un indice de harcèlement à prendre en compte parmi d’autres, sans qu’il doive être procédé à un examen de sa légalité ou que l’épuisement des délais de recours à son égard ne fasse obstacle à ce que le juge constate l’existence
d’un harcèlement. Par ailleurs, la jurisprudence précise qu’il appartient au juge d’apprécier si une décision en tant qu’élément factuel peut être considérée comme étant un indice, en tenant compte de l’ensemble du contexte factuel pertinent (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, Faita/CESE, F‑92/11, EU:F:2013:130, point 57).
45 Or, si, certes, en l’espèce, comme le fait valoir Fusion for Energy, les procédures 2011/0151 et 2016/20146 sont devenues définitives, le requérant invoque cependant des irrégularités dans ces procédures en vue de démontrer le harcèlement dont il estime avoir été victime. Ainsi, les arguments du requérant relatifs à ces irrégularités sont, en substance, liés à ses arguments relatifs au harcèlement contenus dans sa réclamation contre la décision attaquée et soulevés dans le cadre de la
troisième branche du premier moyen.
46 Partant, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par Fusion for Energy à l’encontre de la deuxième branche du premier moyen.
2) Sur le bien-fondé du premier moyen
i) Sur la première branche du premier moyen, tirée d’une erreur d’appréciation
47 Le requérant rappelle que, dans la décision attaquée, le non-renouvellement de son contrat est « fondé sur les besoins de l’organisation (réduction du tableau d’effectifs décidée par l’autorité budgétaire) dont la conséquence est la réorganisation du département PM impliquant la réaffectation de [ses] tâches et la suppression de [son] poste ». Cette motivation serait entachée d’une erreur d’appréciation.
48 En effet, le requérant soutient que, dans le tableau d’effectifs présenté par le directeur de Fusion for Energy le 27 juillet 2018 lors de la réunion de l’ensemble du personnel (« All hands meeting », ci-après la « réunion AHM ») et par C les 11 et 12 décembre 2018 lors de la 42^e réunion du conseil de gouvernance de Fusion for Energy (ci-après la « 42^e réunion du CG »), Fusion for Energy estimait qu’un total de neuf postes, à savoir trois postes d’agent temporaire et six postes d’agent
contractuel, devaient être supprimés pour l’année 2020, en plus de trois postes d’agent contractuel pour l’année 2019, tout en se référant à des postes de courte durée. À cet égard, le requérant se fonde, en particulier, sur les annexes A.11 à A.14 de la requête.
49 Selon le requérant, la distinction entre les postes de courte durée et les postes de longue durée est bien présente dans le programme annuel et pluriannuel 2018-2022 (Annual and Multi-Annual Programme, ci-après l’« AMAP 2018-2022 »), annexé à la décision du 1^er décembre 2017 du conseil de gouvernance de Fusion for Energy.
50 L’AMAP 2018-2022 prévoirait que les contrats de longue durée sont conclus avec des agents temporaires ou avec des agents contractuels. De manière exceptionnelle, en raison de pics de charge de travail au sein de Fusion for Energy, des contrats de courte durée pourraient être conclus avec des agents temporaires ou avec des agents contractuels.
51 Ainsi, selon le requérant, en considérant que le personnel de Fusion for Energy, en 2017, était composé de 225 agents temporaires, 174 agents contractuels et 51 fonctionnaires, l’interprétation des contrats de travail de courte durée est étroitement liée à leur caractère exceptionnel. En effet, plus de 80 % des personnes travaillant au sein de Fusion for Energy seraient des agents temporaires dont le contrat peut être à durée indéterminée à partir du deuxième renouvellement ou des agents
contractuels dont le contrat est à durée déterminée. Or, selon le requérant, qu’il s’agisse de contrats d’agent temporaire ou d’agent contractuel, ces types de contrats ne peuvent en aucun cas être considérés en eux-mêmes comme des contrats de courte durée. Partant, le requérant considère qu’une différence existe entre les agents temporaires ayant vocation à obtenir un contrat à durée indéterminée et les agents temporaires ayant un contrat de courte durée.
52 Le requérant ajoute que, d’une part, il ressort du rapport annuel 2017 de Fusion for Energy que, entre 2016 et 2017, 21 procédures de sélection ont été effectuées et, d’autre part, au cours de l’année 2017, 19 agents temporaires et 30 agents contractuels ont pris leurs fonctions.
53 Ainsi, selon le requérant, l’ensemble de ces éléments prouve que la suppression de son poste ne correspond pas au tableau d’effectifs prévu pour les années 2019 et 2020, étant donné que ce tableau prévoit seulement que trois postes d’agent temporaire ayant un contrat de courte durée soient restitués au cours de l’année 2020.
54 Selon le requérant, le tableau d’effectifs est contraignant, dans la mesure où il est reproduit dans l’AMAP 2018-2022 approuvé par l’autorité budgétaire. Il observe que, selon les termes de l’AMAP 2018-2022, seule la suppression de postes de courte durée était prévue.
55 À la lumière de ces considérations, le requérant conclut que la première évaluation détaillée des postes à supprimer aurait dû être axée sur les postes de courte durée.
56 Fusion for Energy conteste les arguments du requérant.
57 En premier lieu, l’AMAP 2018-2022, adopté le 1^er décembre 2017, se compose de plusieurs chapitres, parmi lesquels le plan d’estimation des ressources (Resource estimate plan) qui établit que le budget est le seul instrument qui détermine les dépenses nécessaires pour Fusion for Energy, y compris les dépenses de personnel.
58 En deuxième lieu, l’AMAP 2018-2022 prévoit que le budget de Fusion for Energy ne doit pas être modifié jusqu’à la fin de l’année 2020.
59 En troisième lieu, l’AMAP 2018-2022 reproduit deux tableaux.
60 Le premier tableau, repris à l’annexe A.14 de la requête, contient le nombre total d’employés autorisé par l’autorité budgétaire pour la période comprise entre 2015 et 2022 au sein de Fusion for Energy. Il convient de constater que ce tableau ne fait aucune distinction entre agents ayant un contrat de longue durée et agents ayant un contrat de courte durée.
61 Le second tableau, repris également à l’annexe A.14 de la requête, contient le nombre total de fonctionnaires et d’agents temporaires dans les groupes de fonctions AD et AST autorisé par l’autorité budgétaire pour la période comprise entre 2016 et 2022.
62 Il ressort de ce second tableau que, à partir de l’année 2018 et jusqu’à l’année 2022, l’autorité budgétaire a autorisé que le nombre total d’employés appartenant au groupe de fonctions AD, fonctionnaires et agents temporaires confondus, soit de 204. Cependant, il ressort du même tableau que, en ce qui concerne les agents temporaires, si, pour les grades compris entre AD 10 et AD 14, une augmentation constante de postes est envisagée au fil des années, en revanche, pour les grades compris
entre AD 5 et AD 8, une réduction constante de postes est prévue. Cette dynamique fait que, pour que le nombre total d’agents temporaires de grade AD reste constant, si le nombre d’administrateurs d’un grade augmente, il doit forcément diminuer dans d’autres grades. En particulier, en ce qui concerne le grade AD 7, qui était le grade du requérant au moment de l’adoption de la décision attaquée, le second tableau indique que, pour l’année 2018, le nombre de postes autorisés par l’autorité budgétaire
était de 28, pour l’année 2019, de 21, pour l’année 2020, de 15, pour l’année 2021, de 11 et, pour l’année 2022, de 8. Ainsi, ce tableau résume, pour chaque année comprise entre 2016 et 2022, le nombre d’administrateurs que l’autorité budgétaire a autorisé et que, par conséquent, Fusion for Energy doit respecter.
63 S’agissant de l’argument du requérant fondé sur les annexes A.11 à A.14 de la requête, selon lequel le tableau d’effectifs prévoyait uniquement une réduction des contrats de courte durée, il n’est pas fondé.
64 En ce qui concerne la présentation faite par C les 11 et 12 décembre 2018 lors de la 42^e réunion du CG, contenue dans l’annexe A.11 de la requête, il convient de relever qu’elle ne concerne pas l’AMAP 2018-2022, mais le programme annuel et multiannuel 2020-2024 (ci-après l’« AMAP 2020-2024 »). Par ailleurs, l’affirmation du requérant se fonde sur une seule page de ladite présentation, dans laquelle il est indiqué que, pour l’année 2020, Fusion for Energy devrait rendre neuf postes de courte
durée, dont six d’agent contractuel et trois d’agent temporaire, qui s’ajouteraient aux trois postes d’agent contractuel rendus au cours de l’année 2019, ce qui lui permettrait d’avoir, pour la période comprise entre 2021 et 2023, un tableau d’effectifs de 455 postes et, pour l’année 2024, de 440 postes.
65 L’annexe A.12 de la requête reproduit la présentation faite par le directeur de Fusion for Energy au cours de la réunion AHM, établissant que, même si celle-ci était censée rendre 45 postes de courte durée, elle avait réussi à négocier le maintien de 33 postes et à ne rendre, au cours de l’année 2019, que trois postes d’agent contractuel et, au cours de l’année 2020, que six postes d’agent contractuel et trois postes d’agent temporaire.
66 L’annexe A.13 de la requête reproduit la décision du conseil de gouvernance de Fusion for Energy du 1^er décembre 2017 adoptant l’AMAP 2018-2022.
67 Contrairement à ce que soutient le requérant, ces différents documents ne démontrent pas que le tableau d’effectifs excluait que son poste puisse faire l’objet d’une suppression.
68 En effet, il y a lieu de relever que, à l’exception de l’annexe A.14 de la requête, qui reproduit une partie de l’AMAP 2018-2022 et, notamment, les deux tableaux cités ci-dessus et la description de la distinction entre postes de longue durée et postes de courte durée, les autres annexes ne contiennent pas de tableaux détaillés et, partant, leur valeur probante doit être relativisée.
69 En premier lieu, la présentation faite par C lors de la 42^e réunion du CG concerne l’AMAP 2020-2024 et celle faite par le directeur de Fusion for Energy au cours de la réunion AHM, même si elle ne se réfère pas à l’AMAP 2020-2024, en reprend le contenu en ce qui concerne les postes devant être rendus au cours de l’année 2019 et de l’année 2020.
70 En deuxième lieu, bien que l’AMAP 2018-2022 fasse une distinction entre postes de courte durée et postes de longue durée, il ne découle ni des tableaux ni de la description de cette distinction qu’une première évaluation détaillée des postes à supprimer, par Fusion for Energy, aurait dû être axée prioritairement sur les postes de courte durée ayant un caractère exceptionnel.
71 En troisième lieu, il ressort du second tableau reproduit dans l’AMAP 2018-2022 que, pour le grade AD 7, à savoir celui du requérant, l’autorité budgétaire a autorisé une réduction progressive de postes entre 2018 et 2022. Par ailleurs, il convient de relever qu’il ressort de la présentation faite au cours de la 42^e réunion du CG que l’objectif de Fusion for Energy est de garder 455 postes pour la période comprise entre 2021 et 2023 et 440 postes pour l’année 2024. Ainsi, même si la
présentation faite au cours de la 42^e réunion du CG est relative à une période postérieure à l’adoption de la décision attaquée, elle concerne néanmoins partiellement la période couverte par l’AMAP 2018-2022 et démontre la tendance constante à la réduction de postes au sein de Fusion for Energy.
72 En quatrième lieu, il convient de relever que, en tout état de cause, en ce qui concerne les postes de courte durée, il ressort de l’AMAP 2018-2022 que, en 2016, « l’autorité budgétaire a mis à disposition de Fusion for Energy 21 postes d’agent temporaire ayant le grade AD 6 ». Ainsi, même en admettant que la distinction proposée par le requérant entre postes de courte durée et postes de longue durée puisse être pertinente, cela n’aurait eu aucune incidence sur sa situation personnelle, dans
la mesure où, au moment de l’adoption de la décision attaquée, il avait le grade AD 7.
73 À la lumière de ces considérations, l’argument du requérant selon lequel Fusion for Energy aurait dû d’abord supprimer les postes de courte durée et ensuite, le cas échéant, les autres postes manque en fait.
74 Partant, la première branche du premier moyen doit être rejetée.
ii) Sur les deuxième, troisième et quatrième branches du premier moyen, tirées d’irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146, de la violation de l’interdiction de harcèlement moral et d’un détournement de pouvoir
75 Par la deuxième branche de son premier moyen, le requérant fait valoir que les procédures 2016/20146 et 2011/0151 sont irrégulières, notamment dans la mesure où D a été recruté pour des raisons de « copinage » et de favoritisme, puisque c’était un ancien collègue de C.
76 En ce qui concerne la procédure 2016/20146, le requérant soutient que, premièrement, elle ne prévoyait pas la possibilité de recruter une personne « repêchée » sur la liste de réserve d’un concours précédent, mais uniquement le recrutement par concours interne et avait des critères de sélection différents de ceux de la procédure 2011/0151, deuxièmement, elle n’a été publiée ni sur le site Internet de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO), ni sur le site Internet de Fusion for
Energy et, troisièmement, son comité de sélection a décidé, en cours de recrutement, des modalités d’engagement sans fondement suffisant et objectif. Le requérant ajoute que D a été recruté au grade AD 9, ce qui a impliqué une dépense plus importante pour Fusion for Energy.
77 En ce qui concerne la procédure 2011/0151, dont la liste de réserve était celle sur laquelle figurait D lorsqu’il a été « repêché », le requérant relève non seulement que ses critères de sélection ne répondaient pas aux critères de sélection de la procédure 2016/20146, mais également que sa liste de réserve avait expiré le 31 décembre 2013.
78 Par la troisième branche de son premier moyen, tirée de la violation de l’interdiction de harcèlement moral, le requérant soulève cinq arguments tendant à démontrer que la décision attaquée a été adoptée non dans l’intérêt du service, mais dans le but de lui nuire et qu’elle est, de ce fait, constitutive d’un harcèlement moral.
79 En premier lieu, le requérant affirme que C, à son arrivée, premièrement, lui a demandé de retirer sa candidature déposée dans le cadre de la procédure 2016/20146 et, deuxièmement, l’a menacé de ne pas soutenir le renouvellement de son contrat s’il ne le faisait pas.
80 En deuxième lieu, en violation des règles internes qui prévoient que seul le service des ressources humaines peut modifier les tâches d’un agent, C aurait décidé unilatéralement d’une telle modification, exposant le requérant à une discrimination.
81 En effet, selon le requérant, C a décidé de lui retirer la planification et la création d’un projet sur une base annuelle, mais indéterminée dans le temps, dans le cadre du programme multiannuel pour lui confier le déroulement du plan de recrutement à long terme (Long term staffing plan). Certaines de ses nouvelles tâches auraient comporté des objectifs irréalisables et la stratégie de sa hiérarchie aurait consisté à supprimer ses tâches à long terme et à les remplacer par des tâches à court
terme pour ensuite pouvoir les redistribuer parmi le personnel. Dans ce contexte, le requérant cite la dernière phrase de la proposition de non-renouvellement de son contrat, signée par D, selon laquelle, « [e]n définitive, [s]es activités […] peuvent être réallouées sans trop de problèmes ».
82 Le requérant ajoute que l’attribution de ces nouvelles tâches a été effectuée dans le seul but de lui nuire et qu’il avait déjà formulé cette critique au notateur d’appel dans le cadre de son rapport de notation pour l’année 2017.
83 En outre, certaines de ces nouvelles tâches, notamment celles relatives à la logistique, telles que l’installation d’écrans de télévision dans les bâtiments de Fusion for Energy, n’auraient correspondu ni au profil ni au grade du requérant.
84 En troisième lieu, le requérant affirme avoir reçu, pour la première fois, des commentaires négatifs dans son rapport de notation pour l’année 2017 à cause desdites nouvelles tâches. Par ailleurs, le requérant observe que D a été autorisé à évaluer son travail à peine deux mois après avoir été recruté et que les commentaires négatifs de ce dernier ont été confirmés par C.
85 En quatrième lieu, le requérant fait valoir que, malgré le fait qu’il a, au cours des années 2017 et 2018, signalé la situation aux services de Fusion for Energy, ses dénonciations sont restées sans suite.
86 Premièrement, le requérant affirme qu’il en a informé le responsable des ressources humaines de Fusion for Energy en lui demandant d’intervenir. Dans ce contexte, le requérant se serait adressé au service des ressources humaines pour l’informer que ses tâches principales lui avaient été retirées au titre de mesures de rétorsion et d’intimidation.
87 Deuxièmement, le requérant affirme avoir pris contact avec le responsable du service « Éthique et antifraude » de Fusion for Energy pour dénoncer les manquements graves de C, conformément à l’article 22 bis du statut. Le requérant soutient que, dans le rejet de la réclamation, Fusion for Energy n’a pas répondu à cet argument et a délibérément confondu l’essence d’une plainte fondée sur l’article 22 bis du statut et le délai des procédures administratives présentées sur la base de
l’article 90 du statut. À cet égard, le requérant considère que les faits dénoncés constituaient des faits authentiques ou, à tout le moins, vraisemblables, qui laissaient présumer l’existence d’un harcèlement moral à son égard. Par ailleurs, le requérant relève qu’il avait également indiqué son état d’anxiété et d’épuisement professionnel causé par ses supérieurs hiérarchiques et les consultations auprès de médecins spécialisés en ayant découlé.
88 En cinquième lieu, le requérant fait valoir que, d’une part, alors que son contrat n’a pas été renouvelé, ses tâches ont été réattribuées à un collègue dont le contrat a été renouvelé et transformé en contrat à durée indéterminée et, d’autre part, le 29 août 2019, Fusion for Energy a lancé une nouvelle procédure de sélection pour recruter un agent temporaire de grade compris entre AD 5 et AD 12. En outre, le requérant soutient que toutes ses candidatures à des postes vacants au sein de
Fusion for Energy, dont certains correspondaient parfaitement à son profil, ont été systématiquement rejetées.
89 Par la quatrième branche de son premier moyen, le requérant estime que l’AHCC a commis une erreur d’appréciation dans la décision attaquée, ce qui constitue un détournement de pouvoir, dans la mesure où ladite décision a été prise dans le seul but de s’affranchir des dispositions prévues par le statut et le RAA. En effet, le requérant soutient, en substance, que la décision attaquée n’était fondée ni sur la restructuration budgétaire au sein de Fusion for Energy, ni sur l’intérêt du service,
mais s’insérait dans une stratégie de harcèlement qui avait pour but le non-renouvellement de son contrat et vraisemblablement pour cause le « copinage » par un détournement de procédure.
90 Ainsi, par les deuxième, troisième et quatrième branches de son premier moyen, le requérant fait valoir que, en réalité, la décision attaquée, qui constitue un détournement de pouvoir, est la manifestation d’une stratégie globale de harcèlement mise en place à son égard.
91 Fusion for Energy conteste les arguments du requérant.
92 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un détournement de pouvoir n’est réputé exister et affecter la présomption de légalité dont bénéficie l’acte d’une AHCC que s’il est prouvé que, en adoptant l’acte litigieux, cette dernière a poursuivi un but autre que celui visé par la réglementation en cause ou s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, que l’acte en question a été pris pour atteindre des fins autres que celles excipées (voir
arrêt du 3 octobre 2006, Nijs/Cour des comptes, T‑171/05, EU:T:2006:288, point 64 et jurisprudence citée ; ordonnance du 22 octobre 2015, Macchia/Commission, T‑80/15 P, EU:T:2015:845, point 67).
93 En ce qui concerne le harcèlement moral, il y a lieu d’examiner le présent recours à la lumière des principes jurisprudentiels cités aux points 37 et 38 ci-dessus.
94 À titre liminaire, en ce qui concerne les deuxième et troisième branches du premier moyen, il convient de relever que, d’une part, la demande d’assistance du requérant à l’égard du harcèlement dont il estime avoir été victime a été rejetée par Fusion for Energy et, d’autre part, le requérant n’ayant pas introduit de réclamation à l’encontre de cette décision de rejet, ladite demande a été classée sans suite.
95 Ensuite, il convient de constater qu’il ne ressort pas des éléments du dossier que l’entretien ayant eu lieu entre le requérant et C, au cours duquel ce dernier lui a suggéré de retirer sa candidature déposée dans le cadre de la procédure 2016/20146, les éventuelles irrégularités dans les procédures 2011/0151 et 2016/20146, le rapport de notation du requérant pour l’année 2017 et les modalités de son adoption ainsi que les dénonciations effectuées par ce dernier présentent un lien quelconque
avec les motifs retenus par l’AHCC pour fonder la décision attaquée.
96 En outre, il y a lieu de constater que les autres arguments du requérant, d’une part, ne sont étayés par aucun élément et, d’autre part, ne peuvent pas prospérer.
97 En premier lieu, s’agissant de l’argument selon lequel C a menacé le requérant de ne pas soutenir le renouvellement de son contrat s’il ne retirait pas sa candidature déposée dans le cadre de la procédure 2016/20146, il suffit de constater qu’il s’agit d’une simple affirmation, contestée par Fusion for Energy, qui, faute d’autres éléments, n’est pas prouvée et reste à l’état de pure allégation.
98 En deuxième lieu, s’agissant de l’argument tiré de la modification unilatérale des tâches du requérant, il y a lieu de constater ce qui suit.
99 Premièrement, s’agissant du grief tiré du fait que C ait modifié unilatéralement les tâches du requérant en violation des règles internes qui prévoient que seul le service des ressources humaines peut modifier les tâches d’un agent, il ressort de l’annexe D.3 de la duplique, qui contient la description de son poste, que ce dernier avait, entre autres, la tâche de contribuer à la préparation de plusieurs rapports. À cet égard, la description du poste indique, à titre d’exemple, les rapports
annuels et pluriannuels, tout en laissant ouverte la possibilité que le requérant soit appelé à contribuer à d’autres rapports. Ainsi, contrairement à ce que le requérant fait valoir, il ne peut être considéré que le fait de lui confier le déroulement du plan de recrutement à long terme constitue une modification de la description de son poste qui aurait nécessité l’intervention du service des ressources humaines. Partant, cet argument manque en fait et doit être rejeté, dans la mesure où aucune
règle interne n’a été violée.
100 Deuxièmement, s’agissant du grief tiré du fait que des tâches ne correspondant ni à son profil ni à son grade aient été attribuées au requérant, notamment celles relatives à la logistique, comme l’installation d’écrans de télévision dans les bâtiments de Fusion for Energy, il ressort de l’annexe D.4 de la duplique que, d’une part, les supérieurs hiérarchiques du requérant lui avaient confié la responsabilité de déployer un système de gestion visuelle pour Fusion for Energy et, d’autre part,
les travaux manuels nécessaires pour la mise en place de ce système étaient accomplis par le personnel de l’unité « Services institutionnels ». Partant, les tâches attribuées au requérant peuvent être considérées comme appropriées.
101 Troisièmement, s’agissant du grief selon lequel les supérieurs hiérarchiques du requérant lui auraient délibérément retiré des tâches à long terme pour lui confier des tâches à court terme, il suffit de constater qu’il manque en fait, dans la mesure où le requérant lui-même, au point 58 de la requête, soutient que le plan de recrutement à long terme, dont le déroulement lui avait été confié, était un plan à long terme.
102 En troisième lieu, l’argument par lequel le requérant soutient que le fait, d’une part, que le contrat de l’un de ses collègues a été renouvelé et, d’autre part, que Fusion for Energy a lancé, le 29 août 2019, une procédure visant à recruter un nouvel agent temporaire est une manifestation du harcèlement exercé à son égard par C ne peut pas prospérer.
103 En effet, comme cela ressort du point 62 ci-dessus, le fait que Fusion for Energy n’a pas renouvelé le contrat du requérant en raison d’une réduction du tableau d’effectifs est sans relation avec la circonstance que, malgré cette réduction, Fusion for Energy ait décidé de renouveler les contrats d’autres personnes et d’embaucher de nouveaux agents.
104 En quatrième lieu, interrogé lors de l’audience quant à ses candidatures à des postes vacants au sein de Fusion for Energy qui auraient été systématiquement rejetées, le requérant a soutenu avoir présenté sa candidature aux postes concernés par les avis de vacance reproduits aux annexes A.26, A.27, A.28 et A.30 de la requête. En revanche, Fusion for Energy a affirmé que le requérant n’avait présenté qu’une seule candidature.
105 Premièrement, il convient de constater que les annexes A.27 et A.28 ne sont pas pertinentes, dans la mesure où elles reproduisent les avis de vacance relatifs à la procédure 2016/20146 et à la procédure 2011/0151. Deuxièmement, il y a lieu de relever que, dans le cadre de son deuxième moyen, le requérant fait référence aux avis de vacance reproduits aux annexes A.26 et A.30 au soutien de son argument visant à démontrer que, juste avant l’adoption de la décision attaquée, Fusion for Energy
avait publié de nouveaux avis de vacance auxquels son profil correspondait parfaitement, mais ne soutient pas avoir présenté sa candidature aux postes concernés. Troisièmement, pour prouver ses affirmations, le requérant aurait dû les étayer, par exemple, par ses actes de candidature ou par le rejet de ses candidatures, plutôt que par les simples avis de vacance qui sont insuffisants à cet égard.
106 À la lumière de ces considérations, il y a lieu de conclure que le requérant n’a pas apporté la preuve d’un lien entre le harcèlement qu’il prétend avoir subi et la décision attaquée, motivée par la réduction du tableau d’effectifs décidée par l’autorité budgétaire, avec pour conséquence la réorganisation du département PM impliquant la réaffectation des tâches du requérant et la suppression de son poste.
107 En outre et en tout état de cause, la décision attaquée n’est pas entachée d’un détournement de pouvoir.
108 En premier lieu, contrairement à ce que le requérant fait valoir, la liste de réserve de la procédure 2011/0151 n’a pas expiré en 2013. En effet, il ressort de l’annexe B.7 du mémoire en défense qu’elle a été prorogée jusqu’au 31 décembre 2017.
109 En deuxième lieu, en ce qui concerne la procédure 2016/20146, le requérant prétend qu’elle a été organisée en violation des règles en matière de publication des avis de concours dans le but de lui nuire. À cet égard, il suffit de constater que l’avis de vacance relatif à ladite procédure, reproduit à l’annexe A.27 de la requête, contient au bas de chacune de ses pages une référence à sa publication le 5 août 2016 sur le site de Fusion for Energy.
110 En troisième lieu, le seul fait que C et D proviennent du même contexte professionnel n’est pas en soi un élément susceptible de démontrer que ce dernier a été recruté pour des raisons autres que ses capacités. En outre, même s’il y avait une raison tenant au « copinage », comme le soutient le requérant, ce fait ne pourrait en soi être considéré comme un indice de harcèlement à son égard. Par ailleurs, tant la procédure 2011/0151 que la procédure 2016/20146 visaient le recrutement d’un chef
d’équipe. Le requérant ne peut donc pas faire valoir que les critères de sélection de ces deux procédures étaient différents. Enfin, concernant l’argument du requérant selon lequel le recrutement de D au grade AD 9 a impliqué une dépense plus importante pour Fusion for Energy, il suffit de relever que l’avis de vacance relatif à la procédure 2016/20146 prévoyait une fourchette de grades compris entre AD 5 et AD 12. Ainsi, le fait que D, qui figurait sur la liste de réserve de la procédure 2011/0151
pour un poste de grade AD 9, a été recruté à ce grade ne constitue pas une irrégularité.
111 En quatrième lieu, l’argument du requérant relatif à la modification de ses tâches manque en fait et doit être rejeté, comme cela a été jugé aux points 98 à 101 ci-dessus.
112 En cinquième lieu, il en va de même pour l’argument du requérant relatif à son rapport de notation pour l’année 2017. En effet, comme cela a été jugé au point 95 ci-dessus, le requérant ne démontre pas en quoi ledit rapport aurait eu des conséquences sur la teneur ou sur les motifs de la décision attaquée.
113 En sixième lieu, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel ses dénonciations auprès du responsable des ressources humaines et du responsable du service « Éthique et antifraude » de Fusion for Energy sont restées sans réponse, il suffit de constater qu’il manque en fait.
114 Premièrement, en ce qui concerne les dénonciations faites auprès du responsable des ressources humaines, il y a lieu de relever qu’il ressort du manuel des procédures en matière de harcèlement que Fusion for Energy a mis en place une procédure informelle et une procédure formelle pour les agents qui s’estiment victimes de harcèlement.
115 La procédure informelle prévoit qu’un agent qui s’estime victime de harcèlement peut en informer un responsable des ressources humaines. Il ressort du manuel des procédures en matière de harcèlement que, indépendamment de la question de savoir si la situation problématique a été résolue d’une manière satisfaisante pour la victime présumée, cette procédure informelle prend fin après quelques échanges ou réunions. En outre, le manuel des procédures en matière de harcèlement précise
explicitement que, si la procédure informelle n’a pas conduit aux résultats escomptés ou si la victime du prétendu harcèlement estime que la procédure informelle ne serait pas utile, celle-ci peut demander officiellement l’assistance de l’administration au titre des articles 24 et 90 du statut.
116 En l’espèce, il y a lieu de constater que le requérant a fait usage de la procédure informelle, qui n’a pas vocation à déclencher une enquête administrative. Ainsi, contrairement à ce que le requérant prétend, il ne peut pas être reproché à Fusion for Energy de ne pas avoir ouvert d’enquête administrative, étant donné que la procédure informelle utilisée n’était pas censée entraîner une telle conséquence.
117 Deuxièmement, en ce qui concerne ses dénonciations auprès du responsable du service « Éthique et antifraude » de Fusion for Energy, le requérant affirme avoir pris contact avec le responsable de ce service pour dénoncer les manquements graves de C, conformément à l’article 22 bis du statut, et soutient que, dans le rejet de la réclamation, Fusion for Energy n’a pas répondu à cet argument.
118 Il y a lieu de relever qu’il ressort de l’annexe A.32 de la requête, qui reproduit les lignes directrices de Fusion for Energy sur les lanceurs d’alertes (ci-après les « lignes directrices »), que, en premier lieu, avant de déclencher la procédure de lancement d’alerte, un agent peut demander assistance et soutien au responsable du service « Éthique et antifraude ». À ce stade, les lignes directrices qualifient l’agent de « lanceur d’alerte potentiel », ce qui implique qu’une procédure de
lancement d’alerte n’est pas encore déclenchée. En second lieu, l’agent peut déclencher la procédure de lancement d’alerte de deux façons : une première consiste à contacter son supérieur hiérarchique ou le directeur de Fusion for Energy et une seconde consiste à contacter directement le secrétaire du conseil de gouvernance de Fusion for Energy. Dans les deux hypothèses, en application de l’article 22 ter du statut, il est précisé dans les lignes directrices que Fusion for Energy est obligée
d’indiquer à l’agent le délai dans lequel elle pense entamer les actions nécessaires.
119 Or, en l’espèce, contrairement à ce que le requérant fait valoir, Fusion for Energy a répondu à son argument dans le rejet de la demande d’assistance, en indiquant qu’il avait contacté le responsable du service « Éthique et antifraude », mais qu’il n’avait pas, par la suite, déclenché de procédure formelle de lancement d’alerte.
120 En tenant compte de ces éléments, ce dernier argument doit être rejeté.
121 Ainsi, les différents éléments mentionnés par le requérant à l’appui de la quatrième branche de son premier moyen ne sauraient être qualifiés d’indices suffisamment précis, objectifs et concordants de nature à soutenir la véracité ou, à tout le moins, la vraisemblance du fait que la décision attaquée est entachée d’un détournement de pouvoir.
122 Partant, il y a lieu de rejeter les deuxième, troisième et quatrième branches du premier moyen et, donc, le premier moyen dans son intégralité.
b) Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration, du devoir de sollicitude et de l’article 8 du RAA
123 Le requérant avance que, en ce qui concerne la violation du devoir de sollicitude, l’article 8, premier alinéa, du RAA prévoit que le contrat d’agent temporaire, au sens de l’article 2, sous a), dudit régime, ne peut être renouvelé qu’une fois pour une durée déterminée et que tout renouvellement ultérieur devient à durée indéterminée, ce qui est précisément interprété par la jurisprudence comme des mesures préventives destinées à lutter contre la précarité de l’emploi.
124 Selon le requérant, cette interprétation est renforcée par le devoir de sollicitude, dont il déduit qu’il incombait à Fusion for Energy de vérifier, préalablement à l’adoption de la décision attaquée, s’il pouvait être redéployé sur un autre poste.
125 Par ailleurs, le requérant soutient que la jurisprudence établit que l’AHCC méconnaît son devoir de sollicitude et l’article 8 du RAA si, en rejetant une demande de renouvellement de contrat d’un agent temporaire conclu au titre de l’article 2, sous a), dudit régime, elle se réfère, de façon abstraite, aux possibilités budgétaires et aux mérites et aptitudes de l’intéressé.
126 À cet égard, le requérant fait valoir que, juste avant l’adoption de la décision attaquée, Fusion for Energy a publié de nouveaux avis de vacance auxquels son profil correspondait parfaitement. Ainsi, selon lui, le prétendu contexte budgétaire n’empêchait ni tout recrutement ni, a fortiori, tout renouvellement de son contrat.
127 Le requérant affirme que l’AHCC a méconnu son devoir de sollicitude et l’article 8 du RAA en omettant de rechercher, dans le cadre d’un examen individualisé de la situation et des services qu’il serait en mesure de rendre à Fusion for Energy, si l’intérêt du service qu’elle poursuivait ne pouvait pas se concilier avec le renouvellement de son contrat.
128 Le requérant ajoute que, dans la décision attaquée, l’AHCC n’a pas tenu compte de ses compétences, de son rendement, de sa conduite dans le service, de sa situation familiale et de son ancienneté et relève que ses capacités n’ont pas été remises en question.
129 Fusion for Energy conteste les arguments du requérant.
130 Il convient de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle, si l’article 8 du RAA prévoit la possibilité de renouveler un contrat d’agent temporaire, il ne s’agit pas d’un droit, mais d’une simple faculté laissée à l’appréciation de l’autorité compétente. En effet, les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services en fonction des missions qui leur sont dévolues et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur
disposition, à la condition cependant que cette affectation se fasse dans l’intérêt du service (voir arrêt du 7 mai 2019, WP/EUIPO, T‑407/18, non publié, EU:T:2019:290, point 57 et jurisprudence citée).
131 L’exercice de ce pouvoir doit toutefois se faire dans le respect du devoir de sollicitude. Celui-ci reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut, et par analogie le RAA, a créé dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public. Cet équilibre implique notamment que, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un agent, l’autorité prenne en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce
faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi, notamment, de celui de l’agent concerné (voir arrêt du 7 mai 2019, WP/EUIPO, T‑407/18, non publié, EU:T:2019:290, point 58 et jurisprudence citée).
132 Appliqué à une décision sur le renouvellement éventuel du contrat d’un agent temporaire, le devoir de sollicitude impose ainsi à l’autorité compétente, lorsqu’elle statue, de procéder à une mise en balance de l’intérêt du service et de l’intérêt de l’agent (voir arrêt du 7 mai 2019, WP/EUIPO, T‑407/18, non publié, EU:T:2019:290, point 59 et jurisprudence citée).
133 Le devoir de sollicitude se traduit par ailleurs par l’obligation, pour l’autorité compétente, d’indiquer, dans la motivation de la décision de ne pas procéder au renouvellement du contrat, les raisons l’ayant conduite à faire prévaloir l’intérêt du service (voir arrêt du 7 mai 2019, WP/EUIPO, T‑407/18, non publié, EU:T:2019:290, point 60 et jurisprudence citée).
134 En revanche, d’une part, le devoir de sollicitude ne saurait aller jusqu’à entraîner, pour l’autorité compétente, une obligation d’examiner, de manière préalable, la possibilité de réaffecter l’agent à de nouvelles tâches et fonctions avant de décider de ne pas renouveler son contrat (voir arrêt du 22 mars 2018, HJ/EMA, T‑579/16, non publié, EU:T:2018:168, point 89 et jurisprudence citée) et, d’autre part, en tant que le manquement au devoir de sollicitude repose sur la prétendue absence de
prise en compte de l’ensemble des éléments susceptibles de fonder la décision attaquée, il y a lieu de relever que la prise en compte de l’intérêt personnel de l’agent ne saurait aller jusqu’à interdire à l’autorité compétente de ne pas renouveler un contrat à durée déterminée malgré l’opposition de cet agent, dès lors que l’intérêt du service l’exige (voir arrêt du 7 mai 2019, WP/EUIPO, T‑407/18, non publié, EU:T:2019:290, point 101 et jurisprudence citée).
135 En l’espèce, en ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel Fusion for Energy aurait dû vérifier, préalablement à l’adoption de la décision attaquée, s’il pouvait être redéployé sur un autre poste, il suffit de constater que, conformément à la jurisprudence citée au point 134 ci-dessus, le devoir de sollicitude ne saurait aller jusqu’à entraîner, pour l’autorité compétente, une obligation d’examiner, de manière préalable, la possibilité de réaffecter l’agent à de nouvelles tâches et
fonctions avant de décider de ne pas renouveler son contrat.
136 Quant à l’argument du requérant tiré de la publication de nouveaux avis de vacance auxquels son profil aurait correspondu, le devoir de sollicitude, appliqué à une décision de non-renouvellement, impose à l’administration de mettre en balance l’intérêt du service et celui de l’agent concerné, mais ne saurait aller jusqu’à entraîner, pour l’autorité compétente, une obligation de renouveler le contrat d’un agent pour la seule circonstance que des avis de vacance pour des postes que ce dernier
considère comme correspondant à son profil ont été publiés peu avant l’adoption de ladite décision. Ainsi, le fait que Fusion for Energy n’a pas renouvelé le contrat du requérant en raison d’une réduction du tableau d’effectifs n’a aucune incidence sur la circonstance que, malgré cette réduction, Fusion for Energy a décidé d’embaucher de nouveaux agents.
137 En ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel Fusion for Energy n’a pas pris en compte sa situation personnelle, force est de constater que, dans la décision attaquée, l’AHCC a précisé que, malgré tous ses arguments soulevés au cours de la procédure de renouvellement, le non-renouvellement du contrat du requérant n’était pas lié à ses performances, mais à la réduction du tableau d’effectifs. En outre, l’AHCC a répondu, dans la décision attaquée, aux commentaires contenus dans la
lettre du requérant du 2 novembre 2018. Par ailleurs, dans le rejet de la réclamation, l’AHCC a pris position par rapport aux arguments contenus dans la réclamation. Ainsi, les arguments que le requérant a soulevés ont été pris en compte et l’AHCC lui a indiqué les raisons pour lesquelles l’intérêt du service, lié à la réduction du tableau d’effectifs décidée par l’autorité budgétaire, prévalait sur son intérêt personnel.
138 Partant, le deuxième moyen doit être rejeté dans son intégralité.
c) Sur le troisième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination
139 Le requérant observe que, bien que la décision attaquée ait été adoptée sur le fondement de motifs budgétaires et organisationnels, les contrats d’autres agents temporaires ont été renouvelés sans qu’un prétendu manque de moyens budgétaires soit invoqué, ce qui est contraire au principe d’égalité de traitement. Le requérant cite, à titre d’exemple, l’agent qui l’a remplacé en 2017, qui a obtenu un renouvellement à durée indéterminée de son contrat, alors que lui-même ne l’a pas obtenu.
140 En outre, selon le requérant, en suivant la motivation de la décision attaquée selon laquelle ses tâches ont été redistribuées à différents agents, on peut conclure que Fusion for Energy a accordé un traitement préférentiel à certains et discriminatoire envers lui, dans la mesure où elle a procédé à une différenciation arbitraire et manifestement contraire à l’intérêt du service.
141 Le requérant réitère, d’une part, que le changement de ses tâches principales a été effectué dans le seul but de lui nuire, en violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination et, d’autre part, qu’il avait pris contact avec le responsable du service « Éthique et antifraude » et le conseiller juridique principal de Fusion for Energy, mais que, de manière incompréhensible, toutes ses tentatives pour signaler une situation préjudiciable aux intérêts de Fusion for Energy
ont été infructueuses, alors que cette dernière s’était dotée de directives internes qui indiquaient la procédure à suivre dans de tels cas. À cet égard, selon le requérant, lorsque l’administration se dote elle-même de règles établissant une procédure interne, elle doit les respecter et ne saurait s’en écarter sans préciser les raisons qui l’y ont amenée, sauf à méconnaître le principe d’égalité de traitement.
142 Par ailleurs, le requérant considère que Fusion for Energy n’a pas non plus précisé les raisons pour lesquelles elle n’a respecté ni ses directives internes, ni l’AMAP 2020-2024 et a décidé, par la décision attaquée, de rejeter tout type d’enquête.
143 Enfin, selon le requérant, Fusion for Energy a méconnu le principe d’égalité de traitement en rejetant sa demande d’assistance, en violation du manuel des procédures en matière de harcèlement, qui prévoit l’ouverture d’une enquête administrative en collaboration avec la personne concernée.
144 Fusion for Energy conteste les arguments du requérant.
145 En ce qui concerne les arguments du requérant selon lesquels Fusion for Energy a violé, d’une part, le principe d’égalité de traitement en renouvelant les contrats d’autres agents temporaires pour une durée indéterminée sans qu’un prétendu manque de moyens budgétaires soit invoqué et, d’autre part, le principe de non-discrimination dans la mesure où, en ayant distribué les tâches du requérant à d’autres agents, elle a octroyé un traitement préférentiel à ces derniers, il suffit de constater
que le requérant n’apporte aucune preuve de ses affirmations, qui dès lors restent de pures allégations.
146 En outre et en tout état de cause, ces arguments se fondent sur une prémisse erronée. En effet, une réduction du tableau d’effectifs n’implique pas que, automatiquement, tout renouvellement de contrat soit exclu. Dans un tel contexte, la redistribution des tâches d’un agent dont le contrat n’a pas été renouvelé ne constitue pas une violation du principe de non-discrimination, mais la conséquence de la nécessité de réattribuer ces tâches dans l’intérêt du service. Partant, ces arguments ne
peuvent prospérer.
147 En ce qui concerne les autres arguments du requérant, ils recoupent partiellement ceux qui ont déjà été examinés dans le cadre du premier moyen.
148 S’agissant de l’argument selon lequel Fusion for Energy a violé le principe d’égalité de traitement par le rejet de la demande d’assistance, il suffit de constater qu’il est inopérant, dans la mesure où, comme le requérant l’a lui-même indiqué lors de l’audience, ledit rejet ne faisait pas l’objet du présent recours.
149 En ce qui concerne l’argument relatif à la modification des tâches du requérant, il a été examiné dans le cadre des deuxième, troisième et quatrième branches du premier moyen, conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus, selon laquelle toute décision adoptée lors de la période pendant laquelle une personne soutient avoir été victime d’un prétendu harcèlement, dont la légalité n’a pas été contestée, est, en tant que telle, un élément factuel qui peut constituer un indice de
harcèlement à prendre en compte parmi d’autres, sans qu’il doive être procédé à un examen de sa légalité ou que l’épuisement des délais de recours à son égard ne fasse obstacle à ce que le juge constate l’existence d’un harcèlement. Cependant, cette jurisprudence implique que, en dehors de ce cas de figure bien déterminé, une personne n’est pas recevable à soulever l’illégalité d’une décision, adoptée lors de la période pendant laquelle elle soutient avoir été victime de harcèlement, qui n’a pas été
contestée dans les délais. Ainsi, le requérant n’est pas recevable à contester la légalité de la décision attaquée sur la base de l’argument relatif à la modification de ses tâches dans le cadre du présent moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, le délai pour ce faire ayant expiré.
150 S’agissant de l’argument du requérant selon lequel Fusion for Energy n’a pas agi malgré ses dénonciations auprès du responsable du service « Éthique et antifraude », il suffit de constater qu’il manque en fait.
151 En effet, il ressort des points 116 et 118 à 120 ci-dessus que, d’une part, en ce qui concerne le harcèlement moral que le requérant aurait prétendument subi, seule une procédure informelle, qui ne prévoit pas d’action de la part de Fusion for Energy, a été déclenchée. D’autre part, en ce qui concerne la procédure de lancement d’alerte, les lignes directrices prévoient que, lorsqu’un agent contacte le responsable du service « Éthique et antifraude », il n’est pas considéré comme un lanceur
d’alerte. Partant, le requérant ne peut pas véritablement soutenir que Fusion for Energy s’est écartée de ses directives internes.
152 S’agissant de l’argument selon lequel Fusion for Energy n’a pas indiqué dans les motifs de sa décision les raisons pour lesquelles elle n’a respecté ni ses directives internes relatives à l’article 22 bis du statut ni l’AMAP 2020-2024 et n’a pas ouvert d’enquête, il suffit de constater que, contrairement à ce que le requérant soutient, premièrement, Fusion for Energy a abordé la question du prétendu harcèlement moral dans la décision attaquée, en faisant référence à la procédure informelle
prévue dans le manuel des procédures en matière de harcèlement et en indiquant que le requérant aurait dû introduire une demande d’assistance au sens de l’article 24 du statut. Deuxièmement, dans le rejet de la réclamation, Fusion for Energy a expliqué que l’AMAP est un plan pluriannuel alors que le tableau d’effectifs est annuel.
153 Ainsi, l’argument du requérant tiré d’une absence de motivation doit être rejeté.
154 À la lumière de ces considérations, il y a lieu de rejeter le troisième moyen ainsi que les conclusions visant l’annulation de la décision attaquée dans leur ensemble.
2. Sur les conclusions indemnitaires
155 En ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché à Fusion for Energy, le requérant évoque l’étendue de la marge d’appréciation à laquelle l’administration a renoncé, le caractère intentionnel du manquement commis et le caractère inexcusable de l’erreur commise.
156 Le requérant soutient que la décision attaquée n’est que génériquement motivée pour des raisons budgétaires, alors qu’il a démontré, dans le cadre de son premier moyen, que Fusion for Energy avait consacré, au cours des années 2017 et 2018, des ressources disponibles pour le recrutement d’agents contractuels et temporaires. En outre, Fusion for Energy continuerait à publier des avis de vacance correspondant aux caractéristiques du poste qu’occupait le requérant, poste qui, selon la décision
attaquée, a été supprimé pour des raisons budgétaires.
157 En ce qui concerne la réalité du dommage, le requérant soutient que le dommage causé est réel, certain et personnel, dans la mesure où il est au chômage. En outre, le requérant demande la réparation de son préjudice moral et de l’atteinte à sa carrière et à sa santé. Ainsi, le requérant estime qu’il a perdu une chance de voir son contrat renouvelé et de bénéficier des avantages pécuniaires qui y auraient été afférents. Il ajoute que la simple annulation de la décision attaquée ne suffirait
pas à réparer tous les dommages qu’il a subis.
158 En ce qui concerne l’existence d’un lien de causalité, le requérant fait valoir que la mauvaise administration dont a fait preuve jusqu’à présent Fusion for Energy lui a causé un préjudice matériel et moral. Il affirme qu’il a demandé le renouvellement de son contrat et que l’illégalité du comportement de Fusion for Energy, qui invoque des raisons budgétaires, lui a causé un préjudice matériel.
159 Le requérant évalue son préjudice financier à un montant de 67 500 euros, ce qui correspond à douze mois de rémunération mensuelle augmentés des frais de scolarité mensuels de sa fille pour les sept derniers mois, qui s’élèvent à 8 000 euros. Il demande le paiement de ce montant, augmenté des intérêts de retard et des nouveaux versements mensuels à échoir dans les mois à venir. Enfin, il demande la réparation du préjudice moral qu’il a subi, évalué à un montant, calculé ex æquo et bono, de
30 000 euros.
160 Fusion for Energy conteste les arguments du requérant.
161 En premier lieu, en ce qui concerne les préjudices prétendument subis par le requérant découlant de la décision attaquée, il suffit de constater que, selon une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme non fondées (voir arrêt du 19 décembre 2019, ZQ/Commission, T‑647/18, non publié, EU:T:2019:884,
point 202 et jurisprudence citée), ce qui est le cas en l’espèce.
162 En second lieu, dans l’hypothèse où les conclusions indemnitaires du requérant devraient être interprétées comme contenant également une demande d’indemnisation d’un préjudice qui ne découlerait pas directement de la décision attaquée, mais qui serait lié à ce que ce dernier considère comme « la mauvaise administration exercée par Fusion for Energy jusqu’à présent », il suffit de constater que cette demande serait irrecevable, conformément à la jurisprudence relative au système des voies de
recours instauré par les articles 90 et 91 du statut, selon laquelle elle aurait dû être invoquée au moyen d’une demande d’indemnisation introduite conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut (arrêt du 19 décembre 2019, ZQ/Commission, T‑647/18, non publié, EU:T:2019:884, point 206), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
163 Ainsi, les conclusions indemnitaires du requérant doivent être rejetées.
IV. Sur les dépens
164 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de Fusion for Energy.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) FD est condamné aux dépens.
Kanninen Jaeger Półtorak
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2021.
Signatures
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* Langue de procédure : le français.