ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
27 octobre 2022 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Droit des marques – Règlement (UE) 2017/1001 – Article 15, paragraphe 2 – Directive (UE) 2015/2436 – Article 15, paragraphe 2 – Épuisement du droit conféré par la marque – Bouteilles contenant du dioxyde de carbone – Mise en circulation dans un État membre par le titulaire de la marque – Activité d’un revendeur consistant à remplir et réétiqueter des bouteilles – Opposition formée par le titulaire de la marque – Motifs légitimes de s’opposer à une commercialisation ultérieure
des produits revêtus de la marque »
Dans l’affaire C‑197/21,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Korkein oikeus (Cour suprême, Finlande), par décision du 9 mars 2021, parvenue à la Cour le 29 mars 2021, dans la procédure
Soda-Club (CO2) SA,
SodaStream International BV
contre
MySoda Oy,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. D. Gratsias, M. Ilešič (rapporteur), I. Jarukaitis et Z. Csehi, juges,
avocat général : M. G. Pitruzzella,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour Soda-Club (CO2) SA et SodaStream International BV, par Mes J. Bonsdorf, H. Pohjola et B. Rapinoja, asianajajat,
– pour MySoda Oy, par Mes H.-M. Elo et E. Hodge, asianajajat,
– pour le gouvernement finlandais, par M. S. Hartikainen, Mmes A. Laine et H. Leppo, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par MM. É. Gippini Fournier, M. Huttunen et Mme T. Sevón, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 mai 2022,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 13, paragraphe 2, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21) (ci-après le « règlement no 207/2009 »), de l’article 15, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur
la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), de l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25), et de l’article 15, paragraphe 2, de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Soda‑Club (CO2) SA et SodaStream International BV (ci-après, ensemble, « SodaStream ») à MySoda Oy au sujet d’une prétendue contrefaçon des marques de l’Union européenne et des marques nationales SODASTREAM et SODA-CLUB dont les premières sont titulaires.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
Le règlement no 207/2009
3 L’article 13 du règlement no 207/2009, intitulé « Épuisement du droit conféré par la marque de l’Union européenne », disposait :
« 1. Une marque de l’Union européenne ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis sur le marché dans l’[E]space économique européen [EEE] sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
2. Le paragraphe 1 n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce. »
Le règlement 2017/1001
4 Le règlement 2017/1001, qui a abrogé et remplacé le règlement no 207/2009 avec effet au 1er octobre 2017, contient un article 9, intitulé « Droit conféré par la marque de l’Union européenne », lequel est ainsi libellé :
« 1. L’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d’une marque de l’Union européenne, le titulaire de cette marque de l’Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque :
a) ce signe est identique à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée ;
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ;
c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d’une renommée dans l’Union et que l’usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l’Union européenne ou leur porte préjudice.
3. Il peut notamment être interdit, en vertu du paragraphe 2 :
[...]
b) d’offrir les produits, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins sous le signe, ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe ;
[...] »
5 L’article 15 du règlement 2017/1001, intitulé « Épuisement du droit conféré par la marque de l’Union européenne », dispose :
« 1. Une marque de l’Union européenne ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis sur le marché dans l’[EEE] sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
2. Le paragraphe 1 n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce. »
La directive 2008/95
6 L’article 7 de la directive 2008/95, intitulé « Épuisement du droit conféré par la marque », prévoyait :
« 1. Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
2. Le paragraphe 1 n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce. »
7 La directive 2008/95 a été abrogée, avec effet au 15 janvier 2019, par la directive 2015/2436.
La directive 2015/2436
8 L’article 10 de la directive 2015/2436, intitulé « Droits conférés par la marque », dispose, à ses paragraphes 1 et 3 :
« 1. L’enregistrement d’une marque confère à son titulaire un droit exclusif sur celle-ci.
[...]
3. Si les conditions énoncées au paragraphe 2 sont remplies, il peut être interdit en particulier :
[...]
b) d’offrir les produits, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins sous le signe, ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe ;
[...] »
9 L’article 15 de cette directive, intitulé « Épuisement des droits conférés par une marque », est ainsi libellé :
« 1. Une marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis sur le marché dans l’Union sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
2. Le paragraphe 1 n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise sur le marché. »
Le droit finlandais
10 En droit finlandais, l’épuisement des droits conférés par une marque fait l’objet de l’article 9 du tavaramerkkilaki (544/2019) [loi relative aux marques (544/2019)], du 26 avril 2019, entrée en vigueur le 1er mai 2019. Cette disposition prévoit, à son paragraphe 1, que le titulaire de la marque ne peut pas interdire l’utilisation de la marque sur des produits qui ont été mis sur le marché dans l’EEE, sous cette marque, par le titulaire ou avec son consentement. Nonobstant ce paragraphe 1, le
paragraphe 2 de ladite disposition précise que le titulaire de la marque peut s’opposer à l’usage de celle-ci sur des produits lorsque ce titulaire a des motifs légitimes de s’opposer à une offre ou à une commercialisation ultérieure des produits. En particulier, le titulaire de la marque peut s’opposer à l’usage de celle-ci lorsque l’état des produits a été modifié ou que leur qualité a été dégradée après leur mise dans le commerce.
11 L’article 10a du tavaramerkkilaki (1715/1995) [loi relative aux marques (1715/1995)], qui était en vigueur jusqu’au 31 août 2016, puis l’article 8 du tavaramerkkilaki (616/2016) [loi relative aux marques (616/2016)], qui était en vigueur jusqu’au 30 avril 2019, correspondaient, en substance, à l’article 9 de la loi relative aux marques (544/2019), applicable à compter du 1er mai 2019.
Le litige au principal et les questions préjudicielles
12 SodaStream, une entreprise multinationale, fabrique et vend des appareils de carbonatation permettant aux consommateurs de préparer, à partir d’eau du robinet, de l’eau gazeuse et des boissons gazeuses aromatisées. En Finlande, SodaStream commercialise ces appareils avec une bouteille rechargeable de dioxyde de carbone qu’elle propose également à la vente séparément. Les sociétés qui composent SodaStream sont titulaires des marques de l’Union européenne et des marques nationales SODASTREAM et
SODA-CLUB. Ces marques figurent sur l’étiquetage et sont gravées sur le corps en aluminium de ces bouteilles.
13 MySoda, une société ayant son siège en Finlande, commercialise dans cet État membre des appareils de carbonatation pour boissons sous la marque MySoda dans des emballages qui n’incluent normalement pas de bouteille de dioxyde de carbone. Depuis le mois de juin 2016, MySoda offre à la vente des bouteilles de dioxyde de carbone remplies en Finlande, qui sont compatibles tant avec ses propres appareils de carbonatation qu’avec ceux de SodaStream. Certaines de ces bouteilles ont été initialement
mises sur le marché par SodaStream.
14 Après avoir reçu, par l’intermédiaire de distributeurs, les bouteilles de SodaStream qui ont été renvoyées vides par des consommateurs, MySoda les recharge en dioxyde de carbone. Elle remplace les étiquettes d’origine par ses propres étiquettes, en laissant visibles les marques de SodaStream gravées sur le corps des bouteilles.
15 Ce faisant, MySoda utilise deux étiquettes différentes. Sur la première, de couleur rose, apparaissent, en gros caractères, le logo de MySoda et les mots « Dioxyde de carbone finlandais pour les équipements de carbonatation », et, en petits caractères, le nom de MySoda en tant que société qui a rempli la bouteille ainsi qu’un renvoi vers son site web pour de plus amples informations. Sur la seconde étiquette, de couleur blanche, figurent les mots « dioxyde de carbone » en lettres majuscules, dans
cinq langues différentes, et, parmi les informations sur le produit, rédigées en petits caractères, le nom de MySoda en tant que société qui a rempli la bouteille ainsi qu’une déclaration selon laquelle cette dernière n’a aucun contact avec le fournisseur d’origine de la bouteille ou avec sa société ou avec la marque déposée qui apparaissent sur la bouteille. Cette étiquette comprend en outre un renvoi vers le site web de MySoda pour de plus amples informations.
16 SodaStream a saisi le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques, Finlande) d’un recours tendant à faire constater que MySoda a contrefait, en Finlande, les marques SODASTREAM et SODACLUB en commercialisant et en vendant des bouteilles de dioxyde de carbone rechargées revêtues de ces marques sans l’autorisation de leurs titulaires.
17 SodaStream a fait valoir que la pratique de MySoda interfère substantiellement avec les droits conférés par lesdites marques et présente un risque significatif de confusion parmi le public concerné quant à l’origine des bouteilles de dioxyde de carbone en créant la fausse impression qu’il existe un rapport, commercial ou économique, entre SodaStream et MySoda.
18 SodaStream a souligné, en outre, que les bouteilles de dioxyde de carbone vendues sur le marché finlandais ne sont pas toutes de la même qualité ou ne présentent pas toutes les mêmes caractéristiques. Les revendeurs qui remplissent les bouteilles de la marque SodaStream sans autorisation ne posséderaient pas nécessairement les connaissances et le savoir-faire requis pour garantir que ces bouteilles sont utilisées et manipulées de manière sûre et correcte. SodaStream ne pourrait pas être tenue
responsable des dommages causés par des bouteilles de dioxyde de carbone rechargées par ces revendeurs.
19 MySoda a rétorqué qu’un changement d’étiquette ne porte pas atteinte à la fonction de la marque qui est d’indiquer l’origine de la bouteille, dès lors que le public pertinent comprendrait que l’étiquetage indique uniquement l’origine du dioxyde de carbone et l’identité du revendeur ayant rechargé la bouteille dont l’origine est gravée sur le corps de celle-ci.
20 Par un arrêt interlocutoire du 5 septembre 2019, le markkinaoikeus (tribunal des affaires économiques) a partiellement fait droit aux demandes de SodaStream. Ce faisant, elle s’est appuyée sur l’arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas (C‑46/10, EU:C:2011:485).
21 Cette juridiction de première instance a considéré qu’il n’a pas été démontré que la pratique de MySoda modifie ou dégrade la bouteille de dioxyde de carbone ou son contenu, ou porte atteinte à la réputation de SodaStream en raison des risques pour la sécurité de ses produits, ni que cette pratique ait causé un préjudice donnant à SodaStream un motif légitime pour s’opposer à cette pratique. S’agissant des étiquettes blanches, ladite juridiction a estimé qu’elles n’ont pas créé une impression
erronée quant au lien économique entre MySoda et SodaStream. En revanche, elle a jugé que l’utilisation des étiquettes roses était susceptible de créer, auprès d’un consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif, l’impression qu’un tel lien existait. Partant, la même juridiction a considéré que l’utilisation de ces étiquettes roses justifie que SodaStream s’oppose à la pratique de MySoda.
22 SodaStream et MySoda ont été autorisées à former des pourvois contre ce jugement devant la juridiction de renvoi, le Korkein oikeus (Cour suprême, Finlande).
23 La juridiction de renvoi expose, tout d’abord, que le droit de l’Union ne prévoit pas de règles détaillées concernant les conditions permettant de constater l’existence de motifs légitimes justifiant que le titulaire de la marque s’oppose à la commercialisation de produits après leur mise sur le marché. La jurisprudence de la Cour n’apporterait pas de réponses claires aux questions qui se posent dans le litige au principal.
24 Premièrement, la jurisprudence de la Cour ne ferait pas clairement apparaître si les conditions énoncées dans l’arrêt du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a. (C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282), s’appliquent au reconditionnement de produits commercialisés dans un même État membre. Deuxièmement, la juridiction de renvoi se demande si le remplacement de l’étiquette du titulaire de la marque par une nouvelle étiquette doit être considéré comme un reconditionnement au sens de la
jurisprudence de la Cour. Elle s’interroge sur l’importance qu’il convient d’accorder au fait que, dans le litige au principal, le produit concerné est composé, d’une part, de la bouteille provenant du titulaire de la marque et, d’autre part, du dioxyde de carbone provenant du revendeur. Il n’apparaîtrait pas clairement s’il est, à cet égard, déterminant que le public pertinent comprenne que l’étiquette indique uniquement l’origine du dioxyde de carbone, l’origine de la bouteille étant identifiée
au moyen de la marque gravée sur le corps de celle-ci.
25 La juridiction de renvoi estime, ensuite, que les faits du litige au principal diffèrent des circonstances à l’origine de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas (C‑46/10, EU:C:2011:485). En effet, dans cette dernière affaire, les marques apposées sur des bouteilles de gaz n’avaient été ni enlevées ni recouvertes, ce qui tendrait à exclure que l’état des bouteilles ait été modifié en masquant leur origine. En l’occurrence, le revendeur aurait remplacé l’étiquette
d’origine par sa propre étiquette qui recouvrirait la plupart de la surface de la bouteille, tout en laissant apparaître la marque d’origine gravée sur la partie supérieure de la bouteille.
26 La juridiction de renvoi relève, enfin, que si le remplacement de l’étiquette d’origine devait être examiné au regard des conditions énoncées dans l’arrêt du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a. (C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282), la jurisprudence de la Cour n’indique pas clairement s’il convient, lors de l’appréciation de la condition relative à la nécessité d’un tel remplacement, de tenir compte de la destination des produits en cause et, le cas échéant, de quelle manière. Le
fait que les bouteilles de dioxyde de carbone soient destinées à être réutilisées et rechargées de nombreuses fois serait de nature à altérer l’état des étiquettes d’origine. Cette juridiction cherche à savoir si la rupture ou le détachement de l’étiquette d’origine apposée par le titulaire de la marque, ou le fait qu’un revendeur a remplacé cette étiquette d’origine par sa propre étiquette, peuvent être considérés comme des circonstances justifiant que l’échange ou le remplacement de l’étiquette
par celle du revendeur soit considéré comme nécessaire pour la mise sur le marché de la bouteille rechargée par ce dernier.
27 Dans ces conditions, le Korkein oikeus (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Les conditions dites “Bristol-Myers Squibb” définies dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne concernant le reconditionnement et le réétiquetage dans le cadre d’importations parallèles et, en particulier, la condition de “nécessité” s’appliquent-elles également en cas de reconditionnement ou de réétiquetage de produits qui ont été mis dans le commerce dans un État membre par le titulaire de la marque ou avec son consentement en vue de leur revente dans le même État
membre ?
2) Lorsque, au moment de la mise dans le commerce d’une bouteille contenant du dioxyde de carbone, le titulaire de la marque y a apposé sa marque, laquelle est non seulement inscrite sur l’étiquette de la bouteille, mais également gravée sur son goulot, les conditions dites “Bristol-Myers Squibb” mentionnées ci-dessus et, en particulier, la condition de “nécessité” s’appliquent-elles lorsqu’un tiers recharge la bouteille avec du dioxyde de carbone en vue de sa revente, en retire l’étiquette
d’origine et la remplace par une étiquette sur laquelle figure son propre logo, alors que, par ailleurs, la marque de la personne qui a mis la bouteille dans le commerce est encore visible sur la gravure inscrite sur le goulot de la bouteille ?
3) Dans les circonstances décrites ci-dessus, peut-on considérer que le retrait et le remplacement de l’étiquette sur laquelle est apposée la marque portent, en principe, atteinte à la fonction de la marque, qui est d’indiquer l’origine de la bouteille, ou bien importe-t-il, aux fins de l’application des conditions relatives au reconditionnement et au réétiquetage, que :
– le public pertinent est réputé comprendre que l’étiquette indique uniquement l’origine du dioxyde de carbone contenu dans la bouteille (et donc la personne qui a rechargé la bouteille) ou que
– le public pertinent est réputé comprendre que l’étiquette indique également, du moins en partie, l’origine de la bouteille ?
4) Dans la mesure où le retrait et le remplacement de l’étiquette apposée sur les bouteilles de dioxyde de carbone sont appréciés au regard de la condition de nécessité, la rupture ou le détachement accidentel des étiquettes apposées sur les bouteilles mises dans le commerce par le titulaire de la marque, ou leur retrait ou remplacement par une personne les ayant précédemment rechargées, peuvent-ils constituer une circonstance de nature à justifier que le remplacement régulier des étiquettes par
l’étiquette de la personne qui a rechargé les bouteilles soit considéré comme nécessaire en vue de la commercialisation des bouteilles rechargées ? »
Sur les questions préjudicielles
28 À titre liminaire, il convient de relever que les questions posées par la juridiction de renvoi portent, en ce qui concerne les marques de l’Union européenne, sur l’interprétation de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 et de l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, et, en ce qui concerne les marques nationales, sur l’interprétation de l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2008/95 et de l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436.
29 À cet égard, il y a lieu de constater que les faits du litige au principal ont débuté au mois de juin 2016 et relèvent, pour une partie, des dispositions du règlement no 207/2009 et de la directive 2008/95 et, pour une autre partie, de celles du règlement 2017/1001 et de la directive 2015/2436. Toutefois, les dispositions de ces règlements et de ces directives étant rédigées en des termes en substance identiques et les réponses à donner aux questions posées par la juridiction de renvoi étant, en
raison de cette identité, les mêmes quels que soient le règlement et la directive respectivement applicables, il convient, pour répondre à ces questions, de faire uniquement référence aux dispositions de l’article 15 du règlement 2017/1001 et de l’article 15 de la directive 2015/2436 (voir, par analogie, arrêt du 9 novembre 2017, Maio Marques da Rosa, C‑306/16, EU:C:2017:844, point 32 et jurisprudence citée).
30 En outre, il ressort de la décision de renvoi que ces questions sont posées dans le cadre d’un litige né lors de la commercialisation ultérieure, en Finlande, des bouteilles de dioxyde de carbone fabriquées et initialement commercialisées par SodaStream qui sont destinées à être réutilisées et rechargées de nombreuses fois. MySoda, après avoir reçu, par l’intermédiaire de distributeurs, les bouteilles de dioxyde de carbone de SodaStream qui ont été renvoyées vides par des consommateurs, recharge
ces bouteilles, retire l’étiquette sur laquelle avait été apposée la marque d’origine et la remplace par ses propres étiquettes faisant figurer le logo de MySoda, tout en laissant apparaître la marque d’origine gravée sur le corps desdites bouteilles.
31 À la lumière de ces précisions, il convient de considérer que la juridiction de renvoi, par ses quatre questions, qu’il convient d’examiner ensemble, demande, en substance, si, et, le cas échéant, dans quelles conditions, le titulaire d’une marque qui a commercialisé, dans un État membre, des produits pourvus de cette marque et destinés à être réutilisés et rechargés de nombreuses fois est en droit de s’opposer, en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 ainsi que de
l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436, à la commercialisation ultérieure de ces produits, dans cet État membre, par un revendeur qui les a rechargés et a remplacé l’étiquette faisant figurer la marque d’origine par un autre étiquetage, tout en laissant apparaître la marque d’origine sur lesdits produits.
32 À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que l’article 9 de ce règlement et l’article 10 de cette directive confèrent respectivement au titulaire d’une marque de l’Union européenne et au titulaire d’une marque nationale, un droit exclusif lui permettant d’interdire à tout tiers, notamment, d’offrir les produits revêtus de sa marque, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins. L’article 15, paragraphe 1, dudit règlement ainsi que l’article 15, paragraphe 1, de ladite
directive contiennent une exception à cette règle, en ce qu’ils prévoient que le droit du titulaire est épuisé lorsque les produits ont été mis sur le marché dans l’EEE sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement (voir, par analogie, arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485, point 26 et jurisprudence citée).
33 En particulier, s’agissant des articles 10 et 15 de la directive 2015/2436, il y a lieu d’ajouter qu’ils procèdent à une harmonisation complète des règles relatives aux droits conférés par la marque et définissent ainsi le contenu matériel des droits dont jouissent les titulaires de marques dans l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2011, Budějovický Budvar, C‑482/09, EU:C:2011:605, point 32 et jurisprudence citée, ainsi que, par analogie, arrêt du 29 juillet 2019, Pelham e.a.,
C‑476/17, EU:C:2019:624, point 85 et jurisprudence citée).
34 Toutefois, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et à l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436, le titulaire de la marque peut justifier d’un motif légitime pour s’opposer à une commercialisation ultérieure des produits pourvus de sa marque, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce. Cette faculté d’opposition, qui constitue une dérogation au principe fondamental de libre circulation des marchandises, a
pour seul objectif la sauvegarde des droits qui relèvent de l’objet spécifique de la marque, compris à la lumière de la fonction essentielle de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2002, Boehringer Ingelheim e.a., C‑143/00, EU:C:2002:246, point 28).
35 Ainsi que la Cour l’a reconnu à maintes reprises, l’objet spécifique du droit de marque est notamment d’assurer au titulaire le droit d’utiliser la marque pour la première mise en circulation d’un produit et de le protéger ainsi contre les concurrents qui voudraient abuser de la position et de la réputation de la marque en vendant des produits indûment pourvus de cette marque. En vue de déterminer la portée exacte de ce droit exclusif reconnu au titulaire de la marque, il faut tenir compte de la
fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit marqué, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit de ceux qui ont une autre provenance (arrêt du 20 décembre 2017, Schweppes, C‑291/16, EU:C:2017:990, point 37 et jurisprudence citée).
36 Dès lors, la question de savoir si le titulaire de la marque peut s’opposer à la commercialisation ultérieure des produits pourvus de sa marque et, notamment, aux mesures prises par le revendeur concernant le retrait des étiquettes d’origine et l’apposition de nouvelles étiquettes sur ces produits tout en laissant visible une marque d’origine, doit être examinée à la lumière des intérêts légitimes du titulaire de la marque, notamment celui tenant à la sauvegarde de la fonction essentiellede la
marque qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit marqué.
37 Ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 22 de ses conclusions, en ce qu’il constitue nécessairement une limitation au principe fondamental de libre circulation des marchandises, le droit du titulaire de la marque de s’opposer à la commercialisation ultérieure des produits revêtus de sa marque n’est pas sans limite.
38 En l’occurrence, il est constant que les bouteilles de dioxyde de carbone en question ont été mises sur le marché dans l’EEE, pour la première fois, par les titulaires des marques de l’Union européenne et des marques nationales apposées sur celles-ci.
39 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, la vente d’une bouteille de gaz rechargeable par le titulaire des marques apposées sur celle-ci épuise les droits que ledit titulaire tire de l’enregistrement de ces marques et transfère à l’acheteur le droit de disposer librement de cette bouteille, y inclus celui de l’échanger ou de la faire remplir auprès d’une entreprise de son choix. Ce droit de l’acheteur a pour corollaire le droit des concurrents du titulaire des
marques apposées sur ladite bouteille de procéder au remplissage et à l’échange des bouteilles vides (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485, point 35).
40 Cela étant, l’activité du revendeur consistant à recharger les bouteilles en question, qui ont été renvoyées vides par des consommateurs, et à apposer sur celles-ci ses propres étiquettes après avoir retiré celles pourvues des marques d’origine, tout en laissant apparaître la marque d’origine sur les bouteilles, est susceptible de relever de l’application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436.
41 Toutefois, ainsi que rappelé au point 34 du présent arrêt, en vertu de l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436, le titulaire d’une marque est en droit, malgré la mise sur le marché des produits revêtus de sa marque, de s’opposer à leur commercialisation ultérieure lorsque des motifs légitimes justifient une telle opposition. L’hypothèse relative à la modification ou à l’altération de l’état des produits, expressément prévue à
ces dispositions, n’est donnée qu’à titre d’exemple, lesdites dispositions ne fournissant pas de liste exhaustive des motifs légitimes susceptibles d’exclure l’application du principe de l’épuisement (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485, point 36 et jurisprudence citée).
42 Dans le contexte des importations parallèles des produits pharmaceutiques reconditionnés, la Cour a élaboré une liste de conditions qui visent à encadrer l’existence de tels motifs, dans ce contexte spécifique (voir, notamment, arrêt du 11 juillet 1996, Bristol‑Myers Squibb e.a., C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282).
43 Dans un contexte plus proche de celui en cause au principal, la Cour a jugé qu’un tel motif légitime existe également lorsque l’usage par un tiers d’un signe identique ou similaire à une marque porte une atteinte sérieuse à la renommée de celle-ci, ou encore lorsque cet usage est fait de manière à donner l’impression qu’il existe un lien économique entre le titulaire de la marque et ce tiers, et notamment que ce dernier appartient au réseau de distribution du titulaire ou qu’il existe une
relation spéciale entre ces deux personnes (voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2010, Portakabin, C‑558/08, EU:C:2010:416, points 79 et 80, ainsi que du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485, point 37).
44 Il s’ensuit qu’une impression erronée qui peut naître dans l’esprit des consommateurs quant à l’existence d’un lien économique entre le titulaire de la marque et un revendeur est un des motifs légitimes pour lesquels le titulaire de la marque peut s’opposer à la commercialisation ultérieure des produits pourvus de sa marque par un revendeur, notamment, lorsque ce dernier retire l’étiquette sur laquelle figure la marque d’origine et appose sa propre étiquette sur ce produit, tout en laissant
visible une marque d’origine gravée sur le produit. Le fait que les mesures prises par le revendeur aux fins de la commercialisation ultérieure des produits en question sont localisées à l’intérieur de l’État membre où ces produits ont été initialement mis sur le marché n’a pas une importance décisive aux fins de déterminer si l’opposition du titulaire de la marque est justifiée par un tel motif légitime.
45 Afin d’apprécier si une telle impression erronée existe, il convient de tenir compte de l’ensemble des circonstances relatives à l’activité du revendeur, telles que la manière dont les bouteilles sont présentées aux consommateurs à la suite du nouvel étiquetage et les conditions dans lesquelles celles-ci sont vendues, notamment les pratiques de rechargement de ces bouteilles prévalant dans le secteur concerné (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485,
points 39 et 40).
46 S’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier l’existence d’une éventuelle impression erronée quant au lien économique entre les titulaires des marques et le revendeur ayant rechargé les bouteilles en cause au principal, la Cour peut toutefois fournir à cette juridiction les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui pourraient lui être utiles à cet égard (voir, par analogie, arrêt du 7 avril 2022, Berlin Chemie A. Menarini, C‑333/20, EU:C:2022:291, point 46 et
jurisprudence citée).
47 Ainsi, il y a lieu de relever, en premier lieu, que l’étendue des informations figurant sur les nouvelles étiquettes revêt une importance significative. En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a souligné au point 51 de ses conclusions, l’impression d’ensemble donnée par le nouvel étiquetage doit être appréciée afin de déterminer si les informations relatives au titulaire de la marque qui a fabriqué la bouteille et celles relatives au revendeur qui en assure la recharge apparaissent claires et
non équivoques pour un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif. Ces informations, présentées au moyen du nouvel étiquetage, ne doivent notamment pas laisser penser qu’un lien économique existe entre le revendeur ayant rechargé la bouteille et le titulaire de la marque d’origine.
48 En deuxième lieu, afin d’apprécier l’impression qui se dégage du nouvel étiquetage, doivent également être prises en compte les pratiques dans le secteur concerné et la question de savoir si les consommateurs sont habitués à ce que les bouteilles soient rechargées par d’autres opérateurs que le titulaire de la marque d’origine.
49 À cet égard, la circonstance que le produit en cause est composé d’une bouteille destinée à être réutilisée et rechargée de nombreuses fois, ainsi que de son contenu, peut être pertinente aux fins de déterminer s’il peut exister une telle impression erronée dans l’esprit des consommateurs. Certes, il y a lieu de tenir compte du fait que, en raison du rapport fonctionnel entre une bouteille et son contenu, le grand public risque de considérer que les deux ont normalement une même origine
commerciale. Toutefois, s’il était impossible d’utiliser des gaz comprimés ou liquéfiés indépendamment des récipients en métal qui les contiennent et si ce type de bouteilles peut, à ce titre, être considéré comme de l’emballage (voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2014, Utopia, C‑40/14, EU:C:2014:2389, point 40), ces bouteilles – dans la mesure où elles sont destinées à être réutilisées et rechargées de nombreuses fois, selon une logique de recyclage – ne seront pas nécessairement perçues
comme ayant la même origine commerciale que le gaz qu’elles contiennent.
50 S’agissant, en particulier, des conditions de rechargement de bouteilles vides, il convient de présumer, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué au point 56 de ses conclusions, qu’un consommateur qui s’adresse directement à un opérateur autre que le titulaire de la marque d’origine pour faire recharger une bouteille vide ou l’échanger contre une bouteille rechargée sera plus facilement en mesure de connaître l’absence de lien économique entre cet opérateur et le titulaire de la marque.
51 En l’occurrence, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi et des observations écrites des parties au principal, ni les titulaires des marques d’origine ni le revendeur ne proposent leurs bouteilles de dioxyde de carbone directement aux consommateurs, ces bouteilles n’étant disponibles à la vente que dans les magasins des distributeurs.
52 Or, l’absence de contact direct avec le revendeur peut engendrer un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs quant au rapport entre ce revendeur et les titulaires des marques d’origine. Une telle situation est donc susceptible de mettre en péril la réalisation de la fonction essentielle de la marque, rappelée au point 35 du présent arrêt, et de justifier ainsi l’application de l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436 et de l’article 15, paragraphe 2, du
règlement 2017/1001.
53 En troisième lieu, il découle de la jurisprudence de la Cour que le fait que la marque d’origine de la bouteille demeure visible en dépit de l’étiquetage supplémentaire effectué par le revendeur constitue un élément pertinent dans la mesure où il semble exclure le fait que l’étiquetage a modifié l’état des bouteilles en masquant leur origine (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2011, Viking Gas, C‑46/10, EU:C:2011:485, point 41).
54 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 15, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2015/2436 doivent être interprétés en ce sens que le titulaire d’une marque qui a commercialisé, dans un État membre, des produits pourvus de cette marque et destinés à être réutilisés et rechargés de nombreuses fois n’est pas en droit de s’opposer, en vertu de ces dispositions, à la
commercialisation ultérieure de ces produits, dans cet État membre, par un revendeur qui les a rechargés et a remplacé l’étiquette faisant figurer la marque d’origine par un autre étiquetage, tout en laissant apparaître la marque d’origine sur lesdits produits, à moins que ce nouvel étiquetage ne crée l’impression erronée, dans l’esprit des consommateurs, qu’un lien économique existe entre le revendeur et le titulaire de la marque. Ce risque de confusion doit être apprécié globalement au regard
des indications figurant sur le produit et sur son nouvel étiquetage ainsi qu’au regard des pratiques de distribution du secteur concerné et du niveau de connaissance de ces pratiques par les consommateurs.
Sur les dépens
55 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :
L’article 15, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne, et l’article 15, paragraphe 2, de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques,
doivent être interprétés en ce sens que :
le titulaire d’une marque qui a commercialisé, dans un État membre, des produits pourvus de cette marque et destinés à être réutilisés et rechargés de nombreuses fois n’est pas en droit de s’opposer, en vertu de ces dispositions, à la commercialisation ultérieure de ces produits, dans cet État membre, par un revendeur qui les a rechargés et a remplacé l’étiquette faisant figurer la marque d’origine par un autre étiquetage, tout en laissant apparaître la marque d’origine sur lesdits produits, à
moins que ce nouvel étiquetage ne crée l’impression erronée, dans l’esprit des consommateurs, qu’un lien économique existe entre le revendeur et le titulaire de la marque. Ce risque de confusion doit être apprécié globalement au regard des indications figurant sur le produit et sur son nouvel étiquetage ainsi qu’au regard des pratiques de distribution du secteur concerné et du niveau de connaissance de ces pratiques par les consommateurs.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le finnois.