ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)
29 février 2024 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Politique d’asile – Directive 2011/95/UE – Conditions pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale – Contenu de cette protection – Article 5 – Besoins d’une protection internationale apparaissant sur place – Demande ultérieure de reconnaissance du statut de réfugié – Article 5, paragraphe 3 – Notion de “circonstances créées par le demandeur, de son propre fait, après le départ de son pays d’origine” – Intention abusive
et d’instrumentalisation de la procédure applicable – Activités dans l’État membre d’accueil qui ne constituent pas l’expression et la prolongation de convictions ou d’orientations déjà affichées dans le pays d’origine – Conversion religieuse »
Dans l’affaire C‑222/22,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 16 mars 2022, parvenue à la Cour le 29 mars 2022, dans la procédure
Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl
contre
JF,
LA COUR (troisième chambre),
composée de Mme K. Jürimäe, présidente de chambre, MM. N. Piçarra (rapporteur) et N. Jääskinen, juges,
avocat général : M. J. Richard de la Tour,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour JF, par Me C. Schmaus, Rechtsanwalt,
– pour le gouvernement autrichien, par M. A. Posch, Mmes J. Schmoll et V.‑S. Strasser, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement allemand, par M. J. Möller et Mme A. Hoesch, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par Mme A. Azéma et M. L. Hohenecker, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 15 juin 2023,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (JO 2011,
L 337, p. 9).
2 Cette demande a été introduite dans le cadre d’un litige opposant le Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl (Office fédéral pour le droit des étrangers et le droit d’asile, Autriche) (ci‑après le « BFA ») à JF, ressortissant d’un pays tiers, au sujet de la légalité d’une décision de refus de reconnaissance du statut de réfugié à la suite d’une demande ultérieure de protection internationale présentée par ce dernier.
Le cadre juridique
Le droit international
3 L’article 1er, section A, de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)], entrée en vigueur le 22 avril 1954 et complétée par le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New York le 31 janvier 1967, entré en vigueur le 4 octobre 1967 (ci‑après la « convention de Genève »), prévoit :
« Aux fins de la présente Convention, le terme “réfugié” s’appliquera à toute personne :
[...]
(2) Qui, [...] craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle [...], ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y
retourner.
[...] »
4 L’article 2 de cette convention, intitulé « Obligations générales », dispose :
« Tout réfugié a, à l’égard du pays où il se trouve, des devoirs qui comportent notamment l’obligation de se conformer aux lois et règlements ainsi qu’aux mesures prises pour le maintien de l’ordre public. »
5 L’article 33 de ladite convention, intitulé « Défense d’expulsion et de refoulement », prévoit, à son paragraphe 1, qu’« aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ».
6 Aux termes de l’article 42, paragraphe 1 de la même convention, « au moment de la signature, de la ratification ou de l'adhésion, tout État pourra formuler des réserves aux articles de la [présente Convention] autres que les articles 1, 3, 4, 16 (1), 33, 36 à 46 inclus ».
Le droit de l’Union
La directive 2011/95
7 Aux termes des considérants 4, 12, 24 et 25 de la directive 2011/95 :
« (4) La convention de Genève et le protocole y afférent constituent la pierre angulaire du régime juridique international de protection des réfugiés.
[...]
(12) L’objectif principal de la présente directive est, d’une part, d’assurer que tous les États membres appliquent des critères communs pour l’identification des personnes qui ont réellement besoin de protection internationale et, d’autre part, d’assurer un niveau minimal d’avantages à ces personnes dans tous les États membres.
[...]
(24) Il est nécessaire d’adopter des critères communs pour reconnaître aux demandeurs d’asile le statut de réfugié au sens de l’article 1er de la convention de Genève ;
(25) Il faut notamment adopter une définition commune [de la notion de] besoins de protection apparaissant sur place, [...] »
8 L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », est libellé comme suit :
« Aux fins de la présente directive, on entend par :
[...]
d) “réfugié”, tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques, de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays, ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne
peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 12 ;
e) “statut de réfugié”, la reconnaissance, par un État membre, de la qualité de réfugié pour tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride ;
[...] »
9 L’article 4 de ladite directive, compris dans le chapitre II de celle-ci et intitulé « Évaluation des faits et circonstances », dispose, à son paragraphe 3 :
« Il convient de procéder à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale en tenant compte des éléments suivants :
[...]
b) les informations et documents pertinents présentés par le demandeur, y compris les informations permettant de déterminer si le demandeur a fait ou pourrait faire l’objet de persécutions ou d’atteintes graves ;
c) le statut individuel et la situation personnelle du demandeur, y compris des facteurs comme son passé, son sexe et son âge, pour déterminer si, compte tenu de la situation personnelle du demandeur, les actes auxquels le demandeur a été ou risque d’être exposé pourraient être considérés comme une persécution ou une atteinte grave ;
d) le fait que, depuis qu’il a quitté son pays d’origine, le demandeur a ou non exercé des activités dont le seul but ou le but principal était de créer les conditions nécessaires pour présenter une demande de protection internationale, pour déterminer si ces activités l’exposeraient à une persécution ou à une atteinte grave s’il retournait dans ce pays.
[...] »
10 L’article 5 de la même directive, figurant également dans le chapitre II de celle‑ci et intitulé « Besoins d’une protection internationale apparaissant sur place », prévoit :
« 1. Une crainte fondée d’être persécuté ou un risque réel de subir des atteintes graves peut s’appuyer sur des évènements ayant eu lieu depuis le départ du demandeur du pays d’origine.
2. Une crainte fondée d’être persécuté ou un risque réel de subir des atteintes graves peut s’appuyer sur des activités que le demandeur a exercées depuis son départ du pays d’origine, en particulier s’il est établi que les activités invoquées constituent l’expression et la prolongation de convictions ou d’orientations affichées dans le pays d’origine.
3. Sans préjudice de la convention de Genève, les États membres peuvent déterminer qu’un demandeur qui introduit une demande ultérieure ne se voit normalement pas octroyer le statut de réfugié, si le risque de persécutions est fondé sur des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait depuis son départ du pays d’origine. »
11 L’article 10 de la directive 2011/95, figurant dans le chapitre III de celle-ci et intitulé « Motifs de la persécution », dispose, à son paragraphe 1 :
« Lorsqu’ils évaluent les motifs de la persécution, les États membres tiennent compte des éléments suivants :
[...]
b) La notion de religion recouvre, en particulier, le fait d’avoir des convictions théistes, non théistes ou athées, la participation à des cérémonies de culte privées ou publiques, seul ou en communauté, ou le fait de ne pas y participer, les autres actes religieux ou expressions d’opinions religieuses, et les formes de comportement personnel ou communautaire fondées sur des croyances religieuses ou imposées par ces croyances ;
[...] »
12 Aux termes de l’article 13 de cette directive, « [l]es États membres octroient le statut de réfugié à tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui remplit les conditions pour être considéré comme réfugié conformément aux chapitres II et III ».
La directive 2013/32/UE
13 L’article 2, sous q), de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 60), définit une « demande ultérieure » comme « une nouvelle demande de protection internationale présentée après qu’une décision finale a été prise sur une demande antérieure [...] ».
Le droit autrichien
14 L’article 3 du Bundesgesetz über die Gewährung von Asyl (Asylgesetz 2005) [loi fédérale relative à l’octroi du droit d’asile (loi sur le droit d’asile de 2005)], du 16 août 2005 (BGBl. I, 100/2005), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après l’« Asylgesetz 2005 »), intitulé « Statut de bénéficiaire du droit d’asile », prévoit :
« (1) Un ressortissant étranger qui a introduit en Autriche une demande de protection internationale se voit reconnaître le statut de bénéficiaire du droit d’asile, pour autant que cette demande ne doive pas être rejetée au titre des articles 4, 4a ou 5, s’il est vraisemblable qu’il soit menacé de persécution dans son pays d’origine, au sens de l’article 1er, section A, point 2, de la [convention de Genève].
(2) La persécution peut également être fondée sur des évènements survenus après que l’étranger a quitté son pays d’origine [...] ou sur des activités que l’étranger a entreprises depuis son départ du pays d’origine, qui sont notamment l’expression et la prolongation d’une conviction déjà affichée dans le pays d’origine [...] Un étranger qui présente une demande ultérieure [...] ne se voit normalement pas accorder le statut de bénéficiaire du droit d’asile si le risque de persécution résulte de
circonstances que l’étranger a créées de son propre fait depuis son départ de son pays d’origine, à moins qu’il ne s’agisse d’activités autorisées en Autriche pour lesquelles il est établi qu’elles sont l’expression et la prolongation d’une conviction déjà affichée dans le pays d’origine.
[...] »
Le litige au principal et la question préjudicielle
15 Le 3 octobre 2015, JF, un ressortissant iranien, a présenté devant le BFA une demande de protection internationale, en faisant valoir, d’une part, qu’il avait été interrogé par les services secrets iraniens dans l’exercice de son activité professionnelle de moniteur d’autoécole et, d’autre part, qu’il avait fait l’objet de poursuites, en tant qu’étudiant, pour avoir critiqué un prédicateur de religion musulmane.
16 Estimant que ces allégations manquaient de crédibilité, le BFA, par une décision du 7 juin 2017, a rejeté cette demande et a adopté une décision de retour à son égard. Par un jugement du 3 janvier 2018, devenu définitif, le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche) a rejeté comme étant non fondé le recours introduit par JF contre cette décision.
17 Le 26 juin 2019, JF a introduit une demande ultérieure, au sens de l’article 2, sous q), de la directive 2013/32, en faisant valoir que, entretemps, il s’était converti au christianisme et craignait, de ce fait, d’être persécuté dans son pays d’origine. Par une décision du 24 juin 2020, le BFA a refusé de lui reconnaître le statut de réfugié sur le fondement de l’article 3, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’Asylgesetz 2005, dès lors que le risque de persécutions invoqué était apparu sur place
et avait été créé par le demandeur de son propre fait. En revanche, le BFA a constaté que JF avait démontré de manière crédible que sa conversion au christianisme en Autriche était intervenue « par conviction intérieure », qu’il pratiquait activement cette religion et que, pour cette raison, il courait le risque d’être exposé, en cas de retour en Iran, à une persécution individuelle. Dans ces conditions, le BFA a accordé à JF le statut de bénéficiaire de la protection subsidiaire et un droit de
séjour temporaire.
18 Par un jugement du 29 septembre 2020, le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral) a fait droit au recours intenté par JF contre cette décision. Cette juridiction a jugé que, si, lors de l’examen d’une demande ultérieure, le risque de persécutions fondé sur des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait exclut « normalement » la reconnaissance du statut de réfugié, un tel adverbe indique toutefois que, dans certains cas, ce statut peut être accordé, sans préjudice
de l’obligation, imposée à l’autorité compétente par l’article 3, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’Asylgesetz 2005, de vérifier l’existence d’un abus de la part de ce demandeur. Selon ladite juridiction, aucun indice du caractère abusif du comportement de JF ne ressortait de la décision du BFA du 24 juin 2020. En outre, l’absence d’éléments démontrant que la conversion de JF était l’expression et la prolongation d’une conviction déjà affichée dans son pays d’origine ne suffisait pas, selon la
même juridiction, à justifier le refus de reconnaissance du statut de réfugié.
19 Le BFA a introduit un recours en Revision contre ce jugement devant la juridiction de renvoi, à savoir le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), en faisant valoir que le libellé de l’article 3, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’Asylgesetz 2005 exclut une interprétation en ce sens que, dans le cas d’une demande ultérieure fondée sur un risque de persécutions découlant de circonstances créées sur place du propre fait du demandeur, il importe uniquement de déterminer si ces
circonstances ont été invoquées avec une intention abusive. Selon le BFA, cette disposition instaure comme règle générale le refus du statut de réfugié à des demandeurs qui ont créé de leur propre fait, dans l’État membre d’accueil, les circonstances qui sont à l’origine du risque de persécutions invoqué. La seule exception à cette règle générale concernerait le cas dans lequel les activités en cause sont autorisées en Autriche et pour lesquelles il est établi qu’elles sont l’expression et la
prolongation d’une conviction déjà affichée par le demandeur dans le pays d’origine.
20 La juridiction de renvoi fait observer que, dans la mesure où l’article 3, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’Asylgesetz 2005 transpose, dans le droit autrichien, l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, la solution du litige au principal dépend de l’interprétation de cette dernière disposition.
21 Elle relève, à cet égard, d’une part, que, s’agissant de l’expression « sans préjudice de la convention de Genève », qui figure à ladite disposition, la signification du terme en langue allemande « unbeschadet » (« sans préjudice de ») est ambiguë. Selon la première acception de ce terme, la convention de Genève devrait être respectée sans aucune limitation, y compris dans les situations relevant du champ d’application de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, alors que, conformément
à la seconde acception, les États membres pourraient instaurer une présomption d’abus à l’égard des demandes ultérieures fondées sur « des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait depuis son départ du pays d’origine ». D’autre part, l’adverbe « normalement » constituerait une notion indéterminée dont la signification concrète ne pourrait être déduite ni du texte de cette directive ni de ses considérants.
22 Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« L’article 5, paragraphe 3, de la directive [2011/95] doit‑il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une disposition d’un État membre prévoyant qu’un étranger qui présente une demande ultérieure se voit normalement refuser le statut de bénéficiaire du droit d’asile lorsque le risque de persécution résulte de circonstances que l’étranger a créées de son propre fait depuis le départ de son pays d’origine, à moins qu’il ne s’agisse d’activités autorisées en Autriche pour lesquelles il est
établi qu’elles sont l’expression et la prolongation d’une conviction déjà affichée dans le pays d’origine ? »
Sur la question préjudicielle
23 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui subordonne la reconnaissance du statut de réfugié à la suite d’une demande ultérieure, au sens de l’article 2, sous q), de la directive 2013/32, fondée sur un risque de persécutions découlant de circonstances que le demandeur a créées de son propre fait, depuis le départ de son pays d’origine, à la
double condition que ces circonstances relèvent d’activités autorisées dans l’État membre concerné et constituent l’expression et la prolongation d’une conviction du demandeur déjà affichée dans le pays d’origine.
24 Aux termes de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, « [s]ans préjudice de la convention de Genève, les États membres peuvent déterminer qu’un demandeur qui introduit une demande ultérieurene se voit normalement pas octroyer le statut de réfugié, si le risque de persécutions est fondé sur des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait depuis son départ du pays d’origine ».
25 Il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union européenne, une interprétation autonome et uniforme, qui doit être recherchée en tenant compte non seulement de ses termes, mais également du contexte d’une telle disposition et de l’objectif
poursuivi par la réglementation en cause et, le cas échéant, de sa genèse [voir, en ce sens, arrêts du 18 janvier 1984, Ekro, 327/82, EU:C:1984:11, point 11 ; du 19 décembre 2019, Nederlands Uitgeversverbond et Groep Algemene Uitgevers, C‑263/18, EU:C:2019:1111, point 38, ainsi que du 25 juin 2020, Ministerio Fiscal (Autorité susceptible de recevoir une demande de protection internationale), C‑36/20 PPU, EU:C:2020:495, point 53].
26 S’agissant, tout d’abord, des termes de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, il en ressort, d’une part, que les États membres ne sont pas tenus de transposer cette disposition dans leur droit interne, mais « peuvent » le faire, à titre de simple faculté. D’autre part, c’est uniquement dans le cas où le risque de persécutions invoqué par le demandeur à l’appui d’une demande ultérieure est fondé « sur des circonstances qu’il a créées de son propre fait depuis son départ du pays
d’origine » que ce demandeur ne se voit « normalement » pas reconnaître le statut de réfugié. Cet adverbe n’exclut donc pas que, même dans de telles circonstances, un demandeur puisse, sous certaines conditions, se voir reconnaître ce statut.
27 S’agissant, ensuite, du contexte de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, il convient de souligner, ainsi que l’énonce notamment le considérant 4 de cette directive, que la convention de Genève constitue la pierre angulaire du régime juridique international de protection des réfugiés. Il s’ensuit que les dispositions de ladite directive doivent être interprétées non seulement à la lumière de l’économie générale de celle-ci, mais aussi dans le respect de cette convention [voir, en ce
sens, arrêts du 13 janvier 2021, Bundesrepublik Deutschland (Statut de réfugié d’un apatride d’origine palestinienne), C‑507/19, EU:C:2021:3, points 38 et 39, ainsi que du 16 janvier 2024, Intervyuirasht organ na DAB pri MS (Femmes victimes de violences domestiques), C‑621/21, EU:C:2024:47, points 36 et 37].
28 Il importe également de rappeler que l’article 5 de la directive 2011/95 porte, conformément à son intitulé, sur « les besoins d’une protection internationale apparaissant sur place ». Cette notion doit faire l’objet d’une définition commune, ainsi que l’énonce le considérant 25 de cette directive. À cet égard, les paragraphes 1 et 2 de cet article 5, qui, contrairement à son paragraphe 3, s’appliquent à toute demande de protection internationale, précisent qu’une crainte fondée d’être persécuté
peut s’appuyer non seulement sur des évènements ayant eu lieu depuis le départ du demandeur de son pays d’origine, mais aussi sur des activités que ce demandeur a exercées depuis son départ de ce pays. L’emploi de l’expression « en particulier », à cet article 5, paragraphe 2, pour viser l’hypothèse où il est établi que ces activités constituent l’expression et la prolongation de convictions ou d’orientations affichées dans le pays d’origine implique que des activités ne constituant pas une telle
expression et une telle prolongation peuvent, en principe, être également invoquées, que ce soit dans le cadre d’une première demande de protection internationale ou d’une demande ultérieure.
29 Il résulte de ce qui précède que l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95 revêt un caractère dérogatoire par rapport au principe établi aux paragraphes 1 et 2 de cet article, dans la mesure où il autorise qu’un risque de persécutions, invoqué à l’appui d’une demande ultérieure, fondé sur des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait depuis son départ du pays d’origine, aboutisse « normalement » à exclure la reconnaissance du statut de réfugié. Eu égard à ce caractère
dérogatoire, ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 54 de ses conclusions, la faculté que confère aux États membres cet article 5, paragraphe 3, doit être interprétée de manière restrictive.
30 Cette interprétation est confirmée par la définition de la notion de « réfugié », figurant à l’article 1er, section A, point 2, de la convention de Genève et reprise à l’article 2, sous d), de la directive 2011/95, qui ne prévoit aucune restriction à ce que la crainte fondée d’être persécuté en raison de l’un au moins des motifs de persécution y énoncés puisse s’appuyer sur des activités que le demandeur a exercées depuis son départ du pays d’origine et qui ne constituent pas l’expression et la
prolongation de convictions ou d’orientations déjà affichées dans ce pays.
31 Ladite interprétation est également corroborée par la genèse de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95. En effet, il ressort de la proposition de directive du Conseil concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers et les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou la personne qui, pour d’autres raisons, a besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts [COM(2001) 510 final],
présentée par la Commission européenne le 30 octobre 2001 et qui a conduit à l’adoption de la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO 2004, L 304, p. 12), abrogée et remplacée par la
directive 2011/95, que, par l’emploi du verbe « créer » à l’article correspondant, dans la directive 2004/83, à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, la Commission entendait régler la situation dans laquelle la crainte du demandeur d’être persécuté a été « fabriquée de toutes pièces » par celui-ci.
32 Il découle de ce qui précède, ainsi que l’a souligné, en substance, M. l’avocat général aux points 56 et 64 de ses conclusions, que le refus de reconnaître le statut de réfugié à la suite d’une demande ultérieure de protection internationale, sur le fondement de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, tend, eu égard à l’élément intentionnel inhérent à l’expression « circonstances créées de son propre fait », à sanctionner une intention abusive du demandeur qui a « fabriqué de toutes
pièces » les circonstances sur lesquelles repose le risque de persécutions auquel il serait exposé en cas de retour dans son pays d’origine et a ainsi instrumentalisé la procédure d’octroi de protection internationale applicable.
33 Une telle interprétation est enfin confortée par l’objectif principal de cette directive, qui, ainsi qu’énoncé à son considérant 12, consiste, d’une part, à assurer que tous les États membres appliquent des critères communs pour l’identification des personnes qui ont réellement besoin d’une protection internationale et, d’autre part, à garantir un niveau minimal d’avantages à ces personnes dans tous les États membres [voir, en ce sens, arrêt du 6 juillet 2023, Staatssecretaris van Justitie en
Veiligheid (Crime particulièrement grave), C-402/22, EU:C:2023:543, point 36].
34 La question de savoir si les circonstances invoquées dans une demande ultérieure afin d’étayer l’existence d’un risque de persécution fondé sur un motif visé à l’article 10, paragraphe 1, de la directive 2011/95, susceptible de conduire à la reconnaissance du statut de réfugié, relèvent d’une intention abusive et d’instrumentalisation de la procédure applicable exige une évaluation individuelle de cette demande au vu de l’ensemble des circonstances en cause, en tenant compte de tous les éléments
de fait pertinents, effectuée par les autorités compétentes des États membres conformément à l’article 4, paragraphe 3, de cette directive [voir, en ce sens, arrêts du21 septembre 2023, Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie (Opinions politiques dans l’État membre d’accueil), C‑151/22, EU:C:2023:688, point 42, et du 16 janvier 2024, Intervyuirasht organ na DAB pri MS (Femmes victimes de violences domestiques), C‑621/21, EU:C:2024:47, point 60].
35 À cet égard, il importe de souligner que le fait que, depuis qu’il a quitté son pays d’origine, le demandeur a ou non exercé des activités dans le seul but ou le but principal de créer les conditions nécessaires pour présenter une demande de protection internationale, visé à l’article 4, paragraphe 3, sous d), de cette directive, ne constitue qu’un élément dont les autorités nationales compétentes doivent tenir compte aux fins de cette évaluation individuelle. Celles-ci doivent en effet procéder
à un examen complet de toutes les circonstances propres au cas individuel du demandeur, en prenant en considération l’ensemble des éléments énumérés aux points a) à e) du paragraphe 3 de cet article 4.
36 Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutiennent les gouvernements autrichien et allemand dans leurs observations écrites, l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95 ne saurait être interprété en ce sens que la transposition facultative de cette disposition dispense les États membres de prévoir l’obligation, pour les autorités nationales compétentes, de procéder à une évaluation individuelle de toute demande ultérieure de protection internationale. Cette disposition ne saurait non plus
être interprétée en ce sens qu’une telle transposition permet aux États membres d’instaurer une présomption selon laquelle toute demande ultérieure fondée sur des circonstances que le demandeur a créées de son propre fait depuis son départ du pays d’origine procède a priori d’une intention abusive et d’instrumentalisation de la procédure d’octroi de la protection internationale, présomption qu’il incomberait à ce demandeur de renverser.
37 En effet, de telles interprétations reviendraient à priver d’effet utile les dispositions de l’article 4 de la directive 2011/95, qui sont applicables à toutes les demandes de protection internationale, quels que soient les motifs de persécution invoqués à l’appui de ces demandes [voir, en ce sens, arrêts du 25 janvier 2018, F, C‑473/16, EU:C:2018:36, point 36, et du 21 septembre 2023, Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie (Opinions politiques dans l’État membre d’accueil), C‑151/22,
EU:C:2023:688, point 41]. Plus particulièrement, le paragraphe 3 de cet article 4 impose à l’autorité nationale compétente de procéder à un examen complet de toutes les circonstances propres au cas individuel du demandeur, ce qui exclut toute forme d’automaticité (voir, par analogie, arrêts du 13 septembre 2018, Ahmed, C‑369/17, EU:C:2018:713, points 48 et 49, ainsi que du 22 septembre 2022, Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság e.a., C‑159/21, EU:C:2022:708, points 72 et 73).
38 En l’occurrence, à la suite d’une évaluation individuelle de la demande ultérieure introduite par JF, conformément à l’article 4, paragraphe 3, de la directive 2011/95, le BFA a constaté que l’intéressé avait démontré de manière crédible qu’il s’était converti « par conviction intérieure » au christianisme en Autriche et qu’il pratiquait activement cette religion, raison pour laquelle il courait le risque d’être exposé, en cas de retour dans son pays d’origine, à une persécution individuelle. Or,
une telle constatation, si elle se révèle exacte, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, est de nature à exclure l’existence d’une intention abusive et d’instrumentalisation, par ce demandeur, de la procédure applicable, susceptible de conduire l’autorité nationale compétente à refuser de lui reconnaître le statut de réfugié sur le fondement de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive.
39 Si un tel demandeur remplit, par ailleurs, les conditions, prévues par les dispositions du chapitre III de la directive 2011/95, pour être qualifié de « réfugié », au sens de l’article 2, sous d), de cette directive, l’article 13 de celle-ci impose à l’État membre concerné de lui reconnaître le statut de réfugié, au sens de l’article 2, sous e), de ladite directive [voir, en ce sens, arrêts du 24 juin 2015, T., C‑373/13, EU:C:2015:413, point 63, ainsi que du 16 janvier 2024, Intervyuirasht organ
na DAB pri MS (Femmes victimes de violences domestiques), C‑621/21, EU:C:2024:47, point 72].
40 En revanche, dans tous les cas où le risque de persécutions invoqué à l’appui d’une demande ultérieure se fonde sur les circonstances décrites à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, mais à l’égard desquelles, à la suite d’une évaluation individuelle de cette demande, effectuée conformément à l’article 4, paragraphe 3, de cette directive, il est constaté que ces circonstances relèvent d’une intention abusive et d’instrumentalisation, par ce demandeur, de la procédure applicable, cet
article 5, paragraphe 3, autorise l’État membre concerné à prévoir que ce demandeur ne se verra en principe pas reconnaître le statut de réfugié, au sens de l’article 2, sous e), de la directive 2011/95, alors même que ledit demandeur craint avec raison d’être persécuté dans son pays d’origine en conséquence de telles circonstances et, partant, devrait être qualifié de « réfugié », au sens de l’article 1er, section A, de la convention de Genève et de l’article 2, sous d), de la directive 2011/95.
En effet, la qualité de réfugié, au sens de ces dispositions, ne dépend pas de la reconnaissance formelle d’une telle qualité par l’octroi du « statut de réfugié », au sens de l’article 2, sous e), de cette directive [arrêt du 14 mai 2019, M e.a. (Révocation du statut de réfugié), C‑391/16, C‑77/17 et C‑78/17, EU:C:2019:403, point 90].
41 C’est dans ce contexte qu’il y a lieu d’examiner le sens et la portée de l’expression « sans préjudice de la convention de Genève », figurant à l’article 5, paragraphe 3, de cette directive. À cet égard, la juridiction de renvoi fait observer que, dans la version en langue allemande de cette disposition, si le terme « unbeschadet » peut signifier « en accord avec », il peut inversement signifier « sans tenir compte de ». Selon elle, cette dernière acception du terme « unbeschadet », si elle
devait prévaloir, laisserait entendre que l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95 permet aux États membres, dans le cas de figure qu’il prévoit, de ne pas tenir compte des dispositions de cette convention.
42 Cependant, la formulation utilisée dans l’une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition, ou se voir attribuer un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques. La nécessité, rappelée au point 25 du présent arrêt, d’une interprétation et d’une application uniformes de chaque disposition du droit de l’Union exclut que celle-ci soit considérée isolément dans l’une de ses versions
linguistiques et exige qu’elle soit interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément [voir, en ce sens, arrêts du 12 novembre 1969, Stauder, 29/69, EU:C:1969:57, points 2 et 3, ainsi que du 15 septembre 2022, Minister for Justice and Equality (Ressortissant de pays tiers cousin d’un citoyen de l’Union), C‑22/21, EU:C:2022:683, point 20].
43 Or, dans les versions, notamment, en langue espagnole, tchèque, anglaise, hongroise, portugaise, finnoise et suédoise, l’expression équivalente à « unbeschadet » en langue allemande, figurant à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, doit être comprise en ce sens que les États membres doivent tenir compte des dispositions de la convention de Genève lorsqu’ils transposent la faculté que leur confère cet article 5, paragraphe 3, de ne pas reconnaître « normalement » le statut de réfugié
à un demandeur dans les circonstances visées au point 32 du présent arrêt. Il s’ensuit que le terme « unbeschadet », figurant dans la version en langue allemande de cette disposition, doit être compris dans ce même sens, conformément tant à l’économie générale qu’à la finalité de la directive 2011/95, telles que rappelées, respectivement, aux points 27 et 33 du présent arrêt.
44 Partant, dans tous les cas où il est établi par l’autorité nationale compétente, saisie d’une demande ultérieure, que les circonstances dont le demandeur fait état relèvent d’une intention abusive et d’instrumentalisation de la procédure applicable, de telle sorte que le statut de réfugié peut lui être refusé sur le fondement de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95, l’expression « sans préjudice de la convention de Genève » commande, si cette autorité constate, à la lumière de ces
circonstances, l’existence d’un risque vraisemblable de persécutions en cas de retour du demandeur dans son pays d’origine, que ce demandeur puisse néanmoins bénéficier, dans l’État membre concerné, des droits garantis par la convention de Genève qui ne peuvent faire l’objet d’aucune réserve, conformément à l’article 42, paragraphe 1, de cette convention. Parmi ces droits figure celui garanti par l’article 33, paragraphe 1, de cette convention, aux termes duquel aucun État contractant n’expulsera
ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison, notamment, de sa religion.
45 Enfin, s’agissant des interrogations de la juridiction de renvoi au sujet de la compatibilité, avec la directive 2011/95, de la condition imposée par la réglementation nationale qui a transposé l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, en vertu de laquelle les activités à l’origine du risque de persécutions dont le demandeur se prévaut doivent être autorisées dans l’État membre d’accueil, il suffit de rappeler que, aux termes de l’article 2 de la convention de Genève, « tout réfugié a, à
l’égard du pays où il se trouve, des devoirs qui comportent notamment l’obligation de se conformer aux lois et aux règlements ainsi qu’aux mesures prises pour le maintien de l’ordre public ». Il s’ensuit que l’expression « sans préjudice de la convention de Genève », figurant à cet article 5, paragraphe 3, ne saurait être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une telle condition prévue par le droit national.
46 Eu égard aux motifs qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui subordonne la reconnaissance du statut de réfugié à la suite d’une demande ultérieure, au sens de l’article 2, sous q), de la directive 2013/32, fondée sur un risque de persécutions découlant de circonstances que le demandeur a créées de son propre fait, depuis le départ de son pays
d’origine, à la condition que ces circonstances constituent l’expression et la prolongation d’une conviction du demandeur déjà affichée dans ce pays.
Sur les dépens
47 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :
L’article 5, paragraphe 3, de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection,
doit être interprété en ce sens que :
il s’oppose à une réglementation nationale qui subordonne la reconnaissance du statut de réfugié à la suite d’une demande ultérieure, au sens de l’article 2, sous q), de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, fondée sur un risque de persécutions découlant de circonstances que le demandeur a créées de son propre fait, depuis le départ de son pays d’origine, à la
condition que ces circonstances constituent l’expression et la prolongation d’une conviction du demandeur déjà affichée dans ce pays.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.