ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
19 septembre 2024 ( *1 )
« Pourvoi – Aides d’État – Régime d’aides mis à exécution par le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord en faveur de certains groupes multinationaux – Imposition des bénéfices financiers non commerciaux des sociétés étrangères contrôlées (SEC) – Exonérations – Fonctions humaines significatives – Détournement artificiel de bénéfices – Érosion de la base imposable – Décision déclarant le régime d’aides incompatible avec le marché intérieur et ordonnant la récupération des aides versées –
Cadre de référence – Droit national applicable – Imposition dite “normale” »
Dans les affaires jointes C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P,
ayant pour objet trois pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits respectivement les 16 août, 17 août et 25 août 2022,
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté initialement par M. L. Baxter, puis par MM. L. Baxter et S. Fuller, puis par Mme R. Fadoju et M. S. Fuller et, enfin, par M. S. Fuller, en qualité d’agents, assistés de M. P. Baker, KC, et M. T. Johnston, barrister,
partie requérante et partie demanderesse en première instance (C‑555/22 P),
partie intervenante en première instance (C‑556/22 P et C‑564/22 P),
ITV plc, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par M. K. Beal, KC, et Mme J. Lesar, solicitor,
partie requérante (C‑556/22 P),
partie demanderesse en première instance (C‑556 P et C‑564/22 P),
et
LSEGH (Luxembourg) Ltd, établie à Londres,
London Stock Exchange Group Holdings (Italy) Ltd, établie à Londres,
représentées par Mes O. W. Brouwer, A. Pliego Selie, advocaten, et Me A. von Bonin, Rechtsanwalt,
parties requérantes (C‑564/22 P),
parties intervenantes en première instance (C‑556/22 P et C-564/22 P),
l’autre partie à la procédure étant :
Commission européenne, représentée par MM. M. Farley, L. Flynn, et B. Stromsky, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance (C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P),
LA COUR (deuxième chambre),
composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, MM. F. Biltgen, N. Wahl (rapporteur), D. Gratsias et Mme M. L. Arastey Sahún, juges,
avocat général : Mme L. Medina,
greffier : Mme R. Stefanova-Kamisheva, administratrice,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 janvier 2024,
ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 11 avril 2024,
rend le présent
Arrêt
1 Par leurs pourvois respectifs, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (C‑555/22 P), ITV plc (C‑556/22 P) ainsi que LSEGH (Luxembourg) Ltd et London Stock Exchange Group Holdings (Italy) Ltd (ci-après, ensemble, « LSEGH ») (C‑564/22 P) demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juin 2022, Royaume-Uni et ITV/Commission (T‑363/19 et T‑456/19, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2022:349), par lequel celui-ci a rejeté les recours du Royaume-Uni et d’ITV,
soutenue par LSEGH, tendant à l’annulation de la décision (UE) 2019/1352 de la Commission, du 2 avril 2019, concernant l’aide d’État SA.44896 mise à exécution par le Royaume-Uni en ce qui concerne l’exonération sur le financement des groupes au titre des règles relatives aux SEC (JO 2019, L 216, p. 1, ci‑après la « décision litigieuse »).
Le droit du Royaume-Uni
2 Au Royaume-Uni, les règles fiscales concernant les sociétés étrangères contrôlées (SEC) sont énoncées à la partie 9 A de la Taxation (International and Other Provisions) Act 2010 [loi de 2010 sur la fiscalité (dispositions internationales et autres dispositions), ci-après la « TIOPA »].
3 Les dispositions pertinentes de la partie 9 A de la TIOPA sont les suivantes :
« [...]
Chapitre no 1
Vue d’ensemble
371AA Vue d’ensemble de [la] partie [9 A de la TIOPA]
(1) Un prélèvement (“prélèvement SEC”) est appliqué en vertu de la présente partie aux sociétés établies au Royaume-Uni qui ont certains intérêts dans des SEC.
(2) Le prélèvement SEC est appliqué sur les bénéfices imposables des SEC.
(3) Une “SEC” est une société non établie au Royaume-Uni qui est contrôlée par une ou plusieurs personnes établies au Royaume-Uni [...]
(4) Le chapitre no 2 définit les caractéristiques de base du prélèvement SEC, y compris[ :]
(a) le point de contrôle du prélèvement SEC (par lequel doivent passer les bénéfices d’une SEC pour que ce prélèvement leur soit applicable), et
(b) les étapes à suivre pour appliquer le prélèvement SEC.
(5) Au chapitre no 2 s’ajoutent les chapitres nos 3 à 17 ; en particulier[ :]
(a) le chapitre no 3 définit comment déterminer si (et, dans l’affirmative, lesquels parmi) les chapitres nos 4 à 8 s’appliquent aux bénéfices d’une SEC,
(b) dans la mesure où ils sont applicables, les chapitres nos 4 à 8 définissent comment déterminer si (et, dans l’affirmative, lesquels parmi) les bénéfices d’une SEC passent par un point de contrôle du prélèvement SEC [...]
(c) le chapitre no 9 définit les exonérations pour les bénéfices issus de prêts éligibles,
(d) les chapitres nos 10 à 14 définissent les exonérations totales du prélèvement SEC,
[...]
(12) La présente partie relève des Corporation Tax Acts [(lois relatives à l’impôt sur les sociétés)].
Chapitre no 2
Le prélèvement SEC
371BA Introduction au prélèvement SEC
(1) Le prélèvement SEC est perçu au titre de l’exercice comptable des SEC conformément à l’article 371BC.
[...]
371BB Le point de contrôle du prélèvement SEC
(1) Suivez les étapes ci-après pour déterminer dans quelle mesure les bénéfices totaux estimés d’une SEC au titre d’un exercice comptable passent par le point de contrôle du prélèvement SEC.
Étape 1 Conformément au chapitre no 3, déterminez si (et, dans l’affirmative, lesquels parmi) les chapitres nos 4 à 8 s’appliquent à l’exercice comptable. Si aucun de ces chapitres ne s’applique, aucun des bénéfices totaux estimés de la SEC ne passe par le point de contrôle du prélèvement SEC et l’étape 2 n’est pas à suivre.
Étape 2 Déterminez dans quelle mesure les bénéfices totaux estimés de la SEC relèvent de l’un des chapitres qui s’appliquent à l’exercice comptable [...]
(2) Le paragraphe 1 [ci-dessus] s’applique sous réserve [du :]
(a) chapitre no 9 (exonérations pour les bénéfices issus de prêts éligibles) [...]
[...]
371BC Application du prélèvement SEC
[...]
(3) [...]
“le taux approprié” [...] signifie[ :]
[...]
(b) s’il y a plus qu’un [...] taux, le taux moyen au cours de l’ensemble de l’exercice comptable pertinent [...]
[...]
Chapitre no 3
Le point de contrôle du prélèvement SEC : déterminer si (et, dans l’affirmative, lequel parmi) les chapitres nos 4 à 8 s’appliquent
[...]
371CB Le chapitre no 5 est-il applicable ?
(1) [...]le chapitre no 5 (bénéfices financiers non commerciaux) s’applique à l’exercice comptable d’une SEC si (et seulement si) la SEC a réalisé des bénéfices financiers non commerciaux.
(2) Dans le présent article et dans le chapitre no 5, les références aux bénéfices financiers non commerciaux de la SEC visent ces bénéfices à l’exclusion de tout bénéfice relevant des paragraphes 3 et 4 [ci-après] ou du chapitre no 8 [...]
[...]
(8) Dans le cas d’une société imposable qui introduit une demande au titre du chapitre no 9, les références, dans le présent article et dans le chapitre no 5, aux bénéfices financiers non commerciaux d’une SEC visent ces bénéfices tout en excluant aussi les bénéfices issus de prêts éligibles (tels qu’ils sont définis au chapitre no 9).
[...]
Chapitre no 4
Le point de contrôle du prélèvement SEC : bénéfices pouvant être attribués à des activités au Royaume-Uni
371DA Introduction au chapitre no 4
(1) Suivez les étapes exposées à l’article 371DB, paragraphe 1, pour déterminer les bénéfices de la SEC qui relèvent du présent chapitre [...]
(2) Dans le présent chapitre, les références aux bénéfices totaux estimés de la SEC visent ces bénéfices tout en excluant ses éventuels bénéfices financiers non commerciaux [...]
(3) Aux fins du présent chapitre[ :]
(a) “le rapport de l’OCDE” désigne le rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (“OCDE”) sur l’attribution de bénéfices aux établissement stables du 22 juillet 2010,
[...]
(f) “FHS” désigne une fonction humaine significative [...]
(g) une FHS est une “FHS du RU” dans la mesure où la FHS est assurée au Royaume-Uni [...]
(h) une FHS est une “FHS hors RU” dans la mesure où elle n’est pas une FHS du RU.
[...]
371DB Les étapes
(1) Voici les [huit] étapes visées à l’article 371DA, paragraphe 1.
Les étapes doivent être suivies conformément aux principes exposés dans le rapport de l’OCDE (dans la mesure où il est pertinent).
Étape 1 Identifiez les actifs dont la SEC dispose ou a disposé, et les risques que la SEC supporte ou a supportés, et dont résultent des montants inclus dans les bénéfices totaux estimés de la SEC. Les actifs et les risques [ainsi] identifiés sont dénommés “les actifs et risques pertinents”
Étape 2 [...]
Étape 3 Identifiez les FHS assurées par le groupe dont relève la SEC qui sont pertinentes pour[ :]
(a) la propriété économique des actifs inclus dans les actifs et risques pertinents, ou
(b) la prise en charge et la gestion des risques inclus dans les actifs et risques pertinents.
À cet effet, présumez que le groupe dont relève la SEC est une société unique.
Étape 4 Déterminez dans quelle mesure les FHS identifiées à l’étape 3 sont des FHS du RU et dans quelle mesure elles sont des FHS hors RU. Si aucune des FHS n’est une FHS du RU, dans quelque mesure que ce soit, aucun bénéfice ne relève donc de ce chapitre et il n’y a pas lieu de suivre les autres étapes.
Étape 5 Présumez que les FHS du RU déterminées à l’étape 4 sont assurées par un établissement stable que la SEC possède au Royaume-Uni et, en conséquence, déterminez dans quelle mesure les actifs et risques inclus dans les actifs et risques pertinents seraient attribués à l’établissement stable. [...]
[...]
Étape 7 Déterminez à nouveau les bénéfices totaux estimés de la SEC en partant du principe que la SEC[ :]
(a) ne détient pas, ou n’a pas détenu, les actifs inclus dans les actifs et les risques pertinents, et
(b) ne supporte pas, ou n’a pas supporté, les risques inclus dans les actifs et les risques pertinents,
dans la mesure où ceux-ci seraient attribués à l’établissement stable mentionné à l’étape 5. Les “bénéfices provisoires du chapitre no 4” sont les bénéfices totaux estimés de la SEC dans la mesure où ils sont exclus de la nouvelle détermination des bénéfices.
Étape 8 Excluez des bénéfices provisoires du chapitre no 4 les montants qui doivent être exclus en vertu des articles 371DD, 371DE ou 371DF. Les bénéfices restants (s’il y en a) relèvent du présent chapitre.
[...]
Chapitre no 5
Le point de contrôle du prélèvement SEC : bénéfices financiers non commerciaux
371EA La règle de base
(1) Les bénéfices de la SEC relevant du présent chapitre aux fins de l’étape 2 de l’article 371BB, paragraphe 1 (le point de contrôle du prélèvement SEC), sont ses bénéfices financiers non commerciaux dans la mesure où ils relèvent de l’un des articles 371EB à 371EE.
(2) Les références dans le présent chapitre aux bénéfices financiers non commerciaux doivent être lues conformément à l’article 371CB, paragraphe 2, et, dans la mesure où il est applicable, à l’article 371CB, paragraphe 8.
371EB Activités au Royaume-Uni
(1) Pour déterminer dans quelle mesure les bénéfices financiers non commerciaux de la SEC relèvent du présent article, suivez les étapes 1 à 5 et 7 de l’article 371DB, paragraphe 1, comme si les références à l’article 371DB aux bénéfices totaux estimés de la SEC étaient des références aux bénéfices financiers non commerciaux.
(2) Les bénéfices financiers non commerciaux relèvent du présent article dans la mesure où ils seraient inclus dans les bénéfices provisoires du chapitre no 4 déterminés conformément au paragraphe 1 [du présent article].
371EC Investissement de capitaux depuis le Royaume-Uni
(1) Les bénéfices financiers non commerciaux relèvent du présent article dans la mesure où ils résultent de fonds ou d’autres actifs pertinents au Royaume-Uni.
[...]
Chapitre no 9
Exonérations pour les bénéfices issus de prêts éligibles
371IA La règle de base
(1) Le présent chapitre s’applique si[ :]
(a) mis à part le présent chapitre, le chapitre no 5 (bénéfices financiers non commerciaux) s’applique pour un exercice comptable de la SEC,
(b) les bénéfices financiers non commerciaux de la SEC incluent des bénéfices issus de prêts éligibles, et
(c) la condition relative aux locaux d’affaires [...] est satisfaite.
(2) Une société imposable (“société S”) au titre de l’exercice comptable peut présenter une demande [...] afin que l’étape 2 de l’article 371BB, paragraphe 1 (le point de contrôle du prélèvement SEC), soit appliquée, dans le cas de la société S seulement, sous réserve du présent chapitre.
(3) Si la société S présente une demande, dans le cas de la société S seulement, les bénéfices issus de prêts éligibles passent par le point de contrôle du prélèvement SEC dans la mesure où (et seulement dans la mesure où) ils ne sont pas exonérés en vertu du présent chapitre.
[...]
371IG Qu’est-ce qu’un “prêt éligible” ?
(1) Dans le présent chapitre, “prêt éligible” signifie une relation portant sur une créance de la SEC[ :]
(a) dont le débiteur final est une société éligible [...]
[...]
[...]
(8) Dans le présent chapitre, “société éligible” signifie une société qui[ :]
(a) est liée à la SEC, et
(b) est contrôlée par la ou les personnes établies au Royaume-Uni qui contrôlent la SEC.
371IH Exclusions de la définition de “prêts éligibles”
[...]
(2) Si le débiteur final d’une créance de la SEC est une société établie au Royaume-Uni, cette créance ne peut être un prêt éligible que lorsque[ :]
(a) [les dispositions sur l’]exonération des bénéfices ou des pertes des établissements stables étrangers sont applicables à [cette] société, et
(b) toutes les dettes de ladite société sont comptabilisées [en vue de l’application de ces dispositions]
[...] »
4 La partie 2 de la TIOPA est consacrée à l’allègement de la double imposition, ainsi que cela ressort de son titre.
Les antécédents du litige
5 Pour les besoins de la présente procédure, les antécédents du litige, exposés aux points 1 à 28 de l’arrêt attaqué, peuvent être présentés de la manière suivante.
Sur le groupe ITV
6 ITV, résidente fiscale au Royaume-Uni, est la société holding à la tête du groupe éponyme, actif dans la création, la production et la distribution de contenus audiovisuels par l’intermédiaire de diverses plateformes dans le monde, qui comprend notamment des SEC.
7 Au cours de plusieurs exercices comptables, allant au moins jusqu’à celui de 2016, les bénéfices imputés à ITV résultant des intérêts sur certains des prêts consentis par des SEC contrôlées par cette société ont fait l’objet d’une demande d’exonération au titre du chapitre no 9 de la partie 9 A de la TIOPA (ci-après le « chapitre no 9 »).
Sur les règles fiscales nationales présentées par le Tribunal
8 Le Tribunal a résumé les règles fiscales nationales dans les termes qui suivent :
« 3 En vertu du système d’imposition des sociétés au Royaume-Uni, les sociétés sont imposées sur leurs bénéfices générés par des activités et des actifs au Royaume-Uni. Conformément au principe de territorialité, les bénéfices des sociétés étrangères qui sont redistribués au Royaume-Uni ne sont pas imposés. De même, les bénéfices attribuables à des établissements stables étrangers ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni.
4 Les règles applicables aux SEC déterminent de manière générale si les bénéfices d’une SEC peuvent être considérés comme ayant été artificiellement détournés du Royaume-Uni et sont, dès lors, imposés au Royaume-Uni par le biais d’un prélèvement spécifique sur ces bénéfices[, à savoir le prélèvement SEC, visé à l’article 371AA de la partie 9 A de la TIOPA].
5 Le chapitre no 2 de la partie 9 A de la TIOPA définit, de manière générale, à son article 371BA, ce [...] prélèvement comme étant l’impôt appliqué, pour un exercice comptable, sur les bénéfices imposables d’une SEC, ces derniers étant définis, à l’article 371BB, comme étant ceux qui sont imposés au titre des chapitres nos 4 à 8 de la partie 9 A de la TIOPA [...], sous réserve, notamment, de l’application du chapitre no 9 [...], qui prévoit des exonérations.
6 Au sein du chapitre no 5 de la partie 9 A de la TIOPA, l’article 371EA prévoit que les bénéfices financiers non commerciaux d’une SEC sont imposés au Royaume-Uni dans la mesure où ils relèvent des situations suivantes :
– les bénéfices financiers non commerciaux issus d’activités dont les [FHS] sont effectuées au Royaume-Uni sont visés par l’article 371EB de la partie 9 A de la TIOPA, sous le titre “Activités au Royaume-Uni” ;
– les bénéfices financiers non commerciaux issus de fonds ou d’actifs en provenance du Royaume-Uni sont visés par l’article 371EC de la partie 9 A de la TIOPA, sous le titre “Investissements de capitaux depuis le Royaume-Uni” ;
[...]
8 Le chapitre no 9 [...] prévoit que les entités imposables peuvent introduire une demande d’exonération du prélèvement SEC, qui aurait été dû au titre du chapitre no 5 de la partie 9 A de la TIOPA, pour des bénéfices financiers non commerciaux issus de prêts éligibles [...] »
9 À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 8, dernière phrase, de l’arrêt attaqué que, « [e]n vertu de l’article 371IG [du chapitre no 9], les prêts éligibles sont, en substance, des prêts intragroupe accordés par la SEC à d’autres membres du groupe multinational non-résidents au Royaume-Uni ». Cette définition doit être lue à la lumière du point 145 de cet arrêt, auquel le Tribunal a précisé que, en vertu de l’article 371IH [du chapitre no 9], sont exclus de la définition de prêts éligibles
notamment les prêts accordés à une société établie au Royaume-Uni ou à un établissement stable dans cet État d’une société non-résidente.
10 En outre, au point 9 dudit arrêt, il a indiqué que le chapitre no 9 prévoyait les trois types d’exonérations suivantes (ci-après les « exonérations en cause ») :
– une exonération pouvant s’appliquer à 75 % des bénéfices financiers non commerciaux imposables, issus de prêts éligibles ;
– une exonération pouvant être totale, lorsque et dans la mesure où les prêts éligibles sont financés à l’aide de ressources de la SEC, et
– une exonération, dite des « intérêts équivalents », qui peut être appliquée, sous certaines conditions, au solde des bénéfices financiers non commerciaux imposables.
Sur la décision litigieuse
11 Dans la décision litigieuse, adoptée à l’issue de la procédure formelle d’examen, au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, la Commission européenne a considéré que le régime résultant des exonérations en cause (ci-après le « régime contesté ») constituait une aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, dans la mesure où il s’appliquait à des bénéfices financiers non commerciaux découlant de prêts éligibles, lesquels relevaient de l’article 371EB du chapitre no 5 de la
partie 9 A de la TIOPA (ci-après le « chapitre no 5 »). Plus particulièrement, elle a considéré que les exonérations en cause constituaient un régime d’aides, au sens de l’article 1er, sous d), du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9), que ce régime était incompatible avec le marché intérieur et qu’il avait été mis à exécution illégalement par le Royaume-Uni, en violation de l’article 108,
paragraphe 3, TFUE (article 1er de la décision litigieuse).
12 La Commission a toutefois estimé que le régime contesté ne constituait pas une aide lorsqu’il s’appliquait à des bénéfices financiers non commerciaux découlant de prêts éligibles qui remplissaient le critère résultant de l’article 371EC du chapitre no 5, fondé sur les capitaux liés au Royaume-Uni (ci-après le « critère des capitaux liés au Royaume-Uni »), et qui ne remplissaient pas le critère résultant de l’article 371EB de ce chapitre, fondé sur le fait que les FHS pertinentes étaient assurées
au Royaume-Uni (ci-après le « critère des FHS au Royaume-Uni »).
13 Pour parvenir aux conclusions exposées aux points 11 et 12 du présent arrêt, la Commission a analysé les conditions devant être remplies afin de qualifier les exonérations en cause d’aides d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
14 Après avoir constaté que les exonérations en cause constituaient des mesures imputables au Royaume-Uni et financées au moyen de ressources de cet État, qu’elles étaient susceptibles d’affecter les échanges entre les États membres et qu’elles faussaient ou menaçaient de fausser la concurrence, la Commission s’est concentrée sur l’existence d’un avantage sélectif.
15 Aussi, la Commission a relevé que les exonérations en cause conféraient un avantage économique dès lors qu’elles permettaient à une société établie au Royaume-Uni et contrôlant une SEC, qui aurait autrement fait l’objet d’un prélèvement SEC en vertu du chapitre no 5, de demander, au titre du chapitre no 9, que ce prélèvement s’applique uniquement à 25 % des bénéfices financiers non commerciaux de cette SEC, dans la mesure où ceux-ci étaient issus de prêts éligibles, de sorte que 75 % de ces
bénéfices étaient exonérés dudit prélèvement. Sous certaines conditions, le même prélèvement pouvait s’appliquer à un pourcentage encore plus réduit, conduisant à une exonération pouvant couvrir jusqu’à 100 % des bénéfices concernés de la SEC.
16 S’agissant de la nature sélective des exonérations en cause, la Commission a considéré que le cadre de référence était constitué par les règles applicables aux SEC, énoncées à la partie 9 A de la TIOPA, et que ces exonérations constituaient une dérogation à ce cadre.
17 Dans ce contexte, la Commission a soutenu que la situation d’une entité imposable qui contrôlait une SEC réalisant des bénéfices financiers non commerciaux découlant de prêts éligibles était comparable à la situation d’une entité imposable qui contrôlait une SEC réalisant d’autres bénéfices financiers non commerciaux, particulièrement dans le cadre de prêts consentis par cette SEC à des sociétés liées résidant au Royaume-Uni, dits « prêts en amont », et de prêts consentis par ladite SEC à des
tiers, désignés comme des « prêts fictifs ».
18 La Commission a rappelé qu’une mesure dérogatoire au cadre de référence pouvait être néanmoins justifiée par la nature ou l’économie générale de ce cadre et qu’il incombait à l’État membre concerné de prouver une telle justification. Le Royaume-Uni avait fait valoir, d’une part, que les exonérations en cause visaient à garantir que le système soit gérable et administrable. D’autre part, elles assureraient l’exercice de la liberté d’établissement au sein de l’Union européenne.
19 À cet égard, la Commission a admis que, pour autant que le régime contesté couvrait des situations qui entraient dans le champ d’application du chapitre no 5 en vertu du critère des capitaux liés au Royaume-Uni, il pouvait être considéré comme visant à assurer la praticabilité administrative des règles applicables aux SEC.
20 En revanche, la Commission a exclu que ce régime, en ce qu’il était applicable à des situations remplissant le critère des FHS au Royaume-Uni, puisse être justifié par la nécessité de disposer de règles antiévasion administrables et gérables ou par celle de respecter les libertés inscrites dans les traités.
21 Par ailleurs, elle a précisé que, à la suite des modifications apportées aux règles applicables aux SEC, dans le cadre de la transposition de la directive (UE) 2016/1164 du Conseil, du 12 juillet 2016, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur (JO 2016, L 193, p. 1), à compter du 1er janvier 2019, et selon lesquelles il n’était plus possible de demander les exonérations en cause s’agissant des
bénéfices remplissant le critère des FHS au Royaume-Uni, le régime contesté était devenu conforme aux règles relatives aux aides d’État.
22 Quant à la compatibilité avec le marché intérieur du régime contesté, la Commission a, en substance, exposé que les aides octroyées en vertu de celui-ci ne facilitaient pas le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, de sorte qu’elles n’étaient pas couvertes par l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.
23 Enfin, en l’absence d’une violation des principes fondamentaux du droit de l’Union, la Commission a ordonné la récupération des aides accordées dans le cadre de l’application du régime contesté auprès de leurs bénéficiaires.
Les recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
24 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 juin 2019, le Royaume-Uni a introduit le recours dans l’affaire T‑363/19, tendant à l’annulation de la décision litigieuse.
25 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juillet 2019, ITV a introduit le recours dans l’affaire T‑456/19, tendant à l’annulation de cette décision.
26 Par décision du 29 janvier 2020, le Royaume-Uni a été admis à intervenir dans l’affaire T‑456/19, au soutien des conclusions d’ITV.
27 Par l’ordonnance du 24 novembre 2020, ITV/Commission (T‑456/19, EU:T:2020:640), le Tribunal a accueilli la demande de LSEGH d’être admise à intervenir dans l’affaire T‑456/19, au soutien de conclusions d’ITV.
28 Par décision du 21 juillet 2021, les affaires T‑363/19 et T‑456/19 ont été jointes aux fins de la phase orale de la procédure.
29 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal, après avoir joint les affaires T‑363/19 et T‑456/19 aux fins de celui-ci, a rejeté les recours.
30 À cet effet, le Tribunal a notamment examiné la condition tenant à l’existence d’un avantage sélectif, en appliquant l’analyse en trois étapes, requise conformément à l’arrêt du 21 décembre 2016, Commission/World Duty Free Group e.a. (C‑20/15 P et C‑21/15 P, EU:C:2016:981, points 57 et 58), cité au point 61 de l’arrêt attaqué, qui consiste, d’abord, à identifier le cadre de référence, ensuite, à vérifier si le régime contesté dérogeait à ce cadre, au regard de l’objectif poursuivi par ce dernier,
et, enfin, à établir si l’État membre concerné avait démontré que la différenciation introduite par ce régime était justifiée, dès lors qu’elle résultait de la nature ou de l’économie du cadre dans laquelle ce régime s’inscrivait. Suivant, aux points 63 à 203 de l’arrêt attaqué, ces trois étapes, le Tribunal a confirmé les constatations figurant dans la décision litigieuse quant à cette condition.
31 En particulier, dans le cadre de la première étape visée au point précèdent du présent arrêt, le Tribunal a rejeté les moyens par lesquels le Royaume-Uni et ITV faisaient valoir que la Commission avait commis une erreur d’appréciation en concluant que le cadre de référence était constitué non pas par le système général de l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni (ci-après le « SGIS »), mais uniquement par les règles applicables aux SEC.
32 À cet égard, en premier lieu, d’une part, le Tribunal a exposé que le SGIS était fondé sur le principe de territorialité, en vertu duquel seuls sont imposés les bénéfices réalisés au Royaume-Uni. D’autre part, il a relevé que les règles applicables aux SEC visaient à ce que les bénéfices réalisés par une SEC qui, en vertu de ce principe, ne seraient normalement pas imposés au Royaume-Uni, soient néanmoins imposés, lorsqu’ils étaient considérés comme ayant été artificiellement détournés du
Royaume-Uni. Le Tribunal en a conclu que les règles applicables aux SEC étaient détachables du SGIS (points 77, 78 et 80 à 83 de l’arrêt attaqué).
33 En second lieu, le Tribunal a considéré que les règles applicables aux SEC formaient un corpus complet de règles, distinct du SGIS, notamment en ce qui concerne l’assiette, les assujettis à l’impôt, le fait générateur de l’impôt et le taux d’imposition. Il a également souligné que ces règles prévoyaient un mécanisme pour éviter la double imposition, qui ne serait pas pertinent dans le cadre du calcul de l’impôt sur la base du SGIS (points 85 à 90 de l’arrêt attaqué).
34 Dans le cadre de la deuxième étape visée au point 30 du présent arrêt, en premier lieu, le Tribunal a rejeté les arguments du Royaume-Uni et d’ITV selon lesquels les autorités fiscales du Royaume-Uni ne pourraient accorder aucun avantage par l’application du chapitre no 9, dès lors que les dispositions de ce chapitre ne pourraient pas être appréhendées séparément de celles du chapitre no 3 de la partie 9 A de la TIOPA (ci-après le « chapitre no 3 ») et de celles du chapitre no 5.
35 À cet effet, le Tribunal a, en substance, considéré que les règles définies à la partie 9 A de la TIOPA prévoyaient des critères pour identifier des situations donnant lieu à un détournement artificiel de bénéfices, telles que, notamment, celles couvertes par le chapitre no 5. Ainsi, selon le Tribunal, lorsque l’un des critères prévus par ces règles est rempli, les bénéfices réalisés par les SEC en question sont imposés au Royaume-Uni au moyen d’un prélèvement SEC. Il en a conclu que le fait de
prévoir, au chapitre no 9, des exonérations de ce prélèvement pour des bénéfices qui en auraient autrement fait l’objet, en vertu des critères susvisés, constituait un avantage (points 96 et 100 à 108 de l’arrêt attaqué).
36 En deuxième lieu, le Tribunal a examiné les arguments du Royaume-Uni et d’ITV, soutenue par LSEGH, selon lesquels la Commission avait considéré à tort que l’objectif des règles applicables aux SEC était circonscrit à l’imposition des bénéfices artificiellement détournés, alors que ces règles viseraient à protéger l’assiette de l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni.
37 À cet égard, le Tribunal a estimé que la protection de la base imposable de l’impôt sur les sociétés du Royaume-Uni était un objectif large, au sein duquel s’intégrait l’objectif plus spécifique qui consistait à imposer des bénéfices artificiellement détournés du Royaume-Uni. Il a souligné que, si plusieurs mesures avaient été adoptées pour protéger cette base imposable, il résultait du dossier que l’objectif spécifique du cadre de référence pertinent, constitué par les règles applicables aux
SEC, était de contribuer à cette protection par l’imposition des bénéfices des SEC artificiellement détournés du Royaume-Uni (points 109 et 114 à 120 de l’arrêt attaqué).
38 En troisième lieu, le Tribunal a analysé les arguments du Royaume-Uni et d’ITV, soutenue par LSEGH, selon lesquels, en substance, le régime contesté n’était pas, a priori, sélectif, au motif que les règles applicables aux SEC viseraient à imposer une obligation fiscale uniquement dans les cas qui présenteraient un risque élevé d’abus ou de détournement artificiel de bénéfices du Royaume-Uni.
39 À cette fin, le Tribunal a notamment relevé que les exonérations en cause s’appliquaient aux bénéfices financiers non commerciaux des SEC, issus de prêts accordés par celles-ci, à l’égard desquels était satisfait le critère des FHS au Royaume-Uni ou le critère des capitaux liés au Royaume-Uni (point 131 de l’arrêt attaqué).
40 À l’issue de son examen de la sélectivité a priori, le Tribunal a conclu que les exonérations en cause, en ce qu’elles étaient applicables seulement aux bénéfices financiers non commerciaux des SEC issus des prêts éligibles, à l’exclusion de ceux issus de prêts consentis à des sociétés liées au Royaume-Uni et de ceux consentis à des sociétés tierces, conduisaient à un traitement différencié de situations comparables, de sorte que la Commission n’avait pas commis d’erreur d’appréciation
lorsqu’elle avait conclu qu’il existait un avantage en l’espèce et que celui-ci était a priori sélectif (points 167 à 182 de l’arrêt attaqué).
41 Dans le cadre de la troisième étape visée au point 30 du présent arrêt, le Tribunal a rejeté les arguments du Royaume-Uni et d’ITV selon lesquels les exonérations en cause étaient justifiées par des raisons tenant, d’une part, à la praticabilité administrative et, d’autre part, au respect de la liberté d’établissement.
42 En particulier, s’agissant de cette liberté, le Tribunal a rappelé que, aux points 72 et 73 de l’arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, EU:C:2006:544), la Cour avait dit pour droit que, dans la mesure où la législation sur les SEC en vigueur à l’époque limitait l’application de l’imposition des bénéfices des SEC aux montages purement artificiels, elle était compatible avec les dispositions des traités garantissant la liberté d’établissement. Il en a
déduit que, le prélèvement SEC visant des bénéfices qui, en vertu du critère des FHS au Royaume-Uni, devaient être considérés comme ayant été artificiellement détournés, ce prélèvement ne comportait pas d’entrave à la liberté d’établissement et, par conséquent, que les exonérations en cause ne pouvaient pas être justifiées par la nécessité d’assurer le respect de cette liberté (points 200 et 201 de l’arrêt attaqué).
43 Au vu de tous ces éléments, le Tribunal a conclu que c’était sans commettre d’erreur d’appréciation que la Commission avait considéré que les exonérations en cause conféraient à leurs bénéficiaires un avantage sélectif.
La procédure devant la Cour et les conclusions des parties aux pourvois
44 Par actes déposés au greffe de la Cour respectivement les 16 août, 17 août et 25 août 2022, le Royaume-Uni, ITV et LSEGH ont introduit les présents pourvois, enregistrés respectivement sous les numéros C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P.
45 Par décision du président de la Cour du 6 octobre 2022, les affaires C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P ont été jointes aux fins des phases écrite et orale de la procédure ainsi que de l’arrêt.
46 Le Royaume-Uni demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué et de faire droit à ses conclusions devant le Tribunal ;
– à titre subsidiaire, d’annuler l’arrêt attaqué et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal afin que celui-ci statue définitivement, et
– de condamner la Commission aux dépens des deux instances.
47 ITV demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué en tant qu’il a rejeté les recours et l’a condamnée aux dépens ;
– d’annuler la décision litigieuse, et
– de condamner la Commission aux dépens des deux instances.
48 LSEGH demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué ;
– de statuer définitivement et d’annuler la décision litigieuse ou, à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal afin que celui statue conformément à l’arrêt de la Cour, et
– de condamner la Commission aux dépens des deux instances, y compris ceux exposés par toute partie intervenante.
49 La Commission demande à la Cour :
– de rejeter les pourvois et
– de condamner le Royaume-Uni, ITV et LSEGH aux dépens.
Sur les pourvois
50 À l’appui de son pourvoi, le Royaume-Uni invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’une erreur de droit, de la dénaturation et de la qualification erronée des faits en ce qui concerne l’identification du cadre de référence, le deuxième, d’une erreur de droit, de la dénaturation et de la qualification erronée des faits en ce qui concerne l’existence d’un avantage, le troisième, d’une erreur de droit, de la dénaturation et de la qualification erronée des faits ainsi que de la violation de
l’obligation de motivation en ce qui concerne la sélectivité, le quatrième, d’une erreur de droit, de la dénaturation des faits et de la violation de l’obligation de motivation en ce qui concerne la praticabilité administrative et, le cinquième, d’une erreur de droit en ce qui concerne la liberté d’établissement.
51 ITV, quant à elle, soulève quatre moyens, tirés, le premier, d’une erreur liée à la détermination du cadre de référence, le deuxième, d’une erreur liée à la détermination d’un avantage sélectif, le troisième, d’une erreur liée au traitement de la justification des exonérations en cause et, le quatrième, d’une erreur liée à l’application de l’arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, EU:C:2006:544).
52 S’agissant de LSEGH, celle-ci se prévaut de cinq moyens, tirés, le premier, d’une erreur de droit quant à la détermination du cadre de référence, le deuxième, d’une erreur de droit quant à l’identification de l’objectif de ce cadre, le troisième, d’une erreur de droit quant à l’existence d’une discrimination entre opérateurs économiques, le quatrième, de la violation des articles 263 et 296 TFUE en raison de l’absence de réponse à certains moyens ainsi que de la substitution par le Tribunal de
son propre raisonnement à celui de la Commission dans la décision litigieuse et, le cinquième, d’une erreur de droit en ce qui concerne la justification des exonérations en cause.
53 Ainsi que l’a relevé, en substance, Mme l’avocate générale aux points 41 à 45 de ses conclusions, d’une part, bien que les requérants ne soulèvent pas tous le même nombre de moyens et que, au sein de ceux-ci, chaque requérant puisse avoir attribué un poids plus ou moins important à certains arguments ou avoir invoqué des arguments spécifiques, leurs contestations portent, fondamentalement, sur quatre questions, à savoir, premièrement, la détermination du cadre de référence, deuxièmement,
l’existence d’un avantage sélectif, troisièmement, la justification du régime contesté par la nécessité de permettre la praticabilité administrative des règles applicables aux SEC et, quatrièmement, la justification de ce régime par la nécessité de respecter la liberté d’établissement.
54 D’autre part, l’essentiel des pourvois a trait à la contestation de la détermination du cadre de référence, étant précisé que les arguments des requérants portant sur la nécessité de lire de manière conjointe les chapitres nos 5 et 9, en ce qu’ils refléteraient l’approche fondée sur les risques suivie par le Royaume-Uni, sont pertinents également aux fins de l’appréciation de cette contestation, même lorsqu’ils ont été formulés, ou développés plus en détail, dans le cadre de la contestation de
l’existence d’un avantage sélectif ou de celle concernant la justification des exonérations en cause par la nécessité de respecter la liberté d’établissement.
Sur la contestation de la détermination du cadre de référence
Sur la recevabilité
55 La Commission fait valoir que l’appréciation du droit national constitue une question de fait qui relève de la compétence exclusive du Tribunal, sauf lorsque l’interprétation de ce droit repose sur une dénaturation des éléments de preuve. Elle admet que, selon les enseignements issus, notamment, de l’arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission (C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859), la détermination correcte du cadre de référence, première étape de l’analyse relative à la
sélectivité d’une mesure fiscale nationale, est une question de droit, mais soutient que, dans cet arrêt, l’erreur constatée par la Cour portait non pas sur l’interprétation du droit national, mais sur le point de savoir si le Tribunal avait pris en compte les éléments appropriés lors de la détermination de ce cadre.
56 En revanche, dans les présentes affaires, les requérants ne soutiendraient pas que le Tribunal se soit fondé sur des éléments erronés lorsqu’il a apprécié si la Commission avait correctement défini le cadre de référence. Ils se borneraient à contester l’interprétation du droit national retenue par le Tribunal, alors que, pour que leur argumentation soit considérée comme étant recevable, ils devraient démontrer que ce droit a été dénaturé, en ce sens qu’il a fait l’objet d’une interprétation
manifestement contraire au contenu des dispositions pertinentes ou revenant à leur attribuer une portée qu’elles n’ont clairement pas.
57 À cet égard, il importe de rappeler que la compétence de la Cour statuant sur un pourvoi formé contre une décision rendue par le Tribunal est définie par l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE. Celui-ci indique que le pourvoi doit être limité aux questions de droit et qu’il doit s’inscrire « dans les conditions et limites prévues par le statut [de la Cour de justice de l’Union européenne] ». Dans une liste énumérative des moyens pouvant être invoqués dans ce cadre, l’article 58, premier
alinéa, de ce statut précise que le pourvoi peut être fondé sur la violation du droit de l’Union par le Tribunal.
58 Certes, en principe, pour ce qui est de l’examen, dans le cadre d’un pourvoi, des appréciations du Tribunal à l’égard du droit national, qui, dans le domaine des aides d’État, constituent des appréciations de faits, la Cour n’est compétente que pour vérifier s’il y a eu une dénaturation de ce droit. La Cour ne saurait cependant être privée de la possibilité de contrôler si de telles appréciations ne constituent pas elles-mêmes une violation du droit de l’Union par le Tribunal (arrêt du 5 décembre
2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 77 ainsi que jurisprudence citée).
59 Or, la question de savoir si le Tribunal a délimité de manière appropriée le cadre de référence pertinent et, par extension, a interprété de manière correcte les dispositions le composant, est une question de droit susceptible de faire l’objet du contrôle de la Cour au stade du pourvoi. En effet, les arguments tendant à remettre en cause le choix du cadre de référence ou sa signification dans la première étape de l’analyse de l’existence d’un avantage sélectif sont recevables, puisque cette
analyse procède d’une qualification juridique du droit national sur la base d’une disposition du droit de l’Union (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 78 ainsi que jurisprudence citée).
60 Admettre que la Cour ne soit pas en mesure de déterminer si c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a fait siennes la délimitation du cadre de référence pertinent, son interprétation et son application en tant que paramètres décisifs aux fins de l’examen de l’existence d’un avantage sélectif reviendrait à accepter la possibilité que le Tribunal ait, le cas échéant, commis une violation d’une disposition du droit primaire de l’Union, à savoir l’article 107, paragraphe 1, TFUE, sans
que cette violation puisse être sanctionnée dans le cadre du pourvoi, ce qui contreviendrait à l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, comme cela a été souligné au point 57 du présent arrêt (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 79).
61 Il y a donc lieu de considérer que les requérants sont recevables à demander à la Cour de contrôler si c’est à bon droit que le Tribunal, aux fins de l’analyse tenant à l’existence d’un avantage sélectif au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, a confirmé la limitation par la Commission du cadre de référence aux seules règles applicables aux SEC.
Sur le fond
– Argumentation des parties
62 Les requérants font valoir, en substance, que le Tribunal a commis une erreur de droit, qu’il a dénaturé le droit national ou qu’il a effectué une qualification juridique erronée de celui-ci lorsqu’il a considéré, à l’instar de la Commission dans la décision litigieuse, que le cadre de référence par rapport auquel il convenait de déterminer si les exonérations en cause donnaient lieu à un avantage sélectif était constitué non pas par le SGIS, mais par les règles applicables aux SEC, énoncées dans
la partie 9 A de la TIOPA.
63 À cet égard, en premier lieu, les requérants soutiennent que le Tribunal a présumé à tort qu’il était « normal » qu’une société relevant du SGIS soit imposée sur les bénéfices réalisés par une SEC provenant d’activités ou d’actifs au Royaume-Uni. À leur avis, d’une part, ce système est essentiellement, mais non purement, territorial, en ce sens que, à quelques exonérations près, qui porteraient notamment sur les dividendes provenant des filiales étrangères, sont imposables les bénéfices réalisés
au niveau mondial par les contribuables établis au Royaume-Uni. D’autre part, ledit système serait fondé non pas sur le principe de l’imposition de groupe, mais sur celui de l’imposition distincte des sociétés, sur la base seulement de leurs propres bénéfices. Une approche en vertu de laquelle les règles applicables aux SEC seraient qualifiées de système d’imposition « normal » échouerait nécessairement à placer ces règles dans le contexte pertinent, en tant qu’exception strictement délimitée au
principe général de l’imposition largement territoriale.
64 Plus précisément, ITV expose, notamment, que c’est en raison de la nature exceptionnelle de l’imposition extraterritoriale que les exonérations en cause ont été formulées de manière très large. En effet, celles-ci viseraient à rendre conforme à la nature essentiellement territoriale du SGIS l’imposition des revenus générés par les SEC en dehors du Royaume-Uni. Le législateur du Royaume-Uni aurait attribué au prélèvement SEC un périmètre potentiellement étendu, mais aurait également prévu des
exonérations servant de « brèches » afin de ne pas soumettre à ce prélèvement les bénéfices des SEC qui, en réalité, ne portent pas atteinte à la base imposable au Royaume-Uni ou ne constituent pas des bénéfices détournés de manière totalement artificielle.
65 LSEGH rappelle, quant à elle, que la détermination du cadre de référence doit être effectuée à l’issue d’un examen objectif du contenu, de l’articulation et des effets concrets des normes applicables en vertu du droit national de l’État membre concerné. Ainsi, selon elle, les règles applicables aux SEC concernant les bénéfices financiers non commerciaux doivent être interprétées de manière conjointe notamment avec les règles relatives aux dividendes reçus par les sociétés établies au Royaume-Uni
de leurs filiales étrangères.
66 En deuxième lieu, les requérants font valoir que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, les règles applicables aux SEC ne sont pas détachables du SGIS, mais constituent, selon la formulation utilisée par le Royaume-Uni et par ITV, une exception au principe de territorialité qui caractérise dans une large mesure le SGIS ou, selon la formulation utilisée par LSEGH, une mesure corrective, inséparable de ce dernier, laquelle viserait à protéger l’assiette de l’impôt sur les sociétés au
Royaume-Uni des abus impliquant des SEC.
67 Pour étayer leur contestation du caractère détachable des règles applicables aux SEC reconnu par le Tribunal, tout d’abord, le Royaume-Uni et, bien que moins en détail, ITV remettent en cause les constatations figurant dans l’arrêt attaqué au sujet de l’assiette imposable, de l’assujetti à l’impôt, du fait générateur de l’impôt et du taux d’imposition.
68 Ensuite, le Royaume-Uni et ITV soutiennent que l’existence de règles permettant d’éviter la double imposition internationale n’est pas une particularité propre aux règles applicables aux SEC, comme l’a considéré le Tribunal, mais est une caractéristique centrale du SGIS, ainsi qu’il résulterait de la partie 2 de la TIOPA.
69 Enfin, le Royaume-Uni précise que, si la partie 9 A de la TIOPA contient des dispositions spécifiques concernant le calcul du prélèvement SEC, ces règles sont, en substance, identiques à celles du SGIS à de nombreux égards.
70 En troisième lieu, les requérants soutiennent que le Tribunal a jugé à tort que le chapitre no 9 prévoit des exonérations du prélèvement SEC en faveur de bénéfices financiers non commerciaux des SEC qui seraient autrement imposables au titre du chapitre no 5. Le Tribunal aurait surestimé le rôle du critère des FHS au Royaume-Uni, en considérant que tout bénéfice financier non commercial d’une SEC qui remplirait ce critère devrait automatiquement être qualifié d’artificiellement détourné du
Royaume-Uni et, en conséquence, soumis au prélèvement SEC en vertu du chapitre no 5. Certains types de montages, à savoir les prêts éligibles, ne présenteraient pas de risque élevé de détournement artificiel de bénéfices, indépendamment de la présence de FHS au Royaume-Uni. D’autres types de montages, à savoir ceux qui ne relèvent pas des prêts éligibles, comporteraient un tel risque, à nouveau indépendamment de la présence de FHS au Royaume-Uni.
71 À cet égard, les requérants soulignent que les chapitres nos 5 et 9 n’énoncent pas, respectivement, des règles et des exceptions à ces règles, en ce sens que le second de ces chapitres entraînerait un allègement de l’impôt autrement dû en vertu du premier. Ces deux chapitres se compléteraient mutuellement et formeraient un corpus uniforme et cohérent de règles relatives à l’imposition des bénéfices financiers non commerciaux des SEC. Ainsi, dans leur ensemble, ces chapitres définiraient le champ
d’application du prélèvement SEC, compte tenu de l’évaluation du risque que présentent, pour la base d’imposition au Royaume-Uni, l’origine et les utilisations des capitaux à partir desquels ces bénéfices financiers non commerciaux sont réalisés.
72 Dans ce contexte, les requérants invoquent notamment l’article 371CB, paragraphes 1 et 8, du chapitre no 3. ITV et LSEGH se réfèrent également à l’article 371BB du chapitre no 2 de la partie 9 A de la TIOPA (ci-après le « chapitre no 2 »).
73 En particulier, selon le Royaume-Uni et ITV, le fait que l’article 371EA, paragraphe 2, du chapitre no 5 renvoie à cet article 371CB, paragraphe 8, implique que, lorsqu’une SEC réalise des bénéfices financiers non commerciaux, il est tenu compte, dans un premier temps, du chapitre no 9, et seul un bénéfice financier non commercial qui ne serait pas couvert par ce chapitre devrait, dans un second temps, être examiné au titre du chapitre no 5.
74 Le Royaume-Uni et, en substance, ITV ainsi que LSEGH ajoutent que l’article 371IA du chapitre no 9, invoqué par la Commission, ne remet pas en cause le fait qu’il convient de tenir compte avant tout de ce dernier chapitre.
75 De manière similaire, les requérants soulèvent des arguments par lesquels, en substance, ils reprochent au Tribunal de ne pas avoir tenu compte du fait que les règles applicables aux SEC, dans leur ensemble et au vu de leur objectif, auraient été conçues suivant une approche fondée sur l’évaluation des risques que les bénéfices des SEC posent pour l’imposition des sociétés au Royaume-Uni.
76 Le Royaume-Uni soutient que les règles applicables aux SEC ont pour objectif d’empêcher tant l’érosion de la base d’imposition, découlant du fait que les sociétés établies au Royaume-Uni qui font partie d’un groupe pourraient déduire de leurs bénéfices les intérêts qu’elles paient à des sociétés du même groupe non établies dans cet État, que le transfert de bénéfices en dehors dudit État sous la forme d’un détournement artificiel.
77 ITV et, en substance, LSEGH font valoir que les dispositions du chapitre no 9 contiennent leur propre évaluation du risque associé aux prêts éligibles, qui ne dépendrait pas du critère des FHS au Royaume-Uni énoncé au chapitre no 5.
78 ITV ajoute, en substance, que ces dispositions du chapitre no 9 sont nécessaires pour faire en sorte que les règles applicables aux SEC permettent de n’imposer que les montages purement artificiels, dans le respect des enseignements découlant de l’arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, EU:C:2006:544).
79 La Commission soutient, en premier lieu, que le SGIS vise à imposer les sociétés établies au Royaume-Uni, ainsi que les sociétés non-résidentes ayant un établissement stable dans cet État, sur leurs bénéfices provenant d’actifs ou d’activités dans ledit État. En raison de la nature en grande partie territoriale de ce système, les bénéfices réalisés en dehors du territoire du Royaume-Uni ne seraient en principe pas soumis à l’impôt sur les sociétés. Dès lors que les sociétés du Royaume-Uni
pourraient être ainsi incitées à créer des SEC dans des pays à fiscalité privilégiée et à détourner artificiellement vers ceux-ci les bénéfices provenant d’actifs ou d’activités au Royaume-Uni, cet État aurait adopté des règles spécifiques pour éviter que l’assiette de l’impôt sur les sociétés soit érodée au moyen des SEC. Les règles applicables à ces dernières permettraient de déterminer, sur la base de critères choisis par le Royaume-Uni, l’existence d’un tel détournement, qui résulterait du
fait que les bénéfices réalisés par une SEC proviennent d’actifs ou d’activités au Royaume-Uni, ainsi que cet État l’aurait confirmé pendant la procédure administrative. L’imposition du prélèvement SEC sur ces bénéfices permettrait de supprimer l’avantage fiscal résultant de ce détournement.
80 Dans ce contexte, la Commission souligne que le Tribunal n’a pas considéré qu’il soit « normal » d’imposer tous les bénéfices des SEC, mais a relevé que les bénéfices de ces dernières font l’objet d’un prélèvement SEC, nonobstant le fait qu’ils ont été réalisés par des sociétés qui ne sont pas établies au Royaume-Uni, lorsqu’ils résultent d’un détournement artificiel. Aussi les règles applicables aux SEC permettraient-elles d’inclure dans la base d’imposition au Royaume-Uni des bénéfices
provenant d’actifs ou d’activités situés dans cet État qui, autrement, en seraient exclus. La Commission en déduit que le prélèvement SEC ne s’applique que dans des circonstances exceptionnelles, à savoir celles dans lesquelles il existe un risque suffisamment important de détournement artificiel. Tel serait le cas des bénéfices remplissant les critères du chapitre no 5.
81 En deuxième lieu, la Commission fait valoir que c’est à juste titre que le Tribunal a considéré que les règles applicables aux SEC, d’une part, étaient détachables du SGIS, au motif qu’elles suivraient une logique distincte de celle de ce dernier, et, d’autre part, venaient en complément ou étaient le corollaire du SGIS, dont elles constitueraient non pas une exception, mais un prolongement.
82 À cet égard, d’abord, la Commission soutient que le caractère détachable des règles applicables aux SEC résulte non seulement des dispositions de celles-ci relatives à l’assiette imposable, à l’assujetti à l’impôt, au fait générateur de l’impôt et au taux d’imposition, mais également du fait que ces règles permettent de tenir compte d’éventuels problèmes de double imposition, qui ne seraient pas pertinents dans le cadre du SGIS.
83 Ensuite, la Commission souligne que ce caractère détachable n’est pas remis en cause par la présence, au sein des règles applicables aux SEC, de renvois à des dispositions du SGIS. En effet, il serait irréaliste de s’attendre à ce que ces règles soient totalement autonomes.
84 Enfin, ledit caractère détachable ne serait pas infirmé non plus par la prétendue existence d’un lien entre les règles applicables aux SEC et les règles en vertu desquelles, d’une part, ne sont pas imposés les dividendes versés par les SEC aux sociétés mères établies au Royaume-Uni et, d’autre part, ces dernières peuvent déduire certains intérêts.
85 En troisième lieu, la Commission fait valoir que les chapitres nos 5 et 9 ne doivent pas être lus de manière conjointe. Selon elle, le chapitre no 5 énonce des règles générales, en particulier les critères des FHS au Royaume-Uni et des capitaux liés au Royaume-Uni, permettant d’identifier les situations dans lesquelles les autorités de cet État, dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, considèrent qu’il existe un risque suffisamment important que les bénéfices financiers non commerciaux
réalisés par une SEC constituent des bénéfices artificiellement détournés du Royaume-Uni et doivent ainsi faire l’objet d’un prélèvement SEC. Le chapitre no 9, quant à lui, introduirait, au moyen des exonérations en cause, une dérogation totale ou partielle à ce prélèvement, pour les bénéfices financiers non commerciaux que les SEC réalisent en accordant certains types de prêts, en dépit du fait que ces bénéfices relèveraient normalement du chapitre no 5.
86 Dans ce contexte, la Commission s’appuie sur l’article 371IA, paragraphe 1, du chapitre no 9, qui démontrerait que les bénéfices visés par les exonérations en cause auraient normalement été soumis à un prélèvement SEC au titre du chapitre no 5 et constitueraient un sous-ensemble des bénéfices relevant de ce dernier chapitre. Les paragraphes 2 et 3 de cet article corroboreraient cette thèse. En revanche, aucune disposition de la partie 9 A de la TIOPA n’étaierait l’affirmation du Royaume-Uni selon
laquelle les bénéfices financiers non commerciaux doivent avant tout être examinés selon les critères du chapitre no 9. En particulier, l’article 371CB, paragraphe 8, du chapitre no 3 ne viendrait pas au soutien de cette affirmation. En tout état de cause, l’interprétation en vertu de laquelle le chapitre no 5 devrait être appliqué avant le chapitre no 9 demeurerait dans les limites d’une appréciation raisonnable des dispositions pertinentes. Les requérants n’auraient ainsi pas démontré que le
Tribunal a dénaturé la législation nationale.
87 S’agissant de l’application du prélèvement SEC aux seuls bénéfices financiers qui présentent un risque suffisamment important de détournement artificiel, la Commission fait valoir que le législateur du Royaume-Uni a conçu les règles applicables aux SEC à partir de la prémisse fondamentale selon laquelle elles couvrent les bénéfices découlant des actifs et des risques qui sont gérés et contrôlés au Royaume-Uni. Ainsi, ces règles auraient un champ d’application large et pourraient viser des
situations dans lesquelles il est probable que la SEC ait été créée pour de véritables raisons commerciales et que le risque de détournement artificiel de bénéfices du Royaume-Uni soit faible. Toutefois, pour tenir compte de ces situations, les autorités du Royaume-Uni auraient inséré, d’une part, au chapitre no 3, des critères pour déterminer si les bénéfices réalisés par les SEC doivent être examinés à l’aune des chapitres suivants et, d’autre part, les exonérations énumérées au considérant 19
de la décision litigieuse.
88 Il en résulterait que, si les bénéfices financiers non commerciaux d’une SEC ne sont pas dispensés de cet examen et ne relèvent pas de ces exonérations, alors qu’ils satisfont à l’un des critères établis au chapitre no 5, ces bénéfices doivent, en vertu du système conçu par le Royaume-Uni lui-même, être considérés comme présentant un risque de détournement artificiel suffisamment élevé pour déclencher l’imposition d’un prélèvement SEC. Aussi ce chapitre permettrait-il d’imposer les seuls
bénéfices ayant été détournés, sans qu’un autre ajustement en application du chapitre no 9 soit requis pour éviter d’imposer des bénéfices qui n’auraient pas été détournés.
89 Par ailleurs, la Commission admet que la base d’imposition au Royaume-Uni peut également être érodée autrement que par des détournements artificiels, notamment par la déduction d’intérêts, mais soutient que la lutte contre les autres risques d’érosion de cette base ne relève pas de l’objectif des règles applicables aux SEC et que des mesures spécifiques peuvent être, ou ont été, adoptées à cette fin.
– Appréciation de la Cour
90 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les interventions des États membres dans les domaines qui n’ont pas fait l’objet d’une harmonisation en droit de l’Union ne sont pas exclues du champ d’application des dispositions du traité FUE relatives au contrôle des aides d’État. Les États membres doivent ainsi s’abstenir d’adopter toute mesure fiscale susceptible de constituer une aide d’État incompatible avec le marché intérieur (arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance
Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 65 ainsi que jurisprudence citée).
91 À cet égard, il résulte d’une jurisprudence bien établie de la Cour que la qualification d’une mesure nationale d’« aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions suivantes soient remplies. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre les États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage sélectif à son
bénéficiaire. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 66 ainsi que jurisprudence citée).
92 En ce qui concerne la condition relative à l’avantage sélectif, celle-ci impose de déterminer si, dans le cadre d’un régime juridique donné, la mesure nationale en cause est de nature à favoriser « certaines entreprises ou certaines productions » par rapport à d’autres, qui se trouvent, au regard de l’objectif poursuivi par ledit régime, dans une situation factuelle et juridique comparable et qui subissent ainsi un traitement différencié pouvant en substance être qualifié de discriminatoire
(arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 67 ainsi que jurisprudence citée).
93 À cet égard, il importe de rappeler que, afin de qualifier une mesure fiscale nationale de « sélective », la Commission doit identifier, dans un premier temps, le cadre de référence, à savoir le régime fiscal « normal » applicable dans l’État membre concerné, et démontrer, dans un deuxième temps, que la mesure fiscale en cause déroge à ce cadre de référence, dans la mesure où elle introduit des différenciations entre des opérateurs se trouvant, au regard de l’objectif poursuivi par ce dernier,
dans une situation factuelle et juridique comparable. La notion d’« aide d’État » ne vise toutefois pas les mesures introduisant une différenciation entre des entreprises qui se trouvent, au regard de l’objectif poursuivi par le régime juridique en cause, dans une situation factuelle et juridique comparable et, partant, a priori sélectives, lorsque l’État membre concerné parvient à démontrer, dans un troisième temps, que cette différenciation est justifiée, en ce sens qu’elle résulte de la nature
ou de l’économie du système dans lequel ces mesures s’inscrivent (arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 68 ainsi que jurisprudence citée).
94 Dans ce contexte, il importe de rappeler que la détermination du cadre de référence revêt une importance accrue dans le cas de mesures fiscales, puisque l’existence d’un avantage économique, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ne peut être établie que par rapport à une imposition dite « normale ». Ainsi, la détermination de l’ensemble des entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable dépend de la définition préalable du régime juridique au regard de
l’objectif duquel doit, le cas échéant, être examinée la comparabilité de la situation factuelle et juridique respective des entreprises favorisées par la mesure en cause et de celles qui ne le sont pas (arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 69 ainsi que jurisprudence citée).
95 La détermination du cadre de référence, qui doit être effectuée à l’issue d’un débat contradictoire avec l’État membre concerné, doit découler d’un examen objectif du contenu, de l’articulation et des effets concrets des normes applicables en vertu du droit national de cet État. À cet égard, la sélectivité d’une mesure fiscale ne peut être appréciée à l’aune d’un cadre de référence constitué de quelques dispositions du droit national de l’État membre concerné qui ont été artificiellement sorties
d’un cadre législatif plus large. Par conséquent, lorsque la mesure fiscale en question est inséparable du système général d’imposition de l’État membre concerné, c’est à ce système qu’il convient de se référer. En revanche, lorsqu’il apparaît qu’une telle mesure est clairement détachable de ce système général, il ne peut être exclu que le cadre de référence devant être pris en compte soit plus restreint que ledit système général, voire qu’il s’identifie à la mesure elle-même, lorsque celle-ci se
présente comme une règle dotée d’une logique juridique autonome et qu’il est impossible d’identifier un ensemble normatif cohérent en dehors de cette mesure (arrêt du 6 octobre 2021, World Duty Free Group et Espagne/Commission, C‑51/19 P et C‑64/19 P, EU:C:2021:793, points 62 et 63 ainsi que jurisprudence citée).
96 Il importe également de rappeler que, en dehors des domaines dans lesquels le droit fiscal de l’Union fait l’objet d’une harmonisation, c’est l’État membre concerné qui détermine, par l’exercice de ses compétences propres en matière de fiscalité directe et dans le respect de son autonomie fiscale, les caractéristiques constitutives de l’impôt, lesquelles définissent, en principe, le cadre de référence ou le régime fiscal « normal », à partir duquel il convient d’analyser la condition relative à
la sélectivité. Il en va, notamment, ainsi de la détermination de l’assiette de l’impôt, de son fait générateur et des éventuelles exonérations dont il est assorti (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 112 ainsi que jurisprudence citée).
97 Il s’ensuit que, lors de la détermination du cadre de référence en vue de l’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE à des mesures fiscales, la Commission est en principe tenue d’accepter l’interprétation des dispositions pertinentes du droit national donnée par l’État membre concerné dans le cadre du débat contradictoire visé au point 95 du présent arrêt, pour autant que cette interprétation soit compatible avec le libellé de ces dispositions (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg
e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 120).
98 La Commission ne peut s’écarter de ladite interprétation que si elle est en mesure d’établir qu’une autre interprétation prévaut dans la jurisprudence ou la pratique administrative de cet État membre, en se fondant à cet égard sur des éléments fiables et concordants, soumis à ce débat contradictoire (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 121).
99 Conformément à l’article 4, paragraphe 3, TUE, ledit État membre est tenu par un devoir de coopération loyale pendant toute la procédure relative à l’examen d’une mesure au titre des dispositions du droit de l’Union en matière d’aides d’État. Ce devoir implique, notamment, que le même État membre fournisse de bonne foi à la Commission toute information pertinente sollicitée par cette dernière concernant l’interprétation des dispositions du droit national pertinentes afin de déterminer le cadre de
référence, résultant de la jurisprudence ou de la pratique administrative nationales (arrêt du 5 décembre 2023, Luxembourg e.a./Commission, C‑451/21 P et C‑454/21 P, EU:C:2023:948, point 122).
100 C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu de vérifier si les requérants ont démontré que le Tribunal a, à tort, confirmé que, ainsi que l’a considéré la Commission dans la décision litigieuse, le cadre de référence en l’espèce était limité aux règles applicables aux SEC.
101 À cette fin, il convient de rappeler que, au point 80 de l’arrêt attaqué, s’agissant de la logique sous-jacente aux règles applicables aux SEC, le Tribunal a relevé que le SGIS se fondait sur le principe de territorialité, « en vertu duquel seuls sont imposés les bénéfices réalisés au Royaume-Uni, à savoir les bénéfices réalisés par des sociétés qui y sont établies ou les bénéfices réalisés par des sociétés étrangères générés par leurs activités effectuées au Royaume-Uni par le biais d’un
établissement permanent dans cet État ».
102 Au point 81 de cet arrêt, le Tribunal a souligné que, en vertu des règles applicables aux SEC, « certains bénéfices réalisés par des SEC qui, suivant le principe de territorialité, ne seraient normalement pas imposés au Royaume-Uni pouvaient toutefois l’être lorsqu’ils étaient considérés comme ayant été artificiellement détournés du Royaume-Uni ». Il en a tiré la conséquence, au point 82 dudit arrêt, que les règles applicables aux SEC reposaient « sur une logique distincte de celle du [SGIS] »,
tout en précisant que « [c]ette logique v[enait], certes, en complément ou [...] en corollaire du [SGIS] reposant sur le principe de territorialité, mais [qu’]elle en [était] détachable ».
103 Au point 83 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté, d’abord, que les règles applicables aux SEC « ne constitu[ai]ent pas une exception au [SGIS], dans la mesure où elles p[ouvai]ent être considérées plutôt comme son prolongement », ensuite, que ces règles « vis[ai]ent à imposer des bénéfices qui [avaient] été artificiellement détournés du Royaume-Uni et, de ce fait, [avaient] augmenté artificiellement les bénéfices de la SEC, laquelle, par la suite, distribuera[it] des dividendes qui
n’[étaient] pas imposables au Royaume-Uni », et, enfin, que « la logique des[dites] règles [était] liée au détournement des bénéfices vers les SEC, de manière que, en pratique, ils soient réalisés en dehors du Royaume-Uni ». Il en a conclu que cette logique était « donc distincte de celle [...] sous-jacente au [SGIS], qui repos[ait] sur les bénéfices réalisés au Royaume-Uni ».
104 À cet égard, il importe de relever qu’un élément qualifié de « corollaire », de « complément » ou de « prolongement » d’un élément principal peut difficilement être considéré comme étant clairement détachable de ce dernier élément ou comme obéissant à une logique juridique autonome au sens de la jurisprudence citée au point 95 du présent arrêt.
105 En effet, en raison du rapport étroit qui, normalement, existe entre ces deux éléments, le fait d’opérer une séparation entre ceux-ci revient, en principe, à sortir artificiellement certaines dispositions du droit national de l’État membre concerné du cadre législatif plus large dont elles font partie, en violation des principes rappelés au point 95 du présent arrêt.
106 En l’espèce, il est constant que le SGIS est largement territorial, en ce sens que, à quelques exceptions près, il prévoit d’imposer les bénéfices mondiaux des sociétés qui sont établies au Royaume-Uni ou les bénéfices réalisés par des sociétés étrangères provenant des activités qu’elles exercent au Royaume-Uni par l’intermédiaire d’un établissement stable dans cet État. Ainsi, à défaut d’être complété par d’autres règles, le SGIS ne permettrait pas d’imposer les bénéfices réalisés par les SEC
des sociétés du Royaume-Uni, et ce en dépit du fait, mis en exergue par le Tribunal, que ces dernières reçoivent de leurs SEC des dividendes, qui ne sont pas imposables au Royaume-Uni, en vertu de dispositions relevant du SGIS.
107 Selon les requérants, en substance, les règles applicables aux SEC sont une exception au principe de territorialité qui caractérise largement le SGIS et visent à compléter celui-ci, en vue d’imposer, par le prélèvement SEC auquel sont soumises les sociétés du Royaume-Uni qui contrôlent des SEC, les bénéfices de ces dernières de la même manière qu’ils l’auraient été s’ils avaient été réalisés par ces sociétés du Royaume-Uni, lorsqu’il existe un risque suffisamment important que ces bénéfices
résultent de montages qui donnent lieu à des détournements artificiels de bénéfices ou à l’érosion de la base imposable de l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni. En revanche, les exonérations en cause permettraient que, en l’absence de risque suffisamment important, les bénéfices concernés ne soient grevés d’aucun prélèvement SEC, de la même manière qu’ils n’auraient pas été imposés en vertu du SGIS, ou bien que ce prélèvement ne s’applique qu’à une partie de ces bénéfices, selon une
estimation forfaitaire des effets de ces montages sur la base imposable.
108 Si cette interprétation des règles applicables aux SEC et de leur articulation avec le SGIS était retenue, ces règles devraient être considérées comme suivant la même logique que ce dernier. En effet, en vertu de ladite interprétation, d’une part, elles introduisent une exception au principe de territorialité qui caractérise dans une large mesure le SGIS, afin d’éviter que des bénéfices qui, en l’absence de détournement ou d’érosion de la base imposable, auraient été imposés en vertu de ce
système échappent aux autorités fiscales du Royaume-Uni. D’autre part, par les exonérations en cause, elles participent de la nature largement territoriale du SGIS, en ce sens que le prélèvement SEC n’est pas, ou pas intégralement, appliqué lorsque le risque de détournement artificiel de bénéfices ou d’érosion de la base imposable de l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni n’est pas suffisamment important. En d’autres termes, suivant l’interprétation des requérants, le SGIS et les règles
applicables aux SEC sont inséparables au sens de la jurisprudence rappelée au point 95 du présent arrêt.
109 Il convient donc d’établir quelle est l’interprétation du droit national qui doit prévaloir entre celle sur laquelle se fonde la décision litigieuse, confirmée par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, et celle défendue par l’État membre concerné.
110 Dans ce contexte, il importe de relever qu’il découle des principes consacrés par la jurisprudence citée aux points 97 à 99 du présent arrêt que, lorsque la Commission ne dispose pas, à l’égard d’un régime d’aides, d’une jurisprudence ou d’une pratique administrative de l’État membre concerné qui étaie sa propre interprétation du droit national, dès lors que cet État membre lui a confirmé, pendant la procédure administrative, qu’il n’existe pas une telle jurisprudence ou pratique, cette
interprétation ne peut prévaloir sur celle défendue par ledit État membre que si la Commission est en mesure de démontrer que cette dernière interprétation est incompatible avec le libellé des dispositions pertinentes.
111 Quant au débat entre la Commission et le Royaume-Uni portant sur l’interprétation correcte des règles applicables aux SEC, en particulier pour ce qui concerne l’interaction entre le chapitre no 5 et le chapitre no 9, il découle de ce qui a été dit au point 110 du présent arrêt que doit être examinée la question de savoir si l’interprétation défendue par le Royaume-Uni, qui est l’auteur de ces règles, est compatible avec le libellé des dispositions pertinentes de celles-ci.
112 Il convient de relever que, ainsi qu’il résulte du considérant 72 de la décision litigieuse, le Royaume-Uni avait fait valoir que les chapitres nos 5 et 9 reflétaient une approche fondée sur les risques et l’incidence de différents montages sur la base d’imposition au Royaume-Uni. De même, devant le Tribunal, le Royaume-Uni a clairement reproché à la Commission de ne pas avoir lu de manière conjointe ces chapitres, qui permettraient d’identifier les montages présentant un risque suffisamment
élevé d’abus ou de détournement artificiel.
113 À cet égard, premièrement, l’article 371BB du chapitre no 2, après avoir indiqué, à son paragraphe 1, les étapes à suivre pour déterminer, conformément au chapitre no 3, si et, dans l’affirmative, lesquels parmi les chapitres nos 4 à 8 de la partie 9 A de la TIOPA s’appliquent aux bénéfices d’une SEC (étape 1), ainsi que dans quelle mesure ces bénéfices relèvent de l’un de ces chapitres (étape 2), indique, à son paragraphe 2, que son paragraphe 1 est applicable « sous réserve » notamment du
chapitre no 9.
114 Rien dans ces paragraphes, lus ensemble, ne s’oppose à l’interprétation des règles applicables aux SEC défendue par le Royaume-Uni, selon laquelle les chapitres nos 5 et 9 se complètent mutuellement et définissent, ensemble, le champ d’application du prélèvement SEC, compte tenu de l’évaluation du risque que des bénéfices financiers non commerciaux résultent de montages qui donnent lieu à des détournements artificiels de bénéfices ou à l’érosion de la base imposable de l’impôt sur les sociétés
au Royaume-Uni. De ce fait, lorsque des bénéfices remplissent les conditions du chapitre no 9, il n’y a pas lieu de les examiner à l’aune des autres chapitres de la partie 9 A de la TIOPA. Ainsi, lorsque le chapitre no 9 est applicable, il n’est pas nécessaire de vérifier si les bénéfices concernés remplissent l’un des critères du chapitre no 5, dès lors que, que cela soit le cas ou non, ces bénéfices peuvent, sur demande, être exonérés selon les règles résultant du chapitre no 9.
115 Deuxièmement, l’article 371CB du chapitre no 3, qui décrit la manière dont il convient de vérifier si le chapitre no 5 est applicable, précise, à son paragraphe 8, que, « [d]ans le cas d’une société imposable qui introduit une demande au titre du chapitre no 9, les références, dans le présent article et dans le chapitre no 5, aux bénéfices financiers non commerciaux d’une SEC visent ces bénéfices tout en excluant aussi les bénéfices issus de prêts éligibles (tels qu’ils sont définis au chapitre
no 9) ».
116 Ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, la présence de l’adverbe « aussi » au sein de l’article 371CB, paragraphe 8, du chapitre no 3 est due au fait que les paragraphes 2 à 7 de cet article énoncent des règles permettant d’exclure certains autres bénéfices du champ d’application dudit article et du chapitre no 5.
117 Dès lors, rien dans l’article 371 CB du chapitre no 3 ne s’oppose à l’interprétation défendue par le Royaume-Uni, selon laquelle, en substance, ses paragraphes 1 et 8 signifient que le chapitre no 9 peut s’appliquer sans prendre en considération le chapitre no 5.
118 Troisièmement, l’article 371EA, paragraphe 1, du chapitre no 5 prévoit que, aux fins de l’étape 2 de l’article 371BB, paragraphe 1, du chapitre no 2, les bénéfices d’une SEC relevant du chapitre no 5 sont ses bénéfices financiers non commerciaux dans la mesure où ceux-ci remplissent les critères de ce chapitre. Le paragraphe 2 de cet article 371EA précise que « les références [...] aux bénéfices financiers non commerciaux doivent être lues conformément à l’article 371CB, paragraphe 2, et dans la
mesure où il est applicable, à l’article 371CB, paragraphe 8 ».
119 Dès lors qu’il renvoie à l’article 371CB, paragraphe 8, du chapitre no 3, cet article 371EA, qui, selon son intitulé même, est la « règle de base » du chapitre no 5, consacré aux bénéfices financiers non commerciaux des SEC, peut être lu comme subordonnant l’application des critères énoncés à ce chapitre au fait que les bénéfices financiers non commerciaux à examiner ne relèvent pas du chapitre no 9, de sorte que le libellé dudit article est compatible avec l’interprétation défendue par le
Royaume-Uni.
120 Quatrièmement, l’article 371IA du chapitre no 9 prévoit, à son paragraphe 1, sous a), que ce chapitre s’applique si, « mis à part le présent chapitre, le chapitre no 5 [...] s’applique » aux bénéfices d’une SEC. Le paragraphe 2 de cet article ajoute qu’« une société imposable [...] peut présenter une demande [...] afin que l’étape 2 de l’article 371BB, paragraphe 1 (le point de contrôle du prélèvement SEC), soit appliquée [...] sous réserve du présent chapitre ». Le paragraphe 3 dudit article
précise que, si cette société présente une demande, « les bénéfices issus de prêts éligibles passent par le point de contrôle du prélèvement SEC dans la mesure où (et seulement dans la mesure où) ils ne sont pas exonérés en vertu du présent chapitre ».
121 Selon la Commission, cet article démontre que les bénéfices financiers non commerciaux visés par le chapitre no 9 sont ceux qui, en l’absence de l’exonération prévue à ce chapitre, feraient l’objet d’un prélèvement SEC conformément au chapitre no 5.
122 Force est de constater que cette interprétation implique que le chapitre no 9 prévoit une exonération de l’impôt dû, le cas échéant, en vertu du chapitre no 5, lequel, selon l’article 371IA, paragraphe 3, du chapitre no 9, peut entraîner l’imposition des bénéfices financiers non commerciaux qui ne sont pas, ou pas intégralement, couverts par le chapitre no 9. Or, l’application des exonérations en cause à des bénéfices financiers non commerciaux susceptibles de remplir, en plus des conditions
prévues au chapitre no 9, l’un des critères du chapitre no 5 n’est pas en contradiction avec l’interprétation soutenue par le Royaume-Uni, synthétisée au point 114 du présent arrêt. En effet, lorsque et dans la mesure où les bénéfices financiers non commerciaux d’une SEC remplissent les conditions du chapitre no 9, ceux-ci peuvent être exonérés, en tout ou en partie, du prélèvement SEC, quand bien même ils rempliraient l’un des critères du chapitre no 5, et ce au motif que, selon l’évaluation
faite par le législateur du Royaume-Uni, le fait que ces conditions soient satisfaites permet d’exclure l’existence d’un risque suffisamment élevé que ces bénéfices résultent de montages qui donnent lieu à des détournements artificiels de bénéfices ou à l’érosion de la base imposable de l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni.
123 Dès lors, les dispositions de l’article 371IA du chapitre no 9 invoquées par la Commission ne permettent pas non plus de considérer que l’interprétation des règles applicables aux SEC invoquée par le Royaume-Uni n’est pas compatible avec le libellé de ces règles.
124 Par ailleurs, ITV soutient, en substance, que l’interprétation des règles applicables aux SEC doit tenir compte des enseignements de l’arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, EU:C:2006:544).
125 Il ressort du dispositif de cet arrêt que les articles 49 et 54 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’incorporation, dans l’assiette imposable d’une société résidente établie dans un État membre, des bénéfices réalisés par une SEC dans un autre État membre lorsque ces bénéfices y sont soumis à un niveau d’imposition inférieur à celui applicable dans le premier État, à moins qu’une telle incorporation ne concerne que les montages purement artificiels destinés à éluder
l’impôt national normalement dû. Par conséquent, l’application d’une telle mesure d’imposition doit être écartée lorsqu’il s’avère, sur la base d’éléments objectifs et vérifiables par des tiers, que, nonobstant l’existence de motivations de nature fiscale, ladite SEC est réellement implantée dans l’État membre d’accueil et y exerce des activités économiques effectives.
126 L’interprétation des règles applicables aux SEC énoncées à la partie 9 A de la TIOPA invoquée par les requérants reflète ces principes, dès lors que, par les chapitres nos 5 et 9, cette partie vise à imposer les bénéfices qui découlent de pratiques abusives, tels les montages purement artificiels, en accordant aux contribuables la possibilité de présenter une demande pour éviter ou pour réduire cette imposition lorsque sont satisfaites certaines conditions qui, de l’avis du législateur national,
anéantissent ou réduisent le risque de l’existence de tels montages.
127 Il s’ensuit que, comme l’a relevé, en substance, Mme l’avocate générale aux points 87 à 90 de ses conclusions, les règles applicables aux SEC, prises dans leur ensemble, et particulièrement, en ce qui concerne les bénéfices financiers non commerciaux, celles énoncées dans les chapitres nos 5 et 9, viennent compléter le SGIS, en obéissant à la même logique, largement fondée sur le principe de territorialité. En effet, le prélèvement SEC n’est pas appliqué ou n’est appliqué que partiellement aux
bénéfices financiers non commerciaux des SEC, tels que ceux provenant des prêts éligibles, qui ne présentent pas de lien territorial suffisant avec le Royaume-Uni et qui ne constituent dès lors pas des bénéfices artificiellement détournés ou une érosion de la base imposable de l’impôt sur les sociétés du Royaume-Uni.
128 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’analyse figurant aux points 85 à 90 de l’arrêt attaqué. Le Tribunal, pour considérer que les règles applicables aux SEC constituaient un corpus complet, distinct du SGIS, y a souligné, d’abord, les différences qui existeraient entre le SGIS et ces règles quant à l’assiette imposable, l’assujetti à l’impôt, le fait générateur de l’impôt ainsi que le taux d’imposition, ensuite, la présence dans la partie 9 A de la TIOPA de dispositions spécifiques
concernant le prélèvement SEC et, enfin, l’existence, dans cette partie, d’un mécanisme visant à éviter la double imposition.
129 À cet égard, premièrement, s’agissant de l’assiette imposable, comme le souligne le Royaume-Uni, le Tribunal opère à tort une distinction entre les bénéfices réalisés dans cet État et les bénéfices artificiellement détournés de celui-ci, pour les considérer comme constituant deux assiettes imposables différentes. En effet, dans les deux cas, l’assiette correspond aux bénéfices réalisés.
130 Deuxièmement, concernant les assujettis à l’impôt, il y a lieu de relever que les assujettis au prélèvement SEC sont les sociétés mères établies au Royaume-Uni, à savoir des sociétés qui sont également assujetties à l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni. Il est vrai qu’il s’agit d’un sous-ensemble des sociétés établies au Royaume-Uni, dès lors que toutes ces sociétés ne contrôlent pas nécessairement des SEC dont les bénéfices déclenchent un prélèvement SEC. Il n’en demeure pas moins que, au
sein de ce sous-ensemble, les mêmes sociétés sont soumises tant à l’impôt sur les sociétés qu’au prélèvement SEC. C’est donc à tort que le Tribunal a considéré qu’il existait une distinction pertinente entre les assujettis au prélèvement SEC et les assujettis à l’imposition résultant du SGIS.
131 Troisièmement, pour ce qui est du fait générateur, le Tribunal a estimé qu’un prélèvement SEC est appliqué lorsque les SEC réalisent des bénéfices en dehors du Royaume-Uni issus de montages ou de détournements purement artificiels de ressources ou de bénéfices qui auraient dû être imposés au Royaume-Uni. Il en a déduit que le fait générateur de ce prélèvement ne correspondait pas à la réalisation de bénéfices au Royaume-Uni imposables au titre du SGIS. Ce faisant, le Tribunal a mal interprété la
notion de fait générateur, dès lors que, dans les deux cas, l’événement qui justifie l’assujettissement d’une personne à l’impôt est la réalisation de bénéfices par celle-ci.
132 Quatrièmement, s’agissant du taux d’imposition du prélèvement SEC, celui-ci est le même que pour l’impôt prévu par le SGIS, ainsi que le Tribunal l’a admis. Certes, ce dernier a ajouté que, en ce qui concerne le prélèvement SEC, il existe un mécanisme de calcul spécifique qui peut impliquer de faire la moyenne de plusieurs taux d’imposition applicables aux bénéfices de la société imposable au Royaume-Uni. Toutefois, ainsi que le fait valoir le Royaume-Uni, sans être contredit par la Commission,
la possibilité que le taux d’imposition corresponde à la moyenne de plusieurs taux existe tant pour le prélèvement SEC que pour l’impôt sur les sociétés établies au Royaume-Uni. En effet, l’article 8, paragraphe 5, de la Corporation Tax Act 2009 (loi relative à l’imposition des sociétés de 2009) prévoit un mécanisme équivalent à celui résultant de l’article 371BC du chapitre no 2, mentionné par le Tribunal au point 88 de l’arrêt attaqué.
133 Cinquièmement, s’il est constant que la partie 9 A de la TIOPA contient des dispositions spécifiques concernant le calcul du prélèvement SEC, ces règles sont, en substance, identiques à celles du SGIS à de nombreux égards, ainsi que le soutient le Royaume-Uni et que l’admet la Commission.
134 Sixièmement, concernant la double imposition, le Royaume-Uni et ITV font valoir à juste titre que la partie 2 de la TIOPA est consacrée à cette problématique, de telle sorte que c’est à tort que le Tribunal a retenu que l’existence d’un mécanisme visant à éviter la double imposition était une spécificité des règles applicables aux SEC.
135 Il découle de l’ensemble de ces considérations que les règles applicables aux SEC font partie intégrante du SGIS, qu’elles complètent, en suivant la même logique que ce dernier, selon laquelle sont soumis à l’impôt les bénéfices présentant un lien territorial suffisant avec le Royaume-Uni. Dès lors, ainsi que le font valoir les requérants par leur première contestation visée au point 53 du présent arrêt, le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a confirmé que, comme l’avait considéré
la Commission dans la décision litigieuse, le cadre de référence aux fins de l’examen de la sélectivité des exonérations en cause à l’aune de l’article 107, paragraphe 1, TFUE était constitué par les seules règles applicables aux SEC, énoncées à la partie 9 A de la TIOPA.
Conclusion sur les pourvois
136 Il ressort de la jurisprudence de la Cour que, la détermination du cadre de référence constituant le point de départ de l’examen comparatif devant être mené dans le contexte de l’appréciation de la sélectivité, une erreur commise dans cette détermination vicie nécessairement l’ensemble de l’analyse de la condition relative à la sélectivité (arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 71 ainsi que jurisprudence citée).
137 Par conséquent, l’erreur de droit constatée au point 135 du présent arrêt suffit pour annuler l’arrêt attaqué dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres contestations mentionnées au point 53 du présent arrêt.
Sur les recours devant le Tribunal
138 Conformément à l’article 61, premier alinéa, deuxième phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.
139 Tel est le cas en l’espèce, les moyens des recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse ayant fait l’objet d’un débat contradictoire devant le Tribunal et leur examen ne nécessitant d’adopter aucune mesure supplémentaire d’organisation de la procédure ou d’instruction du dossier.
140 À cet égard, il suffit de relever que, pour les motifs énoncés aux points 90 à 135 du présent arrêt, la décision litigieuse doit être annulée en ce que la Commission a commis une erreur de droit en constatant l’existence d’un avantage sélectif à l’aune d’un cadre de référence limité aux règles applicables aux SEC inscrites à la partie 9 A de la TIOPA, alors que ces règles ne sont pas détachables du SGIS.
141 Ainsi qu’il découle de la jurisprudence rappelée au point 136 du présent arrêt, une telle erreur dans la détermination des règles effectivement applicables en vertu du droit national pertinent et, partant, dans l’identification de l’imposition dite « normale » au regard de laquelle devaient être appréciées les exonérations en cause vicie nécessairement l’ensemble du raisonnement tenant à l’existence d’un avantage sélectif.
Sur les dépens
142 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.
143 L’article 138, paragraphe 1, et l’article 140, paragraphe 1, de ce règlement, rendus applicables à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, disposent, d’une part, que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens, et, d’autre part, que les États membres et les institutions intervenues au litige supportent leurs propres dépens.
144 En l’espèce, s’agissant des pourvois formés dans les affaires C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P, le Royaume-Uni, ITV et LSEGH ayant chacun obtenu gain de cause, il y a lieu, conformément à leurs conclusions, de condamner la Commission à supporter, outre ses propres dépens, ceux des parties requérantes au pourvoi.
145 Par ailleurs, les recours devant le Tribunal étant accueillis, la Commission est condamnée à supporter, outres ses propres dépens, ceux exposés par le Royaume-Uni dans l’affaire T‑363/19 ainsi que ceux exposés par ITV et par LSEGH dans l’affaire T‑456/19.
146 Le Royaume-Uni supportera ses propres dépens dans l’affaire T‑456/19.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juin 2022, Royaume-Uni et ITV/Commission (T‑363/19 et T‑456/19, EU:T:2022:349), est annulé.
2) La décision (UE) 2019/1352 de la Commission, du 2 avril 2019, concernant l’aide d’État SA.44896 mise à exécution par le Royaume-Uni en ce qui concerne l’exonération sur le financement des groupes au titre des règles relatives aux SEC, est annulée.
3) La Commission européenne est condamnée aux dépens des pourvois dans les affaires C‑555/22 P, C‑556/22 P et C‑564/22 P.
4) La Commission européenne est condamnée aux dépens dans l’affaire T‑363/19.
5) La Commission européenne supporte, outre ses propres dépens, ceux exposés par ITV plc ainsi que par LSEGH (Luxembourg) Ltd et London Stock Exchange Group Holdings (Italy) Ltd dans l’affaire T‑456/19.
6) Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supporte ses propres dépens dans l’affaire T‑456/19.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.