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26/06/2025 | CJUE | N°C-618/23

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, SALUS Haus Dr. med Otto Greither Nachf. GmbH & Co.KG contre Astrid Twardy GmbH., 26/06/2025, C-618/23


 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

26 juin 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Médicaments à usage humain – Directive 2001/83/CE –Article 1er, point 29 – Article 16 bis – Médicaments traditionnels à base de plantes – Article 62 – Informations utiles pour le patient – Règlement (UE) 2018/848 – Article 2, paragraphe 1 – Champ d’application – Mentions figurant sur l’emballage extérieur d’une tisane médicinale à base de plantes – Utilisation de termes faisant référence à la production biologique»

Dans l’affaire C‑618/23,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Ob...

 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

26 juin 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Médicaments à usage humain – Directive 2001/83/CE –Article 1er, point 29 – Article 16 bis – Médicaments traditionnels à base de plantes – Article 62 – Informations utiles pour le patient – Règlement (UE) 2018/848 – Article 2, paragraphe 1 – Champ d’application – Mentions figurant sur l’emballage extérieur d’une tisane médicinale à base de plantes – Utilisation de termes faisant référence à la production biologique»

Dans l’affaire C‑618/23,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), par décision du 28 septembre 2023, parvenue à la Cour le 6 octobre 2023, dans la procédure

SALUS Haus Dr. med. Otto Greither Nachf. GmbH & Co. KG

contre

Astrid Twardy GmbH,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de Mme M. L. Arastey Sahún, présidente de chambre, MM. D. Gratsias, E. Regan, J. Passer (rapporteur) et B. Smulders, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. G. Chiapponi, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 novembre 2024,

considérant les observations présentées :

– pour SALUS Haus Dr. med. Otto Greither Nachf. GmbH & Co. KG, par Mes M. Fuderer et C. Tillmanns, Rechtsanwälte,

– pour Astrid Twardy GmbH, par Me M. Weidner, Rechtsanwalt,

– pour le gouvernement français, par M. G. Bain, Mme P. Chansou, M. B. Fodda et Mme M. Guiresse, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme G. Natale, avvocato dello Stato,

– pour la Commission européenne, par MM. A. Dawes, B. Hofstötter, Mme E. Mathieu et M. A. Spina, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 30 janvier 2025,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 62 de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67), telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004 (JO 2004, L 136, p. 34) (ci-après la « directive 2001/83 »), ainsi que des articles 30 et 32 et de l’article 33, paragraphe 5, du règlement
(UE) 2018/848 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques, et abrogeant le règlement (CE) no 834/2007 du Conseil (JO 2018, L 150, p. 1).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant SALUS Haus Dr. med Otto Greither Nachf. GmbH & Co. KG (ci-après « SALUS »), une entreprise qui commercialise notamment des médicaments à base de plantes, à Astrid Twardy GmbH (ci-après « Twardy »), une entreprise qui commercialise également de tels médicaments, au sujet des mentions apposées sur l’emballage extérieur de tisanes médicinales à base de plantes que SALUS commercialise ou envisage de commercialiser.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2001/83

3 Les considérants 2 et 40 de la directive 2001/83 énoncent :

« (2) Toute réglementation en matière de production, de distribution ou d’utilisation des médicaments doit avoir comme objectif essentiel la sauvegarde de la santé publique.

[...]

(40) Les dispositions relatives à l’information des patients doivent assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, de façon à permettre une utilisation correcte des médicaments, sur la base d’une information complète et compréhensible. »

4 Figurant sous le titre I de cette directive, intitulé « Définitions », l’article 1er de celle-ci dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2) médicament :

a) toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ; ou

b) toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée en vue soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit d’établir un diagnostic médical ;

[...]

25) étiquetage :

les mentions portées sur l’emballage extérieur ou le conditionnement primaire ;

[...]

29) médicament traditionnel à base de plantes :

tout médicament à base de plantes qui répond aux conditions énumérées à l’article 16 bis, paragraphe 1 ;

[...] »

5 Figurant sous le titre II de ladite directive, intitulé « Champ d’application », l’article 2 de celle-ci prévoit :

« 1.   La présente directive s’applique aux médicaments à usage humain destinés à être mis sur le marché dans les États membres et préparés industriellement ou fabriqués selon une méthode dans laquelle intervient un processus industriel.

2.   En cas de doute, lorsqu’un produit, eu égard à l’ensemble de ses caractéristiques, est susceptible de répondre à la fois à la définition d’un “médicament” et à la définition d’un produit régi par une autre législation communautaire, les dispositions de la présente directive s’appliquent.

[...] »

6 Le titre III de la directive 2001/83 comporte les dispositions de celle-ci relatives à la mise sur le marché des médicaments.

7 Figurant au chapitre 1 de ce titre III, intitulé « Autorisation de mise sur le marché », l’article 11 de cette directive se lit comme suit :

« Le résumé des caractéristiques du produit comporte, dans cet ordre, les renseignements suivants :

1. nom du médicament suivi du dosage et de la forme pharmaceutique ;

2. composition qualitative et quantitative en substances actives et en composants de l’excipient, dont la connaissance est nécessaire à une bonne administration du médicament. Sont employées les dénominations communes ou les dénominations chimiques ;

3. forme pharmaceutique ;

4. informations cliniques [...]

[...] »

8 Figurant au chapitre 2 bis dudit titre III, intitulé « Dispositions particulières applicables aux médicaments traditionnels à base de plantes », l’article 16 bis de ladite directive dispose :

« 1.   Une procédure d’enregistrement simplifiée (ci-après dénommée “enregistrement de l’usage traditionnel”) est instaurée pour les médicaments à base de plantes qui répondent à l’ensemble des critères suivants :

a) ils ont des indications exclusivement appropriées à des médicaments traditionnels à base de plantes qui, de par leur composition et leur destination, sont conçus pour et destinés à être utilisés sans la surveillance d’un médecin à des fins de diagnostic, de prescription ou de suivi du traitement ;

b) ils sont exclusivement destinés à être administrés selon un dosage et une posologie spécifiés ;

c) il s’agit de préparations administrées par voie orale, externe et/ou par inhalation ;

d) la durée d’usage traditionnel visée à l’article 16 quater, paragraphe 1, point c), est écoulée ;

e) les données sur l’usage traditionnel du médicament sont suffisantes ; en particulier, l’innocuité du produit est démontrée dans les conditions d’emploi spécifiées et les effets pharmacologiques ou l’efficacité du médicament sont plausibles du fait de l’ancienneté de l’usage et de l’expérience.

[...] »

9 Le titre V de la directive 2001/83, intitulé « Étiquetage et notice », comporte notamment les articles 54, 59, 61 et 62 de celle-ci.

10 L’article 54 de cette directive prévoit :

« L’emballage extérieur ou, à défaut d’emballage extérieur, le conditionnement primaire de tout médicament doit porter les mentions suivantes :

[...]

b) la composition qualitative et quantitative en substances actives par unités de prise ou, selon la forme d’administration, pour un volume ou un poids déterminé, en utilisant les dénominations communes ;

[...]

e) le mode d’administration et, si nécessaire, la voie d’administration. Un espace est prévu pour indiquer la posologie prescrite ;

[...]

k) le nom et l’adresse du titulaire de l’autorisation de mise sur le marché et, le cas échéant, le nom du représentant du titulaire désigné par ce dernier ;

l) le numéro de l’autorisation de mise sur le marché ;

[...] »

11 L’article 59, paragraphe 1, de ladite directive se lit comme suit :

« La notice est établie en conformité avec le résumé des caractéristiques du produit ; elle doit comporter, dans cet ordre :

a) pour l’identification du médicament :

i) le nom du médicament suivi du dosage et de la forme pharmaceutique et, le cas échéant, de la mention du destinataire [...]

[...]

b) les indications thérapeutiques :

c) une liste des informations nécessaires avant la prise du médicament [...]

d) les instructions nécessaires et habituelles pour une bonne utilisation [...]

[...] »

12 L’article 61 de la même directive dispose :

« 1.   Une ou plusieurs maquettes de l’emballage extérieur et du conditionnement primaire du médicament, ainsi que le projet de notice, sont soumis aux autorités compétentes en matière d’autorisation de mise sur le marché lors de la demande d’autorisation de mise sur le marché. [...]

2.   L’autorité compétente ne s’oppose pas à la mise sur le marché du médicament si l’étiquetage ou la notice sont conformes aux prescriptions du présent titre, et s’ils sont en conformité avec les renseignements figurant dans le résumé des caractéristiques du produit.

[...] »

13 L’article 62 de la directive 2001/83 prévoit :

« L’emballage extérieur et la notice peuvent comporter des signes ou des pictogrammes visant à expliciter certaines des informations visées à l’article 54 et à l’article 59, paragraphe 1, ainsi que d’autres informations compatibles avec le résumé des caractéristiques du produit, utiles pour le patient, à l’exclusion de tout élément pouvant présenter un caractère promotionnel. »

Le règlement 2018/848

14 Les considérants 10 et 16 du règlement 2018/848 énoncent :

« (10) L’expérience acquise jusqu’ici dans le cadre de l’application du règlement (CE) no 834/2007 [du Conseil, du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) no 2092/91 (JO 2007, L 189, p. 1),] a mis en évidence la nécessité de préciser les produits inclus dans le champ d’application du présent règlement. Il convient que le règlement couvre tout d’abord les produits issus de l’agriculture, y compris de l’aquaculture
et de l’apiculture, énumérés à l’annexe I du traité [FUE]. Il convient également qu’il couvre les produits agricoles transformés destinés à l’alimentation humaine ou animale, étant donné que la mise sur le marché de ces produits en tant que produits biologiques leur offre des débouchés considérables et renforce la visibilité, pour les consommateurs, du caractère biologique des produits agricoles à partir desquels ils ont été obtenus. De même, il convient que le présent règlement couvre
certains autres produits qui, comme les produits agricoles transformés destinés à l’alimentation humaine ou animale, ont un lien étroit avec les produits agricoles, du fait que ces autres produits constituent un débouché important pour les produits agricoles ou font partie intégrante du processus de production. [...] Par souci de clarté, il convient que ces autres produits qui ne figurent pas à l’annexe I du traité [FUE] soient énumérés dans une annexe du présent règlement.

[...]

(16) Il convient que le présent règlement s’applique sans préjudice de la législation connexe adoptée en particulier dans les domaines de la sécurité de la chaîne alimentaire, de la santé et du bien‑être des animaux, de la santé des végétaux, du matériel de reproduction des végétaux, de l’étiquetage et de l’environnement. »

15 L’article 2 de ce règlement, intitulé « Champ d’application », prévoit :

« 1.   Le présent règlement s’applique aux produits ci‑après provenant de l’agriculture, y compris l’aquaculture et l’apiculture, qui sont énumérés à l’annexe I du traité [FUE], et des produits dérivant de ces produits, lorsqu’ils sont produits, préparés, étiquetés, distribués, mis sur le marché, importés dans ou exportés depuis l’Union [européenne], ou qu’ils sont destinés à l’être :

a) produits agricoles vivants ou non transformés, y compris les semences et autres matériels de reproduction des végétaux ;

b) produits agricoles transformés destinés à l’alimentation humaine ;

c) aliments pour animaux.

Le présent règlement s’applique également à certains autres produits étroitement liés à l’agriculture, énumérés à l’annexe I du présent règlement, lorsqu’ils sont produits, préparés, étiquetés, distribués, mis sur le marché, importés dans ou exportés depuis l’Union, ou qu’ils sont destinés à l’être.

[...]

4.   Sauf dispositions contraires, le présent règlement s’applique sans préjudice de la législation connexe adoptée par l’Union, en particulier, la législation dans les domaines de la sécurité de la chaîne alimentaire, de la santé et du bien‑être des animaux, de la santé des végétaux et du matériel de reproduction des végétaux.

5.   Le présent règlement s’applique sans préjudice des autres dispositions spécifiques du droit de l’Union relatives à la mise sur le marché des produits et, notamment, du règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil[, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 671),] et du règlement (UE) no 1169/2011 [du
Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) no 1924/2006 et (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE)
no 608/2004 de la Commission (JO 2011, L 304, p. 18)].

[...] »

16 Figurant au chapitre IV du règlement 2018/848, intitulé « Étiquetage », l’article 30 de celui-ci, lui‑même intitulé « Utilisation de termes faisant référence à la production biologique », se lit comme suit :

« 1.   Aux fins du présent règlement, un produit est considéré comme portant des termes faisant référence à la production biologique lorsque, dans l’étiquetage, la publicité ou les documents commerciaux, ce produit, ses ingrédients ou les matières premières pour aliments des animaux utilisés pour sa production sont décrits en des termes suggérant à l’acheteur que le produit, ses ingrédients ou les matières premières pour aliments des animaux ont été obtenus conformément au présent règlement. En
particulier, les termes énumérés à l’annexe IV et leurs dérivés et diminutifs, tels que “bio” et “éco”, employés seuls ou associés à d’autres termes, peuvent être utilisés dans l’ensemble de l’Union et dans toutes les langues énumérées dans ladite annexe pour l’étiquetage et la publicité des produits visés à l’article 2, paragraphe 1, conformes au présent règlement.

2.   En ce qui concerne les produits visés à l’article 2, paragraphe 1, l’utilisation des termes visés au paragraphe 1 du présent article n’est autorisée nulle part dans l’Union, dans aucune des langues énumérées à l’annexe IV, pour l’étiquetage, la publicité ou les documents commerciaux concernant un produit qui n’est pas conforme au présent règlement.

En outre, l’utilisation de termes, y compris dans les marques commerciales ou les dénominations sociales, ou de pratiques en matière d’étiquetage ou de publicité qui seraient de nature à induire le consommateur ou l’utilisateur en erreur en suggérant qu’un produit ou ses ingrédients sont conformes au présent règlement est interdite.

[...] »

17 Figurant au même chapitre IV, l’article 32 de ce règlement, intitulé « Indications obligatoires », énonce :

« 1.   Lorsque des produits portent des termes visés à l’article 30, paragraphe 1, y compris les produits étiquetés en tant que produits en conversion conformément à l’article 30, paragraphe 3 :

a) le numéro de code de l’autorité de contrôle ou de l’organisme de contrôle dont dépend l’opérateur qui a mené à bien la dernière opération de production ou de préparation figure également sur l’étiquette ; et

b) en ce qui concerne les denrées alimentaires préemballées, le logo de production biologique de l’Union européenne visé à l’article 33 figure également sur l’emballage, sauf dans les cas visés à l’article 30, paragraphe 3 et paragraphe 5, points b) et c).

2.   Lorsque le logo de production biologique de l’Union européenne est utilisé, une indication de l’endroit où les matières premières agricoles qui composent le produit ont été produites figure dans le même champ visuel que le logo sous l’une des formes ci-après, [...]

[...] »

18 L’article 33 dudit règlement, intitulé « Logo de production biologique de l’Union européenne », dispose :

« 1.   Le logo de production biologique de l’Union européenne peut être utilisé pour l’étiquetage, la présentation et la publicité concernant les produits conformes au présent règlement.

[...]

5.   Des logos nationaux et privés peuvent être utilisés pour l’étiquetage, la présentation et la publicité concernant les produits conformes au présent règlement.

[...] »

19 Parmi les produits figurant à l’annexe I du règlement 2018/848, intitulée « Autres produits visés à l’article 2, paragraphe 1 », figurent les « préparations traditionnelles à base de plantes. ».

20 L’annexe V de ce règlement énonce les règles relatives à l’utilisation du logo de production biologique de l’Union européenne.

Le droit allemand

21 L’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, du Gesetz über den Verkehr mit Arzneimitteln (Arzneimittelgesetz – AMG) (loi relative au commerce des médicaments), du 24 août 1976 (BGBl. 1976 I, p. 2445), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après l’« AMG »), qui transpose l’article 62 de la directive 2001/83, est libellé comme suit :

« L’apposition d’autres mentions, qui ne sont pas prescrites par un règlement de la Communauté européenne ou de l’Union européenne ou ne sont pas déjà autorisés par un tel règlement, est autorisée dans la mesure où elles sont liées à l’utilisation du médicament, qu’elles sont utiles pour l’éducation sanitaire des patients et qu’elles ne contredisent pas les indications visées à l’article 11a. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

22 SALUS et Twardy, deux entreprises de droit allemand, commercialisent notamment des médicaments traditionnels à base de plantes.

23 Parmi les produits proposés à la vente par SALUS figure la « tisane médicinale Salus feuilles de sauge », sur l’emballage extérieur duquel figurent le logo de production biologique officiel de l’Union européenne, le numéro de code de l’organisme de contrôle et la mention « Agriculture non UE ». Cette société prévoit, en outre, de commercialiser, d’une part, une tisane « calmante bio », dont il est prévu que l’emballage extérieur porte le logo de production biologique officiel de l’Union
européenne, le logo de production biologique de SALUS, le numéro de code de l’organisme de contrôle ainsi que la mention « issu de l’agriculture biologique » et, d’autre part, une tisane « alchémille commune », dont l’emballage extérieur porterait le logo de production biologique officiel de l’Union européenne, le numéro de code de l’organisme de contrôle ainsi que la mention « Agriculture UE ».

24 Estimant que l’apposition par SALUS, sur l’emballage extérieur de ces produits, de mentions relatives à la production biologique de ceux-ci constitue une violation de l’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, de l’AMG, Twardy a introduit une action devant le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne) tendant à ce que SALUS s’abstienne de commercialiser des tisanes médicinales à base de plantes dont les emballages extérieurs portent des indications relatives à
l’origine biologique de ces plantes.

25 Par un jugement du 7 juin 2023, le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) a fait droit à cette demande et a notamment condamné SALUS, en substance, à s’abstenir, dans la vie des affaires, de distribuer ou de faire distribuer lesdits produits si ceux-ci comportent, sur leur emballage extérieur, ces indications. Selon cette juridiction, de telles indications sont interdites en vertu de l’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, de l’AMG.

26 SALUS a interjeté appel de ce jugement devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), qui est la juridiction de renvoi. Cette société soutient que le champ d’application du règlement 2018/848 est plus large que celui du règlement no 834/2007 et que le règlement 2018/848 est applicable aux « autres produits étroitement liés à l’agriculture », telles que les tisanes médicinales en cause au principal, qui seraient des « préparations traditionnelles à
base de plantes ». Selon elle, les dispositions du règlement 2018/848 et de la directive 2001/83 en matière d’étiquetage s’appliquent concurremment. En tout état de cause, l’article 62 de la directive 2001/83 devrait être interprété en ce sens que les éléments d’étiquetage autorisés par le règlement 2018/848 sont « utiles pour le patient », au sens de cet article 62.

27 Twardy a conclu au rejet de cet appel, en faisant valoir que, même si les « préparations traditionnelles à base de plantes » qui sont à classer comme étant des médicaments devaient être considérées comme relevant du champ d’application matériel du règlement 2018/848, l’article 62 de la directive 2001/83 et l’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, de l’AMG devraient prévaloir. En effet, pour protéger le patient d’une surabondance d’informations et d’un excès de publicité dans l’étiquetage des
médicaments, l’article 62 de cette directive devrait faire l’objet d’une interprétation stricte, a fortiori dans la mesure où il n’existe pas d’obligation d’indiquer l’origine biologique des plantes utilisées pour la production de tisanes médicinales.

28 La juridiction de renvoi fait observer, premièrement, que l’issue du litige au principal dépend, tout d’abord, du point de savoir si relèvent de la notion de « préparations traditionnelles à base de plantes », au sens des dispositions combinées de l’article 2, paragraphe 1, et de l’annexe I du règlement 2018/848, des préparations, telles que les tisanes médicinales en cause au principal, qui relèvent également de la notion de « médicaments », au sens de la directive 2001/83. Cette juridiction
souligne que la catégorie des « préparations traditionnelles à base de plantes » a été introduite par le législateur de l’Union dans le règlement 2018/848 et n’a pas d’équivalent dans le règlement no 834/2007.

29 À cet égard, ladite juridiction fait observer que, selon le considérant 10 du règlement 2018/848, le législateur de l’Union a voulu inclure dans le champ d’application de ce règlement des produits autres que des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux, sans toutefois fournir une définition plus précise de ces produits, laquelle pourrait inclure des médicaments.

30 Deuxièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur la relation qui existe entre les règles en matière d’étiquetage prévues par le règlement 2018/848 et celles résultant de la directive 2001/83. Tandis que cette dernière contiendrait une liste en principe exhaustive des indications qui peuvent être apposées sur l’emballage extérieur des médicaments, le règlement 2018/848 autoriserait, à ses articles 30 et 32, une multitude d’indications, dont certaines présentent un caractère obligatoire si
l’étiquetage du produit comporte des termes faisant référence à la production biologique. L’article 33, paragraphe 5, de ce règlement autoriserait également d’autres éléments d’étiquetage.

31 À cet égard, cette juridiction expose que, en vertu de l’article 2, paragraphe 4, du règlement 2018/848, celui-ci s’applique, sauf dispositions contraires, « sans préjudice de la législation connexe adoptée par l’Union, en particulier, la législation dans les domaines de la sécurité de la chaîne alimentaire, de la santé et du bien‑être des animaux [...] ». La directive 2001/83 ne serait toutefois pas spécifiquement visée. Par ailleurs, plaiderait en faveur d’une interprétation selon laquelle les
dispositions de cette directive prévalent sur celle du règlement 2018/848 le fait que ladite directive régit tant les risques que les exigences spécifiques quant aux mentions figurant sur l’emballage extérieur de ceux-ci et procède à la mise en balance nécessaire des impératifs en cause.

32 Troisièmement, ladite juridiction fait observer que si les dispositions de la directive 2001/83 en matière d’étiquetage devaient prévaloir, se poserait la question de savoir si relèvent des mentions visées par l’article 62 de cette directive des informations relatives au mode de production des médicaments, notamment le fait que les substances végétales utilisées dans cette production sont issues de l’agriculture biologique. En effet, de telles informations pourraient être considérées comme étant
« utiles pour le patient », au sens de cet article 62.

33 À cet égard, la juridiction de renvoi précise, d’une part, que certaines indications seraient autorisées par l’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, de l’AMG, dans le cas où des règlements de l’Union les autorisent. Cette disposition s’appliquerait toutefois uniquement aux règlements de l’Union relatifs aux médicaments, dont le règlement 2018/848 ne fait pas partie. D’autre part, le libellé de l’article 10, paragraphe 1, cinquième phrase, de l’AMG serait davantage adapté à la rédaction
initiale de l’article 62 de la directive 2001/83, aux termes duquel seules étaient autorisées des indications « utiles pour l’éducation sanitaire », tandis que la nouvelle rédaction de cette directive autorise toutes les indications « utiles pour le patient ».

34 Dans ce contexte, l’interprétation des juridictions allemandes, selon laquelle seules constituent des indications utiles pour le patient des indications qui revêtent une importance directe pour la santé de celui-ci, dont ne font pas partie des informations concernant le mode de production, pourrait s’avérer trop restrictive. Or, compte tenu de l’importance que le droit de l’Union reconnaît, par la refonte du règlement no 834/2007, à la provenance de l’agriculture biologique, de telles
informations pourraient également être « utiles pour le patient ».

35 Dans ces conditions, l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Des tisanes médicinales à base de plantes, qui sont à classer comme “médicaments traditionnels à base de plantes”, au sens de l’article 1er, point 29, et de l’article 16 bis de la [directive 2001/83], ajoutés par l’article 1er, points 1 et 2, de la directive 2004/24/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, modifiant, en ce qui concerne les médicaments traditionnels à base de plantes, la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage
humain (JO 2004, L 136, p. 85), doivent‑elles être considérées comme étant des “préparations traditionnelles à base de plantes”, au sens des dispositions combinées de l’article 2, paragraphe 1, et de l’annexe I du [règlement 2018/848] ?

2) En cas de réponse affirmative à la première question :

Les différents éléments d’étiquetage prévus au chapitre IV du règlement 2018/848, notamment :

– le logo de production biologique officiel de l’Union européenne (article 33 lu en combinaison avec l’annexe V du règlement 2018/848),

– le logo de production biologique propre à l’entreprise (article 33, paragraphe 5, du règlement 2018/848),

– le numéro de code de l’organisme de contrôle [article 32, paragraphe 1, sous a), du règlement 2018/848],

– l’indication de l’endroit [où les matières premières agricoles ont été produites] : “Agriculture UE” ou “Agriculture non UE” (article 32, paragraphe 2, du règlement 2018/848),

– le terme “bio” (article 30, paragraphe 2, du règlement 2018/848) et

– la mention “issu de l’agriculture biologique” (article 30, paragraphe 1, du règlement 2018/848),

peuvent‑ils être apposés sur l’emballage extérieur d’un médicament sans que les conditions de l’article 62 de la directive 2001/83 soient satisfaites ?

3) En cas de réponse négative à la première ou à la deuxième question :

Les éléments d’étiquetage cités dans la deuxième question sont‑ils des éléments “utiles pour le patient” et “[ne] pouvant [pas] présenter un caractère promotionnel”, au sens de l’article 62 de la directive 2001/83 ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

36 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, point 29, et l’article 16 bis de la directive 2001/83 doivent être interprétés en ce sens que des produits qualifiés de « médicaments traditionnels à base de plantes », au sens de ces dispositions, qui relèvent du champ d’application de cette directive en vertu de son article 2, peuvent être considérés simultanément comme étant des « préparations traditionnelles à base de plantes », au sens de l’annexe I
du règlement 2018/848, relevant du champ d’application de ce règlement en vertu de son article 2, paragraphe 1.

37 À titre liminaire, il y a lieu de relever que, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2001/83, qui définit son champ d’application, celle-ci s’applique aux médicaments à usage humain destinés à être mis sur le marché dans les États membres et préparés industriellement ou fabriqués selon une méthode dans laquelle intervient un processus industriel. L’article 2, paragraphe 2, de cette directive précise que, en cas de doute, lorsqu’un produit, eu égard à l’ensemble de ses
caractéristiques, est susceptible de répondre à la fois à la définition d’un « médicament » et à la définition d’un produit régi par une autre législation de l’Union, les dispositions de ladite directive s’appliquent.

38 En l’occurrence, il ressort des indications fournies par la juridiction de renvoi que les tisanes médicinales à base de plantes en cause au principal satisfont aux conditions énumérées à l’article 16 bis, paragraphe 1, de la directive 2001/83, de sorte que ces tisanes doivent être considérées comme étant des médicaments, au sens de l’article 1er, point 2, de cette directive, qui relèvent du champ d’application de ladite directive, tel que défini par son article 2, paragraphe 1.

39 Cette juridiction souligne toutefois que, comme l’énonce le considérant 10 du règlement 2018/848, le champ d’application matériel de ce règlement est plus large que celui du règlement no 834/2007, jusqu’alors applicable, en ce que le règlement 2018/848 couvre également des produits qui ont un lien étroit avec les produits agricoles, tels que les préparations traditionnelles à base de plantes, visées à l’annexe I de ce règlement. Dans la mesure où, selon la requérante au principal, les tisanes
médicinales en cause au principal relèvent également du champ d’application du règlement 2018/848, en application de son article 2, paragraphe 1, ladite juridiction cherche à savoir si, s’agissant de l’étiquetage de ces produits, les dispositions du règlement 2018/848 et celles de la directive 2001/83 sont susceptibles d’être appliquées de manière concomitante.

40 À cet égard, la Cour a déjà jugé que, en cas de doute sur la classification correcte des produits en cause, l’article 2, paragraphe 2, de la directive 2001/83 accorde la priorité à l’application du droit de l’Union relatif aux médicaments, ce qui, en raison des exigences plus élevées découlant du droit relatif aux médicaments pour la mise sur le marché de produits, correspond également à l’objectif de protection élevée de la santé humaine poursuivi par l’article 168 TFUE (arrêt du 2 mars 2023,
Kwizda Pharma, C‑760/21, EU:C:2023:143, point 34).

41 Partant, selon une jurisprudence constante, seules les dispositions du droit de l’Union spécifiques aux médicaments s’appliquent à un produit qui remplit aussi bien les conditions pour relever de la notion de « denrée alimentaire » que de celle de « médicament » (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2005, HLH Warenvertrieb et Orthica, C‑211/03, C‑299/03 et C‑316/03 à C‑318/03, EU:C:2005:370, point 43 ainsi que jurisprudence citée).

42 En outre, ainsi que M. l’avocat général l’a souligné, en substance, aux points 42 et 43 de ses conclusions, la réglementation de l’Union dans le domaine des médicaments à usage humain tend à exclure que des produits qualifiés de « médicaments », au sens de la directive 2001/83, ne relèvent d’autres régimes juridiques qui pourraient être applicables dans ce domaine. À cet égard, les termes « préparations traditionnelles à base de plantes », figurant à l’annexe I du règlement 2018/848, présentent,
certes, un caractère générique. Toutefois, en l’absence de dérogation explicite au régime exclusif établi par cette directive, la volonté du législateur de l’Union énoncée au considérant 10 de ce règlement d’inclure dans le champ d’application de celui-ci, au moyen d’une formulation large et non ciblée, des produits autres que des denrées alimentaires ne saurait être interprétée comme constituant une volonté d’intégrer dans le régime prévu par ledit règlement des produits qui relèvent de la
notion de « médicaments », au sens de l’article 1er, point 2, de ladite directive.

43 Il ressort, d’une part, de l’article 2, paragraphe 4, du règlement 2018/848, lu en combinaison avec le considérant 16 de ce règlement, que celui-ci s’applique « sans préjudice de la législation connexe adoptée par l’Union, en particulier, la législation dans les domaines de la sécurité de la chaîne alimentaire, de la santé et du bien‑être des animaux [...] ». D’autre part, le paragraphe 5 de cet article 2 dispose que ledit règlement s’applique sans préjudice « des autres dispositions spécifiques
du droit de l’Union relatives à la mise sur le marché des produits et, notamment, du [règlement no 1308/2013] et du [règlement no 1169/2011] ». Or, ainsi qu’il ressort de l’utilisation, dans cette disposition, du terme « notamment », l’énumération de ces dispositions spécifiques ne revêt pas de caractère exhaustif.

44 Il s’ensuit que, quand bien même la directive 2001/83 n’est pas explicitement mentionnée à l’article 2, paragraphe 5, du règlement 2018/848, cette directive relève de la législation connexe de l’Union et relève de la catégorie « des autres dispositions spécifiques du droit de l’Union relatives à la mise sur le marché des produits », en ce qu’elle régit la mise sur le marché des médicaments, y compris des médicaments traditionnels à base de plantes.

45 Dans ces conditions, compte tenu du caractère exclusif des dispositions de la directive 2001/83, un produit devant être considéré comme étant un médicament traditionnel à base de plantes, au sens de cette directive, doit satisfaire à l’ensemble des prescriptions énoncées dans ladite directive, et ne peut relever simultanément du champ d’application d’une autre réglementation, qui n’est pas spécifique aux médicaments, telle que celle issue du règlement 2018/848. Par conséquent, des tisanes
médicinales, telles que celles en cause au principal, qui relèvent de la notion de « médicaments », au sens de ladite directive, sont exclues du champ d’application du règlement 2018/848.

46 Il convient encore de relever que s’il appartient, certes, aux opérateurs économiques de décider sous quelle classification ils souhaitent commercialiser certains produits, ils doivent toutefois remplir les obligations prévues en la matière par la réglementation applicable de l’Union. Or, si un produit relève de la notion de « médicament », au sens de la directive 2001/83, il ne sera pas loisible à un opérateur économique d’en faire la commercialisation sous une autre classification. En effet, le
droit de l’Union ne garantit pas qu’un opérateur économique puisse commercialiser ses produits avec toutes les désignations qu’il considère comme étant avantageuses pour promouvoir ceux-ci (voir, par analogie, arrêt du 5 novembre 2014, Herbaria Kräuterparadies, C‑137/13, EU:C:2014:2335, point 46).

47 Eu égard aux considérations qui précédent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 1er, point 29, et l’article 16 bis de la directive 2001/83 doivent être interprétés en ce sens que des produits qualifiés de « médicaments traditionnels à base de plantes », au sens de ces dispositions, qui relèvent du champ d’application de cette directive en vertu de son article 2, ne peuvent pas être considérés simultanément comme étant des « préparations traditionnelles à base de plantes »,
au sens de l’annexe I du règlement 2018/848, relevant du champ d’application de ce règlement en vertu de son article 2, paragraphe 1.

Sur la troisième question

48 Par sa troisième question, qu’il convient d’examiner en deuxième lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 62 de la directive 2001/83 doit être interprété en ce sens que des informations relatives à la production biologique des substances actives de médicaments traditionnels à base de plantes, au sens de l’article 1er, point 29, et de l’article 16 bis de cette directive, peuvent être considérées comme étant « utiles pour le patient » et comme ne présentant pas un
« caractère promotionnel ».

49 Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 1er, point 25, de la directive 2001/83, il convient d’entendre par « étiquetage » les « mentions portées sur l’emballage extérieur ou le conditionnement primaire ».

50 L’article 62 de cette directive prévoit, par ailleurs, que l’emballage extérieur et la notice peuvent comporter des signes ou des pictogrammes explicitant certaines des informations visées à l’article 54 et à l’article 59, paragraphe 1, de celle-ci ainsi que d’autres informations compatibles avec le résumé des caractéristiques du produit, utiles pour le patient, à l’exclusion de tout élément pouvant présenter un caractère promotionnel.

51 Cet article 62 n’opérant aucun renvoi aux droits nationaux, les notions d’informations « utiles pour le patient » et d’« élément pouvant présenter un caractère promotionnel » doivent être considérées comme étant des notions autonomes du droit de l’Union, qui doivent être interprétées de manière uniforme sur le territoire de cette dernière, en tenant compte non seulement des termes de ladite disposition, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit et des objectifs poursuivis par la
réglementation dont elle fait partie (arrêts du 18 janvier 1984, Ekro, 327/82, EU:C:1984:11, point 11, et du 22 décembre 2022, EUROAPTIEKA, C‑530/20, EU:C:2022:1014, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

52 En ce qui concerne, en premier lieu, le libellé de l’article 62 de la directive 2001/83, il ressort des termes de cette disposition que l’emballage extérieur d’un médicament peut comporter d’autres informations que celles visées à l’article 54 et à l’article 59, paragraphe 1, de cette directive moyennant le respect de trois conditions. Premièrement, ces informations doivent pouvoir se concilier avec le résumé des caractéristiques du produit qui, en vertu de l’article 11 de ladite directive,
comporte un nombre d’informations précises sur ce médicament dans un ordre donné. Deuxièmement, lesdites informations doivent pouvoir être utiles pour le patient. Troisièmement, les mêmes informations ne doivent pas comporter d’élément pouvant présenter un caractère promotionnel. La notion d’« informations utiles pour le patient » de cette deuxième condition signifie que lesdites informations sont susceptibles de procurer un avantage au patient et la notion d’« élément pouvant présenter un
caractère promotionnel » de cette troisième condition désigne un élément qui participe à une forme de publicité pour ledit médicament.

53 S’agissant, en deuxième lieu, du contexte dans lequel s’inscrit l’article 62 de la directive 2001/83, il y a lieu de relever que cet article 62 figure parmi les dispositions du titre V de cette directive, intitulé « Étiquetage et notice », qui visent notamment, ainsi que l’énonce le considérant 40 de ladite directive, à assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, de façon à permettre une utilisation correcte des médicaments, sur la base d’une information complète et compréhensible et
d’écarter autant que possible les risques sanitaires liés à leur administration incorrecte.

54 Il convient, en effet, de souligner le caractère très particulier des médicaments, dont les effets thérapeutiques les distinguent substantiellement des autres marchandises. Ces effets thérapeutiques ont pour conséquence que, si des médicaments sont consommés sans nécessité ou de manière incorrecte, ils peuvent gravement nuire à la santé, sans que le patient soit en mesure d’en prendre conscience lors de leur administration (voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2022, EUROAPTIEKA, C‑530/20,
EU:C:2022:1014, point 41 et jurisprudence citée).

55 À cet égard, l’article 61 de la directive 2001/83 prévoit que toutes les informations figurant sur l’emballage et la notice d’un médicament doivent avoir été soumises aux autorités compétentes lors de la demande d’autorisation de mise sur le marché et approuvées par celles‑ci. Il s’agit donc d’informations non seulement objectives, ne présentant a priori pas de danger pour le consommateur, mais aussi approuvées, et dont la présence sur l’emballage extérieur et la notice est même obligatoire
conformément aux articles 54 et 59 de ladite directive (arrêt du 5 mai 2011, MSD Sharp & Dohme, C‑316/09, EU:C:2011:275, point 41).

56 Il s’ensuit que l’article 62 de la directive 2001/83, qui permet l’ajout de certaines informations facultatives à la condition qu’elles soient « utiles pour le patient », tout en excluant « tout élément pouvant présenter un caractère promotionnel », doit faire l’objet d’une interprétation stricte, excluant toute information n’ayant pas été soumise aux autorités compétentes lors de la demande d’autorisation de mise sur le marché ni approuvée par celles-ci. En tout état de cause, il y a lieu de
préciser que, conformément à l’article 16 bis de la directive 2001/83, les médicaments traditionnels à base de plantes relèvent non pas de cette procédure, mais de la procédure d’enregistrement simplifiée.

57 Cette conclusion est toutefois sans préjudice du choix d’un producteur de tels médicaments de recourir, le cas échéant, à la procédure d’autorisation de mise sur le marché d’un médicament, à l’issue de laquelle l’autorité compétente peut constater que des substances actives possédant des propriétés curatives ou préventives issues d’une production d’agriculture biologique ont un effet bénéfique sur les caractéristiques thérapeutiques d’un médicament et, partant, peut approuver une telle mention
sur l’emballage extérieur de ce médicament.

58 En troisième lieu, l’interprétation figurant au point 56 du présent arrêt est corroborée par l’intérêt tenant à la sauvegarde de la santé publique, qui constitue, selon le considérant 2 de la directive 2001/83, l’objectif essentiel de toute réglementation en matière de production, de distribution ou d’utilisation des médicaments (arrêt du 23 avril 2020, DHU Arzneimittel, C‑101/19 et C‑102/19, EU:C:2020:304, point 44).

59 En effet, en considérant que les informations « utiles pour le patient à l’exclusion de tout élément pouvant présenter un élément promotionnel », au sens de l’article 62 de la directive 2001/83, doivent être des informations qui servent à éclairer le patient sur l’utilisation correcte des médicaments, ces informations participent à la protection de la santé publique. Elles permettent ainsi de prémunir le patient contre une surabondance d’informations non pertinentes et une promotion commerciale
dans l’étiquetage des médicaments, tout en promouvant le bon usage de ces médicaments.

60 Or, un tel objectif risquerait d’être compromis s’il était loisible à un opérateur économique qui commercialise des produits relevant de la notion de « médicaments traditionnels à base de plantes », au sens de l’article 1er, point 29, et de l’article 16 bis de la directive 2001/83, en vue de promouvoir la vente ou la consommation de ces produits, de choisir les informations supplémentaires pouvant figurer sur l’emballage extérieur desdits produits, y compris les informations relatives au mode de
production des plantes utilisées dans leur fabrication.

61 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer, à l’instar de M. l’avocat général au point 85 de ses conclusions, que l’apposition sur l’emballage d’un médicament traditionnel à base de plantes d’éléments d’étiquetage prévus au chapitre IV du règlement 2018/848 est susceptible de revêtir un caractère promotionnel notamment lorsque ces éléments sont dépourvus de toute valeur sanitaire, qu’ils ne correspondent à aucune des indications prévues par le résumé des caractéristiques du produit, et que le
médicament peut être acheté sans ordonnance. En effet, dans un tel cas, ces informations sont adressées au patient sans l’intermédiaire d’un professionnel de santé, de sorte qu’elles peuvent directement déboucher sur une décision d’achat de la part du patient.

62 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 62 de la directive 2001/83 doit être interprété en ce sens que des informations relatives à la production biologique des substances actives de médicaments traditionnels à base de plantes, au sens de l’article 1er, point 29, et de l’article 16 bis de cette directive, ne sauraient être considérées comme étant « utiles pour le patient » et comme ne présentant pas un « caractère promotionnel ».

Sur la deuxième question

63 Compte tenu de la réponse apportée à la première question, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième question.

Sur les dépens

64 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

  1) L’article 1er, point 29, et l’article 16 bis de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004,

doivent être interprétés en ce sens que :

des produits qualifiés de « médicaments traditionnels à base de plantes », au sens de ces dispositions, qui relèvent du champ d’application de la directive 2001/83, telle que modifiée, en vertu de son article 2, ne peuvent pas être considérés simultanément comme étant des « préparations traditionnelles à base de plantes », au sens de l’annexe I du règlement (UE) 2018/848 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits
biologiques, et abrogeant le règlement (CE) no 834/2007 du Conseil, relevant du champ d’application du règlement 2018/848 en vertu de son article 2, paragraphe 1.

  2) L’article 62 de la directive 2001/83, telle que modifiée par la directive 2004/27,

doit être interprété en ce sens que :

des informations relatives à la production biologique des substances actives de médicaments traditionnels à base de plantes, au sens de l’article 1er, point 29, et de l’article 16 bis de la directive 2001/83, telle que modifiée, ne sauraient être considérées comme étant « utiles pour le patient » et comme ne présentant pas un « caractère promotionnel ».

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-618/23
Date de la décision : 26/06/2025
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par Oberlandesgericht Düsseldorf.

Renvoi préjudiciel – Médicaments à usage humain – Directive 2001/83/CE – Article 1er, point 29 – Article 16 bis – Médicaments traditionnels à base de plantes – Article 62 – Informations utiles pour le patient – Règlement (UE) 2018/848 – Article 2, paragraphe 1 – Champ d’application – Mentions figurant sur l’emballage extérieur d’une tisane médicinale à base de plantes – Utilisation de termes faisant référence à la production biologique.


Parties
Demandeurs : SALUS Haus Dr. med Otto Greither Nachf. GmbH & Co.KG
Défendeurs : Astrid Twardy GmbH.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Passer

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2025:485

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