ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
5 octobre 2016 ( *1 )
«Marque de l’Union européenne — Procédure de nullité — Marque de l’Union européenne verbale T.G.R. ENERGY DRINK — Mauvaise foi — Article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009»
Dans l’affaire T‑456/15,
Foodcare sp. z o.o., établie à Zabierzów (Pologne), représentée par Me A. Matusik, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
Dariusz Michalczewski, demeurant à Gdańsk (Pologne), représenté par Mes B. Matusiewicz‑Kulig, M. Czerwińska et M. Marek, avocats,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 12 mai 2015 (affaire R 265/2014‑2), relative à une procédure de nullité entre M. Michalczewski et Foodcare,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, A. M. Collins et V. Valančius (rapporteur), juges,
greffier : Mme J. Weychert, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 août 2015,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 29 octobre 2015,
vu le mémoire en réponse de l’intervenant déposé au greffe du Tribunal le 26 octobre 2015,
à la suite de l’audience du 7 juillet 2016,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 31 juillet 2003, l’intervenant, M. Dariusz Michalczewski, un ancien boxeur professionnel, et la requérante, Foodcare sp. z o.o., ont conclu un accord en vertu duquel cette dernière était autorisée à utiliser l’image, le surnom (à savoir « Tiger ») ainsi que les marques verbales et figuratives appartenant à l’intervenant pour promouvoir la commercialisation de boissons énergétiques. Sur le conditionnement des boissons énergétiques commercialisées par la requérante figurait, notamment, le signe
Tiger Energy Drink. Le 1er juillet 2005, un second accord du même type a été conclu entre l’intervenant et la requérante.
2 Le 14 février 2007, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1)].
3 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal T.G.R. ENERGY DRINK.
4 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Essences pour préparer des boissons, limonades, limonades en poudre, non alcooliques, boissons légèrement gazeuses, poudres pour boissons légèrement gazeuses, nectars de fruits,
pastilles destinées à la préparation de boissons légèrement gazeuses, poudres destinées à la préparation de boissons légèrement gazeuses, préparations destinées à la fabrication d’eau gazeuse, produits pour la fabrication des eaux gazeuses, produits en poudre pour la réalisation de boissons énergétiques, renforcées et enrichies en micro-éléments, produits destinés à la production d’eau minérale, jus de fruits, jus de légumes, sorbets (boissons), sirops pour faire des boissons, eaux gazeuses, eaux
de table, eau minérale, boissons rafraîchissantes et énergisantes ».
5 La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 56/2007, du 1er octobre 2007.
6 Le 6 mars 2008, le signe verbal a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 5689237.
7 Le 17 novembre 2011, l’intervenant a présenté une demande en nullité de la marque verbale de la requérante, pour l’ensemble des produits pour lesquels elle avait été enregistrée.
8 Les motifs de nullité invoqués à l’appui de ladite demande étaient fondés sur la cause de nullité absolue visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et sur les causes de nullité relative visées à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement et l’article 8, paragraphe 3, du même règlement.
9 La demande en nullité était fondée, quant aux causes de nullité relative, sur les marques antérieures suivantes :
— la marque de l’Union européenne verbale antérieure Dariusz Tiger Michalczewski, enregistrée le 3 avril 2001 sous le numéro 1219732, désignant notamment des produits relevant de la classe 32, et correspondant à la description suivante : « Eaux minérales, boissons isotoniques » ;
— les marques polonaises figuratives suivantes, enregistrées respectivement le 11 juin 2003 et le 27 avril 2007 sous les références R 145637 et R 191973, désignant notamment, pour la seconde uniquement, des produits relevant de la classe 32 :
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10 La demande en nullité était fondée, en ce qui concerne le motif énoncé à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur la mauvaise foi de la requérante lors du dépôt de la demande de marque.
11 Par décision du 25 novembre 2013, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité, estimant qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les marques antérieures et la marque contestée, que les différences entre les marques antérieures et la marque contestée excluaient la possibilité d’une opposition fondée sur un prétendu dépôt non autorisé, par un agent ou un représentant de l’intervenant, et que la mauvaise foi de la requérante au moment du dépôt n’avait pas été prouvée.
12 Le 20 janvier 2014, l’intervenant a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.
13 Par décision du 12 mai 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et accueilli la demande en nullité. En particulier, elle a considéré que la division d’annulation n’avait pas procédé à une appréciation globale tenant compte de tous les facteurs pertinents pour apprécier l’éventuelle mauvaise foi de la requérante au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée et a estimé, à la suite
d’une telle appréciation, qu’il était établi que la requérante était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée.
Conclusions des parties
14 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision attaquée ;
— condamner l’EUIPO aux dépens.
15 L’EUIPO et l’intervenant concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours ;
— condamner la requérante aux dépens.
En droit
16 Au soutien de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.
17 La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours n’a pas tenu compte de tous les facteurs pertinents pour déterminer son éventuelle mauvaise foi au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée. Selon la requérante, pour apprécier la mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, il y avait lieu de prendre en considération des circonstances tirées, premièrement, de la situation juridique antérieure de l’intervenant,
deuxièmement, de la nature de la relation contractuelle entre elle et l’intervenant et, troisièmement, de l’utilisation faite par elle de la marque contestée.
18 Tout d’abord, s’agissant de la situation juridique antérieure de l’intervenant, la requérante prétend que celui-ci n’était pas titulaire, en Pologne, de droits sur des marques contenant l’élément verbal « tiger » et désignant les produits relevant de la classe 32 au moment où, en 2003, ils sont entrés dans une relation contractuelle. Dans ces conditions, la relation contractuelle entre la requérante et l’intervenant ne saurait s’analyser en un contrat de licence de marque, dès lors que
l’intervenant n’était pas titulaire de droits antérieurs sur des marques contenant l’élément verbal « tiger ». La requérante relève, par ailleurs, que l’intervenant n’a jamais fait usage, avant le début de cette relation contractuelle, d’une marque contenant l’élément verbal « tiger » pour commercialiser des boissons énergétiques.
19 Ensuite, s’agissant de la nature de la relation contractuelle en cause, la requérante fait valoir que celle-ci s’analyse en un accord de promotion par lequel il a été convenu avec l’intervenant que le nom, le surnom et l’image de ce dernier pouvaient être utilisés par elle, moyennant rémunération, pour assurer la publicité des produits, et notamment des boissons énergétiques, commercialisés, de sa seule initiative, par elle. La requérante prétend que, dès lors, il lui revenait de développer de
nouveaux produits et de nouvelles marques, de sorte que la demande d’enregistrement de la marque contestée était légitime.
20 Enfin, la requérante allègue que, dans une campagne publicitaire de 2011, dont il est fait état dans la décision attaquée, ce n’est pas la marque contestée qui est utilisée, mais seulement l’élément verbal « tiger », accompagné d’éléments figuratifs représentant des griffures.
21 L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.
22 Il convient de rappeler, à titre liminaire, que l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 prévoit que la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée.
23 À cet égard, il incombe au demandeur en nullité qui entend se fonder sur ce motif d’établir les circonstances qui permettent de conclure que le titulaire d’une marque de l’Union européenne était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de cette dernière [voir arrêt du 21 mai 2015, Urb Rulmenti Suceava/OHMI – Adiguzel (URB), T‑635/14, non publié, EU:T:2015:297, point 30 et jurisprudence citée].
24 La notion de « mauvaise foi » visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’est, ainsi que l’a énoncé l’avocat général Sharpston au point 36 de ses conclusions dans l’affaire Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (C‑529/07, EU:C:2009:148), ni définie, ni délimitée, ni même décrite d’une quelconque manière dans la législation.
25 Il découle de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 que le moment pertinent aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur est celui du dépôt, par l’intéressé, de la demande d’enregistrement (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 35).
26 En outre, dans son arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (C‑529/07, EU:C:2009:361, point 53), la Cour a indiqué que, aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur, au sens de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, devaient être pris en considération tous les facteurs pertinents propres au cas d’espèce, et notamment :
— le fait que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire, prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé ;
— l’intention du demandeur d’empêcher ce tiers de continuer à utiliser un tel signe ;
— le degré de protection dont jouissent le signe du tiers et le signe dont l’enregistrement est demandé.
27 Cela étant, comme l’a souligné à bon droit la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée, il ressort de la formulation retenue dans l’arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (C‑529/07, EU:C:2009:361), que les facteurs énumérés au point 26 ci-dessus ne sont que des illustrations parmi un ensemble d’éléments susceptibles d’être pris en compte afin de se prononcer sur l’éventuelle mauvaise foi d’un demandeur de marque au moment du dépôt de la demande d’enregistrement
[arrêt du 14 février 2012, Peeters Landbouwmachines/OHMI – Fors MW (BIGAB), T‑33/11, EU:T:2012:77, point 20].
28 Il y a donc lieu de considérer que, dans le cadre de l’analyse globale opérée au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, il peut également être tenu compte de l’origine du signe contesté et de son usage depuis sa création, de la logique commerciale dans laquelle s’est inscrit le dépôt de la demande d’enregistrement du signe en tant que marque de l’Union européenne ainsi que de la chronologie des événements ayant caractérisé la survenance dudit dépôt [voir, en ce
sens, arrêts du 14 février 2012, BIGAB, T‑33/11, EU:T:2012:77, point 21, et du 11 juillet 2013, SA.PAR./OHMI – Salini Costruttori (GRUPPO SALINI), T‑321/10, EU:T:2013:372, point 30].
29 C’est, notamment, à la lumière des considérations qui précèdent, et pour autant qu’elles s’appliquent à la présente affaire, qu’il y a lieu de contrôler la légalité de la décision attaquée, en ce que la chambre de recours a conclu à l’existence de la mauvaise foi de la requérante au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, soit le 14 février 2007.
30 Premièrement, il est constant, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 34 de la décision attaquée, lu en combinaison avec les points 27 à 29 de ladite décision, que, le 31 juillet 2003, l’intervenant et la requérante ont conclu un accord en vertu duquel cette dernière était autorisée à utiliser l’image, le surnom ainsi que les marques verbales et figuratives appartenant à l’intervenant pour promouvoir la commercialisation de boissons énergétiques sur le conditionnement desquelles
figurait, notamment, le signe Tiger. Lors de l’audience, la requérante a, en réponse à une question du Tribunal, précisé que cet accord avait initialement été conclu pour une durée de cinquante ans. La motivation de l’accord conclu entre la requérante et l’intervenant, ainsi que les parties s’accordent à le reconnaître, réside dans l’image véhiculée par l’intervenant, un ancien boxeur professionnel, connu sous le pseudonyme de « Tiger ». Le 1er juillet 2005, un second accord du même type a été
conclu entre l’intervenant et la requérante. Dès lors, il est permis de considérer que lesdits contrats manifestent la volonté de la requérante de développer son activité commerciale en prenant notamment appui sur l’image véhiculée par l’intervenant et sur sa notoriété.
31 Par ailleurs, il ressort des éléments du dossier que ces accords prévoyaient l’obligation, pour la requérante, de payer à l’intervenant une rémunération pour l’utilisation de l’image, du nom, du surnom ainsi que des marques verbales et figuratives de ce dernier. Les stipulations des accords en cause ne laissent subsister aucun doute quant à la connaissance qu’avait la requérante, au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, de l’existence des marques antérieures dont
l’intervenant était le titulaire.
32 Il ressort également des éléments du dossier que tout usage effectif, par la requérante, des droits appartenant à l’intervenant et des marques dont il était le titulaire supposait le consentement écrit préalable de l’intervenant.
33 Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en considération l’existence de relations contractuelles directes entre la requérante et l’intervenant, antérieures au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, comme l’un des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi de la requérante [voir, en ce sens, arrêt du 1er février 2012, Carrols/OHMI – Gambettola (Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL), T‑291/09,
EU:T:2012:39, points 85 à 87].
34 Deuxièmement, il est également constant, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 36 de la décision attaquée, lu en combinaison avec le point 12 de ladite décision, que sur le conditionnement des boissons énergétiques commercialisées par la requérante figuraient, notamment, le signe Tiger, mais aussi, à plusieurs reprises, l’image de l’intervenant. À cet égard, il y a lieu d’observer que les images suivantes ont été utilisées, respectivement en 2004, en 2006 et en 2007, sur des
conditionnements de boissons énergétiques commercialisées par la requérante :
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35 Dès lors, il y a lieu de constater que la présentation du conditionnement des produits commercialisés par la requérante corrobore la conclusion, tirée à partir du contenu desdits accords, selon laquelle cette dernière a souhaité développer son activité commerciale en y associant l’image véhiculée par l’intervenant et la notoriété de celui-ci. Ainsi, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en considération cette circonstance, au point 35 de la décision attaquée, comme l’un
des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi de la requérante.
36 Troisièmement, même s’il n’y a pas lieu, dans le cadre d’une demande en nullité fondée sur le motif énoncé à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, de se livrer à l’examen détaillé des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles existant entre la marque contestée et les marques antérieures dont l’intervenant est titulaire, il convient de constater, dans les circonstances particulières de l’espèce, que la marque contestée ressemble, prima facie, au signe Tiger
Energy Drink utilisé par la requérante, en raison des relations contractuelles qu’elle entretenait avec l’intervenant, pour la commercialisation de ses produits.
37 À cet égard, il convient en effet de rappeler que, de façon générale, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30]. En l’espèce, il ne saurait être sérieusement contesté que le signe Tiger Energy Drink et la marque contestée T.G.R. ENERGY DRINK
présentent une égalité partielle, au moins sur les aspects visuel et phonétique, quel que soit le public pertinent. La seule différence existant, en particulier, sur le plan visuel entre la marque contestée et le signe Tiger Energy Drink est que ce dernier comporte deux voyelles de plus, ce qui ne saurait suffire pour exclure que ces signes produisent la même impression d’ensemble.
38 Cette forte ressemblance entre le signe Tiger Energy Drink et la marque contestée ne saurait être le fruit du hasard. Il est dès lors permis de considérer que cette forte ressemblance témoigne, contrairement à ce que soutient la requérante, de la volonté de cette dernière de créer, dans l’esprit du consommateur, sinon une confusion, au moins une association entre la marque contestée et le signe Tiger Energy Drink. Au surplus, il y a lieu de constater que les images suivantes corroborent cette
conclusion :
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39 Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé, au point 38 de la décision attaquée, que la marque contestée T.G.R. ENERGY DRINK pouvait être considérée comme une version modifiée du signe Tiger. Il en est de même, a fortiori, s’agissant du signe Tiger Energy Drink.
40 D’ailleurs, il convient de relever que, si, comme le prétend la requérante, son intention n’était pas de créer, dans l’esprit du consommateur, une association entre la marque contestée et le signe Tiger Energy Drink, lequel jouissait, ainsi que cela ressort des éléments du dossier, d’un degré de notoriété élevé, il lui aurait été loisible, ainsi qu’elle l’a ensuite fait à partir de l’année 2011 en utilisant le signe Black Energy Drink, de commercialiser ses produits en apposant sur leur
conditionnement un signe totalement différent du signe Tiger Energy Drink.
41 Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en considération la volonté de la requérante de créer, sinon une confusion, au moins une association entre le signe Tiger Energy Drink, qui jouissait d’un degré de notoriété important, et la marque contestée comme l’un des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi de la requérante (voir, en ce sens, arrêts du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361,
point 40, et du 1er février 2012, Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL, T‑291/09, EU:T:2012:39, point 90).
42 Quatrièmement, il ressort des stipulations contractuelles contenues dans les accords conclus entre l’intervenant et la requérante que cette dernière était tenue de payer à l’intervenant une rémunération pour l’utilisation de l’image, du nom, du surnom ainsi que des marques verbales et figuratives appartenant à celui-ci. Il est cependant constant que, en utilisant, pour la commercialisation de ses produits, non plus le signe Tiger mais, le cas échéant, la marque contestée, la requérante se trouve,
de fait, dispensée de tout paiement à l’égard de l’intervenant.
43 Il est ainsi permis de considérer que la requérante, en déposant la demande d’enregistrement de la marque contestée, a eu l’intention de continuer à bénéficier du degré de notoriété dont jouissait le signe Tiger Energy Drink, tout en contournant les obligations contractuelles qui découlaient des accords conclus avec l’intervenant.
44 Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en considération, par référence aux circonstances objectives du cas d’espèce, l’intention de la requérante, laquelle s’analyse en la volonté de contourner ses obligations contractuelles, comme l’un des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de l’existence de sa mauvaise foi (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, points 41 et 42).
45 Il découle de tout ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours, à la suite d’une appréciation globale tenant compte de tous les facteurs pertinents, a conclu que la requérante avait agi de mauvaise foi au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, au sens de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.
46 Cette conclusion n’est pas invalidée par les différentes allégations de la requérante.
47 En premier lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante visant à reprocher à la chambre de recours de ne pas avoir pris en considération la circonstance que, en 2003, lorsqu’ils sont entrés dans une relation contractuelle, l’intervenant n’était pas titulaire de droits antérieurs sur des marques contenant l’élément verbal « tiger » désignant des boissons énergétiques en Pologne et n’avait jamais commercialisé de telles boissons en utilisant cet élément verbal, force est de constater que
celle-ci doit être écartée.
48 En effet, d’une part, il convient de rappeler que l’existence de la mauvaise foi de la requérante s’apprécie au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, soit le 14 février 2007 (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 35). Dès lors, la question de savoir quelles étaient les marques dont l’intervenant était titulaire au jour de la signature du premier accord de promotion avec la requérante, le
31 juillet 2003, est, en l’espèce, dénuée de pertinence.
49 D’autre part, il est constant, ainsi que cela a été rappelé au point 9 ci-dessus, que l’intervenant est titulaire, notamment, de la marque de l’Union européenne verbale antérieure Dariusz Tiger Michalczewski, enregistrée le 3 avril 2001, désignant notamment les produits relevant de la classe 32. Il s’ensuit que, à la suite de l’adhésion de la Pologne à l’Union européenne le 1er mai 2004, la protection de la marque de l’Union européenne de l’intervenant, contenant l’élément verbal « tiger » et
désignant des boissons énergétiques, a été étendue à cet État membre [voir, en ce sens, arrêt du 22 avril 2015, Rezon/OHMI – mobile.international (mobile.de proMotor), T‑337/14, non publié, EU:T:2015:220, point 32].
50 Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en considération comme l’un des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi de la requérante la circonstance selon laquelle, au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, l’intervenant était titulaire de marques, et notamment de la marque de l’Union européenne verbale antérieure Dariusz Tiger Michalczewski, contenant l’élément verbal « tiger » et désignant les
produits relevant de la classe 32.
51 Au demeurant, à supposer que, par son argumentation, la requérante entende faire valoir, en substance, que la marque de l’Union européenne verbale Dariusz Tiger Michalczewski n’a pas fait l’objet, par l’intervenant, d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, de sorte qu’elle encourrait la déchéance prévue à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 188 du règlement de
procédure du Tribunal, les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours.
52 Or, en l’espèce, le litige porté devant la chambre de recours concernait une demande en nullité de la marque contestée, de sorte que la chambre de recours n’était pas saisie de la question de l’usage sérieux de la marque de l’intervenant. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la requérante ne peut valablement demander au Tribunal d’examiner une question qui n’a pas été examinée par la chambre de recours dans cette décision.
53 En deuxième lieu, s’agissant des allégations de la requérante relatives à la nature de la relation contractuelle entre elle et l’intervenant, force est de constater que, par celles-ci, la requérante ne développe aucun grief à l’encontre de la décision attaquée, mais se borne à rappeler les différentes obligations découlant des accords conclus et portant sur l’utilisation de l’image, du nom, du surnom ainsi que des marques verbales et figuratives appartenant à l’intervenant pour promouvoir la
commercialisation de boissons énergétiques. Par ces allégations, la requérante entend cependant faire valoir, en substance, que les accords en cause ne sauraient s’analyser en l’octroi, par l’intervenant, d’une ou de plusieurs licences portant sur les marques dont il est le titulaire.
54 Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’exactitude de ces allégations et sur la nature précise des accords conclus entre la requérante et l’intervenant, il suffit, pour écarter ces allégations, de constater que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas tenu compte de la nature de ces accords comme facteur pertinent pour caractériser, dans le cadre de l’appréciation globale à laquelle elle s’est livrée, la mauvaise foi de la requérante.
55 En tout état de cause, quelle que soit la nature exacte des accords conclus entre la requérante et l’intervenant, leur existence suffit à caractériser la circonstance selon laquelle, antérieurement à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, les parties étaient liées par des relations contractuelles directes. Ces relations contractuelles directes sont, en l’espèce et ainsi que cela a déjà été établi, l’un des facteurs pertinents aux fins de l’appréciation de
l’existence de la mauvaise foi de la requérante (voir, en ce sens, arrêt du 1er février 2012, Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL, T‑291/09, EU:T:2012:39, points 85 à 87).
56 En troisième lieu, s’agissant des allégations de la requérante relatives à l’utilisation ou non de la marque contestée dans une campagne publicitaire de 2011, force est de constater que celles-ci doivent également être écartées.
57 En effet, il a déjà été rappelé que l’existence de la mauvaise foi de la requérante s’apprécie au moment du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, soit le 14 février 2007 (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 35). Dès lors, la question de savoir si la marque contestée est utilisée ou non dans le cadre d’une campagne publicitaire de 2011 est, en l’espèce, dénuée de pertinence.
58 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le moyen unique doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
59 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
60 En l’espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenant.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Foodcare sp. z o.o. supportera, outre ses propres dépens, les dépens exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par M. Dariusz Michalczewski.
Frimodt Nielsen
Collins
Valančius
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 octobre 2016.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.