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02/10/2024 | CJUE | N°T-263/22

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME) e.a. contre Commission européenne., 02/10/2024, T-263/22


 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

2 octobre 2024 ( *1 )

« Dumping – Importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine – Institution d’un droit antidumping définitif – Recours en annulation – Recevabilité – Qualité pour agir – Association représentative d’exportateurs – Article 2, paragraphe 6 bis, du règlement (UE) 2016/1036 – Calcul de la valeur normale – Choix du pays représentatif approprié – Article 2, paragraphe 10, du règlement 2016/1036 – Ajustements – Défaut de co

opération – Article 18 du règlement 2016/1036 –
Calcul de la marge de dumping pour les producteurs‑exportateurs ayant c...

 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

2 octobre 2024 ( *1 )

« Dumping – Importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine – Institution d’un droit antidumping définitif – Recours en annulation – Recevabilité – Qualité pour agir – Association représentative d’exportateurs – Article 2, paragraphe 6 bis, du règlement (UE) 2016/1036 – Calcul de la valeur normale – Choix du pays représentatif approprié – Article 2, paragraphe 10, du règlement 2016/1036 – Ajustements – Défaut de coopération – Article 18 du règlement 2016/1036 –
Calcul de la marge de dumping pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon – Définition du produit concerné – Préjudice pour l’industrie de l’Union – Analyse du préjudice par segment – Lien de causalité – Calcul de la sous‑cotation des prix et de la marge de préjudice – Indicateurs macroéconomiques – Droits procéduraux – Traitement confidentiel »

Dans l’affaire T‑263/22,

China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME), établie à Beijing (Chine), et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe ( 1 ), représentées par Mes R. Antonini, E. Monard et B. Maniatis, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. G. Luengo, L. Di Masi et J. Zieliński, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

European Industrial Fasteners Institute AISBL (EIFI), représenté par Mes B. O’Connor et M. Hommé, avocats,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. F. Schalin, président, Mme G. Steinfatt et M. D. Kukovec (rapporteur), juges,

greffier : Mme I. Kurme, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 7 février 2024,

rend le présent

Arrêt

1 Par leur recours, les requérantes, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME) et les autres personnes morales dont les noms figurent en annexe, demandent l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2022/191 de la Commission, du 16 février 2022, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine (JO 2022, L 36, p. 1, ci‑après le « règlement
attaqué »), en ce qui les concerne.

I. Antécédents du litige

2 À la suite d’une plainte déposée le 6 novembre 2020 par l’intervenante, European Industrial Fasteners Institute, au nom de l’industrie de l’Union européenne, la Commission européenne a ouvert une enquête antidumping concernant les importations d’éléments de fixation originaires de Chine en vertu de l’article 5, paragraphe 1, du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays
non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base »).

3 Le 21 décembre 2020, la Commission a publié l’avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de la République populaire de Chine (JO 2020, C 442, p. 6), en vertu de l’article 5 du règlement de base.

4 L’enquête relative au dumping et au préjudice a porté sur la période comprise entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020 (ci-après la « période d’enquête »). L’examen des tendances utiles pour l’évaluation du préjudice et du lien de causalité a porté sur la période comprise entre le 1er janvier 2017 et la fin de la période d’enquête (ci‑après la « période considérée »).

5 La CCCME a demandé à être considérée comme une partie intéressée, faisant valoir qu’elle représentait l’industrie chinoise des éléments de fixation. L’intervenante a contesté cette demande. La Commission a considéré que la CCCME était habilitée par un certain nombre de producteurs d’éléments de fixation chinois à agir en leur nom et qu’elle ne pouvait être une partie intéressée que dans la mesure où elle était habilitée par ces producteurs d’éléments de fixation spécifiques à les représenter.

6 La Commission a indiqué, dans l’avis d’ouverture, qu’elle avait provisoirement sélectionné un échantillon de producteurs de l’Union, sur la base des volumes de production et de vente dans l’Union, en tenant également compte de leur situation géographique et en veillant à la représentation des petites et moyennes entreprises (PME). Cet échantillon comptait six producteurs de l’Union situés dans quatre États membres différents. L’un des producteurs de l’Union provisoirement retenus dans
l’échantillon, une PME, a informé la Commission qu’il n’était pas en mesure de répondre à l’intégralité du questionnaire. La Commission a donc décidé de réviser l’échantillon de producteurs de l’Union en remplaçant cette société par la plus grande PME suivante du même État membre. Au considérant 34 du règlement attaqué, la Commission a précisé que la méthode de sélection de l’échantillon avait été dûment communiquée aux parties intéressées et qu’aucune observation n’avait été reçue sur la méthode
en tant que telle.

7 Au cours de l’enquête, l’un des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon a informé la Commission qu’il n’était pas en mesure de répondre à l’intégralité de son questionnaire. Un autre producteur de l’Union retenu dans l’échantillon n’a pas été en mesure de fournir une assurance suffisante quant aux données fournies aux fins de la vérification. Ces producteurs ont, dès lors, été remplacés par les deux producteurs suivants dont les volumes et les ventes étaient les plus importants, tout en
tenant compte de la distribution géographique et de l’étendue de la gamme de produits.

8 Pour l’échantillonnage des producteurs exportateurs, la Commission a sélectionné les trois producteurs‑exportateurs ou groupes de producteurs‑exportateurs affichant les plus grands volumes d’exportation sur lesquels l’enquête pouvait raisonnablement porter compte tenu du temps disponible, conformément à l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base, à savoir Jiangsu Yongyi Fastener Co., Ltd (ci‑après « Jiangsu »), Ningbo Jinding Fastening Piece Co., Ltd (ci‑après « Ningbo Jinding ») et Wenzhou
Junhao Industry Co., Ltd (ci‑après « Wenzhou »). La Commission a précisé que les types de produits spécifiques fabriqués par les sociétés sélectionnées ne constituaient pas un critère, puisque tous les éléments de fixation avaient été considérés comme un seul et même produit aux fins de l’enquête.

9 Le produit concerné consiste en certains éléments de fixation en fer ou en acier, autre qu’en acier inoxydable, à savoir, essentiellement, des vis, des boulons ou des rondelles originaires de Chine.

10 Les éléments de fixation peuvent être standard (ci‑après les « éléments de fixation standard ») ou être fabriqués sur la base de dessins du client (ci‑après les « éléments de fixation non standard »). Dans le cadre des mêmes normes nationales ou internationales, les éléments de fixation doivent répondre aux mêmes caractéristiques physiques et techniques essentielles, parmi lesquelles figurent la résistance, les tolérances, la finition et le revêtement. Sur la base de leurs caractéristiques
physiques et techniques essentielles et de leurs utilisations finales, tous les éléments de fixation ont été considérés comme constituant un seul et même produit aux fins de la procédure aboutissant au règlement attaqué.

11 La Commission a par ailleurs considéré que le procédé de production des éléments de fixation n’était pas pertinent en soi pour la définition du produit faisant l’objet de l’enquête. Ainsi, tous les types de produits concernés, qu’ils soient fabriqués par forgeage à chaud ou à froid, ont fait partie de l’enquête.

12 La Commission a estimé que les éléments de preuve lors de l’ouverture de l’enquête avaient mis en évidence l’existence de distorsions significatives en Chine au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous b), du règlement de base.

13 Après avoir entendu les parties à cet égard, la Commission a choisi la Thaïlande comme pays représentatif approprié, dont les prix et les coûts non faussés serviraient de base pour déterminer la valeur normale des produits, en vertu de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base.

14 Par le règlement attaqué, la Commission a institué un droit antidumping définitif de l’ordre de 22,1 à 86,5 % sur les importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine.

II. Conclusions des parties

15 Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler le règlement attaqué, pour autant qu’il s’applique à elles ;

– condamner la Commission et l’intervenante aux dépens.

16 La Commission, soutenue par l’intervenante, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours comme non fondé ;

– condamner les requérantes aux dépens.

III. En droit

A. Sur la recevabilité

17 L’intervenante fait valoir que la CCCME n’est pas une association représentative au sens de l’article 6, paragraphe 7, du règlement de base et que la Commission n’aurait pas dû la considérer comme telle pendant la procédure administrative précédant l’adoption du règlement attaqué, puisque la CCCME ne représenterait pas les intérêts de ses membres, mais ceux de l’État chinois. Ainsi, le mandat qu’aurait reçu la CCCME des producteurs‑exportateurs individuels n’altérerait pas le fait qu’elle aurait
pour objectif d’empêcher la concurrence entre ses membres lorsqu’ils exportent leurs produits vers l’Union. Par conséquent, la qualité pour agir au sens de l’article 263 TFUE ne pourrait que se fonder sur l’erreur de la Commission commise pendant l’enquête administrative et non sur des droits établis dans le règlement de base. Dès lors, l’intervenante invite le Tribunal à examiner cette question d’office.

18 Les requérantes contestent cette argumentation.

19 D’emblée, il convient de rappeler que, selon l’article 142, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, l’intervention ne peut avoir d’autre objet que le soutien, en tout ou en partie, des conclusions de l’une des parties principales. En l’espèce, les arguments de l’intervenante portant sur la recevabilité du recours ne trouvent pas d’appui dans les conclusions de la Commission.

20 Cependant, selon une jurisprudence bien établie, le juge de l’Union peut se prononcer, au besoin d’office, sur le moyen d’ordre public tiré de la méconnaissance des conditions de recevabilité posées à l’article 263 TFUE [voir arrêt du 22 juin 2021, Venezuela/Conseil (Affectation d’un État tiers), C‑872/19 P, EU:C:2021:507, point 22 et jurisprudence citée].

21 En vertu d’une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire d’une telle décision (voir
arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 50 et jurisprudence citée).

22 Parmi les personnes susceptibles d’être individualisées par un acte de l’Union au même titre que les destinataires d’une décision figurent celles qui ont participé au processus d’adoption de cet acte. Toutefois, le fait pour une personne d’intervenir dans le processus d’adoption d’un tel acte n’est de nature à l’individualiser par rapport à l’acte en cause que dans le cas où des garanties de procédure ont été prévues au profit de cette personne par la réglementation de l’Union. En effet, la
portée exacte du droit de recours d’un particulier contre un acte de l’Union dépend de la position juridique définie en sa faveur par le droit de l’Union visant à protéger les intérêts légitimes ainsi reconnus (voir arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 51 et jurisprudence citée).

23 En l’espèce, le point introductif de la requête précise que le présent recours est introduit, premièrement, par la CCCME, d’une part, pour le compte de ses membres visés à l’annexe A.2 (ci‑après les « membres concernés de la CCCME ») et, d’autre part, pour son propre compte en ce qui concerne certains griefs, deuxièmement, par les trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon de la Commission et, troisièmement, par cinq autres producteurs‑exportateurs chinois ayant coopéré non
retenus dans l’échantillon dont les noms figurent dans l’annexe du règlement attaqué. Ni les noms des trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon, ni les noms des cinq autres producteurs‑exportateurs chinois ayant coopéré non retenus dans l’échantillon ne figurent à l’annexe A.2 fournie par les requérantes en tant que membres de la CCCME et ils n’ont pas fourni de documents attestant leur affiliation à la CCCME.

24 Tout d’abord, il importe de constater que, à la suite d’une question du Tribunal portant sur les conséquences à tirer de l’arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission (C‑478/21 P, EU:C:2023:685), rendu postérieurement à la phase écrite de la procédure, la CCCME a admis que le recours était irrecevable en ce qu’il avait été introduit en son propre nom. Interrogée à cet égard lors de l’audience, la CCCME a soutenu
que l’ensemble des griefs du recours était soulevé tant pour son propre compte que pour l’intérêt de ses membres. Par conséquent, aucun grief ne serait soulevé par la CCCME pour son propre compte de manière isolée.

25 Ensuite, s’agissant de la représentation des membres de la CCCME en justice par cette dernière, il ressort du point 23 ci‑dessus que la CCCME entend représenter, dans le cadre du présent recours, les trente‑et‑une sociétés dont la liste est fournie à l’annexe A.2 de la requête et pour lesquelles elle a produit des documents attestant qu’elles lui étaient affiliées. Il ressort de cette annexe que ces trente‑et‑une sociétés sont des producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans
l’échantillon.

26 Pour qu’une association puisse valablement introduire un recours devant les juridictions de l’Union au nom de ses membres, il importe, premièrement, que les personnes physiques ou morales au nom desquelles elle agit fassent partie de ses membres, deuxièmement, qu’elle ait le pouvoir d’agir en justice en leur nom, troisièmement, que ce recours soit introduit en leur nom, quatrièmement, qu’au moins un des membres au nom desquels elle agit aurait pu lui-même introduire un recours recevable et,
cinquièmement, que les membres au nom desquels elle agit n’aient pas introduit de recours en parallèle devant les juridictions de l’Union (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 83).

27 En l’espèce, premièrement, la CCCME a apporté la preuve, non contestée, de l’appartenance des membres concernés.

28 Deuxièmement, les statuts produits par la CCCME en annexe présentent l’objet social qu’elle poursuit en des termes qui permettent de couvrir une action en justice destinée à défendre les intérêts de ses membres contre des mesures de défense commerciale (arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 88).

29 Troisièmement, la requête précise que le recours est introduit également au nom des membres concernés.

30 Quatrièmement, les membres concernés auraient pu introduire un recours contre le règlement attaqué. À cet égard, l’article 263, quatrième alinéa, TFUE prévoit que toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de cette même disposition, un recours contre les actes dont elle est le destinataire, contre ceux qui la concernent directement et individuellement et contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne
comportent pas de mesures d’exécution.

31 En l’espèce, la condition tenant à l’affectation directe est réunie dès lors que le règlement attaqué produit directement des effets sur la situation juridique des membres de la CCCME et que les autorités douanières des États membres, sans qu’elles bénéficient d’une quelconque marge d’appréciation, sont obligées de percevoir les droits imposés par le règlement attaqué (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products
e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 118 et jurisprudence citée).

32 Quant à l’affectation individuelle, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les règlements instituant des droits antidumping ont, par leur nature et leur portée, un caractère normatif en ce qu’ils s’appliquent à la généralité des opérateurs économiques intéressés (voir arrêt du 28 février 2019, Conseil/Marquis Energy, C‑466/16 P, EU:C:2019:156, point 47 et jurisprudence citée). Toutefois, ce caractère normatif ne fait pas obstacle à ce que lesdits règlements puissent viser
individuellement ceux des producteurs et exportateurs du produit concerné auxquels sont imputées les pratiques de dumping sur la base de données relatives à leur activité commerciale, comme les entreprises productrices et exportatrices qui peuvent démontrer qu’elles ont été identifiées dans les actes de la Commission ou concernées par les enquêtes préparatoires (voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association, C‑465/16 P, EU:C:2019:155, point 79).

33 À cet égard, il convient de constater que les membres concernés de la CCCME sont des producteurs‑exportateurs du produit concerné qui ont coopéré avec la Commission pendant son enquête et dont les noms figurent à l’annexe à laquelle renvoie l’article 1er, paragraphe 2, du dispositif du règlement attaqué. En tant qu’autres sociétés ayant coopéré identifiées dans cette annexe, les membres concernés de la CCCME au nom desquels elle a introduit le présent recours se voient appliquer un droit
antidumping d’un montant spécifique, différent du montant applicable à toutes les autres sociétés non identifiées auxquelles le règlement attaqué s’applique. Dès lors, lesdits membres sont directement et individuellement concernés.

34 Cinquièmement, aucun des membres concernés de la CCCME n’a introduit de recours parallèle à celui examiné en l’espèce.

35 Partant, les conditions de recevabilité telles qu’énoncées au point 26 ci‑dessus sont remplies.

36 Cependant, il ressort de la jurisprudence qu’un recours en annulation dirigé contre un règlement imposant des droits antidumping, s’il est accueilli, entraîne l’annulation de ce règlement en tant qu’il impose un droit antidumping à la partie requérante, ladite annulation n’affectant pas la validité des autres éléments de ce règlement, et notamment du droit antidumping applicable aux autres opérateurs. Il s’ensuit que, en ce qui concerne la représentation des membres de la CCCME par cette dernière
devant le Tribunal dans le cadre du présent recours, seuls les membres concernés de la CCCME au nom desquels le présent recours a été introduit pourraient bénéficier d’une annulation si le recours introduit en leur nom par la CCCME était accueilli par le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, points 110 et 112). Ces membres sont Haining Hisener Trade Co., Ltd,
Changshu City Standard Parts Factory Co., Ltd., Ningbo Nanjubaoge Fastener Manufacturing Co. Ltd, Jinan Star Fastener Co., Haiyan Xinglong Fastener Co., Ltd, Zhejiang Excellent Industries Co. Ltd, Zhejiang Channov Auto Parts Co., Ltd, Zhejiang New Shengda Fastener Co., Ltd., Shanghai East Best Foreign Trade Co., Ltd., Lianyungang Suli Hardware Technology Co., Ltd., Yuyao Alfirste Hardware Co., Ltd, Zhejiang Chaoboer Hardware Co., Ltd, Haiyan Shangxin Standarf Parts Co., Ltd, Jiaxing Shangxiang
Import and Export Co., Ltd, Zhejiang Tianyuan Metal Products Co., Ltd, Jiashan Xiaohai Metal Products Factory, Jia Xing Tai Cheng Aoto Parts Co., Ltd, Haiyan Yousun Entreprise Co., Ltd, Haiyan Wancheng Fasteners Co., Ltd., EC International (Nantong) Co., Ltd., Jiaxing Zhengying Hardware Co., Ltd, SSF Industrial Co. Limited, Zhe Jiang World Win Fastener Co., Ltd, Haiyan Tianqi Standard Parts Co., Ltd, Jiashan Sanxin Fastener Company Limited, Jiaxing Huanhuan Tong Plastic Industry Co., Ltd, Yuyao
Zhenrui Metal Co., Beijing Jinzhaobo High Strength Fastener Co., Ltd., Jiashan Yongxin Fastener Co., Ltd, Haiyan Yihui Hardware Technology Co., Ltd et Shanghai Moregood Hardware Co., Ltd.

37 Il en résulte que le présent recours est recevable en ce qu’il est introduit par la CCCME au nom de ses trente‑et‑un membres cités au point 36 ci-dessus qui sont des producteurs‑exportateurs ayant coopéré avec la Commission dans le cadre de l’enquête amenant à l’adoption du règlement attaqué, par les trois producteurs-exportateurs chinois faisant partie de l’échantillon et par les cinq autres producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon qui n’ont pas fourni de certificat
d’appartenance à la CCCME.

B. Sur le fond

38 À l’appui du recours, les requérantes invoquent neuf moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base et du principe de bonne administration dans la détermination de la valeur normale, le deuxième, d’une violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, dans la mesure où la Commission n’a pas procédé aux ajustements nécessaires des données relatives aux frais de vente, aux dépenses administratives et aux autres frais généraux
(ci‑après les « frais VAG ») et aux bénéfices des producteurs thaïlandais, le troisième, d’une violation de l’article 18, paragraphes 1, 3 et 4, du règlement de base, de l’article 6.8 de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping »), figurant à l’annexe 1 A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (JO 1994, L 336, p. 3), et de l’annexe II
de l’accord antidumping (JO 1994, L 336, p. 118, ci-après l’« annexe II »), dans le contexte de la détermination du coût de la main-d’œuvre de deux producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon, le quatrième, d’une violation de l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base par la détermination de la marge de dumping des producteurs‑exportateurs non retenus dans l’échantillon, le cinquième, d’une violation de l’article 3, paragraphes 2, 3, 5 et 6, du règlement de base en combinaison avec
l’article 4, paragraphe 1, du même règlement, en raison de l’absence de prise en considération de la différence entre les éléments de fixation standard et non standard dans le cadre de l’appréciation du préjudice et du lien de causalité, le sixième, d’une violation de l’article 3, paragraphes 2 et 3, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, par l’analyse de la sous‑cotation de la Commission dans la mesure où elle n’est déterminée qu’en ce qui concerne 24 % seulement de la production
des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, le septième, d’une violation de l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, dans la mesure où la Commission a comparé les prix chinois aux distributeurs avec les prix de l’Union aux utilisateurs finaux dans l’analyse des effets sur les prix et la détermination de la marge de préjudice, le huitième, d’une violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base en ce que la Commission
n’a pas procédé à un examen objectif fondé sur des éléments de preuve positifs en ce qui concernait les indicateurs de préjudice macroéconomiques et, le neuvième, d’une violation de l’article 6, paragraphe 7, de l’article 19, paragraphes 1, 2 et 3, et de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base et des droits de la défense des requérantes par la Commission en raison du traitement confidentiel réservé à certaines données pendant la procédure administrative.

1.   Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base et du principe de bonne administration

39 À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 35 et jurisprudence citée). Le contrôle
juridictionnel d’une telle appréciation doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 36 et jurisprudence citée).

40 En outre, il ressort également d’une jurisprudence constante de la Cour que le contrôle par le Tribunal des éléments de preuve sur lesquels les institutions de l’Union fondent leurs constatations ne constitue pas une nouvelle appréciation des faits remplaçant celle de ces institutions. Ce contrôle se limite à relever si ces éléments sont de nature à étayer les conclusions tirées par celles-ci. Il appartient, dès lors, au Tribunal non seulement de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de
preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à fonder les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 59 et jurisprudence citée).

41 En outre, il convient de rappeler que la détermination de la valeur normale d’un produit constitue l’une des étapes essentielles devant permettre d’établir l’existence d’un dumping éventuel (arrêts du 22 mars 2012, GLS, C‑338/10, EU:C:2012:158, point 19, et du 1er octobre 2014, Conseil/Alumina, C‑393/13 P, EU:C:2014:2245, point 20).

42 Cela étant, il est de jurisprudence constante que les institutions de l’Union jouissent d’un large pouvoir d’appréciation concernant la détermination de la valeur normale pour des pays n’ayant pas d’économie de marché (voir arrêt du 19 septembre 2019, Zhejiang Jndia Pipeline Industry/Commission, T‑228/17, EU:T:2019:619, point 126 et jurisprudence citée) et que le choix du pays représentatif approprié à cette fin s’inscrit également dans le cadre du large pouvoir d’appréciation dont disposent les
institutions de l’Union dans le domaine de la politique commerciale commune. Toutefois, la marge d’appréciation de la Commission est limitée dans le cadre de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base, en ce que le pays choisi doit avoir un niveau de développement économique semblable à celui du pays exportateur (voir, en ce sens, arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 127 et
jurisprudence citée).

43 Il a également été jugé qu’il convenait de vérifier si la Commission n’avait pas omis de prendre en considération des éléments essentiels ou pertinents en vue d’établir le caractère adéquat du pays choisi et si les éléments du dossier avaient été examinés avec toute la diligence requise pour qu’il pût être considéré que la valeur normale du produit concerné avait été déterminée d’une manière appropriée et non déraisonnable. Cette jurisprudence peut être transposée à des situations où l’existence
de distorsions significatives dans le pays exportateur justifie l’utilisation des données en provenance d’un pays représentatif approprié pour le calcul de la valeur normale, qui implique également l’examen de situations économiques et politiques complexes (voir arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 128 et jurisprudence citée).

44 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le premier moyen des requérantes relatif au calcul de la valeur normale du produit concerné, qui se divise en cinq branches.

a)   Sur la première branche, relative au choix de la Thaïlande en tant que pays représentatif approprié au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base, aux fins du calcul de la valeur normale du produit concerné

45 Par la première branche du premier moyen, les requérantes font valoir, tout d’abord, que la Commission n’aurait pas dû retenir la Thaïlande comme pays représentatif approprié dans le cadre de la présente enquête en raison des importations dans ce pays du fil machine de qualité spéciale en provenance du Japon, ensuite, que la base de données utilisée par la Commission afin de calculer les frais VAG et les bénéfices n’était pas correctement choisie et, enfin, que la Commission aurait dû procéder à
des ajustements de ces données dans le but de calculer la valeur normale au plus près des valeurs de production des producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon.

1) Sur les prix des matières premières nécessaires à la fabrication du produit concerné en Thaïlande

46 Les requérantes soutiennent, en substance, que la Commission n’aurait pas dû retenir la Thaïlande comme un « pays représentatif approprié », au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base, en raison du prix du fil machine de haute qualité importé du Japon en Thaïlande, qui serait une matière première pour la fabrication du produit concerné. La CCCME aurait produit pendant la procédure administrative un grand nombre de données et d’éléments de preuve indiquant que les prix des
importations thaïlandaises ne correspondaient pas aux coûts de production des producteurs chinois retenus dans l’échantillon, dans la mesure où ceux‑ci n’exporteraient vers l’Union quasi que des éléments de fixation standard et très peu d’éléments de fixation spéciaux. En revanche, le fil machine de qualité spéciale en provenance du Japon serait utilisé pour des applications particulières et non pour la production d’éléments de fixation standard. De plus, les requérantes soutiennent que la
Commission n’a pas correctement examiné la différence significative de prix de 17 % des exportations japonaises, d’une part, vers la Thaïlande et, d’autre part, vers les cinq autres principaux pays d’exportation.

47 Les requérantes estiment que les coûts de production en Thaïlande ne sont pas « correspondants » à ceux des producteurs‑exportateurs chinois, au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base. En imposant une charge de la preuve excessive, la Commission aurait également violé le principe de bonne administration.

48 La Commission conteste l’argumentation des requérantes. Par ailleurs, elle fait valoir que le grief relatif à la violation du principe de bonne administration n’est pas étayé par les requérantes et que, par conséquent, il est irrecevable.

i) Sur la recevabilité du grief relatif à la violation du principe de bonne administration

49 À la suite d’une question du Tribunal sur l’irrecevabilité du grief soulevée par la Commission dans le mémoire en défense, les requérantes ont précisé, lors de l’audience, que le grief relatif à la violation du principe de bonne administration concernait le caractère excessif de la charge de la preuve que leur aurait imposée la Commission, dans la mesure où elles avaient présenté de manière extensive les raisons pour lesquelles les données prises en compte par la Commission n’étaient pas les plus
adéquates et avaient fourni suffisamment d’informations.

50 En effet, il découle du principe de bonne administration, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, que la charge de la preuve qui peut incomber aux producteurs-exportateurs en vertu de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base ne doit pas être déraisonnable (voir, par analogie, arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 82 et jurisprudence citée).

51 Dès lors, s’agissant de la recevabilité du grief relatif à la violation du principe de bonne administration, il suffit de constater que ce grief est étayé dans l’argumentation des requérantes présentée dans le cadre de la première branche du premier moyen, par laquelle elles contestent le choix de la Thaïlande comme pays représentatif approprié au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base, malgré les éléments qu’elles auraient apportés à la Commission indiquant que le pays en
question ne constituait pas un pays représentatif approprié pour le calcul de la valeur normale du produit concerné.

52 Partant, il y a lieu d’écarter l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

ii) Sur le bien-fondé du choix de la Thaïlande en tant que pays représentatif approprié pour le calcul de la valeur normale du produit concerné

53 L’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base dispose ce qui suit :

« a) Lorsqu’il est jugé inapproprié, dans le contexte de l’application de la présente disposition ou de toute autre disposition pertinente du présent règlement, de se fonder sur les prix et les coûts sur le marché intérieur du pays exportateur du fait de l’existence, dans ce pays, de distorsions significatives au sens du point b), la valeur normale est calculée exclusivement sur la base de coûts de production et de vente représentant des prix ou des valeurs de référence non faussés, dans le
respect des règles suivantes.

Les sources d’informations que la Commission peut utiliser sont notamment :

– des coûts de production et de vente correspondants dans un pays représentatif approprié ayant un niveau de développement économique semblable à celui du pays exportateur, pour autant que les données pertinentes soient aisément disponibles ; lorsqu’il existe plusieurs pays représentatifs appropriés, la préférence va, le cas échéant, aux pays appliquant un niveau adéquat de protection sociale et environnementale,

– lorsque cela est jugé approprié, des prix, des coûts ou des valeurs de référence internationaux non faussés, ou

– les coûts sur le marché intérieur, mais uniquement si des preuves correctes et adéquates permettent d’établir positivement que ces coûts ne sont pas faussés, y compris dans le cadre des dispositions relatives aux parties intéressées énoncées au point c).

Sans préjudice de l’article 17, cette évaluation est effectuée séparément pour chaque exportateur et producteur.

La valeur normale ainsi calculée comprend un montant non faussé et raisonnable pour les dépenses administratives, les frais de vente et les autres frais généraux ainsi que pour la marge bénéficiaire.

b) On entend par distorsions significatives les distorsions qui se produisent lorsque les prix ou les coûts déclarés, y compris le coût des matières premières et de l’énergie, ne sont pas déterminés par le libre jeu des forces du marché en raison d’une intervention étatique importante. Dans l’analyse de l’existence de distorsions significatives, il faut tenir compte notamment de l’incidence possible de l’un ou plusieurs des facteurs suivants :

– un marché constitué dans une mesure importante par des entreprises qui appartiennent aux autorités du pays exportateur ou qui opèrent sous leur contrôle, supervision stratégique ou autorité,

– une présence de l’État dans des entreprises qui permet aux autorités d’influer sur la formation des prix ou sur les coûts,

– des mesures ou politiques publiques discriminatoires qui favorisent les fournisseurs nationaux ou influencent de toute autre manière le libre jeu des forces du marché,

– l’absence, l’application discriminatoire ou l’exécution inadéquate de lois sur la faillite, les entreprises ou la propriété,

– une distorsion des coûts salariaux,

– un accès au financement accordé par des institutions mettant en œuvre des objectifs de politique publique ou n’agissant pas de manière indépendante de l’État à tout autre égard.

[…] »

54 Selon le considérant 220 du règlement attaqué, la Commission a fondé son choix du pays représentatif approprié sur la base de trois critères, à savoir un niveau de développement économique semblable à celui de la Chine, la fabrication du produit concerné dans le pays en question et la disponibilité des données publiques pertinentes.

55 Pendant l’enquête, la Commission a publié deux notes au dossier relatives aux sources utilisées pour déterminer la valeur normale, sur lesquelles les parties intéressées ont été invitées à présenter leurs observations. Il ressort de la note au dossier publiée le 5 février 2021 (ci‑après la « première note ») que la Commission a établi l’existence d’une production considérable du produit concerné dans huit pays présentant un niveau économique similaire à celui de la Chine, mais qu’elle n’a pu
trouver des données pertinentes aisément disponibles que pour le Brésil, la Russie, la Turquie et la Thaïlande. Selon le considérant 223 du règlement attaqué, dans la note au dossier publiée le 4 mai 2021 (ci-après la « deuxième note »), la Commission a confirmé la disponibilité de données également pour la Malaisie.

56 Lors de l’analyse des données relatives aux importations dans les cinq pays représentatifs potentiels, la Commission a observé que plus de 75 % des importations de la matière première utilisée dans la fabrication du produit soumis à l’enquête au Brésil et en Malaisie provenaient de Chine et de pays non membres de l’OMC répertoriés à l’annexe I du règlement (UE) 2015/755 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2015, relatif au régime commun applicable aux importations de certains pays
tiers (JO 2015, L 123, p. 33). Étant donné que les prix de ces importations pouvaient être affectés par des distorsions et risquaient de fausser, à leur tour, les volumes d’importations restants, la Commission a analysé ces derniers au regard de leurs quantités absolues et de leurs prix et a conclu que le Brésil et la Malaisie disposaient d’un ensemble de données aisément accessibles de moindre qualité pour calculer une valeur non faussée. La Russie a été écartée, étant donné qu’aucune partie
intéressée ne s’était prononcée en sa faveur. La Thaïlande a été préférée à la Turquie étant donné que, d’une part, la première possédait des volumes plus importants d’importations des quatre principales matières premières utilisées dans la fabrication du produit soumis à l’enquête et, d’autre part, elle présentait des droits à l’importation plus faibles sur ces facteurs de production.

57 La Commission a invité les parties intéressées à formuler des observations et à proposer des informations accessibles au public sur les valeurs non faussées pour chacun des facteurs de production. Il ressort des éléments du dossier que les requérantes et, en particulier, la CCCME et les trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon ont pu, en tant que parties intéressées, consulter le dossier de la Commission et déposer des observations sur le choix du pays représentatif
approprié.

58 En réponse aux observations de la CCCME quant à la présence importante de ce qu’elle a qualifié de matières premières de haute qualité provenant du Japon, la Commission a analysé les prix japonais à l’exportation des quatre principales matières premières, afin d’identifier s’il existait des distorsions qui indiquaient que les importations en Thaïlande en provenance du Japon n’étaient pas soumises aux règles du marché. Il ressort du considérant 232 du règlement attaqué que, pendant la période
d’enquête, la Thaïlande était l’un des cinq principaux marchés d’exportation du Japon et représentait 17 % des exportations japonaises totales de ces matières, tandis que les cinq premiers pays d’exportation, à l’exclusion de la Chine, représentaient plus de 60 % des exportations japonaises. Le prix moyen à l’exportation vers la Thaïlande était 17 % plus élevé que le prix moyen à l’exportation vers les cinq autres principaux pays d’exportation. La Commission a conclu que les prix japonais à
l’exportation vers la Thaïlande n’étaient pas excessivement élevés ou non représentatifs. Par conséquent, la Commission a considéré que les exportations japonaises vers la Thaïlande n’étaient pas susceptibles de remettre en cause le caractère représentatif de cette dernière, aux fins de l’enquête sur le produit concerné.

59 Il convient donc d’examiner si, en l’espèce, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que la Thaïlande constituait un pays représentatif approprié aux fins du calcul de la valeur normale du produit soumis à l’enquête. Dans ce contexte, compte tenu du fait que la charge de la preuve incombe aux requérantes, lesquelles doivent proposer des éléments de preuve concluants à l’appui de leurs allégations, il y a lieu de vérifier si elles ont avancé des éléments de preuve
de nature à démontrer que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation, au sens de la jurisprudence citée au point 39 ci‑dessus, en choisissant la Thaïlande comme pays représentatif approprié (voir, en ce sens, arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 131 et jurisprudence citée).

60 D’emblée, il importe de constater que les requérantes ne contestent pas, dans le cadre du présent recours, les conclusions de la Commission dans le règlement attaqué portant sur l’existence d’éléments de preuve lors de l’ouverture de l’enquête, qui avaient mis en évidence l’existence de distorsions significatives en Chine, au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous b), du règlement de base. De plus, elles ne contestent pas le fait que la Thaïlande affiche généralement un niveau de
développement semblable à celui de la Chine.

61 À cet égard, en premier lieu, il y a lieu de relever que la Commission a invité tous les producteurs‑exportateurs chinois à fournir des informations sur les intrants utilisés pour fabriquer des éléments de fixation, afin de calculer le prix qu’un producteur d’éléments de fixation paierait en Thaïlande pour une matière première livrée à l’entrée de l’usine. Pour la définition des matières premières nécessaires à la production du produit soumis à l’enquête, la Commission a utilisé la méthode du
système harmonisé mondial de désignation et de codification des marchandises élaboré par le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes, et a défini les codes du système harmonisé (SH) pertinents. La Commission a expliqué que, pour obtenir les prix non faussés des matières premières pertinentes dans le pays représentatif approprié, elle était obligée de procéder par des approximations, en fonction des données qui se trouvaient à sa disposition.

62 Ainsi que les requérantes l’ont confirmé lors de l’audience, elles ne contestent pas en tant que telle la définition des codes SH qui déterminent les matières premières nécessaires à la fabrication du produit concerné. Or, la Commission a établi, sans être contredite par les requérantes sur ce point, que cette méthode supposait un certain degré d’approximation, dans la mesure où plusieurs qualités d’une matière première pouvaient être couvertes par un même code SH dans différentes proportions.
Dès lors, il est difficile d’établir une correspondance exacte entre les codes SH d’un producteur à l’autre.

63 En revanche, les requérantes soutiennent que la Commission aurait dû adapter les données qu’elle avait à sa disposition et notamment écarter les valeurs qui concernaient les importations du fil machine en Thaïlande en provenance du Japon, puisque ledit fil machine serait de meilleure qualité que celui utilisé par les producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon et ferait augmenter le prix de la valeur normale du produit soumis à l’enquête de manière déraisonnable.

64 Les requérantes définissent le fil machine de haute qualité comme étant associé à des éléments de fixation non standard, puisque ces derniers seraient généralement destinés à des secteurs qui chercheraient des éléments de meilleure qualité. Cependant, il importe de constater à cet égard que, premièrement, même dans les secteurs auxquels elles se réfèrent, notamment l’automobile ou l’aéronautique, les éléments de fixation utilisés peuvent être à la fois standard et non standard. En tout état de
cause, selon la définition du produit soumis à l’enquête par la Commission, tant les éléments standard que les éléments non standard sont concernés par la présente enquête.

65 Deuxièmement, les requérantes ne prouvent pas la présence spécifique, en termes de pourcentage, de fil machine de qualité spéciale dans les éléments de fixation standard ou non standard. Elles font valoir, à cet égard, des visites des représentants de la European Fasteners Distributor Association (ci‑après l’« EFDA ») dans les usines thaïlandaises et des témoignages de ces représentants établissant l’utilisation du fil machine de qualité spéciale dans le secteur automobile thaïlandais. Cependant,
ces éléments ne sauraient constituer une preuve fiable et objective démontrant que l’ensemble des producteurs thaïlandais d’éléments de fixation se limitaient à cette production. En effet, il importe de rappeler, à cet égard, que la Commission est tenue de s’assurer au cours de l’enquête de l’exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées sur lesquels les constatations sont fondées. Cette obligation de vérification est l’expression, dans le contexte de l’imposition de mesures
antidumping, d’un principe plus général qui impose à toute instance, nonobstant son large pouvoir d’appréciation, d’effectuer un examen précis et de fonder son appréciation sur des preuves d’une qualité suffisante (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2019, Yieh United Steel/Commission, T‑607/15, EU:T:2019:831, point 71 et jurisprudence citée).

66 Troisièmement, il convient de constater que les requérantes n’ont pas apporté de preuves concrètes relatives aux proportions d’inclusion du fil machine pour les éléments de fixation non standard que la Commission pourrait utiliser. D’une part, ainsi que la Commission l’a relevé, les requérantes n’ont pas été en mesure de prouver que le fil machine de qualité spéciale n’était pas utilisé par les producteurs‑exportateurs chinois des éléments de fixation. D’ailleurs, ainsi qu’il ressort de l’annexe
B.1 du mémoire en défense, que les requérantes ne contestent pas, en 2020, la Chine a été le premier pays d’exportation du fil machine relevant des codes pertinents du Japon. Ainsi, le fil machine « de qualité spéciale » en provenance du Japon était également importé en Chine en quantités importantes.

67 D’autre part, la Commission a expliqué au considérant 301 du règlement attaqué que, sur la base des données confidentielles présentées par l’une des parties intéressées, les éléments de fixation pour le secteur automobile représentaient moins de 50 % de la demande totale d’éléments de fixation industriels en Thaïlande en 2018, de sorte qu’il existait une demande de matières premières pour les éléments de fixation standard et non standard en Thaïlande.

68 Ainsi, les requérantes n’ont pas étayé leur affirmation selon laquelle les importations en provenance du Japon étaient principalement des importations de fil machine de qualité spéciale. En tout état de cause, le fait qu’une matière première soit de meilleure qualité, et donc plus chère, ne suffit pas à remettre en cause l’exactitude ou la véracité de cette donnée. Dès lors, cela ne signifie pas que cette donnée doive être écartée du calcul.

69 Quatrièmement, les requérantes ont communiqué des tableaux des « facteurs de production » portant sur des différences de prix des différents types de fil machine. Toutefois, aucune preuve concrète n’a été apportée sur la répartition de ces fils dans la fabrication du produit concerné. Il en résulte que ces éléments peuvent concerner des produits qui ne font pas partie de l’enquête. Dès lors, les tableaux ne constituent pas une preuve suffisante pour remettre en cause les valeurs prises en compte
par la Commission.

70 En tout état de cause, ainsi qu’il résulte du point 61 ci‑dessus, les codes SH pertinents incluent des types et des qualités de matières premières qui ne sont pas utilisés dans la fabrication d’éléments de fixation. Cela va de pair avec la méthode choisie par la Commission, dans le cadre de la large marge d’appréciation dont elle bénéficie pour la détermination du pays représentatif approprié au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base. En effet, si ledit article pose certains
critères quant au choix du pays, il ne détermine pas de méthode précise que la Commission devrait suivre pour calculer la valeur normale du produit soumis à l’enquête à partir de données d’un autre pays que celui concerné directement par l’enquête.

71 Par ailleurs, il importe de rappeler que la valeur normale du produit concerné a été calculée sur la base de l’ensemble des importations en Thaïlande, et non uniquement sur la base des importations en provenance du Japon. Selon le considérant 301 du règlement attaqué, les importations thaïlandaises des quatre principales matières premières en provenance du Japon représentaient uniquement environ 33 % du total des importations de ces matières.

72 Cinquièmement, quant à l’argument des requérantes selon lequel le prix moyen à l’exportation du Japon vers la Thaïlande était 17 % plus élevé que le prix moyen à l’exportation vers les cinq autres principaux pays à l’exportation, il ressort du considérant 232 du règlement attaqué que la Thaïlande représentait 17 % des exportations japonaises totales de ces matières, tandis que les cinq premiers pays d’exportation, à l’exclusion de la Chine, représentaient plus de 60 % des exportations japonaises.
Or, le prix moyen à l’exportation vers la Thaïlande était 17 % plus élevé que le prix moyen à l’exportation vers les cinq autres principaux pays d’exportation. La Commission a considéré que cela ne démontrait pas la nécessité d’écarter les données japonaises, puisque les prix japonais à l’exportation vers la Thaïlande n’étaient pas excessivement élevés ou non représentatifs. Interrogée à cet égard lors de l’audience, la Commission a soutenu que les prix japonais vers la Thaïlande constituaient
simplement la valeur supérieure de la fourchette. En effet, aucun élément de preuve ne permet de constater que cette différence des prix japonais d’exportation vers la Thaïlande en comparaison des autres pays ne correspond pas au mécanisme de marché classique et de remettre en cause le choix de la Thaïlande en tant que pays représentatif approprié.

73 En tout état de cause, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 59 ci‑dessus, il incombait aux requérantes de présenter des éléments de preuve suffisants afin de démontrer que cette différence avait un impact direct sur le calcul de la valeur normale du produit soumis à l’enquête. À cet égard, il importe par ailleurs de constater que, malgré leur argumentation en ce sens, les requérantes n’apportent pas la preuve de l’utilisation de données faussées par la Commission, autrement dit
de données manipulées ou qui ne correspondraient pas à la réalité.

74 En deuxième lieu, s’agissant du caractère correspondant des coûts thaïlandais aux coûts exposés par les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon, il convient de relever que, selon le considérant 198 du règlement attaqué, la Commission a constaté que l’industrie chinoise des éléments de fixation bénéficiait des orientations et des interventions des pouvoirs publics concernant l’acier, qui constituait la principale matière première utilisée dans la fabrication des éléments de fixation.
Dès lors, la Commission a conclu au considérant 206 du règlement attaqué que les coûts des intrants, et notamment des matières premières, étaient également affectés par des distorsions significatives.

75 À cet égard, il ressort de la jurisprudence que la large marge d’appréciation dont dispose la Commission en matière de mesures de défense commerciale s’étend également à l’évaluation des situations de fait, d’ordre juridique et politique, qui se manifestent dans le pays concerné et qu’elle doit évaluer pour déterminer si un exportateur agit dans les conditions du marché sans intervention significative de l’État (arrêt du 11 septembre 2014, Gold East Paper et Gold Huasheng Paper/Conseil, T‑443/11,
EU:T:2014:774, point 163).

76 Certes, la Commission doit calculer la valeur normale du produit soumis à l’enquête tel qu’il l’aurait été pour les producteurs‑exportateurs du pays concerné en l’absence de distorsions. Cependant, il ressort clairement de la lettre de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base que la valeur normale est calculée exclusivement sur la base des données du pays représentatif choisi. Dès lors, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a déterminé la valeur
normale en prenant en compte les coûts des matières premières pour les producteurs thaïlandais d’éléments de fixation.

77 D’ailleurs, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, la Chine étant une des économies les plus importantes au monde, il serait déraisonnable d’exiger de la Commission de retenir en tant que pays représentatif un pays avec une économie équivalente (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 135). Il s’ensuit que la Commission peut, dans le cadre de sa large marge
d’appréciation, procéder à certaines approximations pour le calcul de la valeur normale, pour autant que lesdites approximations sont justifiées par les données qu’elle a à sa disposition. Comme le fait valoir la Commission, l’utilisation des codes SH suppose des approximations, puisqu’elle ne reflète pas exactement les matières premières dans les proportions exactes utilisées par les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon.

78 Il résulte des considérations qui précèdent que les requérantes n’ont pas démontré que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a conclu, au considérant 303 du règlement attaqué, que, en l’absence de données plus étayées sur la part des matières premières importées du Japon qui seraient destinées à des éléments de fixation non standard et sur la manière de distinguer les matières premières de qualité spéciale au sein des quatre codes SH et que, en tenant compte
de la demande de matières premières pour la production d’éléments de fixation standard et non standard en Thaïlande, les données des producteurs thaïlandais pouvaient être utilisées pour le calcul de la valeur normale du produit concerné.

2) Sur la représentativité du calcul des frais VAG et des bénéfices

79 Les requérantes font valoir que les données relatives aux frais VAG et aux bénéfices calculés par la Commission ne correspondent pas à celles des producteurs chinois retenus dans l’échantillon et, donc, que lesdites données ne sont pas représentatives.

80 À cet égard, d’une part, les requérantes soutiennent que trois des cinq producteurs thaïlandais retenus par la Commission ne produisent pas le produit soumis à l’enquête. En effet, tout d’abord, Topy Thaïland ne fabriquerait pas des vis ou des boulons, alors que les rondelles de butée qu’elle fabriquerait ne correspondraient pas au produit concerné. En revanche, aucun des producteurs chinois retenus dans l’échantillon ne fabriquerait des rondelles, qui seraient des produits très différents des
vis et des boulons. Par ailleurs, des visites de l’EFDA auraient confirmé que Topy Thaïland ne produisait pas le produit soumis à l’enquête. Ensuite, ThaiSin fabriquerait essentiellement des éléments de fixation spéciaux et, enfin, S. J Screwthai fabriquerait essentiellement des produits qui ne correspondraient pas au produit concerné.

81 D’autre part, les requérantes allèguent que les données Dun & Bradstreet (ci‑après les « données D & B ») sur les producteurs thaïlandais utilisées par la Commission aux fins du calcul des frais VAG et des bénéfices ne sont pas fiables. En effet, lesdites données seraient différentes des données Orbis qui auraient été utilisées dans le cadre d’autres enquêtes antidumping. Ces différences entacheraient la fiabilité des données. En particulier, si les données D & B concernent le groupe Topy plutôt
que l’entité thaïlandaise du groupe, elles ne seraient pas représentatives.

82 La Commission fait valoir qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

83 Aux termes de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), lorsque la valeur normale est calculée sur la base des coûts de production et de vente correspondants dans un pays représentatif approprié, cette valeur normale doit inclure un montant non faussé et raisonnable pour les frais VAG ainsi que pour la marge bénéficiaire.

84 En premier lieu, les requérantes contestent le choix des producteurs thaïlandais sur lequel la Commission s’est fondée afin de calculer les frais VAG et les bénéfices.

85 À cet égard, il ressort du considérant 244 du règlement attaqué que, à la suite des contestations de la CCCME et de l’EFDA sur le caractère approprié des producteurs thaïlandais retenus dans la deuxième note, la Commission a examiné les informations disponibles sur les six sociétés thaïlandaises dont les données devaient être utilisées. Premièrement, elle a conclu que Topy Thailand fabriquait des rondelles relevant de la définition du produit ainsi que d’autres produits qui n’étaient pas
concernés par l’enquête et l’a donc maintenue dans l’analyse. Deuxièmement, la Commission a conclu que TR Formac n’avait pas d’usine de production en Thaïlande et l’a finalement exclue de l’analyse. Troisièmement, la Commission a conclu que S. J Screwthai était un fabricant de boulons d’ancrage et produisait également des vis, des ancrages à béton et des rondelles. La Commission a considéré que les ancrages, en particulier lorsqu’ils étaient combinés avec des boulons ou des vis, entraient dans le
champ d’application de l’enquête. La Commission a constaté que la société produisait également plusieurs autres types d’éléments de fixation (par exemple des vis et des rondelles) et l’a donc maintenue dans l’analyse. Quatrièmement, la Commission a conclu que Thaisin Metals Industries Co., Ltd. était un producteur de vis à boulons, produisant également des vis autotaraudeuses, des vis pour machines, des boulons hexagonaux et des têtes creuses hexagonales pour différents secteurs. Étant donné
qu’il existait plusieurs types d’éléments de fixation produits par cette société, parmi lesquels des éléments de fixation non standard, la Commission a maintenu cette société dans l’analyse.

86 Selon le considérant 307 du règlement attaqué, après la communication des conclusions définitives, en réponse aux observations reçues par les parties intéressées, dont la CCCME, sollicitant l’exclusion des données financières de certaines sociétés thaïlandaises retenues comme fabriquant le produit soumis à l’enquête, la Commission a confirmé que plusieurs types d’éléments de fixation du produit soumis à l’enquête étaient produits par ces sociétés. En particulier, le site Internet de Topy Thaïland
avait permis d’établir que la société fabriquait des rondelles standard qui faisaient partie du produit soumis à l’enquête et pas seulement des rondelles de butée, comme cela avait été soutenu. La Commission a donc confirmé que les sociétés sélectionnées en Thaïlande étaient directement ou indirectement liées à la fabrication et à la vente du produit soumis à l’enquête.

87 À cet égard, tout d’abord, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du point 9 ci‑dessus, les rondelles sont des éléments de fixation concernés par l’enquête.

88 Ensuite, il ressort des considérants 63 et 70 du règlement attaqué que, conformément à l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base, la Commission a sélectionné, parmi les quatre‑vingt‑douze producteurs‑exportateurs chinois ayant communiqué les informations demandées dans l’avis d’ouverture et accepté d’être inclus dans l’échantillon, les trois producteurs exportateurs ou groupes de producteurs‑exportateurs affichant les plus grands volumes d’exportations sur lesquels l’enquête pouvait
raisonnablement porter compte tenu du temps disponible. Les types de produits spécifiques fabriqués par les sociétés sélectionnées ne constituaient pas un critère pour cette sélection, dans la mesure où tous les types d’éléments de fixation ont été considérés comme un seul et même produit aux fins de l’enquête.

89 En effet, aux termes de l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base, dans les cas où le nombre de producteurs de l’Union, d’exportateurs ou d’importateurs, de type de produits ou de transactions est important, l’enquête peut se limiter à un nombre raisonnable de parties, de produits ou de transactions en utilisant des échantillons statistiquement valables d’après les renseignements disponibles au moment du choix ou au plus grand volume représentatif de production, de ventes ou d’exportations
sur lequel l’enquête peut raisonnablement porter compte tenu du temps disponible.

90 Il n’est pas contesté que l’article 17 du règlement de base autorise la Commission à recourir à la technique de l’échantillonnage, en particulier dans les cas où le nombre de producteurs‑exportateurs est important. De plus, les requérantes ne contestent pas la composition de l’échantillon des producteurs‑exportateurs chinois et son caractère représentatif.

91 Enfin, les requérantes n’expliquent nullement pourquoi les différences de production des éléments de fixation impliqueraient nécessairement une différence significative des coûts quant aux frais VAG. À cet égard, il convient de rappeler que l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base prévoit que le calcul de la valeur normale comprend un montant non faussé et raisonnable des frais VAG et autres bénéfices. Dès lors, il ressort de cette disposition que, pour être pertinentes, les
données utilisées par la Commission doivent être représentatives des sociétés fabriquant des produits soumis à l’enquête. Or, les rondelles font partie de la définition du produit concerné, quand bien même elles ne seraient pas produites par les trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon.

92 Partant, étant donné que la Commission a considéré que tous les éléments de fixation constituaient un seul et même produit et que l’échantillonnage a été constitué conformément aux dispositions pertinentes du règlement de base, l’argument selon lequel il convient d’écarter les données d’un producteur thaïlandais qui produirait des éléments de fixation soumis à l’enquête, mais qui ne correspondraient pas exactement à ceux produits par les trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans
l’échantillon ne saurait prospérer. Dès lors, la circonstance que ces derniers ne produisent pas de rondelles est sans pertinence pour la représentativité du calcul des frais VAG et des bénéfices liés à la valeur normale du produit soumis à l’enquête.

93 Par ailleurs, ainsi que le fait valoir la Commission, dans le cadre d’enquêtes telles que celle faisant l’objet du présent recours, où elle constitue la valeur normale sur la base de données d’un pays représentatif approprié, il lui est difficile d’avoir des données qualitatives et disponibles entièrement calibrées à l’échantillon des producteurs‑exportateurs. En tout état de cause, la représentativité des données de référence des producteurs thaïlandais doit être évaluée à l’échelle nationale du
pays dont les produits font l’objet du dumping, et pas seulement par rapport à chaque producteur‑exportateur retenu dans l’échantillon considéré individuellement. La Commission a expliqué que les montants non faussés et raisonnables pour les frais VAG et les bénéfices étaient généralement établis sur la base d’une recherche approfondie de toutes les sociétés potentiellement pertinentes dans tous les pays représentatifs appropriés potentiels en s’appuyant sur des bases de données auxquelles elle
avait accès. Ces données seraient généralement fournies pour chaque société dans son ensemble et ne se limiteraient presque jamais au produit concerné.

94 En tout état de cause, s’agissant, en particulier de Topy Thaïland, son site Internet préciserait que cette dernière fabrique des rondelles standard, qui font partie du produit soumis à l’enquête.

95 Les requérantes contestent ces appréciations, dans la mesure où, d’une part, le site Internet de Topy Thaïland ne montrerait que des rondelles de butée, qui seraient des rondelles différentes des rondelles « associées à une vis et à un écrou » concernées par l’enquête de la Commission. D’autre part, l’EFDA, qui aurait une connaissance importante des producteurs thaïlandais, aurait confirmé que Topy Thaïland ne produisait pas le produit en cause. Or, ainsi qu’il ressort du point 65 ci‑dessus, de
telles visites, non documentées, ne sauraient constituer une preuve suffisante pour remettre en cause les conclusions de la Commission sur la représentativité du producteur thaïlandais en question.

96 En deuxième lieu, s’agissant de la base de données utilisée pour collecter les données pertinentes des producteurs thaïlandais, il importe de rappeler, tout d’abord, que la détermination de marges raisonnables pour les frais VAG et les bénéfices ne fait pas exception à l’application de la jurisprudence citée au point 39 ci‑dessus, selon laquelle la Commission dispose, dans le domaine des mesures de défense commerciale, d’un large pouvoir d’appréciation, de sorte que le juge de l’Union n’est
appelé à exercer qu’un contrôle restreint. En effet, cette détermination comporte nécessairement des appréciations économiques complexes (arrêt du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T‑301/16, EU:T:2019:234, point 132), de même que l’analyse des données à la disposition de la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 180).

97 Ainsi, il appartient aux requérantes, si elles entendent contester la fiabilité des données utilisées par la Commission pour calculer les frais VAG et les bénéfices ajoutés à la valeur normale du produit concerné, d’étayer leurs affirmations par des éléments de nature à jeter un doute, d’une manière concrète, sur la crédibilité de la méthode ou des données utilisées par cette institution (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and
Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 178 et jurisprudence citée).

98 Dans ce cadre, les requérantes, si elles veulent obtenir gain de cause, ne peuvent se limiter à produire des chiffres alternatifs, par exemple des chiffres obtenus par une autre base de données, mais doivent produire des éléments susceptibles de mettre en cause celles fournies par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 179).

99 À cet égard, il y a lieu de constater que, sur chacun de leurs points de contestation, les requérantes ont obtenu durant l’enquête des explications. En effet, il ressort du considérant 241 du règlement attaqué que la Commission a joint au dossier ouvert de l’affaire, les extraits de la base de données D & B relatifs aux sociétés en Thaïlande et que ces extraits comportaient des liens vers des pages du site Internet de D & B relatives à la méthodologie générale, à savoir une collecte du bilan, du
compte de résultat et de ratios clés pour un certain nombre d’entreprises dans le monde, par pays, avec des explications concernant ces ratios clés.

100 Au considérant 308 du règlement attaqué, la Commission a écarté les allégations quant à l’absence de fiabilité des données D & B qui serait démontrée par le fait que les montants des bénéfices réalisés au niveau du groupe Topy seraient similaires à ceux réalisés par Topy Thaïland. En effet, la Commission a expliqué que le bénéfice consolidé du groupe Topy était le résultat des recettes et des coûts du groupe par rapport aux parties extérieures au groupe et les bénéfices intragroupes étaient
éliminés des comptes au niveau du groupe. Une telle similarité ne serait donc pas inhabituelle.

101 Enfin, selon le considérant 309 du règlement attaqué, les divergences entre les données d’Orbis et de D & B peuvent résulter d’une description différente de l’élément financier collecté par la base de données ou d’une différence de portée du rapport (entreprise ou groupe) et ne remettent donc pas en cause la fiabilité des données. Dès lors, la Commission a rejeté l’argument de la CCCME selon lequel les données en question n’étaient fiables que dans la mesure où elles étaient accessibles au
public. Cela étant, la Commission a expliqué qu’elle utilisait des pourcentages et non des chiffres absolus. Ces données offriraient une approximation plus précise et plus raisonnable.

102 En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence que la légalité d’un règlement instituant des droits antidumping doit s’apprécier au regard des règles de droit et, notamment, des dispositions du règlement de base, et non sur le fondement de la prétendue pratique décisionnelle antérieure des institutions de l’Union [arrêt du 18 octobre 2016, Crown Equipment (Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil, T‑351/13, non publié, EU:T:2016:616, point 107]. Ainsi, le fait que la Commission ait pu
utiliser d’autres bases de données par le passé ne saurait remettre en cause le choix des données D & B pour l’enquête en cause.

103 Selon l’économie du règlement de base, la construction de la valeur normale vise à déterminer le prix de vente d’un produit tel qu’il serait si ce produit était vendu dans son pays d’origine ou d’exportation et, par conséquent, ce sont les frais afférents aux ventes sur le marché intérieur qui doivent être pris en considération pour calculer la valeur construite. Or, dans le cadre de la construction de la valeur normale, les institutions ne sont pas tenues de prendre en considération les frais
réels de la société examinée, mais une estimation raisonnable des frais VAG que cette société devrait supporter si elle commercialisait le produit en cause en quantité suffisante dans son État d’origine (arrêt du 18 mars 2009, Shanghai Excell M&E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, T‑299/05, EU:T:2009:72, point 258).

104 Ainsi, il convient de considérer que, en l’espèce, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en fondant le calcul d’un montant non faussé et raisonnable des frais VAG et des bénéfices des producteurs thaïlandais sur les données D & B. Les requérantes n’apportent aucune preuve mettant en cause la fiabilité des bases de données en question.

105 Partant, le grief des requérantes quant à l’existence d’une erreur dans le calcul des frais VAG et des bénéfices qui n’auraient pas été établis conformément à l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), quatrième alinéa, du règlement de base doit être écarté.

3) Sur l’exigence de modifications et d’ajustements

106 Les requérantes soutiennent que la Commission aurait dû procéder à des ajustements des données des producteurs thaïlandais, afin que ces dernières correspondent aux coûts d’un producteur chinois. À cet égard, elles font valoir que, selon l’organe d’appel de l’OMC, « quelles que soient les informations qu’elle utilise, l’autorité chargée de l’enquête doit s’assurer qu’elles sont utilisées pour établir le coût de production dans le pays d’origine ».

107 La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

108 Tout d’abord, il convient de noter que les requérantes ne soulèvent pas la violation d’une disposition particulière du règlement de base, mais font référence à la pratique décisionnelle de l’organe d’appel de l’OMC.

109 À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, compte tenu de leur nature et de leur économie, les accords de l’OMC ne figurent pas, en principe, parmi les normes au regard desquelles le juge de l’Union contrôle la légalité des actes des institutions de l’Union en vertu de l’article 263, premier alinéa, TFUE. Toutefois, dans l’hypothèse où l’Union aurait entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC, ou dans l’hypothèse où l’acte de l’Union renverrait
expressément à des dispositions précises des accords de l’OMC, il appartient au juge de l’Union de contrôler la légalité de l’acte de l’Union en cause au regard des règles de l’OMC (arrêt du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 95).

110 Ensuite, il convient de rappeler que, par le règlement 2017/2321 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2017, modifiant le règlement 2016/1036 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne et le règlement (UE) 2016/1037 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2017, L 338, p. 1), le législateur de l’Union a
modifié l’article 2 du règlement de base afin d’y insérer le paragraphe 6 bis et de modifier le paragraphe 7.

111 Selon la jurisprudence, l’article 2, paragraphe 7, du règlement de base, dans sa version antérieure à celle résultant du règlement 2017/2321, était l’expression de la volonté du législateur de l’Union d’adopter, dans ce domaine, une approche propre à l’ordre juridique de l’Union en instituant un régime spécial de règles détaillées relatives au calcul de la valeur normale à l’égard des importations en provenance de pays n’ayant pas une économie de marché. Dès lors, il a été jugé que cette
disposition ne pouvait pas être considérée comme une mesure destinée à assurer dans l’ordre juridique de l’Union l’exécution d’une obligation particulière assumée dans le cadre des accords de l’OMC, qui ne prévoyaient pas de règles concernant le calcul de la valeur normale pour les pays n’ayant pas une économie de marché. Le Tribunal a précisé que, dès lors que cette disposition établissait des règles concernant le calcul de la valeur normale qui ne trouvaient pas de correspondance dans les
accords de l’OMC, la Commission n’était pas tenue de l’interpréter conformément aux obligations de l’Union dans le cadre de l’OMC. En effet, si tel avait été le cas, elle se serait trouvée privée du pouvoir d’appréciation que le législateur avait entendu lui accorder (voir arrêt du 21 février 2024, Sinopec Chongqing SVW Chemical e.a./Commission, T‑762/20, sous pourvoi, EU:T:2024:113, point 41 et jurisprudence citée).

112 Ces principes sont applicables, par analogie, à l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base. En effet, cette disposition institue un régime spécial fixant les règles de détermination de la valeur normale en cas d’exportations provenant de pays dont il est établi que leur marché intérieur présente des distorsions significatives, telles que définies par cette même disposition. Or, le droit de l’OMC ne contient pas de règles spécifiques destinées au calcul de la valeur normale dans de
telles situations.

113 Il s’ensuit que l’article 2, paragraphe 6 bis, ne peut pas être considéré comme une mesure destinée à assurer dans l’ordre juridique de l’Union l’exécution d’une obligation particulière résultant des accords de l’OMC au sens de la jurisprudence citée au point 111 ci‑dessus. Partant, les requérantes ne sauraient invoquer l’obligation d’interprétation conforme de cet article au regard des règles de l’OMC (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2024, Sinopec Chongqing SVW Chemical e.a./Commission,
T‑762/20, sous pourvoi, EU:T:2024:113, point 49).

114 Cela étant, il importe de relever que, en tout état de cause, les requérantes se contentent, dans le cadre de ce grief, de répéter leurs arguments quant à la présence du fil machine japonais dans les importations thaïlandaises qui aurait dû être exclu de l’enquête et à la non-correspondance des données collectées à celles des trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. Les requérantes n’invoquent pas, à l’égard de la prétendue obligation d’ajustement des coûts de
production, de disposition précise du règlement de base qui serait violée.

115 Ainsi, force est de constater que l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base se réfère à un « montant raisonnable et non faussé » qui devrait être déterminé par la Commission et que les requérantes n’ont pas apporté la preuve que ce montant était faussé ou déraisonnable.

116 Eu égard aux considérations qui précèdent et aux conclusions figurant aux points 78 et 105 ci‑dessus, il y a lieu de rejeter dans son intégralité la première branche du premier moyen soulevé par les requérantes, portant sur l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commise la Commission en sélectionnant la Thaïlande en tant que pays représentatif approprié aux fins du calcul de la valeur normale du produit soumis à l’enquête, dans les conditions prévues à l’article 2, paragraphe 6 bis, du
règlement de base.

b)   Sur la deuxième branche, tirée du fait que la Malaisie était le pays représentatif le plus approprié

117 En substance, les requérantes font valoir que la Malaisie était le pays représentatif approprié auquel la Commission aurait dû se référer afin de calculer la valeur normale, au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base. Ainsi, la Commission n’aurait pas pris en compte tous les éléments de preuve qu’elle avait à sa disposition, puisque, sur la base de plusieurs facteurs, la Malaisie aurait constitué une meilleure source que la Thaïlande.

118 À cet égard, en premier lieu, les requérantes contestent le fait que, dans le cadre de l’examen des données qu’elle avait à sa disposition, la Commission a fondé son appréciation sur le volume des importations sous le code SH 7227.90 (fils en aciers alliés) au lieu des prix à l’importation, qui seraient plus représentatifs et fiables que ceux concernant la Thaïlande. D’ailleurs, la Commission ne justifierait pas pourquoi les importations malaisiennes étaient moins fiables, puisque les prix des
importations malaisiennes auraient été comparables aux coûts des producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, contrairement aux prix à l’importation thaïlandais.

119 Les requérantes considèrent également que la Commission ne devait pas se limiter aux importations sous le code SH 7227.90, mais aurait dû prendre en compte les importations malaisiennes dans leur ensemble. En effet, en prenant en compte également les trois autres matières principales (sous les codes SH 7213.91, SH 7213.99 et SH 722830), 70 % des importations malaisiennes de fil machine proviendraient de pays autres que la Chine et des pays non membres de l’OMC. En revanche, seulement 54 % des
importations thaïlandaises des quatre codes SH proviendraient de sources autres que la Chine et des pays non membres de l’OMC. Par ailleurs, si la Commission considérait que le prix des importations malaisiennes pour le code SH 7227.90 n’était pas représentatif ou fiable, il aurait été possible de se fonder sur un pays donné et de choisir ensuite une autre valeur de référence pour un élément particulier, comme une valeur de référence internationale, ainsi que la Commission avait pu le faire dans
le cadre d’autres enquêtes.

120 En second lieu, les requérantes font valoir que la Malaisie comptait suffisamment d’entreprises sur lesquelles la Commission pouvait s’appuyer, dans la mesure où Ningbo Jinding avait fourni les états financiers vérifiés de onze producteurs malaisiens d’éléments de fixation, et que la Commission aurait pu s’appuyer sur au moins trois d’entre eux.

121 La Commission estime qu’il convient de rejeter l’argumentation des requérantes.

122 D’emblée, il convient de rappeler que, si les requérantes n’ont pas apporté la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans le choix de la Thaïlande en tant que pays représentatif approprié, le Tribunal doit vérifier, conformément à la jurisprudence citée au point 43 ci‑dessus, si la Commission n’a pas omis de prendre en considération des éléments essentiels ou pertinents en vue d’établir le caractère adéquat du pays choisi et si les éléments du dossier ont été examinés
avec toute la diligence requise, de sorte que la valeur normale du produit concerné ait été déterminée d’une manière appropriée et non déraisonnable. Ainsi, les arguments des requérantes dans le cadre de cette deuxième branche ne devraient être examinés que dans la mesure où la Commission aurait eu le choix entre plusieurs pays « représentatifs appropriés », parmi lesquels elle aurait dû éventuellement préférer celui qui appliquait un niveau adéquat de protection sociale et environnementale
conformément aux critères établis par l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base.

123 Cela étant, il convient de constater que, selon le considérant 224 du règlement attaqué, la Commission a estimé que plus de 75 % des importations de fils en aciers alliés (SH 7227.90) en Malaisie provenaient de la Chine et de pays non membres de l’OMC et que les fils en aciers alliés représentaient plus de 45 % du coût de production des éléments de fixation. Sur cette base, la Commission a estimé que la valeur à l’importation des fils en aciers alliés n’était pas représentative par rapport aux
autres pays représentatifs disponibles et elle a conclu que la Malaisie disposait d’un ensemble de données aisément accessibles de moindre qualité pour calculer une valeur non faussée.

124 En outre, selon le considérant 235 du règlement attaqué, la Commission a observé que les importations en Malaisie sous le code SH 7227.90 de sources non faussées étaient inférieures aux volumes des importations dans d’autres pays représentatifs potentiels et que leurs prix étaient donc considérés comme moins fiables. En effet, la Commission a considéré que les importations malaisiennes étaient moins appropriées sous l’angle des prix que les importations thaïlandaises, étant donné qu’elles
subissaient les effets de la concurrence avec les importations en provenance de Chine et de pays non membres de l’OMC, qui représentaient ensemble plus de 80 % de l’ensemble des importations de cette matière première en Malaisie.

125 De plus, il ressortirait des données des producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon que la part des trois autres matières premières principales était d’au moins 10 % inférieure à celle du fil en aciers alliés. La Commission a donc également pris en compte le fait que le poids relatif des importations de ces autres matières premières en provenance de Chine et des autres pays non membres de l’OMC était plus important en Malaisie qu’en Thaïlande, sauf pour l’une d’entre elles (SH
7213.91). La Commission a donc écarté l’argument de certaines parties intéressées tiré du fait que la Malaisie était un pays représentatif approprié.

126 Les arguments des requérantes ne sauraient remettre en cause ce choix de la Commission.

127 En premier lieu, il ressort du règlement attaqué que, si la Commission a estimé qu’elle ne disposait pas de données suffisantes ou adéquates à l’égard de la Malaisie, ce pays a en réalité été écarté d’abord en raison du fait que les importations enregistrées du produit concerné ne pouvaient pas être prises en considération pour le calcul de la valeur normale, puisqu’elles n’étaient pas déterminées par le libre jeu des forces du marché. En effet, la Commission a expliqué qu’elle s’était d’abord
référée aux prix pour déterminer la représentativité du pays concerné et que les proportions d’importations en provenance de Chine et de pays non membres de l’OMC indiquaient que les prix du volume restant subiraient eux aussi les effets de la concurrence avec les importations en provenance de Chine et des pays non membres de l’OMC qui représenteraient plus de 80 % de l’ensemble de cette matière première en Malaisie.

128 En outre, s’agissant de l’importance de la part des matières premières relevant des quatre codes, la Commission a expliqué que le code SH 7227.90 était le facteur de production le plus important, puisqu’il représentait plus de 50 % des coûts des matières premières utilisées et plus de 35 % du coût de fabrication des éléments de fixation, soit plus que les autres matières premières combinées. Cela étant, les requérantes admettent que les volumes des importations thaïlandaises sous le code
SH 7227.90 que la Commission pouvait utiliser étaient plus importants que ceux pour la Malaisie.

129 Par ailleurs, l’argument des requérantes quant au volume identique d’importations qui aurait été suffisant dans le cadre d’une autre enquête est dépourvu de pertinence dans le cadre de l’examen du règlement attaqué en l’espèce. D’une part, selon la jurisprudence, la légalité d’un règlement instituant des droits antidumping doit s’apprécier au regard des règles de droit et, notamment, des dispositions du règlement de base, et non sur le fondement de la prétendue pratique décisionnelle antérieure
des institutions de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2016, Crown Equipment (Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil, T‑351/13, non publié, EU:T:2016:616, point 107 ; voir également, en ce sens, arrêts du 10 février 2021, RFA International/Commission, C‑56/19 P, EU:C:2021:102, point 79, et du 4 octobre 2006, Moser Baer India/Conseil, T‑300/03, EU:T:2006:289 point 45]. D’autre part, l’importance du volume importé d’un produit varie en fonction du produit en question.

130 En deuxième lieu, quant à la question de l’indisponibilité de données sur les producteurs malaisiens que les requérantes contestent, puisque Ningbo Jinding aurait communiqué des données pertinentes et qualitatives de producteurs malaisiens à la Commission, il importe de constater, premièrement, que Ningbo Jinding a fourni les comptes financiers certifiés d’un producteur malaisien le 5 janvier 2021, c’est-à-dire avant la première note, dans ses observations portant sur les codes SH choisis par la
Commission où elle a soutenu que tant la Thaïlande que la Malaisie constituaient des pays représentatifs appropriés. Or, selon le considérant 237 du règlement attaqué, que les requérantes ne contestent pas, le document produit par ce producteur malaisien a été jugé inapproprié, puisque le groupe auquel appartenait la société comprenait d’autres activités que la production d’éléments de fixation en Malaisie.

131 Deuxièmement, il ressort du considérant 294 du règlement attaqué que Ningbo Jinding a fourni des données portant sur les comptes financiers vérifiés de onze producteurs d’éléments de fixation à la suite de la communication des conclusions définitives, à savoir, ainsi que le fait observer la Commission, huit mois après avoir été demandées dans la deuxième note. Cette communication a donc été tardive et n’a pas été prise en considération dans le cadre de l’examen de la pertinence du choix du pays
représentatif approprié au moment de l’enquête.

132 Il résulte de ce qui précède que les requérantes n’ont pas apporté la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission lorsque cette dernière a considéré que la Malaisie ne pouvait pas être retenue comme un pays représentatif approprié au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base, dans le cadre de l’enquête faisant l’objet du présent recours.

c)   Sur le calcul du fret intérieur, des consommables et des frais généraux aux fins de la détermination de la valeur normale

133 Afin de prendre en compte l’ensemble de coûts associés à la production du produit concerné, la Commission a reconstitué le coût des matières premières sur la base des prix, tels qu’ils auraient été disponibles pour un producteur dans le pays représentatif approprié, à savoir la Thaïlande.

134 Dans le cadre de la troisième branche du premier moyen, en premier lieu, les requérantes font valoir que la Commission a calculé de façon artificielle les coûts de transport des matières premières, les consommables, qui sont des matières premières mineures consommées dans le processus de production, et les frais généraux et que ceux‑ci n’étaient pas « correspondants » à ceux des producteurs chinois en violation de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base. En effet, la
Commission aurait augmenté les coûts de transport en utilisant le même coefficient que celui utilisé pour augmenter le coût de la matière première en question. Or, cette valeur de référence se rapporterait à cette matière première en Thaïlande et n’aurait aucune conséquence sur les coûts de transport. Le transport serait un service dont le coût ne fluctuerait pas vers le haut ou vers le bas en fonction de la hausse ou de la baisse de la valeur de la matière première transportée. Dans tous les
cas, le même pourcentage ne devrait pas être appliqué. Cette méthode ne tiendrait pas compte d’éléments factuels concrets, tels que la distance de transport par exemple.

135 De plus, Ningbo Jinding aurait communiqué à la Commission une valeur de référence appropriée pour la Thaïlande, à savoir le coût de fret unitaire par kilogramme et par kilomètre en Thaïlande, sur la base du rapport « Doing Business 2020 – Thailand ». La Commission aurait donc eu à sa disposition une valeur de référence plus appropriée que le rapport artificiel sur lequel elle s’est fondée.

136 En deuxième lieu, les requérantes estiment que les mêmes critiques s’appliquent aux calculs des consommables et des frais généraux dans la mesure où la Commission a calculé ces valeurs par rapport aux coûts recalculés des matières premières, en les augmentant sur la base d’une valeur de référence n’ayant aucun rapport avec eux. Cependant, les matières consommables ne seraient pas des matières premières et les frais généraux engloberaient des éléments, tels que les loyers, les réparations,
l’amortissement. Ces coûts ne seraient pas corrélés aux coûts des matières premières.

137 Par ailleurs, la Commission n’aurait pas informé les parties intéressées de la source qu’elle entendait utiliser aux fins de déterminer les coûts de transport, en violation de son obligation en vertu de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base. En effet, ni la première note au dossier sur les facteurs de production ni la seconde ne contiennent des informations à ce sujet.

138 La Commission fait valoir qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

139 En premier lieu, selon le considérant 256 du règlement attaqué, la Commission a exprimé le coût du transport supporté par les producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon pour l’approvisionnement en matières premières en pourcentage du coût réel de ces matières premières et a ensuite appliqué le même pourcentage au coût non faussé des mêmes matières premières en Thaïlande afin d’obtenir un coût de transport non faussé. La Commission a considéré que, dans le cadre de l’enquête, le
rapport entre les coûts des matières premières et les coûts de transport déclarés du producteur-exportateur chinois pouvait être raisonnablement utilisé pour estimer les coûts non faussés des matières premières lorsqu’elles étaient livrées à l’usine de l’entreprise.

140 En effet, il ressort des considérants 327 et 328 du règlement attaqué que la Commission a estimé que la valeur normale au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement attaqué devait correspondre au prix qu’un producteur d’éléments de fixation paierait en Thaïlande pour une matière première livrée à l’entrée de l’usine. Ainsi, si les coûts de transport international ou les droits à l’importation n’étaient pas ajoutés, la valeur de référence qui en résulterait ne refléterait pas le
prix non faussé sur le marché thaïlandais, mais uniquement le prix moyen établi sur une base coût, assurance et fret (CIF) dans les pays exportant les matières premières en question.

141 La Commission a ajouté que, en l’absence de toute valeur de référence pour les coûts de transport (par entreprise, par type de matière première, par voie d’acheminement, etc.), elle avait utilisé le rapport entre le coût du transport et des matières premières des producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. Ce rapport est appliqué à la valeur de référence de la matière première, qui est par conséquent multipliée par la quantité de matières premières consommées par le
producteur‑exportateur. Cette méthode refléterait la structure des coûts du producteur‑exportateur, étant donné que le rapport entre le coût du transport et le coût des matières premières est maintenu et appliqué à la valeur de référence non faussée.

142 Pour parvenir au total non faussé des coûts de production, la Commission a ajouté les frais généraux de fabrication. Ces derniers, supportés par les producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, ont été majorés des coûts des matières premières mineures et des consommables, puis exprimés en pourcentage des coûts de fabrication effectivement supportés par chacun des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon. Ce pourcentage a été appliqué aux coûts de fabrication non
faussés.

143 D’emblée, il convient de rappeler que la Commission ne pouvait pas se fonder sur les prix payés par les producteurs‑exportateurs chinois du fait de l’existence dans ce pays de distorsions significatives. Il ressort des considérants 187 et suivants du règlement attaqué que la Commission a constaté l’existence de distorsions significatives du fait de l’intervention des pouvoirs publics chinois dans le secteur de l’acier, affectant ainsi les prix ou les coûts du produit concerné, dont les coûts des
matières premières.

144 L’article 2, paragraphe 6 bis, sous b), du règlement de base définit la notion de « distorsions significatives » comme les « distorsions qui se produisent lorsque les prix ou les coûts déclarés, y compris le coût des matières premières et de l’énergie, ne sont pas déterminés par le libre jeu des forces du marché en raison d’une intervention étatique importante » et comporte une liste indicative de facteurs qui peuvent être pris en compte dans l’analyse de l’existence de telles distorsions. Les
requérantes ne contestent pas, dans le cadre du présent recours, les appréciations de la Commission quant à l’existence de distorsions significatives en Chine.

145 À cet égard, il convient de relever que le large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union dans le domaine des mesures de défense commerciale en raison de la complexité des situations économiques et politiques qu’elles doivent examiner porte également sur la détermination de l’existence de distorsions significatives au sens de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous b), du règlement de base. Il en va de même des situations de fait, d’ordres juridique et politique, qui se
manifestent dans le pays concerné et que les institutions de l’Union doivent évaluer pour déterminer si un exportateur agit dans les conditions du marché sans intervention significative de l’État (voir arrêt du 21 juin 2023, Guangdong Haomei New Materials et Guangdong King Metal Light Alloy Technology/Commission, T‑326/21, EU:T:2023:347, point 78 et jurisprudence citée).

146 Il en résulte que, conformément à la jurisprudence citée au point 39 ci‑dessus, c’est aux requérantes qu’il incombe d’apporter la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans le calcul de la valeur normale du produit concerné par l’enquête et, notamment, dans le calcul des frais liés au fret intérieur, aux consommables et aux frais généraux.

147 Comme l’a relevé la Commission à juste titre, les requérantes n’ont contesté ni pendant l’enquête ni dans leurs écritures devant le Tribunal que le coût de transport supporté par les producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon pour l’approvisionnement en matières premières, les consommables et les frais généraux étaient affectés par des distorsions significatives.

148 Il s’ensuit que les coûts des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon ne peuvent pas servir de référence pour le calcul des frais accessoires. La Commission a expliqué que, lorsque des valeurs de référence appropriées n’étaient pas disponibles, elle était tenue de les établir par rapport au groupe de coûts auquel appartenaient les coûts en question. Par conséquent, une fois les coûts non faussés des matières premières ou de production établis, la Commission a appliqué la valeur de
référence afin d’estimer le coût non faussé en question, conformément à la structure des coûts du producteur‑exportateur. Ainsi, si, par exemple, le fret intérieur représentait 1 % du total des coûts des matières premières, tels qu’ils avaient été indiqués dans les comptes d’un producteur‑exportateur chinois, il représenterait toujours 1 % des coûts des matières premières dans la valeur normale ainsi construite par la Commission, conformément à l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du
règlement de base.

149 Par ailleurs, la Commission a écarté la valeur de référence fournie par Ningbo Jinding, dans la mesure où elle ne disposait pas d’informations fiables sur la distance en kilomètres. De plus, les quatre principales matières premières étaient fournies à Ningbo Jinding par des fournisseurs différents, qui provenaient donc de régions différentes de Chine, alors que les requérantes avaient suggéré d’utiliser une seule distance qui était celle qui était la plus proche du port. De surcroît, la valeur
de référence n’a pas pu être recoupée avec d’autres données, puisqu’elle a été fournie après l’information finale. Elle a donc été rejetée.

150 En deuxième lieu, il convient de constater que les requérantes n’ont pas fourni de valeur de référence appropriée pour le calcul des consommables et des frais généraux.

151 Par ailleurs, il doit être rappelé que la Commission jouit d’une large marge d’appréciation dans l’analyse des données (arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 180).

152 Ainsi, en l’absence de données plus pertinentes et fiables que la Commission pouvait utiliser pour le calcul du fret intérieur, des consommables et des frais généraux, celle-ci a été tenue de construire ces coûts en tenant compte de la structure des producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. D’ailleurs, il convient de constater à cet égard que les requérantes ne contestent pas, en soi, que la valeur normale du produit calculée sur la base des producteurs thaïlandais devait
contenir ces coûts liés aux matières premières.

153 En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence que, en l’absence de données accessibles plus fiables, des données obtenues après un ajustement d’autres données peuvent constituer des éléments de preuve positifs, à condition, d’une part, que ces autres données constituent elles-mêmes de tels éléments de preuve positifs et, d’autre part, que les ajustements en cause soient opérés sur la base d’hypothèses raisonnables, de sorte que le résultat de ces ajustements soit plausible (arrêt du
21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 125).

154 Ainsi, en l’absence de données plus fiables, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, calculer le coût du fret intérieur, des consommables et des autres frais généraux en appliquant un pourcentage sur le coût des matières premières nécessaires à la fabrication du produit concerné, tout en respectant la structure des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon.

155 Il résulte des considérations qui précèdent que les requérantes n’ont pas apporté la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans le calcul du fret intérieur, des consommables et des autres frais généraux. Partant, il convient de rejeter la troisième branche du premier moyen.

d)   Sur le calcul du coût horaire de la main-d’œuvre

156 Les requérantes soutiennent que l’hypothèse de la Commission selon laquelle un employé thaïlandais travaillait en moyenne 40 heures par semaine est erronée et ne repose sur aucune base factuelle, en violation de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base. De plus, les rapports trimestriels de l’Office national de statistique thaïlandais montreraient que le pourcentage d’employés travaillant entre 40 et 49 heures, ou plus de 50 heures, chaque trimestre est très élevé, pour
chaque trimestre de la période d’enquête. Les parties intéressées auraient indiqué à la Commission que la législation thaïlandaise applicable prévoyait un maximum de quarante-huit heures de travail hebdomadaire.

157 La Commission fait valoir qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

158 La main-d’œuvre est l’un des facteurs de production utilisés pour construire la valeur normale sur le fondement de l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base.

159 Selon le considérant 314 du règlement attaqué, pour calculer le coût horaire de la main-d’œuvre, la Commission a divisé le coût mensuel de la main-d’œuvre dans le pays représentatif par quatre semaines, puis divisé chaque semaine par quarante heures de travail, soit la durée normale du travail hebdomadaire (huit heures par jour multipliées par cinq jours ouvrés). Selon les informations qu’elle avait à sa disposition, 67 % des salariés du secteur manufacturier de Thaïlande travaillaient entre
quarante et quarante-neuf heures par semaine, la limite légale étant de quarante-huit heures.

160 La Commission défend son choix en soutenant qu’il n’y a aucune preuve que la valeur correcte était plutôt quarante-huit heures par semaine.

161 À cet égard, il convient de constater que les requérantes n’ont pas prouvé, par des éléments concrets, pendant l’enquête ou devant le Tribunal, que la fourchette de quarante à quarante-neuf heures de travail hebdomadaire était erronée. Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 59 ci‑dessus, si les requérantes souhaitent contester les appréciations complexes de la Commission dans le cadre du calcul de la valeur normale, il leur incombe d’apporter des preuves concrètes démontrant
l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans les éléments pris en compte aux fins dudit calcul. Les requérantes allèguent que les heures de travail hebdomadaires sont en réalité plus élevées en Thaïlande, sans toutefois se fonder sur des preuves concrètes.

162 Il s’ensuit que les requérantes n’ont pas apporté la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commise la Commission en retenant la valeur de quarante heures par semaine de travail en Thaïlande, afin de calculer le coût de la main-d’œuvre associé à la production du produit concerné.

163 La quatrième branche du premier moyen doit ainsi être rejetée.

e)   Sur l’application de droits à l’importation sur les matières premières

164 Les requérantes font valoir que, en ajoutant des droits à l’importation au prix CIF moyen, tel que cela est indiqué dans l’Atlas mondial du commerce (GTA), la Commission a violé l’article 2, paragraphe 6 bis, sous a), du règlement de base, puisque les producteurs-exportateurs chinois s’approvisionneraient exclusivement sur le marché chinois pour les matières premières. Dès lors, les coûts ainsi calculés ne seraient pas correspondants.

165 De plus, les requérantes arguent que la Commission avait à sa disposition le prix intérieur thaïlandais des principales matières premières. En effet, les données communiquées par les parties intéressées étaient fondées sur des données relatives aux ventes de fil machine réalisées en Thaïlande par Tata Thaïland pendant la période d’enquête, telles qu’elles sont présentées dans son rapport annuel vérifié.

166 La Commission soutient qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

167 À cet égard, il ressort du considérant 258 du règlement attaqué que la Commission a considéré que, pour déterminer la valeur normale du produit concerné, devaient entrer dans le calcul les coûts qu’un producteur thaïlandais paierait pour une matière première livrée à l’entrée de l’usine. Ainsi, si les droits à l’importation n’étaient pas ajoutés au prix CIF moyen, la valeur de référence qui en résulterait ne refléterait pas le prix non faussé sur le marché thaïlandais.

168 En effet, premièrement, dans la mesure où la Commission était tenue de calculer la valeur normale du produit concerné, telle qu’elle serait déterminée pour un producteur du pays représentatif approprié, c’est à juste titre qu’elle a considéré comme nécessaire de prendre en compte, dans ce calcul, tous les coûts associés à la production du produit concerné, et notamment les coûts afférents à l’approvisionnement des matières premières pour les producteurs thaïlandais.

169 Ainsi, lorsque la valeur normale est construite sur la base des prix et des coûts d’un pays autre que le pays examiné, l’ensemble des données relatives à ce marché doit être pris en compte pour la détermination de la valeur normale (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2018, Shanxi Taigang Stainless Steel/Commission, T‑675/15, non publié, EU:T:2018:209, point 61 et jurisprudence citée).

170 Il s’ensuit que l’argument des requérantes selon lequel les producteurs‑exportateurs chinois s’approvisionnaient exclusivement sur le marché interne chinois n’est pas pertinent.

171 Deuxièmement, ainsi que l’a constaté la Commission, sans être contredite par les requérantes sur ce point dans le cadre du présent recours, les prix internes chinois étaient influencés fortement par une intervention des pouvoirs publics, de sorte qu’ils ne correspondaient pas au libre jeu du marché.

172 Troisièmement, les requérantes admettent que les données communiquées à la Commission concernaient un seul producteur, à savoir Tata Thaïland. À cet égard, la Commission a relevé qu’aucune explication n’avait été donnée quant à la manière dont ces données avaient été obtenues, aux matières premières exactes qu’elles concernaient et à la période qu’elles couvraient et que, en tout état de cause, les données d’un seul producteur n’étaient pas nécessairement considérées comme représentatives.

173 Quatrièmement, quant à la méthode alternative proposée par les requérantes visant à ce que la Commission se limite aux prix intérieurs thaïlandais et ne se fonde pas sur les prix d’importation, il convient de relever, que la Commission a expliqué que les importations étaient concurrentielles sur les prix avec la production nationale, mais reflétaient également les coûts des matières premières associés par exemple au transport, tels qu’ils avaient été identifiés par les producteurs‑exportateurs
eux-mêmes, et qu’elles constituaient donc un ensemble de données plus pertinent pour le calcul non seulement du prix des matières premières, mais également des coûts accessoires à la fabrication du produit concerné. De plus, la Commission a expliqué que les données portant sur les prix intérieurs thaïlandais qu’elle avait à sa disposition ne concernaient qu’un seul fournisseur et qu’elles n’avaient donc pas été considérées comme des données fiables.

174 Il s’ensuit que la cinquième branche du premier moyen n’est pas fondée.

175 Au vu des considérations qui précèdent, il convient de rejeter la cinquième branche du premier moyen et, par conséquent, le premier moyen dans son intégralité.

2.   Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 10, sous e), du règlement de base

176 Les requérantes allèguent une violation de l’article 2, paragraphe 10, sous e), du règlement de base, dans la mesure où la Commission n’aurait pas procédé à une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale, puisqu’elle aurait appliqué des ajustements uniquement sur les prix à l’exportation et non sur la valeur normale.

177 D’une part, les requérantes font valoir que la Commission ne disposait pas d’un décompte précis des frais VAG des cinq producteurs thaïlandais sur la base desquels elle a calculé la valeur normale et qu’elle ne savait donc pas ce que ces données des producteurs thaïlandais englobaient. D’autre part, certaines dépenses liées aux ventes, comme les coûts de transport, n’auraient pas été déduites des chiffres des frais VAG, ce qui signifierait que la Commission aurait considéré que les cinq
producteurs thaïlandais effectuaient tous leurs ventes aux conditions « départ usine », hypothèse qui ne serait pas justifiée. Pourtant, dans le questionnaire adressé aux producteurs chinois, la Commission aurait classé les frais de transport dans les frais VAG.

178 Les requérantes estiment que la Commission a rejeté à tort les preuves qu’elles avaient apportées démontrant la nécessité de l’ajustement sollicité. À défaut de données sur l’exacte répartition des coûts, la Commission aurait dû au minimum utiliser un indicateur lui donnant le pourcentage des coûts de transport. Par ailleurs, l’approche de la Commission à cet égard ne correspondrait pas à sa pratique antérieure.

179 La Commission fait valoir qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

180 Selon l’article 2 du règlement de base, après la détermination de la valeur normale, il convient de déterminer le prix à l’exportation des produits soumis à l’enquête. L’article 2, paragraphe 8, du règlement de base précise que le prix à l’exportation est le prix réellement payé ou à payer pour le produit vendu à l’exportation vers l’Union.

181 Il convient ensuite, en vertu de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, de procéder à une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale en tenant compte, le cas échéant, sous forme d’ajustements, des différences constatées dans les facteurs dont il est revendiqué et démontré qu’ils affectent les prix et, partant, leur comparabilité.

182 En particulier, selon l’article 2, paragraphe 10, sous e), du règlement de base invoqué par les requérantes, un ajustement est opéré au titre de différences dans les coûts qui ont un rapport direct avec le produit et qui ont été exposées pour acheminer le produit en question depuis les locaux de l’exportateur jusqu’au premier acheteur indépendant, lorsque ces coûts sont inclus dans les prix pratiqués. Ces coûts comprennent le transport, l’assurance, la manutention, le chargement et les coûts
accessoires.

183 Conformément à la jurisprudence, si une partie demande, au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, des ajustements destinés à rendre comparables la valeur normale et le prix à l’exportation en vue de la détermination de la marge de dumping, cette partie doit apporter la preuve que sa demande est justifiée. En effet, la charge de prouver que les ajustements spécifiques énumérés à l’article 2, paragraphe 10, sous a) à k), du règlement de base doivent être opérés incombe à ceux
qui souhaitent s’en prévaloir (voir arrêt du 23 avril 2018, Shanxi Taigang Stainless Steel/Commission, T‑675/15, non publié, EU:T:2018:209, point 71 et jurisprudence citée).

184 Il a été également précisé par la jurisprudence que le large pouvoir d’appréciation de la Commission en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elle doit examiner en matière de défense commerciale s’étend également à l’application de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base (voir, en ce sens, arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C‑191/09 P et C‑200/09 P, EU:C:2012:78, point 63). Dès lors, le
contrôle par le Tribunal des éléments de preuve sur lesquels la Commission fonde ses constatations n’empiète pas sur le large pouvoir d’appréciation de cette institution dans le domaine de la politique commerciale, mais se limite à relever si ces éléments sont de nature à étayer les conclusions tirées par la Commission (arrêt du 7 avril 2016, ArcelorMittal Tubular Products Ostrava e.a./Hubei Xinyegang Steel, C‑186/14 P et C‑193/14 P, EU:C:2016:209, point 35).

185 Il s’ensuit que, en l’espèce, c’est aux requérantes qu’il appartenait, en application de cette jurisprudence, de démontrer la nécessité de l’ajustement sollicité à l’appui de preuves qu’elles auraient apportées pendant l’enquête.

186 Il ressort du considérant 279 du règlement attaqué que la Commission a procédé à des ajustements du prix à l’exportation des producteurs‑exportateurs chinois pour la manutention, le transport, l’assurance, l’emballage, le coût du crédit et les frais bancaires pour arriver aux conditions « départ usine ».

187 Cependant, la Commission n’a procédé à aucun ajustement de la valeur normale, étant donné que cette dernière avait déjà été calculée sur une base « départ usine », conformément à l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base.

188 À cet égard, il convient de relever que si la pratique d’ajustements peut s’avérer nécessaire, en vertu de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, pour tenir compte des différences existant entre le prix à l’exportation et la valeur normale affectant leur comparabilité, de telles déductions ne sauraient être pratiquées sur une valeur qui a été construite et qui, partant, n’est pas réelle. En effet, cette valeur ne se voit pas affectée en principe d’éléments pouvant nuire à sa
comparabilité, car elle a été artificiellement déterminée (voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 2009, Shanghai Excell M&E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, T‑299/05, EU:T:2009:72, point 266).

189 Au demeurant, il convient de constater que, en réponse aux observations des parties intéressées, la Commission a conclu au considérant 333 du règlement attaqué que le calcul de la valeur normale par type de produit aux conditions « départ usine » incluait un montant raisonnable pour les frais VAG et qu’aucune des informations disponibles ne montrait que les frais VAG des sociétés thaïlandaises concernées incluaient les dépenses de transport relatives à la livraison aux clients.

190 Quant à la suffisance des preuves apportées par les requérantes sur l’ajustement sollicité, conformément à la jurisprudence citée au point 183 ci‑dessus, il ressort du dossier soumis au Tribunal, en premier lieu, que les requérantes font référence à la proposition alternative de Wenzhou, visant à quantifier les frais VAG sur la base des données des producteurs‑exportateurs. Toutefois, ainsi que le fait valoir la Commission à juste titre, un ajustement fondé sur la structure de coûts des
producteurs‑exportateurs est inapproprié au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, dans la mesure où ces prix ne correspondent pas à une économie de marché (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T‑650/17, EU:T:2019:644, points 74 et 75). Dès lors, cet argument doit être écarté.

191 En deuxième lieu, les requérantes ont fourni des documents qu’elles estiment susceptibles de démontrer que les frais de transport sont, dans la pratique comptable ordinaire, traités comme des frais VAG. À cet égard, premièrement, elles font référence, d’une part, au logiciel de compatibilité NetSuite d’Oracle dont il ressort que les frais VAG peuvent inclure les « frais d’expédition » et, d’autre part, à un article de la Harvard Business Review, de 1987, qui rangerait également les coûts de fret
dans la catégorie des frais VAG. En effet, selon les requérantes, cela résulterait d’une pratique habituelle en matière de comptabilité, puisque aucun autre poste comptable n’existerait pour inscrire ces frais.

192 Or, les « preuves » dont se prévalent les requérantes portent sur des éléments de comptabilité générale, et pas spécialement sur les données utilisées par la Commission dans le cadre de l’enquête en cause. Dès lors, elles ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’appréciation de la Commission quant à l’examen des données des producteurs‑exportateurs thaïlandais.

193 Deuxièmement, les requérantes présentent également en annexe à la réplique, d’une part, le rapport d’audit de Tata Thaïland mentionnant les frais de livraison et de vente ainsi que les frais bancaires, en tant que frais VAG, et, d’autre part, le rapport d’audit de Ningbo Jinding, qui traite les frais de fret d’exportation ou intérieurs et les frais divers en tant que frais VAG.

194 Or, il ressort du considérant 271 du règlement attaqué que Tata Thaïland ne fait pas partie des cinq sociétés thaïlandaises identifiées. De surcroît, le rapport d’audit de Ningbo Jinding est à cet égard inopérant, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort du point 190 ci‑dessus, la structure des coûts des producteurs‑exportateurs chinois ne peut pas servir de base à un ajustement sollicité au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base.

195 Troisièmement, il convient d’écarter, pour les mêmes raisons, l’argument des requérantes portant sur le questionnaire adressé aux producteurs‑exportateurs chinois qui avait inclus les frais de transport dans les frais VAG. En effet, la Commission a expliqué que le but dudit questionnaire était de comprendre la structure des producteurs‑exportateurs chinois. Il ne saurait donc engager la Commission sur le traitement de ces données par la suite.

196 Quatrièmement, les requérantes font valoir que, dans la mesure où la Commission ignorait ce qu’incluaient les frais VAG des cinq producteurs thaïlandais, il n’est pas raisonnable d’attendre de leur part qu’elles produisent des éléments de preuve concrets à ce sujet, eu égard à l’opacité des données D & B et au fait que ces données concernent un pays étranger. Ainsi, les requérantes admettent que leur argumentation est spéculative.

197 Cela étant, le fait que la valeur normale soit construite sur le fondement de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base et donc sur la base de données de producteurs‑exportateurs du pays représentatif approprié ne saurait assouplir la charge de la preuve découlant de la jurisprudence citée au point 183 ci‑dessus, selon laquelle il revient à la partie qui demande un ajustement au titre d’un des facteurs visés à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base de démontrer que ce facteur
est de nature à affecter les prix et, partant, leur comparabilité (voir, en ce sens, arrêt du 28 avril 2022, Changmao Biochemical Engineering/Commission, C‑666/19 P, EU:C:2022:323, point 151).

198 En conclusion, il convient de relever qu’il appartenait aux requérantes de formuler, au cours de la procédure administrative, une demande d’ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base et d’apporter des éléments de preuve, permettant d’établir la nécessité dudit ajustement afin de garantir la comparabilité des prix entre la valeur normale et les prix à l’exportation.

199 Or, il découle des considérations qui précèdent que les requérantes n’ont nullement apporté la preuve de la nécessité de l’ajustement sollicité.

200 Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

3.   Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 18 du règlement de base dans le cadre du calcul du coût de la main‑d’œuvre nécessaire à la fabrication du produit concerné

201 Par leur troisième moyen, les requérantes contestent, en substance, le calcul du coût de la main-d’œuvre nécessaire à la fabrication du produit concerné, à partir des données d’un seul des trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, à savoir Jiangsu, en violation de l’article 18, paragraphes 1 et 5, du règlement de base, ainsi que de l’article 6.8 et de l’annexe II, points 5 et 7, de l’accord antidumping.

202 En premier lieu, les requérantes font valoir que cette méthode est erronée dans la mesure où Jiangsu utilise le procédé de forgeage à froid, alors que le procédé de forgeage à chaud requérait une plus grande intensité de main-d’œuvre. En appliquant la productivité de la main-d’œuvre de Jiangsu à Ningbo Jinding, la Commission aurait formulé la conclusion déraisonnable que les employés de cette dernière travaillaient cinquante-deux semaines par an, six jours par semaine et dix-sept heures par
jour. Or, la Commission serait tenue, en vertu de l’article 18 du règlement de base, d’une part, de choisir les meilleurs renseignements disponibles afin de combler le vide laissé dans les éléments de preuve par les renseignements nécessaires manquants et, d’autre part, de vérifier les renseignements qui en résultaient par rapport à d’autres sources, notamment celles des producteurs de l’Union.

203 En deuxième lieu, s’agissant des autres données sur lesquelles la Commission aurait pu se fonder, premièrement, les requérantes font valoir que la Commission aurait pu utiliser les heures de travail standard communiquées par Ningbo Jinding et Wenzhou en temps utile. Ces producteurs ne seraient pas tenus de consigner les heures effectivement travaillées et ils ne disposeraient donc pas d’autres renseignements qu’ils auraient pu communiquer à la Commission afin de confirmer que les heures de
travail standard étaient respectées. Or, selon les requérantes, la Commission savait qu’elle pouvait s’appuyer sur les avis au personnel en ce qui concernait Ningbo Jinding, qui seraient propres aux ateliers concernés participant à la production des éléments de fixation, et sur le nombre maximal d’heures de travail autorisé par la loi chinoise en ce qui concernait Wenzhou. Ce nombre maximal d’heures de travail s’appliquerait quel que soit le secteur concerné. Par ailleurs, les requérantes
soutiennent que la Commission a pu, par le passé, s’appuyer sur des coûts standard, ce qui serait habituel en matière de défense commerciale. Elle l’aurait fait également en l’espèce, en se fondant sur les heures de travail standard pour déterminer le coût de référence thaïlandais.

204 Deuxièmement, les requérantes soutiennent que la Commission aurait pu s’appuyer sur le nombre maximal d’heures de travail fixé par le droit chinois. En effet, les avis de Ningbo Jinding au personnel indiqueraient le nombre d’heures de travail par atelier et confirmeraient que Ningbo Jinding respectait le nombre maximal d’heures de travail. À défaut de preuves indiquant le contraire, la Commission ne serait pas fondée à présumer le comportement illégal d’un producteur‑exportateur ayant coopéré.

205 Troisièmement, selon les requérantes, la Commission aurait pu s’appuyer sur les heures de travail moyennes par employé de Jiangsu. En multipliant ces heures par employé par le nombre d’employés des producteurs‑exportateurs considérés, la Commission aurait pu calculer les heures moyennes de travail par kilogramme de produit soumis à l’enquête, en évitant la distorsion résultant du procédé de production différent utilisé. De plus, cela permettrait de tenir compte du nombre effectif d’employés
communiqué par Ningbo Jinding et Wenzhou, en conformité avec l’article 18 du règlement de base.

206 La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

207 L’article 18 du règlement de base prévoit que, lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas dans les délais prévus, ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles. Ainsi, s’il est constaté qu’une partie intéressée a fourni un renseignement faux ou trompeur, ce renseignement n’est pas pris en considération et il peut
être fait usage des données disponibles.

208 Il ressort de l’article 6.8 de l’accord antidumping que, dans les cas où une partie intéressée refuse de donner accès aux renseignements nécessaires ou ne les communique pas dans un délai raisonnable, ou entrave le déroulement de l’enquête de façon notable, des déterminations préliminaires et finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données de fait disponibles. De plus, l’annexe II de l’accord antidumping contient des dispositions relatives à l’utilisation des
« meilleurs renseignements disponibles » au cours des enquêtes et précise les conditions dans lesquelles les autorités chargées de l’enquête peuvent se fier aux renseignements provenant d’une autre source que la personne concernée.

209 D’emblée, il y a lieu de rappeler que l’article 18 du règlement de base constitue la transposition en droit de l’Union du contenu de l’article 6.8 ainsi que de l’annexe II de l’accord antidumping, à la lumière desquels il doit être interprété dans la mesure du possible (voir arrêt du 22 mai 2014, Guangdong Kito Ceramics e.a./Conseil, T‑633/11, non publié, EU:T:2014:271, point 40 et jurisprudence citée).

210 Selon l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base, la possibilité de recourir aux données disponibles existe dans quatre cas de figure, à savoir, premièrement, lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires, deuxièmement, lorsqu’elle ne les fournit pas dans les délais prévus, troisièmement, lorsqu’elle fait obstacle de façon significative à l’enquête ou, quatrièmement, lorsqu’elle fournit un renseignement faux ou trompeur (arrêt du 25 octobre 2011, Transnational
Company  Kazchrome  et ENRC Marketing/Conseil, T‑192/08, EU:T:2011:619, point 268).

211 Il ressort également de la jurisprudence que les parties intéressées sont tenues de fournir aux services de la Commission les informations qui lui permettront de mener à bien l’enquête antidumping. Ainsi, des informations sont considérées comme « nécessaires », au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base, si elles sont de nature à permettre à la Commission d’établir les conclusions qui s’imposent dans le cadre de l’enquête antidumping, l’appréciation du caractère nécessaire d’une
information s’effectuant au cas par cas [arrêt du 14 décembre 2017, EBMA/Giant (China), C‑61/16 P, EU:C:2017:968, point 53].

212 La définition de la notion d’« informations nécessaires » doit tenir compte de l’objectif de l’article 18 du règlement de base. À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il incombe à la Commission, en tant qu’autorité investigatrice, d’établir l’existence d’un dumping, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les importations faisant l’objet d’un dumping et le préjudice. Toutefois, aucune disposition du règlement de base ne confère à la Commission le pouvoir de contraindre les parties
intéressées à participer à l’enquête ou à produire des renseignements, donc cette institution est tributaire de la coopération volontaire de ces parties pour lui fournir les informations nécessaires. Dans ce contexte, il découle du considérant 27 du règlement de base que le législateur de l’Union a estimé « nécessaire de prévoir que, à l’égard de parties qui ne coop[é]r[ai]ent pas d’une manière satisfaisante, d’autres renseignements p[o]uv[ai]ent être utilisés aux fins des déterminations et que
ces renseignements p[ou]v[ai]ent être moins favorables auxdites parties que dans le cas où elles auraient coopéré ». Ainsi, l’objectif de l’article 18 du règlement de base est de permettre à la Commission de poursuivre l’enquête quand bien même les parties intéressées refuseraient de coopérer ou coopéreraient de manière insuffisante. Dès lors, étant donné qu’elles sont tenues de coopérer au mieux de leurs possibilités, les parties intéressées doivent fournir toutes les informations dont elles
disposent et que les institutions estiment nécessaires afin d’établir leurs conclusions [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2017, EBMA/Giant (China), C‑61/16 P, EU:C:2017:968, points 54 à 56].

213 D’ailleurs, lorsque la Commission fonde ses conclusions sur les données disponibles, dans les situations où les données soumises sont déficientes, cette institution n’est pas tenue d’expliquer en quoi les données disponibles utilisées étaient les meilleures possibles, dès lors qu’une telle obligation ne ressort ni de l’article 18 du règlement de base ni de la jurisprudence (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 mars 2015, City Cycle Industries/Conseil, T‑413/13, non publié,
EU:T:2015:164, point 132).

214 En effet, le recours à l’article 18 du règlement de base n’est pas exclu en l’absence de comportement intentionnel (voir arrêt du 22 septembre 2021, NLMK/Commission, T‑752/16, non publié, EU:T:2021:611, point 62 et jurisprudence citée). L’ampleur des efforts déployés par une partie intéressée pour communiquer certains renseignements n’a pas nécessairement de rapport avec la qualité intrinsèque des renseignements communiqués et n’en est, de toute façon, pas le seul élément déterminant. Ainsi, si
les renseignements demandés ne sont finalement pas obtenus, la Commission est en droit de recourir aux données disponibles s’agissant desdits renseignements (voir arrêts du 19 mars 2015, City Cycle Industries/Conseil, T‑413/13, non publié, EU:T:2015:164, point 117 et jurisprudence citée, et du 22 septembre 2021, NLMK/Commission, T‑752/16, EU:T:2021:611, non publié, point 63 et jurisprudence citée).

215 À cet égard, il importe de rappeler que le contrôle par le Tribunal des éléments de preuve sur lesquels les institutions de l’Union fondent leurs constatations ne constitue pas une nouvelle appréciation des faits remplaçant celle de ces institutions. Ce contrôle n’empiète pas sur le large pouvoir d’appréciation desdites institutions dans le domaine de la politique commerciale, mais se limite à relever si ces éléments sont de nature à étayer les conclusions tirées par celles-ci (voir arrêt du
12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 59 et jurisprudence citée).

216 En l’espèce, il ressort du considérant 180 du règlement attaqué que, lors des recoupements à distance, la Commission n’a pas été en mesure de vérifier l’utilisation réelle de main‑d’œuvre pour la fabrication du produit concerné pour les trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon et qu’elle a informé ces derniers qu’elle entendait utiliser les données disponibles conformément aux dispositions de l’article 18 du règlement de base pour le calcul de l’utilisation de la main-d’œuvre.
En effet, les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon ont communiqué l’utilisation de leur main‑d’œuvre sur la base d’un nombre standard d’heures de travail effectives. Cependant, selon le considérant 260 du règlement attaqué, la Commission a pu obtenir des informations sur la différence entre les heures déclarées et les heures d’entrée et de sortie chez Jiangsu.

217 Par conséquent, sur la base des heures de travail « effectives » de Jiangsu, la Commission a calculé la productivité « effective » de cette dernière, c’est‑à‑dire le nombre de kilogrammes du produit soumis à l’enquête qu’un salarié pouvait fabriquer pendant la période de l’enquête, et l’a comparée à la productivité des deux autres producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon. La comparaison a mis en évidence une productivité accrue chez Ningbo Jinding, ce qui a remis en cause la fiabilité
du calcul qui prenait en compte les heures de travail standard en général. La Commission a ensuite établi les heures de travail moyennes effectives par kilogramme du produit soumis à l’enquête chez Jiangsu et a utilisé ces données pour les trois producteurs‑exportateurs en tant que données disponibles au sens de l’article 18 du règlement de base.

218 Il ressort également des considérants 181 et 182 du règlement attaqué que, d’une part, Ningbo Jinding avait soutenu que la Commission devait se fonder sur les heures de travail standard et, d’autre part, Wenzhou avait fait valoir que les jours de travail effectifs étaient indiqués sur les fiches de paie mensuelles et que la Commission pouvait utiliser les heures de travail journalières standard fixées par le droit du travail chinois. Cependant, au considérant 184 du règlement attaqué, la
Commission a indiqué qu’aucun élément de preuve n’avait permis de conclure que les jours de travail effectifs convertis en heures de travail correspondaient aux heures de travail consacrées au procédé de fabrication du produit concerné, étant donné qu’aucun élément de preuve n’avait été fourni concernant la base sur laquelle les heures de travail standard pour la production d’éléments de fixation avaient été établies.

219 Les requérantes font valoir une violation de l’article 18 du règlement de base et de l’article 6.8 de l’accord antidumping, étant donné que, d’une part, la Commission n’aurait pas dûment tenu compte des différences entre les procédés de fabrication des produits soumis à l’enquête et aurait erronément utilisé les chiffres fondés sur Jiangsu qui étaient déconnectés de la réalité une fois appliqués à Ningbo Jinding. D’autre part, les requérantes avancent que la Commission aurait dû tenir compte
d’autres données qu’elle avait à sa disposition afin de calculer la productivité de la main-d’œuvre.

220 Ainsi, en premier lieu, s’agissant, premièrement, de l’éventuel impact en termes de productivité du procédé de production choisi par chaque producteur‑exportateur, la Commission a expliqué au considérant 317 du règlement attaqué qu’elle n’avait pas été en mesure d’établir la différence entre les heures de travail nécessaires pour les différentes méthodes de production pour l’un quelconque des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon et que les parties intéressées n’avaient pas non
plus fourni d’éléments de preuve sur la manière dont lesdites différences devaient être estimées.

221 Interrogées à cet égard lors de l’audience, les requérantes ont confirmé, d’une part, que tant Jiangsu que Ningbo Jinding utilisaient les deux procédés de fabrication du produit concerné et, d’autre part, que, dans leurs réponses au questionnaire de la Commission, les trois producteurs‑exportateurs avaient déterminé la productivité uniquement sur la base du coût de la main-d’œuvre pour la production du produit concerné, indépendamment du procédé de production. En effet, les requérantes n’ont pas
été en mesure de déterminer comment la Commission aurait pu distinguer les deux procédés pour établir le coût de la main-d’œuvre.

222 Par ailleurs, ainsi que la Commission l’a relevé, sans être contredite par les requérantes sur ce point, aucun des trois producteurs‑exportateurs ne détenait de documentation précise définissant les exigences en matière de coût de la main-d’œuvre sur la base de la méthode de forgeage du produit.

223 Il s’ensuit que, dans la mesure où les requérantes n’ont pas été en mesure d’apporter à la Commission des données à cet égard, leur argument tiré de l’éventuelle différence entre les heures de travail nécessaires à la fabrication du produit concerné en fonction du procédé choisi de fabrication doit être rejeté.

224 Deuxièmement, les requérantes contestent le fait que la Commission ait calculé à partir des données de Jiangsu le coût de la main-d’œuvre de Ningbo Jinding, puisque cela aurait donné des résultats qui, selon elles, étaient irréalistes, à savoir que les employés de Ningbo Jinding travaillaient cinquante‑deux semaines par an, six jours par semaine et dix‑sept heures par jour.

225 Néanmoins, il ressort des observations de Ningbo Jinding sur les conclusions définitives que, pour arriver au chiffre de dix‑sept heures de travail par salarié et par jour, Ningbo Jinding a utilisé les heures de travail nécessaires pour la production du produit concerné telles que calculées sur la base des « données disponibles » utilisées par la Commission et l’a multiplié par le nombre de salariés indiqué dans le tableau C5 de la réponse au questionnaire. Il convient de constater à cet égard
que, tout d’abord, ces données n’ont pas été vérifiées par la Commission. Ensuite, les requérantes ont admis que le nombre de salariés de Ningbo Jinding avait fluctué significativement pendant l’enquête, de sorte que la Commission ne pouvait pas utiliser le nombre d’heures de travail par salarié de Jiangsu, multiplié par le nombre de salariés des deux autres producteurs-exportateurs, pour calculer le coût de la main-d’œuvre. Dès lors, le chiffre de dix‑sept heures de travail par jour n’est pas
corroboré par des éléments de preuve concrets et reste, en tout état de cause, hypothétique.

226 Enfin, ainsi que la Commission l’a relevé, il ressort de l’annexe R.3 de la réplique que Ningbo utilisait dans son calcul uniquement la « main-d’œuvre directe » nécessaire à la fabrication du produit concerné ainsi que le « personnel d’assistance dans le domaine de la R & D », alors que la Commission a précisé dans les instructions fournies avec le questionnaire antidumping que la « main-d’œuvre » utilisée pour le calcul du coût de production devait inclure à la fois la « main-d’œuvre directe et
indirecte ». Partant, il y a lieu de constater que les requérantes n’ont pas pu fournir à la Commission les données dont elle considérait avoir besoin.

227 À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, dans la mesure où les institutions dépendent de la coopération volontaire des parties pour leur fournir les informations nécessaires dans les délais impartis, les réponses de ces parties au questionnaire prévu à l’article 6, paragraphe 2, du règlement de base, ainsi que la vérification postérieure à laquelle la Commission peut procéder, sont essentielles au déroulement de la procédure antidumping. Le risque que, en cas de défaut de coopération des
entreprises visées par l’enquête, les institutions prennent en compte des données autres que celles fournies en réponse au questionnaire est inhérent à la procédure antidumping et vise à encourager la coopération loyale et diligente de ces entreprises (voir arrêt du 13 juillet 2006, Shandong Reipu Biochemicals/Conseil, T‑413/03, EU:T:2006:211, point 65 et jurisprudence citée).

228 Dès lors, la Commission a considéré, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, que, dans la mesure où tant Jiangsu que Ningbo Jinding utilisaient le procédé de forgeage à froid et à chaud, elle n’était pas tenue de vérifier si ces procédés entraînaient des différences quant aux heures de travail nécessaires à la fabrication du produit concerné par rapport à d’autres sources, et notamment les heures de travail nécessaires à la fabrication du produit concerné par les producteurs de
l’Union. À cet égard et en tout état de cause, la Commission a expliqué que les heures de travail n’étaient pas demandées dans les questionnaires des producteurs de l’Union. Ces informations n’auraient donc pas été disponibles au sens de l’article 18, paragraphe 5, du règlement de base.

229 Dans ces conditions, la Commission a pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, conclure que les données en cause présentaient des contradictions et des lacunes et qu’elle ne pouvait pas les utiliser.

230 En deuxième lieu, s’agissant de la question de savoir si la Commission a choisi les meilleures données qu’elle avait à sa disposition afin de calculer le coût de la main-d’œuvre, il y a lieu de rappeler, d’emblée, que la possibilité de calculs alternatifs ne suffit pas pour constater que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation.

231 En effet, l’objectif de l’article 18 du règlement de base est de permettre à la Commission de terminer l’enquête dans le cadre des contraintes temporaires qui lui sont imposées. Dans ces conditions, la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la nécessité de s’appuyer sur l’article 18 du règlement de base dans l’examen des données qui sont à sa disposition, en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elle doit examiner.

232 Plus précisément, s’agissant, premièrement, de la possibilité de se fonder sur les heures de travail standard, il y a lieu de relever que la Commission a pu constater, sans être contredite par les requérantes sur ce point, que les heures de travail standard ne reflétaient pas nécessairement la réalité des heures accordées spécifiquement à la fabrication du produit concerné.

233 D’ailleurs, l’argument des requérantes selon lequel les heures standard ont été utilisées dans le cadre d’autres enquêtes ne saurait prospérer. À cet égard, il ressort de la jurisprudence que la légalité d’un règlement instituant des droits antidumping doit s’apprécier au regard des règles de droit et, notamment, des dispositions du règlement de base, et non sur le fondement de la prétendue pratique décisionnelle antérieure des institutions de l’Union [arrêt du 18 octobre 2016, Crown Equipment
(Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil, T‑351/13, non publié, EU:T:2016:616, point 107 ; voir également, en ce sens, arrêts du 10 février 2021, RFA International/Commission, C‑56/19 P, EU:C:2021:102, point 79, et du 4 octobre 2006, Moser Baer India/Conseil, T‑300/03, EU:T:2006:289, point 45].

234 En effet, le règlement de base ne définit pas ce qu’est une information « nécessaire » au sens de son article 18, paragraphe 1 (arrêt du 22 mai 2014, Guangdong Kito Ceramics e.a./Conseil, T‑633/11, non publié, EU:T:2014:271, point 46).

235 Dès lors, étant donné qu’un élément d’information peut permettre d’établir des conclusions dans une enquête et être inutile dans une autre enquête, il y a lieu de considérer que l’appréciation permettant de déterminer si un élément d’information donné constitue ou non une « information nécessaire », au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base, doit être effectuée compte tenu des circonstances spécifiques de chaque enquête, et non dans l’abstrait [arrêt du 14 décembre 2017,
EBMA/Giant (China), C‑61/16 P, EU:C:2017:968, point 49].

236 En l’espèce, la Commission a considéré comme nécessaire de déterminer le nombre d’heures de travail « effectives » nécessaires à la fabrication du produit concerné. Les requérantes ne contestent pas que le nombre d’heures de travail nécessaires pour la fabrication du produit concerné est une information nécessaire à l’enquête, mais considèrent que la communication des heures standard était suffisante. Dès lors, elles n’apportent pas la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la
Commission sur le rejet du calcul du coût de la main-d’œuvre sur le fondement des heures de travail standard en Chine.

237 Pour les mêmes raisons, il convient de rejeter l’argument des requérantes selon lequel aucune obligation légale chinoise n’impose l’enregistrement des heures effectivement travaillées, dans la mesure où la Commission a considéré que les heures de travail effectives nécessaires à la fabrication du produit concerné étaient des informations nécessaires pour le calcul de la valeur normale du produit concerné.

238 Cette constatation n’est pas remise en cause par l’argument des requérantes selon lequel la Commission aurait pu utiliser les heures réglementaires afin de calculer les heures de travail nécessaires à la fabrication du produit concerné et de ne pas présumer un comportement illégal. En effet, ainsi que la Commission l’a relevé au considérant 183 du règlement attaqué, la simple existence d’une disposition de droit du travail qui délimite le nombre d’heures de travail standard qu’un travailleur
peut accomplir n’est pas une preuve suffisante pour démontrer les heures effectivement travaillées, étant donné qu’aucun élément n’a prouvé au cours de l’enquête que le droit du travail chinois était respecté ou appliqué et que les jours de travail effectifs déclarés par les producteurs‑exportateurs correspondaient à la rémunération effectivement versée au personnel.

239 Deuxièmement, quant à la possibilité proposée par les requérantes d’utiliser le nombre maximal d’heures de travail selon le droit chinois, la Commission a expliqué qu’elle avait trouvé, chez Jiangsu, des éléments de preuve sur le non‑respect de cette règle et l’absence apparente de contrôle de son respect. Ainsi, la Commission a conclu que cette valeur de référence n’était pas pertinente.

240 Troisièmement, s’agissant de la possibilité de se fonder sur le nombre d’heures de travail moyennes par employé de Jiangsu, multiplié par le nombre de salariés des deux autres producteurs‑exportateurs, ainsi que la Commission l’a expliqué, un tel calcul n’est pas approprié dans la mesure où le nombre de salariés travaillant chez Ningbo Jinding a fluctué tout au long de la période d’enquête. Ainsi, les informations fournies par ce producteur‑exportateur à cet égard ne permettaient pas à la
Commission de retenir une valeur pour le calcul de la main-d’œuvre. Par conséquent, les requérantes n’ont pas fourni à la Commission toutes les informations dont cette dernière considérait avoir besoin pour le calcul de la valeur normale du produit concerné.

241 Il ressort des considérations qui précèdent que les requérantes sont restées en défaut d’apporter des éléments suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenues dans le règlement attaqué concernant les heures effectives de travail nécessaires à la fabrication du produit concerné. Or, une telle preuve est requise afin d’établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation de nature à justifier l’annulation du règlement attaqué (voir, en ce sens, arrêt
du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T‑650/17, EU:T:2019:644, point 110).

242 Partant, eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, la Commission était en droit de considérer, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que, dans la mesure où les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon n’avaient pas pu lui fournir le nombre d’heures de travail concrètes de leurs salariés participant à l’ensemble du procédé de fabrication du produit concerné, elle pouvait se fonder sur les
données vérifiées d’un de ces trois producteurs‑exportateurs, afin de calculer la valeur normale du produit concerné.

243 Il convient donc de rejeter le troisième moyen.

4.   Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base

244 Les requérantes allèguent, en substance, que la Commission ne pouvait pas se fonder sur l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base pour établir la marge de dumping pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon, dans la mesure où, selon cette disposition, la Commission ne devait pas tenir compte des marges établies dans les circonstances visées à l’article 18 de ce règlement. La même limitation résulterait de l’article 9.4 de l’accord antidumping qui
chercherait à empêcher que les producteurs‑exportateurs, auxquels il n’a pas été demandé de coopérer à l’enquête, soient affectés par les informations manquantes ou insuffisantes produites par les producteurs‑exportateurs soumis à l’enquête.

245 La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

246 À titre liminaire, il y a lieu de relever que, dans son article 1er, paragraphe 2, le règlement attaqué a fixé les taux du droit antidumping définitif, tout d’abord, des trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon, à savoir 22,1 % pour Jiangsu, 46,1 % pour Ningbo Jinding et 48,8 % pour Wenzhou, ensuite, le taux pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon à 39,6 % et, enfin, 86,5 % pour tous les autres producteurs‑exportateurs du pays concerné. Le
taux contesté dans le cadre du quatrième moyen est celui de 39,6 %.

247 L’article 9, paragraphe 6, du règlement de base dispose ce qui suit :

« Lorsque la Commission a limité son enquête conformément à l’article 17, le droit antidumping appliqué à des importations en provenance d’exportateurs ou de producteurs qui se sont fait connaître conformément à l’article 17, mais qui n’ont pas été pris en compte dans l’enquête, ne peut excéder la marge de dumping moyenne pondérée établie pour les parties constituant l’échantillon, indépendamment de la question de savoir si la valeur normale pour ces parties est calculée sur la base de
l’article 2, paragraphes 1 à 6, ou de l’article 2, paragraphe 7, [sous] a).

Aux fins du présent paragraphe, la Commission ne tient pas compte des marges nulles et de minimis, ni des marges établies dans les circonstances visées à l’article 18. »

248 Ainsi, cette disposition s’applique uniquement dans les cas où la Commission a recours à la méthode de l’échantillonnage, c’est‑à‑dire, uniquement lorsqu’elle a limité son enquête à un groupe déterminé de producteurs‑exportateurs, conformément à l’article 17 du règlement de base, comme elle l’a fait dans la procédure faisant l’objet du présent litige.

249 Ensuite, il convient de préciser que l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base est substantiellement identique à l’article 9, paragraphe 4, de l’accord antidumping qui dispose ce qui suit :

« Lorsque les autorités auront limité leur examen conformément à la deuxième phrase du paragraphe 10 de l’article 6, un droit antidumping appliqué à des importations en provenance d’exportateurs ou de producteurs qui n’auront pas été visés par l’examen ne dépassera pas :

i) la marge moyenne pondérée de dumping établie pour les exportateurs ou producteurs choisis ou,

[…]

à condition que les autorités ne tiennent pas compte, aux fins du présent paragraphe, des marges nulles ou de minimis ni des marges établies dans les circonstances indiquées au paragraphe 8 de l’article 6. Les autorités appliqueront des droits ou des valeurs normales individuelles aux importations en provenance des exportateurs ou des producteurs qui n’auront pas été visés par l’examen et qui auront fourni les renseignements nécessaires au cours de l’enquête, ainsi qu’il est prévu à
l’alinéa 10.2 de l’article 6. »

250 La Cour a déjà jugé que le principe de droit international général de respect des engagements contractuels (pacta sunt servanda), consacré à l’article 26 de la convention de Vienne sur le droit des traités, du 23 mai 1969 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1155, p. 331), impliquait que le juge de l’Union devait, aux fins de l’interprétation et de l’application de l’accord antidumping, tenir compte de l’interprétation des différentes dispositions de cet accord que l’organe de règlement
des différends de l’OMC avait adoptée (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 32 et jurisprudence citée).

251 Selon le considérant 3 du règlement de base, afin d’assurer une application appropriée et transparente des règles de l’accord antidumping, il convient de transposer, dans toute la mesure du possible, les termes de cet accord dans le droit de l’Union. Ainsi, le juge de l’Union peut s’appuyer sur les rapports de l’organe d’appel de l’OMC afin de procéder à l’interprétation des dispositions, substantiellement identiques (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special
Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, points 33 et 34).

252 Dans son rapport relatif au différend « États-Unis – Mesures antidumping appliquées à certains produits en acier laminés à chaud en Provenance du Japon », du 24 juillet 2001 (WT/DS 184/AB/R), l’organe d’appel de l’OMC a considéré que l’article 9, paragraphe 4, de l’accord antidumping établissait une limite maximale aux autorités concernées pour la détermination du plafond pour le taux « résiduel global », à savoir, le fait que la marge fixée aux producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus
dans l’échantillon ne dépassait pas la marge moyenne pondérée des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon. L’organe d’appel a également relevé que l’article 9, paragraphe 4, établissait deux interdictions. La première empêche les autorités chargées de l’enquête de calculer le taux résiduel global en utilisant des marges nulles ou de minimis, tandis que la seconde leur interdit de calculer ce plafond en utlisant « des marges établies dans les circonstances indiquées » à l’article 6,
paragraphe 8, de l’accord.

253 Plus précisément, l’organe d’appel de l’OMC a explicitement rejeté l’affirmation selon laquelle la seconde limitation visait uniquement les marges entièrement calculées sur la base des données de fait disponibles. Ainsi, les « circonstances indiquées » à l’article 6, paragraphe 8, de l’accord antidumping sont des circonstances dans lesquelles les autorités chargées de l’enquête ont dûment recours aux données disponibles afin de pallier au manque de renseignements nécessaires dans le dossier et
ces circonstances peuvent, en fait, ne faire intervenir qu’un petit nombre de renseignements devant servir au calcul de la marge de dumping individuelle pour un exportateur ou producteur.

254 Par ailleurs, l’organe d’appel de l’OMC a considéré que cette lecture de l’article 9, paragraphe 4, de l’accord antidumping était compatible avec le but de la disposition. En effet, dans la mesure où l’article 6, paragraphe 8, de l’accord antidumping permet aux autorités de combler les lacunes du dossier résultant de l’insuffisance ou de l’absence des renseignements devant être communiqués par les exportateurs soumis à l’enquête, l’article 9, paragraphe 4, de l’accord antidumping chercherait à
empêcher que les exportateurs, à qui il n’a pas été demandé de coopérer pendant l’enquête, ne subissent un préjudice du fait des lacunes ou des insuffisances dans les renseignements communiqués par les exportateurs retenus dans l’échantillon. Cet objectif serait dès lors compromis si la marge moyenne pondérée était calculée, ne serait-ce qu’en partie, sur la base des données de faits disponibles.

255 L’organe d’appel de l’OMC a explicitement constaté que le différend qu’il devait examiner ne soulevait pas la question de savoir comment remédier à une situation telle que celle en l’espèce, où toutes les marges à l’appui desquelles la Commission devait calculer la marge moyenne pondérée pour les producteurs‑exportateurs non retenus dans l’échantillon devaient être exclues du calcul sur le fondement de la deuxième interdiction. Dès lors, après avoir constaté l’existence d’une lacune, il a
expliqué que le différend qu’il examinait n’impliquait pas le devoir de résoudre cette question.

256 En l’espèce, la Commission s’est appuyée sur ce rapport pour défendre l’existence d’une lacune dans le règlement de base, qui, dans des circonstances telles que celles de la présente affaire, lui imposait une limitation sans lui donner d’alternative. Ainsi, la Commission a fait valoir devant le Tribunal que l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base tendait à remédier à cette lacune identifiée concernant la fixation de la marge de dumping des producteurs‑exportateurs ayant coopéré non
retenus dans l’échantillon.

257 L’article 17, paragraphe 4, du règlement de base prévoit ce qui suit :

« Lorsqu’il a été décidé de procéder par échantillonnage et qu’il y a un manque de coopération de la part des parties retenues ou de certaines d’entre elles, de sorte que les résultats de l’enquête peuvent s’en trouver affectés de façon importante, un nouvel échantillon peut être choisi.

Toutefois, si le refus de coopérer persiste ou si l’on ne dispose pas du temps suffisant pour choisir un nouvel échantillon, les dispositions pertinentes de l’article 18 s’appliquent. »

258 Partant, la Commission a soutenu ne pas avoir disposé du « temps suffisant » au sens de l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base et avoir été obligée d’établir la marge moyenne pondérée pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon sur le fondement de l’article 18 du règlement de base, comme elle l’a fait pour les producteurs‑exportateurs qui n’avaient pas coopéré. La Commission a fait valoir que, si elle ne pouvait pas se fonder sur les marges des trois
producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon pour le calcul de la marge moyenne pondérée de ceux ayant coopéré, mais non retenus dans l’échantillon, cela aurait placé ces derniers dans une situation bien plus défavorable, puisque le taux antidumping applicable aurait été fixé à 86,5 %, comme pour tous les autres producteurs‑exportateurs chinois n’ayant pas participé de quelque manière que ce soit à l’enquête, au lieu de 39,6 %.

259 Dans la réplique, les requérantes ont contesté cette argumentation dans la mesure où le raisonnement fondé sur l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base serait entièrement nouveau et ne saurait justifier le règlement attaqué a posteriori. Dès lors, elles ont considéré qu’il s’agissait d’une motivation nouvelle de la Commission. À l’audience, les requérantes ont soutenu que l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base prévoyait deux étapes, à savoir, d’abord, la constatation d’un degré
de non-coopération qui était susceptible d’avoir une incidence matérielle et, ensuite, la constitution d’un nouvel échantillon. Si, à la suite de ce nouvel échantillon, il n’y avait toujours pas de coopération ou si le temps était insuffisant, les dispositions pertinentes de l’article 18 pourraient s’appliquer. Cette hypothèse ne correspondrait pas à la situation en l’espèce. Selon les requérantes, l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base répondrait à des situations de blocage, où tous
les producteurs‑exportateurs ne coopèrent pas ou ne fournissent aucune donnée.

260 Premièrement, la Commission a soutenu à l’audience que la constitution d’un nouvel échantillon constituait une possibilité, mais non une obligation, dans la mesure où l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base indique qu’elle « peut » constituer un nouvel échantillon. Deuxièmement, la Commission a reconnu que la constatation de la lacune ne l’exemptait pas de son obligation générale de respecter par ailleurs le règlement de base, comme ce serait le cas en l’espèce. Troisièmement, la
Commission a relevé que, en présence d’une lacune, elle pouvait appliquer l’article 18 du règlement de base en conformité avec les exigences dudit règlement. Quatrièmement, la Commission a également soutenu que l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base ne constituait pas nécessairement une protection pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon. En effet, dans la situation hypothétique où uniquement deux des trois marges devraient être écartées en ce
qu’elles seraient fondées sur l’article 18 du règlement de base, la Commission appliquerait la marge restante aux producteurs‑exportateurs en question, même lorsque celle‑ci serait la plus élevée des trois marges en question. Ainsi, la marge de dumping de ces producteurs pourrait augmenter si l’une des marges de l’échantillon ne pouvait pas être retenue, parce qu’elle serait fixée en utilisant des données disponibles, au sens de l’article 18 du règlement de base.

261 À la lumière des considérations qui précèdent, il convient de constater, en premier lieu, que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il ne saurait, toutefois, être exigé que la motivation
spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si elle satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, il serait excessif d’exiger une description détaillée de chacun des aspects sous‑tendant l’acte litigieux, notamment lorsque les parties
requérantes, comme c’est le cas en l’espèce, ont été étroitement impliquées dans la procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2011, Far Eastern New Century/Conseil, T‑167/07, non publié, EU:T:2011:165, point 103 et jurisprudence citée).

262 En deuxième lieu, il importe également de relever que si les données des trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon ne pouvaient pas être utilisées en raison de la limitation de l’article 9, paragraphe 6, deuxième alinéa, du règlement de base, l’échantillon de la Commission devenait non opérationnel pour l’enquête en cause.

263 En effet, ainsi qu’il résulte des points 201 à 243 ci‑dessus, la Commission a utilisé les meilleures données disponibles relatives à l’utilisation de la main-d’œuvre nécessaire à la fabrication du produit concerné, dans la mesure où les données que les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon lui avaient communiquées étaient manquantes ou incohérentes. Or, cette constatation a été faite à un moment avancé de l’enquête, puisque la Commission n’a constaté l’insuffisance des données
fournies que lors des recoupements à distance. Dans la mesure où la procédure aboutissant à l’institution d’un droit antidumping conformément au règlement de base suit une approche par étapes, la marge de dumping des producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon n’a été fixée que lors de la communication des conclusions définitives. À cet égard, il doit être rappelé que la Commission est tenue d’achever l’enquête dans des délais prescrits relativement courts, strictement limités par le
règlement de base ainsi que par l’avis d’ouverture de l’enquête en cause. Ainsi, elle ne disposait pas de temps suffisant pour choisir un nouvel échantillon, conformément à l’article 17, paragraphe 4, du règlement de base.

264 En troisième lieu, d’une part, il importe de relever que, ainsi qu’il résulte du considérant 336 du règlement attaqué, aucune des requérantes concernées par cette marge, à savoir les membres concernés de la CCCME ou les cinq autres producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon, n’a contesté les conclusions de la Commission sur la marge fixée pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon.

265 D’autre part, il convient d’indiquer que l’article 17, paragraphe 3, du règlement de base, auquel l’article 9, paragraphe 6, de ce règlement se réfère, prévoit le calcul d’une marge de dumping individuelle pour chaque exportateur ou producteur non retenu dans l’échantillon qui le demande, en présentant un questionnaire complet.

266 En effet, selon l’article 17, paragraphe 3, du règlement de base, lorsque la Commission procède à l’échantillonnage, une marge de dumping individuelle peut néanmoins être calculée pour chaque producteur‑exportateur qui n’a pas été initialement choisi, qui présente les renseignements nécessaires dans les délais prévus, sauf dans les cas où le nombre d’exportateurs ou de producteurs est si important que des examens individuels compliqueraient indûment la tâche et empêcheraient d’achever l’enquête
en temps utile. En tout état de cause, ainsi que les parties l’ont confirmé à l’audience, aucune des requérantes concernées n’a exprimé auprès de la Commission la volonté de se voir appliquer une marge individuelle.

267 En quatrième lieu, il convient de rappeler que la Commission a expliqué dans le règlement attaqué que le niveau de coopération avait été généralement jugé faible et qu’elle avait dû fonder le calcul du niveau des droits à l’échelle nationale sur les données disponibles dans le dossier.

268 En cinquième lieu, il convient de rappeler que la Commission a utilisé les données disponibles au sens de l’article 18 du règlement de base pour le calcul de la valeur normale du produit concerné. Or, la valeur normale du produit concerné est la même pour l’ensemble des producteurs‑exportateurs dudit produit en provenance de Chine, dans la mesure où elle a été construite sur le fondement de l’article 2, paragraphe 6 bis, du règlement de base. En effet, ce qui différencie la marge de dumping des
différents producteurs‑exportateurs est la comparaison de ladite valeur normale à leurs propres prix à l’exportation, au lieu de comparer la valeur normale « générale » avec les prix à l’exportation de l’industrie. Ainsi, les producteurs‑exportateurs non retenus dans l’échantillon obtiendraient éventuellement une marge différente, en application de l’article 17, paragraphe 3, du règlement de base, en comparant leurs prix à l’exportation à la valeur normale constituée sur le fondement de
« données disponibles » conformément à l’article 18 du règlement de base. Par conséquent, à défaut de la constitution d’un nouvel échantillon de producteurs‑exportateurs dans l’ensemble, la limitation de l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base n’aurait pas pu être levée en l’espèce.

269 Partant, en acceptant l’hypothèse selon laquelle la Commission était tenue d’utiliser les « données disponibles » au sens de l’article 18 du règlement de base pour la construction de la valeur normale, dans la mesure où les informations communiquées par les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon étaient insuffisantes, il peut être affirmé que cette étape était indispensable dans le cadre de l’enquête en cause. De surcroît, il est également établi que la Commission a recouru à
l’échantillonnage pour l’enquête en cause, ce qui, au demeurant, n’est pas contesté dans le cadre du présent recours, en raison du volume de producteurs‑exportateurs concernés, dont les données n’auraient pas pu être examinées individuellement en temps utile. Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 227 ci‑dessus, la Commission ne dispose d’aucun moyen pour contraindre les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon à lui fournir les informations qu’elle estime
nécessaires à la conclusion de son enquête.

270 Par conséquent, il convient de constater que la marge des producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon a été déterminée par la Commission non d’une manière arbitraire ou punitive, mais après qu’elle avait constaté, à un stade tardif de la procédure administrative, que, en raison, d’une part, du fait que les données fournies par les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon étaient incohérentes et, d’autre part, du fait que le contexte mondial affecté par
l’épidémie de COVID‑19 l’empêchait de procéder à des vérifications sur place, elle était tenue de faire application à une partie des requérantes de l’article 18 du règlement de base.

271 Il en résulte que les requérantes n’ont pas établi que la Commission ne pouvait pas se fonder sur l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base pour établir la marge moyenne pondérée des producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon.

272 Partant, le quatrième moyen doit être rejeté.

5.   Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2, 3, 5 et 6, du règlement de base, lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 1, dudit règlement

273 Par leur cinquième moyen, les requérantes allèguent que la Commission a erronément analysé le préjudice et le lien de causalité, premièrement, parce qu’elle n’a pas tenu compte du fait que la majorité des producteurs de l’Union fabriquait essentiellement des éléments de fixation non standard alors que la majorité des importations chinoises concernait des éléments de fixation standard. La Commission aurait donc dû examiner si l’industrie de l’Union et les exportateurs chinois se concentraient à
parts égales sur les deux segments ou si un ou plusieurs segments étaient davantage susceptibles d’être concernés que d’autres par les importations faisant l’objet d’un dumping. De plus, le refus de la Commission ne serait pas fondé sur des éléments indiquant que les types de produits en cause étaient interchangeables ou qu’ils se concurrençaient. À cet égard, les requérantes ajoutent que, hormis les différences de prix importantes, les deux types de produits ont des destinations différentes et
sont vendus à des industries différentes. En effet, les éléments de fixation non standard seraient utilisés dans les secteurs où la sécurité jouerait un rôle essentiel et dans les industries sensibles à la qualité, tandis que les éléments de fixation standard seraient utilisés dans les secteurs de la construction, du meuble et du bricolage. Les requérantes contestent le fait que, malgré des demandes réitérées des parties intéressées réclamant une analyse segmentée, la Commission ait refusé de
procéder à une telle analyse.

274 Deuxièmement, les requérantes font valoir que la Commission ne fonde son allégation selon laquelle les producteurs‑exportateurs chinois avaient la capacité de produire et d’exporter des éléments de fixation non standard sur aucune preuve et que, en tout état de cause, elle aurait dû analyser l’impact réel des importations au cours de la période considérée. Or, selon l’enquête menée par la CCCME, seuls quatre producteurs chinois auraient envisagé d’exporter des éléments de fixation non standard
dans les années suivant la période considérée et vingt-huit producteurs n’auraient pas envisagé une telle possibilité.

275 Troisièmement, les requérantes soutiennent, en substance, que la segmentation est également prouvée par le fait que la Commission a été obligée d’agrandir l’échantillon des producteurs de l’Union, car les informations, auparavant obtenues des quatre entreprises retenues dans l’échantillon initial, ne couvraient pas la fabrication d’éléments de fixation standard. La correspondance entre les produits n’aurait été finalement constatée que pour 24 % de la production des producteurs de l’Union
retenus dans l’échantillon.

276 Quatrièmement, s’agissant du recours à la méthode des numéros de contrôle des produits (ci‑après les « NCP ») pour l’analyse de la sous‑cotation des prix, les requérantes contestent le pourcentage de 90 % de correspondance avancé par la Commission, faisant valoir que cette dernière ne devait pas se focaliser sur les importations chinoises, mais sur les ventes de l’Union. Ainsi, la Commission aurait dû examiner si les ventes de l’industrie de l’Union avaient fait l’objet d’une sous‑cotation et
prendre en compte le pourcentage de correspondance du point de vue de l’industrie de l’Union pour apprécier l’existence d’une sous‑cotation des prix significative causée par les importations faisant l’objet d’un dumping. Les requérantes font valoir que la Commission n’a établi une sous‑cotation des prix que pour une petite fraction de l’industrie de l’Union qui fabriquerait des éléments de fixation standard, puis a étendu ces constatations à l’industrie de l’Union dans son ensemble.

277 Cinquièmement, les requérantes soulèvent les mêmes préoccupations en ce qui concerne les principaux groupes d’éléments de fixation, à savoir les vis, les boulons et les rondelles, qui sont chacun destinés à des utilisations finales très différentes, lesquelles justifieraient une analyse segmentée du préjudice. Les trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon n’exporteraient que des vis et des boulons. La Commission aurait donc violé l’article 3, paragraphes 2 et 6, du règlement de
base en ce qu’elle a établi l’existence d’un préjudice pour les producteurs de rondelles au sein de l’Union.

278 La Commission conteste les arguments des requérantes.

279 D’emblée, il convient de constater que, aux fins de déterminer le préjudice, l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base prévoit qu’il convient de procéder à un examen objectif du volume des importations faisant l’objet d’un dumping et de leur effet sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union ainsi que de leur incidence sur l’industrie de l’Union.

280 S’agissant en particulier de l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix, l’article 3, paragraphe 3, deuxième phrase, du règlement de base précise qu’il sera examiné s’il y a, pour ces importations, une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se
seraient produites.

281 L’article 3, paragraphe 5, du règlement de base précise, quant à lui, que l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie. Cette disposition contient une liste des différents facteurs pouvant être pris en considération et précise que cette liste n’est pas exhaustive et qu’un seul ou plusieurs de ces facteurs ne
constituent pas nécessairement une base d’appréciation déterminante [voir arrêt du 28 février 2017, Yingli Energy (China) e.a./Conseil, T‑160/14, non publié, EU:T:2017:125, point 188 et jurisprudence citée].

282 Aux termes de l’article 3, paragraphe 6, du règlement de base, la Commission doit démontrer que les importations faisant l’objet d’un dumping causent un préjudice important à l’industrie de l’Union, compte tenu de leur volume et des niveaux de prix, à l’aide de tous les éléments de preuve pertinents.

283 Par ailleurs, il découle de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base que la détermination du préjudice doit être effectuée au niveau de l’industrie de l’Union dans son ensemble.

284 Ensuite, il y a lieu de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, le large pouvoir d’appréciation reconnu à la Commission en raison de la complexité des situations économiques et politiques qu’elle doit examiner dans le cadre d’une procédure antidumping porte également sur la détermination de l’existence d’un préjudice causé à l’industrie de l’Union (voir arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products
e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 112 et jurisprudence citée). De même, l’examen de l’existence d’une sous-cotation des prix étant une question économiquement complexe pour laquelle le règlement de base n’impose aucune méthode particulière, la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation à cet égard (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 99).

285 Ainsi, le contrôle juridictionnel d’une telle appréciation doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir. Tel est notamment le cas en ce qui concerne la détermination des facteurs qui causent un préjudice à l’industrie de l’Union dans le cadre d’une enquête antidumping (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei
Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 36 et jurisprudence citée).

286 La Cour a aussi itérativement jugé que le contrôle par le Tribunal des éléments de preuve sur lesquels les institutions de l’Union fondaient leurs constatations ne constituait pas une nouvelle appréciation des faits remplaçant celle de ces institutions. Ce contrôle n’empiète pas sur le large pouvoir d’appréciation desdites institutions dans le domaine de la politique commerciale, mais se limite à relever si ces éléments sont de nature à étayer les conclusions tirées par celles-ci. Il appartient,
dès lors, au Tribunal non seulement de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à fonder les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 37 et jurisprudence
citée).

287 Il ressort des termes mêmes de l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base que la méthode suivie pour déterminer une éventuelle sous-cotation des prix doit, en principe, être opérée au niveau du « produit similaire », au sens de l’article 1er, paragraphe 4, dudit règlement, même si celui-ci peut, comme c’est le cas en l’espèce, être composé de différents types de produits relevant de plusieurs segments de marché (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special
Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 74). Partant, le règlement de base n’impose, en principe, pas d’obligation à la Commission d’effectuer une analyse de l’existence de la sous-cotation des prix à un niveau autre que celui du produit similaire (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 75).

288 La même interprétation ressort également de l’accord antidumping, auquel les requérantes se référent, puisque l’autorité chargée de l’enquête antidumping n’est pas tenue, au titre de l’article 3, paragraphe 3.2, de l’accord antidumping, d’établir l’existence d’une sous‑cotation des prix pour chacun des types de produits visés par l’enquête ou en ce qui concerne toute la gamme des produits constituant le produit national similaire (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special
Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 76).

289 Cependant, afin d’assurer l’objectivité de l’analyse de la sous-cotation des prix, la Commission peut, dans certaines circonstances, être tenue de procéder à une telle analyse au niveau des segments du marché du produit en cause, même si le large pouvoir d’appréciation dont elle dispose pour déterminer, notamment, l’existence d’un préjudice s’étend, à tout le moins, aux décisions relatives au choix de la méthode d’analyse, aux données et aux preuves à recueillir, à la méthode de calcul à
utiliser pour déterminer la marge de sous‑cotation ainsi qu’à l’interprétation et à l’évaluation des données recueillies (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 78).

290 Il peut en aller ainsi dans une situation marquée par l’existence d’une segmentation caractérisée du marché du produit en cause et par le fait que les importations faisant l’objet de l’enquête antidumping étaient très majoritairement concentrées dans l’un des segments du marché du produit en cause, sous réserve, toutefois, que le produit similaire dans son ensemble soit dûment pris en compte. Il peut également en aller ainsi dans une situation particulière caractérisée par une forte
concentration des ventes intérieures et des importations faisant l’objet d’un dumping sur des segments distincts ainsi que par des différences de prix tout à fait notables entre ces segments. En effet, dans ces circonstances, la Commission peut être tenue de prendre en considération les parts de marché de chaque type de produit et ces différences de prix afin de garantir l’objectivité de l’analyse relative à l’existence de la sous-cotation des prix (voir arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber
of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 167 et jurisprudence citée).

291 S’agissant des preuves sur lesquelles la Commission peut s’appuyer afin de conclure à l’existence d’un préjudice causé à l’industrie de l’Union, il ressort de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base qu’elle est obligée de tenir compte, dans son analyse de la sous‑cotation des prix, de tous les éléments de preuve positifs pertinents (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 77). Cependant, le règlement de base ne définit pas la
notion d’« éléments de preuve positifs ». Compte tenu du sens littéral de cette notion, de son contexte, comprenant notamment l’exigence d’un examen objectif visée à l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement, et de la finalité de la détermination de l’existence d’un préjudice, à savoir permettre l’imposition d’un droit antidumping au regard des importations faisant l’objet d’un dumping, ladite notion désigne des éléments matériels qui établissent de façon affirmative, objective et vérifiable la
réalité des indicateurs de ce préjudice. Elle exclut de la sorte que de simples affirmations, des conjectures ou des considérations aléatoires puissent constituer de tels indicateurs (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 118).

292 C’est à la lumière de ces rappels et précisions qu’il convient d’examiner le bien-fondé des allégations des requérantes sur l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commise la Commission en se fondant sur le produit similaire dans son ensemble pour l’analyse du préjudice et en n’examinant pas ce dernier par segments.

293 En premier lieu, il importe de constater que, selon le considérant 110 du règlement attaqué, sur la base de leurs caractéristiques physiques et techniques essentielles et de leurs utilisations finales, tous les éléments de fixation ont été considérés comme constituant un seul et même produit aux fins de la procédure en cause.

294 Il ressort de la jurisprudence, d’une part, que, pour la définition du produit concerné, la Commission peut tenir compte de plusieurs facteurs tels que les caractéristiques physiques, techniques et chimiques des produits, leur usage, leur interchangeabilité, la perception qu’en a le consommateur, les canaux de distribution, le processus de fabrication, les coûts de production et la qualité (arrêts du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, EU:T:2010:390, point 138, et du
17 décembre 2010, EWRIA e.a./Commission, T‑369/08, EU:T:2010:549, point 82). Pour déterminer s’il s’agit de produits différents, il convient notamment de vérifier s’ils partagent les mêmes caractéristiques techniques et physiques, les mêmes utilisations finales fondamentales et le même rapport entre leur qualité et leur prix. À cet égard, l’interchangeabilité et la concurrence entre ces produits devraient aussi être évaluées (arrêt du 18 avril 2013, Steinel Vertrieb, C‑595/11, EU:C:2013:251,
point 44).

295 Néanmoins, au regard du caractère indicatif de la liste des critères indiqués au point 294 ci‑dessus, rien n’oblige la Commission à déterminer le produit concerné en recourant à l’ensemble desdits critères. Il n’est pas non plus indispensable que l’analyse de chacun des critères soit susceptible de conduire au même résultat [voir arrêt du 28 février 2017, Yingli Energy (China) e.a./Conseil, T‑160/14, non publié, EU:T:2017:125, point 114 et jurisprudence citée].

296 En effet, le règlement de base ne précise pas comment doit être défini le produit ou la gamme de produits pouvant faire l’objet d’une enquête de dumping, ni n’exige de procéder à une taxinomie fine (arrêt du 25 septembre 1997, Shanghai Bicycle/Conseil, T‑170/94, EU:T:1997:134, point 61).

297 Il s’ensuit que des produits qui ne sont pas identiques peuvent être regroupés dans la même définition du produit concerné et faire l’objet, ensemble, d’une enquête antidumping [arrêt du 10 octobre 2012, Gem-Year et Jinn-Well Auto-Parts (Zhejiang)/Conseil, T‑172/09, non publié, EU:T:2012:532, point 60]. Ainsi, la détermination des « produits similaires » s’inscrit dans le cadre de la large marge d’appréciation dont dispose la Commission dans l’analyse de situations économiques complexes.
L’examen du bien‑fondé de l’inclusion d’un produit spécifique au sein de la liste des produits doit être effectué au regard des caractéristiques du produit concerné tel que défini par la Commission et non au regard de celles des produits composant le produit concerné ou des sous‑catégories de celui‑ci (arrêt du 18 novembre 2014, Photo USA Electronic Graphic/Conseil, T‑394/13, non publié, EU:T:2014:964, point 30).

298 En l’espèce, il convient de relever que les requérantes ne contestent pas la distinction retenue par la Commission entre les éléments de fixation standard et non standard au regard de la conformité ou non à une norme internationale. Ainsi, les éléments de fixation sont qualifiés de standard lorsqu’ils répondent à des normes internationales spécifiques, alors que ceux qui sont qualifiés de non standard ne correspondent pas à une norme précise internationalement reconnue. En effet, selon le
considérant 372 du règlement attaqué, les éléments de fixation standard sont ceux décrits en détail par des normes industrielles, telles que les normes du Deutsches Institut für Normung (DIN), les normes de l’Organisation internationale de normalisation (ISO) ou les normes européennes (EN) élaborées et actualisées par le Comité européen de normalisation (CEN). En revanche, les éléments de fixation non standard présentent des différences par rapport aux normes reconnues par le secteur et sont
souvent conformes à la conception ou aux exigences d’un utilisateur particulier. Ainsi, les dessins du client qui s’écartent d’une norme internationale reconnue rendent un élément de fixation non standard. De même, les éléments de fixation produits sur des chaînes de production standard sont considérés comme des éléments de fixation non standard lorsqu’ils ne sont pas totalement conformes à une norme industrielle spécifique reconnue à l’échelon international.

299 Il s’ensuit que ces éléments sont présents dans une vaste catégorie de secteurs, qui utilisent des éléments de fixation de plusieurs types. En effet, la définition de ce que constitue un élément de fixation standard et non standard ne tient pas compte de la complexité ou du coût de production des industries concernées ou des matières premières utilisées. Il en résulte également qu’un même objet, comme un meuble ou une voiture, peut être composé tant d’éléments de fixation standard que d’éléments
de fixation non standard.

300 Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argumentation des requérantes. En effet, les requérantes ont soutenu que les éléments de fixation non standard s’adressaient en particulier aux industries où la sécurité était plus importante, alors que les éléments standard étaient surtout utilisés dans des domaines comme la construction. Or, aucun élément de preuve n’a été apporté quant à cette distinction opérée par les requérantes, de sorte qu’il soit possible de constater que chaque type d’élément
de fixation s’adressait exclusivement à telle ou telle industrie. D’ailleurs, les requérantes n’ont apporté aucune preuve démontrant que les éléments de fixation standard et non standard n’étaient pas en concurrence.

301 La Commission a uni les éléments de fixation standard et non standard au sein d’une même catégorie au motif qu’ils devaient répondre aux mêmes caractéristiques physiques et techniques. Il convient de constater à cet égard que ces facteurs figurent parmi ceux reconnus par la jurisprudence citée au point 294 ci‑dessus. De plus, ainsi qu’il ressort des précisions apportées au point 298 ci‑dessus, les processus de fabrication ou de distribution des éléments de fixation standard et non standard
peuvent se juxtaposer. Par ailleurs, la Commission a expliqué au considérant 402 du règlement attaqué que l’enquête avait également révélé un chevauchement des applications et des utilisations finales entre les deux types d’éléments de fixation.

302 Or, les requérantes sont restées en défaut d’apporter des éléments suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par la Commission dans le règlement attaqué sur la définition du produit concerné. Par conséquent, l’approche de la Commission est conforme à la jurisprudence qui a reconnu que l’appartenance de produits à des gammes différentes ne suffisait pas pour établir, en soi, leur absence d’interchangeabilité et donc l’opportunité d’effectuer une analyse par segment, dès
lors que des produits appartenant à des gammes distinctes pouvaient avoir des fonctions identiques ou répondre aux mêmes besoins (voir arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 383 et jurisprudence citée). D’ailleurs, il ressort également de la jurisprudence que si la différence des prix entre les différents segments du marché est expliquée par une utilisation différente des produits
relevant de la définition du produit concerné, cette différence de prix est en tout état de cause prise en compte dans le cadre de l’analyse de la sous‑cotation des prix selon la méthode des NCP, de sorte qu’il ne soit pas nécessaire de procéder à une analyse du préjudice par segment (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, points 112 à 114).

303 Partant, la Commission a pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, considérer que les éléments de fixation standard et non standard étaient des produits similaires.

304 En deuxième lieu, il y a lieu de constater que, premièrement, la Commission a précisé au considérant 402 du règlement attaqué que l’enquête avait révélé que l’industrie de l’Union produisait et vendait des éléments de fixation standard et non standard et que les producteurs‑exportateurs exportaient des éléments standard et non standard vers l’Union. Deuxièmement, la Commission a constaté que les importations du produit concerné concurrençaient les ventes de l’industrie de l’Union pour les mêmes
utilisations et applications. Troisièmement, la Commission s’est appuyée sur des éléments de preuve figurant dans le dossier qui avaient montré que les producteurs‑exportateurs chinois avaient la capacité de produire et d’exporter des éléments de fixation non standard, quand bien même ceux retenus dans l’échantillon exporteraient peu d’éléments non standard. En effet, les types de produits importés des producteurs‑exportateurs chinois correspondaient à plus de 90 % aux types de produits
fabriqués et vendus par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et une comparaison des prix des éléments de fixation standard et non standard faisait invariablement apparaître une sous‑cotation significative des prix et des prix indicatifs. Quatrièmement, la Commission a conclu que tous les producteurs de l’Union, y compris ceux qui produisaient des éléments de fixation non standard, quel que soit l’assortiment de produits, affichaient une tendance à la baisse du volume de
production et de vente ainsi que des marges bénéficiaires et que cela avait montré que les importations en provenance de Chine avaient eu des effets négatifs sur tous les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon. Cinquièmement, la Commission a relevé que le dossier contenait des éléments prouvant que les producteurs de l’Union ne pouvaient pas accroître leur production et leurs ventes d’éléments de fixation standard en raison de la pression exercée par les importations en provenance de
Chine sur les prix sur le marché de l’Union. Sixièmement, la détérioration des indicateurs macroéconomiques de préjudice, parallèlement à l’augmentation des importations en provenance de Chine, ainsi que la tendance à la baisse des indicateurs microéconomiques de tous les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont montré qu’il existait une concurrence sur le marché entre l’industrie de l’Union et les importations en provenance de Chine au niveau du produit similaire.

305 Le Tribunal a demandé à la Commission de préciser quels étaient les éléments du dossier qui lui avaient permis de constater la capacité des producteurs‑exportateurs chinois à exporter des éléments de fixation non standard vers l’Union, dans la mesure où les requérantes avaient contesté cette affirmation.

306 À ce sujet, tout d’abord, la Commission a expliqué que, pendant l’enquête, un nombre significatif d’importateurs et de producteurs‑exportateurs chinois, dont un membre concerné de la CCCME et une des personnes morales dont le nom figure en annexe, avaient demandé à être exclus de l’enquête en soutenant que les éléments de fixation qu’ils produisaient présentaient des caractéristiques spéciales sur des aspects tels que leurs caractéristiques physiques et techniques, leur utilisation, leur
interchangeabilité, leur processus de production, leur prix et leur processus de certification et étaient destinés à une utilisation différente de celle des éléments de fixation standard. La Commission a également produit la preuve desdites demandes, qui manifestaient le lien étroit entre les deux segments concernés.

307 Ainsi, il ressort de l’annexe E.1 des réponses écrites de la Commission aux questions du Tribunal que deux importateurs‑distributeurs de l’Union avaient demandé l’exclusion des vis à bois de la définition du produit concerné de l’enquête, en affirmant que 40 à 60 % du total des importations des vis à bois dans l’Union provenait de Chine. Ils ont soutenu que les vis à bois en fer ou acier autres qu’en acier inoxydable devaient être exclues de l’enquête, sur la base des critères cités au point 294
ci‑dessus, en faisant également valoir que ces produits nécessitaient une certification supplémentaire afin d’être vendus sur le territoire de l’Union. Ainsi, selon la définition retenue par la Commission, les vis à bois importées de Chine par ces deux importateurs‑distributeurs ne sont pas des éléments de fixation standard dans la mesure où lesdites vis divergent des standards internationaux. De même, deux producteurs‑exportateurs chinois ont soutenu qu’ils exportaient des vis pour structure en
bois qui étaient des éléments de fixation non standard, fabriqués sur mesure, tandis qu’un membre concerné de la CCCME a également demandé que les vis confirmat (ou vis autotourillonantes) soient exclues de la définition du produit en raison de leurs utilisations finales spécifiques.

308 Ensuite, l’annexe E.6 produite par la Commission présente la position de l’intervenante qui avait constaté que beaucoup de produits exportés par les producteurs‑exportateurs chinois avaient été erronément classés dans la catégorie des éléments de fixation standard et que, en réalité, les importations des éléments de fixation non standard étaient beaucoup plus importantes pendant la période d’enquête. Ainsi, d’une part, l’intervenante a estimé que, certains éléments de fixation non standard
avaient été erronément classés comme des éléments standard dans les réponses au questionnaire fournies par l’EFDA, qui avait retenu d’autres critères que ceux du questionnaire de la Commission sur ce qui distinguait les éléments de fixation standard de ceux non standard. D’autre part, les réponses audit questionnaire ignoreraient que des éléments de fixation standard importés dans l’Union nécessitent une procédure de certification supplémentaire avant la livraison des produits aux fabricants
d’équipement d’origine. Les réponses de l’EFDA annexées par l’intervenante à sa lettre confirment ces allégations.

309 Enfin, il ressort également des preuves soumises par la Commission que deux des trois producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon ont exporté vers l’Union des éléments de fixation non standard pendant la période de l’enquête. Les requérantes ont par ailleurs reconnu que les producteurs de l’Union et les producteurs chinois fabriquaient à la fois des éléments de fixation standard et non standard. Cependant, les requérantes ont allégué que cette observation n’était pas pertinente
et que la Commission aurait dû examiner si l’industrie de l’Union et les producteurs‑exportateurs chinois se concentraient à parts égales sur les deux segments, voire si un segment était davantage susceptible d’être concerné que d’autres.

310 Or, il ressort clairement de la jurisprudence citée aux points 289 et 290 ci‑dessus que la Commission n’est tenue de procéder à une analyse par segment du préjudice que lorsque des éléments de preuve démontrent une segmentation particulièrement caractérisée des importations concernées, sous réserve, toutefois, que le produit similaire dans son ensemble soit dûment pris en compte (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 80).

311 En tout état de cause, une telle segmentation particulièrement caractérisée ne ressort pas des éléments de preuve soumis par les parties au Tribunal.

312 En effet, d’une part, il n’est pas contesté par les requérantes que les producteurs de l’Union et notamment ceux retenus dans l’échantillon produisent tant des éléments de fixation standard que des éléments de fixation non standard. Selon l’enquête de la Commission, cette production avait lieu sur les mêmes sites de production. Il s’ensuit que les importations chinoises d’éléments de fixation peuvent concurrencer la production de tous les éléments de fixation par l’industrie de l’Union.

313 D’autre part, les requérantes ont soutenu que le fait que les éléments de fixation importés correspondaient à 90 % aux éléments de fixation produits par l’industrie de l’Union était dénué de pertinence dans la mesure où la Commission devait examiner si les ventes de l’Union, et non les importations chinoises, faisaient l’objet d’une sous‑cotation pour apprécier le préjudice. Or, une telle argumentation n’est clairement pas soutenue par la jurisprudence pertinente. En effet, il découle d’une
lecture conjointe de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base que le préjudice doit être apprécié lors de la « mise en libre pratique dans l’Union » du produit faisant l’objet d’un dumping. Par conséquent, contrairement à ce que font valoir les requérantes, le calcul de la sous‑cotation des prix doit, en principe, se faire au niveau des importations faisant l’objet d’un dumping (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370,
point 102).

314 Il s’ensuit que la Commission a fondé ses conclusions sur la capacité des producteurs‑exportateurs chinois à exporter vers l’Union des éléments de fixation non standard sur des éléments de preuve positifs, qui démontrent par ailleurs l’interférence entre les deux segments du marché.

315 En troisième lieu, quant à l’argument des requérantes selon lequel la Commission s’est trouvée contrainte d’agrandir l’échantillon de producteurs de l’Union six mois après l’ouverture de l’enquête en raison du fait que les producteurs retenus dans l’échantillon initialement ne produisaient pas ou ne vendaient pas suffisamment d’éléments de fixation standard, il convient de constater que, ainsi qu’il ressort des points 6 et 7 ci‑dessus, l’échantillon des producteurs de l’Union a dû être révisé en
raison d’un manque d’informations de ceux initialement sélectionnés. Ces informations figuraient dans le dossier non confidentiel.

316 À cet égard, il doit être constaté que la Commission s’est conformée aux exigences de l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base en matière d’échantillonnage, qui prévoit que, dans les cas où le nombre de plaignants, d’exportateurs ou d’importateurs, de types de produits ou de transactions est important, l’enquête peut se limiter à un nombre raisonnable de parties, de produits ou de transactions en utilisant des échantillons statistiquement valables d’après les renseignements disponibles
au moment du choix, ou au plus grand volume de production, de ventes ou d’exportations sur lequel l’enquête peut raisonnablement porter compte tenu du temps disponible.

317 Il ressort de la jurisprudence que le choix final de l’échantillon relève de la Commission, pour lequel elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation (voir arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 293 et jurisprudence citée). Par conséquent, le contrôle du juge de l’Union à cet égard est limité conformément à la jurisprudence citée au point 285 ci‑dessus.

318 Dans un tel contexte, il appartient aux requérantes, en application de la jurisprudence, de produire les éléments de preuve permettant au Tribunal de constater que, en composant, comme elle l’a fait l’échantillon de l’industrie de l’Union, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278,
point 295 et jurisprudence citée).

319 Or, les requérantes n’ont nullement apporté de preuves visant à faire constater une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans le cadre du choix des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et à démontrer que la Commission n’avait pas respecté les exigences découlant du règlement de base ou de la jurisprudence à cet égard.

320 En outre, si un producteur de l’Union initialement choisi ne peut pas ou ne souhaite pas participer à l’enquête de la Commission, cette dernière ne dispose d’aucun pouvoir d’enquête lui permettant de le contraindre à participer à l’enquête ou à produire des renseignements en vertu du règlement de base (voir arrêt du 20 mai 2015, Yuanping Changyuan Chemicals/Conseil, T‑310/12, non publié, EU:T:2015:295, point 152 et jurisprudence citée).

321 Cela étant, si l’échantillon des producteurs de l’Union comportait finalement plus de producteurs d’éléments de fixation standard que dans sa constitution initiale, force est de constater qu’il a été, dès lors, plus représentatif des deux segments du marché des éléments de fixation. En effet, la Commission a expliqué que, dès lors que deux des six producteurs de l’Union initialement choisis avaient cessé de coopérer, elle était tenue, afin d’assurer la représentativité de l’échantillon restant,
y compris au niveau de la gamme des produits, de sélectionner deux nouveaux producteurs. Dès lors, cette circonstance ne saurait constituer la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans l’analyse de l’existence d’un préjudice sur l’industrie de l’Union.

322 En tout état de cause, les requérantes n’ont produit aucun élément de preuve permettant au Tribunal de constater que la Commission avait manipulé la composition de l’échantillon de l’industrie de l’Union sélectionné, de manière à rendre celui‑ci moins représentatif de l’industrie de l’Union.

323 Par conséquent, l’allégation des requérantes selon laquelle la modification de l’échantillon des producteurs de l’Union en cours de procédure démontre une production insuffisante d’éléments de fixation standard par l’industrie de l’Union dans son ensemble doit être écartée.

324 En quatrième lieu, quant à l’argument des requérantes portant sur la faible correspondance des NCP, il convient de rappeler que les NCP sont des codes alphanumériques utilisés dans les enquêtes antidumping pour établir une correspondance entre des types de produits. Lors de l’enquête, les entreprises contactées sont invitées à classer leurs produits dans des catégories auxquelles correspondent ces codes. À ces derniers sont attachées des caractéristiques spécifiques du produit qui ont été jugées
pertinentes, parce qu’elles ont influencé le coût de production ou le coût de vente.

325 Il ressort de la jurisprudence que, lorsque le produit concerné contient une large gamme de biens, il peut s’avérer indispensable de les regrouper sous des catégories plus ou moins homogènes, afin de permettre une comparaison équitable entre des produits comparables et d’éviter ainsi un calcul erroné du préjudice en raison de comparaisons inadaptées (arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18,
EU:T:2021:278, points 550 et 551).

326 Ainsi, l’analyse du préjudice selon une méthode des NCP par NCP est considérée comme adéquate, notamment lorsqu’il s’agit de produits complexes, dont les modèles présentent des caractéristiques techniques différentes et des prix pouvant varier sensiblement (voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2021, Severstal/Commission, T‑753/16, non publié, EU:T:2021:612, point 72 et jurisprudence citée).

327 Si elles entendent mettre utilement en cause l’approche utilisée par la Commission dans ce cadre, les requérantes doivent démontrer que la codification proposée par la Commission était manifestement inappropriée (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 552).

328 Or, en l’espèce, les requérantes n’avancent pas une telle allégation. En revanche, elles font valoir que la Commission n’a pas établi une correspondance pour 138 sur 267 des NCP des producteurs retenus dans l’échantillon.

329 À cet égard, la Commission a expliqué que, en l’espèce, chaque NCP comportait en réalité une série de six caractéristiques, qui incluaient le fait d’être standard ou non standard, mais aussi d’autres caractéristiques comme la résistance, le diamètre, la longueur ou le revêtement. Un type de produit se compose donc d’une combinaison de caractéristiques et il n’y a correspondance que lorsque toutes les caractéristiques du type de produit fabriqué par l’industrie de l’Union correspondent au type de
produit exporté. Ainsi, l’allégation des requérantes tirée d’une correspondance de 24 % ne concerne que les transactions correspondantes pour la combinaison entière de caractéristiques. Cependant, si seule la caractéristique portant sur le caractère standard ou non standard d’un élément de fixation devait être prise en considération, la correspondance serait de 44 % dans la mesure où 44 % des ventes incluses dans l’échantillon seraient des ventes d’éléments de fixation standard.

330 En effet, la Commission a soulevé à juste titre que le fait que l’industrie de l’Union vendait également d’autres types de produits ne correspondant pas aux exportations des producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon n’invalidait pas la conclusion d’une concurrence entre le produit importé et le produit fabriqué sur le territoire de l’Union, mais n’était que la conséquence du choix de la méthode des NCP et du recours à l’échantillonnage, qui n’est d’ailleurs pas contesté en
l’espèce (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 144).

331 En tout état de cause, il ressort clairement des tableaux de correspondance fournis par la Commission que le pourcentage de 90 % de correspondance sur la base de la méthode des NCP est prouvé.

332 Il s’ensuit que l’objection des requérantes concernant l’existence d’une sous‑cotation pour une petite partie des ventes de l’Union seulement, laquelle revient, en substance, à remettre en cause la possibilité pour la Commission de se fonder sur des échantillons représentatifs, doit être rejetée (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 412).

333 Cela est corroboré par le fait que l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix de l’industrie de l’Union, qu’il y a lieu d’effectuer aux fins de la détermination d’un préjudice, implique une comparaison des ventes non d’une même entreprise, mais de plusieurs entreprises, à savoir les producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon et les entreprises faisant partie de l’industrie de l’Union incluses dans l’échantillon. Or, une comparaison des ventes de
ces entreprises sera bien souvent plus difficile dans le cadre de l’analyse d’une sous-cotation des prix que dans celui de la détermination de la marge de dumping, dès lors que la gamme des types de produits vendue par ces différentes entreprises aura tendance à ne se chevaucher qu’en partie (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 195).

334 Un tel risque tenant à ce que certains types de produits ne puissent pas être pris en compte dans le cadre de l’analyse d’une sous-cotation des prix en raison de la différence de la gamme des produits vendue par ces différentes entreprises est plus élevé encore lorsque les NCP sont davantage détaillés. En effet, si une plus grande granularité des NCP a comme avantage que soient comparés des types de produits présentant davantage de caractéristiques physiques et techniques communes, celle‑ci a,
inversement, comme désavantage d’augmenter la possibilité que certains types de produits vendus par les unes ou les autres des sociétés concernées n’aient pas d’équivalents et ne puissent donc être comparés ni pris en compte dans cette analyse (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 196).

335 Ainsi, l’exercice, par la Commission, de son large pouvoir d’appréciation quant au choix de la méthode à suivre pour analyser une sous-cotation des prix peut avoir comme conséquence inéluctable, ainsi que c’est le cas de la méthode des NCP, que certains types de produits ne puissent être comparés et, partant, ne soient pas pris en compte dans le cadre de ladite analyse. L’exercice de ce pouvoir d’appréciation est toutefois limité par l’obligation, qui est imposée à la Commission par l’article 3,
paragraphe 2, du règlement de base, de procéder à un examen objectif des effets des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix de l’industrie de l’Union (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 197).

336 Il s’ensuit que les requérantes n’ont pas apporté la preuve d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans l’utilisation de la méthode des NCP afin de démontrer l’existence d’une sous‑cotation des prix causant un préjudice à l’industrie de l’Union.

337 En cinquième lieu, quant à l’argument des requérantes selon lequel la Commission aurait dû analyser séparément le préjudice pour les trois segments des vis, des boulons et des rondelles, il convient de constater que ce grief n’est pas suffisamment étayé, l’argumentation des requérantes se fondant essentiellement sur le fait qu’il s’agirait de produits très différents appartenant à des segments distincts. Or, au-delà de leur allégation sur la différence entre les vis, les boulons et les rondelles
qui appellent une analyse segmentée du préjudice, les requérantes n’ont apporté aucun élément de preuve visant à faire constater une erreur manifeste d’appréciation de la Commission à cet égard.

338 Ainsi, n’étant pas soutenue par des éléments concrets, une telle allégation n’est pas suffisante pour remettre en cause la définition du produit concerné par l’enquête par la Commission ou l’analyse du préjudice pour l’ensemble de ces éléments de fixation.

339 Partant, ce grief doit être rejeté.

340 Il s’ensuit que les arguments des requérantes portant sur l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commise la Commission en refusant d’analyser l’éventuel préjudice des importations chinoises d’éléments de fixation par segments ne sont pas fondés.

341 Dès lors, pour l’ensemble des motifs qui précèdent, le cinquième moyen doit être rejeté.

6.   Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2 et 3, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base

342 Par leur sixième moyen, les requérantes soutiennent que le faible pourcentage des ventes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon pour lequel la Commission a constaté l’existence d’une sous-cotation ne saurait permettre de conclure à suffisance de droit que les prix de l’industrie de l’Union dans son ensemble ont été sous-cotés. Elles soulignent, à cet égard, que la Commission n’a établi l’existence d’une sous‑cotation que pour moins de 24 % de la production des producteurs retenus
dans l’échantillon et que le faible pourcentage des ventes des producteurs retenus ne saurait constituer un « élément de preuve positif » au sens de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base, d’autant plus que l’échantillon de l’Union retenu par la Commission ne représenterait que 9,5 % de la production de l’industrie de l’Union. Ainsi, la Commission se serait fondée sur le constat selon lequel 2,3 % des ventes de l’industrie de l’Union avaient fait l’objet d’une sous-cotation, ce
qui ne serait pas suffisant pour établir une sous‑cotation des prix et ne permettrait pas, par ailleurs, d’avoir une vue suffisamment précise du montant du droit qui serait adéquat pour éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union, en violation de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base.

343 La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

344 À cet égard, il importe de rappeler que le règlement de base ne contient pas de définition de la sous‑cotation du prix et ne prévoit pas de méthode pour le calcul de ce dernier.

345 Il en va de même s’agissant de la méthode de calcul de la marge de préjudice utilisée pour déterminer s’il y a lieu de fixer, en application de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, auquel les requérantes se réfèrent, un droit antidumping inférieur à la marge de dumping suffisant pour éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union (ordonnance du 17 février 2023, Hansol Paper/Commission, T‑693/20, non publiée, EU:T:2023:83, point 30).

346 Le calcul de la sous-cotation du prix des importations est réalisé, conformément à l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base, aux fins de la détermination de l’existence d’un préjudice subi par l’industrie de l’Union du fait de ces importations et il est utilisé, plus largement, en vue d’évaluer ce préjudice et de déterminer la marge de préjudice, à savoir le niveau d’élimination dudit préjudice (arrêt du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T‑301/16,
EU:T:2019:234, point 176).

347 Par ailleurs, l’examen de l’existence d’une sous‑cotation des prix étant une question économiquement complexe pour laquelle le règlement de base n’impose aucune méthode particulière, la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation à cet égard (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 99).

348 Les requérantes prétendent avoir été en mesure de calculer les volumes des ventes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et d’avoir déduit que la sous‑cotation des prix avait été établie pour moins de 24 % de la production des producteurs de l’Union. Ce pourcentage est contesté par la Commission, qui a expliqué que, en comparant les ventes correspondantes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon aux ventes totales des producteurs de l’Union, ce pourcentage était de
31,6 %.

349 En effet, il ressort du dossier que le pourcentage de 24 % avancé par les requérantes ne concerne que les transactions correspondantes de la méthode des NCP pour la combinaison entière des caractéristiques entre les éléments de fixation standard et non standard, la résistance, le diamètre, la longueur et le revêtement. Or, conformément à la jurisprudence citée au point 287 ci‑dessus, l’analyse de la sous‑cotation ne doit en principe être effectuée qu’au niveau du produit similaire.

350 Partant, le pourcentage de 24 % dont se prévalent les requérantes n’est pas fondé.

351 En tout état de cause, l’allégation des requérantes selon laquelle la sous‑cotation n’a été établie que pour un pourcentage très faible des producteurs de l’Union, à savoir 2,3 % de ceux-ci, est fausse. En effet, tout d’abord, elle repose sur la prémisse non fondée qu’aucun autre producteur de l’Union que ceux retenus dans l’échantillon ne fabrique des types de produits correspondants, sans que les requérantes apportent une quelconque preuve à cet égard.

352 Ensuite, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, le libellé de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base n’indique ni ne suggère que l’analyse de l’incidence des importations en dumping sur les prix de l’industrie de l’Union doit, en toutes circonstances, prendre en compte l’intégralité des ventes de cette industrie. Au contraire, il indique que ces dispositions n’imposent pas à la Commission que soient nécessairement prises en considération dans l’analyse de l’incidence sur les
prix de l’industrie de l’Union des importations faisant l’objet d’un dumping toutes les ventes du produit similaire par l’industrie de l’Union (arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, points 152 et 153).

353 Ainsi, l’analyse effectuée par la Commission a été fondée sur des données devant être considérées comme étant représentatives, au sens du règlement de base, avec pour conséquence que, dès lors qu’elle est constatée pour les ventes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, la sous‑cotation des prix doit être tenue comme représentative pour toute l’industrie de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic
Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 411).

354 Il s’ensuit que la Commission pouvait, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, fonder ses conclusions quant à l’existence d’un préjudice à l’industrie de l’Union du fait du dumping des importations examinées sur une partie des ventes d’un échantillon représentatif de l’industrie de l’Union.

355 Partant, l’argumentation des requérantes selon laquelle la Commission a fondé l’analyse de l’existence d’un préjudice sur un pourcentage très faible de sous‑cotation doit être rejetée.

356 Il s’ensuit que le sixième moyen n’est pas fondé et doit être écarté.

7.   Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base

357 Par leur septième moyen, les requérantes contestent l’analyse des effets sur les prix et la détermination de la marge du préjudice, puisque la Commission n’aurait pas procédé à une comparaison équitable des prix. Ainsi, les requérantes font valoir, en substance, que la Commission n’a pas clarifié à quel stade commercial étaient effectuées les ventes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et elles allèguent que la Commission a comparé les prix de vente des producteurs‑exportateurs
chinois aux distributeurs avec les prix de vente des producteurs de l’Union aux utilisateurs finaux, en violation de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base. Dans la mesure où le règlement attaqué se fonderait largement sur le niveau de sous‑cotation des prix constaté pour relier le préjudice aux importations chinoises et, donc, conclure à l’existence d’un lien de causalité, les requérantes font valoir également une violation de l’article 3, paragraphe 6, dudit règlement.

358 La Commission soutient qu’il convient d’écarter l’argumentation des requérantes.

359 À titre liminaire, il importe de relever que le règlement de base n’impose pas de méthode particulière à la Commission pour la comparaison des prix.

360 Toutefois, il ressort de la jurisprudence que, afin de garantir le caractère équitable de cette comparaison, les prix doivent être comparés au même stade commercial. Il s’ensuit qu’une comparaison effectuée entre des prix obtenus à des stades commerciaux différents, c’est-à-dire sans inclure l’ensemble des coûts afférents au stade commercial dont il y a lieu de tenir compte, donnera nécessairement lieu à des résultats artificiels ne permettant pas une appréciation correcte du préjudice de
l’industrie de l’Union. Une telle comparaison équitable constitue une condition de la légalité du calcul du préjudice de cette industrie (voir arrêt du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T‑300/16, EU:T:2019:235, point 239 et jurisprudence citée).

361 Ainsi, d’une part, l’obligation de comparer les prix au même stade commercial s’impose indépendamment du nombre de producteurs‑exportateurs ayant coopéré et, d’autre part, elle s’applique indépendamment des volumes de ventes liées ou indépendantes dans le cadre de l’enquête en question (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2022, CRIA et CCCMC/Commission, T‑30/19 et T‑72/19, EU:T:2022:266, point 149).

362 Par ailleurs, il convient de préciser que le juge de l’Union a jugé que la prise en compte des prix de vente à des clients indépendants permettait de déterminer la marge de l’éventuel préjudice, dans la mesure où lesdits prix étaient déterminants dans le choix du client d’acheter les produits de l’industrie de l’Union ou les produits des producteurs‑exportateurs chinois (voir, en ce sens, arrêt du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T‑300/16, EU:T:2019:235, point 251).
Partant, pour la comparaison des prix aux fins de la détermination de la marge du préjudice, la Commission était tenue de prendre en compte l’ensemble des frais liés à une vente à un stade commercial particulier et de procéder, le cas échéant, aux ajustements nécessaires des données à sa disposition.

363 En l’espèce, la Commission a expliqué au considérant 364 du règlement attaqué qu’elle avait déterminé la sous‑cotation des prix au cours de la période d’enquête en comparant, d’une part, les prix de vente moyens pondérés, par type de produits des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, appliqués aux clients indépendants sur le marché de l’Union, ajustés aux conditions « départ usine », et, d’autre part, les prix moyens pondérés correspondants par type de produits importés vendus par
les producteurs chinois ayant coopéré retenus dans l’échantillon au premier client indépendant sur le marché de l’Union, établis sur une base CIF et dûment ajustés pour tenir compte des droits de douane et des coûts supportés après l’importation. Il est précisé au considérant 365 du règlement attaqué que la comparaison a montré une marge moyenne pondérée de sous‑cotation des prix des importations en provenance du pays concerné sur le marché de l’Union variant de 28 à 46 %.

364 En premier lieu, tout d’abord, il convient de constater que les parties sont d’accord sur le fait que les trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon et dont les ventes ont été utilisées aux fins de la comparaison exportaient directement à des distributeurs indépendants dans l’Union.

365 Ensuite, il importe de souligner que la Commission a opéré une distinction, aux fins de cette comparaison, entre les éléments de fixation standard et non standards. Pour l’ensemble du produit concerné, les ventes des producteurs de l’Union aux clients indépendants représentaient 51 % du total des ventes, alors que ce pourcentage était de 84 % pour les éléments de fixation standard. La Commission a expliqué que la distinction au niveau du pourcentage de comparabilité des prix des éléments de
fixation standard et non standard résultait naturellement de la méthode des NCP.

366 Enfin, la Commission a expliqué que les ventes des producteurs de l’Union aux « clients indépendants » qui avaient été prises en compte pour le calcul de la sous‑cotation des prix, auxquelles elle se réfère au considérant 364 du règlement attaqué, concernaient tant des ventes à des distributeurs indépendants qu’à des utilisateurs finaux. De plus, la Commission a précisé lors de l’audience, sans que les requérantes parviennent à la contredire, que les différences constatées entre les prix de
vente des producteurs de l’Union aux distributeurs indépendants et aux utilisateurs finaux étaient minimes, de sorte qu’aucun ajustement n’avait été considéré comme nécessaire.

367 En deuxième lieu, d’une part, il convient de constater que les requérantes ne contestent pas les ajustements qui ont été opérés par la Commission afin d’assurer une comparaison équitable des prix entre les ventes des producteurs‑chinois retenus dans l’échantillon et les ventes des producteurs de l’Union. D’autre part, ainsi que la Commission l’a précisé lors de l’audience, aucune demande d’ajustement quantifiable n’avait été formulée par les requérantes pendant l’enquête.

368 Les requérantes ont contesté cette allégation de la Commission pendant l’audience. À cet égard, il ressort, premièrement, des observations de la CCCME sur les conclusions définitives du 6 décembre 2021 et du considérant 377 du règlement attaqué qu’elle avait fait valoir qu’il aurait fallu procéder à des ajustements pour tenir compte des coûts du contrôle de la qualité et de la gestion des documents lors du calcul des marges de sous‑cotation. Ainsi, elle a soutenu que l’industrie de l’Union était
soumise à des exigences de certification spécifiques qui ne s’imposaient pas aux producteurs‑exportateurs chinois. Cependant, cet argument n’est en tout état de cause pas pertinent dans la mesure où il n’est nullement soulevé par les requérantes dans leurs écritures.

369 Deuxièmement, il ressort également des considérants 376 et 381 du règlement attaqué que la CCCME avait allégué pendant l’enquête que la majorité des ventes de l’industrie de l’Union étaient effectuées par l’intermédiaire de distributeurs liés et que les ajustements qui s’imposaient auraient donc dû être opérés pour tenir compte des différences en ce qui concernait le stade commercial. Toutefois, il ressort du considérant 381 du règlement attaqué que cette allégation n’était fondée sur aucune
information figurant dans le dossier et n’était étayée par aucun élément de preuve. Dès lors, la Commission a de nouveau précisé que les ventes des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon qui avaient été prises en considération dans le calcul de la sous‑cotation avaient été effectuées à des clients indépendants dans l’Union.

370 Il ressort également des observations de l’EFDA sur les conclusions définitives, auxquelles les requérantes se sont référées, qu’elle a soutenu que la Commission devait procéder à des ajustements afin de s’assurer que les prix comparés correspondaient au même stade commercial. Toutefois, ces observations contiennent essentiellement des allégations portant sur le fait qu’il n’était pas facile de savoir si les producteurs de l’Union vendaient également principalement à des distributeurs
indépendants. Aucune preuve n’avait été soumise à cet égard, ni même une argumentation certaine. Ainsi, en l’absence d’éléments quantitatifs, la Commission n’a pas remis en cause ses conclusions quant à la comparabilité des ventes prises en compte pour le calcul de la sous‑cotation. Dès lors, n’étant pas fondées sur des éléments concrets, les allégations des requérantes n’étaient pas suffisantes pour mettre en cause l’analyse de la Commission.

371 Cela étant, dans le cadre du présent recours, les requérantes n’ont pas allégué la nécessité d’un quelconque ajustement pour assurer la comparabilité des prix de l’Union avec ceux des producteurs‑exportateurs chinois aux fins de l’examen du préjudice et du lien de causalité. En effet, dans leurs écritures, les requérantes n’ont contesté que le manque de clarté en ce qui concernait le stade commercial choisi pour les producteurs de l’Union aux fins de l’analyse de la sous‑cotation des prix. Cette
question ayant été clarifiée par la Commission, il convient de constater que, dans la mesure où les requérantes n’ont pas établi l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission dans l’analyse de la sous‑cotation des prix, ce moyen doit être rejeté.

8.   Sur le huitième moyen, tiré d’une violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base

372 Par le huitième moyen, les requérantes contestent l’appréciation des indicateurs macroéconomiques de la Commission, qui serait incompatible avec l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base ainsi qu’avec les obligations procédurales de la Commission.

373 En substance, premièrement, les requérantes contestent la représentativité des sociétés dont les données ont fondé les conclusions de la Commission ainsi que le fait que cette dernière n’a pas précisé le nombre exact des sociétés en question. En effet, si la version non confidentielle du questionnaire macroéconomique indique que 44 sociétés ont communiqué des informations, il ressortirait de la réponse de la Commission aux questions de la CCCME concernant des informations additionnelles du
1er décembre 2021 qu’elle s’est référée à 34 sociétés qui auraient répondu au questionnaire.

374 Deuxièmement, les requérantes font grief à la Commission d’avoir refusé de divulguer le volume de production ou des ventes des sociétés ayant répondu au questionnaire macroéconomique. En outre, selon les requérantes, les parties ont été privées de la possibilité de formuler des observations utiles sur ces données, du fait de leur communication tardive et de l’absence de résumés non confidentiels adéquats.

375 Troisièmement, les requérantes critiquent la façon dont les données en question ont été extrapolées à l’industrie de l’Union dans son ensemble.

376 La Commission fait valoir qu’il convient de rejeter l’argumentation des requérantes.

377 Aux termes de l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base, l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie. L’article contient une liste non exhaustive des différents facteurs pouvant être pris en considération.

378 Cette disposition donne ainsi à la Commission un pouvoir discrétionnaire dans l’examen et l’évaluation des différents indices (arrêt du 10 septembre 2015, Bricmate, C‑569/13, EU:C:2015:572, point 54).

379 En l’espèce, selon le considérant 382 du règlement attaqué, l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union a comporté une évaluation de tous les indicateurs économiques ayant influé sur la situation de cette industrie durant la période considérée, en conformité avec l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base.

380 Aux considérants 384 à 386 du règlement attaqué, pour les besoins de la détermination du préjudice, la Commission a établi une distinction entre les indicateurs macroéconomiques et microéconomiques du préjudice et a évalué les premiers sur la base de données fournies par l’intervenante et recoupées avec les données fournies par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon. Les données communiquées ont été ajustées sur la base d’un recoupement avec les données fournies par les
producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon. Les ajustements ne tenaient compte que de certaines incohérences dans les données, mais n’ont pas modifié substantiellement les données soumises par l’intervenante. En effet, selon le considérant 387 du règlement attaqué, la Commission a vérifié l’exactitude des données et a donc considéré qu’il s’agissait d’une base appropriée pour la détermination des indicateurs macroéconomiques.

381 En outre, la Commission a expliqué au considérant 385 du règlement attaqué qu’elle avait protégé la confidentialité de ces données, parce qu’elles avaient été fournies au niveau des sociétés. Ainsi, l’intervenante a estimé le montant total des données macroéconomiques par extrapolation des données fondées sur la part de ces producteurs dans la production totale de l’Union et a déterminé la production totale de l’Union en se fondant sur les informations disponibles dans Prodcom.

382 Il doit d’abord être précisé que, dans le cadre du présent moyen, les requérantes ne contestent pas la pertinence des facteurs et des indices économiques qui ont été retenus par la Commission lors de l’évaluation du préjudice subi par l’industrie de l’Union.

383 S’agissant du premier grief des requérantes selon lequel la Commission a omis de préciser le nombre de sociétés concernées, celle-ci a expliqué que 44 sociétés avaient répondu au questionnaire et que le nombre de 34 était une simple erreur de frappe dans sa correspondance, qui avait été reproduite dans la lettre adressée à la CCCME le 1er décembre 2021.

384 Cette précision étant désormais apportée par la Commission et acceptée par les requérantes, le premier grief doit être rejeté.

385 Par leur deuxième grief, les requérantes contestent le refus de la Commission de leur communiquer le volume de production ou de ventes des 44 sociétés ayant répondu au questionnaire macroéconomique.

386 À cet égard, tout d’abord, il ressort de la lettre adressée à la CCCME le 1er décembre 2021 que la Commission a indiqué à cette dernière que le volume de production ou de ventes n’était pas une information disponible dans le dossier.

387 Les requérantes s’appuient sur la version non confidentielle des réponses au questionnaire macroéconomique pour faire valoir que la Commission connaissait cette information, car elle ressortait de la cellule B69 du tableau « 1 Production ». Toutefois, la Commission a expliqué que cette cellule du tableau indiquait la part de toutes les sociétés membres de l’intervenante ayant répondu au questionnaire macroéconomique dans la production totale de l’Union qu’elle avait estimée. La Commission a
expliqué que, dans la mesure où la production totale de l’Union était une extrapolation des données transmises par les producteurs de l’Union ayant coopéré, elle ne disposait pas de la part exacte représentée par les producteurs ayant répondu au questionnaire macroéconomique.

388 Ensuite, il y a lieu également de rappeler que, afin d’assurer la coopération des producteurs des pays de l’Union qui apportaient la connaissance du marché, la Commission était tenue de limiter les droits d’accès à ces informations et de préserver leur caractère confidentiel. Cette approche est confirmée par la jurisprudence qui a considéré que la production estimée des producteurs concernés de l’Union, sur laquelle s’était fondée la Commission dans le cadre du calcul du préjudice, pouvait à
juste titre être considérée comme confidentielle, dès lors qu’elle avait pour fondement la connaissance du marché qu’avait l’intervenante (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 507).

389 Par ailleurs, la nature des questions posées à l’intervenante ainsi que le résumé non confidentiel des contributions individuelles des producteurs de l’Union ont été mis à la disposition des parties intéressées. Si les requérantes contestent la communication tardive du résumé non confidentiel, il ressort du dossier qu’elles avaient tout de même la possibilité de présenter des observations, en bénéficiant d’une prolongation du délai imparti pour présenter lesdites observations, malgré les
contraintes du règlement de base et de l’avis d’ouverture quant aux délais de l’enquête.

390 Il s’ensuit que le deuxième grief doit être rejeté.

391 Par leur troisième grief, les requérantes contestent l’extrapolation des données fournies par l’intervenante à l’ensemble de l’industrie de l’Union.

392 À cet égard, tout d’abord, il convient de préciser que la Commission a procédé à l’échantillonnage pour la présente enquête tant pour les producteurs de l’Union que pour les producteurs chinois du produit concerné. Ainsi qu’il résulte des considérations développées au point 353 ci‑dessus, pour autant que cet argument vise à remettre en cause la technique de l’échantillonnage choisie par la Commission, il doit être rejeté.

393 Ensuite, il convient de rappeler que, dans le cadre des affaires antidumping, la Commission dépend de la coopération volontaire des parties pour lui fournir les informations nécessaires dans les délais impartis (arrêt du 28 octobre 1999, EFMA/Conseil, T‑210/95, EU:T:1999:273, point 71). Or, les facteurs macroéconomiques permettent de déterminer le préjudice subi au niveau de l’industrie dans son ensemble et appuient les calculs de la Commission à cet égard.

394 Il ressort du règlement attaqué que la plainte a été soutenue par des producteurs représentant plus de 58 % de la production totale d’éléments de fixation en fer ou en acier réalisée dans l’Union au cours de la période concernée. Dès lors, les données partagées par l’intervenante peuvent être considérées comme représentatives de la situation de l’industrie de l’Union. D’ailleurs, l’objectif d’obtenir une vision de l’industrie de l’Union aussi précise et détaillée que possible ne pourrait être
atteint si la Commission était obligée d’écarter, parmi toutes les données disponibles, les données macroéconomiques au motif que ces dernières n’étaient pas disponibles pour tous les producteurs de l’industrie de l’Union (arrêt du 20 mai 2015, Yuanping Changyuan Chemicals/Conseil, T‑310/12, non publié, EU:T:2015:295, point 147).

395 Enfin, la Commission a expliqué avoir recoupé les données partagées par l’intervenante avec celles des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon. La Commission a rappelé que l’extrapolation de données pour le questionnaire macroéconomique d’une industrie aussi fragmentée constituait un exercice statistique, qui, par définition, nécessitait de déduire des valeurs inconnues de tendances relevées dans les données connues.

396 À cet égard, il convient de constater que l’allégation des requérantes selon laquelle la Commission n’a pas dûment vérifié les données fournies par l’intervenante est spéculative et n’est appuyée par aucune preuve concrète permettant de douter de la vérification opérée par la Commission lors de l’examen desdites données.

397 Dès lors, le troisième grief des requérantes doit être rejeté et, par conséquent, le huitième moyen dans son ensemble.

9.   Sur le neuvième moyen, tiré de la violation des droits procéduraux des requérantes

398 Par leur neuvième moyen, les requérantes allèguent la violation de leurs droits procéduraux pendant l’enquête administrative. Ce moyen est divisé en trois branches, tirées, la première, d’un traitement confidentiel excessif des informations figurant dans le dossier, la deuxième, d’une gestion prétendument médiocre du dossier non confidentiel par la Commission et, la troisième, de l’absence de divulgation de faits essentiels par la Commission.

399 La Commission conteste le bien‑fondé de ce moyen.

400 À titre liminaire, il convient de rappeler les principes et les garanties procédurales que la Commission est tenue de respecter lorsque les parties intéressées à une enquête antidumping souhaitent exercer leurs droits de la défense en accédant à des informations concernant des faits ou des considérations susceptibles de former la base de mesures antidumping, en particulier lorsque ces informations revêtent un caractère confidentiel.

401 L’article 19, paragraphe 1, du règlement de base prévoit que toute information de nature confidentielle soit traitée comme telle par les autorités, dès lors que des raisons valables sont fournies. L’article 19, paragraphe 2, du même règlement prévoit que les parties intéressées qui fournissent des informations confidentielles sont tenues d’en donner des résumés non confidentiels qui doivent être suffisamment détaillés afin de permettre de comprendre raisonnablement la substance des informations
communiquées à titre confidentiel. Dans des circonstances exceptionnelles, lesdites parties peuvent indiquer que des informations ne sont pas susceptibles d’être résumées, mais elles doivent préciser les raisons pour lesquelles un résumé ne peut pas être fourni.

402 L’article 19, paragraphe 3, du règlement de base dispose que, s’il est considéré qu’une demande de traitement confidentiel n’est pas justifiée et si la personne qui a fourni l’information ne veut pas la rendre publique, ni en autoriser la divulgation en termes généraux ou sous forme de résumé, l’information peut être écartée, sauf s’il peut être démontré de manière convaincante à partir de sources appropriées que l’information est correcte. Il précise également que les demandes de traitement
confidentiel ne peuvent pas être rejetées arbitrairement.

403 Conformément à l’article 6, paragraphe 5, du règlement de base, les parties qui se sont fait connaître à la suite de la publication de l’avis d’ouverture d’enquête dans le délai imparti sont entendues si elles ont démontré être effectivement des parties intéressées et s’il existe des raisons particulières de les entendre.

404 En outre, l’article 6, paragraphe 7, du règlement de base dispose que les producteurs de l’Union, les syndicats, les importateurs et les exportateurs ainsi que leurs associations représentatives, les utilisateurs et les associations des consommateurs qui se sont fait connaître conformément à l’article 5, paragraphe 10, dudit règlement, ainsi que les représentants du pays exportateur, peuvent, sur demande écrite, prendre connaissance de tous les renseignements fournis par toute partie concernée
par l’enquête, mis à part les documents internes établis par les autorités de l’Union ou de ses États membres, pour autant que ces renseignements sont pertinents pour la défense de leurs intérêts, qu’ils ne sont pas confidentiels au sens de l’article 19 et qu’ils soient utilisés dans l’enquête. Ces parties peuvent répondre à ces renseignements et leurs commentaires sont pris en considération dans la mesure où ils sont suffisamment étayés dans la réponse.

405 Selon l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base, les plaignants, importateurs et exportateurs ainsi que leurs associations représentatives et les représentants du pays exportateur peuvent demander une information finale sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures provisoires. L’article 20, paragraphe 4, du même règlement précise que l’information finale est donnée par écrit, dès que possible et, normalement un
mois au plus tard avant l’ouverture des procédures prévues à l’article 9, en tenant compte cependant de la nécessité de protéger les informations confidentielles. En effet, lorsque la Commission n’est pas en mesure de communiquer certains faits ou considérations à ce moment‑là, elle le fera dès que possible par la suite.

406 Il ressort de la jurisprudence que le respect des droits de la défense, qui revêt une importance capitale dans les procédures d’enquêtes antidumping, suppose que les entreprises intéressées doivent avoir été mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une pratique
de dumping et du préjudice qui en résulterait (voir arrêt du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 209 et jurisprudence citée).

407 Cependant, l’absence alléguée de prise en compte des observations des requérantes ne constitue pas une violation de leurs droits de la défense ou de leur droit d’être entendues. En effet, si le respect desdits droits exige des institutions de l’Union de permettre aux parties intéressées de faire connaître leur point de vue, il ne peut imposer auxdites institutions d’adhérer à celui‑ci. Le caractère utile de la soumission du point de vue des requérantes requiert seulement que ce point de vue ait
pu être soumis en temps voulu pour que les institutions de l’Union puissent en prendre connaissance et, avec toute l’attention requise, en apprécier la pertinence pour le contenu de l’acte en voie d’adoption. En tout état de cause, il convient de relever que la Commission n’est pas tenue de répondre, dans un règlement fixant des droits antidumping définitifs, à l’ensemble des arguments avancés par les parties intéressées au cours de la procédure d’enquête et que cette absence de réponse ne
saurait automatiquement établir un défaut d’examen de ces arguments (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T‑424/13, EU:T:2016:378, point 126 et jurisprudence citée).

408 S’agissant d’une violation du droit d’accès au dossier de l’enquête, il convient de relever qu’une telle violation ne pourrait entraîner une annulation totale ou partielle du règlement attaqué que si la divulgation des documents en cause avait eu une chance, même réduite, de faire aboutir la procédure administrative à un résultat différent dans l’hypothèse où l’entreprise concernée aurait pu s’en prévaloir au cours de ladite procédure (arrêt du 10 mars 2009, Interpipe Niko Tube et Interpipe
NTRP/Conseil, T‑249/06, EU:T:2009:62, point 134).

409 Cela étant, les droits procéduraux doivent être octroyés légalement à une personne pour qu’elle puisse être considérée comme étant individuellement concernée par ces droits et être recevable à introduire un recours en annulation contre un acte adopté en violation desdits droits (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 52).

410 De surcroît, lesdits droits nécessitent la participation active de ces personnes à la procédure elle‑même, qui doit s’exprimer, à tout le moins, par la présentation d’une demande écrite dans un délai déterminé (voir arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 214 et jurisprudence citée). Le fait, pour des parties intéressées, de se faire connaître et de fournir des informations
pertinentes afin d’établir un échantillon représentatif de ces parties, voire d’être retenues à cette fin, constitue une forme de participation à la procédure antidumping. Toutefois, cette participation ne confère pas auxdites parties les garanties procédurales énoncées à l’article 6, paragraphes 5 et 7, et à l’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base. En effet, l’octroi de ces garanties est soumis à certaines modalités qui impliquent une participation particulière à cette procédure
de la part des mêmes parties, sous la forme d’une manifestation d’intérêt et de demandes écrites. Or, la participation à un échantillonnage, au sens de l’article 17 de ce règlement, ne constitue pas une telle participation particulière (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 216).

411 Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la protection du secret d’affaires constitue un principe général du droit de l’Union. En effet, le maintien d’une concurrence non faussée constitue un intérêt public important dont la sauvegarde peut justifier le refus de divulguer des informations relevant du secret d’affaires (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T‑424/13, EU:T:2016:378, point 165 et jurisprudence citée). Ainsi, afin de concilier le principe du respect
des droits de la défense des parties concernées et celui de la protection du secret d’affaires, dans l’accomplissement de leur devoir d’information, les institutions de l’Union doivent agir avec toute la diligence requise en cherchant à donner aux entreprises concernées, dans la mesure où le respect du secret des affaires demeure assuré, des indications utiles à la défense de leurs intérêts et en choisissant, le cas échéant d’office, les modalités appropriées d’une telle communication (voir
arrêt du 1er juin 2017, Changmao Biochemical Engineering/Conseil, T-442/12, EU:T:2017:372, point 141 et jurisprudence citée).

412 Ainsi, lorsqu’il faut concilier les impératifs de confidentialité et le droit à l’information pour les parties intéressées, les institutions concernées doivent apprécier, au regard de ces informations, la situation particulière de la partie intéressée et, notamment, la position que cette partie intéressée occupe sur le marché considéré par rapport à celle de la personne ayant fourni ces informations (voir arrêt du 19 mai 2021, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and
Electronic Products e.a./Commission, T‑254/18, EU:T:2021:278, point 469 et jurisprudence citée).

413 Cependant, l’objectif de l’article 19 du règlement de base est de protéger non seulement les secrets d’affaires, mais également les droits de la défense des autres parties à la procédure antidumping. Dans ce cadre, l’utilisation par la Commission d’informations dont aucun résumé non confidentiel n’a été fourni ne peut être invoquée, comme motif d’annulation d’une mesure antidumping, par des parties à une procédure antidumping, que si elles peuvent démontrer que l’utilisation de ces informations
a constitué une violation de leurs droits de la défense (voir arrêt du 15 octobre 2020, Zhejiang Jiuli Hi-Tech Metals/Commission, T‑307/18, non publié, EU:T:2020:487, point 82 et jurisprudence citée).

414 ll ressort également de la jurisprudence que c’est en fonction du degré de spécificité des informations demandées qu’il convient d’apprécier le caractère suffisant des renseignements fournis par la Commission (voir arrêt du 15 octobre 2020, Zhejiang Jiuli Hi-Tech Metals/Commission, T‑307/18, non publié, EU:T:2020:487, point 86 et jurisprudence citée).

415 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le neuvième moyen soulevé par les requérantes.

a)   Sur la recevabilité du neuvième moyen

416 En premier lieu, il convient de rappeler que le recours est introduit par plusieurs requérantes, qui sont affectées différemment par le règlement attaqué. En effet, les requérantes sont, d’une part, les trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon et, d’autre part, trente-six producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon, dont les noms figurent à l’annexe 1 du règlement attaqué. Ainsi qu’il ressort du point 37 ci‑dessus, trente-et-un de ces
producteurs‑exportateurs sont représentés, dans le cadre du présent recours, par la CCCME.

417 En deuxième lieu, ainsi qu’il ressort des points 24 et 37 ci‑dessus, les arguments de la CCCME soulevés en son nom propre sont irrecevables dans le cadre du présent recours. Les requérantes ont d’ailleurs reconnu cette irrecevabilité en ce qui concernait la CCCME dans leur réponse écrite du 15 janvier 2024 aux questions du Tribunal ainsi qu’à l’audience du 7 février 2024.

418 En troisième lieu, il importe de relever que, dans l’arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission (C‑478/21 P, EU:C:2023:685), la Cour a confirmé l’irrecevabilité de l’allégation d’une violation des droits de la défense des membres de la CCCME et des autres personnes morales dont les noms figuraient en annexe au règlement, en ce qu’ils n’avaient pas formulé de demandes spécifiques visant à se voir communiquer des
informations essentielles à la défense de leurs intérêts. En effet, dans cette procédure, la CCCME représentait « l’intérêt de l’industrie chinoise de la fonte dans son ensemble » et ses membres n’avaient pas été identifiés pendant la procédure administrative.

419 En l’espèce, la situation est différente, dans la mesure où la CCCME a participé à l’enquête en tant qu’association représentant les intérêts de ses membres pour lesquels elle a fourni la preuve d’habilitation de ces derniers à la Commission.

420 En effet, il convient de constater, premièrement, que, au point 5.6 de l’avis d’ouverture de l’enquête ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué, la Commission a annoncé que, afin de participer à l’enquête, les parties intéressées, telles que les producteurs‑exportateurs, les producteurs de l’Union, les importateurs et leurs associations représentatives, les utilisateurs ou leurs associations représentatives, les syndicats et les organisations de consommateurs représentatives, devaient
d’abord démontrer qu’il existait un lien objectif entre leurs activités et le produit soumis à l’enquête et que l’accès au dossier consultable par les parties intéressées se ferait par le biais de la plateforme Tron.tdi.

421 Les requérantes ont soutenu, dans leurs réponses aux questions du Tribunal, que toutes les entreprises et membres qui s’étaient conformés à cette démarche avaient automatiquement acquis le statut de partie intéressée.

422 À cet égard, les requérantes ont fait valoir que, dans l’avis d’ouverture, la Commission avait invité tous les exportateurs chinois du produit concerné à participer à l’enquête, en soumettant un formulaire, en précisant que tous les producteurs qui participeraient en conformité avec les exigences dudit avis d’ouverture seraient considérés comme des parties intéressées s’il existait un lien objectif entre leurs activités et le produit soumis à l’enquête. Dès lors, selon les requérantes, tous les
producteurs‑exportateurs ayant participé à la procédure par le biais de la plateforme Tron.tdi ont été des parties intéressées ayant acquis des droits procéduraux. Ainsi, d’une part, le libellé de l’avis d’ouverture invitant toute partie intéressée à participer à l’enquête et, d’autre part, la procédure d’échange d’informations entre la Commission et les parties intéressées étant différents de ceux de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import
and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission (C‑478/21 P, EU:C:2023:685), en ce qu’elle serait passée exclusivement par la plateforme Tron.tdi, impliqueraient que cela distingue la présente affaire de celle ayant donné lieu à l’arrêt susmentionné. Dès lors, les requérantes estiment que le neuvième moyen est recevable dans ses trois branches.

423 Tout d’abord, au sujet de la première branche du neuvième moyen, tiré d’une violation de l’article 19, paragraphes 1 à 3, du règlement de base, les requérantes soutiennent que ces dispositions imposent de toute manière des obligations objectives à la Commission qui devrait veiller à limiter le traitement confidentiel des données pertinentes au strict nécessaire. Par ailleurs, les requérantes soulignent que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce
for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission (C‑478/21 P, EU:C:2023:685), aucun moyen ne concernait la violation de l’article 19 du règlement de base. Dès lors, les requérantes estiment que cette branche est recevable en ce qu’elle est soulevée tant par les producteurs‑exportateurs individuels que par la CCCME au nom de ses membres.

424 Ensuite, les requérantes estiment que la deuxième branche, par laquelle elles allèguent une mauvaise gestion du dossier confidentiel en violation de l’article 6, paragraphe 7, et de l’article 19, paragraphes 1 à 3, du règlement de base et des droits de la défense, est également recevable.

425 Enfin, les requérantes soutiennent que les producteurs‑exportateurs individuels et les membres de la CCCME ont expressément demandé l’accès au dossier et aux conclusions définitives par leur enregistrement sur la plateforme Tron.tdi et que, en omettant de leur communiquer des faits essentiels, la Commission a violé l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base.

426 À titre subsidiaire, au cas où le Tribunal n’accepterait pas la recevabilité de certains griefs soulevés dans le cadre du neuvième moyen par la CCCME au nom de ses membres, les requérantes font valoir que le neuvième moyen est recevable en ce qui concerne les arguments soulevés par les producteurs-exportateurs individuels que la CCCME a représentés pendant l’enquête.

427 À cet égard, les requérantes ont fourni des mandats de représentation par la CCCME de plusieurs sociétés qui avaient été communiqués à la Commission dans le cadre de l’enquête. En effet, ainsi qu’il ressort du point 5 ci‑dessus, la CCCME n’a été considérée comme partie intéressée à la procédure administrative que dans la mesure où elle était habilitée par ces producteurs d’éléments de fixation spécifiques à les représenter.

428 Il ressort des mandats que les requérantes ont communiqués au Tribunal que la CCCME n’a pas représenté devant la Commission l’ensemble des membres concernés au nom desquels elle a introduit le présent recours, c’est-à-dire que la CCCME a représenté devant la Commission des producteurs‑exportateurs pour partie différents de ceux qu’elle représente devant le Tribunal dans le cadre du présent recours.

429 En effet, premièrement, il ressort des mandats fournis par les requérantes au Tribunal que la CCCME avait été mandatée pour représenter dans le cadre de la procédure administrative les trois producteurs‑exportateurs retenus dans l’échantillon. Cependant, ces derniers n’ont pas apporté la preuve qu’ils étaient membres de cette association.

430 Deuxièmement, la CCCME a représenté neuf sociétés qui sont des producteurs‑exportateurs ayant collaboré non retenus dans l’échantillon et qui figurent à l’annexe 1 du règlement attaqué. Elles sont membres de la CCCME et sont représentées également par cette dernière dans le cadre du présent recours.

431 Troisièmement, la CCCME a également représenté devant la Commission huit autres sociétés qui figurent à l’annexe 1 du règlement attaqué et qui ne sont pas parties au présent recours. Ces sociétés n’ont pas non plus apporté la preuve d’être membres de la CCCME, mais elles ne sont, en tout état de cause, pas parties requérantes dans le présent recours.

432 Quatrièmement, la CCCME a également représenté devant la Commission deux sociétés dont les noms ne figurent pas dans le règlement attaqué et qui ne sont pas non plus représentées par la CCCME dans le cadre du présent recours.

433 Partant, en ce qui concerne la recevabilité des allégations soulevées par la CCCME devant le Tribunal au nom de ses membres, parmi les trente‑et‑un membres concernés de la CCCME au nom desquels elle a introduit le présent recours, elle n’a représenté devant la Commission que neuf producteurs‑exportateurs chinois non retenus dans l’échantillon. Ainsi que les parties l’ont confirmé à plusieurs reprises lors de l’audience, la Commission n’a pas vérifié si les sociétés accordant ces mandats étaient
membres de la CCCME. Aucune preuve supplémentaire à cet égard n’a été produite par les parties. Les requérantes n’ont pas été en mesure de confirmer avec certitude si toutes les sociétés ayant accordé les mandats de représentation devant la Commission étaient membres de la CCCME. Les requérantes ont, par ailleurs, allégué que le mandat seul devrait suffire aux fins de la représentation des intérêts de ces sociétés devant la Commission.

434 Or, d’une part, ainsi qu’il ressort du point 26 ci‑dessus, une association telle que la CCCME n’est recevable à représenter des producteurs‑exportateurs devant le juge de l’Union que si elle apporte la preuve que ces producteurs‑exportateurs en sont membres.

435 D’autre part, la Cour a considéré que, même si les membres de la CCCME et les autres personnes morales dont les noms figurent en annexe avaient participé à l’échantillonnage réalisé au cours de la procédure antidumping en cause, lesdits membres et ces autres personnes étaient irrecevables à faire valoir une violation de leurs garanties procédurales tirée du fait que la Commission ne leur avait pas communiqué des informations essentielles à la défense de leurs intérêts, puisqu’ils n’avaient pas
formulé de demandes visant à se voir communiquer ces informations au cours de cette procédure (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, point 217).

436 En effet, les droits procéduraux sont des droits propres à la personne à laquelle ils sont conférés et ils ont un caractère subjectif, si bien que ce sont les parties concernées elles‑mêmes qui doivent être en mesure de les exercer effectivement, indépendamment de la nature de la procédure dont elles font l’objet. Or, la possibilité pour une association d’exercer les droits procéduraux de ses membres ne saurait conduire à contourner les conditions que, en vertu de la jurisprudence, les
entreprises en cause auraient dû respecter si elles avaient voulu exercer elles‑mêmes leurs droits procéduraux (arrêt du 21 septembre 2023, China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products e.a./Commission, C‑478/21 P, EU:C:2023:685, points 223 et 224).

437 Il résulte de ces considérations qu’un producteur-exportateur membre de la CCCME ne saurait se contenter des demandes de cette dernière, s’il n’a pas expressément fait valoir ses droits de la défense pendant l’enquête administrative. En effet, si l’inscription sur la plateforme Tron.tdi permettait aux producteurs‑exportateurs individuels de recevoir des informations en temps utile et de suivre l’évolution de l’enquête administrative, à défaut d’une demande explicite pour davantage
d’informations, les producteurs‑exportateurs en question ne pouvaient pas prétendre exercer des droits procéduraux qui leur sont spécifiques.

438 À cet égard, il convient de rappeler que le droit d’accès aux renseignements non confidentiels au titre de l’article 6, paragraphe 7, du règlement de base est lié à la qualité de la partie intéressée qui s’est fait connaître conformément à l’article 5, paragraphe 10, du même règlement (arrêt du 27 janvier 2000, BEUC/Commission, T‑256/97, EU:T:2000:21, point 32) et que la Commission doit, au cas par cas, décider si une partie doit être considérée comme une partie intéressée compte tenu des
circonstances propres à chaque espèce (arrêt du 27 janvier 2000, BEUC/Commission, T‑256/97, EU:T:2000:21, point 76).

439 De plus, il résulte de la jurisprudence qu’il appartient aux parties intéressées à une procédure d’enquête antidumping de mettre les institutions en mesure d’apprécier les problèmes que peut leur poser l’absence d’un élément dans les informations qui ont été mises à leur disposition. A fortiori, une telle partie intéressée n’est pas fondée à se plaindre devant le juge de l’Union du fait qu’une information n’a pas été mise à sa disposition, si, au cours de la procédure d’enquête ayant abouti au
règlement antidumping litigieux, elle n’a formulé auprès des institutions aucune demande concernant cette information particulière (voir arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T‑424/13, EU:T:2016:378, point 93 et jurisprudence citée). Il s’ensuit que ces demandes doivent être faites par les producteurs‑exportateurs individuels eux‑mêmes, qui ne sauraient se contenter des demandes de la CCCME.

440 La différence de la présente procédure, dont se prévalent les requérantes, dans la mesure où la communication de la Commission avec les parties intéressées s’est faite différemment, à savoir par le biais de la plateforme Tron.tdi, qui permettait aux parties intéressées de soumettre des informations et des observations et de suivre l’enquête, n’est pas susceptible de mettre en cause ce constat quant aux exigences procédurales attachées aux droits de la défense des parties. En effet, ainsi que la
Commission l’a soutenu à juste titre lors de l’audience, la plateforme Tron.tdi vise uniquement à simplifier la communication avec les parties et à fluidifier les échanges. En tout état de cause, la qualité de partie intéressée au titre du règlement de base et les droits qui y sont attachés ne sauraient dépendre du moyen de communication de la Commission avec ces parties.

441 Par conséquent, pour autant que les griefs soulevés dans le neuvième moyen concernent les producteurs‑exportateurs non retenus dans l’échantillon qui n’ont pas présenté de demandes spécifiques tendant à la divulgation d’informations additionnelles pour l’exercice de leurs droits procéduraux, ils sont irrecevables, qu’ils soient soulevés par la CCCME au nom de ses membres ou par les cinq producteurs‑exportateurs non retenus dans l’échantillon.

442 En quatrième lieu, s’agissant des trois producteurs‑exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, il ressort de la jurisprudence citée au point 409 ci‑dessus que la seule participation à l’échantillonnage n’accorde pas aux producteurs‑exportateurs concernés des droits procéduraux particuliers à défaut de demandes visant à se voir communiquer des informations qu’ils considèrent comme essentielles à la défense de leurs intérêts.

443 Par conséquent, il convient de conclure au regard des précisions qui précèdent que le neuvième moyen ne peut être recevable qu’en ce qu’il est soulevé par les producteurs‑exportateurs individuels alléguant la violation de leurs droits de la défense qui ont manifesté pendant la procédure administrative la volonté d’exercer lesdits droits. Afin d’apprécier la recevabilité des griefs soulevés, il convient dès lors d’examiner, pour chaque branche, si les entreprises en cause ont respecté les
conditions leur permettant d’exercer effectivement leurs droits de la défense.

b)   Sur l’exercice des droits procéduraux des requérantes

1) Sur la première branche

444 Par la première branche du neuvième moyen, les requérantes font valoir une violation de l’article 19, paragraphes 1 à 3, du règlement de base et de leurs droits de la défense, dans la mesure où tous les documents qui ont été soumis par l’intervenante ou par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ont fait l’objet d’un traitement confidentiel sans raison valable ou étaient très lacunaires dans leur résumé non confidentiel, ce qui aurait privé les parties intéressées de la
possibilité de formuler des observations ou de vérifier l’exactitude des éléments de preuve qu’ils contenaient. Les requérantes contestent, en particulier, le traitement confidentiel accordé, premièrement, au questionnaire macroéconomique, deuxièmement, aux versions non confidentielles des réponses au questionnaire des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et, troisièmement, à la réponse de l’intervenante à la demande de complément d’information de la Commission concernant les
indicateurs macroéconomiques.

445 Selon les requérantes, la violation de leurs droits procéduraux est aggravée par le traitement anonyme accordé à tous les producteurs de l’Union qui ont fourni des informations et par les refus réitérés de communiquer quelque information que ce soit sur la gamme de produits de ces sociétés et sur le caractère représentatif de ces derniers quant au volume des ventes.

446 À cet égard, s’agissant, d’une part, de la confidentialité des réponses au questionnaire macroéconomique, il ressort du règlement attaqué que seules l’EFDA et la CCCME ont contesté la confidentialité de ces informations pendant la procédure administrative. Il en est de même pour la contestation de la confidentialité des réponses aux questions de producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon ainsi que de la confidentialité de la réponse de l’intervenante à la demande de complément
d’information de la Commission concernant les indicateurs macroéconomiques.

447 Or, d’une part, l’EFDA n’est pas une partie requérante et, d’autre part, conformément à la conclusion au point 434 ci‑dessus, la CCCME ne peut pas invoquer la violation des droits procéduraux de ses membres si ceux‑ci n’ont pas fait valoir ces droits devant la Commission par des demandes écrites.

448 D’autre part, s’agissant des noms des sociétés ayant répondu au questionnaire macroéconomique, il ressort des considérants 21 et 396 du règlement attaqué que les seules parties intéressées qui ont contesté l’anonymat des producteurs de l’Union étaient la CCCME, l’EFDA et la République populaire de Chine. Dans la mesure où aucun producteur‑exportateur qui fait partie des parties requérantes n’a demandé à la Commission davantage d’informations sur l’identité des producteurs de l’Union,
conformément à la conclusion au point 440 ci‑dessus, ce grief doit être rejeté.

449 Il s’ensuit que la première branche du neuvième moyen est irrecevable et doit être rejetée.

2) Sur la deuxième branche

450 Les requérantes contestent la gestion du dossier non confidentiel de la Commission qui aurait violé l’article 6, paragraphe 7, et l’article 19, paragraphes 1 à 3, du règlement de base et leurs droits de la défense, puisque les parties intéressées n’auraient pas eu accès pleinement et en temps utile au dossier non confidentiel pendant l’enquête.

451 Premièrement, cela aurait privé les parties intéressées de la possibilité de suivre au plus près les principaux développements de l’enquête ou de soumettre des observations à leur égard, comme la décision de la Commission de modifier l’échantillon des producteurs de l’Union. De plus, les parties intéressées n’auraient pas été informées des échanges ex parte entre la Commission et l’intervenante.

452 Deuxièmement, les requérantes allèguent qu’un certain nombre de dossiers ont été supprimés du dossier non confidentiel.

453 Troisièmement, les requérantes suggèrent qu’il existe divers autres fichiers qui n’ont jamais été téléchargés dans le dossier non confidentiel.

454 S’agissant de la gestion du dossier non confidentiel par la Commission, en premier lieu, il convient de constater qu’il résulte du libellé même de l’article 6, paragraphe 7, du règlement de base, rappelé au point 404 ci-dessus, que les parties intéressées à une procédure d’enquête antidumping, telles que les requérantes, ne sont pas susceptibles de se plaindre de l’absence d’un document dans le dossier non confidentiel de l’enquête si elles n’ont pas présenté une demande écrite pour prendre
connaissance dudit document (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T‑424/13, EU:T:2016:378, point 109).

455 Or, il ressort des considérants 22 et 24 du règlement attaqué que la prétendue insuffisance du dossier non confidentiel a été contestée pendant la procédure administrative uniquement par la CCCME et l’EFDA à la suite de la communication des conclusions définitives.

456 En deuxième lieu, s’agissant de la communication entre la Commission et l’intervenante, il ressort du considérant 47 du règlement attaqué que seules l’EFDA et la CCCME avaient demandé sa divulgation.

457 En troisième lieu, s’agissant de la prétendue suppression d’un certain nombre de documents du dossier non confidentiel, seule la CCCME a demandé davantage d’informations de la part de la Commission à cet égard.

458 Partant, eu égard à l’identité des parties intéressées ayant formulé des demandes pendant la procédure administrative et à la conclusion au point 440 ci‑dessus, il convient de considérer que cette branche est également irrecevable.

3) Sur la troisième branche

459 Les requérantes contestent le refus de la Commission de mettre à la disposition des parties intéressées des informations sur lesquelles elle se serait fondée pour établir ses constatations définitives, en violation de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base et des droits de la défense. Or, les informations communiquées par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon et le questionnaire macroéconomique auraient été les deux principales sources sur lesquelles la Commission
se serait fondée pour établir ses conclusions sur le préjudice et le lien de causalité.

460 À cet égard, il ressort du règlement attaqué qu’aucun producteur‑exportateur individuel comptant parmi les parties requérantes n’a demandé la divulgation des informations précises communiquées par les producteurs de l’Union. Il s’ensuit que les allégations des requérantes dans le cadre de cette branche sont irrecevables et, avec elles, le neuvième moyen dans son ensemble, qui doit être rejeté.

461 Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

IV. Sur les dépens

462 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission et par l’intervenante, conformément aux conclusions de ces dernières.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

  1) Le recours est rejeté.

  2) China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME) et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe sont condamnées aux dépens.

Schalin

Steinfatt

  Kukovec

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 octobre 2024.

Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

( 1 ) La liste des autres parties requérantes n’est annexée qu’à la version notifiée aux parties.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : T-263/22
Date de la décision : 02/10/2024

Analyses

Dumping – Importations de certains éléments de fixation en fer ou en acier originaires de Chine – Institution d’un droit antidumping définitif – Recours en annulation – Recevabilité – Qualité pour agir – Association représentative d’exportateurs – Article 2, paragraphe 6 bis, du règlement (UE) 2016/1036 – Calcul de la valeur normale – Choix du pays représentatif approprié – Article 2, paragraphe 10, du règlement 2016/1036 – Ajustements – Défaut de coopération – Article 18 du règlement 2016/1036 – Calcul de la marge de dumping pour les producteurs‑exportateurs ayant coopéré non retenus dans l’échantillon – Définition du produit concerné – Préjudice pour l’industrie de l’Union – Analyse du préjudice par segment – Lien de causalité – Calcul de la sous‑cotation des prix et de la marge de préjudice – Indicateurs macroéconomiques – Droits procéduraux – Traitement confidentiel.


Parties
Demandeurs : China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME) e.a.
Défendeurs : Commission européenne.

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2024
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2024:663

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