ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre élargie)
19 mars 2025 ( *1 )
« Dumping – Importation de polymères superabsorbants originaires de la République de Corée – Règlement d’exécution (UE) 2022/547 – Droit antidumping définitif – Article 3, paragraphes 2, 3, 5, 6 et 7, du règlement (UE) 2016/1036 – Article 9, paragraphe 4, du règlement 2016/1036 – Détermination du préjudice – Examen de l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix des produits similaires vendus sur le marché de l’Union – Analyse de la sous-cotation des prix – Application de la
méthode des numéros de contrôle de produit – Lien de causalité – Analyse d’imputation et de non-imputation – Autres facteurs connus – Montant du droit antidumping – Droits de la défense – Principe de bonne administration »
Dans l’affaire T‑356/22,
LG Chem, Ltd., établie à Séoul (Corée du Sud), représentée par Mes P. Vander Schueren, E. Gergondet et A. Nosowicz, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. G. Luengo et J. Zieliński, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
soutenue par
BASF Antwerpen NV, établie à Anvers (Belgique),
et
Nippon Shokubai Europe NV, établie à Anvers,
représentées par Mes M.-S. Dibling et J. Pauwelyn, avocats,
et par
Evonik Superabsorber GmbH, établie à Essen (Allemagne), représentée par Mes T. Wessely, T. Oeyen, avocats, et M. A. Çelebi, solicitor,
parties intervenantes,
LE TRIBUNAL (septième chambre élargie),
composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. E. Buttigieg, G. Hesse, I. Dimitrakopoulos (rapporteur) et Mme B. Ricziová, juges,
greffier : Mme M. Zwozdziak-Carbonne, administratrice,
vu la phase écrite de la procédure,
à la suite de l’audience du 11 avril 2024,
rend le présent
Arrêt ( 1 )
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, LG Chem, Ltd., demande l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2022/547 de la Commission, du 5 avril 2022, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de polymères superabsorbants originaires de la République de Corée (JO 2022, L 107, p. 27, ci-après le « règlement attaqué »), dans la mesure où il s’applique à elle.
[omissis]
II. Conclusions des parties
23 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler le règlement attaqué, dans la mesure où il la concerne ;
– condamner la Commission aux dépens.
24 La Commission, soutenue par BASF, NSE et Evonik, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
III. En droit
25 À l’appui de son recours, la requérante invoque quatre moyens. Le premier moyen est tiré, en substance, de ce que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation, enfreint l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base et violé les droits de la défense de la requérante lorsqu’elle a analysé l’effet des importations en provenance de la République de Corée sur les prix. Le deuxième moyen est tiré, en substance, de ce que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation et
violé l’article 3, paragraphes 2, 5, 6 et 7, du règlement de base ainsi que son obligation de motivation en analysant la situation de préjudice des producteurs de l’Union de manière biaisée ainsi qu’en attribuant le préjudice allégué aux importations coréennes plutôt qu’à d’autres facteurs connus. Le troisième moyen est tiré, en substance, de ce que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation et agi en violation de l’article 3, paragraphe 3, et de l’article 9, paragraphe 4, du
règlement de base ainsi que des droits de la défense de la requérante en établissant la marge de préjudice sur la base d’un NCP simplifié, en ne fournissant pas de résumés non confidentiels des calculs de la marge de préjudice appropriés et en ne tenant pas compte d’autres facteurs de préjudice connus dans sa détermination de la marge de préjudice. Le quatrième moyen est tiré, en substance, de ce que la Commission a mené l’enquête en violation des droits de la défense de la requérante et du droit
à une bonne administration.
[omissis]
C. Sur le troisième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation ainsi que d’une violation de l’article 3, paragraphe 3, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base et des droits de la défense du fait de l’établissement de la marge de préjudice sur la base d’un NCP simplifié, de l’absence de fourniture de résumés non confidentiels des calculs de la marge de préjudice appropriés et d’un défaut de prise en compte d’autres facteurs de préjudice connus dans la détermination de la marge de
préjudice
266 Dans le cadre du troisième moyen, la requérante soutient, en substance, que la marge de préjudice établie par la Commission dans le règlement attaqué est incompatible avec l’article 3, paragraphe 3, et l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base et que la Commission a violé ses droits de la défense. La requérante développe deux griefs à l’appui de ce moyen.
[omissis]
268 Dans le cadre du second grief, la requérante fait valoir que, au titre de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, la Commission aurait dû imposer un droit antidumping ne dépassant pas ce qui était nécessaire pour contrer les effets préjudiciables des importations en cause et que ce montant ne devrait donc pas aller jusqu’à contrer des effets préjudiciables causés par des facteurs autres que ces importations. Or, la requérante estime avoir démontré par la troisième branche du deuxième
moyen qu’il existait d’autres facteurs de préjudice connus que la Commission aurait dû examiner. Selon la requérante, parce que les calculs de la marge de préjudice effectués par la Commission ne tiennent pas compte de ces autres facteurs, il est impossible de garantir que le montant du droit antidumping imposé ne contre pas également des effets préjudiciables causés par des facteurs autres que les importations en provenance de la République de Corée. Elle ajoute que, lors de la procédure
administrative, elle avait évalué de manière prudente le montant du préjudice qui aurait dû être attribué à d’autres facteurs connus. En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel le calcul de la sous-cotation des prix indicatifs ne tient, par définition, pas compte des effets dus à d’autres causes de préjudice, la requérante allègue qu’il contredit l’obligation de ne pas imputer aux importations ciblées les effets préjudiciables dus à d’autres facteurs et qu’il est erroné dans la
mesure où les prix coréens sont tout autant déprimés par les effets des importations japonaises et turques à bas prix que par la stratégie prédatrice de NSE en matière de prix et la formule de calcul des prix SAP, tandis que les coûts de l’industrie de l’Union sont gonflés par les coûts d’investissement élevés.
269 La Commission, soutenue par les intervenantes, conteste les arguments de la requérante. La Commission avance, en substance, que la marge de préjudice telle que calculée dans le règlement attaqué tient compte seulement de la différence entre les prix de vente de la requérante et le prix cible hypothétique de l’industrie de l’Union. Selon elle, la marge de préjudice est donc l’expression du droit nécessaire pour éliminer le préjudice découlant des seules importations de la requérante.
270 Il convient tout d’abord de rappeler que le deuxième alinéa de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base prévoit que « le montant du droit antidumping n’excède pas la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union » et que « l’article 7, paragraphes 2 bis, 2 ter, 2 quater et 2 quinquies, s’applique en conséquence ».
271 Aux termes de l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, tel que modifié par le règlement (UE) 2018/825 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018 (JO 2018, L 143, p. 1) :
« Lorsque la marge de préjudice est calculée sur la base d’un prix cible, le bénéfice cible utilisé est établi en tenant compte de facteurs tels que le niveau de rentabilité avant l’augmentation des importations en provenance du pays faisant l’objet d’une enquête, le niveau de rentabilité nécessaire pour couvrir l’ensemble des coûts et investissements, la recherche, le développement et l’innovation, et le niveau de rentabilité escompté dans des conditions normales de concurrence. Cette marge de
bénéfice ne doit pas être inférieure à 6 %. »
272 En outre, aux termes de l’article 7, paragraphe 2 quinquies, du règlement de base, tel que modifié par le règlement 2018/825 :
« Lorsque le prix cible est établi, le coût de production réel pour l’industrie de l’Union, qui résulte d’accords multilatéraux sur l’environnement auxquels l’Union est partie, et de leurs protocoles, ou de conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) énumérées à l’annexe I bis du présent règlement, est dûment répercuté. En outre, il est tenu compte des coûts futurs, qui ne sont pas couverts par le paragraphe 2 quater du présent article, qui résultent de ces accords et
conventions et que l’industrie de l’Union supportera au cours de la période d’application de la mesure en vertu de l’article 11, paragraphe 2. »
273 Il y a lieu de rappeler à cet égard que l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base énonce la « règle du droit moindre », à savoir que le montant du droit antidumping doit être inférieur à la marge de dumping établie si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union. Cette règle a pour objectif d’éviter que le droit antidumping imposé excède ce qui est nécessaire pour éliminer le préjudice causé à cette industrie par les importations faisant l’objet d’un
dumping. Une telle règle est justifiée au regard de la nature et de la finalité des droits antidumping qui ne constituent ni des sanctions ni des mesures compensatoires destinées à réparer des dommages subis, mais des mesures de défense contre la concurrence déloyale résultant d’importations faisant l’objet de dumping. Ces droits ne visent qu’à empêcher ou à rendre économiquement inintéressantes les importations faisant l’objet d’un dumping et ainsi à remédier à un déséquilibre sur le marché
national, causé par ce dumping (voir arrêt du 8 juin 2023, Severstal et NLMK/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:459, points 72 et 73 et jurisprudence citée).
274 En outre, si l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base ne comporte aucune indication pour le calcul concret du droit antidumping et n’impose aux institutions aucune méthodologie particulière afin d’assurer que le droit antidumping ne dépasse pas ce qui est nécessaire afin de parer aux effets préjudiciables des importations du produit concerné faisant l’objet de dumping, il convient de rappeler que lesdites institutions doivent dans ce cadre tenir compte des conclusions auxquelles elles
sont parvenues au terme des analyses d’imputation et de non-imputation effectuées au titre de l’article 3, paragraphes 6 et 7, de ce règlement (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil, C‑236/17 P, EU:C:2019:258, points 161 et 163).
275 Afin que le montant du droit antidumping, imposé au titre de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour contrer les effets préjudiciables des importations faisant l’objet du dumping, il est nécessaire qu’il ne tienne pas compte des effets préjudiciables causés par des facteurs autres que ces importations. En d’autres termes, il convient que les institutions tiennent compte, aux fins de la détermination de ce montant, des conclusions auxquelles
elles sont parvenues à la suite de l’examen relatif à la détermination de l’existence d’un préjudice, au sens de l’article 3, paragraphes 6 et 7, de ce règlement. Ce constat est en outre confirmé par le libellé de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, qui vise le « dumping et [le] préjudice en résultant ». Ainsi, le terme « préjudice », dans ce même paragraphe, doit être compris de la même manière comme se référant au préjudice résultant du dumping, à savoir au préjudice causé
uniquement par les importations faisant l’objet du dumping (arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil, C‑236/17 P, EU:C:2019:258, points 169 et 170 ; voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2020, Changmao Biochemical Engineering/Distillerie Bonollo e.a., C‑461/18 P, EU:C:2020:979, point 65).
276 En ce qui concerne l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, il convient de relever que celui-ci codifie largement l’approche suivie dans le cadre de la méthode dite de « sous‑cotation des prix indicatifs » afin de déterminer la marge dite « de préjudice » (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Emiliou dans les affaires jointes Severstal et Novolipetsk Steel/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:20, points 33 à 35 et 57).
277 En vertu de cette méthode, la marge de préjudice est calculée en comparant le prix des importations faisant l’objet d’un dumping à un prix de vente indicatif de l’industrie de l’Union. Ce dernier prix correspond au prix que cette industrie pouvait raisonnablement escompter pratiquer sur le marché de l’Union en l’absence de ces importations. Pour établir un tel prix hypothétique, un bénéfice cible est ajouté au coût de production de l’industrie de l’Union. Ce bénéfice cible correspond à la marge
bénéficiaire que l’industrie de l’Union pouvait raisonnablement escompter dans des conditions normales de marché (arrêt du 8 juin 2023, Severstal et NLMK/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:459, point 74).
278 La Cour a jugé, en substance, que l’utilisation de cette méthode relevait de la marge d’appréciation de la Commission. L’utilisation d’un prix indicatif au lieu du prix réel des ventes de l’industrie de l’Union pour déterminer la marge de préjudice permet de tenir compte de la pression à la baisse qu’exercent les importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix de vente de l’industrie de l’Union. Or, la prise en compte de cette pression contribue au caractère vraisemblable des résultats
obtenus en utilisant cette méthode (arrêt du 8 juin 2023, Severstal et NLMK/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:459, point 77).
279 Enfin, l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base est applicable aux procédures initiées à partir du 8 juin 2018, de sorte qu’il est applicable en l’espèce.
280 En l’espèce, la Commission a appliqué l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base et a calculé la marge de préjudice sur la base d’un prix cible.
281 En particulier, la Commission a indiqué, dans la section 5 du règlement attaqué, que, en raison de leur volume et de leurs prix, les importations en provenance de la République de Corée causaient un préjudice important à l’industrie de l’Union, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement de base. Dans le cadre de l’appréciation de l’article 3, paragraphe 7, du règlement de base, la Commission, tout en reconnaissant que les importations en provenance de la Turquie et du Japon constituaient
des facteurs ayant contribué au préjudice subi par l’industrie de l’Union, a conclu, en substance, que lesdits facteurs n’étaient pas suffisamment significatifs pour atténuer ce lien de causalité.
282 Dans la section 7 du règlement attaqué, la Commission a examiné si un droit plus faible que la marge de dumping suffirait à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union par les importations faisant l’objet d’un dumping, conformément à l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base. La Commission a considéré, au considérant 378 du règlement attaqué, que tel serait le cas si l’industrie de l’Union était en mesure de couvrir ses coûts de production et d’obtenir un bénéfice raisonnable (en
d’autres termes, un « bénéfice cible ») en vendant à un prix cible au sens de l’article 7, paragraphes 2 quater et 2 quinquies, du règlement de base.
283 Aux considérants 378 à 380 et 383 et 384 du règlement attaqué, la Commission a expliqué sa méthodologie comme suit :
« (378) La Commission a d’abord établi le montant du droit nécessaire pour éliminer le préjudice subi par l’industrie de l’Union. Dans ce cas, le préjudice serait éliminé si l’industrie de l’Union était en mesure de couvrir ses coûts de production, y compris les coûts résultant d’accords multilatéraux sur l’environnement auxquels l’Union est partie, et de leurs protocoles, et de conventions de l’OIT énumérées à l’annexe I bis du règlement de base, et était en mesure d’obtenir un bénéfice
raisonnable (ci-après le “bénéfice cible”) en vendant à un prix cible au sens de l’article 7, paragraphes 2 quater et 2 quinquies, du règlement de base.
(379) Conformément à l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, pour établir le bénéfice cible, la Commission a tenu compte du niveau de rentabilité avant l’augmentation des importations en provenance du pays concerné, et du niveau de rentabilité escompté dans des conditions normales de concurrence. Cette marge de bénéfice ne devrait pas être inférieure à 6 %.
(380) La Commission a établi une marge de bénéfice de base couvrant l’ensemble des coûts dans des conditions normales de concurrence. L’industrie de l’Union a subi des pertes sur l’ensemble de la période considérée. Cette marge de bénéfice étant inférieure au minimum de 6 % requis par l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, elle a été remplacée par une marge de bénéfice de 6 %.
[…]
(383) Sur cette base, la Commission a calculé un prix non préjudiciable du produit similaire pour l’industrie de l’Union en appliquant la marge de bénéfice cible de 6 % au coût de production des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon pendant la période d’enquête puis elle a ajouté les ajustements apportés au titre de l’article 7, paragraphe 2 quinquies, du règlement de base, type par type.
(384) La Commission a ensuite déterminé le niveau d’élimination du préjudice sur la base d’une comparaison type par type entre le prix à l’importation moyen pondéré des producteurs-exportateurs retenus dans l’échantillon dans le pays concerné, utilisé pour établir la sous-cotation des prix, et le prix non préjudiciable moyen pondéré du produit similaire vendu par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon sur le marché libre de l’Union au cours de la période d’enquête. Toute
différence résultant de cette comparaison a été exprimée en pourcentage de la valeur CAF [coût, assurance, fret] moyenne pondérée à l’importation. »
284 Le niveau d’élimination du préjudice (marge de préjudice définitive) a ainsi été déterminé à 34,4 % en ce qui concerne la requérante (voir considérant 385 du règlement attaqué).
285 Enfin, la Commission a précisé ce qui suit :
« (386) À la suite de l’information finale, [la requérante] a fait valoir que la détermination de la marge de préjudice était entachée de la même erreur que les calculs de la sous-cotation, et que ses considérations relatives à la sous-cotation s’appliquaient mutatis mutandis. En outre, la marge de préjudice devrait être ajustée en fonction de l’incidence des autres facteurs avancés par [la requérante].
(387) La Commission a renvoyé aux arguments qu’elle a formulés aux considérants 184 à 188 ainsi qu’à sa réfutation des arguments de [la requérante] sur l’incidence des importations en provenance d’autres pays, la formule de calcul des prix des SAP et les investissements de l’industrie de l’Union, énoncée dans les sections correspondantes de l’analyse du lien de causalité. Ces allégations ont donc été rejetées également en ce qui concerne la détermination de la marge de préjudice. »
[omissis]
288 En second lieu, la requérante soutient que la méthodologie utilisée par la Commission dans le règlement attaqué n’était pas de nature à garantir l’absence de prise en compte par le montant du droit antidumping imposé des effets préjudiciables causés par des facteurs autres que les importations coréennes, à savoir, d’une part, la formule de calcul des SAP et l’impact des investissements réalisés par l’industrie de l’Union et, d’autre part, les importations en provenance de Turquie et du Japon.
289 Premièrement, s’agissant de la formule de calcul des SAP et de l’impact des investissements réalisés par l’industrie de l’Union, il ressort de l’examen du premier grief de la troisième branche du deuxième moyen (voir points 227 à 232 ci-dessus) que la requérante n’a pas démontré que de tels facteurs auraient contribué au préjudice subi par l’industrie de l’Union. Partant, la requérante ne saurait reprocher à la Commission d’avoir omis d’écarter les prétendus effets préjudiciables desdits
facteurs.
290 Deuxièmement, s’agissant des importations en provenance de Turquie et du Japon, il convient d’observer que la requérante n’a pas établi que la méthodologie suivie par la Commission n’était pas appropriée pour déterminer le niveau de droit adéquat permettant d’éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union par les importations faisant l’objet d’un dumping, conformément à l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base. À cet égard, il y a lieu de souligner que, en veillant à ce que la marge
de préjudice exprime seulement la différence entre le prix à l’importation moyen pondéré et un prix cible de l’industrie de l’Union calculé conformément à l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, la Commission s’est assurée de ne pas imputer le préjudice causé par d’autres facteurs aux importations faisant l’objet d’un dumping.
291 En effet, comme cela est indiqué aux points 276 à 278 ci-dessus, la méthode dite de « sous-cotation des prix indicatifs » suivie par la Commission en application de l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base est fondée sur l’utilisation d’un prix cible hypothétique de l’industrie de l’Union qui, contrairement aux prix réels des ventes de l’industrie de l’Union, n’est pas affecté par les effets des autres facteurs de préjudice reconnus par la Commission.
292 À cet égard, la requérante avance dans ses écritures devant le Tribunal, en faisant référence à l’arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil (C‑236/17 P, EU:C:2019:258), que cette méthode contredit l’obligation, énoncée au point 169 de cet arrêt, de ne pas imputer aux importations ciblées les effets préjudiciables dus à d’autres facteurs. Cependant, la requérante invoque l’arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil (C‑236/17 P, EU:C:2019:258), aux seules fins d’établir
l’existence d’une telle obligation, sans pour autant faire valoir de manière concrète et précise que cet arrêt a remis en cause le recours à la méthode susmentionnée en présence d’autres facteurs de préjudice. D’ailleurs, il ne ressort nullement dudit arrêt que la Cour aurait censuré le recours à la méthode dite de « sous-cotation des prix indicatifs », aujourd’hui codifiée à l’article 7, paragraphe 2 quater, du règlement de base, au motif que cette méthode serait de nature à violer la règle
selon laquelle il est nécessaire que le montant du droit antidumping ne tienne pas compte des effets préjudiciables causés par des facteurs autres que les importations faisant l’objet du dumping.
293 Par ailleurs, il convient d’observer que, dans sa requête, la requérante n’a pas contesté de manière concrète et précise le prix à l’importation moyen pondéré utilisé par la Commission pour l’établissement de la sous-cotation des prix. En revanche, dans sa réplique, elle allègue, pour la première fois, que les prix coréens sont eux aussi déprimés par les effets d’autres facteurs tels que, notamment, les importations japonaises et turques à bas prix. Force est de constater que cette allégation
est irrecevable, dans la mesure où elle est invoquée pour la première fois dans la réplique. En tout état de cause, cette allégation, qui n’a d’ailleurs jamais été soulevée pour contester le lien de causalité entre les importations en provenance de Corée et le préjudice subi par l’industrie de l’Union, n’est assortie d’aucune explication concrète et circonstanciée dans la réplique, ni étayée par des éléments de preuve concrets quant à l’impact de ces autres facteurs sur les prix coréens.
294 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de conclure que la requérante n’a pas établi que la Commission avait commis des erreurs manifestes d’appréciation et violé l’article 3, paragraphe 3, ou l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base par l’application de sa méthode de calcul de la marge de préjudice et du taux du droit antidumping ou que la Commission avait violé ses droits de la défense.
295 Par conséquent, le troisième moyen doit être rejeté dans son intégralité.
[omissis]
341 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.
[omissis]
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) LG Chem, Ltd. supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne, BASF Antwerpen NV, Nippon Shokubai Europe NV et Evonik Superabsorber GmbH.
Kowalik-Bańczyk
Buttigieg
Hesse
Dimitrakopoulos
Ricziová
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 mars 2025.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.
( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.