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28/02/2019 | CEDH | N°001-191278

CEDH | CEDH, AFFAIRE H.A. ET AUTRES c. GRÈCE, 2019, 001-191278


PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE H.A. ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 19951/16)

ARRÊT

STRASBOURG

28 février 2019

DÉFINITIF

28/05/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire H.A. et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Ksenija Turković, présidente,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Krzysztof Wojtyczek,
Armen Harutyuny

an,
Pauliine Koskelo,
Tim Eicke,
Jovan Ilievski, juges,
et de Abel Campos, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le...

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE H.A. ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 19951/16)

ARRÊT

STRASBOURG

28 février 2019

DÉFINITIF

28/05/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire H.A. et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Ksenija Turković, présidente,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Krzysztof Wojtyczek,
Armen Harutyunyan,
Pauliine Koskelo,
Tim Eicke,
Jovan Ilievski, juges,
et de Abel Campos, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 5 février 2019,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 19951/16) dirigée contre la République hellénique et dont neuf ressortissants de différentes nationalités (dont la liste figure en annexe) ont saisi la Cour le 13 avril 2016 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »). La vice‑présidente de la section a accédé à la demande de non-divulgation de leur identité formulée par les requérants (article 47 § 4 du règlement).

2. Les requérants ont été représentés par Me E.-L. Koutra, avocate exerçant à Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, M. K. Georghiadis, assesseur au Conseil juridique de l’État, et Mme Z. Hadjipavlou, auditrice au Conseil juridique de l’État. Des observations ont également été reçues du Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés ainsi que du Centre AIRE, du Conseil néerlandais des réfugiés, du Conseil européen sur les réfugiés et les exilés et de la Commission internationale des Juristes, que la présidente avait autorisés à intervenir dans la procédure écrite en tant que tierces parties (articles 36 § 2 de la Convention et 44 § 3 a) du règlement de la Cour).

3. Les requérants se plaignaient de violations de l’article 3 de la Convention, pris isolément et combiné avec l’article 13, ainsi que de l’article 5 § 1 d), 5 § 2 et 5 § 4.

4. Le 25 novembre 2016, les griefs susmentionnés ont été communiqués au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus conformément à l’article 54 § 3 du règlement de la Cour.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Les requérants sont neuf mineurs non accompagnés âgés, au moment des faits, de 14 à 17 ans, dont six Syriens, deux Iraquiens et un Marocain. Ils entrèrent en Grèce peu avant la signature de l’accord sur l’immigration conclu le 18 mars 2016 entre les États membres de l’Union européenne et la Turquie, intitulé « Déclaration UE-Turquie », en vue de se rendre dans d’autres pays européens.

6. Dès leur entrée sur le territoire grec, ils furent arrêtés par les autorités de police. Des places dans les structures d’accueil pour mineurs n’étant pas disponibles, les requérants furent tous placés sous « garde protectrice » (προστατευτική φύλαξη), en vertu de l’article 118 du décret no 141/1991, dans différents postes de police de Grèce du Nord.

A. Version des requérants

1. Situation individuelle des requérants

a) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 1

7. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 1 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-cinq jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli. Il a ensuite été placé dans le centre d’accueil provisoire des réfugiés de Diavata (« le centre de Diavata ») et, le 21 avril 2016, il a été remis en détention pendant dix jours, d’abord au centre de rétention d’Orestiada puis au centre de rétention de Fylakio. Il a de nouveau été placé dans le centre de Diavata à la suite de l’intervention d’un représentant d’une organisation non gouvernementale qui se serait rendu à Fylakio pour le récupérer. Le 6 juin 2016, il a été placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Il vit actuellement en Finlande.

8. Le 27 mars 2016, à 16 heures, il a été pris d’une crise de panique qui, selon lui, avait inquiété ses codétenus. Il n’a été examiné par un médecin que vers 19 heures, après l’intervention de son avocate, basée à Athènes, qui, en sa qualité de tuteur légal des mineurs non accompagnés, aurait pris contact avec le procureur et le chef du poste de police. Toutefois, le seul soin qui lui a été prodigué a selon lui consisté à le calmer et à le reconduire dans sa cellule.

b) Requérants figurant à l’annexe sous les numéros 2 et 3

9. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 2 et 3 sont frères. Ils présentent leur version des faits comme suit. Ils ont été détenus pendant vingt-huit jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli et au poste de police d’Axioupoli. Ils ont ensuite été transférés au centre de Diavata où ils auraient séjourné pendant cinquante-six jours avant d’être placés dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Ils vivent actuellement en Allemagne.

c) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 4

10. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 4 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-huit jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli, puis au poste de police d’Axioupoli et au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant cinquante-six jours avant d’être placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Il vit actuellement au Danemark.

d) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5

11. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-huit jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli, puis au poste de police de Kilkis et au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant cinquante-six jours avant d’être placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Il vit actuellement en Allemagne.

e) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 6

12. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 6 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-cinq jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli, puis au poste de police d’Axioupoli et au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant cinquante-six jours avant d’être placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés (Siniparxhi).

f) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7

13. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-huit jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli, puis au poste de police d’Axioupoli, au poste de police de Kilkis et au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant soixante-six jours avant d’être placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Il vit actuellement en Belgique.

g) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8

14. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant vingt-cinq jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli puis au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant cinquante-six jours avant d’être placé dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés. Il vit actuellement en Allemagne.

h) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 9

15. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 9 présente sa version des faits comme suit. Il a été détenu pendant trente-cinq jours au poste de gardes-frontières d’Axioupoli puis au poste de police de Polykastro. Il a ensuite été transféré au centre de Diavata où il aurait séjourné pendant soixante jours avant d’être placé, en juin 2016, dans une structure d’accueil pour mineurs non accompagnés.

2. Conditions de détention

a) Les postes de police

16. Six des requérants allèguent avoir été battus par des policiers au poste de gardes-frontières d’Axioupoli. Aucun d’entre eux n’aurait subi d’examen médical. Ils n’auraient pas non plus été informés des procédures à suivre pour déposer une demande d’asile. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 1 indique qu’il s’était même vu refuser l’accès à un médecin ou à un hôpital pour des problèmes cardiaques dont il aurait souffert.

17. Les requérants qui avaient été transférés au poste de police d’Axioupoli disent y avoir été détenus de dix-huit à trente-trois jours, jusqu’à début avril 2016. Ils déclarent avoir été placés dans des cellules surpeuplées, non chauffées, mal aérées et mal éclairées, sans possibilité de sortie ni de promenade. Ils disent y avoir reçu une alimentation de mauvaise qualité, qui aurait été achetée avec la somme de 5,87 euros (EUR) par jour. Ils ajoutent qu’ils dormaient par terre et que les couvertures étaient crasseuses.

18. Selon les requérants, les conditions matérielles de détention au poste de police de Polykastro étaient identiques à celle du poste de police de Kilkis. Les requérants qui avaient été placés au poste de police de Polykastro indiquent que, arguant du caractère insoutenable des conditions de détention humiliantes qu’ils y auraient subies, ils avaient menacé de s’immoler par le feu. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8, qui avait été détenu au poste de police de Polykastro à partir du 21 mars 2016, allègue qu’il y avait souffert d’asthme en raison de l’aération insuffisante et du manque de chauffage pendant la nuit. Il dit avoir été examiné par un médecin après plusieurs jours, mais que les autorités de police avaient indiqué, selon lui, qu’elles n’avaient pas les moyens de lui payer les médicaments prescrits par le médecin.

b) Le centre de Diavata

19. Les requérants exposent que, à la suite d’une demande d’application de l’article 39 du Règlement intérieur de la Cour soumise le 12 avril 2016, ils ont été transférés au centre de Diavata, géré par l’organisation non gouvernementale ARSIS.

20. Dans ce centre, une caserne désaffectée et transformée en camp de réfugiés, ils disent avoir reçu de l’aide pour déposer une demande d’asile et pour recevoir une carte de demandeur d’asile.

21. Ils indiquent toutefois que, si les conditions dans ce centre étaient meilleures que dans les postes de police, elles n’étaient pas adaptées à leur état de mineurs. Ils décrivent leur situation dans le centre de Diavata de la façon suivante. Le centre de Diavata disposait de quelques toilettes chimiques et de quarante-sept douches pour 3 000 réfugiés. Il n’y avait pas d’endroit spécifique pour jeter les déchets qui, avec les excréments, auraient imprégné le sol et causé la prolifération de maladies infectieuses comme l’hépatite A.

22. Il n’y avait pas de contrôle des personnes qui entraient dans le centre ou qui le quittaient. Ce fait, combiné avec l’absence d’électricité dans le centre, avait résulté en une explosion des cas d’agressions, de violences sexuelles et de trafic d’armes, ce qui les aurait obligés à rester dans leurs tentes pendant la nuit.

23. Ils étaient placés dans une zone spéciale réservée aux mineurs mais cette zone n’était pas clôturée. Ils vivaient à sept ou huit dans des tentes prévues pour cinq personnes et qui étaient dépourvues d’électricité, de chauffage, d’eau courante et sol en dur, ce qui, selon eux, devenait très problématique en cas de pluie ; ils partageaient les toilettes et les douches avec des adultes ; ils étaient harcelés par les adultes qui les battaient, volaient leurs effets personnels et les insultaient au motif qu’ils auraient bénéficié d’un traitement préférentiel ; ils recevaient une nourriture de faible qualité nutritionnelle (sans viande, poisson, légumes ni fruits) ; ils avaient un accès limité aux soins (les médecins ne leur prescrivaient que du paracétamol) et ils se trouvaient dans l’impossibilité de se faire comprendre par les médecins en raison de l’absence d’interprètes ; ils ne bénéficiaient d’aucun soutien psychologique et n’avaient pas accès à des activités éducatives ou de loisir. Alors qu’ils devaient être pris en charge 24 heures sur 24, ils étaient livrés à eux-mêmes à partir de 7 heures chaque jour. Leurs conditions de vie étaient devenues encore plus précaires lorsque, quelques jours après leur arrivée au centre de Diavata, le 20 avril 2016, leurs tentes avaient été détruites par un incendie qui s’était déclenché dans le centre à la suite des tentatives des réfugiés de se chauffer et de faire la cuisine.

3. Les allégations de mauvais traitements formulées par les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 au poste de police de Kilkis

24. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 disent avoir été transférés, le 8 avril 2016, au poste de police de Kilkis, où ils auraient été maltraités par les policiers.

25. Selon le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7, les policiers lui ont fait subir des intimidations et l’ont frappé à la tête dans sa cellule, à la suite de quoi sa tête aurait heurté le mur et il se serait évanoui. L’intéressé dit n’avoir reçu aucune assistance médicale et ajoute que les policiers l’ont transféré au poste de police de Polykastro pour le faire taire.

26. Quant au requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5, il soutient que les policiers lui ont tordu le bras derrière le dos et lui ont donné des coups dans les pieds. Il indique avoir été pris d’une crise de panique et que les policiers l’ont laissé pleurer sans lui apporter aucune aide. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 indiquent que, le soir du même jour, le 8 avril 2016, des représentants d’organisations non gouvernementales ou internationales, dont le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (« le HCR »), après leur avoir rendu visite, ont informé les policiers du poste de police de Kilkis qu’ils demandaient à se faire examiner par un médecin. Selon eux, les policiers n’ont pas tenu compte de cette demande et ont ouvert une enquête à l’encontre des représentants des organisations en question pour fausse déclaration. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 allègue que, le lendemain, à la suite d’une nouvelle crise de panique, il a été transféré à l’hôpital puis renvoyé au poste de police de Kilkis. Les documents médicaux établis à cette occasion précisaient qu’il y avait eu un problème de communication avec le patient en raison de l’absence d’interprète, ce qui aurait empêché le médecin de prendre connaissance de l’historique médical de l’intéressé.

27. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 indiquent que, dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte à la suite de leurs allégations de mauvais traitements, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 a indiqué lors de sa déposition du 10 mai 2016 que les policiers avaient tenté de le mettre de force dans sa cellule, qu’ils l’avaient battu et que le lendemain, après la visite des représentants du HCR, l’avaient transféré à l’hôpital pour que son bras soit plâtré.

28. Ils ajoutent que, entendu dans le cadre d’une autre affaire pénale, le 2 août 2016, le représentant de l’organisation non gouvernementale ARSIS a déclaré que, le 8 avril 2016, ils avaient subi des violences physiques et psychologiques, décrites dans les documents établis par cette organisation les 11 et 14 avril 2016.

B. Version du Gouvernement

1. Situation individuelle des requérants

Le Gouvernement décrit la situation individuelle des requérants comme suit.

a) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 1

29. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 1 a été enregistré comme mineur non accompagné dans le centre d’accueil et d’identification (hotspot) de Moria, sur l’île de Lesbos, le 9 février 2016. Le 16 février 2016, le Service national de solidarité sociale (« l’EKKA ») a recommandé son placement dans un centre d’accueil situé à Volos.

30. Du 19 au 22 mars 2016, le requérant a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

31. Le 27 mars 2016, le requérant a été transféré pour des examens médicaux au centre de santé de Polykastro, le 28 mars 2016 à l’hôpital de Thessalonique et le 30 mars 2016 à l’hôpital de Kilkis. Il n’a pas été considéré comme nécessaire de lui prescrire un traitement.

32. Le 11 avril 2016, le requérant s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé le transfert de l’intéressé au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

33. Le 1er juin 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

34. Le 21 juin 2016, le service d’asile a autorisé l’envoi de l’intéressé en Finlande, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

35. Le 22 juillet 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés du Pirée pour les besoins de la procédure de relocalisation.

36. Le 2 septembre 2016, l’intéressé a quitté la Grèce pour la Finlande.

b) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 2

37. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 2 a été enregistré comme mineur non accompagné dans le hotspot Vial, sur l’île de Chios.

38. Du 19 au 22 mars 2016, il a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

39. Le 23 mars 2016, le requérant a été transféré pour des examens médicaux à l’hôpital de Kilkis.

40. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril.

41. Le 20 mai 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

42. Le 15 juillet 2016, le service d’asile a autorisé l’envoi de l’intéressé en Allemagne, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

43. Le 22 juillet 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés du Pirée pour les besoins de la procédure de relocalisation.

44. Le 8 septembre 2016, l’intéressé a quitté la Grèce pour l’Allemagne.

c) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 3

45. Du 19 au 22 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 3 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par le rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

46. Les 21 mars et 1er avril 2016, le requérant a été transféré pour des examens médicaux à l’hôpital de Kilkis et, le 23 mars 2016, au centre de santé de Polykastro.

47. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

48. Le 20 mai 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

49. Le 15 juillet 2016, le service d’asile a autorisé l’envoi de l’intéressé en Allemagne, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

50. Le 22 juillet 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés du Pirée pour les besoins de la procédure de relocalisation.

51. Le 8 septembre 2016, l’intéressé a quitté la Grèce pour l’Allemagne.

d) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 4

52. Du 19 au 22 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 4 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli et, le 8 avril 2016, au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

53. Les 21 mars 2016, le requérant a été transféré pour des examens médicaux à l’hôpital de Kilkis et, le 23 mars 2016, au centre de santé de Polykastro.

54. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé le transfert du requérant au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

55. Le 20 mai 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

56. Le 9 juin 2016, le service d’asile a transmis à l’Allemagne une demande l’invitant à se charger de l’examen de la demande d’asile du requérant. L’Allemagne a rejeté cette demande le 15 juillet 2016. Le 26 septembre 2016, le requérant a déposé une demande de regroupement familial avec son oncle, qui se trouvait au Danemark, mais l’a retirée le 2 novembre 2016. Le 16 décembre 2016, il a réitéré cette demande.

e) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5

57. Le 21 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré le 22 mars 2016 au poste de police d’Axioupoli, le 8 avril 2016 au poste de police de Kilkis et le 9 avril 2016 au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

58. Les 28 mars, 30 mars et 9 avril 2016, le requérant a été transféré à l’hôpital de Kilkis pour y subir des examens médicaux.

59. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

60. Le 1er juin 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

61. Le 14 octobre 2016, le service d’asile a autorisé l’envoi de l’intéressé en Allemagne, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

62. Le 14 décembre 2016, le requérant a quitté la Grèce pour l’Allemagne.

f) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 6

63. Du 19 au 22 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 6 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli et, le 8 avril 2016, au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

64. Les 28 et 30 mars 2016, le requérant a été transféré à l’hôpital de Kilkis pour y subir des examens médicaux.

65. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

66. Le 1er juin 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

67. Le 11 janvier 2018, le service d’asile a autorisé l’envoi de l’intéressé en Finlande, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

68. Le 17 janvier 2017, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés d’Athènes pour les besoins de la procédure de relocalisation.

69. Le 24 février 2017, l’intéressé s’est rendu au service d’asile et a déclaré qu’il refusait sa relocalisation en Finlande. Il a alors été informé, dans une langue qu’il comprenait, qu’il n’était plus considéré comme demandeur de protection internationale.

g) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7

70. Du 16 au 22 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli avant d’être transféré au poste de police d’Axioupoli puis, le 8 avril 2016, au poste de police de Kilkis et, le 10 avril 2016, au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

71. Les 21, 23 et 28 mars 2016, le requérant a été transféré au centre de santé de Polykastro pour des examens médicaux. Il a aussi subi des examens à l’hôpital de Kilkis et à l’hôpital de Thessalonique.

72. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

73. Le 20 mai 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique. Toutefois, le 6 juin 2016, l’intéressé a été placé dans la structure provisoire d’accueil Arsis.

74. Le 11 janvier 2018, le service d’asile a autorisé l’envoi du requérant en Belgique, pays qui s’était chargé d’examiner sa demande d’asile dans le cadre de la procédure de relocalisation prévue par des décisions du Conseil de l’Union européenne.

75. Le 23 août 2017, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Glyfada pour les besoins de la procédure de relocalisation.

76. Le 25 octobre 2016, l’intéressé a quitté la Grèce pour la Belgique.

h) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8

77. Le 19 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli et a été transféré, le 21 mars 2016, au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

78. Les 28 et 30 mars 2016, le requérant a été transféré à l’hôpital de Kilkis, et le 11 avril 2016, au centre de santé de Polykastro pour y subir des examens médicaux.

79. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

80. Le 1er juin 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique.

i) Requérant figurant à l’annexe sous le numéro 9

81. Le 9 mars 2016, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 9 a été placé sous garde protectrice au poste de gardes-frontières d’Axioupoli et a été transféré le 11 mars 2016 au poste de police de Polykastro. Le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a immédiatement été informé de ce placement par un rapport établi à cet égard en application de l’article 18 § 5 du décret no 141/1991. Le Gouvernement admet que le poste de gardes-frontières d’Axioupoli ne conserve pas copie de ce type de rapport.

82. Les 15 et 17 mars et le 11 avril 2016, le requérant a été transféré à l’hôpital de Kilkis pour y subir des examens médicaux.

83. Le 11 avril 2016, il s’est plaint de ses conditions de détention auprès du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Le même jour, l’organisation non gouvernementale ARSIS a recommandé son transfert au centre de Diavata. Ce transfert a eu lieu le 12 avril 2016.

84. Le 20 mai 2016, l’EKKA a recommandé le placement du requérant dans le centre d’accueil des mineurs non accompagnés de Volos.

85. Le 19 septembre 2016, le service d’asile a rejeté la demande de protection internationale formulée par l’intéressé. Le 22 décembre 2016, celui-ci a interjeté appel contre ce rejet. Cette procédure est encore pendante.

2. Conditions de séjour des requérants dans les différents postes de police et au centre de Diavata

Le Gouvernement décrit les conditions de séjour des requérants dans les différents postes de police et au centre de Diavata comme suit.

a) Le poste de gardes-frontières d’Axioupoli

86. Le poste de gardes-frontières d’Axioupoli disposait de deux cellules d’une superficie de 21 m² et 8,75 m² respectivement. La première cellule comportait deux fenêtres et la deuxième une seule. Les deux cellules étaient chauffées. Les cellules étaient équipées de sept lits et des matelas supplémentaires pouvaient être rajoutés.

87. Le poste disposait aussi de deux toilettes et douches et l’eau chaude était disponible à toute heure.

88. Pendant la période où les requérants y ont séjourné, le poste de gardes-frontières d’Axioupoli n’accueillait que des mineurs non accompagnés. Les requérants n’étaient pas enfermés dans les cellules et ils pouvaient circuler à l’intérieur du poste. Chaque requérant a reçu du linge de lit. Il leur était possible de se procurer des produits d’hygiène personnelle dans les magasins situés à proximité du poste. L’alimentation des requérants était assurée par un restaurant pour la somme de 5,87 EUR par jour. Les requérants avaient accès à des livres, à des journaux et à des jeux de société.

b) Le poste de police d’Axioupoli

89. Le poste de police d’Axioupoli disposait de deux cellules de 9 m² qui avaient chacune une fenêtre. Les cellules étaient chauffées et équipées de toilettes et d’une douche avec eau chaude. Elles étaient équipées de sept lits.

90. Pendant la période où les requérants y ont séjourné, le poste n’accueillait que des mineurs non accompagnés. Leur alimentation était assurée par un restaurant pour la somme de 5,87 EUR par jour. Les requérants avaient accès à un téléphone.

c) Le poste de police de Kilkis

91. Le poste de police de Kilkis disposait de trois cellules de 12,5 m² chacune et d’une capacité de trois personnes.

92. Lors de leur séjour dans ce poste de police, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ont été placés dans une cellule avec un autre mineur non accompagné. La cellule était suffisamment éclairée et aérée. Les requérants ont reçu du linge de lit, du savon et du papier hygiénique. Ils bénéficiaient de deux repas par jour (midi et soir).

93. Les requérants avaient la possibilité de sortir de leurs cellules et de se déplacer à l’intérieur du poste aussi longtemps qu’ils le souhaitaient. Ils avaient accès à un téléphone et à la télévision.

d) Le poste de police de Polykastro

94. Le poste de police de Polykastro disposait de deux cellules d’une superficie de 13,77 m² et 14,01 m² respectivement et d’une capacité de quatre personnes chacune.

95. Le poste disposait aussi de deux toilettes (une pour les femmes et une pour les hommes) et douches avec eau chaude.

96. Les requérants ont été placés dans une cellule et étaient séparés des adultes. Ils n’ont jamais été plus de quatre par cellule.

97. Les cellules étaient chauffées et suffisamment éclairées et aérées.

98. Les requérants avaient la possibilité de sortir de leurs cellules et de se déplacer à l’intérieur du poste. Leur alimentation était assurée pour la somme de 5,87 EUR par jour. Ils avaient accès à leurs téléphones portables, à Internet et à la télévision. Ils pouvaient également prendre contact avec des avocats et des représentants d’organisations non gouvernementales.

99. Les requérants ont reçu des soins médicaux gratuitement et ont été transportés par des voitures de police au centre de soins le plus proche et aux hôpitaux de Kilkis et de Thessalonique.

100. Le 10 mai 2016, dans le cadre d’une enquête préliminaire ordonnée par le procureur de Kilkis quant à leurs conditions de détention dans les différents postes de police, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 4, 5 et 7 ont déclaré que les conditions de détention dans le poste de Polykastro étaient meilleures que celles des autres postes.

e) Le centre de Diavata

101. Le centre de Diavata, créé le 24 février 2016 sur les lieux d’une ancienne caserne, est un centre d’accueil ouvert. À partir du 12 avril 2016, à l’intérieur de ce centre commença à fonctionner une zone spéciale pour mineurs non accompagnés (« safe zone ») gérée par l’organisation non gouvernementale ARSIS et financée par l’organisation non gouvernementale « Save the Children International » et par le HCR. Le but de la création de cette safe zone était de répondre au plus vite aux besoins des mineurs non accompagnés qui se trouvaient dans le secteur de Kilkis et d’Idomeni.

102. La safe zone, établie à l’écart du reste du centre de Diavata, consistait en cinq tentes d’une capacité de six personnes chacune et équipées de six lits pliables et de deux toilettes. Chaque occupant recevait un sac de couchage et trois couvertures.

103. L’institution responsable pour l’alimentation des mineurs était l’armée grecque, qui faisait préparer les trois repas quotidiens.

104. Les soins médicaux étaient assurés de 8 heures à 22 heures par le personnel de l’armée, la Croix-Rouge hellénique et des médecins des organisations « Women and Health Alliance » et « Médecins du Monde ». Le soutien psychologique était assuré par l’organisation non gouvernementale ARSIS, qui employait sur place trois assistantes sociales et un psychologue, ainsi qu’un avocat pour l’assistance juridique des mineurs. Les organisations non gouvernementales ARSIS et METADRASI fournissaient aussi aux étrangers présents dans le centre des services d’interprétation. Les requérants avaient eu un accès direct à la procédure de demande d’asile, dont ils se seraient servis.

105. Aucune doléance concernant les conditions de vie dans ce centre, notamment celles des mineurs non accompagnés, ne parvint jamais au service de réception et d’identification, dont des représentants étaient présents dans le centre, ni de la part des mineurs, ni de celle des organisations non gouvernementales présentes sur les lieux.

3. En ce qui concerne les allégations de mauvais traitements subis par les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 dans le poste de police de Kilkis

106. Le 8 avril 2016, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ont transférés au poste de police de Kilkis. Lors de leur admission, l’officier de permanence leur a demandé s’ils étaient en bonne santé et ceux-ci ont répondu par l’affirmative. Le même jour, à 17 heures, les requérants ont eu la visite des représentants du HCR et de l’organisation non gouvernementale ARSIS. À la fin de la visite, le directeur de la direction de la police de Kilkis a informé l’officier de permanence au poste de police que, lors d’un entretien téléphonique avec la représentante du HCR, celle-ci lui aurait dit que les deux requérants souhaitaient se rendre à l’hôpital de Kilkis pour des examens mais les policiers refusaient de les transférer. L’officier de permanence a répondu que cela n’était pas vrai. Il s’est alors rendu auprès des requérants qui lui auraient de nouveau dit qu’ils n’avaient pas besoin d’aller à l’hôpital. Le 9 avril 2016, la représentante du HCR a une nouvelle fois rendu visite aux requérants. À la suite du départ de celle‑ci, les requérants se sont mis à crier. À 12 h 40, ils ont demandé à se faire examiner par un médecin. Ils ont alors été transférés à l’hôpital de Kilkis où les médecins ont, selon le Gouvernement, constaté que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 n’avait besoin d’aucun traitement mais que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 devait subir des examens supplémentaires auprès d’un neurologue et d’un psychiatre car il présentait des troubles émotionnels et était sujet à des crises de panique, mais que ces spécialistes n’étaient pas disponibles ce jour-là à l’hôpital de Kilkis. À 15 h 50, les requérants sont retournés au poste de police de Kilkis où ils ont reçu une nouvelle visite de la représentante du HCR. Après cette visite, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7, brusquement et sans raison, est tombé par terre et s’est mis à hurler. Il a été emmené au bureau de l’officier de permanence et, après avoir retrouvé ses esprits, est retourné en cellule.

107. À 16 h 45, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 a été transféré, sur ordre du directeur de la direction de la police de Kilkis, au poste de police de Polykastro. À 22 heures, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 a été transféré dans un hôpital de Thessalonique pour être examiné par un neurologue et un cardiologue, qui ont constaté que l’intéressé ne présentait aucun problème de santé. Le 10 avril 2016 à 2 heures, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 est retourné au poste de police de Kilkis et, peu après, il a été transféré au poste de police de Polykastro.

C. Le recours de certains des requérants concernant leurs conditions de détention

108. Le 11 avril 2016, des mineurs placés dans des postes de police, dont certains des requérants, saisirent le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis d’un rapport dans lequel ils dénonçaient leurs conditions de détention dans les postes de police en question. Ils alléguaient que, dans certains cas, les policiers ne les laissaient pas sortir de leurs cellules, qu’ils ne donnaient pas suite à leurs demandes de transfert à l’hôpital, que les conditions d’hygiène étaient mauvaises et que certains policiers exerçaient des violences physiques et psychologiques à leur égard.

109. Le procureur ouvrit une enquête. Celle-ci consista à entendre trois adultes détenus dans les postes de police concernés. Sur la base des dépositions de ceux-ci, le procureur décida, le 24 octobre 2016, de classer l’affaire. Dans son rapport au procureur près la cour d’appel de Thessalonique, il soulignait que la direction de la police de Kilkis et les postes de police de la région avaient pris les mesures nécessaires pour la garde des mineurs et pour mener à bien la procédure de transfert de ceux-ci dans des structures d’accueil appropriées. Il indiquait que certains retards et carences étaient dus au grand nombre de mineurs non accompagnés et à l’inexistence provisoire de structures d’accueil. Il exposait que les mineurs étaient placés dans un espace délimité au sein du poste de police, qu’ils n’étaient pas enfermés dans leurs cellules et qu’ils n’étaient pas traités comme des détenus. Il ajoutait que la communication avec eux se faisait en anglais, que l’accès aux toilettes était libre et que l’eau et la nourriture étaient fournies en fonction du budget de chaque service.

D. L’enquête pénale et l’enquête disciplinaire relatives aux allégations de mauvais traitements des requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7

110. Le 11 avril 2016, l’organisation non gouvernementale ARSIS informa le parquet de Kilkis que les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 avaient subi des mauvais traitements au poste de police de Kilkis. Elle indiqua qu’une représentante du HCR, A.P., et l’interprète des organisations non gouvernementales ARSIS et Save the Children, R.S., avaient rencontré les deux requérants en question, que ceux-ci étaient paniqués et en larmes et qu’ils avaient dit avoir été tabassés par les policiers. Cette information déclencha une enquête pénale et une enquête disciplinaire.

1. L’enquête pénale

111. Le 13 avril 2016, le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis ordonna une enquête préliminaire.

112. Dans le cadre de cette enquête, menée par les officiers de police du poste de Kilkis, les officiers qui étaient de permanence au poste précité les 8 et 9 avril 2016, le policier qui avait accompagné les deux requérants à l’hôpital de Kilkis et le policier qui avait conduit le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 à l’hôpital de Thessalonique firent des rapports. Le policier qui avait accompagné les deux requérants à l’hôpital de Kilkis indiqua que « les requérants n’avaient pas l’attitude de personnes malades ou tabassées et montraient tout le temps qu’ils allaient bien ». En outre, quatre étrangers qui avaient été détenus en même temps que les deux requérants au poste de Kilkis firent aussi des dépositions : ils déclarèrent que le comportement des policiers envers les requérants avait été correct, qu’ils n’avaient exercé aucune violence à l’égard des requérants, qu’ils avaient demandé à plusieurs reprises aux requérants si ces derniers souhaitaient se rendre à l’hôpital et que, à un moment, alors que les requérants auraient été calmes, ceux-ci s’étaient mis à protester et à demander leur transfert à l’hôpital, demande qui aurait été satisfaite.

113. Sur le fondement de ces éléments, le poste de police de Kilkis envoya au procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis un rapport qui indiquait que, pendant toute la durée du séjour des deux requérants au poste précité, le comportement des policiers à l’égard des intéressés avait été approprié et respectueux des droits de l’homme, des règles et des lois régissant le fonctionnement de la police grecque.

114. Le 24 octobre 2016, le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis proposa de classer l’affaire. Il souligna qu’il ressortait des rapports susmentionnés que les policiers n’avaient pas eu de comportement violent, que les requérants eux-mêmes avaient été à l’origine de l’agitation au poste de police de Kilkis, qu’ils avaient été transférés à l’hôpital, qu’ils pouvaient communiquer avec des tiers (les représentants des organisations non gouvernementales) et qu’aucune de leurs allégations n’avait été confirmée par aucun élément. Il indiqua que, à chaque fois que les requérants l’avaient demandé, ils avaient été transférés à l’hôpital de Kilkis où il avait été constaté qu’ils étaient en bonne santé, et que seul le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 avait manifesté quelques symptômes d’étourdissement et d’étouffement ayant une cause cardiologique.

115. Le 25 janvier 2017, le procureur près la cour d’appel de Thessalonique approuva la décision du procureur de Kilkis et classa l’affaire.

2. L’enquête disciplinaire

116. Le 24 septembre 2016, la direction de la police de Macédoine centrale ordonna une enquête administrative préliminaire (Προκαταρκτική Διοικητική Εξέταση) en insistant sur la nécessité d’enquêter sur l’existence d’éventuels motifs racistes dans le comportement des policiers. L’enquête fut confiée au directeur adjoint de la direction de la police d’Imathie.

117. Le 14 octobre 2016, dans le cadre de l’enquête, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 fut entendu par un officier de police du poste de police de Glyfada. Il indiqua que trois policiers du poste de police de Kilkis lui avaient donné des coups de pied et qu’il avait eu le bras cassé. Il déclara que ces policiers l’avaient aussi frappé, ce qui l’aurait fait tomber par terre et se cogner la tête. Il dit avoir demandé à être transféré à l’hôpital mais que les policiers n’auraient accédé à sa demande que deux ou trois jours plus tard. Il allégua également que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 et lui n’avaient reçu aucune nourriture à compter de leur arrivée au poste de Kilkis jusqu’au soir du deuxième jour de leur détention dans ce poste. À la question de savoir pourquoi il n’avait pas dénoncé tous ces faits plus tôt, il répondit que la seule chose qui l’intéressait était de quitter ce poste de police.

118. De son côté, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 fut entendu par un officier de police du poste de police de Langada de Thessalonique. Il allégua que, à leur arrivée au poste de Kilkis, les policiers leur avaient enlevé tous leurs effets personnels, qu’ils auraient mis dans des sacs en plastique. Il indiqua que, comme les policiers leur auraient aussi pris leurs téléphones portables, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 et lui s’étaient assis par terre et avaient refusé d’entrer dans la cellule. Il déclara que les policiers avaient alors soulevé le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 et l’avaient mis dans la cellule. Quant à lui, il dit avoir résisté et s’être retenu aux barreaux de la cellule, puis à l’encadrement de la porte, et avoir réclamé son portable. Il indiqua qu’un des policiers lui avait alors donné un coup de pied au sternum, qu’il s’était évanoui et qu’il s’était réveillé dans la cellule. Selon lui, lorsque les policiers lui avaient permis de téléphoner, il avait décrit sa situation à un ami qui, de son côté, avait prévenu l’organisation non gouvernementale ARSIS, laquelle s’était immédiatement rendue au poste de police et l’avait emmené à l’hôpital, où on lui avait plâtré le poignet.

119. Le directeur adjoint de la direction de la police d’Imathie entendit aussi tous les policiers en service au poste de police de Kilkis à la date de l’incident susmentionné, le représentant de l’organisation non gouvernementale ARSIS, dont le témoignage ne fut pas pris en considération au motif qu’il n’était pas un témoin oculaire, et il examina tous les certificats médicaux et divers documents pertinents en l’espèce. Il lui fut cependant impossible d’entendre R.S, l’interprète qui avait rendu visite aux requérants, et A.P., la représentante du HCR, qui avait rencontré personnellement les deux requérants au poste de police de Kilkis.

120. En effet, en ce qui concerne R.S., le directeur adjoint ne put le convoquer. La représentante de l’organisation Save the Children, pour qui travaillait R.S., l’informa que celui-ci avait déménagé et qu’il s’était installé en Croatie. Le directeur adjoint s’adressa alors à la direction de la coopération policière internationale pour demander s’il y avait un policier de liaison grec en poste en Croatie qui aurait pu entendre comme témoin R.S., mais tel n’était pas le cas.

121. Quant à A.P., elle se déclara prête à être entendue sous réserve de l’accord de sa hiérarchie. Le directeur adjoint contacta dans ce but et à deux reprises le chef du bureau du HCR à Athènes mais celui-ci ne répondit pas à ses deux courriers. Contactés par téléphone, tant le chef du bureau du HCR à Athènes que A.P. informèrent le directeur adjoint que, pour cette dernière dépose comme témoin, il fallait l’accord du HCR lui-même, accord qui devait être recherché par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères. Le ministère des Affaires étrangères indiqua qu’une telle procédure ne pouvait pas être mise en œuvre car elle n’était pas prévue. En outre, le directeur adjoint envoya au poste de police du lieu de résidence de A.P. une citation à comparaître l’invitant à déposer en tant que témoin. L’agent de police chargé de la notification de la citation n’ayant pas trouvé A.P. chez elle, il afficha la citation sur la porte de celle-ci. Lors d’un nouvel entretien téléphonique, A.P. répéta au directeur adjoint qu’elle ne pouvait pas déposer sans avoir eu au préalable l’accord du HCR.

122. Dans son rapport du 21 décembre 2016, le directeur adjoint notait que les allégations des deux requérants ne correspondaient pas à la réalité, qu’elles étaient manifestement mensongères, dépourvues de fondement et formulées pour des raisons relatives à leur désir de retrouver leur liberté. Selon lui, aucun élément du dossier n’établissait que, lors de leur séjour au poste de police de Kilkis, les intéressés avaient été maltraités physiquement ou psychologiquement. Le directeur adjoint indiquait que les violences dénoncées par le HCR et les organisations ARSIS et Save the Children ne correspondaient pas à la réalité car elles étaient fondées sur les allégations des requérant qui, selon lui, étaient fausses. Il ajoutait que les certificats médicaux des hôpitaux de Kilkis et de Thessalonique établissaient clairement que les deux requérants étaient en bonne santé.

123. Le 9 janvier 2017, le directeur général de la direction de la police de Macédoine centrale classa l’affaire faute d’éléments suffisants pour engager des poursuites disciplinaires contre les policiers. Il releva que les dépositions des deux requérants n’étaient pas corroborées par des certificats médicaux, notamment celle du requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 concernant le coup de pied qu’il disait avoir reçu au sternum et la fracture du bras dont il aurait souffert. Il souligna que le certificat médical établi le 9 avril 2016 par l’hôpital de Kilkis faisait état d’une possibilité de « crise de panique et de crise émotionnelle » et du besoin de subir des « examens neurologiques et psychiatriques », et que l’intéressé avait ensuite été transféré à l’hôpital AKHEPA de Thessalonique pour des examens supplémentaires. Le directeur général nota aussi que la représentante du HCR qui avait rencontré les deux requérants et qui avait été dûment convoquée par le responsable de l’enquête n’avait pas comparu pour témoigner.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

A. Le droit interne pertinent

124. L’article 118 du décret no 141/1991 relatif aux compétences des organes et aux actions du personnel du ministère de l’Ordre public et aux questions d’organisation des services prévoit que :

« 1. Sont placées sous garde protectrice les personnes qui, en raison de leur âge ou de leur état psychique ou intellectuel, sont dangereuses pour l’ordre public ou sont exposées à des dangers.

2. Sont notamment placés sous garde protectrice, et jusqu’à ce qu’ils soient remis à leurs proches :

a) les mineurs qui, de manière volontaire ou involontaire, avaient disparu ;

(...)

3. La garde protectrice n’est pas considérée comme une arrestation selon les termes du code de procédure pénale.

4. Les personnes placées sous garde protectrice ne sont pas incarcérées sauf s’il n’est pas possible d’éviter par un autre moyen les dangers auxquels elles sont soumises (...).

5. Lorsqu’une personne est placée sous garde protectrice, un rapport est établi et soumis au procureur près le tribunal correctionnel (...). Le rapport indique, en plus des motifs du placement, la date de début et de fin de celui-ci. »

125. L’article 19 (relatif aux mineurs non accompagnés) du décret no 220/2007 intitulé « Accueil des demandeurs d’asile – Mise en conformité avec la directive 2003/9/CEE » dispose que :

« 1. En ce qui concerne les mineurs non accompagnés, les autorités compétentes prennent immédiatement les mesures appropriées, afin d’assurer la représentation nécessaire de ceux-ci. Dans ce but, elles informent le procureur compétent en matière de mineurs et, si celui-ci n’existe pas, le procureur près le tribunal de première instance du lieu qui agit comme un tuteur provisoire et entreprend les démarches nécessaires pour la désignation d’un tuteur (...) »

126. L’article 13 § 6 b) du décret no 114/2010, intitulé « Statut de réfugié : procédure unique applicable aux étrangers et apatrides », qui transpose dans l’ordre juridique grec la directive du Conseil no 2005/85/CE du 1er décembre 2005, est ainsi libellé en ses parties pertinentes en l’espèce :

« 6. Si les demandeurs sont en détention, les autorités (...) s’engagent à :

b) éviter la détention de mineurs. Les mineurs qui ont été séparés de leur famille ou qui ne sont pas accompagnés ne sont détenus que pour le temps nécessaire à leur transfert sécurisé dans des structures appropriées pour l’hébergement de mineurs. »

127. La loi no 3907/2011, intitulée « Service d’asile et de premier accueil, retour des personnes résidant illégalement, permis de séjour, etc. » est entrée en vigueur le 26 janvier 2011. Elle transpose dans l’ordre juridique grec la directive du Parlement européen et du Conseil no 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Cette loi prévoit en son article 32 que :

« 1. Les mineurs non accompagnés (...) ne sont placés en rétention qu’en dernier ressort pour la période appropriée la plus brève possible.

(...)

4. Les mineurs non accompagnés bénéficient, dans la mesure du possible, d’un hébergement dans des institutions disposant d’un personnel et d’installations adaptés aux besoins des personnes de leur âge.

5. L’intérêt supérieur de l’enfant constitue une considération primordiale dans le cadre de la rétention de mineurs dans l’attente d’un éloignement. »

128. L’article 78A (protection contre l’expulsion) de la loi no 3386/2005 relative à l’entrée, au séjour et à l’insertion de ressortissants de pays tiers sur le territoire grec dispose que :

« Une décision d’expulsion n’est pas émise lorsque sont réunies les conditions du principe de non renvoi tel que reflété dans l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (...) dans l’article 7 du Pacte des Nations-Unies pour les droits civils et politiques (...), dans les articles 31 et 33 de la Convention de Genève sur le statut des réfugiés (...), et l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (...). Dans ce cas, l’autorité compétente indiquée dans l’article 76 § 2 de la loi no 3385/2005 délivre une attestation de non renvoi pour des raisons humanitaires (...) »

B. Informations fournies par le Gouvernement relatives à la crise migratoire en Grèce à l’époque des faits

129. À partir de 2015, il y a eu une augmentation extrême des flux migratoires vers la Grèce. Entre janvier 2015 et mars 2016, plus d’un million de migrants sont arrivés en Grèce depuis les côtes turques. Ce flux a créé une crise migratoire et humanitaire sans précédent qui appelait l’adoption des mesures urgentes. La situation s’est encore aggravée après la fermeture en février 2016 de la voie de l’ouest des Balkans, qui a empêché les migrants de se diriger vers les pays d’Europe du Nord. Le 10 juin 2016, le nombre de migrants dans les îles grecques et en Grèce continentale s’élevait à 57 000, le 22 septembre 2016 à 60 528 et le 6 décembre 2016 à 62 000.

130. Le nombre des migrants ayant transité par la région d’Idomeni, qui relève de la juridiction de la direction de la police de Kilkis, pour atteindre l’Europe du Nord s’élevait à 576 775. Après la fermeture de la voie de l’ouest des Balkans, des milliers des migrants ont été bloqués à la frontière. Entre février et avril 2016, une trentaine des mineurs non accompagnés ont été recensés au poste de gardes-frontières d’Axioupoli. Parallèlement, il y a eu une augmentation brutale des demandes d’hébergement adressées à l’EKKA, l’organisme chargé de gérer ce type de demandes de la part des demandeurs d’asile et des mineurs non accompagnés.

131. Les demandes d’hébergement émanant des mineurs non accompagnés s’élevaient à 1 210 au premier trimestre 2016, à 1 189 au deuxième, à 1 577 au troisième et à 1 208 au quatrième. Parallèlement, il y a eu une baisse du pourcentage de satisfaction des demandes de ces mineurs par rapport au pourcentage de 2015, à savoir 43,73 % au deuxième trimestre 2016, 43,37 % au troisième et 61,17 % au quatrième.

132. La protection des mineurs non accompagnés étant prioritaire pour les autorités, celles-ci ont tout mis en œuvre pour augmenter le nombre de places offertes dans les structures de l’EKKA. Ainsi, au 1er mars 2017, les places disponibles dans ces structures s’élevaient à 1 362 alors qu’il n’y avait en mars 2016 que 423 places.

C. Les constats du Médiateur de la République

133. Dans une lettre adressée le 30 mars 2016 au ministre de la Protection des citoyens, au ministre de la Politique migratoire et au ministre de la Solidarité sociale, le Médiateur indiquait que, pendant les trois premiers mois de 2016, 1 150 mineurs non accompagnés avaient été enregistrés. Selon les informations fournies par l’EKKA, les structures d’accueil destinées aux mineurs, d’une capacité de 432 places, étaient saturées, de sorte que plusieurs mineurs (240 personnes au 29 mars 2016) étaient en attente de trouver une place et étaient maintenus pendant de longues périodes dans des postes de police. Le Médiateur soulignait que la restriction de la liberté de mouvement de ces mineurs pouvait être justifiée seulement pour une courte période nécessaire à leur enregistrement et à la recherche d’une structure d’accueil. Dans le cas où les places dans ces structures n’étaient pas disponibles, les mineurs non accompagnés devaient être placés dans des lieux d’hébergement provisoires et non dans des postes de police.

134. Du 17 au 19 juillet 2017, le Médiateur a effectué des visites dans les postes de police de la Grèce du Nord qui accueillaient des mineurs non accompagnés et des réfugiés. Dans un communiqué du 31 juillet 2017, il a constaté que plusieurs mineurs y étaient placés pour de longues semaines, dans des conditions totalement inappropriées et sans possibilité de sortir à l’extérieur. Il rappelait que le maintien de mineurs dans des lieux de détention constituait une violation flagrante de leurs droits.

III. LES TEXTES ET LES CONSTATS DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

A. Les Nations Unies

135. La Convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 prévoit en ses articles pertinents :

Article 3

« 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.

2. Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées.

3. Les États parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié. »

Article 37

« Les États parties veillent à ce que :

(...)

b) Nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être qu’une mesure de dernier ressort, aussi brève que possible ;

c) Tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant et il a le droit de rester en contact avec sa famille par la correspondance et par les visites, sauf circonstances exceptionnelles. »

B. Le Conseil de l’Europe

1. Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)

a) Normes concernant la rétention des migrants en situation irrégulière

136. En mars 2017 (CPT/Inf(2017)3), le CPT a développé un ensemble détaillé de normes concernant la rétention des migrants en situation irrégulière, dont une grande partie est consacrée à la prise en charge par les autorités nationales des personnes vulnérables et des enfants en particulier. Le CPT précise ce qui suit [notes de bas de page omises] :

« Le CPT souhaite rappeler sa position selon laquelle tous les efforts doivent être faits pour éviter de recourir à la privation de liberté d’un migrant en situation irrégulière qui est un enfant.

Lorsque, exceptionnellement, un enfant est placé avec ses parents dans un centre de rétention, la privation de liberté doit être la plus courte possible. L’enfant et sa mère (ou toute autre personne ayant la charge principale de l’enfant) doivent être hébergés ensemble dans un établissement répondant à leurs besoins spécifiques.

Le CPT rejoint le Comité des droits de l’enfant des Nations unies sur la position selon laquelle, « [e]n application de l’article 37 de la Convention [relative aux droits de l’enfant] et du principe d’intérêt supérieur de l’enfant, les enfants non accompagnés ou séparés ne devraient pas, en règle générale, être placés en détention. La détention ne saurait être justifiée par le seul fait que l’enfant est séparé ou non accompagné, ni par son seul statut au regard de la législation relative à l’immigration ou à la résidence ou l’absence d’un tel statut». Par ailleurs, d’autres instances du Conseil de l’Europe, comme l’Assemblée parlementaire ou le Commissaire aux droits de l’homme, ont déclaré que les enfants non accompagnés ne devraient pas être placés en rétention.

Dès que les autorités apprennent la présence d’un enfant non accompagné, une personne dûment qualifiée doit procéder à un premier entretien, dans une langue que l’enfant comprend. Une évaluation des vulnérabilités particulières de l’enfant doit être effectuée, y compris du point de vue de l’âge, de la santé, des facteurs psychologiques et d’autres besoins de protection (y compris ceux résultant de la violence, de la traite ou de traumatismes). Tous les efforts doivent être déployés en vue de faciliter sa libération immédiate du centre de rétention et une prise en charge plus appropriée.

Les enfants non accompagnés ou séparés qui sont privés de liberté doivent obtenir rapidement et gratuitement l’accès à une assistance juridique, ou à une autre assistance appropriée, y compris la désignation d’un tuteur ou d’un représentant légal, qui les tient informés de leur situation juridique et protège effectivement leurs intérêts. Des mécanismes de contrôle doivent également être mis en place pour assurer le suivi de la qualité de la tutelle.

Les enfants ne doivent être retenus que dans des centres conçus pour répondre à leurs besoins spécifiques et dotés d’un personnel composé d’hommes et de femmes correctement formés.

Afin de limiter le risque d’exploitation, des dispositions spéciales doivent être prises pour aménager des quartiers d’hébergement qui soient adaptés aux enfants, par exemple en les séparant des adultes, sauf si l’on estime qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant de ne pas le faire. Tel est le cas, par exemple, lorsque des enfants sont en compagnie de leurs parents ou d’autres membres de leur famille proche. Dans ce cas, tous les efforts doivent être réalisés pour éviter de séparer la famille.

Les enfants privés de liberté doivent se voir proposer une palette d’activités constructives (avec un effort particulier sur la possibilité de poursuivre leur éducation). »

b) Les constats du CPT dans son rapport du 26 septembre 2017

137. Dans son rapport du 26 septembre 2017, établi à la suite de deux visites en Grèce, la première ayant eu lieu du 13 au 18 avril 2016 et la seconde du 19 au 25 juillet 2016, le CPT a examiné, entre autres, la situation des mineurs étrangers non accompagnés ou séparés de leurs parents qui étaient privés de liberté. Le CPT a relevé que le problème structurel de la pénurie de structures appropriées, sous la forme de structures ouvertes, était devenu aigu. En conséquence, plusieurs centaines de mineurs étaient maintenus en détention pendant de longues périodes. Le CPT a reconnu les efforts déployés par les autorités grecques pour trouver des places supplémentaires. Toutefois, il a considéré que les autorités devaient revoir leur pratique en matière de « garde protectrice » de mineurs non accompagnés ou séparés de leurs parents et prendre les mesures nécessaires afin de mettre un terme à la détention de ces mineurs. Cette position était selon le CPT justifiée par le constat de manque de soins et de protection et par les mauvaises conditions de vie dans les centres de réception et d’identification.

138. Le CPT a aussi souligné que la pratique qui consistait à placer en détention dans des postes de police, dans un but « protecteur », pendant plusieurs jours, voire des semaines, les mineurs non accompagnés ou séparés sans aucune assistance ou soutien psychologique et social était inacceptable. Il a exposé que le bien-être des mineurs devait être primordial, ce qui, par définition, devait exclure tout hébergement dans des postes de police ou des postes de gardes-frontières.

c) Le 12e Rapport général d’activités du CPT du 3 septembre 2002

139. Le 12e Rapport général d’activités du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), en date du 3 septembre 2002, se lit comme suit :

« 47. La détention par la police est (ou au moins devrait être) de relativement courte durée. Toutefois, les conditions de détention dans les cellules de police doivent remplir certaines conditions élémentaires.

Toutes les cellules de la police doivent être propres et d’une taille raisonnable eu égard au nombre de personnes que l’on peut y placer et elles doivent bénéficier d’un éclairage adéquat (c’est-à-dire suffisant pour lire en dehors des périodes de repos); de préférence, les cellules devraient bénéficier de lumière naturelle. De plus, les cellules doivent être aménagées de façon à permettre le repos (par exemple un siège ou une banquette fixe), et les personnes contraintes de passer la nuit en détention doivent disposer d’un matelas et de couverture propres. Les personnes détenues par la police doivent avoir accès à des toilettes correctes dans des conditions décentes et disposer de possibilités adéquates pour se laver. Elles doivent avoir accès à tout moment à de l’eau potable et recevoir de quoi manger à des moments appropriés, y compris un repas complet au moins chaque jour (c’est-à-dire quelque chose de plus substantiel qu’un sandwich). Les personnes détenues par la police pendant 24 heures ou plus devraient, dans la mesure du possible, se voir proposer un exercice quotidien en plein air. »

d) Les observations préliminaires du CPT à la suite de sa visite en Grèce du 10 au 19 avril 2018

140. Dans ses observations préliminaires du 1er juin 2018, établies à la suite d’une visite en Grèce ayant eu lieu du 10 au 19 avril 2018, le CPT a relevé ce qui suit au sujet du régime de la «garde protectrice»:

« Dans son rapport à la suite de sa visite ayant eu lieu en 2016, le CPT avait critiqué la détention continue et de routine des mineurs non accompagnés dans des postes de police. (...) [La délégation] note que des mineurs non accompagnés sont toujours détenus sous le régime de la « garde protectrice » pendant plusieurs semaines jusqu’à leur transfert dans un centre de réception ouvert dédié, en raison principalement du nombre totalement insuffisant des structures ouvertes disponibles. La délégation rappelle la position du Comité selon laquelle les enfants non accompagnés ne devraient pas, en principe, être privés de leur liberté et appelle les autorités grecques à redoubler d’efforts pour mettre fin à leur détention dans des locaux de la police. »

2. Le Commissaire aux droits de l’homme

141. Dans un document de synthèse sur les droits des migrants mineurs en situation irrégulière (CommDH/PositionPaper(2010)6), du 25 juin 2010, le Commissaire aux droits de l’homme recommandait ce qui suit :

« Le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant s’applique pleinement aux enfants migrants, comme tous les autres droits fondamentaux de l’enfant. Les enfants migrants devraient être pris en charge au cas par cas, en tenant compte de leurs particularités, et ils devraient pouvoir influer sur leur situation en donnant leur avis.

Un tuteur compétent devrait être affecté le plus rapidement possible aux mineurs séparés ou non accompagnés.

(...)

Les enfants ne devraient être placés en détention que dans des circonstances exceptionnelles, en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible. En principe, aucun enfant migrant ne devrait faire l’objet d’une mesure de détention. En outre, toute détention d’un enfant doit donner lieu à un contrôle rigoureux. Des dispositions spécifiques doivent être prises pour que les lieux de vie soient adaptés aux enfants, ceux-ci étant séparés des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire au nom de leur intérêt supérieur. Une autorité judiciaire doit être associée à toute décision entraînant la détention d’un enfant. Les enfants doivent avoir accès à une aide judiciaire et avoir la possibilité de recevoir des visites. Tous leurs besoins élémentaires, y compris celui de se distraire, doivent être satisfaits.

(...)

Les mineurs séparés ou non accompagnés ne devraient pas être détenus. Les États devraient les prendre en charge, leur offrir un lieu d’accueil et leur affecter un tuteur compétent ayant le pouvoir de servir au mieux leurs intérêts (...) »

EN DROIT

I. SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DES ARTICLES 3 ET 13 DE LA CONVENTION EN CE QUI CONCERNE LES CONDITIONS DE DÉTENTION OU DE VIE DES REQUÉRANTS, DE L’ARTICLE 3 EN CE QUI CONCERNE LES MAUVAIS TRAITEMENTS ALLÉGUÉS PAR LES REQUÉRANTS FIGURANT À L’ANNEXE SOUS LES NUMÉROS 5 ET 7, AINSI QUE DE L’ARTICLE 5 §§ 1, 2 ET 4

142. Les requérants dénoncent leurs conditions de détention dans les différents postes de police où ils disent avoir été détenus ainsi que dans le centre de Diavata. Ils dénoncent aussi l’absence de recours effectif pour se plaindre de ces conditions. Ils allèguent à cet égard des violations des articles 3 et 13 de la Convention. Invoquant l’article 3 de la Convention, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 se plaignent d’avoir subi des sévices de la part d’officiers de police au poste de police de Kilkis. Ils dénoncent aussi l’absence d’enquête effective sur leurs allégations de sévices en dépit des déclarations des représentants d’organisations non gouvernementales concernant leur souhait de se faire examiner par un médecin. Invoquant l’article 5 §§ 1 d), 2 et 4 de la Convention, tous les requérants se plaignent aussi : de l’absence de régularité de leur détention au motif que, en dépit de leur situation de mineurs non accompagnés, ils ont été placés dans des cellules de postes de police avec des détenus adultes de droit commun ; de ne pas avoir été informés dans une langue qu’ils pouvaient comprendre des motifs de leur détention ; que, la décision de leur détention ne leur ayant pas été notifiée et n’ayant pas accès à un avocat ou à un interprète, ils se sont trouvés dans l’impossibilité d’introduire un recours pour contester la légalité de leur détention. Les articles de la Convention invoqués par les requérants sont ainsi libellés :

Article 3

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

Article 5

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales:

(...)

d) s’il s’agit de la détention régulière d’un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou de sa détention régulière, afin de le traduire devant l’autorité compétente.

(...)

2. Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

(...)

4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. (...) »

Article 13

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

A. Sur la recevabilité

143. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour la déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

a) Article 3 de la Convention en ce qui concerne les conditions de détention ou de vie

144. Les requérants notent, se référant à leur version de leurs conditions de détention, que la détention dans des postes de police pour des durées aussi longues que celles qu’ils disent avoir subi a donné lieu à plusieurs condamnations de la Grèce sur le fondement de l’article 3 de la Convention s’agissant de détenus adultes. Or ils allèguent qu’ils avaient entre 14 et 17 ans à l’époque des faits et qu’ils fuyaient des zones de guerre où auraient eu lieu de graves violations de leurs droits. Ils exposent qu’ils étaient donc dans une situation d’extrême vulnérabilité et que, en dépit de cette situation, ils ont dû rester pendant des périodes comprises entre 20 et 35 jours dans des cellules de postes de police où, selon la législation grecque elle-même, il serait interdit de rester plus de 48 heures. Les requérants allèguent que, non seulement cette situation leur a causé de graves problèmes psychologiques et une grande détresse, mais les autorités leur ont refusé toute prise en charge psychologique. Ils observent que leurs conditions de détention dans le centre de Diavata n’étaient pas non plus compatibles avec la dignité humaine. Selon eux, l’État grec a totalement méconnu à leur égard ses obligations découlant tant de la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant que du droit européen en la matière.

145. Renvoyant à sa version des conditions de séjour des requérants et se prévalant de l’urgence de la situation humanitaire créée par l’arrivée massive de réfugiés à laquelle étaient confrontées les autorités grecques à l’époque des faits, le Gouvernement soutient que les requérants ont séjourné dans tous les lieux précités dans des conditions dignes et respectueuses des droits de l’homme. Il indique que, dans les commissariats de police, les requérants n’ont pas été placés sous un régime de détention mais sous le régime de la garde protectrice, provisoirement et dans l’attente de trouver une structure d’hébergement appropriée pour mineurs et surveillée par l’EKKA. Il soutient que, à plus forte raison, les requérants n’étaient pas en détention dans la structure ouverte de la safe zone du centre de Diavata.

b) Article 13 de la Convention combiné avec l’article 3

146. Les requérants soutiennent qu’ils ne disposaient pas d’un recours qui leur aurait permis de mettre un terme à leur situation de victime en raison de leurs conditions de détention. Ils exposent que, n’étant pas des « détenus » au sens propre du terme et selon le droit interne mais placés sous le régime de la « garde protectrice », ils se trouvaient dans un vide juridique en ce qui concernait leur protection. Ils indiquent que, comme l’autorité qui avait ordonné leur placement était la même que celle qui était considérée comme leur tuteur, ils étaient dans l’impossibilité d’obtenir le redressement de leur situation. Selon eux, seul le procureur était en mesure de mettre un terme à leur garde protectrice au poste de police et, à supposer même qu’il eût été en mesure de le faire, il se serait heurté à l’obstacle du manque de place dans les structures d’accueil.

147. Le Gouvernement soutient que les requérants avaient à leur disposition un recours effectif dont ils se sont servis : la saisine du procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis, en sa qualité de tuteur provisoire des intéressés (article 19 § 1 du décret no 220/2007). Il indique que, saisi par la plupart des requérants et par l’organisation non gouvernementale ARSIS, le procureur susmentionné a immédiatement réagi en ordonnant une enquête préliminaire et le transfert des requérants au centre de Diavata. Sans soulever formellement une exception, il soutient aussi que les requérants auraient pu dénoncer leurs conditions de « détention » auprès du commandant de chaque poste de police.

c) Article 3 de la Convention en ce qui concerne les allégations de mauvais traitements subis par les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7

148. En ce qui concerne le volet matériel de l’article 3 de la Convention, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 se plaignent d’avoir subi des sévices de la part d’officiers de police au poste de police de Kilkis. Ils se plaignent aussi de l’absence d’enquête effective sur les sévices qu’ils disent avoir subis, en dépit des déclarations des représentants d’organisations non gouvernementales concernant leur souhait de se faire examiner par un médecin.

149. Ces requérants soutiennent que, lors de leur détention au poste de police de Kilkis les 8 et 9 avril 2016, ils ont subi de la part des policiers des traitements qui, en raison de leur vulnérabilité, des intimidations dont ils auraient fait l’objet et de la force qu’auraient utilisée les agents de police, devaient selon eux être qualifiés de torture conformément à la jurisprudence de la Cour. Ils exposent à cet égard que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 a été frappé à la tête par les policiers dans sa cellule et qu’il s’est évanoui, et que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 a eu le bras tordu derrière le dos, a reçu des coups de pied à la poitrine et a été poussé contre les barreaux de la cellule, ce qui aurait déclenché chez lui une crise de panique. Ils disent avoir tous les deux été la cible d’intimidations et de propos racistes.

150. En ce qui concerne le volet procédural de l’article 3 de la Convention, se prévalant des constats du CPT et du Commissaire des droits de l’homme sur la manière dont se déroulent en Grèce les enquêtes sur les allégations de mauvais traitements, ces requérants soutiennent que, en l’espèce, l’enquête n’a été ni approfondie, ni rapide, ni effectuée par des organes indépendants. Ils allèguent aussi que, si les représentants du HCR ont demandé leur transfert à l’hôpital, c’était pour faire constater leur état par des médecins, ce qui aurait été perçu comme une menace par les policiers qui auraient ainsi ouvert une procédure contre lesdits représentants pour fausse déclaration. Ils ajoutent que tous les certificats médicaux établis par les hôpitaux qui les ont examinés faisaient état de problèmes de communication avec eux en raison de l’absence d’interprète.

151. Le Gouvernement soutient que les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 n’ont pas subi de mauvais traitements lors de leur passage par le poste de police de Kilkis. Il indique que, au contraire, les policiers ont agi dans l’intérêt des intéressés, ont facilité les rencontres avec les représentants du HCR et d’autres organisations non gouvernementales et ont fourni les soins médicaux nécessaires. Il soutient par ailleurs que les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ne fournissent aucun élément de nature à prouver leurs allégations de mauvais traitements.

152. Quant au volet procédural de l’article 3 de la Convention, le Gouvernement estime que les allégations des requérants ont été examinées de manière complète tant sur le plan pénal que disciplinaire. Il considère que l’enquête préliminaire ordonnée par le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis a été menée rapidement et avec diligence. Il expose que l’examen de tous les éléments de preuve n’a pas permis de trouver des indices de culpabilité des policiers concernés et a conduit au classement de l’affaire. Il estime enfin que l’enquête disciplinaire a été rapide et approfondie et qu’elle a abouti à la rédaction d’un rapport volumineux qui concluait que les policiers concernés n’avaient commis aucune infraction.

d) Article 5 § 1 de la Convention

153. Les requérants soutiennent que, en les plaçant dans des cellules situées dans des postes de police, les autorités ont procédé à une application automatique et faussée de l’article 118 du décret no 141/1991, en ignorant totalement leur vulnérabilité et en méconnaissant le but du décret qui, selon eux, consiste à protéger les mineurs. Ils estiment que, indépendamment du nom que porte la structure qui accueille les personnes et de la qualification que donne le droit interne au placement dans la structure en question, telle que « garde protectrice », les personnes peuvent être considérées comme privées de leur liberté en fonction de la nature des restrictions apportées à leur liberté de mouvement et de l’effet cumulatif de leurs conditions de vie dans cette structure. Ils considèrent que le fait qu’une forme de privation de liberté ne soit pas reconnue comme une détention par les autorités enlève aux intéressés toute possibilité de bénéficier des garanties procédurales pour contester la légalité et la nécessité de cette privation de liberté. Ils avancent que cela aboutit à une situation incongrue dans laquelle, selon eux, ceux qui ont le plus besoin de soins et de protection se trouvent privés de toute liberté pendant de longues périodes. Les requérants soutiennent qu’ils ont été arbitrairement privés de leur liberté par l’autorité qui aurait été leur tuteur et qui aurait été chargée de veiller à ce que leurs droits garantis par la Convention fussent respectés.

154. Le Gouvernement soutient, en premier lieu, que l’énumération au paragraphe d) de l’article 5 § 1 de la Convention des motifs autorisant la détention d’un mineur n’est pas exhaustive. En outre, selon lui, le placement des requérants sous garde protectrice dans des postes de police était une mesure répondant à l’urgence dans l’intérêt des mineurs et visant à écarter tout risque pour la vie et la sécurité de ceux-ci. Le Gouvernement expose que, à l’époque des faits, en raison des circonstances humanitaires particulières qui régnaient en Grèce, aucune autre solution n’était possible. Il indique que le placement dans les postes de police n’a duré que pendant une période strictement nécessaire, le temps de trouver une structure appropriée pour mineurs capable d’accueillir les requérants.

155. Enfin, le Gouvernement soutient que l’allégation des requérants selon laquelle ils ont été placés, dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et dans les postes de police d’Axioupoli et de Kilkis, dans des cellules avec des détenus adultes est totalement fausse. Il indique que, à l’époque des faits, le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et le poste de police d’Axioupoli accueillaient exclusivement de mineurs et que, au poste de police de Kilkis, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ont été placés dans des cellules avec d’autres mineurs.

e) Article 5 § 2 de la Convention

156. Les requérants allèguent que l’ordre d’expulsion initialement émis à leur encontre par la police ne leur a jamais été traduit et que son contenu ne leur a jamais été expliqué. Ils arguent en outre que les autorités ne les ont pas informés des motifs de leur transfert au poste de police d’Axioupoli et qu’elles ne leur ont fourni aucune indication quant à la durée de leur détention et à leurs droits en tant que mineurs non accompagnés. Enfin, ils soutiennent que la décision relative à leur placement en détention/garde protectrice ne leur a jamais été communiquée par écrit.

157. Le Gouvernement soutient que les requérants ont été informés immédiatement et dans une langue qu’ils comprenaient, par l’intermédiaire d’interprètes collaborant avec la police ou les organisations non gouvernementales, de la nécessité de les placer sous garde protectrice. Il estime qu’il ressort du document par lequel les requérants ont saisi le procureur près le tribunal correctionnel le 11 avril 2014 que ceux-ci connaissaient les raisons pour lesquelles ils avaient été placés dans les postes de police.

f) Article 5 § 4 de la Convention

158. Les requérants se plaignent que leur liberté de mouvement a été extrêmement réduite sans que les autorités ne leur reconnaissent le statut de détenus, ce qui les aurait privés de tout droit procédural inhérent à ce statut. Ils allèguent tout d’abord ne pas avoir été informés de la base juridique et réelle sur laquelle se serait fondée leur détention et des droits théoriques dont ils auraient disposé pour contester la légalité de cette détention. Ils indiquent ensuite que le recours au procureur ne pouvait avoir aucune effectivité pratique car, selon eux, c’était le procureur lui-même qui avait ordonné leur placement dans les postes de police. Ils soutiennent enfin que les objections prévues par l’article 76 de la loi 3386/2005 ne constituaient aussi qu’un recours théorique compte tenu des nombreux obstacles pratiques qui auraient en réalité empêché les migrants en situation irrégulière et les demandeurs d’asile de saisir le tribunal administratif.

159. Le Gouvernement estime que tous les griefs des requérants relatifs à la légalité de leur placement sous garde protectrice, à la continuation de celle-ci et aux conditions y relatives ont été soulevés dans le document par lequel ils ont saisi le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis le 11 avril 2014. Or, selon lui, le procureur a ordonné le transfert immédiat des requérants dans une structure plus appropriée et a ordonné une enquête préliminaire pour rechercher d’éventuelles responsabilités pénales. Le Gouvernement estime par conséquent que les requérants disposaient d’une voie de recours effective et simple dont ils ont selon lui fait usage, ce grief étant dès lors manifestement mal fondé.

2. Tiers intervenants

a) Le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés

160. Dans ses observations, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés traite du droit interne pertinent en Grèce concernant les mineurs non accompagnés et des pratiques existant dans ce pays en la matière. Il expose et analyse aussi les principes de droit international en matière de réfugiés ainsi que les principes qui se dégagent du droit européen et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de Justice de l’Union européenne relative à la détention des mineurs non accompagnés.

161. Plus particulièrement, en ce qui concerne les pratiques en Grèce, le Haut-Commissaire relève que la grande majorité des mineurs non accompagnés sont détenus en vue de leur hébergement dans une structure d’accueil approprié. Il indique que le nombre limité des structures ouvertes a résulté en 2016 en des périodes de détention prolongées qui ont excédé les limites maximales prévues par la loi (vingt-cinq jours) pour les besoins de la réception et de l’identification des demandeurs d’asile. Il expose que, à la suite de la fermeture des frontières de la Grèce avec les pays voisins, il y a eu une augmentation considérable du nombre de mineurs qui restaient en Grèce pour des périodes plus longues et, par conséquent, une augmentation des demandes d’hébergement adressées à l’EKKA. Il ajoute que, en attendant de trouver des places dans des structures de l’EKKA et de subir les examens médicaux en vue de cet hébergement, les mineurs pouvaient passer de longues périodes détenus dans des postes de police ou dans des hotspots.

162. En ce qui concerne les conditions de détention dans les centres de rétention, le Haut-Commissaire dénonce de nombreuses lacunes en matière de soutien psychologique, de soins médicaux et d’assistance juridique. Il allègue en outre que la communication d’informations aux mineurs dans une langue qu’ils comprenaient continuait à être problématique en raison du manque d’interprètes et de l’impossibilité de traduire les décisions administratives. Selon lui, les divertissements pour les enfants et les adolescents étaient limités, et l’insuffisance du chauffage et du refroidissement des lieux avait des conséquences sur leur santé. Le Haut-Commissaire expose que les mêmes conditions étaient constatées dans les postes de police, qui n’étaient conçus pour détenir des personnes que pendant quelques jours. Il déclare que plusieurs postes de police étaient mal ventilés et éclairés et n’offraient pas d’accès à l’espace extérieur, que les conditions de vie étaient souvent mauvaises et qu’elles se dégradaient de plus en plus en raison de la surpopulation et de l’insuffisance de l’entretien apporté aux locaux. Il estime que ces conditions, combinées avec les problèmes d’hygiène et l’absence de soins médicaux, présentaient un risque pour la santé physique et mentale des mineurs.

163. Enfin, le Haut-Commissaire décrit certaines alternatives à la détention, notamment la création de safe zones dans des structures ouvertes dans l’attente de mettre en place pour les mineurs non accompagnés des structures plus appropriées à long et moyen terme. Il indique que ce concept a été expérimenté dans trois sites existants près de Thessalonique : à Lagkadikia, à Diavata et à Alexandria, et que ces safe zones avaient une capacité de trente personnes chacune.

b) Le Centre AIRE, le Conseil néerlandais des réfugiés (VluchtelingenWerk Nederland), le Conseil européen sur les réfugiés et les exilés et la Commission Internationale de Juristes

164. Ces intervenants déclarent que la Convention doit être interprétée à la lumière d’autres traités internationaux et notamment celle de la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant de 1989. Ils estiment que cela est particulièrement important lorsqu’il s’agit de détention d’enfants, où le cas particulier d’un enfant et son intérêt supérieur doivent être pris en considération de manière primordiale. Or, selon eux, cet intérêt supérieur exclut tout recours à la détention. Ces intervenants estiment par ailleurs que la rétention des enfants migrants pour des besoins de contrôle de l’immigration ne peut pas tomber sous le coup de l’article 5 § 1 d) de la Convention, qui est intimement lié aux besoins de l’éducation surveillée et de la protection de l’enfant. Ils considèrent que la rétention des enfants migrants est également arbitraire sous l’angle de l’article 5 § 1 f) de la Convention. Selon eux, avant qu’une mesure administrative concernant un enfant non accompagné soit prise et afin de respecter les garanties procédurales destinées à évaluer l’intérêt supérieur de l’enfant, l’État doit désigner un tuteur et fournir à l’enfant des informations adéquates dans une langue qu’il comprend.

165. Les intervenants précités estiment que des informations trompeuses et a fortiori l’absence d’informations concernant les raisons pour lesquels un enfant est détenu constituent des violations des paragraphes 2 et 4 de l’article 5 de la Convention même lorsque la détention n’est pas arbitraire. Enfin, ils considèrent que les États membres de l’Union européenne sont obligés de fournir aux enfants les conditions, les procédures et les informations nécessaires afin d’assurer à ceux-ci un accès effectif à la justice pour faire valoir leurs droits garantis par la Charte des droits fondamentaux.

3. Appréciation de la Cour

a) Articles 3 et 13 de la Convention en ce qui concerne les conditions de détention ou de vie

i. Article 3

α) Les postes de police

166. La Cour note qu’elle a déjà eu à connaître, à plusieurs reprises, d’affaires relatives aux conditions d’emprisonnement dans des locaux de police de personnes mises en détention provisoires ou détenues en vue de leur expulsion, et qu’elle a conclu à la violation de l’article 3 de la Convention dans ces affaires (voir, parmi d’autres, Siasios et autres c. Grèce, no 30303/074 juin 2009, Vafiadis c. Grèce, no 24981/07, 2 juillet 2009, Shuvaev c. Grèce, no 8249/07, 29 octobre 2009, Tabesh c. Grèce, no 8256/07, 26 novembre 2009, Efremidze c. Grèce, no 33225/08, 21 juin 2011, Aslanis c. Grèce, no 36401/10, 17 octobre 2013, Kavouris et autres c. Grèce, no 73237/12, §§ 35-40, 17 avril 2014, et Tenko c. Grèce, no 7811/15, 21 juillet 2016). Mises à part les déficiences particulières quant à la détention des intéressés dans chacune des affaires précitées, ayant notamment trait au surpeuplement, au manque d’espace extérieur pour se promener, à l’insalubrité et à la qualité de restauration, la Cour a fondé son constat de violation de l’article 3 sur la nature même des commissariats de police, lesquels sont des lieux destinés à accueillir des personnes pour une courte durée. Ainsi, des durées de détention comprises entre un et trois mois ont été considérées comme contraires à l’article 3 (Siasios et autres, précité, § 32, Vafiadis, précité, §§ 35-36, Shuvaev, précité, § 39, Tabesh, précité, § 43, Efremidze, précité, § 41, Aslanis, précité, § 39, Chazaryan c. Grèce, no 76951/12, 16 juillet 2015, Peidis c. Grèce, no 728/13, 16 juillet 2015, Ali et autres c. Grèce, no 13385/14, §§ 15-20, 7 avril 2016, Grammosenis et autres c. Grèce, no 16287/13, §§ 48-50, 30 mars 2017, Iatropoulos et autres c. Grèce, no 23262/13, §§ 37-41, 20 avril 2017, et S.Z. c. Grèce, no 66702/13, §§ 38-42, 21 juin 2018). La Cour note que dans l’affaire Tsarpelas c. Grèce (no 74884/13, §§ 48-50, 26 avril 2018), la Cour a conclu à la violation de l’article 3 de la Convention pour une durée de détention de vingt-sept jours, étant donné la vulnérabilité du requérant, et en particulier le fait que sa jambe droite avait été amputée, de sorte qu’il utilisait des béquilles pour se déplacer.

167. La Cour relève qu’en l’espèce les requérants ont été détenus pendant des périodes allant de vingt et un à trente-trois jours dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et dans le poste de police d’Axioupoli et, pour certains d’entre eux, dans les postes de police de Kilkis et de Polykastro. La Cour note, tout d’abord, que les parties présentent des versions qui ne coïncident pas quant aux conditions de détention prévalant dans les postes de police en cause. Les requérants allèguent que les cellules de la poste de police d’Axioupoli où ils avaient été placés étaient surpeuplées, non chauffées, mal aérées et mal éclairées, sans possibilité de sortir ni de promenade et ajoutent y avoir reçu une alimentation de mauvaise qualité, qu’ils dormaient par terre et que les couvertures étaient sales (paragraphe 17 ci-dessus). Quant aux conditions matérielles de détention aux postes de Polykastro, les requérants soumettent qu’ils avaient menacé de s’immoler par le feu en raison du caractère insoutenable des conditions de détention. Qui plus est, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 8 allègue qu’il avait souffert d’asthme en raison de l’aération insuffisante et du manque de chauffage pendant la nuit (paragraphe 18 ci-dessus). De son côté, le Gouvernement affirme notamment que les cellules du poste de gardes-frontières d’Axioupoli étaient équipées de sept lits et que des matelas supplémentaires pouvait être rajoutés. Il ajoute que les requérants y avaient accès à des livres, à des journaux et à des jeux de société. Toujours selon le Gouvernement, les requérants n’étaient pas enfermés dans les cellules du poste de gardes-frontières d’Axioupoli, du poste de police de Kilkis et du poste de police de Polykastro et ils pouvaient circuler à l’intérieur des postes. Le Gouvernement soumet également que les cellules du poste de gardes-frontières d’Axioupoli, du poste de police d’Axioupoli, du poste de police de Polykastro étaient chauffées et disposaient de l’eau chaude et que la cellule du poste de police de Kilkis était suffisamment éclairée et aérée (paragraphes 86-100).

168. La Cour estime que les postes de police présentent des caractéristiques pouvant faire naître chez le détenu un sentiment de solitude, sans enceinte extérieure pour se promener ou faire de l’exercice physique, ni structure de restauration interne, ni, en règle générale, poste de radio ou de télévision pour avoir un contact avec le monde extérieur et n’est pas adapté aux besoins d’une incarcération prolongée (voir, Kaja c. Grèce, no 32927/03, § 49, 27 juillet 2006). En effet, la détention dans les postes de police pourrait faire naître chez les intéressés des sentiments d’isolement du monde extérieur, avec des conséquences potentiellement négatives sur leur bien-être physique et moral (voir, Efremidze, précité, § 41). Selon le CPT, la détention par la police est (ou au moins devrait être) de relativement courte durée et les personnes détenues par la police pendant 24 heures ou plus devraient, dans la mesure du possible, se voir proposer un exercice quotidien en plein air (voir, en ce sens, les recommandations du CPT en matière de détention par la police, paragraphe 139 ci-dessus). Or il ressort du dossier que les requérants n’avaient pas la possibilité de sortir des postes de police en cause – ce qui n’est pas contesté par le Gouvernement. Ce constat est aggravé par le fait que les requérants étaient tous des mineurs. À cet égard, la Cour souligne que, dans sa lettre adressée le 30 mars 2016 au ministre de la Protection de citoyens, au ministre de la Politique migratoire et au ministre de la Solidarité sociale, le Médiateur a déclaré que la restriction de la liberté de mouvement de mineurs non accompagnés dans de postes de police pouvait être justifiée seulement pour une courte période nécessaire à leur enregistrement et à la recherche d’une structure d’accueil. Il a indiqué que, dans le cas où les places dans ces structures n’étaient pas disponibles, les mineurs devaient être placés dans des lieux d’hébergement provisoires et non dans des postes de police. De même dans son rapport du 26 septembre 2017, le CPT a souligné que la pratique qui consistait à placer en détention dans des postes de police, dans un but « protecteur », pendant plusieurs jours, voire des semaines, les mineurs non accompagnés ou séparés sans aucune assistance ou soutien psychologique et social était inacceptable. Dans ses observations préliminaires à la suite de sa visite en Grèce du 10 au 18 avril 2018, le CPT a relevé que des mineurs non accompagnés étaient toujours détenus sous le régime de la « garde protectrice » pendant plusieurs semaines, en raison principalement du nombre insuffisant des structures ouvertes disponibles. Le CPT a appelé les autorités grecques à redoubler d’efforts pour mettre fin à leur détention dans des locaux de la police (paragraphe 140 ci-dessus).

169. Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente en l’espèce de celle à laquelle elle est parvenue dans les affaires précitées.

170. Ces éléments lui suffisent pour conclure qu’il y a eu en l’espèce violation de l’article 3 de la Convention.

β) Le centre de Diavata

171. La situation des requérants se caractérisait par leur jeune âge, le fait qu’ils étaient étrangers en situation d’illégalité dans un pays inconnu, qu’ils n’étaient pas accompagnés et donc livrés à eux-mêmes. Eu égard à la protection absolue conférée par l’article 3 de la Convention, il convient, selon la Cour, de garder à l’esprit que ces éléments sont déterminants. Les requérants relevaient incontestablement de la catégorie des personnes les plus vulnérables de la société et il appartenait à l’État grec de les protéger et de les prendre en charge en adoptant à leur égard des mesures adéquates au titre des obligations positives découlant de l’article 3 (Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga, précité, § 55).

172. La Cour note que les thèses des parties diffèrent en ce qui concerne les conditions de vie des requérants dans la zone spéciale pour mineurs non accompagnés – « safe zone » du centre de Diavata.

173. D’une part, les requérants évoquent notamment des conditions de surpopulation dans les tentes où ils dormaient, le manque d’électricité, de chauffage et d’eau courante dans les tentes, la mauvaise qualité de la nourriture et l’accès limité aux soins. Ils évoquent aussi d’autres problèmes afférents à leurs relations avec les adultes mais dont la véracité est difficile à établir. D’autre part, le Gouvernement souligne que la « safe zone », gérée par une organisation non gouvernementale, avait été créée afin de répondre aux besoins des mineurs non accompagnés qui se trouvaient dans le secteur de Kilkis et d’Idomeni. Elle était établie à l’écart du reste du centre de Diavata, consistait en cinq tentes d’une capacité de six personnes chacune et équipées de six lits pliables et de deux toilettes. Chaque occupant recevait un sac de couchage et trois couvertures. Les soins médicaux étaient assurés de 8 heures à 22 heures par le personnel de l’armée, de la Croix-Rouge hellénique et des médecins des organisations « Women and Health Alliance » et « Médecins du Monde ». Le soutien psychologique était assuré par l’organisation non gouvernementale ARSIS, qui employait sur place trois assistantes sociales et un psychologue.

174. De son côté, la Cour note que le centre de Diavata était une structure ouverte, où les requérants pouvaient sortir et entrer à leur guise. Par ailleurs, la Cour ne peut négliger le fait qu’entre janvier 2015 et mars 2016, les flux migratoires vers la Grèce ont créé une crise migratoire et humanitaire sans précédent qui appelait l’adoption des mesures urgentes (voir, mutatis mutandis, Khlaifia et autres c. Italie [GC], no 16483/12, CEDH 2016). Dans ce contexte, il y a eu une augmentation brutale des demandes d’hébergement adressées à l’EKKA, l’organisme chargé de gérer ce type de demandes de la part des demandeurs d’asile et des mineurs non accompagnés (paragraphes 129-130 ci-dessus). La « safe zone » du centre de Diavata, gérée par une organisation non gouvernementale, avait été créée afin de répondre aux besoins des mineurs non accompagnés qui se trouvaient dans certains secteurs du nord de la Grèce (paragraphe 101 cidessus). La Cour note aussi que, dans son intervention devant la Cour, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés qui évoque la création des « safe zones » dans des centres situés près de Thessalonique, dont celle de Diavata, n’émet pas des critiques à leur égard (paragraphe 163 ci-dessus).

175. Compte tenu de ce qui précède, la Cour considère que les conditions de vie dans la « safe zone » du centre de Diavata, n’ont pas dépassé le seuil de gravité exigé par l’article 3 de la Convention pour être qualifiées de traitement inhumain ou dégradant.

γ) Conclusion

176. Eu égard à ce qui précède, la Cour considère que seulement les conditions de détention auxquelles les requérants ont été soumis au sein des différents postes de police équivalent à un traitement dégradant. Partant, il y a eu violation de l’article 3 de la Convention en ce qui concerne ces conditions mais non en ce qui concerne les conditions de vie dans le centre de Diavata.

ii. Article 13

177. La Cour rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle l’article 13 de la Convention garantit l’existence de recours internes permettant l’examen de tout « grief défendable » fondé sur la Convention et l’octroi d’un redressement approprié. À ce titre, les États contractants jouissent d’une certaine marge d’appréciation quant à la manière de se conformer aux obligations que leur impose cette disposition, et la portée de cette obligation varie en fonction de la nature du grief que le requérant tire de la Convention. Toutefois, le recours exigé par l’article 13 de la Convention doit être « effectif » en pratique comme en droit (McGlinchey et autres c. Royaume-Uni, no 50390/99, § 62, CEDH 2003-V).

178. La Cour note d’emblée que la situation des requérants en l’espèce diffère de celle dans laquelle elle était appelée à se prononcer sur l’existence d’un recours effectif dans le cas d’adultes détenus dans des postes de police (voir, à titre d’exemple, Lici c. Grèce, no 69881/12, §§ 39-43 et 58, 17 avril 2014, et Ali et autres c. Grèce, précité, § 24).

179. En l’espèce, le recours mentionné par le Gouvernement et utilisé par les requérants, à savoir la saisine du procureur en application des articles 118 § 5 du décret no 141/1991 et 19 du décret no 220/2007, n’était pas effectif, et ce pour les raisons suivantes.

180. La Cour ne met pas en doute l’allégation du Gouvernement selon laquelle les policiers du poste de gardes-frontières d’Axioupoli ont informé du placement des requérants le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis. Toutefois, en l’absence de copie du rapport établi en application de l’article 118 § 5 précité et eu égard au manque constaté de places suffisantes dans des structures d’accueil pour mineurs, elle ne trouve pas établi que ce rapport ait indiqué – comme l’exige d’ailleurs l’article précité – la date de fin du placement sous « garde protectrice » des requérants. Ceux-ci, ainsi que les organisations non-gouvernementales qui les suivaient, n’étaient donc pas en mesure d’être informés de la durée du placement pour pouvoir alerter le procureur. Or il a fallu plusieurs jours aux requérants et à l’organisation non-gouvernementale ARSIS pour se rendre compte que cette « garde protectrice » perdurait au-delà du délai raisonnable : placés initialement les 9, 16, 19 et 21 mars 2016 dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et transférés à plusieurs reprises ensuite, ils se sont plaints de leurs conditions de détention dans les différents postes en saisissant le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis le 11 avril 2016. S’ils ont été transférés le lendemain de cette plainte au centre de Diavata, cela était dû à l’intervention de l’organisation non-gouvernementale ARSIS. Quant au procureur, il a classé sans suite, plus de six mois plus tard, soit le 24 octobre 2016, la plainte concernant les conditions de détention des requérants après avoir interrogé trois adultes détenus dans les mêmes postes de police que les intéressés.

181. Dans les circonstances de l’espèce, de l’avis de la Cour, la saisine du procureur n’était effective ni pour le transfert des requérants dans la structure ouverte du centre de Diavata ni pour l’examen de la plainte de ces derniers relative à leurs conditions de détention.

182. Enfin, la Cour rappelle que la saisine du supérieur hiérarchique de la police, évoquée par le Gouvernement, ne pouvait pas être considérée comme une voie de recours effective (A.A. c. Grèce, no 70586/11, § 70, 11 décembre 2014).

183. Aucun autre recours n’ayant été invoqué par le Gouvernement, la Cour ne peut que constater qu’il y a eu violation de l’article 13 de la Convention combiné avec l’article 3 sur ce point.

b) Article 3 de la Convention en ce qui concerne les mauvais traitements allégués par les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7

184. La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle lorsque des traitements contraires à l’article 3 de la Convention, dans leur totalité ou pour une large part, sont connus exclusivement des autorités, comme dans le cas des personnes soumises à leur contrôle en garde à vue, toute blessure survenue pendant cette période donne lieu à de fortes présomptions de fait. La charge de la preuve pèse alors sur le Gouvernement : il lui incombe de fournir une explication satisfaisante et convaincante en produisant des preuves établissant des faits qui font peser un doute sur le récit de la victime (voir, parmi beaucoup d’autres, El-Masri c. l’ex-République yougoslave de Macédoine ([GC], no 39630/09, § 152, CEDH 2012). Pour bénéficier de la présomption dont il s’agit, les personnes qui se disent victimes d’une violation de l’article 3 de la Convention doivent démontrer qu’elles présentent des traces de mauvais traitements alors qu’elles se trouvaient précédemment entre les mains de la police ou d’une autorité comparable. Comme l’illustrent nombre d’affaires soumises à son examen, elles produisent habituellement à cette fin des certificats médicaux décrivant des blessures ou des traces de coups, auxquels la Cour reconnaît une importante valeur probante (Bouyid c. Belgique [GC], no 23380/09, § 92, 28 septembre 2015).

185. En l’espèce, la Cour note que le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 allègue que, alors qu’il se tenait aux barreaux de la cellule et qu’il refusait d’y entrer, il a reçu un coup de pied au sternum de la part d’un policier et est tombé par terre. Elle observe qu’il dit également que, à la suite des coups qu’il aurait reçus afin de l’obliger de lâcher les barreaux, son bras a été cassé au niveau du poignet et un plâtre a dû lui être posé à l’hôpital. Elle constate que, de son côté, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7 allègue qu’un des policiers lui avait donné un coup sur la tête, ce qui l’aurait fait tomber contre un mur et blessé à la tête.

186. Toutefois, la Cour note que le certificat établi par l’hôpital de Kilkis auquel le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 a été transféré ne fait pas état de pose de plâtre sur le bras de celui-ci. Le médecin qui l’a examiné a noté que ce requérant devait subir des examens supplémentaires par un neurologue et un psychiatre car il aurait présenté des troubles émotionnels et aurait été sujet à des crises de panique. Transféré à l’hôpital de Thessalonique tout de suite après, il a été examiné par un neurologue et un cardiologue qui ont constaté qu’il ne présentait aucun problème de santé. Quant au requérant figurant à l’annexe sous le numéro 7, le médecin de l’hôpital de Kilkis qui l’a examiné a conclu qu’il n’avait besoin d’aucun traitement.

187. La Cour note en outre que, dans ses observations devant elle, le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 5 ne fait aucun commentaire quant à l’absence de toute référence, dans le certificat médical susmentionné, au plâtre qui lui aurait été posé.

188. Dans les circonstances de la cause, la Cour considère que les allégations de mauvais traitements des requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ne sont pas étayées par des éléments de preuve appropriés et que de telles preuves ne résultent non plus d’un faisceau d’indices, ou de présomptions non réfutées, suffisamment graves, précis et concordants comme l’exige sa jurisprudence (à cet égard, voir notamment, Irlande c. Royaume-Uni, 18 janvier 1978, § 161 in fine, série A no 25, Labita c. Italie [GC], no 26772/95, § 121, CEDH 2000-IV, Jalloh c. Allemagne [GC], n) 54810/00, § 67, CEDH 2006-IX, Ramirez Sanchez c. France [GC], no 59450/00, §117, CEDH 2006-IX, et Gäfgen c. Allemagne [GC], no 22978/05, § 92, CEDH 2010).

189. Dans ces circonstances, la Cour estime qu’aucune apparence de violation du volet matériel de l’article 3 de la Convention ne saurait être décelée en l’espèce et que, par conséquent, cette partie du grief doit être rejeté comme étant manifestement mal fondée, en application de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.

190. Quant au grief relatif à la violation du volet procédural de l’article 3, la Cour rappelle que l’examen par elle d’un tel grief présuppose que le grief tenant à l’existence du traitement prohibé soit « défendable » (Chiriţă c. Roumanie (déc.), no 37147/02, 6 septembre 2007). Or, tel n’a pas été le cas en l’espèce.

191. Il s’ensuit que cette partie du grief est aussi manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

c) Article 5 § 1 de la Convention

i. Principes généraux

192. La Cour rappelle que la liste des exceptions au droit à la liberté figurant à l’article 5 § 1 de la Convention revêt un caractère exhaustif et que seule une interprétation étroite de cette disposition cadre avec le but de celle-ci : assurer que nul ne soit arbitrairement privé de sa liberté (voir, parmi beaucoup d’autres, McKay c. Royaume-Uni [GC], no 543/03, § 30, CEDH 2006-X et la jurisprudence citée).

193. Énoncée à l’alinéa f) de l’article 5 § 1, l’une des exceptions au droit à la liberté permet aux États de restreindre celle des étrangers dans le cadre du contrôle de l’immigration (Saadi c. Royaume-Uni [GC], no 13229/03, § 43, CEDH 2008, Khlaifia et autres c. Italie [GC], no 16483/12, § 89, 15 décembre 2016). Si les États jouissent en effet du « droit indéniable de contrôler souverainement l’entrée et le séjour des étrangers sur leur territoire » (Amuur c. France, arrêt du 25 juin 1996, Recueil 1996‑III, § 41) et ont, corollairement, la faculté de placer en détention des candidats à l’immigration ayant sollicité – par le biais d’une demande d’asile ou non ‑ l’autorisation d’entrer dans le pays (Saadi précité, § 64), ce droit doit s’exercer en conformité avec les dispositions de la Convention (Amuur précité, § 41) et la Cour doit avoir égard à la situation particulière de ces personnes lorsqu’elle est amenée à contrôler les modalités d’exécution de la mesure de détention à l’aune des dispositions conventionnelles (Riad et Idiab c. Belgique, nos 29787/03 et 29810/03, § 100, 24 janvier 2008).

194. L’article 5 § 1 exige de surcroît la conformité de toute privation de liberté au but consistant à protéger l’individu contre l’arbitraire (Gebremedhin [Gaberamadhien] c. France, no 25389/05, § 74, CEDH 2007-II, Saadi précité, § 67).

195. Pour ne pas être taxée d’arbitraire, une mesure privative de liberté prise sur le fondement de l’article 5 § 1 f) doit se faire de bonne foi et être étroitement liée au motif de détention invoqué par le Gouvernement. S’agissant de la première partie de l’article 5 § 1 f), elle doit donc être étroitement liée au but consistant à empêcher une personne de pénétrer irrégulièrement sur le territoire (Gebremedhin [Gaberamadhien] précité, § 74, Saadi précité, §§ 74 et 80).

196. En outre, le lieu et les conditions de détention doivent être appropriés. Un lien doit exister entre le motif invoqué pour la privation autorisée et le lieu et le régime de détention. La Cour ne perd pas de vue à cet égard que les mesures de détention s’appliquent à des ressortissants étrangers qui, le cas échéant, n’ont pas commis d’autres infractions que celles liées au séjour. De plus, la durée de cette mesure ne doit pas excéder le délai raisonnable nécessaire pour atteindre le but poursuivi (Kanagaratnam et autres c. Belgique, no 15297/09, § 84, 13 décembre 2011).

197. Enfin, la Cour a indiqué que la mise en œuvre d’une mesure provisoire est, en elle-même, sans incidence sur la conformité à l’article 5 § 1 (Gebremedhin [Gaberamadhien] précité, § 74).

ii. Application des principes en l’espèce

198. La Cour relève d’emblée que les requérants, tous mineurs à l’époque de faits, ont pénétré irrégulièrement dans le territoire grec dans le but de se rendre par la suite dans d’autres pays européens aux fins du regroupement familial. Ils ont été aussitôt arrêtés par les autorités de police et placés pendant plusieurs semaines d’abord dans des postes de gardesfrontières puis dans des postes de police avant d’être transférés au centre de Diavata. En effet, la Cour note que, comme il ressort du dossier, les requérants n’avaient pas la possibilité de quitter ni les postes de gardes-frontières ni les postes de police - ce qui n’est pas contesté par le Gouvernement. Or, selon la Cour, seul leur placement dans les postes de gardes-frontières et de police, et non dans le centre de Diavata, qui était une structure ouverte, s’analyse en une privation de liberté au sens de l’article 5 § 1 de la Convention.

199. La Cour considère que la privation de liberté des requérants échappe au champ d’application de l’article 5 § 1 a), b), c) et e) de la Convention. Elle estime qu’elle échappe aussi à celui de l’alinéa d) de l’article 5 § 1 de la Convention car il ne s’agissait pas d’une détention aux fins de l’éducation surveillée d’un mineur ni aux fins de le traduire devant une autorité compétente.

200. De l’avis de la Cour, la privation de liberté des requérants ne pouvait donc relever que de l’alinéa f) de l’article 5 § 1 de la Convention.

201. La Cour note que le placement des requérants dans les différents postes de police a été ordonné par les autorités dans l’attente de trouver des places disponibles dans des structures d’accueil destinées à l’hébergement des mineurs non accompagnés, ce qui leur aurait permis de vivre dans des conditions adaptées à leur état de mineur. Le placement des requérants a eu lieu en application de l’article 118 du décret no 141/1991 relatif aux compétences des organes du ministère de l’Ordre public, qui prévoit la « garde protectrice » des personnes qui avaient disparu de manière volontaire ou involontaire et qui, en raison de leur âge, ou de leur état psychique ou intellectuel, sont dangereuses pour l’ordre public ou sont exposées à de dangers.

202. Comme l’indique dans son intervention le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, ce texte, qui n’a pas été conçu pour les migrants mineurs et non accompagnés, a été appliqué dans la pratique par les autorités grecques pour placer cette catégorie de migrants dans des centres de rétention ou dans des postes de police jusqu’à ce que des places soient trouvées dans des structures appropriées ou jusqu’à ce que les adultes qui en sont responsables les prennent en charge (paragraphe 161 ci-dessus). La Cour note de surcroît que ce texte ne prévoit pas de limite temporelle, ce qui peut conduire à des situations où la privation de liberté de mineurs non accompagnés peut se prolonger pendant des périodes assez longues. Cela est d’autant plus problématique lorsque cette privation de liberté a lieu dans des postes de police dans lesquels les conditions de détention sont incompatibles avec de longues détentions. Ce problème a été porté à l’attention des autorités grecques par le CPT lors de ses visites d’avril et de juillet 2016 (paragraphes 137-138 ci-dessus).

203. La Cour estime que c’est ce qui s’est également passé en l’espèce. Faute de places disponibles dans des structures appropriées pour mineurs, les autorités ont appliqué de manière automatique aux requérants l’article 118 du décret no 141/1991. Ainsi, les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 1, 2, 3 et 4 ont été placés dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et dans le poste de police d’Axioupoli, le premier pendant 26 jours et les autres pendant 28 jours. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 ont été placés dans les mêmes postes de police que les requérants précédents puis dans les postes de police de Kilkis et de Polykastro pendant 23 et 28 jours respectivement. Le requérant figurant à l’annexe sous le numéro 6 a été placé dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et dans les postes de police d’Axioupoli et de Polykastro pendant 25 jours. Les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 8 et 9 ont été placés dans le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et dans le poste de police de Polykastro pendant 25 et 35 jours respectivement.

204. La Cour souligne à cet égard que le souci des États de déjouer les tentatives de contournement des restrictions à l’immigration ne doit pas priver le mineur étranger, de surcroît non accompagné, de la protection liée à son état. Il y a donc nécessité de concilier la protection des droits fondamentaux et les impératifs de la politique de l’immigration des États (Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga c. Belgique, no 13178/03, § 81, 12 octobre 2006).

205. Si en l’espèce l’article 118 du décret no 141/1991 précité a servi de base légale formelle au placement des requérants dans les postes de police, la Cour note que l’article 13 § 6 b) du décret no 114/2010 qui transpose en droit grec la directive 2005/85/CE du Conseil de l’Union européenne prévoit que les autorités doivent éviter la détention des mineurs et que ceux-ci ne peuvent, le cas échéant, être détenus que pour le temps nécessaire à leur transfert dans des structures appropriées pour l’hébergement de mineurs (paragraphe 126 ci-dessus). En outre, l’article 32 de la loi no 3907/2011 prévoit que les mineurs non accompagnés ne sont placés en rétention qu’en dernier ressort pour la période appropriée la plus brève possible (paragraphe 127 ci‑dessus). À cela s’ajoute l’obligation faite aux États par l’article 3 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 de prendre impérativement en considération l’intérêt supérieur de l’enfant dans la prise des décisions le concernant.

206. Dans l’affaire Rahimi c. Grèce (no 8687/08, §§ 108-110, 5 avril 2011), la Cour a souligné que les autorités nationales ne s’étaient penchées sur la question de l’intérêt supérieur du requérant en tant que mineur ou sur sa situation particulière de mineur non accompagné. De plus, elles n’avaient pas recherché si le placement de l’intéressé dans le centre de rétention était une mesure de dernier ressort et si elles pouvaient lui substituer une autre mesure moins radicale.

207. La Cour estime que ces considérations sont pertinentes mutatis mutandis dans la présente affaire. À cet égard, elle constate que le Gouvernement n’explique pas pour quelle raison les autorités ont d’abord placé les requérants dans une multitude de postes de police et dans des conditions de détention dégradantes et non dans d’autres lieux d’hébergement provisoires, comme le préconisait du reste le Médiateur de la République dans sa lettre du 30 mars 2016 adressée aux ministres compétents en la matière (paragraphe 125 ci-dessus). L’argument du Gouvernement selon lequel le poste de gardes-frontières d’Axioupoli et le poste de police d’Axioupoli étaient exclusivement réservés aux mineurs et n’accueillaient pas de détenus adultes ne change pas cette réalité.

208. Eu égard à de ce qui précède, la Cour conclut que la détention des requérants n’était pas « régulière » au sens de l’article 5 § 1 de la Convention et qu’il y a eu violation de cette disposition.

d) Article 5 §§ 2 et 4 de la Convention

209. La Cour rappelle que, dans des affaires où des détenus n’avaient pas été informés des raisons justifiant leur privation de liberté, elle a jugé que le droit des intéressés d’introduire un recours contre la détention litigieuse s’était trouvé vidé de son contenu (voir, notamment, Khlaifia et autres c. Italie [GC], no 16483/12, § 132, 15 décembre 2016, Musaev c. Turquie, no 72754/11, § 40, 21 octobre 2014, Dbouba c. Turquie, no 15916/09, § 54, 13 juillet 2010, Abdolkhani et Karimnia c. Turquie, no 0471/08, § 141, 22 septembre 2009, et Chamaïev et autres, précité, § 432).

210. Dans la présente cause, la Cour ne doute pas que, si les requérants pouvaient éventuellement savoir qu’ils étaient entrés de manière irrégulière sur le territoire grec, ils pouvaient ne pas savoir qu’ils tombaient, faute d’existence d’une structure d’accueil destinée aux mineurs, sous le coup de la procédure de placement sous « garde protectrice » impliquant une détention ou une restriction de liberté, selon les dispositions de l’article 118 du décret no 141/1991. La Cour note que les requérants ont été placés directement dans un poste de police avant d’être transférés dans plusieurs autres, sans qu’une décision quelconque leur faisant part de cette restriction de liberté dans l’attente d’une place dans un établissement plus approprié ou qu’un document leur indiquant leurs droits en tant que mineurs non accompagnés ne leur soit notifiés.

211. Par ailleurs, elle considère que, en dépit du fait que la garde protectrice est ordonnée jusqu’à ce qu’une place soit disponible dans des structures appropriées pour mineurs, cette garde dans les postes de police peut durer pendant de longues périodes pendant lesquelles les mineurs ne peuvent pas être repérés par les avocats travaillant pour les organisations non gouvernementales et introduire dans un délai raisonnable un recours contre ce qu’ils perçoivent comme une détention. Or, en l’espèce, les requérants ont séjourné plusieurs semaines dans des postes de police avant que l’EKKA ne recommande leur placement dans les centres d’accueil des mineurs non accompagnés de Thessalonique et de Volos. Elle note que le procureur près le tribunal correctionnel de Kilkis, qui était considéré par la loi comme le tuteur des requérants, n’a pas non plus mis ceux-ci en contact avec un avocat et n’a pas introduit de recours dans le but d’écourter leur séjour dans les postes de police et d’accélérer leur transfert dans des structures appropriées.

212. Enfin, à supposer même que la possibilité de former des objections contre une détention devant le tribunal administratif, prévue à l’article 76 § 3 de la loi no 3386/2005, eût été un recours accessible aux requérants et que le tribunal administratif eût accepté de l’examiner, compte tenu du fait que les requérants n’avaient pas officiellement le statut de détenus, son exercice se serait heurté aux obstacles suivants : l’impossibilité pour les requérants de saisir et de prendre part à la procédure devant le tribunal administratif s’ils n’étaient pas représentés par un avocat et l’absence d’assistance judiciaire prévue par le système juridique grec pour les mineurs demandeurs d’asile.

213. Eu égard à ce qui précède, la Cour conclut qu’il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention. Au vu de cette conclusion, la Cour n’estime pas nécessaire de se prononcer séparément sous l’angle de l’article 5 § 2 de la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

214. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

215. Les requérants réclament chacun diverses sommes variant entre 12 000 euros (EUR) et 30 000 EUR au titre du préjudice moral qu’ils estiment avoir subi en raison de la violation des articles 1, 2, 3, 8, 13 et 14 de la Convention et de toute autre violation de celle-ci qui serait constatée par la Cour. Ils demandent aussi que ces sommes soient versées directement sur le compte bancaire de leur avocate.

216. Le Gouvernement soutient que les prétentions des requérants sont vagues, non fondées, excessives et contraires à la jurisprudence de la Cour qui, dans d’autres affaires concernant des mineurs, a accordé des sommes inférieures à celles demandées en l’espèce. Selon lui, le constat de violation constituerait une satisfaction suffisante. Le Gouvernement invite aussi la Cour à prendre en considération la situation de crise humanitaire dans le cadre de laquelle ont eu lieu les faits de la cause, la charge que représentait pour la Grèce la gestion du flux énorme de réfugiés ainsi que la crise économique qui a frappé le pays pendant cette période. Il argue que, en l’espèce, les autorités ont fait tout leur possible pour répondre aux besoins des requérants dans le respect de leur intérêt supérieur et de la législation interne pertinente.

217. La Cour rappelle qu’elle a constaté la violation des articles 3 de la Convention (conditions de détention), pris isolément et combiné avec l’article 13, 5 § 1 et 5 § 4. Statuant en équité et tenant compte de la durée de la détention des requérants, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer 4 000 EUR à chacun de ceux-ci.

B. Frais et dépens

218. Les requérants réclament également 10 000 EUR pour les frais et dépens qu’ils disent avoir engagés devant la Cour, notamment la demande d’application de l’article 39 du règlement, la rédaction de la requête et des observations, ainsi que pour d’autres frais. Cette somme est calculée, conformément au code des avocats, sur la base de 98 euros par heure de travail pour chaque requérant. Les requérants soutiennent qu’ils doivent verser cette somme à leur avocate, si la Cour conclut à un constat de violation de la Convention, après la fin de la procédure devant celle-ci et devant le Comité des Ministres.

219. Le Gouvernement soutient que la somme réclamée est excessive. Il allègue que rien ne prouve que les requérants ont passé un accord avec leur avocate concernant le paiement d’honoraires, notamment le montant et le mode de calcul de ceux-ci. Par ailleurs, le code des avocats fixe la rémunération horaire des avocats hors prétoire à 80 euros et non à 98 euros, somme qui est prévue en cas d’absence d’accord entre l’avocat et son client.

220. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En outre, la Cour rappelle qu’elle n’accorde pas de sommes pour frais et dépens selon les dispositions de la législation interne, mais selon les critères de sa propre jurisprudence.

221. En l’espèce, la Cour note d’abord qu’elle avait décidé de ne pas appliquer l’article 39 précité et qu’elle n’a communiqué qu’une fraction des griefs des requérants. Elle note aussi que les requérants n’ont pas déposé devant elle copie d’un quelconque accord qu’ils auraient conclu avec leur avocate quant à la rémunération de celle-ci.

222. Compte tenu de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 1 500 EUR pour la procédure devant elle, somme à verser directement sur le compte bancaire de l’avocate des requérants.

C. Intérêts moratoires

223. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare le grief tiré de l’article 3 concernant les mauvais traitements allégués par les requérants figurant à l’annexe sous les numéros 5 et 7 irrecevable et le restant de la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 1 de la Convention ;

3. Dit qu’il n’est pas nécessaire de se prononcer séparément sur le grief tiré de l’article 5 § 2 de la Convention ;

4. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention ;

5. Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention, en ce qui concerne les conditions de détention dans les différents postes de police ;

6. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 3 de la Convention, en ce qui concerne les conditions de vie dans le centre de Diavata ;

7. Dit qu’il y a eu violation de l’article 13 combiné avec l’article 3 de la Convention en ce qui concerne les conditions de détention dans les différents postes de police ;

8. Dit

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois, à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :

i. 4 000 EUR (quatre mille euros) à chacun des requérants, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii. 1 500 EUR (mille cinq cents euros), conjointement aux requérants, plus tout montant pouvant être dû par les requérants à titre d’impôt, pour frais et dépens, à verser directement sur le compte bancaire de leur avocate ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

9. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 28 février 2019, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Abel CamposKsenija Turković
GreffierPrésidente

ANNEXE

1. H.A. ou M.S.H. est un ressortissant iraquien né le 13/06/1999
2. A.A.H. est un ressortissant syrien né le 12/01/1999
3. Ha.A.H. est un ressortissant syrien né le 05/01/2001
4. M.A.K. ou M.A.A.K. est un ressortissant syrien né le 30/10/1998
5. M.A.M. ou M.A. est un ressortissant syrien né le 16/07/1999
6. N.A.T. ou N.E.A.T. est un ressortissant syrien né le 26/08/1999
7. A.F. est un ressortissant syrien né le 31/10/1999
8. A.S. ou A.S.A. est un ressortissant iraquien né le 24/06/1998
9. M.Z. est un ressortissant marocain né le 13/07/2000


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