LA COUR
Vu la requête, enregistrée le 04 septembre 2014 au Secrétariat Général de la Cour Suprême sous le numéro 2014-160 REP, par laquelle Madame Xy Z…, ayant fait élection de domicile en l'étude de la SCPA Le Paraclet, société d'Avocats près la Cour d'Appel d'Abidjan, y demeurant, Cocody les Deux-Plateaux, Aghien, boulevard des Martyrs, Résidence Latrille-Sicogi, îlot B, bâtiment I, 2ème étage, porte 103, 17 BP 1229 postel 2001, Abidjan 17, demande à la Chambre Administrative de la Cour Suprême d'annuler le refus du Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme de lui délivrer un permis de construire et de dire que le silence gardé par ladite autorité a généré à son profit un permis de construire tacite;
Vu la décision attaquée;
Vu les pièces du dossier;
Vu les réquisitions du Ministère Public, parvenues le 17 mars 2015 au Secrétariat de la Chambre Administrative et tendant à déclarer la requête irrecevable pour absence de demande d'annulation d'un acte administratif déterminé ;
Vu les pièces desquelles il résulte que le Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme à qui la requête, le 12 janvier 2015, et le rapport, le 28 mai 2015, ont été communiqués, n'a pas produit d'écritures ;
Vu les observations après rapport de Madame Xy Z…, parvenues le 05 juin 2015 au Secrétariat de la Chambre Administrative et tendant à l'annulation de la décision attaquée ;
Vu la loi no 65-248 du 4 août 1965 relative au permis de construire, complétée par la loi n°97523 du 4 septembre 1997 ;
Vu le décret no 92-398 du 1er juillet 1992 portant réglementation du permis de construire et abrogeant le décret n°77-941 du 29 novembre 1977 ;
Vu l'arrêté na 1593 du 1er octobre 1983 déterminant les modalités d'application du décret n°77-941 du 29 novembre 1977 en ce qui concerne le certificat d'urbanisme ;
Vu l'arrêté n0 1595 du 1er octobre 1983 déterminant les modalités d'application du décret n°77-941 du 29 novembre 1977 en ce qui concerne la délivrance du permis de construire;
Vu le certificat d'urbanisme n°2013-00067827 du 12 aout 2013 délivré par le Directeur de l'Urbanisme ;
Vu la loi no 94-440 du 16 Août 1994 déterminant la composition, l'organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour Suprême, modifiée et complétée par la loi n°97243 du 25 Avril 1997;
Ouï le Rapporteur ;
Considérant que, par arrêté n°120016/MCAU/DAJC/GYO/KKA du 11 septembre 2012, le Ministre de la Construction, de l'Assainissement et de l'Urbanisme a, ensuite d'une requête formulée le 12 juillet 2012 par le Ministre de la Poste, des Technologies de l'Information et de la Communication, annulé l'arrêté no 12-001/MCAU/DGCAMA/DAM du 14 août 2012 accordant à Madame Xy Z… le permis de construire un immeuble R+l à usage de bureaux et un garage automobile, sur les lots n°(…) de la commune de Treichville, objet des titres fonciers n°(…) de Bingerville ; Qu'ayant, le 25 septembre 2012, reçu notification de l'arrêté du 11 septembre 2012 susvisé, Madame Xy Z… a formé, le 08 novembre 2012, un recours afin que « justice soit rendue » ;
Considérant qu'à l'obtention, le 12 août 2013, d'un nouveau certificat d'urbanisme, Madame Xy Z… a introduit, le 20 décembre 2013, une nouvelle demande de permis de construire ;
Qu'estimant que le silence gardé par le Ministre constitue un refus de lui délivrer le permis de construire sollicité, elle a, le 4 septembre 2014, saisi la Chambre Administrative de la Cour Suprême aux fins de mettre à néant ledit refus et de dire et juger que le silence du Ministre a créé à son profit un permis de construire tacite ;
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA REQUETE
Considérant que la requête de madame Xy Z… doit être regardée comme dirigée contre le refus implicite du Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme de lui délivrer un permis de construire ; qu'eu égard à la nature de l'acte attaqué et aux circonstances de l'espèce, elle doit être déclarée recevable ;
SUR LE FOND
Considérant qu'il ressort de l'économie tant de la loi n°65-248 du 4 août 1965 relative au permis de construire, modifiée par la loi n°57-523 du 4 septembre 1997 que du décret n°92398 du 1er juillet 1992 portant réglementation du permis de construire, ainsi que de l'arrêté n°1593 du 1er octobre 1983 déterminant les modalités d'application du décret n°77-941 du 29 novembre 1977 en ce qui concerne le certificat d'urbanisme et de l'arrêté n°1595 du 1er octobre 1983 déterminant les modalités d'application du décret n°77-941 du 29 novembre 1977 en ce qui concerne la délivrance du permis de construire que le droit de construire découle du droit de propriété ; que l'Administration a compétence liée pour délivrer un permis de construire dès lors que le projet de construction est conforme à la réglementation d'urbanisme par la délivrance d'un certificat d'urbanisme ; qu'elle ne peut refuser le permis de construire que si le projet de construction n'est pas conforme à la réglementation ;
Considérant, en l'espèce, que madame Xy Z…, titulaire, sur les lots n°(…) d'Abidjan-Treichville KM4, des certificats de propriété foncière no°(…) à elle délivrés le 18 janvier 2011, a formé, le 20 décembre 2013, une demande de permis de construire conformément à la procédure fixée par les textes sur le permis de construire ; qu'au préalable, elle a, le 12 aout 2013, obtenu le certificat d'urbanisme n°(…) indiquant que le projet de construire par elle envisagé était conforme à la réglementation en vigueur ; que, dès lors que sa demande correspondait aux dispositions mentionnées dans le certificat d'urbanisme, il pesait sur l'Administration l'obligation de lui délivrer le permis sollicité ;
Qu'il s'ensuit que le Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme, en refusant de lui délivrer formellement un permis de construire dans un délai raisonnable, a violé la loi et que son refus implicite non justifié, constitutif d'une décision administrative, doit être déclaré nul ; que, dès lors, il lui revient, conformément à la loi, de délivrer un permis de construire à Madame Xy Z… •
DÉCIDÉ
Article 1er : La requête n°2014-160 REP 4 septembre 2014 de Madame Xy Z… est recevable et bien fondée ;
Article 2 : La décision implicite de refus du Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme de délivrer un permis de construire à Madame Xy Z…, est annulée ;
Article 3 : Le Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme a compétence liée, conformément à la loi, pour délivrer un permis de construire à la requérante ;
Article 4 : Les frais sont mis à la charge du Trésor Public ;
Article 5 : Une expédition du présent arrêt sera transmise au Procureur Général près la Cour Suprême, au Ministre de la Construction, du Logement, de l'Assainissement et de l'Urbanisme ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour Suprême, Chambre Administrative, en son audience publique ordinaire du dix-sept juin deux mil quinze ;
Où étaient présents MM. DEDOH Dakouri, Président de la Première Formation, Président-Rapporteur ; YOH GAMA, Mme DIAKITE Fatoumata, Mme NIANGO ABOKE Maria, KOBON Abé Hubert, GAUDJI K. Joseph Désiré, Conseillers ; en présence de M. ZAMBLE Bi Tah Germain, Avocat Général ; avec l'assistance de Maître LANZE Denis, Greffier.