Le Conseil constitutionnel a été saisi le 20 mai 2010 par le Conseil d'État (décision n° 306643 du 18 mai 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la commune de DUNKERQUE et relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L. 2113-2 et L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, notamment son article 123 ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites pour la commune de DUNKERQUE par la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 8 juin 2010 ;
Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 10 juin 2010 ;
Vu les nouvelles observations produites pour la commune de DUNKERQUE, enregistrées le 17 juin 2010 ;
Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Me Arnaud Lyon-Caen pour la commune de DUNKERQUE et Mme Sophie Rimeu, désignée par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 24 juin 2010 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l'article 123 de la loi du 13 août 2004 susvisée : « Les personnes inscrites sur les listes électorales municipales sont consultées sur l'opportunité de la fusion de communes. - Les dépenses résultant de la consultation sont à la charge de l'État. - Un décret fixe les modalités applicables à l'organisation des consultations prévues au premier alinéa » ; qu'aux termes de l'article L. 2113-3 du même code : « Lorsqu'une consultation a été organisée suivant la procédure définie à l'article L. 2113-2, la fusion est prononcée par arrêté du représentant de l'État dans le département si le projet recueille l'accord de la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits dans l'ensemble des communes concernées. - Toutefois, une commune ne peut être contrainte à fusionner si la consultation fait apparaître que les deux tiers des suffrages exprimés représentant au moins la moitié des électeurs inscrits dans cette commune ont manifesté leur opposition au projet » ;
2. Considérant que la commune requérante soutient qu'en prévoyant un référendum pour toutes les fusions de communes, les dispositions précitées sont contraires à la dernière phrase du troisième alinéa de l'article 72-1 de la Constitution qui autorise uniquement une consultation des électeurs en matière de modification des limites des collectivités territoriales ; qu'elles méconnaîtraient le principe de la souveraineté nationale en conférant à une section du peuple un pouvoir de décision ; qu'elles porteraient atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales ;
3. Considérant qu'aux termes de la dernière phrase du troisième alinéa de l'article 72-1 de la Constitution : « La modification des limites des collectivités territoriales peut également donner lieu à la consultation des électeurs dans les conditions prévues par la loi » ; qu'en tout état de cause, l'habilitation ainsi donnée au législateur n'institue pas un droit ou une liberté qui puisse être invoqué à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution ;
4. Considérant que la décision de procéder à la fusion de communes ne constitue pas un acte portant atteinte à la libre administration des collectivités territoriales ;
5. Considérant qu'en tout état de cause, la décision de procéder à la fusion de communes à la suite d'une consultation des électeurs ne met en cause ni la définition de la souveraineté nationale ni les conditions de son exercice ;
6. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,
DÉCIDE :
Article 1er.- Les articles L. 2113-2 et L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales sont conformes à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er juillet 2010, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, MM. Jacques BARROT, Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et M. Pierre STEINMETZ.