Le Conseil constitutionnel a été saisi le 1er juin 2011 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 1225 du 1er juin 2011), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par le syndicat intercommunal à vocation multiple de la Communauté du Bruaysis, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du cinquième alinéa du paragraphe III de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites pour le syndicat requérant par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 23 juin et 8 juillet 2011 ;
Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 23 juin 2011 ;
Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Me François-Henri Briard, pour le syndicat requérant, Me Bruno Odent, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la Caisse des dépôts et consignations, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 19 juillet 2011 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant qu'aux termes du cinquième alinéa du paragraphe III de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale : « Les rémunérations des aides à domicile ayant la qualité d'agent titulaire relevant du cadre d'emplois des agents sociaux territoriaux en fonction dans un centre communal ou intercommunal d'action sociale bénéficient d'une exonération de 100 % de la cotisation d'assurance vieillesse due au régime visé au 2° de l'article R. 711-1 du présent code pour la fraction de ces rémunérations remplissant les conditions définies au premier alinéa du présent paragraphe » ;
2. Considérant que le syndicat requérant fait grief à ces dispositions de porter atteinte au principe d'égalité en ce qu'elles ne prévoient d'exonération de la cotisation d'assurance vieillesse due à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales qu'en faveur des agents titulaires exerçant les fonctions d'aides à domicile dans un centre communal ou intercommunal d'action sociale et non pour ceux qui exercent au sein d'un syndicat intercommunal à vocation multiple ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ;
4. Considérant que l'exonération de cotisations patronales prévue par l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale tend à favoriser le maintien chez elles des personnes dépendantes ; que le cinquième alinéa du paragraphe III de cette disposition limite le bénéfice de l'exonération de la cotisation d'assurance vieillesse due par les employeurs publics aux seuls centres communaux ou intercommunaux d'action sociale ; que le législateur a ainsi entendu favoriser, pour le suivi social des personnes dépendantes, la coopération intercommunale spécialisée en matière d'aide sociale ; qu'il s'est fondé sur un critère objectif et rationnel ; que la différence de traitement qui en résulte ne crée pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; que, dès lors, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 13 de la Déclaration de 1789 doit être rejeté ;
5. Considérant que le cinquième alinéa du paragraphe III de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,
DÉCIDE :
Article 1er.- Le cinquième alinéa du paragraphe III de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est conforme à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 août 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.
Rendu public le 5 août 2011.